Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
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Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
7. Trois jours avant le commencement de la nouvelle année 1813, la fille de la veuve Roters trouva Anne Catherine en extase ; elle priait, les bras étendus. Cette fille s'aperçut que le sang jaillissait de la paume de ses mains, mais elle crut que c'était par suite de quelque blessure accidentelle. Lorsqu'Anne Catherine revint à elle, elle lui fit remarquer que son sang coulait, sur quoi celle-ci la pria de ne parler de cela à personne. Mais le 31 décembre, le père Limberg lui porta la sainte communion et vit alors pour la première fois des plaies saignantes sur le dos des mains.
" Je fis savoir cela, dit-il dans son rapport, à l'abbé Lambert qui demeurait dans la même maison. Il vint aussitôt dans la petite chambre d'Anne Catherine, et, voyant le sang couler, il lui dit : " Ma soeur, n'allez pas vous croire une sainte Catherine de Sienne." Mais, comme les plaies persistèrent jusqu'au soir, il me dit le lendemain : " Mon père, personne ne doit le savoir. Cela doit rester entre nous, autrement la chose fera du bruit et nous attirera beaucoup d'ennuis."
Le père Limberg était si parfaitement du même avis que dès lors il songea bien plus à expliquer comme une chose sans importance ou à tenir secrets ces phénomènes inexplicables pour lui qu'à y chercher une liaison avec ses autres expériences touchant Anne Catherine et à l'interroger à ce sujet. Elle-même ressentit une grande joie de ce que les deux prêtres ne la pressaient pas davantage et elle chercha, autant qu'elle le put, à tenir cachées à tous les yeux les nouvelles et bien cruelles souffrances qu'elle avait à supporter. Le père Limberg omit de rédiger ses observations par écrit : seulement il consigna sur son calendrier ecclésiastique les courtes remarques qui suivent :
" Le jour des Rois, j'ai vu pour la première fois les stigmates à la partie intérieure des mains.
" 11 janvier. Elle est restée assise environ six heures dans un fauteuil et elle a été en extase une heure et demie.
" 15 janvier. Elle a communié aujourd'hui. De sept à neuf heures, elle est restée en extase, raide et immobile.
" 28 janvier. Elle a été, depuis lors, tous les jours en extase pendant un temps plus ou moins long. J'ai vu aujourd'hui les marques des plaies à la plante des pieds.
" Ses mains et ses pieds ont saigné tous les vendredis ; la double croix sur la poitrine, les mercredis. Depuis que, j'ai eu connaissance de ses plaies, elle n'a pris aucune nourriture.
" Son état est resté inconnu jusqu'au 28 février 1813 mais Clara Soentgen s'en est aperçue et m'en a parlé."
8. Comme Anne Catherine ne parlait jamais de ses stigmates, mais les dérobait à tous les regards avec une sollicitude inquiète, nous ne pouvons avoir d'autres détails à ce sujet que par l'enquête ecclésiastique à laquelle elle fut soumise dès que son état fut connu du public.
" Je fis savoir cela, dit-il dans son rapport, à l'abbé Lambert qui demeurait dans la même maison. Il vint aussitôt dans la petite chambre d'Anne Catherine, et, voyant le sang couler, il lui dit : " Ma soeur, n'allez pas vous croire une sainte Catherine de Sienne." Mais, comme les plaies persistèrent jusqu'au soir, il me dit le lendemain : " Mon père, personne ne doit le savoir. Cela doit rester entre nous, autrement la chose fera du bruit et nous attirera beaucoup d'ennuis."
Le père Limberg était si parfaitement du même avis que dès lors il songea bien plus à expliquer comme une chose sans importance ou à tenir secrets ces phénomènes inexplicables pour lui qu'à y chercher une liaison avec ses autres expériences touchant Anne Catherine et à l'interroger à ce sujet. Elle-même ressentit une grande joie de ce que les deux prêtres ne la pressaient pas davantage et elle chercha, autant qu'elle le put, à tenir cachées à tous les yeux les nouvelles et bien cruelles souffrances qu'elle avait à supporter. Le père Limberg omit de rédiger ses observations par écrit : seulement il consigna sur son calendrier ecclésiastique les courtes remarques qui suivent :
" Le jour des Rois, j'ai vu pour la première fois les stigmates à la partie intérieure des mains.
" 11 janvier. Elle est restée assise environ six heures dans un fauteuil et elle a été en extase une heure et demie.
" 15 janvier. Elle a communié aujourd'hui. De sept à neuf heures, elle est restée en extase, raide et immobile.
" 28 janvier. Elle a été, depuis lors, tous les jours en extase pendant un temps plus ou moins long. J'ai vu aujourd'hui les marques des plaies à la plante des pieds.
" Ses mains et ses pieds ont saigné tous les vendredis ; la double croix sur la poitrine, les mercredis. Depuis que, j'ai eu connaissance de ses plaies, elle n'a pris aucune nourriture.
" Son état est resté inconnu jusqu'au 28 février 1813 mais Clara Soentgen s'en est aperçue et m'en a parlé."
8. Comme Anne Catherine ne parlait jamais de ses stigmates, mais les dérobait à tous les regards avec une sollicitude inquiète, nous ne pouvons avoir d'autres détails à ce sujet que par l'enquête ecclésiastique à laquelle elle fut soumise dès que son état fut connu du public.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XVII
COMMENCEMENT DE L'ENQUETE ECCLESIASTIQUE
1. Une fois que Clara Soentgen eut pénétré le secret, la connaissance s'en répandit bientôt au loin. Au milieu de mars 1813, les stigmates étaient un sujet de conversation dans la ville de Dulmen et, comme on avait parlé très vivement pour et contre dans un cabaret (note), cela fut cause qu'on prit à ce sujet des informations dont les résultats furent communiqués aux supérieurs ecclésiastiques à Munster. Au nombre de ceux qui avaient pris part à la discussion mentionnée ci-dessus, s'était trouvé le docteur Guillaume Wesener, médecin du district de Dulmen, qui entendait pour la première fois parler de choses de ce genre, mais qui ne voulait voir là que de la superstition ; toutefois, il se proposa de visiter la malade, afin de se mieux rendre compte de la réalité des faits. Wesener avait perdu la foi pendant les années qu'il avait passées à l'Université : mais c'était un homme d'un caractère si bienveillant et si loyal que l'aspect de la patiente produisit sur lui une profonde impression. Il ne savait, à la vérité, s'expliquer aucun des phénomènes qu'il voyait, mais il espérait, grâce à la droiture et à la candeur d'Anne Catherine, arriver promptement à connaître la cause véritable de ce qui paraissait si extraordinaire.
(note) Cet entretien dans l'auberge n'avait pas échappé au regard d'Anne Catherine ; car, après la visite du docteur Wesener qui en fut la conséquence, son confesseur lui ayant demandé comment le docteur avait connu son état, elle répondit : " Chez les messieurs de l'auberge, il a parlé contre, et ensuite il est venu pour me voir."
Après quelques visites, il offrit à Anne Catherine ses services comme médecin (note), ce qu'elle accepta de bon cœur. Or, après des observations faites avec le plus grand soin, il arriva à se convaincre que toute idée de fraude ou de tromperie préméditée devait être écartée et qu'il y avait là des faits dépassant, à la vérité, le cercle de ses expériences, mais qui ne pouvaient être niés, ni tenus secrets. C'est pourquoi il délibéra avec le doyen Rensing, curé de la ville, avec le père Limberg et avec un autre médecin, nommé Krauthausen, sur les mesures à prendre pour dresser préalablement un procès-verbal sur les phénomènes qui se produisaient chez Anne Catherine. Pendant que ces messieurs discutaient au presbytère sur les moyens de mettre ce projet à exécution, Dieu dirigeait vers eux le regard d'Anne Catherine afin de la préparer à ce qui allait survenir. L'abbé Lambert se trouvait près d'elle, lorsqu'interrompant tout à coup l'entretien, elle s'écria
" Que va-t-il m'arriver ? On tient conseil chez le doyen sur un examen auquel on doit me soumettre. Si je ne me trompe, mon confesseur est là."
Peu après ces paroles, le doyen Rensing entra chez elle et lui annonça l'enquête qui avait été décidée.
COMMENCEMENT DE L'ENQUETE ECCLESIASTIQUE
1. Une fois que Clara Soentgen eut pénétré le secret, la connaissance s'en répandit bientôt au loin. Au milieu de mars 1813, les stigmates étaient un sujet de conversation dans la ville de Dulmen et, comme on avait parlé très vivement pour et contre dans un cabaret (note), cela fut cause qu'on prit à ce sujet des informations dont les résultats furent communiqués aux supérieurs ecclésiastiques à Munster. Au nombre de ceux qui avaient pris part à la discussion mentionnée ci-dessus, s'était trouvé le docteur Guillaume Wesener, médecin du district de Dulmen, qui entendait pour la première fois parler de choses de ce genre, mais qui ne voulait voir là que de la superstition ; toutefois, il se proposa de visiter la malade, afin de se mieux rendre compte de la réalité des faits. Wesener avait perdu la foi pendant les années qu'il avait passées à l'Université : mais c'était un homme d'un caractère si bienveillant et si loyal que l'aspect de la patiente produisit sur lui une profonde impression. Il ne savait, à la vérité, s'expliquer aucun des phénomènes qu'il voyait, mais il espérait, grâce à la droiture et à la candeur d'Anne Catherine, arriver promptement à connaître la cause véritable de ce qui paraissait si extraordinaire.
(note) Cet entretien dans l'auberge n'avait pas échappé au regard d'Anne Catherine ; car, après la visite du docteur Wesener qui en fut la conséquence, son confesseur lui ayant demandé comment le docteur avait connu son état, elle répondit : " Chez les messieurs de l'auberge, il a parlé contre, et ensuite il est venu pour me voir."
Après quelques visites, il offrit à Anne Catherine ses services comme médecin (note), ce qu'elle accepta de bon cœur. Or, après des observations faites avec le plus grand soin, il arriva à se convaincre que toute idée de fraude ou de tromperie préméditée devait être écartée et qu'il y avait là des faits dépassant, à la vérité, le cercle de ses expériences, mais qui ne pouvaient être niés, ni tenus secrets. C'est pourquoi il délibéra avec le doyen Rensing, curé de la ville, avec le père Limberg et avec un autre médecin, nommé Krauthausen, sur les mesures à prendre pour dresser préalablement un procès-verbal sur les phénomènes qui se produisaient chez Anne Catherine. Pendant que ces messieurs discutaient au presbytère sur les moyens de mettre ce projet à exécution, Dieu dirigeait vers eux le regard d'Anne Catherine afin de la préparer à ce qui allait survenir. L'abbé Lambert se trouvait près d'elle, lorsqu'interrompant tout à coup l'entretien, elle s'écria
" Que va-t-il m'arriver ? On tient conseil chez le doyen sur un examen auquel on doit me soumettre. Si je ne me trompe, mon confesseur est là."
Peu après ces paroles, le doyen Rensing entra chez elle et lui annonça l'enquête qui avait été décidée.
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2. Elle eut lieu le 22 mars 1813. On dressa un protocole dont un passage seulement trouvera place ici :
" Sur le dos de ses deux mains, y est-il dit, nous avons remarqué des croûtes de sang desséché, sous lesquelles était une plaie. Dans la paume des deux mains, il y avait de semblables croûtes de sang figé, seulement elles étaient plus petites.
(note) Dès sa première visite, Wesener tint un journal continué jusqu'en 1819, dans lequel il consigna non seulement ses observations et ses expériences touchant Anne Catherine, mais même les exhortations qu'elle lui dressait pour le ramener à la foi et à la pratique fidèle de tous les devoirs d'un bon catholique.
Nous avons trouvé ces mêmes croûtes sur la partie extérieure des pieds et au milieu de la plante des pieds. Elles étaient douloureuses quand on les touchait et celles du pied droit avaient saigné, il y avait peu de temps. Au côté droit, nous avons vu, à peu près au-dessus de la quatrième côte, en comptant à partir d'en bas, une plaie longue d'environ trois pouces qui doit saigner quelquefois. Sur le creux de l'estomac nous avons vu certaines marques de forme ronde qui figuraient une croix fourchue. Un peu plus bas, nous avons vu une croix ordinaire formée de raies larges d'un demi pouce et semblables à des meurtrissures. A la partie supérieure du front, nous avons vu, en grand nombre, comme des piqûres d'aiguille qui allaient des deux côtés jusque dans les cheveux. Sur le linge qu'elle portait autour du front nous avons vu beaucoup de petites taches de sang."
Quand cela fut fini, Anne Catherine dit au doyen Rensing : " La chose n'en restera pas là. Voici des messieurs de Munster qui viennent pour faire un examen : il y a un grand personnage, il ressemble à monseigneur l'évêque suffragant qui m'a confirmée à Coesfeld : il y en a un autre qui est assez vieux et qui n'a que quelques cheveux gris."
Ces paroles portaient juste : car, dès le 28 mars, (c'était le quatrième dimanche de Carême), le vicaire général de Munster, Clément-Auguste de Droste de Vischering, devenu plus tard si célèbre comme archevêque de Cologne, vint à Dulmen accompagné du respectable doyen Overberg et du conseiller de médecine Druffel pour soumettre Anne Catherine à un rigoureux examen. Le 25 mars, le doyen Rensing avait adressé à ses supérieurs un rapport officiel sur l'état de la malade et il avait envoyé aussi le procès-verbal du médecin dont il a été question plus haut.
" Sur le dos de ses deux mains, y est-il dit, nous avons remarqué des croûtes de sang desséché, sous lesquelles était une plaie. Dans la paume des deux mains, il y avait de semblables croûtes de sang figé, seulement elles étaient plus petites.
(note) Dès sa première visite, Wesener tint un journal continué jusqu'en 1819, dans lequel il consigna non seulement ses observations et ses expériences touchant Anne Catherine, mais même les exhortations qu'elle lui dressait pour le ramener à la foi et à la pratique fidèle de tous les devoirs d'un bon catholique.
Nous avons trouvé ces mêmes croûtes sur la partie extérieure des pieds et au milieu de la plante des pieds. Elles étaient douloureuses quand on les touchait et celles du pied droit avaient saigné, il y avait peu de temps. Au côté droit, nous avons vu, à peu près au-dessus de la quatrième côte, en comptant à partir d'en bas, une plaie longue d'environ trois pouces qui doit saigner quelquefois. Sur le creux de l'estomac nous avons vu certaines marques de forme ronde qui figuraient une croix fourchue. Un peu plus bas, nous avons vu une croix ordinaire formée de raies larges d'un demi pouce et semblables à des meurtrissures. A la partie supérieure du front, nous avons vu, en grand nombre, comme des piqûres d'aiguille qui allaient des deux côtés jusque dans les cheveux. Sur le linge qu'elle portait autour du front nous avons vu beaucoup de petites taches de sang."
Quand cela fut fini, Anne Catherine dit au doyen Rensing : " La chose n'en restera pas là. Voici des messieurs de Munster qui viennent pour faire un examen : il y a un grand personnage, il ressemble à monseigneur l'évêque suffragant qui m'a confirmée à Coesfeld : il y en a un autre qui est assez vieux et qui n'a que quelques cheveux gris."
Ces paroles portaient juste : car, dès le 28 mars, (c'était le quatrième dimanche de Carême), le vicaire général de Munster, Clément-Auguste de Droste de Vischering, devenu plus tard si célèbre comme archevêque de Cologne, vint à Dulmen accompagné du respectable doyen Overberg et du conseiller de médecine Druffel pour soumettre Anne Catherine à un rigoureux examen. Le 25 mars, le doyen Rensing avait adressé à ses supérieurs un rapport officiel sur l'état de la malade et il avait envoyé aussi le procès-verbal du médecin dont il a été question plus haut.
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3. Le rapport que nous donnons ici tout entier était ainsi conçu
" Très noble baron, très révérend vicaire général, le cœur profondément touché et plein d'émotions religieuses, j'annonce à Votre Révérence, comme à mon supérieur ecclésiastique, un fait bien propre à prouver de la manière la plus frappante que le Seigneur, en tout temps si admirable dans ses saints, opère encore en eux, même dans nos jours d'incrédulité et de frivolité, des signes qui montrent dans son plus vif éclat la force de notre sainte religion et qui portent l'homme léger à réfléchir et l'incrédule à revenir de ses erreurs. Vraiment, le Seigneur choisit encore, comme toujours, les faibles pour confondre les torts et révèle aux simples et aux petits des secrets qu'il cache aux grands et aux savants de ce monde. Jusqu'à présent j'avais été forcé de tenir le cas secret autant que possible, par suite du silence qui m'était imposé, de la condescendance que je croyais devoir à une modestie si favorisée de Dieu et par la crainte des suites fâcheuses qui pouvaient résulter de la divulgation : mais maintenant Dieu a permis que la chose, malgré toutes les précautions prises par moi, ait été pour ainsi dire prêchée sur les toits, qu'elle ait acquis une grande notoriété et qu'elle ait déjà produit beaucoup de bien. C'est ce qui m'a poussé à faire à ce sujet un rapport officiel : car dans de telles conjonctures, il ne me paraît plus convenable de continuer à celer les secrets du roi des rois ; je crois au contraire qu'il vaut beaucoup mieux qu'on fasse connaître les œuvres de Dieu et qu'on le glorifie à cette occasion.
" Anne Catherine Emmerich, sœur de choeur du couvent d'Augustines appelé Agnetenberg et aujourd'hui supprimé, est l'élue du Seigneur dont il s'agit. D'après le témoignage de la maîtresse d'école d'ici, Clara Soentgen, qui a pris l'habit le même jour et chez les parents de laquelle elle a résidé avant d'entrer au couvent, elle a été, dès sa jeunesse, extrêmement pieuse, et elle regardait comme le plus précieux don du ciel la conformité à la volonté de Dieu, spécialement dans les moments de tribulation, afin de ressembler toujours davantage à notre Sauveur crucifié. Cette grâce était le principal objet de ses prières de tous les jours, et l'auteur de tout bien la lui accorda de bonne heure. Pendant les dix ans qu'elle a passés au couvent, elle y a été presque constamment malade et souvent obligée de garder le lit pendant des semaines : mais ce qui augmentait encore sa souffrance, c'est qu'elle était méconnue par les autres sœurs qui ne voyaient en elle qu'une pieuse visionnaire. Elles la traitaient même d'une manière peu charitable, parce que quelquefois, ou, pour mieux dire, habituellement, elle faisait plusieurs communions dans la semaine, parlait souvent avec un saint enthousiasme du bonheur qu'il y a à souffrir, faisait beaucoup d'exercices de piété de surérogation, et, par là, se distinguait trop des autres ; en outre, elle avait laissé quelquefois tomber un petit mot de visions et de révélations. Son état de maladie a continué après la suppression du couvent : maintenant, elle est forcée de rester au lit depuis quelques mois et n'a pris, depuis plus de deux mois, ni remède, ni autre nourriture que de l'eau froide à laquelle, pendant un certain temps, on a mêlé quelques gouttes de vin. Depuis trois ou quatre semaines, elle la boit sans aucun mélange. Ce qu'elle prend en sus, pour cacher au monde qu'elle ne vit que d'eau pure, est aussitôt rejeté per vomitum. En entre, elle a de si fortes sueurs que le soir tout ce qu'elle a sur elle et autour d'elle est trempé comme si on venait de le tirer de l'eau. Elle rend par là chaque jour un nouveau témoignage à la vérité du vieil enseignement biblique que l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche du Seigneur. Communément, elle a le soir une défaillance qui dure parfois deux heures entières et même davantage. Pendant cet défaillance que j'appellerais plutôt une sainte extase, elle devient raide comme une pièce de bois, en sorte que tout le corps se pose, comme ferait une perche, sur le côté ou l'on tourne sa tête avec la main ; mais le teint de son visage reste dans cet état aussi vermeil que celui d'un petit enfant : et si, pendant ce temps, lors même qu'elle a un oreiller ou la couverture du lit devant le visage, on lui donne, à la dérobée, si je puis m'exprimer ainsi, la bénédiction sacerdotale, elle lève sa main, qui, hors de là, reste immobile comme une pierre, et fait le signe de la croix. Après de semblables extases, elle a révélé à son confesseur le père Limberg, ainsi qu'à moi, des secrets qu'en ne peut connaître que par une inspiration supérieure. Mais ce qui marque le plus en elle une amie particulièrement chérie de notre Sauveur est qu'elle a une couronne saignante autour de la tête, les stigmates au coté, aux pieds et aux mains, et de plus, sur la poitrine deux ou trois croix. Toutes ces plaies saignent souvent, les unes le mercredi, les autres le vendredi, et si abondamment qu'on voit quelquefois de nombreuses gouttes tomber par terre. Comme ce privilège singulier fait le plus grand bruit et qu'il est l'objet de la critique la plus vive, j'ai voulu me mettre à même de faire un rapport sommaire à ce sujet, et j'ai prié les médecins d'ici de faire un examen préalable. Tous deux ont été touchés jusqu'aux larmes en s'y livrant, et le résultat de leur enquête est contenu dans l'appendice A-A, signé par tous les deux, comme aussi par moi, par M. Limberg et par le prêtre français Lambert qui demeure dans la même maison que la malade.
" En m'acquittant du devoir de fournir à mon supérieur, par ce rapport, les informations convenables sur un cas de nature si extraordinaire, je le prie aussi de m'indiquer comment je dois me comporter ultérieurement, spécialement dans le cas du décès de cette personne, si remarquable dans un temps comme le notre. Elle craint par-dessus tout que la blessure faite à son cœur par la publicité donnée à son histoire ne soit rendue encore plus douloureuse par l'intervention de l'autorité civile : mais j'espère que vous pourrez l'empêcher. Si Votre Excellence voulait se convaincre personnellement par le témoignage de ses yeux de la vérité de mes allégations du caractère surhumain de certaines circonstances accessoires que pour le moment je ne puis confier au papier, je la prierais d'amener avec elle le respectable M. Overberg, si expérimenté dans les voies spirituelles, et de me faire l'honneur de descendre chez moi.
" J'aurais voulu vous porter moi-même ce rapport, d'autant plus que j'aurais pu le compléter de vive voix, mais l'état de maladie de quelques-uns de mes pénitents, le catéchisme que j'ai à faire pour préparer les enfants à la première communion, et les autres affaires paroissiales qui s'accumulent dans cette saison, ne me permettent pas de m'éloigner quant à présent. Votre Excellence trouvera certainement cette excuse trop bien fondée pour ne pas l'agréer complètement. C'est dans cette confiance que je suis, avec le plus profond respect, etc.
Dulmen, le 25 mai 1843.
RENSING
" Très noble baron, très révérend vicaire général, le cœur profondément touché et plein d'émotions religieuses, j'annonce à Votre Révérence, comme à mon supérieur ecclésiastique, un fait bien propre à prouver de la manière la plus frappante que le Seigneur, en tout temps si admirable dans ses saints, opère encore en eux, même dans nos jours d'incrédulité et de frivolité, des signes qui montrent dans son plus vif éclat la force de notre sainte religion et qui portent l'homme léger à réfléchir et l'incrédule à revenir de ses erreurs. Vraiment, le Seigneur choisit encore, comme toujours, les faibles pour confondre les torts et révèle aux simples et aux petits des secrets qu'il cache aux grands et aux savants de ce monde. Jusqu'à présent j'avais été forcé de tenir le cas secret autant que possible, par suite du silence qui m'était imposé, de la condescendance que je croyais devoir à une modestie si favorisée de Dieu et par la crainte des suites fâcheuses qui pouvaient résulter de la divulgation : mais maintenant Dieu a permis que la chose, malgré toutes les précautions prises par moi, ait été pour ainsi dire prêchée sur les toits, qu'elle ait acquis une grande notoriété et qu'elle ait déjà produit beaucoup de bien. C'est ce qui m'a poussé à faire à ce sujet un rapport officiel : car dans de telles conjonctures, il ne me paraît plus convenable de continuer à celer les secrets du roi des rois ; je crois au contraire qu'il vaut beaucoup mieux qu'on fasse connaître les œuvres de Dieu et qu'on le glorifie à cette occasion.
" Anne Catherine Emmerich, sœur de choeur du couvent d'Augustines appelé Agnetenberg et aujourd'hui supprimé, est l'élue du Seigneur dont il s'agit. D'après le témoignage de la maîtresse d'école d'ici, Clara Soentgen, qui a pris l'habit le même jour et chez les parents de laquelle elle a résidé avant d'entrer au couvent, elle a été, dès sa jeunesse, extrêmement pieuse, et elle regardait comme le plus précieux don du ciel la conformité à la volonté de Dieu, spécialement dans les moments de tribulation, afin de ressembler toujours davantage à notre Sauveur crucifié. Cette grâce était le principal objet de ses prières de tous les jours, et l'auteur de tout bien la lui accorda de bonne heure. Pendant les dix ans qu'elle a passés au couvent, elle y a été presque constamment malade et souvent obligée de garder le lit pendant des semaines : mais ce qui augmentait encore sa souffrance, c'est qu'elle était méconnue par les autres sœurs qui ne voyaient en elle qu'une pieuse visionnaire. Elles la traitaient même d'une manière peu charitable, parce que quelquefois, ou, pour mieux dire, habituellement, elle faisait plusieurs communions dans la semaine, parlait souvent avec un saint enthousiasme du bonheur qu'il y a à souffrir, faisait beaucoup d'exercices de piété de surérogation, et, par là, se distinguait trop des autres ; en outre, elle avait laissé quelquefois tomber un petit mot de visions et de révélations. Son état de maladie a continué après la suppression du couvent : maintenant, elle est forcée de rester au lit depuis quelques mois et n'a pris, depuis plus de deux mois, ni remède, ni autre nourriture que de l'eau froide à laquelle, pendant un certain temps, on a mêlé quelques gouttes de vin. Depuis trois ou quatre semaines, elle la boit sans aucun mélange. Ce qu'elle prend en sus, pour cacher au monde qu'elle ne vit que d'eau pure, est aussitôt rejeté per vomitum. En entre, elle a de si fortes sueurs que le soir tout ce qu'elle a sur elle et autour d'elle est trempé comme si on venait de le tirer de l'eau. Elle rend par là chaque jour un nouveau témoignage à la vérité du vieil enseignement biblique que l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche du Seigneur. Communément, elle a le soir une défaillance qui dure parfois deux heures entières et même davantage. Pendant cet défaillance que j'appellerais plutôt une sainte extase, elle devient raide comme une pièce de bois, en sorte que tout le corps se pose, comme ferait une perche, sur le côté ou l'on tourne sa tête avec la main ; mais le teint de son visage reste dans cet état aussi vermeil que celui d'un petit enfant : et si, pendant ce temps, lors même qu'elle a un oreiller ou la couverture du lit devant le visage, on lui donne, à la dérobée, si je puis m'exprimer ainsi, la bénédiction sacerdotale, elle lève sa main, qui, hors de là, reste immobile comme une pierre, et fait le signe de la croix. Après de semblables extases, elle a révélé à son confesseur le père Limberg, ainsi qu'à moi, des secrets qu'en ne peut connaître que par une inspiration supérieure. Mais ce qui marque le plus en elle une amie particulièrement chérie de notre Sauveur est qu'elle a une couronne saignante autour de la tête, les stigmates au coté, aux pieds et aux mains, et de plus, sur la poitrine deux ou trois croix. Toutes ces plaies saignent souvent, les unes le mercredi, les autres le vendredi, et si abondamment qu'on voit quelquefois de nombreuses gouttes tomber par terre. Comme ce privilège singulier fait le plus grand bruit et qu'il est l'objet de la critique la plus vive, j'ai voulu me mettre à même de faire un rapport sommaire à ce sujet, et j'ai prié les médecins d'ici de faire un examen préalable. Tous deux ont été touchés jusqu'aux larmes en s'y livrant, et le résultat de leur enquête est contenu dans l'appendice A-A, signé par tous les deux, comme aussi par moi, par M. Limberg et par le prêtre français Lambert qui demeure dans la même maison que la malade.
" En m'acquittant du devoir de fournir à mon supérieur, par ce rapport, les informations convenables sur un cas de nature si extraordinaire, je le prie aussi de m'indiquer comment je dois me comporter ultérieurement, spécialement dans le cas du décès de cette personne, si remarquable dans un temps comme le notre. Elle craint par-dessus tout que la blessure faite à son cœur par la publicité donnée à son histoire ne soit rendue encore plus douloureuse par l'intervention de l'autorité civile : mais j'espère que vous pourrez l'empêcher. Si Votre Excellence voulait se convaincre personnellement par le témoignage de ses yeux de la vérité de mes allégations du caractère surhumain de certaines circonstances accessoires que pour le moment je ne puis confier au papier, je la prierais d'amener avec elle le respectable M. Overberg, si expérimenté dans les voies spirituelles, et de me faire l'honneur de descendre chez moi.
" J'aurais voulu vous porter moi-même ce rapport, d'autant plus que j'aurais pu le compléter de vive voix, mais l'état de maladie de quelques-uns de mes pénitents, le catéchisme que j'ai à faire pour préparer les enfants à la première communion, et les autres affaires paroissiales qui s'accumulent dans cette saison, ne me permettent pas de m'éloigner quant à présent. Votre Excellence trouvera certainement cette excuse trop bien fondée pour ne pas l'agréer complètement. C'est dans cette confiance que je suis, avec le plus profond respect, etc.
Dulmen, le 25 mai 1843.
RENSING
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XVIII
PREMIÈRE VISITE DU VICAIRE GÉNÉRAL DE DROSTE A DULMEN
1. Le rapport qu'on vient de lire fut accueilli très froidement par le vicaire général de Droste, auquel il parvint le 27 mars.
" Lorsque j'eus reçu, dit-il lui-même, l'écrit de Rensing, avec le procès-verbal des médecins, je fus bien loin d'envisager l'affaire comme elle paraissait être représentée dans ces rapports. Je supposai de l'illusion ou même de la fraude comme je le supposerai toujours dans des cas semblables. Jusque-là je n'avais pas encore entendu dire un seul mot de cette affaire. Comme je vis qu'à Dulmen, elle était déjà devenue le sujet des conversations de la ville, comme en outre, puisqu'il s'agissait de choses qui tombaient si fort sous les sens, je pensais qu'on découvrirait la vérité sans beaucoup de peine, je me rendis le jour suivant à Dulmen, où certainement l'on ne m'attendait pas sitôt. Je priai M. Overberg et le conseiller de médecine Druffel de m'accompagner. Je m'adressai spécialement à ce dernier, parce que je le considère comme un observateur très perspicace et comme n'étant pas disposé à croire légèrement, ce qui aurait beaucoup d'inconvénients dans un cas comme celui-ci.
2. Toutefois, cette arrivée subite n'était aussi pas inattendue pour Anne Catherine que le vicaire général se l'était figuré : car, peu de jours après, le vicaire Hilgenberg déposa sous la foi du serment qu'il lui avait rendu visite samedi soir, 27 mars, après le chant des litanies, et que lui ayant demandé comment elle se trouvait, il en avait cette réponse : " J'ai eu une très mauvaise semaine à cause de l'enquête sur les stigmates faite par les médecins d'ici, mais demain et la semaine prochaine j'aurai à souffrir encore davantage par suite de nouvelles enquêtes."
3. " Nous arrivâmes vers quatre heures à Dulmen, dit dans ses notes le vicaire général de Droste : le dimanche, nous vîmes deux fois Anne Catherine Emmerich et nous nous entretînmes avec elle, avec son confesseur et avec le doyen" . Le lundi matin 29, nous vîmes encore la sœur Emmerich, et nous eûmes un nouvel entretien avec elle. Je parlai aussi à sa compagne d'enfance, Clara Soentgen, de Coesfeld. Vers dix heures, nous repartîmes de Dulmen. Dans cette première visite, la chose nous parut plus sérieuse que ne nous nous y étions attendus."
4. Le 28 mars était le quatrième dimanche de carême en même temps le jour de la fête de saint Joseph pour le diocèse de Munster. Le vicaire général fit dresser un procès-verbal spécial des observations faites ce jour-là et le jour suivant touchant Anne Catherine : en outre, Overberg nota soigneusement tout ce qui lui avait paru digne de remarque. Le procès-verbal s'exprime ainsi :
" Vers cinq heures de l'agrès midi, nous avons visité la sœur Emmerich pour nous assurer des phénomènes particuliers qu'on nous avait dit se produire sur son corps. On ne remarqua rien de frappant dans sa physionomie, rien qui indiquât qu'elle nous attendit, aucun signe de joie, ou d'étonnement. Quand on signifia à la sœur Emmerich que l'autorité ecclésiastique voulait s'assurer de son état, elle donna son acquiescement à tout. Elle laissa voir sans hésitation ses mains, ses pieds, son côté droit. Elle se borna à dire qu'il lui était pénible d'avoir à subir des examens de ce genre, mais que du reste elle ne désirait rien autre chose que de se conformer à la volonté de Dieu :
" Le plus léger attouchement est, à ce qu'elle assure, très douloureux pour ses plaies. Son bras tressaillait chaque fois qu'on touchait la plaie de la main, ou même quand on faisait seulement remuer le doigt du milieu.
" Vers neuf heures du soir, il y eut une nouvelle visite et bientôt après Anne Catherine tomba en extase. Tous les membres semblaient raidis comme par une paralysie, cependant les doigts pouvaient se remuer et même l'attouchement des plaies et du doigt du milieu excitaient des tressaillements. La tête ne pouvait être relevée qu'avec peine, et alors la poitrine, comme suivant le mouvement de la tête, s'élevait aussi. Diverses questions faites par les médecins restèrent sans réponse. Elle ne donnait aucun signe de vie (note). Alors M. le vicaire général lui dit" Je vous ordonne de répondre en vertu de l'obéissance." A peine ces paroles furent-elles prononcées, qu'elle rejeta sa tête du côté où nous étions avec une rapidité surprenante, nous regarda d'un air singulièrement affectueux et répondit à toutes les interrogations qui lui furent adressées. Plus tard, on lui demanda comment il s'était fait qu'étant sans connaissance, elle eût si promptement tourné la tête sur le commandement du vicaire général, comme si elle eût entendu ses paroles ; elle répondit" Non ! Je ne les ai pas entendues, mais quand, étant dans cet état, quelque chose m'est commandé en vertu de l'obéissance, c'est comme si une voix puissante m'appelait."
" En ce qui touche les plaies, elle avoua qu'elle avait prié Dieu de lui enlever les signes extérieurs, mais il lui avait été répondu : " Ma grâce te suffit" sur quoi le vicaire général lui prescrit de recommencer sans cesse cette prière."
PREMIÈRE VISITE DU VICAIRE GÉNÉRAL DE DROSTE A DULMEN
1. Le rapport qu'on vient de lire fut accueilli très froidement par le vicaire général de Droste, auquel il parvint le 27 mars.
" Lorsque j'eus reçu, dit-il lui-même, l'écrit de Rensing, avec le procès-verbal des médecins, je fus bien loin d'envisager l'affaire comme elle paraissait être représentée dans ces rapports. Je supposai de l'illusion ou même de la fraude comme je le supposerai toujours dans des cas semblables. Jusque-là je n'avais pas encore entendu dire un seul mot de cette affaire. Comme je vis qu'à Dulmen, elle était déjà devenue le sujet des conversations de la ville, comme en outre, puisqu'il s'agissait de choses qui tombaient si fort sous les sens, je pensais qu'on découvrirait la vérité sans beaucoup de peine, je me rendis le jour suivant à Dulmen, où certainement l'on ne m'attendait pas sitôt. Je priai M. Overberg et le conseiller de médecine Druffel de m'accompagner. Je m'adressai spécialement à ce dernier, parce que je le considère comme un observateur très perspicace et comme n'étant pas disposé à croire légèrement, ce qui aurait beaucoup d'inconvénients dans un cas comme celui-ci.
2. Toutefois, cette arrivée subite n'était aussi pas inattendue pour Anne Catherine que le vicaire général se l'était figuré : car, peu de jours après, le vicaire Hilgenberg déposa sous la foi du serment qu'il lui avait rendu visite samedi soir, 27 mars, après le chant des litanies, et que lui ayant demandé comment elle se trouvait, il en avait cette réponse : " J'ai eu une très mauvaise semaine à cause de l'enquête sur les stigmates faite par les médecins d'ici, mais demain et la semaine prochaine j'aurai à souffrir encore davantage par suite de nouvelles enquêtes."
3. " Nous arrivâmes vers quatre heures à Dulmen, dit dans ses notes le vicaire général de Droste : le dimanche, nous vîmes deux fois Anne Catherine Emmerich et nous nous entretînmes avec elle, avec son confesseur et avec le doyen" . Le lundi matin 29, nous vîmes encore la sœur Emmerich, et nous eûmes un nouvel entretien avec elle. Je parlai aussi à sa compagne d'enfance, Clara Soentgen, de Coesfeld. Vers dix heures, nous repartîmes de Dulmen. Dans cette première visite, la chose nous parut plus sérieuse que ne nous nous y étions attendus."
4. Le 28 mars était le quatrième dimanche de carême en même temps le jour de la fête de saint Joseph pour le diocèse de Munster. Le vicaire général fit dresser un procès-verbal spécial des observations faites ce jour-là et le jour suivant touchant Anne Catherine : en outre, Overberg nota soigneusement tout ce qui lui avait paru digne de remarque. Le procès-verbal s'exprime ainsi :
" Vers cinq heures de l'agrès midi, nous avons visité la sœur Emmerich pour nous assurer des phénomènes particuliers qu'on nous avait dit se produire sur son corps. On ne remarqua rien de frappant dans sa physionomie, rien qui indiquât qu'elle nous attendit, aucun signe de joie, ou d'étonnement. Quand on signifia à la sœur Emmerich que l'autorité ecclésiastique voulait s'assurer de son état, elle donna son acquiescement à tout. Elle laissa voir sans hésitation ses mains, ses pieds, son côté droit. Elle se borna à dire qu'il lui était pénible d'avoir à subir des examens de ce genre, mais que du reste elle ne désirait rien autre chose que de se conformer à la volonté de Dieu :
" Le plus léger attouchement est, à ce qu'elle assure, très douloureux pour ses plaies. Son bras tressaillait chaque fois qu'on touchait la plaie de la main, ou même quand on faisait seulement remuer le doigt du milieu.
" Vers neuf heures du soir, il y eut une nouvelle visite et bientôt après Anne Catherine tomba en extase. Tous les membres semblaient raidis comme par une paralysie, cependant les doigts pouvaient se remuer et même l'attouchement des plaies et du doigt du milieu excitaient des tressaillements. La tête ne pouvait être relevée qu'avec peine, et alors la poitrine, comme suivant le mouvement de la tête, s'élevait aussi. Diverses questions faites par les médecins restèrent sans réponse. Elle ne donnait aucun signe de vie (note). Alors M. le vicaire général lui dit" Je vous ordonne de répondre en vertu de l'obéissance." A peine ces paroles furent-elles prononcées, qu'elle rejeta sa tête du côté où nous étions avec une rapidité surprenante, nous regarda d'un air singulièrement affectueux et répondit à toutes les interrogations qui lui furent adressées. Plus tard, on lui demanda comment il s'était fait qu'étant sans connaissance, elle eût si promptement tourné la tête sur le commandement du vicaire général, comme si elle eût entendu ses paroles ; elle répondit" Non ! Je ne les ai pas entendues, mais quand, étant dans cet état, quelque chose m'est commandé en vertu de l'obéissance, c'est comme si une voix puissante m'appelait."
" En ce qui touche les plaies, elle avoua qu'elle avait prié Dieu de lui enlever les signes extérieurs, mais il lui avait été répondu : " Ma grâce te suffit" sur quoi le vicaire général lui prescrit de recommencer sans cesse cette prière."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
5. Le lendemain matin, les visiteurs vinrent une troisième fois. Le vicaire général décida alors que le chirurgien Krauthausen de Dulmen laverait avec de l'eau tiède les plaies des mains et des pieds pour faire tomber les croûtes de sang desséché, qu'il les banderait avec des compresses bien sèches et qu'il veillerait à ce que ces bandages apposés aux mains et aux pieds y restassent ainsi huit jours pleins sans interruption, de manière à ce que ni les doigts ni les pouces ne pussent se mouvoir librement. Anne Catherine déclara qu'elle se soumettrait sans difficulté à cet arrangement : elle répéta même suivant le procès-verbal, qu'elle donnait son assentiment à toutes les expériences qu'on voudrait faire sur les plaies, et en général sur sa personne. Elle pria seulement qu'on voulut bien éviter tout ce qui pourrait faire de l'éclat.
Les assistants non seulement furent pleinement satisfaits de la manière dont se comportait en tout Anne Catherine, mais encore l'empressement sincère avec lequel elle prêta une obéissance aveugle à l'ordre de l'autorité ecclésiastique, malgré le surcroît de souffrances qu'il lui préparait, produisit sur eux une forte impression et ils consignèrent ce qui suit dans le procès-verbal : " Pendant les divers entretiens, la physionomie de la malade se rasséréna notablement, et on fut frappé de ce regard avait de candide et de bienveillant.
" A la fin, le vicaire général s'entretint seul avec elle et lui dit qu'on pouvait bien désirer d'avoir part aux souffrances du divin Rédempteur et aux douleurs de ses plaies, mais non aux marques extérieures elles-mêmes. A quoi elle répondit : " Les marques extérieures sont précisément ma croix ".
Les assistants non seulement furent pleinement satisfaits de la manière dont se comportait en tout Anne Catherine, mais encore l'empressement sincère avec lequel elle prêta une obéissance aveugle à l'ordre de l'autorité ecclésiastique, malgré le surcroît de souffrances qu'il lui préparait, produisit sur eux une forte impression et ils consignèrent ce qui suit dans le procès-verbal : " Pendant les divers entretiens, la physionomie de la malade se rasséréna notablement, et on fut frappé de ce regard avait de candide et de bienveillant.
" A la fin, le vicaire général s'entretint seul avec elle et lui dit qu'on pouvait bien désirer d'avoir part aux souffrances du divin Rédempteur et aux douleurs de ses plaies, mais non aux marques extérieures elles-mêmes. A quoi elle répondit : " Les marques extérieures sont précisément ma croix ".
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XIX
MESURES PRISES PAR LE VICAIRE GÉNÉRAL DE DROSTE
1. Après son retour à Munster, le vicaire général prit pour la continuation de l'enquête des mesures prouvant clairement que l'impression personnelle faite sur lui par toute la manière d'être d'Anne Catherine cédait à des considérations d'un ordre supérieur.
" Je ne pouvais pas, dit-il dans le procès-verbal, espérer comme résultat d'une seule enquête l'assurance que l'imposture ou l'illusion étaient impossibles. La question de savoir si, dans le cas où l'on ne rencontrerait ni l'une ni l'autre, ces phénomènes frappants peuvent s'expliquer naturellement n'est pas mon affaire. Les stigmates sont tellement visibles pour quiconque les regarde qu'on ne peut se tromper quant au fait lui-même. La question est donc celle-ci : La sœur Emmerich a-t-elle fait ces marques elle-même, oui ou non ? Quelque autre personne les lui a-t-elle faites ? Comme elle a déclaré formellement que ni elle, ni personne autre ne les avait faites, il me reste à rechercher si elle trompe ou si elle est trompée. Si l'enquête me conduit à cette conclusion qu'on ne peut raisonnablement supposer aucune tromperie, je n'ai point à pousser plus loin mes perquisitions. Pour arriver là, je dois me servir uniquement de moyens qui ne blessent ni la justice, ni la charité."
MESURES PRISES PAR LE VICAIRE GÉNÉRAL DE DROSTE
1. Après son retour à Munster, le vicaire général prit pour la continuation de l'enquête des mesures prouvant clairement que l'impression personnelle faite sur lui par toute la manière d'être d'Anne Catherine cédait à des considérations d'un ordre supérieur.
" Je ne pouvais pas, dit-il dans le procès-verbal, espérer comme résultat d'une seule enquête l'assurance que l'imposture ou l'illusion étaient impossibles. La question de savoir si, dans le cas où l'on ne rencontrerait ni l'une ni l'autre, ces phénomènes frappants peuvent s'expliquer naturellement n'est pas mon affaire. Les stigmates sont tellement visibles pour quiconque les regarde qu'on ne peut se tromper quant au fait lui-même. La question est donc celle-ci : La sœur Emmerich a-t-elle fait ces marques elle-même, oui ou non ? Quelque autre personne les lui a-t-elle faites ? Comme elle a déclaré formellement que ni elle, ni personne autre ne les avait faites, il me reste à rechercher si elle trompe ou si elle est trompée. Si l'enquête me conduit à cette conclusion qu'on ne peut raisonnablement supposer aucune tromperie, je n'ai point à pousser plus loin mes perquisitions. Pour arriver là, je dois me servir uniquement de moyens qui ne blessent ni la justice, ni la charité."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2 . Quand un homme est résolu à régler sa manière d'agir d'après de semblables principes, et que cet homme, comme Droste Vischering, unit à une inébranlable force de caractère une sensibilité d'âme poussée à ce point qu'il lui arrivait souvent d'acheter des oiseaux pris au piège pour leur rendre la liberté, on doit s'attendre d'avance que les souffrances qui résulteront inévitablement de l'enquête pour Anne Catherine seront allégées autant que possible. Toutefois, cet adoucissement n'était pas dans les desseins de Dieu qui, à cette époque d'épreuves si douloureuses pour l'Église, avait appelé Anne Catherine à être l'instrument de ses miséricordes. En cette qualité, elle avait à prendre sur elle toutes les souffrances par lesquelles l'endurcissement du siècle pouvait être vaincu et préparé à recevoir les bénédictions qui devaient découler des tortures de l'innocente pénitente. De là vint que, dans tous les procédés du vicaire général, la sensibilité de son âme prévalut moins que la nécessité de tenir compte de l'esprit de son époque et aussi sa situation très difficile, comme administrateur d'un diocèse depuis si longtemps orphelin et exposé à de continuelles vicissitudes politiques : tout cela lui imposait des obligations devant lesquelles toute autre considération devait être mise de côté.
3. Le pays de Munster avait perdu en 1802 son dernier souverain ecclésiastique, le prince évêque Maximilien-Xavier, frère de l'empereur Joseph II, et la Prusse l'avait occupé pendant la vacance du siège. La décision rendue par la députation d'Empire, en l'an 1803, mit la Prusse en possession définitive de la ville épiscopale de Munster et de la partie méridionale du pays dont le reste fut partagé entre sept autres petits souverains. Dulmen échut à un catholique, le duc de Croy, qui plus tard fit entièrement démolir avec son église l'ancien couvent d'Agnetenberg qu'Anne Catherine a rendu célèbre. Coesfeld et Flamske échurent au comte de Salm.
Après la bataille d'Iéna, ces territoires furent de nouveau retirés à leurs possesseurs et unis au grand-duché de Berg que Napoléon avait érigé en faveur d'un enfant au berceau, le fils aîné de sa belle-sœur Hortense, reine de Hollande. L'année 1810 mit fin à cette union parce que Munster, avec Coesfeld et Dulmen, fut appelé à faire partie du grand Empire français, jusqu'au moment où la Prusse, au congrès de Vienne, se fit donner tout le pays de Munster.
3. Le pays de Munster avait perdu en 1802 son dernier souverain ecclésiastique, le prince évêque Maximilien-Xavier, frère de l'empereur Joseph II, et la Prusse l'avait occupé pendant la vacance du siège. La décision rendue par la députation d'Empire, en l'an 1803, mit la Prusse en possession définitive de la ville épiscopale de Munster et de la partie méridionale du pays dont le reste fut partagé entre sept autres petits souverains. Dulmen échut à un catholique, le duc de Croy, qui plus tard fit entièrement démolir avec son église l'ancien couvent d'Agnetenberg qu'Anne Catherine a rendu célèbre. Coesfeld et Flamske échurent au comte de Salm.
Après la bataille d'Iéna, ces territoires furent de nouveau retirés à leurs possesseurs et unis au grand-duché de Berg que Napoléon avait érigé en faveur d'un enfant au berceau, le fils aîné de sa belle-sœur Hortense, reine de Hollande. L'année 1810 mit fin à cette union parce que Munster, avec Coesfeld et Dulmen, fut appelé à faire partie du grand Empire français, jusqu'au moment où la Prusse, au congrès de Vienne, se fit donner tout le pays de Munster.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
4. On voit assez combien devait être difficile la position d'un supérieur ecclésiastique envers ces pouvoirs qui changeaient sans cesse, dans un pays dont la population regrettait chaque jour davantage la paix et le bonheur dont elle avait joui sous le sceptre paternel de ses princes évêques. En outre, Clément Auguste appartenait à une des familles les plus anciennes et les plus considérées de la noblesse du pays de Munster, et c'était une raison pour qu'il fût regardé d'un oeil méfiant par les dominateurs étrangers. En 1807, le chapitre cathédral l'avait mis à la tête de l'administration du diocèse qui était sans pasteur depuis 1802 ; mais, le 14 avril 1813, le doyen du chapitre, comte de Spiegel, fut nommé évêque par un décret de Napoléon et le chapitre forcé de lui remettre l'administration du diocèse. Clément Auguste se trouvait par là dans la nécessité de se substituer le comte Spiegel comme vicaire général, mais c'est ce que Rome naturellement ne pouvait pas tolérer. Il reprit donc ses fonctions jusqu'à l'année 1821, où le diocèse de Munster reçut enfin un véritable chef suprême dans la personne du baron de Luning, ancien prince évêque de Corvey. Mais celui-ci tomba bientôt dans un état d'affaiblissement intellectuel complet qui le conduisit au tombeau en 1825.
5. Clément Auguste ressentait une douleur amère en voyant l'Église dont il se glorifiait d'être le serviteur, traitée par les prétendues lumières du temps avec un mépris injurieux, comme une institution qui n'avait plus droit à l'existence et destinée à tomber bientôt dans l'oubli. Il savait avec quel débordement d'outrages était poursuivie toute manifestation de la vie de l'Église tendant à démentir l'opinion que l'extinction du catholicisme était déjà un fait accompli : il avait même la douleur de voir un certain nombre de prêtres dans les rangs de ces ennemis de Dieu qui combattaient par leurs paroles et leurs écrits les pratiques de la foi et de la piété. On ne doit donc pas s'étonner que, sous la pression d'une situation précaire et compliquée comme l'était la sienne, un homme d'autant de prévoyance fût très contrarié de se trouver en présence d'un phénomène aussi étrange et aussi choquant pour toutes les idées du siècle que l'était, Anne Catherine, et fût effrayé de la foule de nouveaux embarras qui pouvaient en résulter pour lui. Il avait d'abord espéré pouvoir dévoiler tout de suite par sa brusque intervention l'imposture dont il supposait l'existence, et empêcher toute propagation ultérieure du bruit qu'on faisait de cette affaire, avant qu'elle pût être exploitée au détriment de l'Église ; maintenant qu'il ne pouvait plus croire à une fourberie, il se considérait comme obligé de poursuivre l'enquête aussi sérieusement que possible. Il ne devait pas laisser exposée à l'ombre d'une suspicion l'autorité ecclésiastique considérée avec tant de méfiance et de mauvais vouloir, ni donner à croire qu'elle montrait une indulgence et une incurie blâmables dans une affaire où il pouvait y avoir de la fraude, et qui, dans tous les cas, si elle n'était pas tenue dans le secret le plus profond ou ensevelie dans l'oubli, devait provoquer toute l'irritation des ennemis de l'Église et de la foi.
5. Clément Auguste ressentait une douleur amère en voyant l'Église dont il se glorifiait d'être le serviteur, traitée par les prétendues lumières du temps avec un mépris injurieux, comme une institution qui n'avait plus droit à l'existence et destinée à tomber bientôt dans l'oubli. Il savait avec quel débordement d'outrages était poursuivie toute manifestation de la vie de l'Église tendant à démentir l'opinion que l'extinction du catholicisme était déjà un fait accompli : il avait même la douleur de voir un certain nombre de prêtres dans les rangs de ces ennemis de Dieu qui combattaient par leurs paroles et leurs écrits les pratiques de la foi et de la piété. On ne doit donc pas s'étonner que, sous la pression d'une situation précaire et compliquée comme l'était la sienne, un homme d'autant de prévoyance fût très contrarié de se trouver en présence d'un phénomène aussi étrange et aussi choquant pour toutes les idées du siècle que l'était, Anne Catherine, et fût effrayé de la foule de nouveaux embarras qui pouvaient en résulter pour lui. Il avait d'abord espéré pouvoir dévoiler tout de suite par sa brusque intervention l'imposture dont il supposait l'existence, et empêcher toute propagation ultérieure du bruit qu'on faisait de cette affaire, avant qu'elle pût être exploitée au détriment de l'Église ; maintenant qu'il ne pouvait plus croire à une fourberie, il se considérait comme obligé de poursuivre l'enquête aussi sérieusement que possible. Il ne devait pas laisser exposée à l'ombre d'une suspicion l'autorité ecclésiastique considérée avec tant de méfiance et de mauvais vouloir, ni donner à croire qu'elle montrait une indulgence et une incurie blâmables dans une affaire où il pouvait y avoir de la fraude, et qui, dans tous les cas, si elle n'était pas tenue dans le secret le plus profond ou ensevelie dans l'oubli, devait provoquer toute l'irritation des ennemis de l'Église et de la foi.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
6. Le choix des deux hommes par lesquels Clément Auguste s'était fait accompagner à Dulmen et qui devaient continuer à l'assister dans l'enquête introduite, était le plus heureux qu'on pût imaginer. Overberg, dont le nom était prononcé avec respect bien au-delà des limites de son pays natal, était l'un des plus nobles caractères de son époque, et il était regardé dans tout le diocèse, de Munster comme un prêtre d'une expérience sans égale en ce qui concernait la conduite des âmes et les voies de la vie spirituelle. Clément Auguste l'appréciait à toute sa valeur ; aussi, le chargea-t-il de prendre pour objet de ses investigations les plus scrupuleuses toute la vie intérieure et extérieure d'Anne Catherine depuis sa première jeunesse. Il prescrivit en outre à celle-ci, en vertu de l'obéissance, de rendre, en présence d'Overberg, le compte le plus exact de tout ce qu'elle avait jamais éprouvé intérieurement et extérieurement. Il ne fut pas difficile à ce saint prêtre d'obtenir d'Anne Catherine une confiance sans réserve, en sorte que, dès son premier entretien avec elle, il put rapporter ce qui suit :
" Elle m'a vu venir en esprit : elle m'a dit à moi-même et a affirmé à d'autres qu'elle ne m'avait jamais vu des yeux du corps." " Je vous ai vu intérieurement, " m'a-t-elle dit. Cela la rendait aussi confiante que si nous nous étions connus depuis longtemps."
La candeur naïve avec laquelle Anne Catherine s'ouvrait constamment à ce respectable vieillard permit à celui-ci de jeter de profonds regards dans l'âme de la pieuse fille, dont toute la vie intérieure fut bientôt clairement exposée à ses yeux. Plus il eut de rapports avec Anne Catherine, plus s'offrirent à lui les preuves multipliées de la réalité de sa vocation extraordinaire et de tous les dons qu'elle avait reçus, et cet homme accablé d'affaires, dont une infinité de personnes de toutes les classes réclamait les conseils et l'assistance, crut devoir s'imposer le travail de noter toutes ses observations et même les propres paroles qu'il avait recueillies de la bouche d'Anne Catherine
Avec la rare bonté d'Overberg, on devait s'attendre que son intervention apporterait quelque adoucissement aux souffrances dont l'enquête était l'occasion pour Anne Catherine : mais Dieu ne voulait pas que d'aucun côté il vînt un empêchement aux mesures jugées nécessaires par Clément Auguste pour lever tous les doutes, quant à la réalité des grâces accordées à Anne Catherine
7. Le professeur et conseiller de médecine de Druffel médecin savant et considéré, était un homme d'un esprit indépendant : il examina les phénomènes qui se produisaient chez Anne Catherine avec le regard exercé d'un naturaliste profondément instruit. Lui aussi, lorsqu'on lui en parla pour la première fois, se sentit porté à n'y voir que de l'imposture et de l'artifice : mais son sentiment se modifia dès la première visite. Non seulement l'état des plaies et la façon dont elles saignaient le convainquirent qu'on ne pouvait pas voir là quelque chose d'artificiel ou l'oeuvre d'une main étrangère : mais toute la personne et la manière d'être d'Anne Catherine contribuèrent encore davantage à lui faire rejeter absolument toute croyance à un mensonge et à une fraude. Il est à propos de remarquer que Druffel, comme les autres médecins Krauthausen et Wesener, avait un vif sentiment des cruelles souffrances qui allaient résulter de l'enquête pour Anne Catherine et que sa conviction, quant à la véracité de la personne et à la réalité des faits, n'avait pas besoin de l'application des mesures rigoureuses que le supérieur ecclésiastique, directeur de l'enquête, se croyait obligé de faire subir, à Anne Catherine. Par suite du grand éclat que fit l'enquête, M. de Druffel se trouva amené à faire insérer dans le journal de médecine et de chirurgie de Salzbourg un long article signé de lui, où il rendit un compte exact et détaillé de ses observations médicales auprès d'Anne Catherine. Quoiqu'il" déclara dès l'abord son intention de ne pas chercher à expliquer les phénomènes, " (ce que les éditeurs d'un journal de médecine, surtout à cette époque, auraient difficilement permis), il eut pourtant la hardiesse de conclure en ces termes :
" Quant à ceux qui regardent les phénomènes observés comme une imposture, on doit leur faire remarquer que, dans l'enquête, l'autorité ecclésiastique y a regardé de très près. Cette fraude, si elle existait, serait d'une nature toute particulière et bien difficile à constater.
" Elle m'a vu venir en esprit : elle m'a dit à moi-même et a affirmé à d'autres qu'elle ne m'avait jamais vu des yeux du corps." " Je vous ai vu intérieurement, " m'a-t-elle dit. Cela la rendait aussi confiante que si nous nous étions connus depuis longtemps."
La candeur naïve avec laquelle Anne Catherine s'ouvrait constamment à ce respectable vieillard permit à celui-ci de jeter de profonds regards dans l'âme de la pieuse fille, dont toute la vie intérieure fut bientôt clairement exposée à ses yeux. Plus il eut de rapports avec Anne Catherine, plus s'offrirent à lui les preuves multipliées de la réalité de sa vocation extraordinaire et de tous les dons qu'elle avait reçus, et cet homme accablé d'affaires, dont une infinité de personnes de toutes les classes réclamait les conseils et l'assistance, crut devoir s'imposer le travail de noter toutes ses observations et même les propres paroles qu'il avait recueillies de la bouche d'Anne Catherine
Avec la rare bonté d'Overberg, on devait s'attendre que son intervention apporterait quelque adoucissement aux souffrances dont l'enquête était l'occasion pour Anne Catherine : mais Dieu ne voulait pas que d'aucun côté il vînt un empêchement aux mesures jugées nécessaires par Clément Auguste pour lever tous les doutes, quant à la réalité des grâces accordées à Anne Catherine
7. Le professeur et conseiller de médecine de Druffel médecin savant et considéré, était un homme d'un esprit indépendant : il examina les phénomènes qui se produisaient chez Anne Catherine avec le regard exercé d'un naturaliste profondément instruit. Lui aussi, lorsqu'on lui en parla pour la première fois, se sentit porté à n'y voir que de l'imposture et de l'artifice : mais son sentiment se modifia dès la première visite. Non seulement l'état des plaies et la façon dont elles saignaient le convainquirent qu'on ne pouvait pas voir là quelque chose d'artificiel ou l'oeuvre d'une main étrangère : mais toute la personne et la manière d'être d'Anne Catherine contribuèrent encore davantage à lui faire rejeter absolument toute croyance à un mensonge et à une fraude. Il est à propos de remarquer que Druffel, comme les autres médecins Krauthausen et Wesener, avait un vif sentiment des cruelles souffrances qui allaient résulter de l'enquête pour Anne Catherine et que sa conviction, quant à la véracité de la personne et à la réalité des faits, n'avait pas besoin de l'application des mesures rigoureuses que le supérieur ecclésiastique, directeur de l'enquête, se croyait obligé de faire subir, à Anne Catherine. Par suite du grand éclat que fit l'enquête, M. de Druffel se trouva amené à faire insérer dans le journal de médecine et de chirurgie de Salzbourg un long article signé de lui, où il rendit un compte exact et détaillé de ses observations médicales auprès d'Anne Catherine. Quoiqu'il" déclara dès l'abord son intention de ne pas chercher à expliquer les phénomènes, " (ce que les éditeurs d'un journal de médecine, surtout à cette époque, auraient difficilement permis), il eut pourtant la hardiesse de conclure en ces termes :
" Quant à ceux qui regardent les phénomènes observés comme une imposture, on doit leur faire remarquer que, dans l'enquête, l'autorité ecclésiastique y a regardé de très près. Cette fraude, si elle existait, serait d'une nature toute particulière et bien difficile à constater.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
8. Il arriva pour M. de Druffel, comme pour tous ceux qui furent en relation avec Anne Catherine, que Dieu lui fit une grâce par l'intermédiaire de sa servante. Celle-ci en effet vit l'état de l'âme du professeur et le danger dans lequel il se trouvait de perdre la foi. Dès le premier entretien, elle en fit la confidence à Overberg, laissant celui-ci, en qualité d'ami pour lequel Druffel avait un grand respect, libre d'en faire tel usage qu'il voudrait. Overberg fut très surpris et ne voulut pas croire légèrement ce qui lui était dit : mais Druffel lui-même, auquel il fit part de cette communication intime, confirma ce qu'avait dit Anne Catherine et donna à celle-ci les preuves les moins équivoques de l'utilité qu'avait pour lui cet avertissement.
9. Le vicaire général de Droste transmit à Dulmen, dès le 31 mars, une série d'ordres écrits et de règlements qui furent observés avec la plus grande exactitude et qui sont une preuve remarquable de la rare fermeté, de la prudence et de la pénétration de cet homme éminent dont Dieu voulait se servir pour la glorification de sa servante. La première disposition consistait en ce qu'il nommait le doyen Rensing (note) directeur extraordinaire d'Anne Catherine pendant la durée de l'enquête et lui imposait l'obligation d'observer avec le plus grand soin toute la conduite de la malade et d'en rendre un compte fidèle. Il lui envoya une instruction détaillée conçue en, ces termes :
" C'est le devoir de l'autorité ecclésiastique d'examiner à fond, autant que possible, si les phénomènes extraordinaires qui se présentent sont l'effet d'une maladie, s'ils sont survenus et s'ils se maintiennent d'une manière qui sorte de la sphère de l'ordre naturel, ou enfin s'ils ont été produits et entretenus d'une manière artificielle. Il ne s'agit pas ici de ce que l'on croit, mais de vérifier ce qui est le plus exactement possible. D'après cela il est absolument nécessaire que, non seulement tout ce qui s'est passé par rapport à l'âme et dans l'âme (en tant que cela se peut sans porter la moindre atteinte au secret de la confession) et tout ce qui s'est produit sur le corps et dans le corps de la sœur Emmerich soit décrit et rapporté de la manière la plus conforme qu'il se pourra à la simple vérité, mais encore qu'à partir du jour où cette charge est confiée à M. le doyen Rensing, toute modification dans l'état du corps aussi bien que tout phénomène physique ou moral soit noté sur un journal qui me sera envoyé tous les huit jours. Ce qui concerne l'âme est ici confié à M. le doyen Rensing. En ce qui touche le corps, M. le doyen est chargé de dire à la sœur Emmerich que, pour obéir à l'autorité ecclésiastique, elle doit laisser M. Krauthausen faire tout ce qu'il jugera convenable pour sa guérison corporelle. En général, elle doit s'apercevoir aussi peu que possible qu'elle est l'objet d'une enquête.
(note) ." Le doyen Rensing, observa-t-il, est un homme de sens. C'est à lui et à lui seul que je dois confier la direction de l'enquête."
Plus la chose sera conduite de façon à ce qu'elle doive naturellement croire qu'on n'a autre chose en vue que sa guérison, mieux cela vaudra : on ne doit pas attacher la moindre importance aux plaies et aux signes, ni s'en préoccuper, comme si c'était une grâce extraordinaire. Plus toute cette histoire tombera dans l'oubli et moins on en parlera, mieux cela vaudra."
9. Le vicaire général de Droste transmit à Dulmen, dès le 31 mars, une série d'ordres écrits et de règlements qui furent observés avec la plus grande exactitude et qui sont une preuve remarquable de la rare fermeté, de la prudence et de la pénétration de cet homme éminent dont Dieu voulait se servir pour la glorification de sa servante. La première disposition consistait en ce qu'il nommait le doyen Rensing (note) directeur extraordinaire d'Anne Catherine pendant la durée de l'enquête et lui imposait l'obligation d'observer avec le plus grand soin toute la conduite de la malade et d'en rendre un compte fidèle. Il lui envoya une instruction détaillée conçue en, ces termes :
" C'est le devoir de l'autorité ecclésiastique d'examiner à fond, autant que possible, si les phénomènes extraordinaires qui se présentent sont l'effet d'une maladie, s'ils sont survenus et s'ils se maintiennent d'une manière qui sorte de la sphère de l'ordre naturel, ou enfin s'ils ont été produits et entretenus d'une manière artificielle. Il ne s'agit pas ici de ce que l'on croit, mais de vérifier ce qui est le plus exactement possible. D'après cela il est absolument nécessaire que, non seulement tout ce qui s'est passé par rapport à l'âme et dans l'âme (en tant que cela se peut sans porter la moindre atteinte au secret de la confession) et tout ce qui s'est produit sur le corps et dans le corps de la sœur Emmerich soit décrit et rapporté de la manière la plus conforme qu'il se pourra à la simple vérité, mais encore qu'à partir du jour où cette charge est confiée à M. le doyen Rensing, toute modification dans l'état du corps aussi bien que tout phénomène physique ou moral soit noté sur un journal qui me sera envoyé tous les huit jours. Ce qui concerne l'âme est ici confié à M. le doyen Rensing. En ce qui touche le corps, M. le doyen est chargé de dire à la sœur Emmerich que, pour obéir à l'autorité ecclésiastique, elle doit laisser M. Krauthausen faire tout ce qu'il jugera convenable pour sa guérison corporelle. En général, elle doit s'apercevoir aussi peu que possible qu'elle est l'objet d'une enquête.
(note) ." Le doyen Rensing, observa-t-il, est un homme de sens. C'est à lui et à lui seul que je dois confier la direction de l'enquête."
Plus la chose sera conduite de façon à ce qu'elle doive naturellement croire qu'on n'a autre chose en vue que sa guérison, mieux cela vaudra : on ne doit pas attacher la moindre importance aux plaies et aux signes, ni s'en préoccuper, comme si c'était une grâce extraordinaire. Plus toute cette histoire tombera dans l'oubli et moins on en parlera, mieux cela vaudra."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
10. Le chirurgien Krauthausen fut chargé d'observer et de noter tous les phénomènes physiques.
" Car, dit le vicaire général, le docteur Wesener a rédigé l'acte du 25 mars, et cela l'engage trop pour qu'on puisse 1'employer dans l'enquête. D'après ce que m'a dit M. le Conseiller de médecine Druffel, on peut se fier entièrement à M. Krauthausen en ce qui concerne le traitement des plaies de la sœur Emmerich. Dans aucun cas les bandages ne doivent être enlevés, ni même seulement changés par un autre que lui. Si M. Krauthausen voit quelque indice qui l'y détermine, il peut retirer les bandages au bout de quatre jours, mais il faut qu'ensuite il les remette aussitôt."
Les points sur lesquels il devait faire son rapport chaque semaine étaient notés d'avance dans le plus grand détail par le vicaire général.
11. Rensing devait prescrire, de la part du supérieur ecclésiastique, au père Limberg, confesseur ordinaire d'Anne Catherine : 1° d'éviter autant que possible, dans ses entretiens sur des sujets de piété, de faire allusion aux souffrances de la malade ; 2° de ne jamais lui adresser, pendant ou après ses extases, de question sur son état intérieur et les diverses pensées qui avaient pu se présenter à elle, car tout cela était désormais l'affaire exclusive du doyen Rensing ; 3° de faire part à celui-ci de tout ce qu'Anne Catherine, sans y être provoquée, lui communiquerait pendant ou après les extases.
12. Enfin, Clara Soentgen fut chargée de faire des rapports secrets : " car, dit le vicaire général, elle m'est bien connue comme une personne sensée et absolument incapable de tromper. Je lui ai demandé de me faire un rapport à l'insu du doyen, afin d'arriver plus sûrement à la vérité à l'aide de rapports tout à fait indépendants les uns des autres.
L'ordre écrit adressé à Clara Soentgen était accompagné de l'avertissement suivant
Je voudrais ici tout savoir, non pas imaginer, conjecturer, mais savoir. Ce que, je sais avec certitude a seul de la valeur pour moi."
13. En ce qui touchait la sœur d'Anne Catherine, l'instruction suivante fut donnée :
" On la laisse volontiers auprès de la malade. Mais si elle se permettait d'agir à l'encontre des prescriptions données, il faudrait sans faute la séparer entièrement de sa sœur. Je dois de plus faire remarquer que des mesures venant d'autre part et qui seraient infiniment plus désagréable pour la sœur Emmerich ne pourront être évitées que si l'on se conforme scrupuleusement à celles que j'ai prescrites."
14. Enfin le doyen Rensing ; fut chargé d'entendre, au nom de l'autorité ecclésiastique, sur des points déterminés d'avance, toutes les personnes, prêtres, religieuses ou laïques qui à Dulmen, à Coesfeld et à Flamske, s'étaient trouvées en relation plus particulière avec Anne Catherine et qui par conséquent étaient en mesure de faire des communications instructives sur son caractère et toute sa manière de vivre.
" Car, dit le vicaire général, le docteur Wesener a rédigé l'acte du 25 mars, et cela l'engage trop pour qu'on puisse 1'employer dans l'enquête. D'après ce que m'a dit M. le Conseiller de médecine Druffel, on peut se fier entièrement à M. Krauthausen en ce qui concerne le traitement des plaies de la sœur Emmerich. Dans aucun cas les bandages ne doivent être enlevés, ni même seulement changés par un autre que lui. Si M. Krauthausen voit quelque indice qui l'y détermine, il peut retirer les bandages au bout de quatre jours, mais il faut qu'ensuite il les remette aussitôt."
Les points sur lesquels il devait faire son rapport chaque semaine étaient notés d'avance dans le plus grand détail par le vicaire général.
11. Rensing devait prescrire, de la part du supérieur ecclésiastique, au père Limberg, confesseur ordinaire d'Anne Catherine : 1° d'éviter autant que possible, dans ses entretiens sur des sujets de piété, de faire allusion aux souffrances de la malade ; 2° de ne jamais lui adresser, pendant ou après ses extases, de question sur son état intérieur et les diverses pensées qui avaient pu se présenter à elle, car tout cela était désormais l'affaire exclusive du doyen Rensing ; 3° de faire part à celui-ci de tout ce qu'Anne Catherine, sans y être provoquée, lui communiquerait pendant ou après les extases.
12. Enfin, Clara Soentgen fut chargée de faire des rapports secrets : " car, dit le vicaire général, elle m'est bien connue comme une personne sensée et absolument incapable de tromper. Je lui ai demandé de me faire un rapport à l'insu du doyen, afin d'arriver plus sûrement à la vérité à l'aide de rapports tout à fait indépendants les uns des autres.
L'ordre écrit adressé à Clara Soentgen était accompagné de l'avertissement suivant
Je voudrais ici tout savoir, non pas imaginer, conjecturer, mais savoir. Ce que, je sais avec certitude a seul de la valeur pour moi."
13. En ce qui touchait la sœur d'Anne Catherine, l'instruction suivante fut donnée :
" On la laisse volontiers auprès de la malade. Mais si elle se permettait d'agir à l'encontre des prescriptions données, il faudrait sans faute la séparer entièrement de sa sœur. Je dois de plus faire remarquer que des mesures venant d'autre part et qui seraient infiniment plus désagréable pour la sœur Emmerich ne pourront être évitées que si l'on se conforme scrupuleusement à celles que j'ai prescrites."
14. Enfin le doyen Rensing ; fut chargé d'entendre, au nom de l'autorité ecclésiastique, sur des points déterminés d'avance, toutes les personnes, prêtres, religieuses ou laïques qui à Dulmen, à Coesfeld et à Flamske, s'étaient trouvées en relation plus particulière avec Anne Catherine et qui par conséquent étaient en mesure de faire des communications instructives sur son caractère et toute sa manière de vivre.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XX
LE BANDAGE DES PLAIES
1. Le 1er avril, Krauthausen appliqua les bandages aux mains et aux pieds. Voici ce qui est dit à ce sujet dans son rapport au vicaire général :
" Conformément à la mission qui m'a été donnée, j'ai, le jeudi (d'avant le dimanche de la passion), à huit heures du matin, lavé complètement avec de l'eau chaude les endroits marqués par des croûtes de sang desséché aux pieds, aux mains et aussi à la tête de l'ancienne religieuse augustine Catherine Emmerich : je les ai aussitôt après enveloppés avec des bandages, de manière à ce que les doigts et les pouces ne puissent se mouvoir librement et à ce que ce bandage ne puisse être dérangé et encore bien moins retiré sans que je m'en aperçoive. La lotion, quoique faite très lentement et très doucement avec une éponge fine, et l'application des bandages ont déterminé chez la malade des souffrances très vives et une agitation qui ont duré environ vingt-quatre heures. Lorsque j'eus fini de laver, je vis sur le dos des deux mains et des deux pieds une plaie ovale, longue d'environ un demi-pouce ; les plaies à la paume des mains et à la plante des pieds étaient plus petites : elles étaient saines et il n'y avait aucune suppuration."
LE BANDAGE DES PLAIES
1. Le 1er avril, Krauthausen appliqua les bandages aux mains et aux pieds. Voici ce qui est dit à ce sujet dans son rapport au vicaire général :
" Conformément à la mission qui m'a été donnée, j'ai, le jeudi (d'avant le dimanche de la passion), à huit heures du matin, lavé complètement avec de l'eau chaude les endroits marqués par des croûtes de sang desséché aux pieds, aux mains et aussi à la tête de l'ancienne religieuse augustine Catherine Emmerich : je les ai aussitôt après enveloppés avec des bandages, de manière à ce que les doigts et les pouces ne puissent se mouvoir librement et à ce que ce bandage ne puisse être dérangé et encore bien moins retiré sans que je m'en aperçoive. La lotion, quoique faite très lentement et très doucement avec une éponge fine, et l'application des bandages ont déterminé chez la malade des souffrances très vives et une agitation qui ont duré environ vingt-quatre heures. Lorsque j'eus fini de laver, je vis sur le dos des deux mains et des deux pieds une plaie ovale, longue d'environ un demi-pouce ; les plaies à la paume des mains et à la plante des pieds étaient plus petites : elles étaient saines et il n'y avait aucune suppuration."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2. Quelques heures après l'application des bandages, le doyen Rensing vint visiter Anne Catherine, qu'il trouva" pleurant à cause des douleurs tout à fait intolérables que lui occasionnait la chaleur brûlante qui se faisait sentir dans les plaies bandées."
" Consolée par lui, elle répondit Je veux tout supporter de bon cœur, pourvu seulement que le bon Dieu me donne assez de force pour ne pas tomber dans l'impatience."
Mais, lorsqu'à l'heure des vêpres, elle commença à s'unir aux douleurs de la Passion du Sauveur, les souffrances devinrent beaucoup plus violentes et elle fut prise de la" peur" de ne pouvoir jamais les supporter et d'être poussée par leur excès à manquer à l'obéissance due à l'autorité ecclésiastique."
Elle ne put être calmée que par la promesse du doyen que lui et un autre prêtre offriraient le lendemain pour elle le saint sacrifice de la messe afin de lui obtenir de Dieu la force nécessaire, et elle répondit :
" Je ne désire rien que cette grâce, et Dieu ne me la refusera pas si les prêtres la demande avec moi."
3. La nuit du 1er au 2 avril fut excessivement douloureuse, au point qu'elle s'évanouit trois fois. Ce ne fut que le matin, lorsqu'on dit la sainte messe pour elle, qu'elle éprouva quelque soulagement. Mais les élancements et la cuisson des plaies continuèrent sans interruption et, le soir du 2 avril, ce ne fut que d'une voix à peine intelligible à cause de sa faiblesse qu'elle put dire au doyen :
" Voilà encore des personnes qui veulent voir mes signes : cela me tourmente ; ne pourriez-vous pas l'empêcher ?"
Ces paroles reçurent leur accomplissement le 4 avril, car le commissaire général de police français, M. Garnier, vint de Munster à Dulmen pour prendre des informations auprès des médecins et de l'entourage d'Anne Catherine et pour faire une visite officielle. Il adressa différentes questions à Anne Catherine dont les réponses lui furent traduites en français par l'abbé Lambert. Il voulait surtout savoir si Anne Catherine ne parlait pas de choses touchant à la politique et ne faisait pas de prédictions. Il fit ensuite lever par Krauthausen les bandages de la main droite pour voir lui-même la plaie. Toute la manière d'être d'Anne Catherine fit sur Garnier une si profonde impression que, quatorze ans après, à Paris, il parla encore de cette visite à Clément Brentano en termes très respectueux et très sympathiques.
" Consolée par lui, elle répondit Je veux tout supporter de bon cœur, pourvu seulement que le bon Dieu me donne assez de force pour ne pas tomber dans l'impatience."
Mais, lorsqu'à l'heure des vêpres, elle commença à s'unir aux douleurs de la Passion du Sauveur, les souffrances devinrent beaucoup plus violentes et elle fut prise de la" peur" de ne pouvoir jamais les supporter et d'être poussée par leur excès à manquer à l'obéissance due à l'autorité ecclésiastique."
Elle ne put être calmée que par la promesse du doyen que lui et un autre prêtre offriraient le lendemain pour elle le saint sacrifice de la messe afin de lui obtenir de Dieu la force nécessaire, et elle répondit :
" Je ne désire rien que cette grâce, et Dieu ne me la refusera pas si les prêtres la demande avec moi."
3. La nuit du 1er au 2 avril fut excessivement douloureuse, au point qu'elle s'évanouit trois fois. Ce ne fut que le matin, lorsqu'on dit la sainte messe pour elle, qu'elle éprouva quelque soulagement. Mais les élancements et la cuisson des plaies continuèrent sans interruption et, le soir du 2 avril, ce ne fut que d'une voix à peine intelligible à cause de sa faiblesse qu'elle put dire au doyen :
" Voilà encore des personnes qui veulent voir mes signes : cela me tourmente ; ne pourriez-vous pas l'empêcher ?"
Ces paroles reçurent leur accomplissement le 4 avril, car le commissaire général de police français, M. Garnier, vint de Munster à Dulmen pour prendre des informations auprès des médecins et de l'entourage d'Anne Catherine et pour faire une visite officielle. Il adressa différentes questions à Anne Catherine dont les réponses lui furent traduites en français par l'abbé Lambert. Il voulait surtout savoir si Anne Catherine ne parlait pas de choses touchant à la politique et ne faisait pas de prédictions. Il fit ensuite lever par Krauthausen les bandages de la main droite pour voir lui-même la plaie. Toute la manière d'être d'Anne Catherine fit sur Garnier une si profonde impression que, quatorze ans après, à Paris, il parla encore de cette visite à Clément Brentano en termes très respectueux et très sympathiques.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
4. Voici ce que rapporte le journal de Krauthausen sur l'enlèvement du bandage :
" Aujourd'hui, 4 avril, sur l'ordre de M. le commissaire de police du département de la Lippe, j'ai été obligé d'enlever le bandage de la main droite et, dans l'après-midi, vers quatre heures et demie, j'ai retiré ceux de la main gauche et des deux pieds. Par l'effet du sang dont ils étaient trempés, ils étaient tellement collés ensemble et sur chaque plaie qu'il m'a fallu un certain temps pour les amollir avec de l'eau chaude et les retirer ; en outre, ce qui est le pire, cela a causé de grandes douleurs à la patiente. Les plaies se trouvaient encore dans le même état que le 1er avril. Afin que les bandages que j'ai remis immédiatement ne se collassent plus si fortement aux plaies, et aussi pour alléger les souffrances de la malade, j'ai mis un cataplasme sur les plaies."
Toutefois, ce cataplasme ne fit qu'augmenter les souffrances déjà si cruelles et ne put pas empêcher le sang de jaillir. Le jour suivant (5 avril), les bandages étaient de nouveau traversés par le sang, en sorte que Krauthausen, sur la demande de la malade, retira le cataplasme et appliqua de nouveaux bandages de toile bien sèche. En retirant le cataplasme, il ne vit aucune trace de suppuration.
5. Le matin suivant, le sang avait de nouveau traversé les bandages, et les douleurs allaient toujours croissant. Jusqu'au 7 avril, elles augmentèrent tellement qu'Anne Catherine supplia le médecin de retirer les bandages des mains et des pieds, parce qu'elle ne se sentait pas de force à endurer plus longtemps ce qu'ils lui faisaient souffrir. Le médecin n'osait pas condescendre à cette prière sans une permission expresse de Munster : il voulait la demander par lettre, mais, le soir même, le vicaire général et ses compagnons revinrent à Dulmen.
" Aujourd'hui, 4 avril, sur l'ordre de M. le commissaire de police du département de la Lippe, j'ai été obligé d'enlever le bandage de la main droite et, dans l'après-midi, vers quatre heures et demie, j'ai retiré ceux de la main gauche et des deux pieds. Par l'effet du sang dont ils étaient trempés, ils étaient tellement collés ensemble et sur chaque plaie qu'il m'a fallu un certain temps pour les amollir avec de l'eau chaude et les retirer ; en outre, ce qui est le pire, cela a causé de grandes douleurs à la patiente. Les plaies se trouvaient encore dans le même état que le 1er avril. Afin que les bandages que j'ai remis immédiatement ne se collassent plus si fortement aux plaies, et aussi pour alléger les souffrances de la malade, j'ai mis un cataplasme sur les plaies."
Toutefois, ce cataplasme ne fit qu'augmenter les souffrances déjà si cruelles et ne put pas empêcher le sang de jaillir. Le jour suivant (5 avril), les bandages étaient de nouveau traversés par le sang, en sorte que Krauthausen, sur la demande de la malade, retira le cataplasme et appliqua de nouveaux bandages de toile bien sèche. En retirant le cataplasme, il ne vit aucune trace de suppuration.
5. Le matin suivant, le sang avait de nouveau traversé les bandages, et les douleurs allaient toujours croissant. Jusqu'au 7 avril, elles augmentèrent tellement qu'Anne Catherine supplia le médecin de retirer les bandages des mains et des pieds, parce qu'elle ne se sentait pas de force à endurer plus longtemps ce qu'ils lui faisaient souffrir. Le médecin n'osait pas condescendre à cette prière sans une permission expresse de Munster : il voulait la demander par lettre, mais, le soir même, le vicaire général et ses compagnons revinrent à Dulmen.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
6. Sur le refus de Krauthausen, Anne Catherine, dans son délaissement, s'était proposé de patienter encore un jour : là-dessus, il lui fut enjoint en vision de représenter à ceux qui faisaient l'enquête qu'elle ne désirait rien au monde, ni argent, ni renommée, mais qu'elle aspirait uniquement à vivre cachée et tranquille ; qu'on ne devait donc pas mettre sa patience à une si forte épreuve, car, avec l'excès intolérable de ses souffrances, ce n'était rien moins que tenter Dieu. Lorsque ensuite elle fit ces représentations devant Overberg, celui-ci qui, d'après ce qui s'était passé lors de sa première visite, croyait pouvoir compter sur une obéissance aveugle, en fut d'abord assez surpris toutefois, Anne Catherine leva ses scrupules en lui disant qu'elle avait reçu l'ordre de s'expliquer ainsi, mais qu'en même temps il lui avait été prescrit de souffrir, quoi qu'il pût advenir, tout ce que l'obéissance demanderait d'elle. La suite de l'enquête montrera de plus en plus clairement, combien, en dépit de toutes les souffrances, elle fut docile à cette injonction.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XXI
LE VICAIRE GÉNÉRAL DROSTE ET SES COMPAGNONS
VIENNENT POUR LA SECONDE FOIS À DULMEN. 7 AVRIL 1813
1. Le procès-verbal relatif à cette visite s'exprime ainsi :
" Le mercredi 7 avril, vers six heures du soir, les soussignés se sont rendus dans la maison où habite la sœur Emmerich. La physionomie de la malade ne paraissait pas avoir changé. Les bandages des pieds et des mains ont été enlevés par M. Krauthausen. Il a fallu mouiller à chaque tour la partie du linge qui posait sur les plaies, afin de pouvoir le retirer avec moins de douleur, tant le bandage était trempé de sang noirâtre. Après l'enlèvement des bandages, la patiente se trouva soulagée, quant à ses douleurs continuelles.
" Les plaies en général paraissaient très saines. Il ne s'y montrait ni suppuration, ni inflammation. A part ses plaintes sur les douleurs excessives et insupportables causées par l'application des bandages, sa figure, comme lors de la première visite, prit une expression de contentement et de bienveillance pendant la conversation."
LE VICAIRE GÉNÉRAL DROSTE ET SES COMPAGNONS
VIENNENT POUR LA SECONDE FOIS À DULMEN. 7 AVRIL 1813
1. Le procès-verbal relatif à cette visite s'exprime ainsi :
" Le mercredi 7 avril, vers six heures du soir, les soussignés se sont rendus dans la maison où habite la sœur Emmerich. La physionomie de la malade ne paraissait pas avoir changé. Les bandages des pieds et des mains ont été enlevés par M. Krauthausen. Il a fallu mouiller à chaque tour la partie du linge qui posait sur les plaies, afin de pouvoir le retirer avec moins de douleur, tant le bandage était trempé de sang noirâtre. Après l'enlèvement des bandages, la patiente se trouva soulagée, quant à ses douleurs continuelles.
" Les plaies en général paraissaient très saines. Il ne s'y montrait ni suppuration, ni inflammation. A part ses plaintes sur les douleurs excessives et insupportables causées par l'application des bandages, sa figure, comme lors de la première visite, prit une expression de contentement et de bienveillance pendant la conversation."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2. Lors du dernier entretien que Clément Auguste eut avec Anne Catherine en présence d'Overberg, celle-ci le pria" de penser à la peine qu'elle éprouvait quand il lui fallait se laisser voir ainsi, elle qui avait toujours été si timide." Elle dit encore" que ses souffrances la troublaient dans sa prière ; que, tout ce temps-ci, elle avait eu bien peu de consolation ; qu'elle avait eu à lutter, non seulement contre l'impatience, mais aussi contre le ressentiment à l'égard de ceux qui avaient fait connaître ce qu'il pouvait y avoir à remarquer chez elle ; qu'elle savait ce qu'ils avaient dit, mais qu'elle se résignait de bon cœur à la volonté de Dieu." Devant Overberg, elle exprima aussi la crainte" que sa vieille mère n'apprit qu'elle avait été soumise à un examen et ne put supporter, à cause de son grand âge, le chagrin qu'elle en ressentirait." Et, comme il lui demandait si elle oubliait souvent de penser à Dieu, elle resta un moment silencieuse, puis répondit : " Pendant ces huit jours (note), plus qu'ordinairement pendant une année entière." Un peu avant qu'on se séparât, elle lui dit : " Ah ! Combien je voudrais mourir." Et à la question" Ne pouvez-vous donc pas supporter plus longtemps vos souffrances ?" elle répondit : " Vraiment non !" " Son regard me disait assez, écrit Overberg, pourquoi elle désirait si fort la mort."
3. Dans cette seconde visite aussi, l'impression que la manière d'être d'Anne Catherine fit sur les supérieurs ecclésiastiques fut très satisfaisante. Ce qui plut surtout au vicaire général, ce fut la prière qu'elle lui fit avec beaucoup d'insistance de ne pas laisser approcher d'elle les curieux qui voudraient la visiter.
(note) : Elle voulait parler de ces jours pendant lesquels les bandages l'avaient fait tellement souffrir. (Note d'Overberg. )
" La sœur Emmerich, écrivit-il le 9 avril à Rensing, m'a tellement remercié d'avoir prescrit la diminution des visites et m'a prié si instamment d'y tenir fortement la main, que cela m'aurait décidé à le faire quand même il n'y aurait pas bien d'autres raisons tirées de la manière de sentir de la sœur Emmerich, et motivées par le désir d'alléger ses souffrances et d'éloigner ce qui trouble son repos. Vous pouvez montrer cet ordre aux personnes ecclésiastiques ou laïques qui seraient assez indiscrètes pour insister malgré vos remontrances. On peut leur faire savoir aussi que la sœur Emmerich consent docilement à recevoir les visites autorisée par vous, mais qu'il ne serai pas juste de lui imposer des visites de ce genre contrairement à sa volonté." Clément Auguste témoigna aussi par écrit combien il était satisfait du doyen lui-même." Votre manière d'agir, dit-il, prouve que je n'aurais pu trouver personne qui s'acquittât mieux des soins dont je vous ai chargé."
Clément Auguste et ses compagnons quittèrent Dulmen le 8 avril, à midi. A peine étaient-ils partis qu'Anne Catherine, qui était d'ailleurs épuisée de fatigue à la suite des entretiens prolongés et multipliés des deux derniers, jours, entra dans cet état qui la faisait participer à la passion de Jésus-Christ et aux douleurs de la sainte Vierge dont la fête tombait ce jour-là. A l'heure des vêpres, les blessures de la couronne d'épines saignèrent avec tant d'abondance que le sang coula sur son visage et pénétra à travers le bandage qui entourait sa tête. Dans cet état de souffrance, elle avait fait prier le doyen de venir auprès d'elle, parce qu'on lui avait annoncé la visite du préfet du département qui, dans ces circonstances, ne pouvait lui être que très pénible. Le doyen lui ayant demandé si elle craignait que ce magistrat ne lui adressât des questions auxquelles elle ne saurait pas répondre, elle lui dit" Quant aux questions qu'on peut me faire, je n'ai jamais eu d'inquiétude, car pour cela je me repose sur la promesse faite par le Sauveur à ses disciples qu'ils n'avaient pas à s'inquiéter de ce qu'ils auraient à dire, parce qu'il le leur suggérerait." Le doyen remarqua aussi que soit visage se contractait douloureusement toutes les fois que le derrière de la tête touchait l'oreiller, auquel d'ordinaire elle ne s'appuyait que par les épaule, de sorte, qu'entre la tête et l'oreiller, il y avait un vide de la largeur de la main. Le médecin Krauthausen rapporte aussi, en date de ce même jour : " A deux heures moins un quart, Anne Catherine s'étant plainte, environ trois heures auparavant, de cuissons et de douleurs violentes à la tête, je trouvai le linge qui lui entourait la tête et le cou, ainsi que son visage, couverts en plusieurs endroits d'une quantité de sang, qui avait coulé du front. Après l'avoir lavé avec soin, je remarquai sur le front une infinité de petites ouvertures par lesquelles le sang revint de nouveau sur plusieurs points." Dans la nuit du 8 au 9, les plaies des mains et des pieds avaient abondamment saigné : il en fut de même pendant la journée du 9. Le soir, à huit heures, je trouvai le pouls si petit et si faible, et la malade dans un tel état de prostration que je craignis pour sa vie."
3. Dans cette seconde visite aussi, l'impression que la manière d'être d'Anne Catherine fit sur les supérieurs ecclésiastiques fut très satisfaisante. Ce qui plut surtout au vicaire général, ce fut la prière qu'elle lui fit avec beaucoup d'insistance de ne pas laisser approcher d'elle les curieux qui voudraient la visiter.
(note) : Elle voulait parler de ces jours pendant lesquels les bandages l'avaient fait tellement souffrir. (Note d'Overberg. )
" La sœur Emmerich, écrivit-il le 9 avril à Rensing, m'a tellement remercié d'avoir prescrit la diminution des visites et m'a prié si instamment d'y tenir fortement la main, que cela m'aurait décidé à le faire quand même il n'y aurait pas bien d'autres raisons tirées de la manière de sentir de la sœur Emmerich, et motivées par le désir d'alléger ses souffrances et d'éloigner ce qui trouble son repos. Vous pouvez montrer cet ordre aux personnes ecclésiastiques ou laïques qui seraient assez indiscrètes pour insister malgré vos remontrances. On peut leur faire savoir aussi que la sœur Emmerich consent docilement à recevoir les visites autorisée par vous, mais qu'il ne serai pas juste de lui imposer des visites de ce genre contrairement à sa volonté." Clément Auguste témoigna aussi par écrit combien il était satisfait du doyen lui-même." Votre manière d'agir, dit-il, prouve que je n'aurais pu trouver personne qui s'acquittât mieux des soins dont je vous ai chargé."
Clément Auguste et ses compagnons quittèrent Dulmen le 8 avril, à midi. A peine étaient-ils partis qu'Anne Catherine, qui était d'ailleurs épuisée de fatigue à la suite des entretiens prolongés et multipliés des deux derniers, jours, entra dans cet état qui la faisait participer à la passion de Jésus-Christ et aux douleurs de la sainte Vierge dont la fête tombait ce jour-là. A l'heure des vêpres, les blessures de la couronne d'épines saignèrent avec tant d'abondance que le sang coula sur son visage et pénétra à travers le bandage qui entourait sa tête. Dans cet état de souffrance, elle avait fait prier le doyen de venir auprès d'elle, parce qu'on lui avait annoncé la visite du préfet du département qui, dans ces circonstances, ne pouvait lui être que très pénible. Le doyen lui ayant demandé si elle craignait que ce magistrat ne lui adressât des questions auxquelles elle ne saurait pas répondre, elle lui dit" Quant aux questions qu'on peut me faire, je n'ai jamais eu d'inquiétude, car pour cela je me repose sur la promesse faite par le Sauveur à ses disciples qu'ils n'avaient pas à s'inquiéter de ce qu'ils auraient à dire, parce qu'il le leur suggérerait." Le doyen remarqua aussi que soit visage se contractait douloureusement toutes les fois que le derrière de la tête touchait l'oreiller, auquel d'ordinaire elle ne s'appuyait que par les épaule, de sorte, qu'entre la tête et l'oreiller, il y avait un vide de la largeur de la main. Le médecin Krauthausen rapporte aussi, en date de ce même jour : " A deux heures moins un quart, Anne Catherine s'étant plainte, environ trois heures auparavant, de cuissons et de douleurs violentes à la tête, je trouvai le linge qui lui entourait la tête et le cou, ainsi que son visage, couverts en plusieurs endroits d'une quantité de sang, qui avait coulé du front. Après l'avoir lavé avec soin, je remarquai sur le front une infinité de petites ouvertures par lesquelles le sang revint de nouveau sur plusieurs points." Dans la nuit du 8 au 9, les plaies des mains et des pieds avaient abondamment saigné : il en fut de même pendant la journée du 9. Le soir, à huit heures, je trouvai le pouls si petit et si faible, et la malade dans un tel état de prostration que je craignis pour sa vie."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
4. Le journal du doyen Rensing fait un rapport analogue le 9 avril." Lorsque je la visitai à une heure et demie, le vendredi 9, je fus terrifié : car elle était étendue sur sa couche, sans force, pâle et défigurée, comme un mourant qui est arrivé à son dernier moment : mais, dès que je lui adressai la parole, elle me tendit la main et se plaignit avec une voix qu'on pouvait à peine entendre des affreuses douleurs qu'elle ressentait dans ses plaies. Celles des pieds saignaient si abondamment que le drap de lit en était tout rougi. Elle dit aussi que sa sœur, qui était malade, s'était trouvée si faible pendant la nuit qu'elle avait craint d'être obligée de faire appeler son confesseur : " Cela m'affligea tellement, ajouta Anne Catherine, que je me plaignis du fond du cœur au bon Dieu de la détresse où j'étais et que je le suppliai de secourir ma sœur. Aussitôt après, elle se sentit mieux et reposa un peu, ce qui me causa tant de joie que j'en oubliai mes propres souffrances." Sa sœur, en effet, fut de nouveau en état de vaquer à ses occupations ordinaires.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XXII
VISITES MULTIPLIÉES. TÉMOIGNAGE D'UN MÉDECIN PROTESTANT.
1. La défense faite par Clément Auguste, sur les instantes prières d'Anne Catherine, d'admettre des visites de curieux, quoique renouvelée à plusieurs reprises, n'eut pas le résultat qui eut été si nécessaire à la pauvre malade : car l'affluence des visiteurs alla toujours croissant par suite de nouvelle promptement répandue de l'enquête. Il vint beaucoup de personnes qui ne se laissèrent pas congédier qui mirent en avant des raisons auxquelles la trop grande condescendance du doyen n'opposa pas la résistance qu'il eût fallu : ce furent spécialement des médecins et des personnes de la haute classe qui prétendaient avoir, en quelque sorte, le droit de voir les stigmates. Rensing eut à noter dans son journal les plaintes et les prières souvent répétées avec lesquelles Anne Catherine le conjurait de ne laisser entrer personne." Ne vous inquiétez donc pas, lui dit-elle une fois, si l'on vous fait mauvais visage à cause de cela : Dieu vous compensera de la charité que vous me témoignerez par la." L'inspection de ses stigmates lui était beaucoup plus sensible que les douleurs causées par les plaies, et Rensing était constamment obligé de la tranquilliser, en lui présentant que cette sorte de mortification pourrait être pour elle une source de nouveaux mérites devant Dieu. Cependant elle ne cessa jamais d'être tourmentée à la pensée des visites et, même dans les visions où Dieu la fortifiait et la consolait, elle était troublée par cette pensée. Elle avoua à Rensing que, trois fois déjà, comme elle priait Dieu de lui donner la patience nécessaire pour les supporter, elle avait reçu cette réponse : " Ma grâce te suffit !" Je deviens de plus en plus un objet de dégoût pour moi-même, ajouta-t-elle, à cause du grand bruit que mon histoire fait maintenant de tous côtés : cependant je me console par la pensée que je n'en suis pas cause."
VISITES MULTIPLIÉES. TÉMOIGNAGE D'UN MÉDECIN PROTESTANT.
1. La défense faite par Clément Auguste, sur les instantes prières d'Anne Catherine, d'admettre des visites de curieux, quoique renouvelée à plusieurs reprises, n'eut pas le résultat qui eut été si nécessaire à la pauvre malade : car l'affluence des visiteurs alla toujours croissant par suite de nouvelle promptement répandue de l'enquête. Il vint beaucoup de personnes qui ne se laissèrent pas congédier qui mirent en avant des raisons auxquelles la trop grande condescendance du doyen n'opposa pas la résistance qu'il eût fallu : ce furent spécialement des médecins et des personnes de la haute classe qui prétendaient avoir, en quelque sorte, le droit de voir les stigmates. Rensing eut à noter dans son journal les plaintes et les prières souvent répétées avec lesquelles Anne Catherine le conjurait de ne laisser entrer personne." Ne vous inquiétez donc pas, lui dit-elle une fois, si l'on vous fait mauvais visage à cause de cela : Dieu vous compensera de la charité que vous me témoignerez par la." L'inspection de ses stigmates lui était beaucoup plus sensible que les douleurs causées par les plaies, et Rensing était constamment obligé de la tranquilliser, en lui présentant que cette sorte de mortification pourrait être pour elle une source de nouveaux mérites devant Dieu. Cependant elle ne cessa jamais d'être tourmentée à la pensée des visites et, même dans les visions où Dieu la fortifiait et la consolait, elle était troublée par cette pensée. Elle avoua à Rensing que, trois fois déjà, comme elle priait Dieu de lui donner la patience nécessaire pour les supporter, elle avait reçu cette réponse : " Ma grâce te suffit !" Je deviens de plus en plus un objet de dégoût pour moi-même, ajouta-t-elle, à cause du grand bruit que mon histoire fait maintenant de tous côtés : cependant je me console par la pensée que je n'en suis pas cause."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2. On lit dans le journal de Rensing, à la date du 3 avril :
" Aujourd'hui s'est présenté un visiteur qu'aucune représentation n'a pu arrêter ; c'est le docteur Ruhfus, de Gildhaus, dans le comté de Bentheim. Il désirait vivement être admis auprès d'elle et n'a pas voulu se retirer que je ne lui eusse promis de demander à la malade si elle pouvait se résoudre à recevoir sa visite. Elle fit d'abord des difficultés ; mais, lorsque je lui eus exposé les motifs qui me faisaient désirer qu'elle ne refusât pas cette visite d'un médecin protestant, elle dit qu'elle trouverait bon ce que je déciderais, et alors je fis entrer le docteur. Il se comporta avec beaucoup de discrétion. Il se fit montrer les plaies, s'enquit de tout ce qui lui parut bon à savoir en pareil cas, et, en se retirant, non seulement il remercia la malade de sa complaisance, mais encore il s'exprima touchant ce phénomène d'une manière qui fait honneur à sa droiture. Sitôt que je fus avec lui hors de la chambre, il me dit : " Ce que je viens de voir est bien étonnant. Il ne peut pas ici être question d'imposture ; les sentiments religieux de la personne le disent assez, ainsi que sa physionomie où se manifestent si clairement une pieuse simplicité, une crainte de Dieu partant du fond du cœur et un abandon paisible à la volonté divine ; c'est ce que dit enfin le caractère des plaie : elles-mêmes, au moins pour un homme de l'art. Expliquer naturellement l'origine des plaies par l'imagination, l'induction, l'analogie et toutes les autres causes au moyen desquelles on voudrait en rendre raison, est chose absolument impossible. A mon avis, cela est surnaturel." J'ai cru devoir noter dans mon journal ce jugement d'un homme compétent, dont l'impartialité n'est pas douteuse : je le fais, autant que possible, avec les propres expressions du docteur, d'autant plus qu'avant d'avoir vu par lui-même cet étrange phénomène, il en avait fait des plaisanteries à l'auberge."
3. Comme l'entourage habituel d'Anne Catherine ne comprenait rien à son état extraordinaire, et comme il n'y avait près d'elle personne qui pût la protéger et la garantir quand elle était obsédée de visiteurs curieux, il arrivait fréquemment qu'on lui adressait des questions sottes et indiscrètes auxquelles elle ne pouvait ni ne voulait répondre. Cela n'empêchait pourtant pas que chaque parole échappée par hasard de sa bouche, lorsqu'elle était à l'état contemplant, ne fût avidement recueillie comme une réponse et répétée légèrement, ce qui donnait lieu à toute espèce de propos absurdes dans la petite ville. Un jour que Rensing le faisait remarquer à Anne Catherine, elle profita de cette occasion pour obtenir de lui un moyen infaillible de se défendre contre ces interrogation, curieuses :
" Je vous en prie, lui dit-elle, ordonnez-moi, en vertu de l'obéissance, de ne répondre à aucune question dictée par la curiosité, quand même elle me serait adressée par mon confesseur ou par une de mes anciennes sœurs en religion ; moyennant cela, même pendant mes défaillances, je garderai le silence quand on m'interrogera de la sorte. Alors on ne pourra plus prétendre que j'ai dit, étant en défaillance ; " tel ou tel est dans le purgatoire ; tel autre dans le ciel ; " car Dieu sait tout ce qu'on m'attribue dans ce genre."
Envers son confesseur ordinaire, elle n'avait pas besoin de cette sauvegarde, car lui-même était lié par la défense rigoureuse que lui avaient faite ses supérieurs ecclésiastiques d'adresser aucune question à Anne Catherine lorsqu'elle était en extase. Et Rensing témoigne en ces termes de la fidélité avec laquelle obéissait cet homme consciencieux
" Anne Catherine, dit-il, m'a raconté que, la nuit précédente, elle est tombée en défaillance (en extase) et qu'elle l'a dit à son confesseur, le père Limberg. Mais il lui a répondu qu'elle ne devait pas lui en parler davantage, parce que c'était contraire à la volonté des supérieurs ecclésiastiques ; que si elle avait quelque chose à faire connaître à ce sujet, c'était à moi qu'elle en devait parler." Cela, ajouta-t-elle, m'a fait beaucoup de plaisir : car s'il m'avait fait des questions, je n'aurais plus eu pleine confiance en lui comme confesseur, parce qu'il eût été désobéissant envers l'autorité ecclésiastique."
" Aujourd'hui s'est présenté un visiteur qu'aucune représentation n'a pu arrêter ; c'est le docteur Ruhfus, de Gildhaus, dans le comté de Bentheim. Il désirait vivement être admis auprès d'elle et n'a pas voulu se retirer que je ne lui eusse promis de demander à la malade si elle pouvait se résoudre à recevoir sa visite. Elle fit d'abord des difficultés ; mais, lorsque je lui eus exposé les motifs qui me faisaient désirer qu'elle ne refusât pas cette visite d'un médecin protestant, elle dit qu'elle trouverait bon ce que je déciderais, et alors je fis entrer le docteur. Il se comporta avec beaucoup de discrétion. Il se fit montrer les plaies, s'enquit de tout ce qui lui parut bon à savoir en pareil cas, et, en se retirant, non seulement il remercia la malade de sa complaisance, mais encore il s'exprima touchant ce phénomène d'une manière qui fait honneur à sa droiture. Sitôt que je fus avec lui hors de la chambre, il me dit : " Ce que je viens de voir est bien étonnant. Il ne peut pas ici être question d'imposture ; les sentiments religieux de la personne le disent assez, ainsi que sa physionomie où se manifestent si clairement une pieuse simplicité, une crainte de Dieu partant du fond du cœur et un abandon paisible à la volonté divine ; c'est ce que dit enfin le caractère des plaie : elles-mêmes, au moins pour un homme de l'art. Expliquer naturellement l'origine des plaies par l'imagination, l'induction, l'analogie et toutes les autres causes au moyen desquelles on voudrait en rendre raison, est chose absolument impossible. A mon avis, cela est surnaturel." J'ai cru devoir noter dans mon journal ce jugement d'un homme compétent, dont l'impartialité n'est pas douteuse : je le fais, autant que possible, avec les propres expressions du docteur, d'autant plus qu'avant d'avoir vu par lui-même cet étrange phénomène, il en avait fait des plaisanteries à l'auberge."
3. Comme l'entourage habituel d'Anne Catherine ne comprenait rien à son état extraordinaire, et comme il n'y avait près d'elle personne qui pût la protéger et la garantir quand elle était obsédée de visiteurs curieux, il arrivait fréquemment qu'on lui adressait des questions sottes et indiscrètes auxquelles elle ne pouvait ni ne voulait répondre. Cela n'empêchait pourtant pas que chaque parole échappée par hasard de sa bouche, lorsqu'elle était à l'état contemplant, ne fût avidement recueillie comme une réponse et répétée légèrement, ce qui donnait lieu à toute espèce de propos absurdes dans la petite ville. Un jour que Rensing le faisait remarquer à Anne Catherine, elle profita de cette occasion pour obtenir de lui un moyen infaillible de se défendre contre ces interrogation, curieuses :
" Je vous en prie, lui dit-elle, ordonnez-moi, en vertu de l'obéissance, de ne répondre à aucune question dictée par la curiosité, quand même elle me serait adressée par mon confesseur ou par une de mes anciennes sœurs en religion ; moyennant cela, même pendant mes défaillances, je garderai le silence quand on m'interrogera de la sorte. Alors on ne pourra plus prétendre que j'ai dit, étant en défaillance ; " tel ou tel est dans le purgatoire ; tel autre dans le ciel ; " car Dieu sait tout ce qu'on m'attribue dans ce genre."
Envers son confesseur ordinaire, elle n'avait pas besoin de cette sauvegarde, car lui-même était lié par la défense rigoureuse que lui avaient faite ses supérieurs ecclésiastiques d'adresser aucune question à Anne Catherine lorsqu'elle était en extase. Et Rensing témoigne en ces termes de la fidélité avec laquelle obéissait cet homme consciencieux
" Anne Catherine, dit-il, m'a raconté que, la nuit précédente, elle est tombée en défaillance (en extase) et qu'elle l'a dit à son confesseur, le père Limberg. Mais il lui a répondu qu'elle ne devait pas lui en parler davantage, parce que c'était contraire à la volonté des supérieurs ecclésiastiques ; que si elle avait quelque chose à faire connaître à ce sujet, c'était à moi qu'elle en devait parler." Cela, ajouta-t-elle, m'a fait beaucoup de plaisir : car s'il m'avait fait des questions, je n'aurais plus eu pleine confiance en lui comme confesseur, parce qu'il eût été désobéissant envers l'autorité ecclésiastique."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XXIII
LES DERNIERS JOURS DE LA SEMAINE SAINTE ET LES FÊTES DE PAQUES
1. Anne Catherine se prépara à la communion pascale pour le jeudi saint. Un ardent désir du très saint Sacrement ralluma dans son cœur, comme c'était l'ordinaire, quelques jours auparavant. La pieuse fille qui, depuis l'impression des stigmates était devenue incapable de prendre aucune nourriture terrestre, éprouvait, dans sa préparation à la sainte communion, le sentiment de la faim naturelle à l'égard du pain de vie. Ce fut ainsi, qu'étant entièrement plongée dans la contemplation de ce pain céleste, elle cria plusieurs fois : " J'ai faim, j'ai faim !" Son entourage prit ces paroles à la lettre, et sa sœur, pendant cet état d'extase où elle n'avait pas le sentiment de ce qui se faisait autour d'elle, lui versa dans la bouche deux cuillerées de bouillon d'oseille qu'elle fut forcée de rejeter à l'instant avec de violentes nausées. Elle se trouva tellement mal après cela que le médecin fit venir l'abbé Lambert pour qu'il lui rendit de la force au moyen de la bénédiction sacerdotale. Tout l'entourage savait bien que le même résultat se produisait chaque fois qu'on lui faisait goûter à quelque mets ; mais ni les médecins, ni le confesseur, ni la sœur ne cessaient de renouveler leurs tentatives pour lui faire prendre de la nourriture. Ainsi Krauthausen rapporte, à la date du 11 avril :
" Elle a, sur ma demande, pris, à deux reprises différentes, une cuillerée de bouillon gras ; mais chaque fois elle l'a vomi immédiatement."
Le jour précédent on lui avait également fait prendre, par l'ordre du médecin, quelques gouttes de vin qu'elle avait de même rejetées immédiatement. Le 14 avril, veille du jeudi saint, on fit un nouvel essai avec de la soupe d'eau et de poisson." Mais, dit Krauthausen, elle ne put la garder, et il s'ensuivit aussitôt un vomissement." Toutefois, lorsqu'elle eut reçu la sainte communion, elle fut tellement fortifiée que tout son entourage fut frappé du changement qui en résulta. Et lorsque le doyen la visita à midi, il la trouva à la vérité très faible, parce que la croix imprimée sur la poitrine ne cessait pas de saigner depuis la veille ; mais pourtant elle put lui faire connaître que la consolation qu'elle avait reçue rendait maintenant ses souffrances plus supportables. Elle avait aussi, pendant la nuit précédente imploré auprès de Dieu la guérison de Clara Soentgen, atteinte d'une maladie dangereuse.
LES DERNIERS JOURS DE LA SEMAINE SAINTE ET LES FÊTES DE PAQUES
1. Anne Catherine se prépara à la communion pascale pour le jeudi saint. Un ardent désir du très saint Sacrement ralluma dans son cœur, comme c'était l'ordinaire, quelques jours auparavant. La pieuse fille qui, depuis l'impression des stigmates était devenue incapable de prendre aucune nourriture terrestre, éprouvait, dans sa préparation à la sainte communion, le sentiment de la faim naturelle à l'égard du pain de vie. Ce fut ainsi, qu'étant entièrement plongée dans la contemplation de ce pain céleste, elle cria plusieurs fois : " J'ai faim, j'ai faim !" Son entourage prit ces paroles à la lettre, et sa sœur, pendant cet état d'extase où elle n'avait pas le sentiment de ce qui se faisait autour d'elle, lui versa dans la bouche deux cuillerées de bouillon d'oseille qu'elle fut forcée de rejeter à l'instant avec de violentes nausées. Elle se trouva tellement mal après cela que le médecin fit venir l'abbé Lambert pour qu'il lui rendit de la force au moyen de la bénédiction sacerdotale. Tout l'entourage savait bien que le même résultat se produisait chaque fois qu'on lui faisait goûter à quelque mets ; mais ni les médecins, ni le confesseur, ni la sœur ne cessaient de renouveler leurs tentatives pour lui faire prendre de la nourriture. Ainsi Krauthausen rapporte, à la date du 11 avril :
" Elle a, sur ma demande, pris, à deux reprises différentes, une cuillerée de bouillon gras ; mais chaque fois elle l'a vomi immédiatement."
Le jour précédent on lui avait également fait prendre, par l'ordre du médecin, quelques gouttes de vin qu'elle avait de même rejetées immédiatement. Le 14 avril, veille du jeudi saint, on fit un nouvel essai avec de la soupe d'eau et de poisson." Mais, dit Krauthausen, elle ne put la garder, et il s'ensuivit aussitôt un vomissement." Toutefois, lorsqu'elle eut reçu la sainte communion, elle fut tellement fortifiée que tout son entourage fut frappé du changement qui en résulta. Et lorsque le doyen la visita à midi, il la trouva à la vérité très faible, parce que la croix imprimée sur la poitrine ne cessait pas de saigner depuis la veille ; mais pourtant elle put lui faire connaître que la consolation qu'elle avait reçue rendait maintenant ses souffrances plus supportables. Elle avait aussi, pendant la nuit précédente imploré auprès de Dieu la guérison de Clara Soentgen, atteinte d'une maladie dangereuse.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2. Si ses souffrances étaient devenues plus supportables par la vertu de la sainte communion, elles n'avaient pourtant pas diminué : elles augmentaient plutôt constamment, et, vers le soir du jeudi saint, elles devinrent assez violentes pour lui faire dire qu'il lui semblait que, si elle pouvait mourir, elle mourrait maintenant de l'excès de ses douleurs.
" Dans la nuit d'avant le vendredi saint, vers onze heures, rapporte Rensing, toutes ses plaies commencèrent à saigner, et elles saignaient encore abondamment lorsque je la visitai à huit heures du matin. Il était notamment sorti tant de sang de la plaie du côté que le frisson me saisit lorsque je vis les draps comme teints de sang. Je lui demandai comment elle avait passé la nuit dernière, à quoi elle répondit : " La nuit ne m'a pas semblé longue, car j'ai médité, heure par heure, ce que Notre-Seigneur a souffert pendant cette nuit. Cela m'a donné de la consolation, oh ! Quelle douce consolation ! J'ai eu aussi une courte défaillance et il m'est venu à l'esprit que je devrais prier pour que les signes me fussent enlevés, mais que les douleurs me restassent."
Cette méditation des heures de la Passion était pour Anne Catherine une contemplation des souffrances du Sauveur auxquelles elle participait : c'est pourquoi, pendant ces jours-là, elle fut livrée sans relâche à des tortures indicibles. Chaque nerf de son corps, disait-elle, était torturé par des douleurs cruelles qui se faisaient sentir jusqu'à la pointe des doigts, et elle fut en proie à une fièvre ardente qui la fit souffrir sans relâche jusqu'à minuit, heure où commençait le saint jour de Pâques, lequel tombait le 18 avril. Ce ne fut qu'à trois heures du matin qu'elle se sentit soulagée.
Le samedi saint, les plaies ne saignèrent pas. Ce jour-là, le doyen la trouva très faible et très épuisée : il lui rendit un peu de force par ses exhortations spirituelles, en sorte qu'elle put répondre à quelques-unes de ses questions. Il lui demanda, entre autres choses, pour qui elle avait spécialement prié Dieu dans les derniers, jours, et elle lui fit cette réponse :
" Pour ceux qui se recommandent à mes prières et surtout pour les pécheurs qui ne connaissent pas encore le malheur de leur état. Pour moi-même, je prie ainsi : " Seigneur, que votre volonté se fasse ; faites de moi ce qui vous plaira ; mais faites-moi aussi la grâce de tout endurer et de ne pas vous offenser." Autrefois, j'étais si heureuse d'être à l'église pendant la semaine sainte et les fêtes de Pâques ! Ah ! Que je m'y trouvais bien alors quand j'avais devant les yeux tout ce qui nous rappelle la mort et la résurrection du Sauveur ! Maintenant, il faut rester couchée ici : mais c'est aussi la volonté de Dieu, et par conséquent cela est bon et je me réjouis qu'il en soit ainsi."
" Dans la nuit d'avant le vendredi saint, vers onze heures, rapporte Rensing, toutes ses plaies commencèrent à saigner, et elles saignaient encore abondamment lorsque je la visitai à huit heures du matin. Il était notamment sorti tant de sang de la plaie du côté que le frisson me saisit lorsque je vis les draps comme teints de sang. Je lui demandai comment elle avait passé la nuit dernière, à quoi elle répondit : " La nuit ne m'a pas semblé longue, car j'ai médité, heure par heure, ce que Notre-Seigneur a souffert pendant cette nuit. Cela m'a donné de la consolation, oh ! Quelle douce consolation ! J'ai eu aussi une courte défaillance et il m'est venu à l'esprit que je devrais prier pour que les signes me fussent enlevés, mais que les douleurs me restassent."
Cette méditation des heures de la Passion était pour Anne Catherine une contemplation des souffrances du Sauveur auxquelles elle participait : c'est pourquoi, pendant ces jours-là, elle fut livrée sans relâche à des tortures indicibles. Chaque nerf de son corps, disait-elle, était torturé par des douleurs cruelles qui se faisaient sentir jusqu'à la pointe des doigts, et elle fut en proie à une fièvre ardente qui la fit souffrir sans relâche jusqu'à minuit, heure où commençait le saint jour de Pâques, lequel tombait le 18 avril. Ce ne fut qu'à trois heures du matin qu'elle se sentit soulagée.
Le samedi saint, les plaies ne saignèrent pas. Ce jour-là, le doyen la trouva très faible et très épuisée : il lui rendit un peu de force par ses exhortations spirituelles, en sorte qu'elle put répondre à quelques-unes de ses questions. Il lui demanda, entre autres choses, pour qui elle avait spécialement prié Dieu dans les derniers, jours, et elle lui fit cette réponse :
" Pour ceux qui se recommandent à mes prières et surtout pour les pécheurs qui ne connaissent pas encore le malheur de leur état. Pour moi-même, je prie ainsi : " Seigneur, que votre volonté se fasse ; faites de moi ce qui vous plaira ; mais faites-moi aussi la grâce de tout endurer et de ne pas vous offenser." Autrefois, j'étais si heureuse d'être à l'église pendant la semaine sainte et les fêtes de Pâques ! Ah ! Que je m'y trouvais bien alors quand j'avais devant les yeux tout ce qui nous rappelle la mort et la résurrection du Sauveur ! Maintenant, il faut rester couchée ici : mais c'est aussi la volonté de Dieu, et par conséquent cela est bon et je me réjouis qu'il en soit ainsi."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
3. Le lundi de Pâques, Rensing note qu'il la trouva d'une bonne humeur inaccoutumée. Krauthausen le remarque aussi, à la date de ce jour :
" Le 19, dit-il, elle s'est trouvée, pendant toute la journée, si bien et de si bonne humeur qu'on n'avait pas vu pareille chose durant tout le mois. Cependant elle a continué à ne prendre aucun aliment, si ce n'est là moitié d'une pomme cuite dont elle a seulement sucé le jus et deux gorgées d'eau.
Interrogée par le doyen sur ce qui causait sa bonne humeur, elle répondit :
" J'en suis redevable à la consolation que j'ai éprouvée en méditant sur la Résurrection. Je ne ressens maintenant ni faim, ni soif ; mais je ne sais pas ce que Dieu me prépare. Depuis plusieurs jours, il m'a semblé que plusieurs messieurs étaient chez M. le vicaire général et qu'on avait parlé de moi. Il y eut spécialement un monsieur qui parla de moi, et j'ai une idée vague que celui-là doit venir aussi pour voir mes signes."
Le jeudi saint elle avait dit encore après la sainte communion : " Après Pâques, mon repos doit être troublé. On viendra certainement faire de nouvelles expériences sur moi."
La suite fera voir qu'Anne Catherine, cette fois encore, voyait aussi juste que le 27 mars et le 15 avril, où elle avait dit à Rensing : " J'ai le cœur très serré parce que j'aurai de nouveau beaucoup à souffrir de la part de ces messieurs à cause de mes plaies."
4. Le 13 avril, le vicaire général écrivit à Rensing pour l'engager à chercher une femme de bonne réputation qui pût, pendant deux semaines, rester continuellement le jour et la nuit auprès d'Anne Catherine, observer tout et le rapporter consciencieusement au doyen.
" Dans le cas où vous croiriez pouvoir trouver une telle personne, ajoutait le vicaire général, vous devez préalablement, demander à la sœur Emmerich si cela lui convient, et lui dire qu'elle doit être persuadée que, lorsque j'ordonne ainsi quelque chose de fâcheux et de désagréable pour elle, je le fais uniquement parce que je le crois absolument nécessaire, et parce que je le regarde comme mon devoir et comme un moyen de lui épargner de plus grands désagréments ; dites-lui aussi que, pour agir ainsi, il me faut faire violence à mon cœur."
Le 20 avril, mardi de Pâques, le vicaire général vint de nouveau à Dulmen avec Overberg. Nous donnons textuellement la relation de cette troisième visite d'après les notes écrites de la main du vicaire général.
" Le 19, dit-il, elle s'est trouvée, pendant toute la journée, si bien et de si bonne humeur qu'on n'avait pas vu pareille chose durant tout le mois. Cependant elle a continué à ne prendre aucun aliment, si ce n'est là moitié d'une pomme cuite dont elle a seulement sucé le jus et deux gorgées d'eau.
Interrogée par le doyen sur ce qui causait sa bonne humeur, elle répondit :
" J'en suis redevable à la consolation que j'ai éprouvée en méditant sur la Résurrection. Je ne ressens maintenant ni faim, ni soif ; mais je ne sais pas ce que Dieu me prépare. Depuis plusieurs jours, il m'a semblé que plusieurs messieurs étaient chez M. le vicaire général et qu'on avait parlé de moi. Il y eut spécialement un monsieur qui parla de moi, et j'ai une idée vague que celui-là doit venir aussi pour voir mes signes."
Le jeudi saint elle avait dit encore après la sainte communion : " Après Pâques, mon repos doit être troublé. On viendra certainement faire de nouvelles expériences sur moi."
La suite fera voir qu'Anne Catherine, cette fois encore, voyait aussi juste que le 27 mars et le 15 avril, où elle avait dit à Rensing : " J'ai le cœur très serré parce que j'aurai de nouveau beaucoup à souffrir de la part de ces messieurs à cause de mes plaies."
4. Le 13 avril, le vicaire général écrivit à Rensing pour l'engager à chercher une femme de bonne réputation qui pût, pendant deux semaines, rester continuellement le jour et la nuit auprès d'Anne Catherine, observer tout et le rapporter consciencieusement au doyen.
" Dans le cas où vous croiriez pouvoir trouver une telle personne, ajoutait le vicaire général, vous devez préalablement, demander à la sœur Emmerich si cela lui convient, et lui dire qu'elle doit être persuadée que, lorsque j'ordonne ainsi quelque chose de fâcheux et de désagréable pour elle, je le fais uniquement parce que je le crois absolument nécessaire, et parce que je le regarde comme mon devoir et comme un moyen de lui épargner de plus grands désagréments ; dites-lui aussi que, pour agir ainsi, il me faut faire violence à mon cœur."
Le 20 avril, mardi de Pâques, le vicaire général vint de nouveau à Dulmen avec Overberg. Nous donnons textuellement la relation de cette troisième visite d'après les notes écrites de la main du vicaire général.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
TROISIEME VISITE DU VICAIRE GÉNÉRAL ET D'OVERBERG
(D'après le rapport officiel du vicaire général Droste.)
" Le 20 avril 1813, M. Overberg et moi, nous partîmes de nouveau pour Dulmen où nous arrivâmes vers deux heures de l'après-midi.
" Nous n'avions pas encore fini de dîner qu'un médecin de Stadtlohn, dont le nom m'est inconnu, vint nous trouver et me pria de lui permettre d'examiner l'état de la sœur Emmerich. Je crois que jusque-là le doyen n'avait pas voulu l'y autoriser. Comme je juge utile que des médecins examinent les phénomènes singuliers qui se produisent sur le corps de la sœur Emmerich et que, d'ailleurs, j'avais le dessein de me faire encore montrer toutes les plaies, je promis à ce médecin de le prendre avec moi. Comme nous allions sortir, on m'annonça qu'il y avait là un chirurgien très habile de Gescher, (j'ai également oublié son nom), qui, lui aussi, désirait vivement examiner ces mêmes phénomènes. Je me dis qu'il importait peu qu'il y en eût un de plus ou un de moins, puisque tout devait être vu. Le doyen et M. Krauthausen étaient venus aussi : mais je priai ceux-ci de prévenir la malade de cette visite, parce que je savais bien que la visite de ces étrangers lui serait très désagréable. M. Krauthausen alla d'avance la trouver ; les deux médecins, M. Overberg et moi, nous le suivîmes bientôt et nous arrivâmes vers quatre heures chez la sœur Emmerich. Elle était couchée dans son lit, comme de coutume.
" Alors eut lieu l'examen. Sur la tête, on ne voyait pas de sang, mais seulement quelques piqûres. Les plaies des mains et des pieds, aussi bien à la partie supérieure que dans l'intérieur des mains et sous la plante des pieds, étaient dans leur état ordinaire ; je crois pourtant que la croûte de la main droite avait été traversée par le sang qui avait jailli. Comme, pendant ce séjour que je fis à Dulmen, je visitai souvent la sœur Emmerich, je ne puis me rappeler bien exactement si je trouvai les choses ainsi lors de ma première visite, ou lors d'une visite ultérieure. J'examinai la croûte du sang de la main gauche avec un verre grossissant et je la trouvai très mince et semblable à un épiderme rugueux ou un peu plissé vu ainsi à la loupe. Pendant ce séjour à Dulmen, j'ai aussi examiné une fois avec la loupe la plaie qui se trouve, si je ne me trompe, au-dedans de la main gauche et, dans le sang desséché, j'ai pu apercevoir une cavité ronde, un trou ayant à peu près cette forme. (Voir la planche, à la fin du volume, fig. 1.)
" Cette fois, les croix de la poitrine ne saignaient pas, mais semblaient colorées d'un rouge pâle par le sang qui était apparent à travers l'épiderme. J'examinai de même avec la loupe l'endroit où sont les lignes qui forment les croix, ainsi que la peau environnante, et je pus voir distinctement qu'il n'y avait aucune lésion à la peau : l'épiderme sur les lignes des croix, aussi bien que la peau environnante, à une assez grande distance, était identique à lui-même et paraissait s'écailler un peu quand on le voyait à travers le verre grossissant.
J'examinai avec la loupe la place grisâtre au-dessous de la croix : mais je n'y distinguai pas une forme assez arrêtée pour que je pusse la décrire. Plus en haut, la couleur pâlissait et à peu de distance du centre elle semblait disparaître tout à fait : la partie inférieure était la plus allongée et la plus large ; c'était à peu près comme ceci, si ma mémoire ne me trompe pas. (Voir la planche, fig. 2.)
La marque du coté droit ne saignait pas, mais, dans la partie supérieure, elle était couverte en partie de sang desséché ; on voyait, dans cette direction, une nuance plus foncée, comme pourrait la donner du sang extravasé qui ne serait pas immédiatement sous l'épiderme : l'ensemble peut être à peu près figuré ainsi. (Voir la planche, fig. 3)
" J'examinai avec la loupe la place où il n'y avait pas de sang, mais je ne trouvai nulle part la peau entamée ; toutefois, il se peut que la peau, à cet endroit, eût une coloration un peu rougeâtre ; je ne m'en souviens pas distinctement.
La sœur Emmerich y ayant donné son consentement (note), M. Krauthausen posa sur la plaie de la main gauche un emplâtre composé d'althéa et d'autres ingrédients, qu'il avait étendu sur de la charpie et par là-dessus un emplâtre collant ; il pouvait être environ six heures du soir. Si je ne me trompe, elle se plaignait déjà le soir, quand je la visitai de nouveau, que cette plaie la faisait souffrir plus que les autres.
(D'après le rapport officiel du vicaire général Droste.)
" Le 20 avril 1813, M. Overberg et moi, nous partîmes de nouveau pour Dulmen où nous arrivâmes vers deux heures de l'après-midi.
" Nous n'avions pas encore fini de dîner qu'un médecin de Stadtlohn, dont le nom m'est inconnu, vint nous trouver et me pria de lui permettre d'examiner l'état de la sœur Emmerich. Je crois que jusque-là le doyen n'avait pas voulu l'y autoriser. Comme je juge utile que des médecins examinent les phénomènes singuliers qui se produisent sur le corps de la sœur Emmerich et que, d'ailleurs, j'avais le dessein de me faire encore montrer toutes les plaies, je promis à ce médecin de le prendre avec moi. Comme nous allions sortir, on m'annonça qu'il y avait là un chirurgien très habile de Gescher, (j'ai également oublié son nom), qui, lui aussi, désirait vivement examiner ces mêmes phénomènes. Je me dis qu'il importait peu qu'il y en eût un de plus ou un de moins, puisque tout devait être vu. Le doyen et M. Krauthausen étaient venus aussi : mais je priai ceux-ci de prévenir la malade de cette visite, parce que je savais bien que la visite de ces étrangers lui serait très désagréable. M. Krauthausen alla d'avance la trouver ; les deux médecins, M. Overberg et moi, nous le suivîmes bientôt et nous arrivâmes vers quatre heures chez la sœur Emmerich. Elle était couchée dans son lit, comme de coutume.
" Alors eut lieu l'examen. Sur la tête, on ne voyait pas de sang, mais seulement quelques piqûres. Les plaies des mains et des pieds, aussi bien à la partie supérieure que dans l'intérieur des mains et sous la plante des pieds, étaient dans leur état ordinaire ; je crois pourtant que la croûte de la main droite avait été traversée par le sang qui avait jailli. Comme, pendant ce séjour que je fis à Dulmen, je visitai souvent la sœur Emmerich, je ne puis me rappeler bien exactement si je trouvai les choses ainsi lors de ma première visite, ou lors d'une visite ultérieure. J'examinai la croûte du sang de la main gauche avec un verre grossissant et je la trouvai très mince et semblable à un épiderme rugueux ou un peu plissé vu ainsi à la loupe. Pendant ce séjour à Dulmen, j'ai aussi examiné une fois avec la loupe la plaie qui se trouve, si je ne me trompe, au-dedans de la main gauche et, dans le sang desséché, j'ai pu apercevoir une cavité ronde, un trou ayant à peu près cette forme. (Voir la planche, à la fin du volume, fig. 1.)
" Cette fois, les croix de la poitrine ne saignaient pas, mais semblaient colorées d'un rouge pâle par le sang qui était apparent à travers l'épiderme. J'examinai de même avec la loupe l'endroit où sont les lignes qui forment les croix, ainsi que la peau environnante, et je pus voir distinctement qu'il n'y avait aucune lésion à la peau : l'épiderme sur les lignes des croix, aussi bien que la peau environnante, à une assez grande distance, était identique à lui-même et paraissait s'écailler un peu quand on le voyait à travers le verre grossissant.
J'examinai avec la loupe la place grisâtre au-dessous de la croix : mais je n'y distinguai pas une forme assez arrêtée pour que je pusse la décrire. Plus en haut, la couleur pâlissait et à peu de distance du centre elle semblait disparaître tout à fait : la partie inférieure était la plus allongée et la plus large ; c'était à peu près comme ceci, si ma mémoire ne me trompe pas. (Voir la planche, fig. 2.)
La marque du coté droit ne saignait pas, mais, dans la partie supérieure, elle était couverte en partie de sang desséché ; on voyait, dans cette direction, une nuance plus foncée, comme pourrait la donner du sang extravasé qui ne serait pas immédiatement sous l'épiderme : l'ensemble peut être à peu près figuré ainsi. (Voir la planche, fig. 3)
" J'examinai avec la loupe la place où il n'y avait pas de sang, mais je ne trouvai nulle part la peau entamée ; toutefois, il se peut que la peau, à cet endroit, eût une coloration un peu rougeâtre ; je ne m'en souviens pas distinctement.
La sœur Emmerich y ayant donné son consentement (note), M. Krauthausen posa sur la plaie de la main gauche un emplâtre composé d'althéa et d'autres ingrédients, qu'il avait étendu sur de la charpie et par là-dessus un emplâtre collant ; il pouvait être environ six heures du soir. Si je ne me trompe, elle se plaignait déjà le soir, quand je la visitai de nouveau, que cette plaie la faisait souffrir plus que les autres.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
(note) Overberg s'exprime ainsi dans ses notes : " Après l'examen des plaies par les médecins, on lui demanda si elle trouverait bon qu'on fit un essai pour guérir une des plaies. Elle y consentit très volontiers. Un emplâtre fut aussitôt appliqué sur la main gauche.
" Le 21 avril, M. Krauthausen vint me trouver vers huit heures du matin, et nous allâmes ensemble chez la sœur Emmerich. M Krauthausen enleva l'emplâtre posé sur la plaie de la main afin d'examiner l'état de cette plaie, car la malade se plaignait d'y ressentir des douleurs plus vives et d'avoir passé la nuit sans dormir. La croûte qui s'était formée vint naturellement avec l'emplâtre. Je crois cependant qu'il resta encore tout autour un peu de sang desséché. Mais la plaie était nette et il n'y avait pas trace de suppuration ; on ne voyait que du sang et, à ce qu'il semblait, un liquide aqueux. Nous engageâmes la malade à supporter encore un peu de temps l'emplâtre sur cette même plaie, en lui promettant que, le soir, on l'enlèverait tout à fait, dans le cas où elle en souffrirait comme précédemment.
" Je priai Krauthausen de tourner un peu la malade sur le côté gauche, pour que je pusse voir le stigmate du côté droit à un meilleur jour qu'hier. Je l'examinai encore à la loupe et je ne vis pas de différence notable avec ce que j'avais déjà observé : seulement cet endroit où une nuance plus foncée semblait annoncer la présence du sang extravasé, était moins rouge. Je remarquai aussi avec la loupe, à droite de la partie supérieure du stigmate, quelques égratignures séparées les unes des autres et ressemblant, je ne dirai pas à des déchirures faites avec une aiguille, mais plutôt à des gerçures spontanées de la peau.
" Les croix de la poitrine étaient toutes rouges de sang. Je fis laver le sang à la partie supérieure et je regardai de nouveau avec la loupe : s'il y avait eu une lésion de la peau, je l'aurais certainement remarqué et je m'en souviendrais bien à présent ; mais près de la croix, je trouvai, je crois, une raie à peu près de cette longueur (Voir la planche, fig. 4.) qui avait l'air d'une dépression remplie de sang. A droite, au-dessus du bras gauche de la croix supérieure, je trouvai des égratignures semblables à celles que j'avais observées au-dessus du stigmate du côté (note). Je demandai si par hasard l'épingle qui attachait le mouchoir du cou n'aurait pas pu faire ces égratignures : mais la malade répondit qu'elle mettait toujours cette épingle de manière à ce que la pointe fût tournée en dehors (ce qu'elle fit encore en ma présence).
Maintenant, l'emplâtre dont il a été question plus haut fut remis sur la même plaie. Ce jour-là, je fis plusieurs visites à la malade, mais je trouvai toujours le même état. Pendant le séjour que je fis cette fois à Dulmen, toutes les fois que j'examinai une ou plusieurs des plaies des mains et des pieds, je les trouvai toujours, notamment celles de la partie extérieure, entourées d'une faible rougeur d'inflammation, à ce qu'il me sembla. M. Krauthausen me dit qu'il en était toujours ainsi. Vers midi, je conduisis chez elle M. Schwelling de Munster lequel m'en avait instamment prié : elle y avait consenti, sur ce que je lui avais dit que c'était un très brave homme qui ne demandait pas à voir la marque du côté, ni les croix de la poitrine, ni même, je crois, les plaies des pieds.
(note) " Je dois faire observer ici que souvent les choses se représentent aussi vivement à ma mémoire que si je les voyais réellement : alors je puis dire : " Cela était ainsi." Souvent aussi elles se présentent moins vivement et je sens que c'est une pure réminiscence : alors je blesserais le respect que j'ai pour la vérité en disant : " Cela était ainsi." J'étais ici dans ce dernier cas c'est pourquoi je me suis exprimé comme je l'ai fait." signé Clém. DROSTE.
" Le 21 avril, M. Krauthausen vint me trouver vers huit heures du matin, et nous allâmes ensemble chez la sœur Emmerich. M Krauthausen enleva l'emplâtre posé sur la plaie de la main afin d'examiner l'état de cette plaie, car la malade se plaignait d'y ressentir des douleurs plus vives et d'avoir passé la nuit sans dormir. La croûte qui s'était formée vint naturellement avec l'emplâtre. Je crois cependant qu'il resta encore tout autour un peu de sang desséché. Mais la plaie était nette et il n'y avait pas trace de suppuration ; on ne voyait que du sang et, à ce qu'il semblait, un liquide aqueux. Nous engageâmes la malade à supporter encore un peu de temps l'emplâtre sur cette même plaie, en lui promettant que, le soir, on l'enlèverait tout à fait, dans le cas où elle en souffrirait comme précédemment.
" Je priai Krauthausen de tourner un peu la malade sur le côté gauche, pour que je pusse voir le stigmate du côté droit à un meilleur jour qu'hier. Je l'examinai encore à la loupe et je ne vis pas de différence notable avec ce que j'avais déjà observé : seulement cet endroit où une nuance plus foncée semblait annoncer la présence du sang extravasé, était moins rouge. Je remarquai aussi avec la loupe, à droite de la partie supérieure du stigmate, quelques égratignures séparées les unes des autres et ressemblant, je ne dirai pas à des déchirures faites avec une aiguille, mais plutôt à des gerçures spontanées de la peau.
" Les croix de la poitrine étaient toutes rouges de sang. Je fis laver le sang à la partie supérieure et je regardai de nouveau avec la loupe : s'il y avait eu une lésion de la peau, je l'aurais certainement remarqué et je m'en souviendrais bien à présent ; mais près de la croix, je trouvai, je crois, une raie à peu près de cette longueur (Voir la planche, fig. 4.) qui avait l'air d'une dépression remplie de sang. A droite, au-dessus du bras gauche de la croix supérieure, je trouvai des égratignures semblables à celles que j'avais observées au-dessus du stigmate du côté (note). Je demandai si par hasard l'épingle qui attachait le mouchoir du cou n'aurait pas pu faire ces égratignures : mais la malade répondit qu'elle mettait toujours cette épingle de manière à ce que la pointe fût tournée en dehors (ce qu'elle fit encore en ma présence).
Maintenant, l'emplâtre dont il a été question plus haut fut remis sur la même plaie. Ce jour-là, je fis plusieurs visites à la malade, mais je trouvai toujours le même état. Pendant le séjour que je fis cette fois à Dulmen, toutes les fois que j'examinai une ou plusieurs des plaies des mains et des pieds, je les trouvai toujours, notamment celles de la partie extérieure, entourées d'une faible rougeur d'inflammation, à ce qu'il me sembla. M. Krauthausen me dit qu'il en était toujours ainsi. Vers midi, je conduisis chez elle M. Schwelling de Munster lequel m'en avait instamment prié : elle y avait consenti, sur ce que je lui avais dit que c'était un très brave homme qui ne demandait pas à voir la marque du côté, ni les croix de la poitrine, ni même, je crois, les plaies des pieds.
(note) " Je dois faire observer ici que souvent les choses se représentent aussi vivement à ma mémoire que si je les voyais réellement : alors je puis dire : " Cela était ainsi." Souvent aussi elles se présentent moins vivement et je sens que c'est une pure réminiscence : alors je blesserais le respect que j'ai pour la vérité en disant : " Cela était ainsi." J'étais ici dans ce dernier cas c'est pourquoi je me suis exprimé comme je l'ai fait." signé Clém. DROSTE.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
Vers six heures du soir, nous retournâmes chez elle, M. Krauthausen et moi : elle avait, si je ne me trompe, un peu dormi dans l'après-midi. Le sang paraissait à travers l'emplâtre de la main gauche qu'il avait traversé : on retira cet emplâtre qui était tout imbibé de sang. La plaie avait donc saigné, car, en supposant que, le matin, la croûte assez mince et le sang desséché qui était autour n'eussent pas été enlevés entièrement avec l'emplâtre ; lorsqu'on l'avait retiré, une si petite quantité de sang desséché n'aurait pas suffi pour altérer l'emplâtre à ce degré. Je crois que la plaie supérieure de la main droite a aussi saigné. Il n'y avait dans la plaie de la main gauche aucune trace de suppuration. Comme la malade se plaignait de souffrir beaucoup, nous ne remîmes pas l'emplâtre, comme nous le lui avions promis. Nous eûmes ces ménagements pour elle parce que nous ne croyions pas avoir le droit de torturer une personne à laquelle il n'y a rien à reprocher sous aucun rapport.
Si je le lui avais ordonné, elle aurait sans aucun doute tout supporté ; mais elle craignait de tomber dans l'impatience, et je ne crois pas avoir, en pareil cas, le droit de donner un tel ordre. La malade se plaignit le soir de douleurs de tête ; elle pensait que la tête rendrait du sang.
Le 22, vers huit heures du matin, M. Krauthausem vint chez moi, comme je l'en avais prié ; il avait déjà visité la sœur Emmerich et elle lui avait dit qu'elle croyait que sa tête avait déjà saigné ou saignerait bientôt. M. Krauthausen n'avait pourtant pas vérifié le fait en retirant le linge que la patiente porte autour de la tête. Nous allâmes ensemble chez elle. Elle avait un peu dormi pendant la nuit, si je ne me trompe. Nous trouvâmes que le sang avait coulé du front par-dessous le linge jusqu'au-dessus du nez, mais il s'était desséché. On ôta sa coiffe et le linge qui entourait sa tête ; on vit dans le bonnet, sur la partie postérieure, d'assez larges taches de sang : il y avait spécialement au côté droit de la tête, dans le voisinage de la tempe, une forte tache de sang dans le bonnet et dans les cheveux.
" Il avait été impossible jusqu'à présent, à cause de l'épaisseur plus qu'ordinaire de la chevelure, d'examiner les points par lesquels le sang coule sous les cheveux : Maintenant, elle a consenti à ce qu'on lui coupe les cheveux aussi courts que possible ; cependant on laissera tout autour assez de cheveux pour que le sang qui coulera ne puisse traverser immédiatement ses coiffes et les draps du lit. Elle l'a demandé expressément par des raisons de propreté.
" Le sang qui était sur le nez et sur le front a été lavé par M. Krauthausen, après quoi on a pu voir à l'oeil nu une quantité de petits points saignants, descendant jusqu'à la moitié du front et remontant jusqu'au milieu des cheveux de devant. Les points sont à peu près de cette dimension (voir la planche, fig. 3), les uns plus petits, quelques-uns peut-être plus grands : ils semblent semés irrégulièrement. Je les ai examinés à la loupe et j'ai pu voir spécialement dans un de ces points (qui, si je ne me trompe, sont de petits trous et ne paraissent pas avoir la forme qu'ils auraient s'ils étaient faits avec un corps très pointu) du sang encore liquide : j'ai cru voir aussi très distinctement que c'était bien un petit trou.
Avant mon départ, la malade me dit qu'une personne de Munster était venue la visiter, disant avoir la permission du doyen, mais qu'elle ne savait pas si cela était vrai. Comme je lui répondis, d'après la connaissance que j'en avais, que le doyen avait permis cette visite, elle se montra satisfaite, me remercia cordialement de la diminution du nombre des visites et me pria de les interdire rigoureusement. Je lui parlai à ce propos de la défense que j'avais faite de faire voir les plaies du côté, de la poitrine et des pieds, et je voulus ensuite la préparer à laisser voir ses plaies aux médecins de Stadtlohn et de Gescher mentionnés plus haut, lesquels voulaient revenir dans quinze jours : mais elle dit très nettement : " Non ! Ils ne les reverront pas."
" J'ai été obligé cette fois d'examiner très minutieusement les plaies et le reste, parce que M. Krauthausen ne pouvait rien voir à travers la loupe." En prenant congé d'elle, je lui dis en plaisantant" Quand vous voudrez mourir, vous me le ferez dire d'avance, " à quoi elle répondit qu'elle n'y manquerait pas."
Tel est le rapport du vicaire général.
La patiente n'avait guère le cœur à la plaisanterie. Les épreuves des jours précédents l'avaient mortellement épuisée. Mais sa patience et sa constance se soutinrent jusqu'au bout, en sorte que Clément Auguste, sous l'impression de la paix et du calme de cette âme si forte, sembla oublier un moment les cruelles souffrances qu'elle avait à endurer.
Il prit occasion de cette troisième visite pour adresser au commissaire général de police français les explications officielles qui suivent :
" La fille Emmerich désire uniquement être oubliée du monde pour s'occuper sans distraction des seules choses qui l'intéressent. Elle ne demande rien et n'accepte rien. Elle désire aussi qu'on ne parle pas d'elle. Je suis porté à croire que le monde cessera bientôt de s'occuper d'elle. Quoique je ne puisse pas apercevoir l'ombre d'une imposture, je ne cesserai pourtant pas d'y avoir l'oeil très attentivement."
Si je le lui avais ordonné, elle aurait sans aucun doute tout supporté ; mais elle craignait de tomber dans l'impatience, et je ne crois pas avoir, en pareil cas, le droit de donner un tel ordre. La malade se plaignit le soir de douleurs de tête ; elle pensait que la tête rendrait du sang.
Le 22, vers huit heures du matin, M. Krauthausem vint chez moi, comme je l'en avais prié ; il avait déjà visité la sœur Emmerich et elle lui avait dit qu'elle croyait que sa tête avait déjà saigné ou saignerait bientôt. M. Krauthausen n'avait pourtant pas vérifié le fait en retirant le linge que la patiente porte autour de la tête. Nous allâmes ensemble chez elle. Elle avait un peu dormi pendant la nuit, si je ne me trompe. Nous trouvâmes que le sang avait coulé du front par-dessous le linge jusqu'au-dessus du nez, mais il s'était desséché. On ôta sa coiffe et le linge qui entourait sa tête ; on vit dans le bonnet, sur la partie postérieure, d'assez larges taches de sang : il y avait spécialement au côté droit de la tête, dans le voisinage de la tempe, une forte tache de sang dans le bonnet et dans les cheveux.
" Il avait été impossible jusqu'à présent, à cause de l'épaisseur plus qu'ordinaire de la chevelure, d'examiner les points par lesquels le sang coule sous les cheveux : Maintenant, elle a consenti à ce qu'on lui coupe les cheveux aussi courts que possible ; cependant on laissera tout autour assez de cheveux pour que le sang qui coulera ne puisse traverser immédiatement ses coiffes et les draps du lit. Elle l'a demandé expressément par des raisons de propreté.
" Le sang qui était sur le nez et sur le front a été lavé par M. Krauthausen, après quoi on a pu voir à l'oeil nu une quantité de petits points saignants, descendant jusqu'à la moitié du front et remontant jusqu'au milieu des cheveux de devant. Les points sont à peu près de cette dimension (voir la planche, fig. 3), les uns plus petits, quelques-uns peut-être plus grands : ils semblent semés irrégulièrement. Je les ai examinés à la loupe et j'ai pu voir spécialement dans un de ces points (qui, si je ne me trompe, sont de petits trous et ne paraissent pas avoir la forme qu'ils auraient s'ils étaient faits avec un corps très pointu) du sang encore liquide : j'ai cru voir aussi très distinctement que c'était bien un petit trou.
Avant mon départ, la malade me dit qu'une personne de Munster était venue la visiter, disant avoir la permission du doyen, mais qu'elle ne savait pas si cela était vrai. Comme je lui répondis, d'après la connaissance que j'en avais, que le doyen avait permis cette visite, elle se montra satisfaite, me remercia cordialement de la diminution du nombre des visites et me pria de les interdire rigoureusement. Je lui parlai à ce propos de la défense que j'avais faite de faire voir les plaies du côté, de la poitrine et des pieds, et je voulus ensuite la préparer à laisser voir ses plaies aux médecins de Stadtlohn et de Gescher mentionnés plus haut, lesquels voulaient revenir dans quinze jours : mais elle dit très nettement : " Non ! Ils ne les reverront pas."
" J'ai été obligé cette fois d'examiner très minutieusement les plaies et le reste, parce que M. Krauthausen ne pouvait rien voir à travers la loupe." En prenant congé d'elle, je lui dis en plaisantant" Quand vous voudrez mourir, vous me le ferez dire d'avance, " à quoi elle répondit qu'elle n'y manquerait pas."
Tel est le rapport du vicaire général.
La patiente n'avait guère le cœur à la plaisanterie. Les épreuves des jours précédents l'avaient mortellement épuisée. Mais sa patience et sa constance se soutinrent jusqu'au bout, en sorte que Clément Auguste, sous l'impression de la paix et du calme de cette âme si forte, sembla oublier un moment les cruelles souffrances qu'elle avait à endurer.
Il prit occasion de cette troisième visite pour adresser au commissaire général de police français les explications officielles qui suivent :
" La fille Emmerich désire uniquement être oubliée du monde pour s'occuper sans distraction des seules choses qui l'intéressent. Elle ne demande rien et n'accepte rien. Elle désire aussi qu'on ne parle pas d'elle. Je suis porté à croire que le monde cessera bientôt de s'occuper d'elle. Quoique je ne puisse pas apercevoir l'ombre d'une imposture, je ne cesserai pourtant pas d'y avoir l'oeil très attentivement."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
XXIV
LE MEDECIN KRAUTHAUSEN ET LE DOYEN RENSING COMMENCENT À PERDRE PATIENCE
1. Comme le résultat des observations si exactes et si minutieuses du vicaire général concordait avec la conviction déjà existante chez les médecins que les stigmates n'avaient pas pu être produits artificiellement et qu'ils ne pouvaient pas non plus être entretenus par des moyens artificiels, le doyen Rensing se livra avec confiance à l'espoir que l'enquête allait être déclarée suffisante. Krauthausen y comptait encore plus fermement et il était décidé à ne pas continuer ses visites plus longtemps. Ayant été autrefois médecin du couvent, il avait si bien appris à connaître Anne Catherine et son entourage que la pensée d'une imposture ou d'une illusion ne pouvait pas lui venir à l'esprit. Il s'était chargé, par déférence pour le vicaire général, de l'enquête médicale et de la rédaction de rapports journaliers. Les stigmates étaient pour lui un fait certain, incontestable, qu'il ne pouvait cependant s'expliquer d'après son expérience et ses connaissances comme médecin ; car, non seulement ils échappaient à toute action curative, mais ils présentaient chaque jour à l'observateur des symptômes qui ne lui permettaient pas de les considérer comme une forme particulière de maladie naturelle. Il avait vu, jour par jour, les douleurs insolites que les plaies occasionnaient chez Anne Catherine ; c'est pourquoi il répugnait à sa ferme conviction de l'innocence de la pieuse fille, comme à la sympathie naturelle qu'elle lui inspirait, de la voir soumise plus longtemps aux tortures vie de l'enquête. En outre ; il lui fallait, comme au docteur Wesener, subir les mépris de ses confrères incrédules qui le prenaient en pitié parce qu'il ne pouvait pas découvrir la fraude, et il en voulait presque à Anne Catherine de n'avoir pas su mieux cacher les phénomènes extraordinaires qui s'étaient produits en elle et échapper à une enquête qui pour lui n'avait d'autre conséquence que de la fatigue et des ennuis.
LE MEDECIN KRAUTHAUSEN ET LE DOYEN RENSING COMMENCENT À PERDRE PATIENCE
1. Comme le résultat des observations si exactes et si minutieuses du vicaire général concordait avec la conviction déjà existante chez les médecins que les stigmates n'avaient pas pu être produits artificiellement et qu'ils ne pouvaient pas non plus être entretenus par des moyens artificiels, le doyen Rensing se livra avec confiance à l'espoir que l'enquête allait être déclarée suffisante. Krauthausen y comptait encore plus fermement et il était décidé à ne pas continuer ses visites plus longtemps. Ayant été autrefois médecin du couvent, il avait si bien appris à connaître Anne Catherine et son entourage que la pensée d'une imposture ou d'une illusion ne pouvait pas lui venir à l'esprit. Il s'était chargé, par déférence pour le vicaire général, de l'enquête médicale et de la rédaction de rapports journaliers. Les stigmates étaient pour lui un fait certain, incontestable, qu'il ne pouvait cependant s'expliquer d'après son expérience et ses connaissances comme médecin ; car, non seulement ils échappaient à toute action curative, mais ils présentaient chaque jour à l'observateur des symptômes qui ne lui permettaient pas de les considérer comme une forme particulière de maladie naturelle. Il avait vu, jour par jour, les douleurs insolites que les plaies occasionnaient chez Anne Catherine ; c'est pourquoi il répugnait à sa ferme conviction de l'innocence de la pieuse fille, comme à la sympathie naturelle qu'elle lui inspirait, de la voir soumise plus longtemps aux tortures vie de l'enquête. En outre ; il lui fallait, comme au docteur Wesener, subir les mépris de ses confrères incrédules qui le prenaient en pitié parce qu'il ne pouvait pas découvrir la fraude, et il en voulait presque à Anne Catherine de n'avoir pas su mieux cacher les phénomènes extraordinaires qui s'étaient produits en elle et échapper à une enquête qui pour lui n'avait d'autre conséquence que de la fatigue et des ennuis.
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
2. Comme le vicaire général avait quitté Dulmen sans s'expliquer d'une manière précise, Krauthausen n'attendit pas une décision ultérieure, et déclara, en envoyant son dernier rapport daté du 26 avril, qu'il se considérait comme déchargé de la mission qui lui avait été confiée. Mais la prompte décision qu'il désirait et que Rensing ne désirait pas moins que lui ne pouvait pas encore être prise par le vicaire général, malgré les observations qu'il avait faites lui-même avec tant de soin et malgré le jugement favorable des trois médecins, parce qu'Overberg n'avait pas encore fini de prendre ses informations sur la vie intérieure d'Anne Catherine. Bien que le vicaire général, à chacune de ses visites et dans chaque entretien qu'il avait eu avec elle, n'eût reçu que des impressions qui fortifiaient de plus en plus sa conviction que des faveurs extraordinaires lui avaient été accordées, c'était un homme trop judicieux et trop prudent pour se hasarder à rendre un jugement final avant d'avoir pesé mûrement les conclusions et les rapports de tous ceux qui avaient pris part à l'enquête. Il laissa donc Overberg à Dulmen quelques jours encore, afin qu'il pût compléter ses informations autant que le permettraient les forces d'Anne Catherine. Mais, en attendant que tous les renseignements eussent passé sous ses yeux et l'eussent mis en mesure de rendre sa dernière décision, il voulait que le projet formé, dès le 13 avril, de placer Anne Catherine sous la surveillance d'une femme digne de confiance, fût mis à exécution. Il regardait cette mesure comme nécessaire pour prévenir le reproche qui pourrait lui être fait de n'avoir pas employé tous les moyens que la prévoyance et la prudence paraissaient prescrire.
3. Mais Rensing, qui ne pouvait trouver la personne capable de remplir cet office aussi promptement que son impatience l'eût désiré, fit le 27 avril, au vicaire général, une nouvelle proposition pour laquelle il s'était assuré d'avance du contentement d'Anne Catherine. Voici ce qu'il lui écrivit :
" M. Krauthausen commence à être fatigué des fréquentes visites qu'il lui faut faire, et il m'a dit hier qu'il ne continuerait ses observations et ses rapports que jusqu'à la fin de ce mois. La malade aussi s'aperçoit bien qu'il est excédé de cette affaire et il en résulte qu'elle ne le voit venir qu'avec un sentiment d'effroi. Pour rendre le repos à la pauvre fille, qui du reste n'en trouvera guère tant qu'elle vivra, et en même temps pour donner satisfaction aux critiques dont il est permis de tenir compte, le mieux serait, suivant l'opinion de tous les gens sages, que deux ou trois médecins, à tour de rôle, restassent jour et nuit près d'elle et l'observassent pendant une semaine. Cette opinion était aussi celle du médecin protestant, le docteur Ruhfus, qui est revenu ici ce matin et m'a encore déclaré que les phénomènes lui paraissaient surnaturels. La sœur Emmerich acceptera volontiers cet arrangement.
Deux jours après, Rensing reproduisit cette proposition et y ajouta, en ce qui le concernait, la demande de pleins pouvoirs de l'autorité épiscopale pour essayer ce qui lui paraîtrait utile. Le sévère vicaire général répondit, en peu de mots
" D'abord, je crois toujours que le mieux serait la surveillance de quinze jours par une personne du sexe. Notre mission n'est pas de mettre la chose tellement hors de doute que ceux qui ont peur de la vérité ne puissent plus trouver des objections : ce serait une tâche ingrate, et la peine qu'on y emploierait resterait infructueuse. Qu'y a-t-il réellement là dans le corps et dans l'âme ? Comment ce qui y est a-t-il pris naissance ? Comment Anne Catherine est-elle devenue ce qu'elle est ? Telles sont les questions auxquelles nous avons à répondre et cela de manière à ce que la chose soit éclaircie pour nous et pour tous les hommes sensés, non par des faits isolés, mais par l'ensemble qui résulte du rapprochement de toutes les circonstances. Toutefois, dans l'application des moyens, nous ne devons pas contrevenir aux règles de la justice et de la charité, et un soupçon en l'air fondé uniquement sur une possibilité, ne mérite pas qu'on en tienne un compte particulier."
3. Mais Rensing, qui ne pouvait trouver la personne capable de remplir cet office aussi promptement que son impatience l'eût désiré, fit le 27 avril, au vicaire général, une nouvelle proposition pour laquelle il s'était assuré d'avance du contentement d'Anne Catherine. Voici ce qu'il lui écrivit :
" M. Krauthausen commence à être fatigué des fréquentes visites qu'il lui faut faire, et il m'a dit hier qu'il ne continuerait ses observations et ses rapports que jusqu'à la fin de ce mois. La malade aussi s'aperçoit bien qu'il est excédé de cette affaire et il en résulte qu'elle ne le voit venir qu'avec un sentiment d'effroi. Pour rendre le repos à la pauvre fille, qui du reste n'en trouvera guère tant qu'elle vivra, et en même temps pour donner satisfaction aux critiques dont il est permis de tenir compte, le mieux serait, suivant l'opinion de tous les gens sages, que deux ou trois médecins, à tour de rôle, restassent jour et nuit près d'elle et l'observassent pendant une semaine. Cette opinion était aussi celle du médecin protestant, le docteur Ruhfus, qui est revenu ici ce matin et m'a encore déclaré que les phénomènes lui paraissaient surnaturels. La sœur Emmerich acceptera volontiers cet arrangement.
Deux jours après, Rensing reproduisit cette proposition et y ajouta, en ce qui le concernait, la demande de pleins pouvoirs de l'autorité épiscopale pour essayer ce qui lui paraîtrait utile. Le sévère vicaire général répondit, en peu de mots
" D'abord, je crois toujours que le mieux serait la surveillance de quinze jours par une personne du sexe. Notre mission n'est pas de mettre la chose tellement hors de doute que ceux qui ont peur de la vérité ne puissent plus trouver des objections : ce serait une tâche ingrate, et la peine qu'on y emploierait resterait infructueuse. Qu'y a-t-il réellement là dans le corps et dans l'âme ? Comment ce qui y est a-t-il pris naissance ? Comment Anne Catherine est-elle devenue ce qu'elle est ? Telles sont les questions auxquelles nous avons à répondre et cela de manière à ce que la chose soit éclaircie pour nous et pour tous les hommes sensés, non par des faits isolés, mais par l'ensemble qui résulte du rapprochement de toutes les circonstances. Toutefois, dans l'application des moyens, nous ne devons pas contrevenir aux règles de la justice et de la charité, et un soupçon en l'air fondé uniquement sur une possibilité, ne mérite pas qu'on en tienne un compte particulier."
Re: Vie d'Anne Catherine Emmerich - Tome1
4. On ne doit pas trouver étrange que Rensing désirât si vivement la clôture de l'enquête : il devenait tous les jours plus pénible pour lui d'être le spectateur du cruel martyre d'Anne Catherine sans pouvoir lui offrir d'autre assistance ni d'autre consolation que la simple mention des ordres et des prescriptions de l'autorité ecclésiastique. En outre, l'importunité et la curiosité sans retenue des étrangers, plus nombreux qu'à l'ordinaire à l'époque des confessions, pascales, qui désiraient voir Anne Catherine, lui occasionnaient non seulement des dérangements très désagréables, mais assez fréquemment des conflits irritants qui, pour un homme aussi poli et aussi régulier dans ses habitudes, devenaient de plus en plus incompatibles avec ses devoirs de pasteur des âmes. Dans ses visites journalières, il s'était scrupuleusement fait rendre compte par Anne Catherine de tout ce qui lui arrivait à l'intérieur comme à l'extérieur : il avait envoyé les rapports les plus exacts sur tout cela et porté en outre à la connaissance du vicaire général une multitude de faits qui, selon sa conviction bien arrêtée, devaient lever toute espèce de doute quant à la réalité des phénomènes observés. C'est pourquoi il ne voyait aucune raison qui pût justifier à ses yeux la prolongation d'une enquête si fatigante pour lui et si douloureuse pour Anne Catherine. Avant de poursuivre le récit de la continuation de l'enquête, nous devons prendre une connaissance plus détaillée des notes de Rensing, parce qu'il s'y trouve beaucoup de traits qui font de mieux en mieux connaître Anne Catherine et les voies par lesquelles Dieu la conduisait.
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