Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BIENHEUREUX
BASILE HOPKO
prêtre, évêque
1904-1976
NOTICE BIOGRAPHIQUE
« Monseigneur Vasil’ n’a jamais renié son attachement à l’Église catholique et au Pape. » (Jean-Paul II)
Vasil' (Basile) Hopko naît le 21 avril 1904 en Slovaquie, et il est baptisé dans l'église grecque-catholique.
Après une guérison providentielle, il fait vœu d’embrasser le sacerdoce et il est ordonné prêtre à Presov en 1929 par Mgr Pavol Gojdic , (futur martyr lui aussi, béatifié par Jean Paul II en 2001).
Le Père Vasil est d’abord curé à Prague.
De retour à Presov en 1936, il est nommé directeur spirituel du séminaire.
Entre temps, il reprend ses études et obtient une maîtrise en théologie, en avril 1940, à l'Université de Bratislava.
Au cours de la guerre il est le secrétaire personnel de l'Évêque et professeur de théologie morale et pastorale à la faculté de théologie de Presov.
Rédacteur d’un mensuel, il écrit de nombreux articles et livres de spiritualité. En 1947.il est nommé évêque auxiliaire de Presov.
Au cours des années 1949 et 1950, le parti communiste intensifie sa persécution envers les évêques du diocèse dans le cadre d'un projet visant à la disparition de l'Eglise grecque-catholique.
Le 27 mars 1950, Mgr P. Gojdic et Mgr Hopko sont placés en isolement.
A partir de ce moment, commence une période de persécution pour le clergé et les fidèles de l'Eglise grecque-catholique.
Pendant 26 ans, Mgr Hopko va subir un terrible emprisonnement et de dures persécutions: résidence surveillée; internement dans un monastère; condamnation à une peine de détention de 15 ans pour haute trahison.
Sur cette période, voici ce qu’il dit de positif :
« J’ai dû supporter beaucoup de moments difficiles que je ne souhaiterais pas même à mes pires ennemis.
Néanmoins je considère mes jours de prison comme une éducation importante pour l’humilité.
En prison, j’ai appris beaucoup de choses importantes, comme d’être utile aux autres dans leurs besoins.
La prison en soi n’est un endroit si terrible après tout.
Ce qui est effrayant, c’est qu’on est forcé de rester, vu qu’on est enfermé avec toutes sortes de gens : criminels, espions, et autres personnes au caractère bizarre. »
Quant au négatif, le Pape le décrit en détail ainsi :
« Il a affronté un procès injuste et une condamnation inique, la torture, l'humiliation, la solitude, la mort.
Ainsi, la Croix est devenue pour lui le chemin qui l’a conduit à la vie, source de force et d'espérance, preuve d'amour pour Dieu et pour l'homme. »
Après sa libération pour motif de santé, malade et épuisé, physiquement et psychologiquement, il habite chez un prêtre grec-catholique (1964), puis dans une maison de repos pour prêtres âgés.
Finalement sa condamnation est annulée, mais sans réhabilitation.
Il meurt le 23 juillet 1976 à Presov.
Son autopsie révèlera une forte présence d'arsenic dans ses os, le poison ayant été administré, selon les analyses, à faibles doses pendant une longue durée.
Aussi est-il considéré comme un des nombreux martyrs du communisme.
Béatifié le 14 septembre 2003 à Bratislava par Jean Paul II
BASILE HOPKO
prêtre, évêque
1904-1976
NOTICE BIOGRAPHIQUE
« Monseigneur Vasil’ n’a jamais renié son attachement à l’Église catholique et au Pape. » (Jean-Paul II)
Vasil' (Basile) Hopko naît le 21 avril 1904 en Slovaquie, et il est baptisé dans l'église grecque-catholique.
Après une guérison providentielle, il fait vœu d’embrasser le sacerdoce et il est ordonné prêtre à Presov en 1929 par Mgr Pavol Gojdic , (futur martyr lui aussi, béatifié par Jean Paul II en 2001).
Le Père Vasil est d’abord curé à Prague.
De retour à Presov en 1936, il est nommé directeur spirituel du séminaire.
Entre temps, il reprend ses études et obtient une maîtrise en théologie, en avril 1940, à l'Université de Bratislava.
Au cours de la guerre il est le secrétaire personnel de l'Évêque et professeur de théologie morale et pastorale à la faculté de théologie de Presov.
Rédacteur d’un mensuel, il écrit de nombreux articles et livres de spiritualité. En 1947.il est nommé évêque auxiliaire de Presov.
Au cours des années 1949 et 1950, le parti communiste intensifie sa persécution envers les évêques du diocèse dans le cadre d'un projet visant à la disparition de l'Eglise grecque-catholique.
Le 27 mars 1950, Mgr P. Gojdic et Mgr Hopko sont placés en isolement.
A partir de ce moment, commence une période de persécution pour le clergé et les fidèles de l'Eglise grecque-catholique.
Pendant 26 ans, Mgr Hopko va subir un terrible emprisonnement et de dures persécutions: résidence surveillée; internement dans un monastère; condamnation à une peine de détention de 15 ans pour haute trahison.
Sur cette période, voici ce qu’il dit de positif :
« J’ai dû supporter beaucoup de moments difficiles que je ne souhaiterais pas même à mes pires ennemis.
Néanmoins je considère mes jours de prison comme une éducation importante pour l’humilité.
En prison, j’ai appris beaucoup de choses importantes, comme d’être utile aux autres dans leurs besoins.
La prison en soi n’est un endroit si terrible après tout.
Ce qui est effrayant, c’est qu’on est forcé de rester, vu qu’on est enfermé avec toutes sortes de gens : criminels, espions, et autres personnes au caractère bizarre. »
Quant au négatif, le Pape le décrit en détail ainsi :
« Il a affronté un procès injuste et une condamnation inique, la torture, l'humiliation, la solitude, la mort.
Ainsi, la Croix est devenue pour lui le chemin qui l’a conduit à la vie, source de force et d'espérance, preuve d'amour pour Dieu et pour l'homme. »
Après sa libération pour motif de santé, malade et épuisé, physiquement et psychologiquement, il habite chez un prêtre grec-catholique (1964), puis dans une maison de repos pour prêtres âgés.
Finalement sa condamnation est annulée, mais sans réhabilitation.
Il meurt le 23 juillet 1976 à Presov.
Son autopsie révèlera une forte présence d'arsenic dans ses os, le poison ayant été administré, selon les analyses, à faibles doses pendant une longue durée.
Aussi est-il considéré comme un des nombreux martyrs du communisme.
Béatifié le 14 septembre 2003 à Bratislava par Jean Paul II
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BEATRIZ DA SILVA MENEZES
religieuse, fondatrice, sainte
1424-1490
Beatriz da Silva, sœur du bienheureux Amadeu da Silva, était issue d’une noble famille portugaise, apparenté à la royauté du pays.
Elle naquit en 1424 à Ceuta — ville du Maroc qui était alors sous la domination des lusitaniens.
Elle accompagna l’infante Isabelle de Portugal, comme dame d’honneur, lorsque celle-ci, en 1447, épousa Jean II de Castille.
Sa beauté et sa vertu attirèrent les nobles castillans qui se disputaient son amitié et son amour, ce qui excita la jalousie de la reine Isabelle qui la malmena, et finit par l’enfermer, pendant trois jours, dans une armoire, au péril de sa vie.
Une fois libérée, il fit le vœu de chasteté et celui de vivre cachée, puis se rendit à Tolède ; la tradition raconte que pendant ce voyage elle eut la vision de saint François d’Assise et de saint Antoine de Lisbonne son compatriote.
Arrivée à Tolède et entra dans le couvent des cisterciennes de saint Dominique, où elle vécut pendant près de 30 ans.
Mais déjà, depuis un certain temps, grandissait en elle le désir de fonder un nouvel Ordre religieux en l’honneur de Immaculée Conception.
Pour ce faire, elle obtint l’appui d’Isabelle la Catholique (1451-1504), fille de Jean II et depuis 1474 reine de Castille et d’Aragon ; la reine lui offrit son palais de Galiana à Tolède, avec l’église Sainte-Foi, qui lui était annexe.
En 1484 elle déménagea dans sa nouvelle demeure, accompagnée par douze autres compagnes, donnant ainsi naissance à la nouvelle Congrégation des Clarisses Conceptionistes, dont la Règle fut écrite par Beatriz elle-même et approuvée par le Pape Innocent VIII, le 30 avril 1489.
Après avoir reçu l’habit et prononcé les vœux religieux, elle s’éteignit dans le Seigneur, à Tolède, le 1er septembre 1490, à la veille de la profession religieuse du premier groupe du nouvel Ordre.
Elle fut en quelque sorte l’initiatrice du culte et de la théologie du dogme de l’Immaculée Conception, proclamé quelques quatre cents ans plus tard par Pie IX.
Spontanément après sa mort, son culte se rependit non seulement parmi les franciscains, mais aussi sur la péninsule ibérique.
Elle fut béatifiée le 28 juillet 1926 et canonisée par le pape Paul VI, le 3 octobre 1976.
Elle est fêtée le 1er septembre.
religieuse, fondatrice, sainte
1424-1490
Beatriz da Silva, sœur du bienheureux Amadeu da Silva, était issue d’une noble famille portugaise, apparenté à la royauté du pays.
Elle naquit en 1424 à Ceuta — ville du Maroc qui était alors sous la domination des lusitaniens.
Elle accompagna l’infante Isabelle de Portugal, comme dame d’honneur, lorsque celle-ci, en 1447, épousa Jean II de Castille.
Sa beauté et sa vertu attirèrent les nobles castillans qui se disputaient son amitié et son amour, ce qui excita la jalousie de la reine Isabelle qui la malmena, et finit par l’enfermer, pendant trois jours, dans une armoire, au péril de sa vie.
Une fois libérée, il fit le vœu de chasteté et celui de vivre cachée, puis se rendit à Tolède ; la tradition raconte que pendant ce voyage elle eut la vision de saint François d’Assise et de saint Antoine de Lisbonne son compatriote.
Arrivée à Tolède et entra dans le couvent des cisterciennes de saint Dominique, où elle vécut pendant près de 30 ans.
Mais déjà, depuis un certain temps, grandissait en elle le désir de fonder un nouvel Ordre religieux en l’honneur de Immaculée Conception.
Pour ce faire, elle obtint l’appui d’Isabelle la Catholique (1451-1504), fille de Jean II et depuis 1474 reine de Castille et d’Aragon ; la reine lui offrit son palais de Galiana à Tolède, avec l’église Sainte-Foi, qui lui était annexe.
En 1484 elle déménagea dans sa nouvelle demeure, accompagnée par douze autres compagnes, donnant ainsi naissance à la nouvelle Congrégation des Clarisses Conceptionistes, dont la Règle fut écrite par Beatriz elle-même et approuvée par le Pape Innocent VIII, le 30 avril 1489.
Après avoir reçu l’habit et prononcé les vœux religieux, elle s’éteignit dans le Seigneur, à Tolède, le 1er septembre 1490, à la veille de la profession religieuse du premier groupe du nouvel Ordre.
Elle fut en quelque sorte l’initiatrice du culte et de la théologie du dogme de l’Immaculée Conception, proclamé quelques quatre cents ans plus tard par Pie IX.
Spontanément après sa mort, son culte se rependit non seulement parmi les franciscains, mais aussi sur la péninsule ibérique.
Elle fut béatifiée le 28 juillet 1926 et canonisée par le pape Paul VI, le 3 octobre 1976.
Elle est fêtée le 1er septembre.
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
SAINTE
BENEDETTA CAMBIAGIO FRASSINELLO
épouse, religieuse, fondatrice
(1791 – 1858)
NOTICE BIOGRAPHIQUE
En Bénédicte Cambiagio Frassinello, l'Église nous donne l'exemple d'une Sainte qui fut à la fois épouse, mère, religieuse et fondatrice.
Elle se laissa conduire par l'Esprit à travers ses différentes expériences: celle du mariage, celle d'éducatrice et celle de la consécration religieuse jusqu'à créer un Institut qu'elle a dirigé, cas unique dans l'hagiographie chrétienne, avec la collaboration généreuse et discrète de son mari.
Bénédicte Cambiagio Frassinello est née à Langasco (Gênes) le 2 octobre 1791 de Joseph et Françoise Ghiglione et elle a été baptisée deux jours plus tard. Quand elle était encore une petite fille sa famille déménagea à Pavia.
Sa jeunesse
Ses parents lui donnent une profonde éducation chrétienne qui enracine dans son âme les principes de la foi et fonde son caractère à la volonté et à la persévérance.
À l'âge de 20 ans elle a une forte expérience intérieure qui fait grandir son amour pour la prière et la pénitence et tout particulièrement, son désir de tout abandonner pour se consacrer entièrement à Dieu.
Pourtant le 7 février 1816 elle se marie avec Jean Baptiste Frassinello, un jeune homme de sa région qui avait lui aussi déménagé avec sa famille à Vigevano.
Épouse et sœur exemplaire
Le chemin de Bénédicte à la recherche de la volonté de Dieu fut assez difficile, poussée par cet élan intérieur à la vie virginale qu'elle avait cultivée depuis son adolescence.
Elle vit dans le mariage deux ans, après lesquels elle eut la joie de connaître, l'aspect le plus sublime et le plus profond de la virginité spirituelle.
Et ce d'un commun accord avec son mari qui attiré par la sainteté de Bénédicte, décida de vivre à ses côtés en la considérant désormais comme sa sœur.
Ils s'occupèrent ensemble, d'un seul amour, d'une des sœurs de Bénédicte, Marie, atteinte d'un cancer à l'estomac et qui vivait chez eux.
Bénédicte et Jean Baptiste Frassinello firent ainsi l'expérience d'une maternité et d'une paternité spirituelle dans la fidélité et dans l'amour conjugal sublimé.
En 1825 à la mort de Marie, Jean Baptiste entre dans la conmunauté de Somaschi et Bénédicte dans la communauté des Ursulines à Capriolo.
L'amour conjugal exclusivement consacré à Dieu
En 1826, en raison de sa santé, Bénédicte revient à Pavia.
Guérie miraculeusement par Saint Jérôme Emiliani, elle décide de s'occuper des jeunes filles avec l'approbation de l'Évêque Mgr Louis Tosi.
Ayant besoin d'aide, que son père refuse de lui donner, l'Évêque appelle de nouveau Jean Baptiste, qui quitte le noviciat et retourne chez son épouse-sœur, en renouvelant avec elle le vœu de parfaite chasteté devant l'Évêque.
Tous les deux se dédient généreusement à l'accueil et à l'éducation humaine et chrétienne des jeunes filles pauvres et abandonnées.
Éducatrice
L'œuvre de Bénédicte s'insère dans la vie sociale de Pavia à un moment où l'institution scolaire est perçue comme véritable source de bien-être.
Bénédicte est la première femme de la ville et de la région qui a compris ce besoin et le gouvernement de l'époque lui reconnaît le titre de “Promotrice de l'instruction de base” de l'empire autrichien.
Aidée par de jeunes filles bénévoles, auxquelles elle enseigne un Règlement aussi approuvé par l'autorité Ecclésiastique, Bénédicte uni à l'enseignement scolaire, la catéchèse et la formation au travail.
Ceux-ci sont l'ensemble des domaines dont elle se sert pour transformer les jeunes filles en “modèles de vie chrétienne” et assurer ainsi la vraie formation des familles.
Contemplative en action
Son dévouement perpétuel jaillit et grandit par sa ferveur eucharistique, par sa contemplation du Crucifié et par sa certitude que Dieu seul est son soutien et sa défense.
Durant sa vie les expériences mystiques vont se multiplier particulièrement pendant les fêtes liturgiques sans néanmoins la détoner de ses engagements quotidiens.
Par amour des jeunes filles elle est disposée à toute sorte de sacrifice: de sa propre personne, de ses biens, de sa renommée en prouvant ainsi l'incomparable grandeur de la “pédagogie de l'Évangile”.
Capacité de se détacher
La singularité de l'œuvre et du programme éducatif de Bénédicte rencontrera l'opposition de quelques puissants qui se voient frustré leurs projets et ainsi que l'incompréhension de certains membres du clergé.
En juillet 1838 Bénédicte cède son institution à l'Évêque Tosi et avec son mari et cinq fidèles consœurs, quitte Pavia pour repartir dans sa région d'origine, la Liguria.
Fondatrice
À Ronco Scrivia elle fonde l'école pour les jeunes filles du peuple et l'Institut des “Sœurs Bénédictines de la Providence”, elle en écrit les Règlement et Constitution.
Tout ceci révèle le développement de son charisme en étendant à toutes les jeunes filles l'éducation, l'instruction et la formation chrétienne; tout cela marqué par sa confiance illimitée et son abandon à la divine Providence, par amour pour Dieu à travers la pauvreté et la charité.
Développement de l'œuvre
L'institut des Sœurs Bénédictines de la Providence se développe rapidement.
En 1847 il s'étend à Voghera.
Ce siège, après 40 ans de la mort de Bénédicte, suite à l'intervention de l'Évêque diocésain, deviendra un Institut indépendante.
À cette occasion, les Sœurs obtiennent le nom de “Bénédictines de la Divine Providence” en mémoire pour leur très pieuse fondatrice.
En 1851 Bénédicte retourne à Pavia dans un lieu-différent de la première fondation et en 1857 elle ouvre une école dans un village appelé San Quirico.
Dans la joie de Dieu
Le 21 mars 1858, Bénédicte meurt à Ronco Scrivia, exactement au jour et à l'heure qu'elle avait prévu.
Autour de sa dépouille, beaucoup de gens se réunirent pour rendre un dernier hommage, plein d'estime et de regret, à celle que chacun a considéré “comme une sainte”.
Bénédicte se propose comme un modèle et une aide:
– pour les personnes consacrées: se conformer au Christ et s'abandonner à la douce Providence Divine;
– aux époux: partage totale pour une maternité et une paternité plus profonde;
– aux jeunes: le Christ source de joie et idéal de vie;
– aux éducateurs: prévenir, comprendre, ouvrir des nouveaux horizons;
– aux familles qui vivent des moments difficiles: accepter les difficultés, quand on est obligé de quitter son pays natal et d'accueillir dans sa maison les familiers éprouvées par la maladie et les aider à mourir dans la sérénité et dans paix.
Canonisée le 19 mai 2002, par le Pape Jean-Paul II, place Saint-Pierre.
SOURCE : www.vatican.va
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BENOÎT MENNI
prêtre, fondateur, bienheureux
1841-1914
Ercole Angelo Menni naît en 1841 à Milan, cinquième d'une famille de quinze enfants.
Son père est commerçant en bois.
Le petit 'Ercolino' porte bien son nom: il est beau et fort; c'est un lombard intrépide.
Dans sa famille, on dit le chapelet en commun et l'on pratique la charité. Devenu jeune homme, il dit son rosaire en entier et communie tous les jours.
Il est bien vu de tous.
Mais à 16 ans, il quitte la banque où il travaillait pour ne pas participer à des opérations qu'il réprouve.
Son premier appel à la vie religieuse, il le ressent en contemplant un tableau de la Madone devant lequel il prie tous les jours.
Le caractère marial marquera toute sa vie, ainsi que la dévotion au Sacré-Cœur.
Le premier nom qu'il donnera à la Congrégation fondée par lui sera:
'Filles de Notre-Dame du Sacré-Cœur de Jésus'.
A 18 ans, en juin 1859, lorsque arrivent à Milan des blessés de la bataille de Magenta, il se porte volontaire comme brancardier et cela décide de son orientation.
Il entre en 1860 chez les Frères de Saint Jean de Dieu à Milan où il reçoit le nom de Fra Benedetto (ou Benito), c'est-à-dire Benoît.
En 1865 il demande au Général de l'Ordre de pouvoir achever ses études de théologie à Rome, marquant ainsi sa dévotion au successeur de Pierre.
"Ce que dit le Pape vient du ciel" dit-il souvent.
Il y reçoit l'ordination sacerdotale en 1866.
Le Père Général le choisit comme secrétaire et voyant sa valeur, dès 1867, il lui demande, en accord avec le Pape, d'aller restaurer l'Ordre de Saint Jean de Dieu en Espagne.
Il a 26 ans et ne connaît pas l'Espagnol.
Pie IX le bénit et lui dit: "Va en Espagne, mon fils, avec la bénédiction du ciel; va restaurer l'Ordre à son berceau même".
Il arrive dans un pays en pleine effervescence religieuse et politique.
Les lois anti-cléricales ont pratiquement détruit l'Ordre.
Néanmoins, dès octobre 1867, à Barcelone, il crée un petit asile-hôpital de 12 lits.
Après des péripéties de vie clandestine et d'expulsion, contrecoup de la Révolution et de la 'guerre carliste', il crée en 1877 à Ciempozuelos près de Madrid un hôpital psychiatrique d'avant-garde avec des équipements et des thérapies de pointe.
C'est là le berceau de la restauration de l'Ordre.
Dans ses fondations, il a soin de s'entourer de médecins et d'un personnel compétents. (Lui-même a exercé la chirurgie.)
Et surtout il crée un changement d'attitude vis-à-vis des malades mentaux que l'on considérait comme des maudits.
Il donne cette consigne:
"Soignez-les comme des enfants mais considérez-les comme des personnes".
En 1881, avec deux jeunes filles originaires de Grenade (berceau primitif de l'Ordre), il fonde à Ciempozuelos les 'sœurs hospitalières du Sacré-Cœur de Jésus', car jusqu'ici on n'avait rien fait pour les femmes malades mentales.
Les débuts sont pauvres, austères.
(La première Sœur, devenue supérieure, mourra assassinée par une malade mentale.)
Le travail est surabondant mais la joie domine.
Les fondations vont se multipliant tandis que les vocations de femmes et d'hommes affluent: 15 fondations pour les Sœurs, 24 pour les Frères.
Le mouvement dépasse les frontières et s'étend au Portugal, en France et au Mexique.
Entre autres responsabilités, le Père est réélu 4 fois comme Provincial d'Espagne.
C'est un chef né qui se distingue par sa douceur, mais après avoir pris conseil, prié et longuement réfléchi, ses décisions sont irréfragables.
Ainsi quand il constate de graves défaillances morales dans sa fondation de Llobregat, il congédie tout le personnel malgré le tollé que cela provoque dans la presse.
En 1911, par un 'Motu proprio', sans convocation préalable du chapitre général, Pie X le nomme Général de l'Ordre.
Une grave contestation, préparée de longue date, se dresse contre lui tant à l'extérieur que parmi ses 'fils bien-aimés' qu'il continue de chérir.
On ne recule pas devant le mensonge et la calomnie.
Dédaignant de prendre un avocat, le Père accepte tout avec un esprit surnaturel et ne se départit pas de sa sérénité.
De lui-même il donne sa démission à l'assemblée générale des provinciaux convoquée par lui en 1912.
Puis il se rend à Rome pour remettre cette démission aux pieds du Saint-Père.
Fixant sur lui ses yeux d'une extrême douceur, Pie X lui dit:
"Voilà, Père, le moment est venu pour vous de prier et de conseiller…"; mais lui, qui a déjà été traîné 'devant tous les tribunaux de la terre', répond:
"J'espère être absous par le tribunal de Dieu et y trouver sa miséricorde".
"Vous la trouverez, vous la trouverez!" lui dit le Pape.
Exilé en France, à Paris, et déjà malade, on continue à la persécuter.
Ainsi, on lui donne comme assistant un frère illettré pour l'empêcher d'entretenir de la correspondance.
Puis on l'envoie à Dinan où il meurt en 1914.
La ferveur populaire se manifeste immédiatement.
Il en est de même à Ciempozuelos où son corps est ramené.
C'est là qu'il repose près de la maison-mère des Sœurs.
prêtre, fondateur, bienheureux
1841-1914
Ercole Angelo Menni naît en 1841 à Milan, cinquième d'une famille de quinze enfants.
Son père est commerçant en bois.
Le petit 'Ercolino' porte bien son nom: il est beau et fort; c'est un lombard intrépide.
Dans sa famille, on dit le chapelet en commun et l'on pratique la charité. Devenu jeune homme, il dit son rosaire en entier et communie tous les jours.
Il est bien vu de tous.
Mais à 16 ans, il quitte la banque où il travaillait pour ne pas participer à des opérations qu'il réprouve.
Son premier appel à la vie religieuse, il le ressent en contemplant un tableau de la Madone devant lequel il prie tous les jours.
Le caractère marial marquera toute sa vie, ainsi que la dévotion au Sacré-Cœur.
Le premier nom qu'il donnera à la Congrégation fondée par lui sera:
'Filles de Notre-Dame du Sacré-Cœur de Jésus'.
A 18 ans, en juin 1859, lorsque arrivent à Milan des blessés de la bataille de Magenta, il se porte volontaire comme brancardier et cela décide de son orientation.
Il entre en 1860 chez les Frères de Saint Jean de Dieu à Milan où il reçoit le nom de Fra Benedetto (ou Benito), c'est-à-dire Benoît.
En 1865 il demande au Général de l'Ordre de pouvoir achever ses études de théologie à Rome, marquant ainsi sa dévotion au successeur de Pierre.
"Ce que dit le Pape vient du ciel" dit-il souvent.
Il y reçoit l'ordination sacerdotale en 1866.
Le Père Général le choisit comme secrétaire et voyant sa valeur, dès 1867, il lui demande, en accord avec le Pape, d'aller restaurer l'Ordre de Saint Jean de Dieu en Espagne.
Il a 26 ans et ne connaît pas l'Espagnol.
Pie IX le bénit et lui dit: "Va en Espagne, mon fils, avec la bénédiction du ciel; va restaurer l'Ordre à son berceau même".
Il arrive dans un pays en pleine effervescence religieuse et politique.
Les lois anti-cléricales ont pratiquement détruit l'Ordre.
Néanmoins, dès octobre 1867, à Barcelone, il crée un petit asile-hôpital de 12 lits.
Après des péripéties de vie clandestine et d'expulsion, contrecoup de la Révolution et de la 'guerre carliste', il crée en 1877 à Ciempozuelos près de Madrid un hôpital psychiatrique d'avant-garde avec des équipements et des thérapies de pointe.
C'est là le berceau de la restauration de l'Ordre.
Dans ses fondations, il a soin de s'entourer de médecins et d'un personnel compétents. (Lui-même a exercé la chirurgie.)
Et surtout il crée un changement d'attitude vis-à-vis des malades mentaux que l'on considérait comme des maudits.
Il donne cette consigne:
"Soignez-les comme des enfants mais considérez-les comme des personnes".
En 1881, avec deux jeunes filles originaires de Grenade (berceau primitif de l'Ordre), il fonde à Ciempozuelos les 'sœurs hospitalières du Sacré-Cœur de Jésus', car jusqu'ici on n'avait rien fait pour les femmes malades mentales.
Les débuts sont pauvres, austères.
(La première Sœur, devenue supérieure, mourra assassinée par une malade mentale.)
Le travail est surabondant mais la joie domine.
Les fondations vont se multipliant tandis que les vocations de femmes et d'hommes affluent: 15 fondations pour les Sœurs, 24 pour les Frères.
Le mouvement dépasse les frontières et s'étend au Portugal, en France et au Mexique.
Entre autres responsabilités, le Père est réélu 4 fois comme Provincial d'Espagne.
C'est un chef né qui se distingue par sa douceur, mais après avoir pris conseil, prié et longuement réfléchi, ses décisions sont irréfragables.
Ainsi quand il constate de graves défaillances morales dans sa fondation de Llobregat, il congédie tout le personnel malgré le tollé que cela provoque dans la presse.
En 1911, par un 'Motu proprio', sans convocation préalable du chapitre général, Pie X le nomme Général de l'Ordre.
Une grave contestation, préparée de longue date, se dresse contre lui tant à l'extérieur que parmi ses 'fils bien-aimés' qu'il continue de chérir.
On ne recule pas devant le mensonge et la calomnie.
Dédaignant de prendre un avocat, le Père accepte tout avec un esprit surnaturel et ne se départit pas de sa sérénité.
De lui-même il donne sa démission à l'assemblée générale des provinciaux convoquée par lui en 1912.
Puis il se rend à Rome pour remettre cette démission aux pieds du Saint-Père.
Fixant sur lui ses yeux d'une extrême douceur, Pie X lui dit:
"Voilà, Père, le moment est venu pour vous de prier et de conseiller…"; mais lui, qui a déjà été traîné 'devant tous les tribunaux de la terre', répond:
"J'espère être absous par le tribunal de Dieu et y trouver sa miséricorde".
"Vous la trouverez, vous la trouverez!" lui dit le Pape.
Exilé en France, à Paris, et déjà malade, on continue à la persécuter.
Ainsi, on lui donne comme assistant un frère illettré pour l'empêcher d'entretenir de la correspondance.
Puis on l'envoie à Dinan où il meurt en 1914.
La ferveur populaire se manifeste immédiatement.
Il en est de même à Ciempozuelos où son corps est ramené.
C'est là qu'il repose près de la maison-mère des Sœurs.
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
- Messages : 26371
Age : 70
Localisation : Vendée (Marie du 85)
Inscription : 12/01/2016
Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BENOÎTE RENCUREL
voyante du Laus, vénérable
1647-1718
EXTRAIT BIOGRAPHIQUE
«Le péché du vingtième siècle est la perte du sens du péché», déclarait le Pape Pie XII, le 26 octobre 1946.
Un demi-siècle plus tard, la crise du sacrement de Pénitence, délaissé par tant de catholiques, montre que ce jugement du Pape reste d'une grande actualité.
Pourtant, «aux yeux de la foi, aucun mal n'est plus grave que le péché et rien n'a de pires conséquences pour les pécheurs eux-mêmes, pour l'Église et pour le monde entier» (Catéchisme de l'Église Catholique, CEC 1488).
Notre époque n'est pas la première à traverser une crise du sacrement de Pénitence.
La Très Sainte Vierge Marie a souvent été la messagère de Dieu auprès des hommes pour les détourner du péché et les ramener à l'amour de leur Créateur.
Au cours des derniers siècles, elle est intervenue à plusieurs reprises, notamment à La Salette, Lourdes et Fatima; mais auparavant, elle avait daigné se manifester à une pauvre fille des Alpes, Benoîte Rencurel.
Le 16 septembre 1647, Benoîte Rencurel vient au monde dans la petite commune de Saint-Etienne d'Avançon (Alpes du Sud).
Ses parents sont de bons catholiques, vivant modestement du travail de leurs mains.
À la naissance de Benoîte, ils ont déjà une fille, Madeleine; une troisième, Marie, naîtra quatre ans plus tard.
Le père, Guillaume Rencurel, meurt alors que Benoîte, pleine de vie et de gaieté, a sept ans. Pour la veuve et ses trois filles, cette disparition entraîne la misère matérielle.
Il n'y a pas d'école à Saint-Etienne d'Avançon; aussi Benoîte ne saura-t-elle jamais lire ni écrire.
Sa seule instruction vient du sermon de la Messe dominicale; elle y apprend que Marie est la toute miséricordieuse Mère de Dieu, ce qui éveille en elle le désir de la voir.
Benoîte, âme contemplative, aime à prier longuement.
«Je m'appelle Dame Marie»
Un jour de mai 1664, la jeune fille, qui est employée comme bergère chez les paysans des environs, garde les brebis dans un vallon dont les pentes sont percées de failles ressemblant à des grottes peu profondes.
Benoîte récite son chapelet lorsqu'elle aperçoit une belle Dame sur une roche, tenant par la main un enfant d'une beauté singulière.
«Belle Dame! lui dit-elle, que faites-vous là-haut?
Voudriez-vous goûter avec moi?
J'ai un peu de bon pain, nous tremperions dans la fontaine!»
La Dame sourit de sa simplicité, et ne lui dit mot.
«Belle Dame!
Vous plairait-il de nous donner cet enfant, qui nous réjouirait tant?»
La Dame sourit encore sans répondre. Après être demeurée quelque temps avec Benoîte, elle prend son enfant dans ses bras et disparaît dans l'antre du rocher, où la bergère l'a vue plusieurs fois entrer et sortir.
Quatre mois durant, la Dame se fait voir chaque jour, conversant très familièrement avec la jeune fille.
Pour la préparer à sa mission future, elle l'éduque, corrigeant sa vivacité et sa brusquerie, son entêtement et son attachement aux choses et aux animaux.
Benoîte raconte ses visions à sa patronne, qui d'abord ne la croit pas, mais qui, un beau matin, la suit secrètement au vallon des Fours.
Là, elle ne voit pas la Dame, mais elle entend les paroles que celle-ci adresse à Benoîte.
Or, l'apparition demande à la bergère d'avertir sa patronne des dangers que court son âme:
«Sa conscience est en mauvais état. Qu'elle fasse pénitence!»
Touchée, celle-ci se corrige, se remet à fréquenter les sacrements et vit le reste de ses jours très chrétiennement.
Le 29 août, Benoîte demande à la visiteuse son nom, et s'entend répondre:
«Je m'appelle Dame Marie».
Mais en même temps, la Vierge lui annonce que les apparitions cesseront pendant un temps indéterminé.
De fait, Benoîte passe un mois sans voir la Dame; cette absence, en la privant des consolations sensibles, contribue à purifier son âme.
Enfin un matin, à la fin de septembre, la bergère, qui a arrêté ses moutons et ses chèvres au bord d'une rivière, aperçoit, face à elle, éclatante comme un beau soleil, Dame Marie.
Elle se hâte de la rejoindre.
Mais le vieux pont de bois qui franchit la rivière est brisé.
Elle passe le cours d'eau en montant sur le dos d'une grosse chèvre.
Arrivée près de l'apparition, elle demande:
«Ma bonne Dame, d'où vient que vous m'avez privée si longtemps de l'honneur de vous voir?
Désormais, quand vous voudrez me voir, vous le pourrez dans la chapelle qui est au lieu du Laus», répond la Dame, en lui indiquant le chemin à suivre.
Le lendemain, Benoîte se rend au hameau du Laus et arrive à la petite chapelle.
Elle entre aussitôt et voit sur l'autel la Vierge Marie qui la félicite d'avoir bien cherché sans s'être impatientée.
Ravie de revoir Notre-Dame, Benoîte est confuse de constater la pauvreté et la malpropreté du lieu; elle propose de couper son tablier en deux, afin de mettre une nappe sous ses pieds.
La Dame lui répond que dans peu de temps, il n'y manquera rien: elle y verra linges, cierges et autres ornements; elle ajoute qu'elle veut faire bâtir une église en son honneur et en celui de son très cher Fils; beaucoup de pécheurs et de pécheresses s'y convertiront.
Pendant l'hiver 1664-1665, Benoîte monte au Laus très souvent; chaque jour, elle voit la Vierge qui lui recommande
«de prier continuellement pour les pécheurs».
Notre-Dame nous donne à entendre par là que les pécheurs se trouvent dans un état pitoyable. Dieu est offensé par leurs fautes, mais Il veut leur prodiguer sa miséricorde, qui ne peut être acceptée que librement.
La nouvelle des apparitions se propage parmi les villageois, à la faveur des veillées, les soirs d'hiver.
Dès la Saint-Joseph (19 mars), les pèlerins accourent à Notre-Dame du Laus. Beaucoup ont obtenu des grâces par son intercession; ils viennent pour se confesser et prendre la résolution de changer de vie.
Le médecin qui sonde la plaie
L'Évangile est la révélation, en Jésus-Christ, de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs
. Mais, si «Dieu nous a créés sans nous, Il n'a pas voulu nous sauver sans nous» (Saint Augustin).
L'accueil de la miséricorde divine réclame de nous l'aveu de nos fautes.
Si nous disons: «Nous n'avons pas de péché», nous nous abusons, la vérité n'est pas en nous.
Si nous confessons nos péchés, Il est assez fidèle et juste pour remettre nos péchés et nous purifier de toute injustice (1 Jn 1, 8-9) (cf. CEC 1846-1847).
Cette confession des péchés est un effet de la grâce, car Dieu, tel un médecin qui sonde la plaie avant de la panser, projette une vive lumière sur le péché. «Reconnaître son péché, et même se reconnaître pécheur, capable de péché et porté au péché, est le principe indispensable du retour à Dieu.
C'est l'expérience exemplaire de David qui, après avoir fait ce qui est mal aux yeux du Seigneur, réprimandé par le prophète Nathan, s'écrie:
Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi.
Contre Toi, et Toi seul, j'ai péché; ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait» (Jean-Paul II, Exhortation apostolique Reconciliatio et Pænitentia, 2 décembre 1984, n. 13).
Dieu a donné à l'homme la liberté pour L'aimer et Le servir.
Le péché, qui est un abus de cette liberté, consiste en tout acte, parole ou désir contraire à la loi de Dieu.
Toutefois les péchés n'ont pas tous la même gravité.
On distingue péché mortel (ou grave) et péché véniel.
Le péché véniel refroidit l'amour de Dieu en nos coeurs sans nous priver de la vie de la grâce.
Le péché mortel, en tant qu'infraction grave à la loi de Dieu (par exemple le blasphème, l'idolâtrie, l'irréligion, l'hérésie, le schisme, le parjure, l'avortement, la contraception, l'adultère, la fornication), détourne l'homme de son Créateur, auquel le pécheur préfère un bien créé.
Pour qu'un péché soit mortel, une matière grave ne suffit pas; il est requis également que l'acte soit accompli avec pleine connaissance et de propos délibéré.
«Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l'amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c'est-à-dire de l'état de grâce.
S'il n'est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu, il cause l'exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de l'enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour toujours, sans retour» (CEC 1861).
L'Apôtre saint Jean décrivait ainsi le sort de ceux qui meurent en état de péché mortel: Pour les lâches, les incrédules, les dépravés, les meurtriers, les impudiques, les magiciens, les idolâtres et tous les hommes de mensonge, leur part est dans l'étang brûlant de feu et de soufre: c'est la seconde mort!
Cette vérité prend d'autant plus de relief que, pour chaque être humain, la mort est une certitude, et qu'après la mort, chacun de nous sera jugé.
Car il nous faudra tous apparaître à découvert devant le tribunal du Christ, pour que chacun reçoive ce qu'il a mérité, soit en bien soit en mal, pendant qu'il était dans son corps (2 Cor 5, 10).
Or, après la mort il n'y aura plus de temps pour se convertir. C'est donc maintenant qu'il faut faire pénitence. «Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels» (Saint François d'Assise).
Une huile miraculeuse
En septembre 1665, une enquête sur les apparitions du Laus est entreprise par le vicaire général d'Embrun, Antoine Lambert.
Celui-ci, après avoir achevé l'interrogatoire de la voyante, célèbre la Messe.
Ce matin-là, est présente Catherine Vial, femme gravement atteinte d'une maladie nerveuse à l'origine du repliement de ses jambes, en sorte que les talons touchent le bas du dos.
Ses parents ont tout essayé pour la guérir, mais en vain.
On a conduit la malade au Laus afin d'y faire une neuvaine à Notre-Dame.
Pendant la nuit qui suit la conclusion de la neuvaine, elle peut étendre ses jambes et se sent guérie.
Au matin, elle se fait porter à la chapelle, alors que le vicaire général termine la Messe.
On crie tout haut «Miracle!»
La Messe achevée, l'ecclésiastique interroge la miraculée et les témoins, puis affirme:
«Le doigt de Dieu est là».
Ainsi, le 18 septembre 1665, pour les dix-huit ans de Benoîte, les apparitions et le pèlerinage sont officiellement reconnus par l'autorité diocésaine et, dès l'automne de cette année, on commence la construction d'une église assez grande pour accueillir les pèlerins, de plus en plus nombreux.
Notre-Dame s'est révélée au Laus comme la réconciliatrice et le refuge des pécheurs.
Aussi donne-t-elle des signes pour convaincre ceux-ci de la nécessité de se convertir.
Elle annonce alors à Benoîte que l'huile de la lampe de la chapelle (qui brûle devant le Saint-Sacrement), opérera des guérisons sur les malades qui s'en appliqueront, s'ils ont recours à son intercession avec foi.
De fait, de nombreuses guérisons sont enregistrées en peu de temps: une enfant retrouve l'usage d'un oeil; une personne est guérie d'un ulcère à la main.
Encore de nos jours, des miracles se produisent chez des personnes qui, confiantes en l'intercession de Notre-Dame, se servent avec dévotion de l'huile du Laus.
Une planche de salut
Benoîte prend à coeur la mission qu'elle a reçue de la Très Sainte Vierge: préparer les pécheurs à recevoir le sacrement de Pénitence.
Aussi, encourage-t-elle souvent les deux prêtres qui sont affectés au sanctuaire à recevoir les pèlerins avec douceur, patience et charité, usant d'une bonté particulière à l'égard des plus grands pécheurs afin de les inciter au repentir.
«Le Christ a institué le sacrement de Pénitence pour tous les membres pécheurs de son Église, avant tout pour ceux qui, après le baptême, sont tombés dans le péché grave...
C'est à eux que le sacrement de Pénitence offre une nouvelle possibilité de se convertir et de retrouver la grâce de la justification.
Les Pères de l'Église présentent ce sacrement comme «la seconde planche de salut après le naufrage qu'est la perte de la grâce».
Dieu seul pardonne les péchés.
Parce que Jésus est le Fils de Dieu, Il dit de Lui-même :
Le Fils de l'Homme a le pouvoir de remettre les péchés sur la terre et Il exerce ce pouvoir divin :
Tes péchés sont pardonnés!
Plus encore : en vertu de sa divine autorité, Il donne ce pouvoir aux hommes pour qu'ils l'exercent en son nom» (CEC 1446, 1441).
Dans ce sacrement, le prêtre, qui tient la place du Christ juge et médecin, doit être informé sur l'état du pénitent.
Par conséquent, «il faut que le fidèle, outre la conscience des péchés commis, la contrition et la volonté de ne plus retomber, confesse ses péchés.
En ce sens, le Concile de Trente déclarait qu'il était nécessaire, «de droit divin, que l'on confesse tous et chacun des péchés mortels»».
(Jean-Paul II, Motu proprio Misericordia Dei, 7 avril 2002).
Cette obligation n'est pas un poids imposé aux pénitents de manière arbitraire, mais un moyen de libération pour retrouver la paix du coeur.
Si, par le péché, nous nous sommes détournés de notre Père du Ciel, le sacrement de pénitence nous permet de revenir vers Lui, de nous jeter dans ses bras miséricordieux.
La confession est ainsi l'occasion de retrouvailles amoureuses entre l'enfant et son Père.
«Ce n'est pas le pécheur qui revient à Dieu pour Lui demander pardon, mais c'est Dieu qui court après le pécheur et qui le fait revenir à Lui», disait le saint Curé d'Ars.
«Pour recevoir le sacrement de pénitence, il faut trois choses, ajoutait le même saint: la Foi qui nous découvre Dieu présent dans le prêtre, l'Espérance qui nous fait croire que Dieu nous donnera la grâce du pardon, la Charité qui nous porte à aimer Dieu, et qui met au coeur le regret de L'avoir offensé».
Benoîte encourage aussi les confesseurs à avertir les pénitents de ne s'approcher de la Sainte Communion qu'après une bonne confession, préparée par un examen de conscience à la lumière des dix Commandements et du Sermon sur la Montagne.
En effet, «celui qui a conscience d'avoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la Sainte Communion, même s'il éprouve une grande contrition, sans avoir préalablement reçu l'absolution sacramentelle» (CEC 1457).
La tâche de Benoîte n'est pas facile; la Vierge lui demande d'admonester les femmes et les filles qui mènent une vie scandaleuse, allant parfois jusqu'à l'infanticide, les gentilshommes injustes ou pervers, les prêtres et les religieux infidèles à leurs engagements sacrés. Mais la voyante s'en acquitte bien.
Elle encourage les pénitents, avertit ceux qui n'osent confesser leurs péchés, et les oriente vers un confesseur approprié.
«En célébrant le sacrement de la Pénitence, le prêtre accomplit le ministère du Bon Pasteur qui cherche la brebis perdue, celui du Bon Samaritain qui panse les blessures, du Père qui attend le fils prodigue et l'accueille à son retour, du juste juge qui ne fait pas acception de personnes et dont le jugement est à la fois juste et miséricordieux.
Bref, le prêtre est le signe et l'instrument de l'amour miséricordieux de Dieu envers le pécheur» (CEC 1465).
Surtout, Benoîte se sacrifie pour les pécheurs et prie pendant qu'ils se confessent. Pour réparer leurs péchés et leur obtenir des grâces, elle s'adonne à des pénitences sévères au point de compromettre sa santé.
Un temps propice pour se réconcilier
Cependant, tous ne voient pas d'un bon oeil les événements du Laus; certains vont jusqu'à attribuer les apparitions au démon.
Aussi, une nouvelle enquête diocésaine devient-elle nécessaire; elle convainc le nouveau vicaire général, Jean Javelly, de la réalité des apparitions.
À ceux qui se plaignent que tout le monde s'en va au Laus, il répond:
«Ce n'est pas Benoîte qui fait perdre la dévotion (c'est-à-dire la pratique religieuse) de notre Église, ce sont nos péchés qui en sont la cause: par le peu de zèle et de soin que nous avons de la maintenir, la dévotion est allée à l'extrémité du diocèse.
Bien loin de l'en retirer, ni de rien faire à cette bonne et sainte fille dont je connais la vertu, nous devons prendre garde que la dévotion n'en sorte (du diocèse d'Embrun), et concourir avec elle pour la conserver là, de peur que nous la perdions tout à fait».
Dans sa prière comme dans son apostolat, Benoîte est sans cesse conseillée par Notre-Dame:
«Courage, ma fille!
Prenez patience... faites de bon coeur votre tâche... ne portez aucune haine aux ennemis du Laus».
Son ange gardien l'instruit, lui aussi:
«Quand on est joyeux, tout ce qu'on fait est agréable à Dieu; quand on se fâche, on ne fait rien qui Lui plaise».
Entre 1669 et 1679, Benoîte est favorisée de cinq apparitions du Christ qui se révèle à elle dans un état de souffrance.
Un vendredi de juillet 1673, le Sauveur tout ensanglanté lui dit:
«Ma fille, je me fais voir en cet état afin que vous participiez aux douleurs de ma Passion».
Le Seigneur Jésus, en effet, veut associer à son sacrifice rédempteur ceux-là même qui en sont les premiers bénéficiaires .
Saint Pierre nous avertit:
Il a souffert pour nous, Il nous a tracé le chemin afin que nous suivions ses pas (1 P 2, 21).
Le temps de la Passion nous rappelle que ce sont nos péchés qui ont fait subir à Notre-Seigneur le supplice de la Croix.
«À coup sûr, ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal crucifient de nouveau dans leur coeur, autant qu'il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés et le couvrent de confusion (He 6, 6)».
Mais, par sa mort, le Christ nous libère du péché, et par sa Résurrection, Il nous ouvre l'accès à une vie nouvelle.
Ainsi, Pâques est-il un temps propice pour recevoir le sacrement de Pénitence et se réconcilier avec Dieu.
Elle est la cause que je perds tant d'âmes!
À partir de 1684, le pèlerinage du Laus connaît son plein essor.
Des troupes, en garnison à Gap, se rendent en masse au Laus.
Les soldats, saisis par la grâce, se confessent, changent de vie et deviennent des messagers du Laus, dans toute la France et même à l'étranger.
Cependant, à ce temps de réussite, succède une période d'épreuves et d'obscurité.
Benoîte subit de fortes tentations contre la confiance en Dieu et la chasteté; le démon l'attaque même physiquement, mais elle, se réfugiant dans la prière, ne cède pas.
L'esprit infernal révèle un jour le motif de ces attaques:
«Elle est la cause que je perds tant d'âmes», crie-t-il.
Fin juillet 1692, Benoîte et les prêtres du Laus sont obligés de se réfugier à Marseille pour fuir l'invasion des troupes du duc de Savoie qui dévastent la région de Gap.
La paix civile finit par se rétablir, mais Benoîte continue à traverser des épreuves purificatrices.
En effet, le successeur de l'abbé Javelly, adversaire du pèlerinage du Laus, nomme deux nouveaux responsables du sanctuaire qui ont peu de zèle pour le soin des âmes, et fait publier en chaire que le Laus n'est qu'un abus.
À partir de 1700, on interdit à la bergère de parler aux pèlerins, et des menaces pèsent sur sa réputation.
Cependant, Benoîte n'est pas sans consolations: elle reçoit souvent la visite de la Sainte Vierge et de son bon Ange, qui la réconfortent. Enfin, en 1711, le pèlerinage est confié à une nouvelle communauté, celle des «Pères gardistes».
Ces prêtres se révèlent être des hommes de prière qui inculquent aux pèlerins du Laus la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus et le recours à Marie, refuge des pécheurs.
Après vingt ans de calvaire, Benoîte peut de nouveau exercer sa mission dans la paix; une foule de pèlerins vient à elle.
Mais tant d'austérités et d'épreuves ont eu raison de sa santé.
Alitée depuis plus d'un mois, elle reçoit le saint Viatique le jour de Noël 1718.
Trois jours plus tard, elle se confesse et reçoit l'Extrême-Onction, avec grande consolation.
Vers huit heures du soir, Benoîte dit adieu à ceux qui l'entourent, puis, ayant baisé un crucifix, les yeux levés au Ciel, elle décède dans la paix et va rejoindre au Ciel son Époux Jésus et sa Très Sainte Mère Marie.
La cause de béatification de la Servante de Dieu Benoîte Rencurel, introduite en 1871, a récemment été reprise en main par le diocèse de Gap.
Après avoir été administré successivement par les Pères gardistes, les Oblats de Marie Immaculée et les Missionnaires de Notre-Dame du Laus, le sanctuaire est aujourd'hui confié au clergé diocésain, avec l'assistance d'une communauté de Frères de Saint-Jean.
Le sanctuaire du Laus est un centre spirituel qui, fidèle à sa mission, accueille des pèlerins venus se mettre sous la protection maternelle de Marie et recevoir le sacrement du pardon.
Demandons à la Mère de Miséricorde de renouveler chez les chrétiens l'estime et la fréquentation de ce sacrement qui est un moyen privilégié, institué par le Sauveur lui-même, pour recouvrer la grâce de Dieu et la paix de l'âme.
Dom Antoine Marie osb, abbé
voyante du Laus, vénérable
1647-1718
EXTRAIT BIOGRAPHIQUE
«Le péché du vingtième siècle est la perte du sens du péché», déclarait le Pape Pie XII, le 26 octobre 1946.
Un demi-siècle plus tard, la crise du sacrement de Pénitence, délaissé par tant de catholiques, montre que ce jugement du Pape reste d'une grande actualité.
Pourtant, «aux yeux de la foi, aucun mal n'est plus grave que le péché et rien n'a de pires conséquences pour les pécheurs eux-mêmes, pour l'Église et pour le monde entier» (Catéchisme de l'Église Catholique, CEC 1488).
Notre époque n'est pas la première à traverser une crise du sacrement de Pénitence.
La Très Sainte Vierge Marie a souvent été la messagère de Dieu auprès des hommes pour les détourner du péché et les ramener à l'amour de leur Créateur.
Au cours des derniers siècles, elle est intervenue à plusieurs reprises, notamment à La Salette, Lourdes et Fatima; mais auparavant, elle avait daigné se manifester à une pauvre fille des Alpes, Benoîte Rencurel.
Le 16 septembre 1647, Benoîte Rencurel vient au monde dans la petite commune de Saint-Etienne d'Avançon (Alpes du Sud).
Ses parents sont de bons catholiques, vivant modestement du travail de leurs mains.
À la naissance de Benoîte, ils ont déjà une fille, Madeleine; une troisième, Marie, naîtra quatre ans plus tard.
Le père, Guillaume Rencurel, meurt alors que Benoîte, pleine de vie et de gaieté, a sept ans. Pour la veuve et ses trois filles, cette disparition entraîne la misère matérielle.
Il n'y a pas d'école à Saint-Etienne d'Avançon; aussi Benoîte ne saura-t-elle jamais lire ni écrire.
Sa seule instruction vient du sermon de la Messe dominicale; elle y apprend que Marie est la toute miséricordieuse Mère de Dieu, ce qui éveille en elle le désir de la voir.
Benoîte, âme contemplative, aime à prier longuement.
«Je m'appelle Dame Marie»
Un jour de mai 1664, la jeune fille, qui est employée comme bergère chez les paysans des environs, garde les brebis dans un vallon dont les pentes sont percées de failles ressemblant à des grottes peu profondes.
Benoîte récite son chapelet lorsqu'elle aperçoit une belle Dame sur une roche, tenant par la main un enfant d'une beauté singulière.
«Belle Dame! lui dit-elle, que faites-vous là-haut?
Voudriez-vous goûter avec moi?
J'ai un peu de bon pain, nous tremperions dans la fontaine!»
La Dame sourit de sa simplicité, et ne lui dit mot.
«Belle Dame!
Vous plairait-il de nous donner cet enfant, qui nous réjouirait tant?»
La Dame sourit encore sans répondre. Après être demeurée quelque temps avec Benoîte, elle prend son enfant dans ses bras et disparaît dans l'antre du rocher, où la bergère l'a vue plusieurs fois entrer et sortir.
Quatre mois durant, la Dame se fait voir chaque jour, conversant très familièrement avec la jeune fille.
Pour la préparer à sa mission future, elle l'éduque, corrigeant sa vivacité et sa brusquerie, son entêtement et son attachement aux choses et aux animaux.
Benoîte raconte ses visions à sa patronne, qui d'abord ne la croit pas, mais qui, un beau matin, la suit secrètement au vallon des Fours.
Là, elle ne voit pas la Dame, mais elle entend les paroles que celle-ci adresse à Benoîte.
Or, l'apparition demande à la bergère d'avertir sa patronne des dangers que court son âme:
«Sa conscience est en mauvais état. Qu'elle fasse pénitence!»
Touchée, celle-ci se corrige, se remet à fréquenter les sacrements et vit le reste de ses jours très chrétiennement.
Le 29 août, Benoîte demande à la visiteuse son nom, et s'entend répondre:
«Je m'appelle Dame Marie».
Mais en même temps, la Vierge lui annonce que les apparitions cesseront pendant un temps indéterminé.
De fait, Benoîte passe un mois sans voir la Dame; cette absence, en la privant des consolations sensibles, contribue à purifier son âme.
Enfin un matin, à la fin de septembre, la bergère, qui a arrêté ses moutons et ses chèvres au bord d'une rivière, aperçoit, face à elle, éclatante comme un beau soleil, Dame Marie.
Elle se hâte de la rejoindre.
Mais le vieux pont de bois qui franchit la rivière est brisé.
Elle passe le cours d'eau en montant sur le dos d'une grosse chèvre.
Arrivée près de l'apparition, elle demande:
«Ma bonne Dame, d'où vient que vous m'avez privée si longtemps de l'honneur de vous voir?
Désormais, quand vous voudrez me voir, vous le pourrez dans la chapelle qui est au lieu du Laus», répond la Dame, en lui indiquant le chemin à suivre.
Le lendemain, Benoîte se rend au hameau du Laus et arrive à la petite chapelle.
Elle entre aussitôt et voit sur l'autel la Vierge Marie qui la félicite d'avoir bien cherché sans s'être impatientée.
Ravie de revoir Notre-Dame, Benoîte est confuse de constater la pauvreté et la malpropreté du lieu; elle propose de couper son tablier en deux, afin de mettre une nappe sous ses pieds.
La Dame lui répond que dans peu de temps, il n'y manquera rien: elle y verra linges, cierges et autres ornements; elle ajoute qu'elle veut faire bâtir une église en son honneur et en celui de son très cher Fils; beaucoup de pécheurs et de pécheresses s'y convertiront.
Pendant l'hiver 1664-1665, Benoîte monte au Laus très souvent; chaque jour, elle voit la Vierge qui lui recommande
«de prier continuellement pour les pécheurs».
Notre-Dame nous donne à entendre par là que les pécheurs se trouvent dans un état pitoyable. Dieu est offensé par leurs fautes, mais Il veut leur prodiguer sa miséricorde, qui ne peut être acceptée que librement.
La nouvelle des apparitions se propage parmi les villageois, à la faveur des veillées, les soirs d'hiver.
Dès la Saint-Joseph (19 mars), les pèlerins accourent à Notre-Dame du Laus. Beaucoup ont obtenu des grâces par son intercession; ils viennent pour se confesser et prendre la résolution de changer de vie.
Le médecin qui sonde la plaie
L'Évangile est la révélation, en Jésus-Christ, de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs
. Mais, si «Dieu nous a créés sans nous, Il n'a pas voulu nous sauver sans nous» (Saint Augustin).
L'accueil de la miséricorde divine réclame de nous l'aveu de nos fautes.
Si nous disons: «Nous n'avons pas de péché», nous nous abusons, la vérité n'est pas en nous.
Si nous confessons nos péchés, Il est assez fidèle et juste pour remettre nos péchés et nous purifier de toute injustice (1 Jn 1, 8-9) (cf. CEC 1846-1847).
Cette confession des péchés est un effet de la grâce, car Dieu, tel un médecin qui sonde la plaie avant de la panser, projette une vive lumière sur le péché. «Reconnaître son péché, et même se reconnaître pécheur, capable de péché et porté au péché, est le principe indispensable du retour à Dieu.
C'est l'expérience exemplaire de David qui, après avoir fait ce qui est mal aux yeux du Seigneur, réprimandé par le prophète Nathan, s'écrie:
Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi.
Contre Toi, et Toi seul, j'ai péché; ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait» (Jean-Paul II, Exhortation apostolique Reconciliatio et Pænitentia, 2 décembre 1984, n. 13).
Dieu a donné à l'homme la liberté pour L'aimer et Le servir.
Le péché, qui est un abus de cette liberté, consiste en tout acte, parole ou désir contraire à la loi de Dieu.
Toutefois les péchés n'ont pas tous la même gravité.
On distingue péché mortel (ou grave) et péché véniel.
Le péché véniel refroidit l'amour de Dieu en nos coeurs sans nous priver de la vie de la grâce.
Le péché mortel, en tant qu'infraction grave à la loi de Dieu (par exemple le blasphème, l'idolâtrie, l'irréligion, l'hérésie, le schisme, le parjure, l'avortement, la contraception, l'adultère, la fornication), détourne l'homme de son Créateur, auquel le pécheur préfère un bien créé.
Pour qu'un péché soit mortel, une matière grave ne suffit pas; il est requis également que l'acte soit accompli avec pleine connaissance et de propos délibéré.
«Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l'amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c'est-à-dire de l'état de grâce.
S'il n'est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu, il cause l'exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de l'enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour toujours, sans retour» (CEC 1861).
L'Apôtre saint Jean décrivait ainsi le sort de ceux qui meurent en état de péché mortel: Pour les lâches, les incrédules, les dépravés, les meurtriers, les impudiques, les magiciens, les idolâtres et tous les hommes de mensonge, leur part est dans l'étang brûlant de feu et de soufre: c'est la seconde mort!
Cette vérité prend d'autant plus de relief que, pour chaque être humain, la mort est une certitude, et qu'après la mort, chacun de nous sera jugé.
Car il nous faudra tous apparaître à découvert devant le tribunal du Christ, pour que chacun reçoive ce qu'il a mérité, soit en bien soit en mal, pendant qu'il était dans son corps (2 Cor 5, 10).
Or, après la mort il n'y aura plus de temps pour se convertir. C'est donc maintenant qu'il faut faire pénitence. «Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels» (Saint François d'Assise).
Une huile miraculeuse
En septembre 1665, une enquête sur les apparitions du Laus est entreprise par le vicaire général d'Embrun, Antoine Lambert.
Celui-ci, après avoir achevé l'interrogatoire de la voyante, célèbre la Messe.
Ce matin-là, est présente Catherine Vial, femme gravement atteinte d'une maladie nerveuse à l'origine du repliement de ses jambes, en sorte que les talons touchent le bas du dos.
Ses parents ont tout essayé pour la guérir, mais en vain.
On a conduit la malade au Laus afin d'y faire une neuvaine à Notre-Dame.
Pendant la nuit qui suit la conclusion de la neuvaine, elle peut étendre ses jambes et se sent guérie.
Au matin, elle se fait porter à la chapelle, alors que le vicaire général termine la Messe.
On crie tout haut «Miracle!»
La Messe achevée, l'ecclésiastique interroge la miraculée et les témoins, puis affirme:
«Le doigt de Dieu est là».
Ainsi, le 18 septembre 1665, pour les dix-huit ans de Benoîte, les apparitions et le pèlerinage sont officiellement reconnus par l'autorité diocésaine et, dès l'automne de cette année, on commence la construction d'une église assez grande pour accueillir les pèlerins, de plus en plus nombreux.
Notre-Dame s'est révélée au Laus comme la réconciliatrice et le refuge des pécheurs.
Aussi donne-t-elle des signes pour convaincre ceux-ci de la nécessité de se convertir.
Elle annonce alors à Benoîte que l'huile de la lampe de la chapelle (qui brûle devant le Saint-Sacrement), opérera des guérisons sur les malades qui s'en appliqueront, s'ils ont recours à son intercession avec foi.
De fait, de nombreuses guérisons sont enregistrées en peu de temps: une enfant retrouve l'usage d'un oeil; une personne est guérie d'un ulcère à la main.
Encore de nos jours, des miracles se produisent chez des personnes qui, confiantes en l'intercession de Notre-Dame, se servent avec dévotion de l'huile du Laus.
Une planche de salut
Benoîte prend à coeur la mission qu'elle a reçue de la Très Sainte Vierge: préparer les pécheurs à recevoir le sacrement de Pénitence.
Aussi, encourage-t-elle souvent les deux prêtres qui sont affectés au sanctuaire à recevoir les pèlerins avec douceur, patience et charité, usant d'une bonté particulière à l'égard des plus grands pécheurs afin de les inciter au repentir.
«Le Christ a institué le sacrement de Pénitence pour tous les membres pécheurs de son Église, avant tout pour ceux qui, après le baptême, sont tombés dans le péché grave...
C'est à eux que le sacrement de Pénitence offre une nouvelle possibilité de se convertir et de retrouver la grâce de la justification.
Les Pères de l'Église présentent ce sacrement comme «la seconde planche de salut après le naufrage qu'est la perte de la grâce».
Dieu seul pardonne les péchés.
Parce que Jésus est le Fils de Dieu, Il dit de Lui-même :
Le Fils de l'Homme a le pouvoir de remettre les péchés sur la terre et Il exerce ce pouvoir divin :
Tes péchés sont pardonnés!
Plus encore : en vertu de sa divine autorité, Il donne ce pouvoir aux hommes pour qu'ils l'exercent en son nom» (CEC 1446, 1441).
Dans ce sacrement, le prêtre, qui tient la place du Christ juge et médecin, doit être informé sur l'état du pénitent.
Par conséquent, «il faut que le fidèle, outre la conscience des péchés commis, la contrition et la volonté de ne plus retomber, confesse ses péchés.
En ce sens, le Concile de Trente déclarait qu'il était nécessaire, «de droit divin, que l'on confesse tous et chacun des péchés mortels»».
(Jean-Paul II, Motu proprio Misericordia Dei, 7 avril 2002).
Cette obligation n'est pas un poids imposé aux pénitents de manière arbitraire, mais un moyen de libération pour retrouver la paix du coeur.
Si, par le péché, nous nous sommes détournés de notre Père du Ciel, le sacrement de pénitence nous permet de revenir vers Lui, de nous jeter dans ses bras miséricordieux.
La confession est ainsi l'occasion de retrouvailles amoureuses entre l'enfant et son Père.
«Ce n'est pas le pécheur qui revient à Dieu pour Lui demander pardon, mais c'est Dieu qui court après le pécheur et qui le fait revenir à Lui», disait le saint Curé d'Ars.
«Pour recevoir le sacrement de pénitence, il faut trois choses, ajoutait le même saint: la Foi qui nous découvre Dieu présent dans le prêtre, l'Espérance qui nous fait croire que Dieu nous donnera la grâce du pardon, la Charité qui nous porte à aimer Dieu, et qui met au coeur le regret de L'avoir offensé».
Benoîte encourage aussi les confesseurs à avertir les pénitents de ne s'approcher de la Sainte Communion qu'après une bonne confession, préparée par un examen de conscience à la lumière des dix Commandements et du Sermon sur la Montagne.
En effet, «celui qui a conscience d'avoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la Sainte Communion, même s'il éprouve une grande contrition, sans avoir préalablement reçu l'absolution sacramentelle» (CEC 1457).
La tâche de Benoîte n'est pas facile; la Vierge lui demande d'admonester les femmes et les filles qui mènent une vie scandaleuse, allant parfois jusqu'à l'infanticide, les gentilshommes injustes ou pervers, les prêtres et les religieux infidèles à leurs engagements sacrés. Mais la voyante s'en acquitte bien.
Elle encourage les pénitents, avertit ceux qui n'osent confesser leurs péchés, et les oriente vers un confesseur approprié.
«En célébrant le sacrement de la Pénitence, le prêtre accomplit le ministère du Bon Pasteur qui cherche la brebis perdue, celui du Bon Samaritain qui panse les blessures, du Père qui attend le fils prodigue et l'accueille à son retour, du juste juge qui ne fait pas acception de personnes et dont le jugement est à la fois juste et miséricordieux.
Bref, le prêtre est le signe et l'instrument de l'amour miséricordieux de Dieu envers le pécheur» (CEC 1465).
Surtout, Benoîte se sacrifie pour les pécheurs et prie pendant qu'ils se confessent. Pour réparer leurs péchés et leur obtenir des grâces, elle s'adonne à des pénitences sévères au point de compromettre sa santé.
Un temps propice pour se réconcilier
Cependant, tous ne voient pas d'un bon oeil les événements du Laus; certains vont jusqu'à attribuer les apparitions au démon.
Aussi, une nouvelle enquête diocésaine devient-elle nécessaire; elle convainc le nouveau vicaire général, Jean Javelly, de la réalité des apparitions.
À ceux qui se plaignent que tout le monde s'en va au Laus, il répond:
«Ce n'est pas Benoîte qui fait perdre la dévotion (c'est-à-dire la pratique religieuse) de notre Église, ce sont nos péchés qui en sont la cause: par le peu de zèle et de soin que nous avons de la maintenir, la dévotion est allée à l'extrémité du diocèse.
Bien loin de l'en retirer, ni de rien faire à cette bonne et sainte fille dont je connais la vertu, nous devons prendre garde que la dévotion n'en sorte (du diocèse d'Embrun), et concourir avec elle pour la conserver là, de peur que nous la perdions tout à fait».
Dans sa prière comme dans son apostolat, Benoîte est sans cesse conseillée par Notre-Dame:
«Courage, ma fille!
Prenez patience... faites de bon coeur votre tâche... ne portez aucune haine aux ennemis du Laus».
Son ange gardien l'instruit, lui aussi:
«Quand on est joyeux, tout ce qu'on fait est agréable à Dieu; quand on se fâche, on ne fait rien qui Lui plaise».
Entre 1669 et 1679, Benoîte est favorisée de cinq apparitions du Christ qui se révèle à elle dans un état de souffrance.
Un vendredi de juillet 1673, le Sauveur tout ensanglanté lui dit:
«Ma fille, je me fais voir en cet état afin que vous participiez aux douleurs de ma Passion».
Le Seigneur Jésus, en effet, veut associer à son sacrifice rédempteur ceux-là même qui en sont les premiers bénéficiaires .
Saint Pierre nous avertit:
Il a souffert pour nous, Il nous a tracé le chemin afin que nous suivions ses pas (1 P 2, 21).
Le temps de la Passion nous rappelle que ce sont nos péchés qui ont fait subir à Notre-Seigneur le supplice de la Croix.
«À coup sûr, ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal crucifient de nouveau dans leur coeur, autant qu'il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés et le couvrent de confusion (He 6, 6)».
Mais, par sa mort, le Christ nous libère du péché, et par sa Résurrection, Il nous ouvre l'accès à une vie nouvelle.
Ainsi, Pâques est-il un temps propice pour recevoir le sacrement de Pénitence et se réconcilier avec Dieu.
Elle est la cause que je perds tant d'âmes!
À partir de 1684, le pèlerinage du Laus connaît son plein essor.
Des troupes, en garnison à Gap, se rendent en masse au Laus.
Les soldats, saisis par la grâce, se confessent, changent de vie et deviennent des messagers du Laus, dans toute la France et même à l'étranger.
Cependant, à ce temps de réussite, succède une période d'épreuves et d'obscurité.
Benoîte subit de fortes tentations contre la confiance en Dieu et la chasteté; le démon l'attaque même physiquement, mais elle, se réfugiant dans la prière, ne cède pas.
L'esprit infernal révèle un jour le motif de ces attaques:
«Elle est la cause que je perds tant d'âmes», crie-t-il.
Fin juillet 1692, Benoîte et les prêtres du Laus sont obligés de se réfugier à Marseille pour fuir l'invasion des troupes du duc de Savoie qui dévastent la région de Gap.
La paix civile finit par se rétablir, mais Benoîte continue à traverser des épreuves purificatrices.
En effet, le successeur de l'abbé Javelly, adversaire du pèlerinage du Laus, nomme deux nouveaux responsables du sanctuaire qui ont peu de zèle pour le soin des âmes, et fait publier en chaire que le Laus n'est qu'un abus.
À partir de 1700, on interdit à la bergère de parler aux pèlerins, et des menaces pèsent sur sa réputation.
Cependant, Benoîte n'est pas sans consolations: elle reçoit souvent la visite de la Sainte Vierge et de son bon Ange, qui la réconfortent. Enfin, en 1711, le pèlerinage est confié à une nouvelle communauté, celle des «Pères gardistes».
Ces prêtres se révèlent être des hommes de prière qui inculquent aux pèlerins du Laus la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus et le recours à Marie, refuge des pécheurs.
Après vingt ans de calvaire, Benoîte peut de nouveau exercer sa mission dans la paix; une foule de pèlerins vient à elle.
Mais tant d'austérités et d'épreuves ont eu raison de sa santé.
Alitée depuis plus d'un mois, elle reçoit le saint Viatique le jour de Noël 1718.
Trois jours plus tard, elle se confesse et reçoit l'Extrême-Onction, avec grande consolation.
Vers huit heures du soir, Benoîte dit adieu à ceux qui l'entourent, puis, ayant baisé un crucifix, les yeux levés au Ciel, elle décède dans la paix et va rejoindre au Ciel son Époux Jésus et sa Très Sainte Mère Marie.
La cause de béatification de la Servante de Dieu Benoîte Rencurel, introduite en 1871, a récemment été reprise en main par le diocèse de Gap.
Après avoir été administré successivement par les Pères gardistes, les Oblats de Marie Immaculée et les Missionnaires de Notre-Dame du Laus, le sanctuaire est aujourd'hui confié au clergé diocésain, avec l'assistance d'une communauté de Frères de Saint-Jean.
Le sanctuaire du Laus est un centre spirituel qui, fidèle à sa mission, accueille des pèlerins venus se mettre sous la protection maternelle de Marie et recevoir le sacrement du pardon.
Demandons à la Mère de Miséricorde de renouveler chez les chrétiens l'estime et la fréquentation de ce sacrement qui est un moyen privilégié, institué par le Sauveur lui-même, pour recouvrer la grâce de Dieu et la paix de l'âme.
Dom Antoine Marie osb, abbé
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
SAINTE
BERNADETTE SOUBIROUS
voyante de Lourdes, religieuse
(1844-1879)
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Le 18 novembre 1923 eut lieu dans la salle ducale au Palais du Vatican la cérémonie de lecture solennelle du Décret sur l'héroïcité des vertus de la Vénérable Bernadette Soubirous.
Cette Cause « intéresse l'univers catholique tout entier » à cause des rapports qui la rattachent au grand fait de Lourdes, et dans une lettre à ses diocésains Mgr. Chatelus, évêque de Nevers, déclare qu'elle est « particulièrement chère au Pape [ancien pèlerin de Lourdes], qui en possède tous les détails et en désire le succès ».
Sur cette question :
« Est-il bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance et leurs annexes, ont été pratiquées à un degré héroïque ? »
Quand on parcourt la vie de la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard Soubirous – vie qui s'acheva dans le court espace de trente-cinq ans, – il est impossible, si on examine avec soin et jusque dans le détail la manière de vivre et d'agir de la Vénérable, de n'y pas rencontrer quelques imperfections ou défauts, mêlés aux actes des vertus chrétiennes.
C'est pourquoi, afin d'être à même de porter sur la question posée un jugement exact, deux points, semble-t-il, sont à élucider et à résoudre.
Premièrement :
La preuve de l'héroïcité des vertus pratiquées par Sœur Marie-Bernard ressort-elle suffisamment et légitimement des faits ?
Deuxièmement :
Cette preuve ne souffre-t-elle aucun préjudice de la présence desdites imperfections ?
ENFANCE DE BERNADETTE
Pour reprendre les choses d'un peu plus haut dans l'histoire de notre Vénérable, nous la voyons d'abord naître dans un humble village de montagne, de parents pieux, et de modeste condition, bientôt contraints de subir tous les inconvénients de la pauvreté.
L'enfant n'en fut naturellement pas exempte : de là cette santé débile dont elle eut à souffrir dès ses premières années.
Néanmoins, à peine son âge le lui permet-elle, qu'elle n'hésite pas à entrer en service et à garder les troupeaux pour subvenir selon son pouvoir aux besoins de sa famille et venir en aide à ses parents.
On comprend qu'au milieu des occupations de la vie des champs la jeune fille n'eut guère le moyen de corriger ce que pouvait avoir d'un peu rude sa nature d'enfant de la montagne.
Cependant, sans avoir reçu aucune éducation humaine, elle faisait de surprenants progrès dans la pratique de toutes les vertus domestiques et surpassait les jeunes filles de son âge et de sa condition par son ardeur pour la piété et son zèle à apprendre la doctrine chrétienne, l'Oraison dominicale, la Salutation angélique, le Symbole et les autres prières.
C'était un bonheur et un charme de la voir et de lui parler ; son visage, sa conversation, toute sa démarche respiraient cette candeur d'âme naïve, fruit de la simplicité et de l'innocence, et toute entière fondée sur l'humilité.
C'est pourquoi Dieu, « qui choisit ce qui est faible en ce monde pour confondre ce qui est fort » (I Cor, I 27), a élu cette jeune enfant pauvre, cachée et inconnue du monde, pour être l'instrument de sa toute-puissance dans l'incomparable prodige qui s'accomplit à Lourdes, près la grotte de Massabielle, et jeta un si vif éclat sur le milieu du XIXe siècle.
LA VOYANTE DE MASSABIELLE
Cette jeune enfant, dont il a été question jusqu'ici, et dont nous venons d'esquisser le portrait physique et moral, se reconnaît aisément, et le nom si populaire de Bernadette se présente de lui-même à l'esprit.
C'est Bernadette, en effet, qui, par un privilège de la divine bonté, fut favorisée, en l'an 1858, des apparitions réitérées de la Bienheureuse Vierge Marie : apparitions par lesquelles fut confirmé le dogme catholique de l'Immaculée-Conception de cette même Bienheureuse Vierge, défini et promulgué, quatre ans auparavant, par le pape Pie IX, de sainte mémoire.
Du 11 février 1858, en effet, jusqu'au 16 juillet de cette même année, plusieurs apparitions eurent lieu, durant lesquelles la Bienheureuse Vierge Marie se montra à Bernadette, l'entretint souvent et, avec la plus grande bienveillance, l'exhorta à prier pour les pécheurs, à baiser la terre, à faire pénitence, et lui ordonna de faire savoir aux prêtres qu'elle voulait qu'on lui élevât en cet endroit un sanctuaire, où l'on viendrait lui adresser des supplications solennelles.
Elle lui enjoignit en outre de boire de l'eau d'une fontaine encore cachée sous terre, mais prête à jaillir, et de s'y laver.
Il y eut d'autres faits, que nous omettons.
Celui-ci toutefois ne saurait être passé sous silence : comme Bernadette insistait pour savoir le nom de celle qu'elle avait été jugée digne de contempler si souvent, la Bienheureuse Vierge Marie, joignant les mains à la hauteur de la poitrine, et élevant les yeux au ciel, répondit :
« Je suis l'Immaculée Conception. »
Or, ceci se passait le 25 mars, jour de la fête de l'Annonciation de la Bienheureuse Vierge Marie, dans lequel l'Eglise honore également le mystère de l'Incarnation.
Cette coïncidence souligne ainsi avec autant d'opportunité que d'éloquence le lien étroit qui existe entre la Maternité divine et l'Immaculée Conception.
L'ÉPREUVE
Il serait trop long de rapporter ici tout ce que Bernadette eut à souffrir pour défendre la réalité de ces apparitions surnaturelles.
Cette réalité fut reconnue d'abord par l'évêque de Tarbes , après une enquête juridique, puis confirmée d'une manière éclatante par les célèbres miracles qui suivirent bientôt.
Il arriva ce qu'on pouvait prévoir ; le nom et l'histoire du sanctuaire de Lourdes devinrent irrévocablement associés au nom et au souvenir de Bernadette.
On comprend aisément que la voyante allait se trouver alors exposée à une forte tentation, et ses vertus subir une redoutable épreuve, surtout son esprit de pauvreté et son humilité.
Mais rassurons-nous. Admirons plutôt ce souci constant qu'elle a de se dérober à la curiosité des pèlerins, qui rivalisaient d'adresse pour la voir, la visiter, la combler de cadeaux, et de fuir les louanges et les applaudissements des hommes.
LA SŒUR MARIE-BERNARD
C'est encore dans cette louable intention que Bernadette se retira dans l'hospice que les si dévouées Sœurs de la Charité et de l'Instruction chrétienne de Nevers dirigeaient à Lourdes, et que, après quelques années passées dans cet établissement, instruite et formée par les Sœurs, elle sollicita et obtint d'être admise dans leur Congrégation.
Elle se rendit donc à la maison-mère de la Congrégation, à Nevers, et, après son temps de probation, y prononça ses vœux ; son nom de Bernadette fut changé en celui de Sœur Marie-Bernard.
C'est en s'acquittant avec une sainte ardeur de toutes les charges et obligations propres à son nouvel état que Sœur Marie-Bernard devint le modèle des sœurs de Nevers, ses compagnes, dans l'intimité desquelles elle passa les treize dernières années de sa vie.
CONCLUSION :
L'HÉROÏCITÉ DES VERTUS DE BERNADETTE.
Nous avons là, comme en un germe fécond, tous les éléments d'une réponse motivée à la double question posée.
Le zèle ardent et inlassable, en effet, avec lequel Sœur Marie-Bernard n'a cessé de tendre à la perfection dans tous ses actes ; la victoire éclatante qu'avec le secours de la grâce divine elle a remportée sur elle-même, tant par le soin vigilant qu'elle mit à se préserver de la vaine gloire, à laquelle l'exposait la grande notoriété de son nom, que par le courage joyeux et ardent avec lequel elle s'efforça de réprimer et d'adoucir sa rudesse native ; son entrée dans l'état religieux, où elle progressa chaque jour en perfection : tout cela nous fournit manifestement la démonstration nécessaire et désirée de l'héroïcité des vertus de Sœur Marie-Bernard.
LES LÉGÈRES IMPERFECTIONS
NE NUISENT PAS À CETTE HÉROÏCITÉ.
Et la valeur de cette démonstration n'est en aucune façon infirmée par ce fait qu'elle n'est pas parvenue à ce résultat du premier coup, que dans le chemin de la perfection, où elle s'était résolument engagée, elle a pu laisser parfois paraître quelques imperfections ou défauts ; car, selon la sentence bien connue de saint Grégoire le Grand, et qui trouve ici son application, « lorsque nous nous détournons de l'amour de cette vie corruptible, c'est “comme pas à pas” que notre cœur s'achemine vers les réalités invisibles.
Partis des régions inférieures, nous n'atteignons jamais le sommet “du premier coup” ; car, dans sa poursuite de la perfection, notre âme, en perpétuelle ascension, ne parvient au but que lentement et “par degrés” ».
LA CAUSE DE BERNADETTE
INTÉRESSE TOUT L'UNIVERS CATHOLIQUE.
Aussi le jugement de cette Cause de choix fut-il des plus faciles à porter, même en appliquant les règles les plus rigoureuses. Son heureuse issue réjouira à juste titre à la fois le diocèse de Nevers, qui vit les dernières années de Sœur Marie-Bernard et garde ses restes sacrés, et le diocèse de Tarbes et Lourdes, qui la vit naître, et où elle passa son enfance et sa jeunesse, jusqu'à l'âge de vingt-deux ans.
Mais cette Cause ne saurait rester renfermée dans ces étroites limites.
Elle intéresse l'univers catholique tout entier. Partout où règne et fleurit le culte de la Vierge Immaculée de Lourdes, les fidèles accueilleront avec la plus grande joie la nouvelle de la promulgation du présent Décret apostolique, qui termine l'enquête commencée il y a deux ans sur l'héroïcité des vertus de Sœur Marie-Bernard.
SES ÉTAPES.
Les deux Congrégations ante-préparatoire et préparatoire, furent en effet suivies de la Congrégation générale, qui se réunit le 7 août dernier, en présence de Notre Très Saint Père le Pape Pie XI. Dans cette Congrégation, S. Em. le cardinal Antoine Vico, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, en lieu et place du Révérendissime rapporteur le cardinal Nicolas Marini, d'illustre mémoire, décédé quelques jours auparavant, soumit à la discussion le Doute suivant :
« Est-il bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard a pratiqué à un degré héroïque les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance, et leurs annexes ? »
Leurs Éminences les Cardinaux et les pères consulteurs donnèrent chacun à leur tour leur avis.
Notre Très Saint Père le Pape, après avoir entendu avec joie et pesé avec attention ces avis, se réserva le soin de prononcer lui-même le jugement suprême.
Puis il exhorta tous les assistants à implorer, en attendant, avec lui, la lumière divine par de ferventes prières.
Lorsqu'il eut décidé de manifester son intention, il désigna ce jour du XXVIe dimanche après la Pentecôte.
C'est pourquoi, après avoir célébré avec une grande dévotion les Saints Mystères, il manda au Vatican S. Éminence le cardinal Vico, évêque de Porto et de Sainte-Rufine, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites et rapporteur de la Cause, le R. P. Ange Mariani, promoteur général de la Foi, et moi-même, secrétaire soussigné ; puis en leur présence il fit solennellement cette déclaration :
« Il est bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard a pratiqué, à un degré héroïque, les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance, et leurs annexes ».
Il ordonna en conséquence que ce Décret fût proclamé et enregistré dans les Actes de la Sacrée Congrégation des Rites, le quatorzième jour des Calendes de décembre de l'année MDCCCCXXIII
+ A. card. VICO, évêque de Porto et Sainte-Rufine,
préfet de la S. C. des Rites.
PRIÈRES
O Jésus et Marie, faites que toute ma consolation en ce monde soit de vous aimer et de souffrir pour les pécheurs.
Divine Mère, offrez-moi à Jésus. Prenez mon cœur et enfoncez-le dans le cœur de Jésus.
O Marie, ma tendre Mère, voici votre enfant qui n'en peut plus ; faites qu'à votre exemple je sois généreuse dans tous les sacrifices que Notre Seigneur pourra me demander dans le cours de ma vie.
Ma Mère, venez à mon aide.
Accordez-moi la grâce de mourir à moi-même pour ne plus vivre que de mon doux Jésus et pour mon Jésus.
Union, union intime avec lui, comme saint Jean, dans la pureté et dans l'amour.
Ainsi toute à Jésus, qu'il me sera doux de mourir avec Jésus.
Mon âme, réjouissez-vous d'avoir un trait de ressemblance avec Jésus : rester cachée dans l'impuissance.
Porter la Croix cachée dans mon cœur à l'exemple de Marie ; oui, j'irai au parloir avec joie quoique mon âme soit dans la tristesse. Je dirai : mon Dieu, j'y vais, mais à condition qu'une âme sortira du purgatoire ou que vous convertirez un pécheur.
PRIÈRE À SAINTE BERNADETTE
Ô Sainte Bernadette, qui simple et pure enfant, avez dix-huit fois, à Lourdes, contemplé la beauté et reçu les confidences de l'Immaculée et qui avez voulu ensuite vous cacher dans le Cloître de Nevers et vous y consumer en hostie pour les pécheurs, obtenez-nous cet esprit de pureté, de simplicité et de mortification qui nous conduira nous aussi à la vision de Dieu et de Marie au Ciel.
Ainsi soit-il.
LE 3 FÉVRIER 1858
EUT LIEU LA 3e APPARITION DE ND DE LOURDES
Le 18 février
Bernadette tend plume et papier à la dame en lui disant :
Voudriez-vous avoir la bonté de mettre votre nom par écrit ?
Elle répond : Ce n'est pas nécessaire.
Voulez-vous avoir la grâce de venir ici pendant quinze jours ?
Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde, mais dans l'autre.
Le 21 février
Vous prierez Dieu pour les pécheurs.
Le 23 ou 24 février
Pénitence, pénitence, pénitence.
Le 25 février
Allez boire à la fontaine et vous y laver.
Allez manger de cette herbe qui est là. Allez baiser la terre en pénitence pour les pécheurs.
Le 2 mars
Allez dire aux prêtres de faire bâtir ici une chapelle.
Qu'on y vienne en procession.
Durant la quinzaine, la Vierge apprit une prière à Bernadette, et lui dit trois choses qui ne concernaient qu'elle, puis elle ajouta d'un ton sévère :
Je vous défends de dire cela à personne.
Le 25 mars
Je suis l'Immaculée Conception
[center]
BERNADETTE SOUBIROUS
voyante de Lourdes, religieuse
(1844-1879)
[size=16][color=#0033ff][font=Georgia]
Le 18 novembre 1923 eut lieu dans la salle ducale au Palais du Vatican la cérémonie de lecture solennelle du Décret sur l'héroïcité des vertus de la Vénérable Bernadette Soubirous.
Cette Cause « intéresse l'univers catholique tout entier » à cause des rapports qui la rattachent au grand fait de Lourdes, et dans une lettre à ses diocésains Mgr. Chatelus, évêque de Nevers, déclare qu'elle est « particulièrement chère au Pape [ancien pèlerin de Lourdes], qui en possède tous les détails et en désire le succès ».
Sur cette question :
« Est-il bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance et leurs annexes, ont été pratiquées à un degré héroïque ? »
Quand on parcourt la vie de la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard Soubirous – vie qui s'acheva dans le court espace de trente-cinq ans, – il est impossible, si on examine avec soin et jusque dans le détail la manière de vivre et d'agir de la Vénérable, de n'y pas rencontrer quelques imperfections ou défauts, mêlés aux actes des vertus chrétiennes.
C'est pourquoi, afin d'être à même de porter sur la question posée un jugement exact, deux points, semble-t-il, sont à élucider et à résoudre.
Premièrement :
La preuve de l'héroïcité des vertus pratiquées par Sœur Marie-Bernard ressort-elle suffisamment et légitimement des faits ?
Deuxièmement :
Cette preuve ne souffre-t-elle aucun préjudice de la présence desdites imperfections ?
ENFANCE DE BERNADETTE
Pour reprendre les choses d'un peu plus haut dans l'histoire de notre Vénérable, nous la voyons d'abord naître dans un humble village de montagne, de parents pieux, et de modeste condition, bientôt contraints de subir tous les inconvénients de la pauvreté.
L'enfant n'en fut naturellement pas exempte : de là cette santé débile dont elle eut à souffrir dès ses premières années.
Néanmoins, à peine son âge le lui permet-elle, qu'elle n'hésite pas à entrer en service et à garder les troupeaux pour subvenir selon son pouvoir aux besoins de sa famille et venir en aide à ses parents.
On comprend qu'au milieu des occupations de la vie des champs la jeune fille n'eut guère le moyen de corriger ce que pouvait avoir d'un peu rude sa nature d'enfant de la montagne.
Cependant, sans avoir reçu aucune éducation humaine, elle faisait de surprenants progrès dans la pratique de toutes les vertus domestiques et surpassait les jeunes filles de son âge et de sa condition par son ardeur pour la piété et son zèle à apprendre la doctrine chrétienne, l'Oraison dominicale, la Salutation angélique, le Symbole et les autres prières.
C'était un bonheur et un charme de la voir et de lui parler ; son visage, sa conversation, toute sa démarche respiraient cette candeur d'âme naïve, fruit de la simplicité et de l'innocence, et toute entière fondée sur l'humilité.
C'est pourquoi Dieu, « qui choisit ce qui est faible en ce monde pour confondre ce qui est fort » (I Cor, I 27), a élu cette jeune enfant pauvre, cachée et inconnue du monde, pour être l'instrument de sa toute-puissance dans l'incomparable prodige qui s'accomplit à Lourdes, près la grotte de Massabielle, et jeta un si vif éclat sur le milieu du XIXe siècle.
LA VOYANTE DE MASSABIELLE
Cette jeune enfant, dont il a été question jusqu'ici, et dont nous venons d'esquisser le portrait physique et moral, se reconnaît aisément, et le nom si populaire de Bernadette se présente de lui-même à l'esprit.
C'est Bernadette, en effet, qui, par un privilège de la divine bonté, fut favorisée, en l'an 1858, des apparitions réitérées de la Bienheureuse Vierge Marie : apparitions par lesquelles fut confirmé le dogme catholique de l'Immaculée-Conception de cette même Bienheureuse Vierge, défini et promulgué, quatre ans auparavant, par le pape Pie IX, de sainte mémoire.
Du 11 février 1858, en effet, jusqu'au 16 juillet de cette même année, plusieurs apparitions eurent lieu, durant lesquelles la Bienheureuse Vierge Marie se montra à Bernadette, l'entretint souvent et, avec la plus grande bienveillance, l'exhorta à prier pour les pécheurs, à baiser la terre, à faire pénitence, et lui ordonna de faire savoir aux prêtres qu'elle voulait qu'on lui élevât en cet endroit un sanctuaire, où l'on viendrait lui adresser des supplications solennelles.
Elle lui enjoignit en outre de boire de l'eau d'une fontaine encore cachée sous terre, mais prête à jaillir, et de s'y laver.
Il y eut d'autres faits, que nous omettons.
Celui-ci toutefois ne saurait être passé sous silence : comme Bernadette insistait pour savoir le nom de celle qu'elle avait été jugée digne de contempler si souvent, la Bienheureuse Vierge Marie, joignant les mains à la hauteur de la poitrine, et élevant les yeux au ciel, répondit :
« Je suis l'Immaculée Conception. »
Or, ceci se passait le 25 mars, jour de la fête de l'Annonciation de la Bienheureuse Vierge Marie, dans lequel l'Eglise honore également le mystère de l'Incarnation.
Cette coïncidence souligne ainsi avec autant d'opportunité que d'éloquence le lien étroit qui existe entre la Maternité divine et l'Immaculée Conception.
L'ÉPREUVE
Il serait trop long de rapporter ici tout ce que Bernadette eut à souffrir pour défendre la réalité de ces apparitions surnaturelles.
Cette réalité fut reconnue d'abord par l'évêque de Tarbes , après une enquête juridique, puis confirmée d'une manière éclatante par les célèbres miracles qui suivirent bientôt.
Il arriva ce qu'on pouvait prévoir ; le nom et l'histoire du sanctuaire de Lourdes devinrent irrévocablement associés au nom et au souvenir de Bernadette.
On comprend aisément que la voyante allait se trouver alors exposée à une forte tentation, et ses vertus subir une redoutable épreuve, surtout son esprit de pauvreté et son humilité.
Mais rassurons-nous. Admirons plutôt ce souci constant qu'elle a de se dérober à la curiosité des pèlerins, qui rivalisaient d'adresse pour la voir, la visiter, la combler de cadeaux, et de fuir les louanges et les applaudissements des hommes.
LA SŒUR MARIE-BERNARD
C'est encore dans cette louable intention que Bernadette se retira dans l'hospice que les si dévouées Sœurs de la Charité et de l'Instruction chrétienne de Nevers dirigeaient à Lourdes, et que, après quelques années passées dans cet établissement, instruite et formée par les Sœurs, elle sollicita et obtint d'être admise dans leur Congrégation.
Elle se rendit donc à la maison-mère de la Congrégation, à Nevers, et, après son temps de probation, y prononça ses vœux ; son nom de Bernadette fut changé en celui de Sœur Marie-Bernard.
C'est en s'acquittant avec une sainte ardeur de toutes les charges et obligations propres à son nouvel état que Sœur Marie-Bernard devint le modèle des sœurs de Nevers, ses compagnes, dans l'intimité desquelles elle passa les treize dernières années de sa vie.
CONCLUSION :
L'HÉROÏCITÉ DES VERTUS DE BERNADETTE.
Nous avons là, comme en un germe fécond, tous les éléments d'une réponse motivée à la double question posée.
Le zèle ardent et inlassable, en effet, avec lequel Sœur Marie-Bernard n'a cessé de tendre à la perfection dans tous ses actes ; la victoire éclatante qu'avec le secours de la grâce divine elle a remportée sur elle-même, tant par le soin vigilant qu'elle mit à se préserver de la vaine gloire, à laquelle l'exposait la grande notoriété de son nom, que par le courage joyeux et ardent avec lequel elle s'efforça de réprimer et d'adoucir sa rudesse native ; son entrée dans l'état religieux, où elle progressa chaque jour en perfection : tout cela nous fournit manifestement la démonstration nécessaire et désirée de l'héroïcité des vertus de Sœur Marie-Bernard.
LES LÉGÈRES IMPERFECTIONS
NE NUISENT PAS À CETTE HÉROÏCITÉ.
Et la valeur de cette démonstration n'est en aucune façon infirmée par ce fait qu'elle n'est pas parvenue à ce résultat du premier coup, que dans le chemin de la perfection, où elle s'était résolument engagée, elle a pu laisser parfois paraître quelques imperfections ou défauts ; car, selon la sentence bien connue de saint Grégoire le Grand, et qui trouve ici son application, « lorsque nous nous détournons de l'amour de cette vie corruptible, c'est “comme pas à pas” que notre cœur s'achemine vers les réalités invisibles.
Partis des régions inférieures, nous n'atteignons jamais le sommet “du premier coup” ; car, dans sa poursuite de la perfection, notre âme, en perpétuelle ascension, ne parvient au but que lentement et “par degrés” ».
LA CAUSE DE BERNADETTE
INTÉRESSE TOUT L'UNIVERS CATHOLIQUE.
Aussi le jugement de cette Cause de choix fut-il des plus faciles à porter, même en appliquant les règles les plus rigoureuses. Son heureuse issue réjouira à juste titre à la fois le diocèse de Nevers, qui vit les dernières années de Sœur Marie-Bernard et garde ses restes sacrés, et le diocèse de Tarbes et Lourdes, qui la vit naître, et où elle passa son enfance et sa jeunesse, jusqu'à l'âge de vingt-deux ans.
Mais cette Cause ne saurait rester renfermée dans ces étroites limites.
Elle intéresse l'univers catholique tout entier. Partout où règne et fleurit le culte de la Vierge Immaculée de Lourdes, les fidèles accueilleront avec la plus grande joie la nouvelle de la promulgation du présent Décret apostolique, qui termine l'enquête commencée il y a deux ans sur l'héroïcité des vertus de Sœur Marie-Bernard.
SES ÉTAPES.
Les deux Congrégations ante-préparatoire et préparatoire, furent en effet suivies de la Congrégation générale, qui se réunit le 7 août dernier, en présence de Notre Très Saint Père le Pape Pie XI. Dans cette Congrégation, S. Em. le cardinal Antoine Vico, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, en lieu et place du Révérendissime rapporteur le cardinal Nicolas Marini, d'illustre mémoire, décédé quelques jours auparavant, soumit à la discussion le Doute suivant :
« Est-il bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard a pratiqué à un degré héroïque les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance, et leurs annexes ? »
Leurs Éminences les Cardinaux et les pères consulteurs donnèrent chacun à leur tour leur avis.
Notre Très Saint Père le Pape, après avoir entendu avec joie et pesé avec attention ces avis, se réserva le soin de prononcer lui-même le jugement suprême.
Puis il exhorta tous les assistants à implorer, en attendant, avec lui, la lumière divine par de ferventes prières.
Lorsqu'il eut décidé de manifester son intention, il désigna ce jour du XXVIe dimanche après la Pentecôte.
C'est pourquoi, après avoir célébré avec une grande dévotion les Saints Mystères, il manda au Vatican S. Éminence le cardinal Vico, évêque de Porto et de Sainte-Rufine, préfet de la Sacrée Congrégation des Rites et rapporteur de la Cause, le R. P. Ange Mariani, promoteur général de la Foi, et moi-même, secrétaire soussigné ; puis en leur présence il fit solennellement cette déclaration :
« Il est bien établi, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit, que la Vénérable Servante de Dieu Sœur Marie-Bernard a pratiqué, à un degré héroïque, les vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le prochain, ainsi que les vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et de Tempérance, et leurs annexes ».
Il ordonna en conséquence que ce Décret fût proclamé et enregistré dans les Actes de la Sacrée Congrégation des Rites, le quatorzième jour des Calendes de décembre de l'année MDCCCCXXIII
+ A. card. VICO, évêque de Porto et Sainte-Rufine,
préfet de la S. C. des Rites.
PRIÈRES
O Jésus et Marie, faites que toute ma consolation en ce monde soit de vous aimer et de souffrir pour les pécheurs.
Divine Mère, offrez-moi à Jésus. Prenez mon cœur et enfoncez-le dans le cœur de Jésus.
O Marie, ma tendre Mère, voici votre enfant qui n'en peut plus ; faites qu'à votre exemple je sois généreuse dans tous les sacrifices que Notre Seigneur pourra me demander dans le cours de ma vie.
Ma Mère, venez à mon aide.
Accordez-moi la grâce de mourir à moi-même pour ne plus vivre que de mon doux Jésus et pour mon Jésus.
Union, union intime avec lui, comme saint Jean, dans la pureté et dans l'amour.
Ainsi toute à Jésus, qu'il me sera doux de mourir avec Jésus.
Mon âme, réjouissez-vous d'avoir un trait de ressemblance avec Jésus : rester cachée dans l'impuissance.
Porter la Croix cachée dans mon cœur à l'exemple de Marie ; oui, j'irai au parloir avec joie quoique mon âme soit dans la tristesse. Je dirai : mon Dieu, j'y vais, mais à condition qu'une âme sortira du purgatoire ou que vous convertirez un pécheur.
PRIÈRE À SAINTE BERNADETTE
Ô Sainte Bernadette, qui simple et pure enfant, avez dix-huit fois, à Lourdes, contemplé la beauté et reçu les confidences de l'Immaculée et qui avez voulu ensuite vous cacher dans le Cloître de Nevers et vous y consumer en hostie pour les pécheurs, obtenez-nous cet esprit de pureté, de simplicité et de mortification qui nous conduira nous aussi à la vision de Dieu et de Marie au Ciel.
Ainsi soit-il.
LE 3 FÉVRIER 1858
EUT LIEU LA 3e APPARITION DE ND DE LOURDES
Le 18 février
Bernadette tend plume et papier à la dame en lui disant :
Voudriez-vous avoir la bonté de mettre votre nom par écrit ?
Elle répond : Ce n'est pas nécessaire.
Voulez-vous avoir la grâce de venir ici pendant quinze jours ?
Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde, mais dans l'autre.
Le 21 février
Vous prierez Dieu pour les pécheurs.
Le 23 ou 24 février
Pénitence, pénitence, pénitence.
Le 25 février
Allez boire à la fontaine et vous y laver.
Allez manger de cette herbe qui est là. Allez baiser la terre en pénitence pour les pécheurs.
Le 2 mars
Allez dire aux prêtres de faire bâtir ici une chapelle.
Qu'on y vienne en procession.
Durant la quinzaine, la Vierge apprit une prière à Bernadette, et lui dit trois choses qui ne concernaient qu'elle, puis elle ajouta d'un ton sévère :
Je vous défends de dire cela à personne.
Le 25 mars
Je suis l'Immaculée Conception
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
LE VÉNÉRABLE PÈRE
BERNARD MARIE CLAUSI
1789-1849
Extraits biographiques
Prophéties
INTRODUCTION
Nous avons recueilli le texte qui va suivre dans l’un des premiers volumes du “Messager du Sacré-Cœur”, mensuel assez volumineux qui paraissait dès la moitié du XIX siècle et qui survécu jusqu’à la moitié du XX.
Le contenu de ces volumes — une vraie mine d’or pour ceux qui s’intéressent encore à la spiritualité — est assez dense et servi par des plumes averties, par des auteurs renommés en matière religieuse, voir même par d’actuels bienheureux.
Nous avons eu la chance de pouvoir compulser un certain nombre de ces volumes et, si le Seigneur le veut, nous vous ferons partager quelques-unes de ces lectures dont l’intérêt, par les temps qui courent, nous semblent d’une importance accrue.
Le père Bernard Clausi, italien, comme il est dit dans le texte ci-après, est devenu lui aussi bienheureux, après que ses amis, Vincent Palloti et Anna-Maria Taïgi, aient reçu, tous deux, les honneurs de l’autel.
Le caractère eschatologique du message du père Clausi, semble d’une grande importance, lors que l’on connaît d’autres messages — tels ceux de La Salette, de Fatima et bien d’autres, dont la liste serait longue —, où la Vierge Marie nous parle Elle aussi, sur le même ton et avec un zèle tout maternel à nous montrer nos erreurs et nous donnant le remède...
“Si vous faites ce que je dis!...”
Mais le faisons nous ?
Certes non, car nous nous enfonçons chaque jour d’avantage dans les ténèbres opaques du péché, dans la facilité de vivre au jour le jour sans se préoccuper le moins du monde des choses de Dieu et, par conséquent sans tenir le moindre compte des admonestations de notre Maman où de toute autre messager ou prophète que la miséricorde de Dieu place sur nos routes...
Nous n’avons pas le temps pour les choses de Dieu ; le monde nous amuse et nous occupe déjà assez, alors, s’occuper des choses spirituelles devient non pas secondaire, mais tout simplement inutile.
Dieu n’existe plus, crient certains, sans même sourciller...
Mais nous, nous qui croyons en Dieu, qui croyons aux messages et aux avertissements de notre Mère du Ciel, que faisons nous ?
Ne sommes nous pas comme les autres ?...
Ne sommes nous pas comme les pharisiens :
“bonne peinture extérieure et pourriture intérieure” ?...
Même si ces réflexions paraissent dures, elles sont, quelque part, le reflet du monde actuel, des hommes et femmes d’aujourd’hui...
Combien petit est le nombre de ceux qui prient !...
Combien petit est le nombre de ceux qui se donnent la “peine” de se consacrer à Jésus par le Cœur Immaculé de Marie, notre douce et tendre Mère ?
Alors, que ce texte, ancien et pourtant d’une actualité brûlante, puisse nous aider à réfléchir à notre état d’âme, à notre façon d’aimer Dieu, et de nous dire qu’il “faut faire quelque chose”, mais en le faisant vraiment, car les “temps de Marie” sont là...
Prière, pénitence, fidélité à l’Eglise et à celui qui, malgré tant de difficultés et d’obstacles, la dirige et donnerait, sûrement, sa vie pour Elle.
Lisons et méditons...car l’heure est là !
Alphonse Rocha
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LE VÉNÉRABLE PÈRE
BERNARD CLAUSI
Bernard Clausi naquit le 27 novembre 1789, à Saint-Sixte, diocèse de Cozenza, en Calabre. Saint François de Paule, fondateur de l’ordre des Minimes, était né dans le même pays.
C’est ce qui inspira de bonne heure à Vincent — tel était le nom de baptême du jeune Clausi — la pensée d’embrasser cet institut.
Il entra donc comme novice dans un couvent des PP. Minimes, voisin de Saint-Sixte ; mais il dut bientôt quitter l’habit religieux, à l’époque de la conquête du royaume de Naples par les Français, et prendre l’habit militaire.
Il servit dans le corps des vélites. Sous les armes comme dans le couvent, il fut pieux et chaste, soumis à ses chefs, charitable pour ses compagnons.
Dès qu’il put quitter le service militaire, il se hâta de revenir dans sa patrie.
Comme les Religieux étaient dispersés, il revêtit l’habit ecclésiastique et étudia la théologie morale.
Il fut ordonné prêtre en envoyé, en qualité de curé, dans son propre village.
Il se conduisit dans ces fonctions avec tant de zèle, de charité, de modestie, que l’évêque ne voulait plus lui donner la permission de retourner dans le couvent des PP. Minimes, tant il regrettait un si bon ouvrier, qu’il appelait une des perles de son diocèse (1821).
Vincent Clausi fit sa profession dans le couvent de Paola, et il s’appela désormais père Bernard Maria.
Déjà il menait la vie d’un saint, passant une partie de ses nuits en prière.
De Paola il fut envoyé à Rome, où il exerça plusieurs fonctions, entre autres celle de gardien, qui répond à la charge de supérieur (1830). Il habitait le couvent de Saint-François-de-Paule-des-Monts. Il demeura quinze années à Rome.
En 1845, il fut envoyé au couvent de Paterne, puis deux ans plus tard, rappelé à Rome, après quelques mois de séjour à Naples.
On peut dire du serviteur de Dieu qu’il fut l’un des hommes les plus remarquables de son temps par l’héroïcité de ses vertus, par les prodiges qu’il a opérés, par son caractère aimable et par les dons surnaturels qui lui ont été prodigués.
Il est déjà déclaré Vénérable, et la cause de sa béatification est une des plus intéressantes.
Nul doute qu’un jour il ne soit placé sur les autels.
Nous ne raconterons pas la vie de Bernard Clausi, Dieu, il faudrait un volume, et telle n’est pas notre intention; nous indiquerons seulement quelques-unes des choses extraordinaires qui le rendirent célèbre de son vivant en Italie.
Le démon persécuta le serviteur de Dieu avec un acharnement incroyable, et d’une manière visible.
Il se battait corps à corps avec le père Bernard, et, un jour, on vit celui-ci rouler dans la poussière, aux prises avec un adversaire invisible.
Le démon apparaissait sous des formes sensibles, et il faisait souffrir d’horribles vexations au saint religieux.
Cela dura dix années.
Sans parler des peines intérieures et des troubles profonds de l’âme, des scrupules, qui étaient l’œuvre de l’esprit de mensonge, le démon alla jusqu’à le jeter dans la mer, et le serviteur de Dieu ne dut la vie qu’à la protection de Marie.
Cette chute fut une cause de grande humiliation pour lui.
Quelques-uns ne craignaient pas de dire qu’il était devenu fou, et qu’il avait voulu se noyer. Cette terrible épreuve ne se dissipa qu’au dernier jour de sa vie.
Il eut le don de connaître l’avenir à un degré vraiment extraordinaire. Citons quelques-unes des prédictions que les événements se chargèrent d’accomplir avec exactitude.
Il prophétisa en 1849, à Dom Vincent Palloti, sa mort prochaine en ces termes :
« Vincent, Vincent, sortez de ce monde souillé.
Qu’avez-vous encore à y faire ?
Dans un mois et trois jours nous nous verrons là-haut. »
Et il montrait le ciel. Et, de fait, ce temps s’écoula entre la mort des deux serviteurs de Dieu.
Le père Bernard prédit aussi sa mort, avec les circonstances merveilleuses qui l’accompagnèrent.
Il assurait que saint Michel descendrait pour précipiter dans l’enfer le démon qui le tourmentait; que sa mort serait précédée d’un tremblement de terre, et suivie d’une tempête sur terre et sur mer.
Ce qui arriva comme il l’avait prédit. Il fut délivré, avant de mourir, des angoisses extrêmes dont son âme était tourmentée depuis un an: après avoir communié, il entonna le Te Deum, et il expira doucement les bras en croix et le visage serein.
Le serviteur de Dieu était sur le point de quitter Rome.
La marquise Corti-Lepri, sa fille spirituelle, tout attristée de son départ, lui dit :
« Mon Père qui m’assistera au moment de ma mort ? »
Le Père lui répondit :
« Vous serez seule avec votre crucifix ».
A ces paroles, la marquise effrayée le conjura de ne pas l’abandonner, et de prier le Seigneur d’éloigner d’elle un tel malheur.
Mais le serviteur de Dieu lui répéta de nouveau d’un ton ferme :
« Vous serez seule avec votre crucifix, mais Dieu vous assistera. »
Quelques temps après, la femme de chambre de la marquise, étonnée de ne pas avoir été appelée comme à l’ordinaire, entra dans la chambre. Elle trouva la marquise morte, et tenant entre les mains son crucifix.
Bien d’autres faits sont rapportés dans le procès de la Béatification du serviteur de Dieu...
Ainsi, pendant l’époque néfaste de la république romaine, en 1848 et 1849, où plusieurs curés jugèrent prudent de se cacher, l’un d’eux demanda au père Bernard s’il devait rester à son poste ou se dérober.
Le serviteur de Dieu lui dit de rester et de n’avoir aucune crainte, parce que rie de fâcheux ne lui arriverait; et, de fait, ce prêtre put sortir le jour et la nuit, administrer les sacrements aux malades, sans faire une seule mauvaise rencontre.
Lorsque la vénérable servante de Dieu, Marie-Christine de Savoie, reine de Naples, était malade, le roi Ferdinand, qui était plein d’estime pour la sainteté du père Bernard, le fit appeler, afin qu’il vînt la bénir; mais le Père se cacha dans le couvent de la Stella où il habitait, disant aux religieux que la reine était morte et que sa visite était inutile.
Et, en effet, les personnes venues pour le chercher trouvèrent, en arrivant au palais royal, que la reine était morte au moment ou le père Bernard l’avait annoncé.
Les miracles, dans la vie du saint Religieux, peuvent à peine se compter, tant ils sont nombreux.
Il guérit une foule de malades par ses prières.
On le vit souvent élevé de terre pendant ses oraisons. Il apparut en divers endroits en même temps.
Il lisait, dans les cœurs et dans les consciences, les plus secrètes pensées. Un des plus gracieux et des plus célèbres miracles, raconté par plusieurs témoins, est celui qui arriva au mois de mai 1842, à Chieri, en Piémont, dans un orphelinat.
Le père Bernard était à genoux devant la statue de la sainte Vierge, lorsqu’on vit la statue étendre le bras et présenter des fleurs au serviteur de Dieu.
Dans ce même orphelinat, le père Bernard bénit l’eau d’un puits, et déclara que cette eau guérirait les fièvres intermittentes, et qu’il fallait en donner à quiconque en demanderait.
Depuis ce jour, une foule de personnes viennent chercher de cette eau, et à peine elles en ont bu qu’elles sont guéries. Ce prodige continue.
Enfin, la réputation de sainteté dont jouissait le père Bernard était universelle.
À Rome, il était regardé comme un autre Philippe de Néri.
C’était au couvent des Monts un concours perpétuel de toutes sortes de personnes, qui venaient auprès du serviteur de Dieu pour se confesser à lui, ou lui demander des conseils et des prières, solliciter les secours de sa charité, ou baiser sa petite image de Marie.
Tous le regardaient comme un saint. On le voyait parcourir la ville pour visiter et confesser les malades, qui tous désiraient le voir pour obtenir leur guérison ou être assistés par lui.
Les personnes les plus graves et les plus considérables de Rome avaient cette même estime pour le vénérable serviteur de Dieu. Il était l’ami de Dom Vincent Palloti, regardé, lui aussi, comme un saint, et qui était plein de vénération pour le vénérable religieux.
Ce fut, surtout, au moment de la grande et terrible épreuve à laquelle le père Bernard fut soumis à la fin de sa vie, que Dom Palloti exaltait la vertu de l’homme de Dieu et qu’il répétait:
« C’est un Bienheureux ! Le père Bernard est un saint. Dieu le purifie, comme on purifie l’or dans le creuset. »
La vénérable Anna-Maria Taïgi estimait le saint religieux et avait la plus grande confiance en lui.
Les cardinaux, les prélats, les seigneurs, les religieux et le peuple romain avaient cette même opinion de la sainteté du serviteur de Dieu.
Les Supérieurs ecclésiastiques lui avaient donné la permission d’entrer dans tous les monastères de religieuses, bien que soumis à la plus rigoureuse clôture. Enfin, Grégoire XVI et Pie IX avaient beaucoup d’affection pour lui. On rapporte que Pie IX le faisait souvent venir auprès de sa personne, et s’entretenait plusieurs heures avec lui. On dit même que le Souverain-Pontife se confessa à lui pendant son séjour à Portici.
Ferdinand II, roi de Naples, l’invitait à venir lui parler, Charles-Albert, roi de Sardaigne, voulut l’avoir plusieurs jours auprès de lui lors que le père Bernard vint à Turin, et ce fut le comte Solar de la Margarita qui lui donna l’hospitalité.
La foi, l’amour de Dieu, la charité pour le prochain, qui était à un degré supérieur dans le cœur du père Bernard, lui avaient inspiré un zèle ardent du salut des âmes.
Aussi il gémissait et son cœur était plein de tristesse, à la vue des malheurs qui menaçaient l’Eglise, et il offrait à Dieu bien des prières et des pénitences afin d’apaiser sa justice.
Nous allons maintenant rapporter quelques prophéties remarquables.
Ces prédictions à la fois effrayantes et consolantes, nous viennent de personnes qui ont vu et entendu le Vénérable père Bernard Clausi. Ces révélations sont connues en Italie. Il n’y a, maintenant, aucun inconvénient à les publier. On peut même espérer que plusieurs, touchés des menaces divines, en profiteront pour se convertir.
PRÉDICTIONS
Premier témoignage
“Le serviteur de Dieu fut orné de dons surnaturels.
Et, de fait, je puis dire que le Seigneur lui avait montré plus de cent fois qu’il préparait de grandes choses pour toute l’Eglise et par tout le monde; que tous les démons sortiraient de l’enfer, mais qu’après, ils y seraient relégués et que tout leur pouvoir, dans la suite, serait limité.
Après cela, il y aurait une grande paix et le triomphe de l’Eglise.
Quelles étaient ces choses?...
Le serviteur de Dieu disait qu’il n’avait pas de paroles pour décrire, ou pour faire comprendre à l’esprit, les grandes choses que Dieu préparait.
Quand au temps où elles devaient arriver, le Seigneur ne le lui avait pas manifesté.
Après m’avoir parlé ainsi, il ajouta:
« Souvenez-vous de ce que je vous ai dit en ce jour, jour de Notre-Dame de Compassion. » — J’ajoute que ce jour fut le troisième dimanche du mois de septembre, fête de Notre-Dame des Sept Douleurs”.
Deuxième témoignage
« Je me souviens que, l’an 1831, époque de la Révolution, par un sentiment de crainte, j’interrogeai le serviteur de Dieu, lequel me dit d’être tranquille, que ce n’était rien, mais qu’il viendrait une époque très malheureuse.
Dans la Révolution de 1849, en parlant avec lui, je lui dis que l’époque annoncée par lui était venue; mais il me répondit, en riant, “que ce que je voyais n’était qu’une mascarade de peu de durée, et qu’il viendrait une époque dans laquelle tout serait bouleversé, et où la main de l’homme serait impuissante ; et alors le Seigneur y mettrait ses très saintes mains, et que, comme un éclair, tout serait arrangé de telle sorte que même les méchants seraient forcés de reconnaître la main de Dieu.”
Peu après, le serviteur de Dieu partit, et moi, le jour avant son départ, j’allai le trouver et je l’interrogeai au sujet de ces choses.
A quoi il ne fit pas d’autre réponse que de me répéter les paroles que j’ai rapportées plus haut, ajoutant seulement qu’il y avait encore du temps d’ici là; et aux instances que je faisais pour avoir quelques éclaircissements, il me répondit qu’on ne pouvait l’exprimer par des paroles, qu’il y aurait des choses grandes, dignes de Dieu, et que chacun goûterait, pour parler ainsi, les délices du Paradis.
Et il ajouta que le Seigneur lui avait fait connaître tout cela, maintes et maintes fois, et il me dit même que c’était autant de fois qu’il avait de cheveux sur la tête.
Tout d’abord il croyait, comme il le dit, que c’était une illusion diabolique; mais ensuite il avait pu se persuader du contraire, parce qu’il avait eu ces révélations même pendant le sacrifice de la messe. »
Troisième témoignage
« Quant aux prophéties, je me souviens que le serviteur de Dieu vint dans cette communauté, et je lui demandai, tout d’abord, si le choléra qui parcourait l’Europe viendrait aussi à Rome; le père Bernard répondit qu’il y viendrait, mais que ce serait en effet de la miséricorde de Dieu.
Je ferai remarquer que le serviteur de Dieu fit cette prédiction plusieurs années avant que la peste vînt à Rome.
Quand ensuite le fléau éclata dans cette ville, le père Bernard nous donna l’assurance que non seulement il n’entrerait pas dans la communauté, mais encore que les parents des religieuses ne périraient pas.
De fait, aucun des parents des religieuses ne mourut à cette époque, et aucun membre de la communauté ne fut atteint par le fléau.
Il répétait ensuite, mais d’une manière à jeter la terreur et l’épouvante, qu’il viendrait un grand fléau, mais qu’il tomberait tout sur les impies.
Il ajouta que ce fléau serait tout nouveau, que l’on ne l’aurait jamais vu dans le monde ; qu’il serait terrible; que le ciel et la terre s’uniraient ; mais qu’il arriverait instantanément et passerait en un moment; que de grands pécheurs se convertiraient, parce qu’alors ils connaîtraient Dieu ; que le fléau serait universel par tout le monde.
Mais, avant qu’il arrive, les maux auront tellement augmenté, qu’il paraîtra que tous les démons seront sortis de l’enfer, et les bons vivront dans un véritable martyre par les persécutions des méchants.
Souvent et presque en toutes occasions où il parlait de cela, il me disait:
« Prenez bien garde de croire ceux qui vous diront de quelle sorte sera le fléau, parce que ce sera une chose tout à fait nouvelle, et qui ne s’est jamais vue dans le monde, et Dieu ne l’a pas révélé à personne; il le tient réservé en lui. »
Il ajoutait que ceux qui resteraient libres (des atteintes du fléau) seraient en petit nombre, et qu’ils seraient tous bons et vraiment convertis.
Pour ceux qui seront demeurés, il leur paraîtra qu’ils seront les seuls dans le monde, à cause de la grandeur terrible du fléau (la terribilità).
Il me disait clairement qu’il ne se trouverait pas en ce temps, mais que je m’y trouverais, et qu’après cela j’aurais tant de joie que j’en oublierais la souffrance. Ensuite viendrait le grand triomphe de l’Eglise; et il disait:
« Heureux ceux qui vivront en ces temps de bonheur, où l’on vivra dans une vraie charité fraternelle!. »
NOTE EXPLICATIVE
Voici quelques mots d’explication au sujet de ces prédictions.
Et d’abord ceux qui les liront remarqueront bien vite ce qu’elles ont de grand et de terrible et de consolant, tout à la fois.
On annonce, en effet, des événements pleins de grandeur et dignes de Dieu.
Ce fléau dont il est parlé, et qui est chargé de purifier la terre de ses souillures, d’apaiser la justice de Dieu, de le faire reconnaître de tous comme le souverain Maître, ce fléau est quelque chose d’inconnu, d’inouï, d’extraordinaire.
Pour le produire, le ciel et la terre s’unissent, et il répand la terreur dans l’univers tout entier.
En vérité, c’est bien un sujet de graves et sérieuses réflexions!
Ce fléau qui tombe et éclate sur les impies, comme éclate et tombe la foudre, ce fléau qui fait périr la plupart des ennemis de Dieu, qui ne laisse qu’un petit nombre de justes tellement effrayés, qu’ils s’imaginent être restés seuls au monde, inspire une terreur religieuse, et ce qui augmente cet effroi, c’est la proximité du fléau.
Quelques années, au plus, ,nous en séparent; l’heure de sa visite va peut-être sonner.
Quel motif sérieux de rentrer en soi-même, de se convertir et de faire pénitence!...
Il y a aussi un côté consolant: les justes échapperont, avec la protection divine, aux atteintes du fléau vendeur.
S’ils ont à souffrir, ils auront ensuite la joie et l’allégresse, et ils oublieront bien vite les heures d’angoisses et de peines.
Ils verront le triomphe de la sainte Eglise, et la paix régnera dans le monde.
Bien des larmes auront coulé, bien des gémissements auront retenti en voyant les persécutions multiples, auxquelles l’Eglise, la sainte Epouse de Jésus-Christ, sera en butte ; depuis longtemps elle se plaint, elle appelle Dieu à son secours. Enfin elle retrouvera la paix, l’honneur et la puissance.
C’est donc une douce lueur de bonheur qui nous est montrée, et nous pouvons entrevoir les années de la délivrance et de la paix.
BERNARD MARIE CLAUSI
1789-1849
Extraits biographiques
Prophéties
INTRODUCTION
Nous avons recueilli le texte qui va suivre dans l’un des premiers volumes du “Messager du Sacré-Cœur”, mensuel assez volumineux qui paraissait dès la moitié du XIX siècle et qui survécu jusqu’à la moitié du XX.
Le contenu de ces volumes — une vraie mine d’or pour ceux qui s’intéressent encore à la spiritualité — est assez dense et servi par des plumes averties, par des auteurs renommés en matière religieuse, voir même par d’actuels bienheureux.
Nous avons eu la chance de pouvoir compulser un certain nombre de ces volumes et, si le Seigneur le veut, nous vous ferons partager quelques-unes de ces lectures dont l’intérêt, par les temps qui courent, nous semblent d’une importance accrue.
Le père Bernard Clausi, italien, comme il est dit dans le texte ci-après, est devenu lui aussi bienheureux, après que ses amis, Vincent Palloti et Anna-Maria Taïgi, aient reçu, tous deux, les honneurs de l’autel.
Le caractère eschatologique du message du père Clausi, semble d’une grande importance, lors que l’on connaît d’autres messages — tels ceux de La Salette, de Fatima et bien d’autres, dont la liste serait longue —, où la Vierge Marie nous parle Elle aussi, sur le même ton et avec un zèle tout maternel à nous montrer nos erreurs et nous donnant le remède...
“Si vous faites ce que je dis!...”
Mais le faisons nous ?
Certes non, car nous nous enfonçons chaque jour d’avantage dans les ténèbres opaques du péché, dans la facilité de vivre au jour le jour sans se préoccuper le moins du monde des choses de Dieu et, par conséquent sans tenir le moindre compte des admonestations de notre Maman où de toute autre messager ou prophète que la miséricorde de Dieu place sur nos routes...
Nous n’avons pas le temps pour les choses de Dieu ; le monde nous amuse et nous occupe déjà assez, alors, s’occuper des choses spirituelles devient non pas secondaire, mais tout simplement inutile.
Dieu n’existe plus, crient certains, sans même sourciller...
Mais nous, nous qui croyons en Dieu, qui croyons aux messages et aux avertissements de notre Mère du Ciel, que faisons nous ?
Ne sommes nous pas comme les autres ?...
Ne sommes nous pas comme les pharisiens :
“bonne peinture extérieure et pourriture intérieure” ?...
Même si ces réflexions paraissent dures, elles sont, quelque part, le reflet du monde actuel, des hommes et femmes d’aujourd’hui...
Combien petit est le nombre de ceux qui prient !...
Combien petit est le nombre de ceux qui se donnent la “peine” de se consacrer à Jésus par le Cœur Immaculé de Marie, notre douce et tendre Mère ?
Alors, que ce texte, ancien et pourtant d’une actualité brûlante, puisse nous aider à réfléchir à notre état d’âme, à notre façon d’aimer Dieu, et de nous dire qu’il “faut faire quelque chose”, mais en le faisant vraiment, car les “temps de Marie” sont là...
Prière, pénitence, fidélité à l’Eglise et à celui qui, malgré tant de difficultés et d’obstacles, la dirige et donnerait, sûrement, sa vie pour Elle.
Lisons et méditons...car l’heure est là !
Alphonse Rocha
*****
LE VÉNÉRABLE PÈRE
BERNARD CLAUSI
Bernard Clausi naquit le 27 novembre 1789, à Saint-Sixte, diocèse de Cozenza, en Calabre. Saint François de Paule, fondateur de l’ordre des Minimes, était né dans le même pays.
C’est ce qui inspira de bonne heure à Vincent — tel était le nom de baptême du jeune Clausi — la pensée d’embrasser cet institut.
Il entra donc comme novice dans un couvent des PP. Minimes, voisin de Saint-Sixte ; mais il dut bientôt quitter l’habit religieux, à l’époque de la conquête du royaume de Naples par les Français, et prendre l’habit militaire.
Il servit dans le corps des vélites. Sous les armes comme dans le couvent, il fut pieux et chaste, soumis à ses chefs, charitable pour ses compagnons.
Dès qu’il put quitter le service militaire, il se hâta de revenir dans sa patrie.
Comme les Religieux étaient dispersés, il revêtit l’habit ecclésiastique et étudia la théologie morale.
Il fut ordonné prêtre en envoyé, en qualité de curé, dans son propre village.
Il se conduisit dans ces fonctions avec tant de zèle, de charité, de modestie, que l’évêque ne voulait plus lui donner la permission de retourner dans le couvent des PP. Minimes, tant il regrettait un si bon ouvrier, qu’il appelait une des perles de son diocèse (1821).
Vincent Clausi fit sa profession dans le couvent de Paola, et il s’appela désormais père Bernard Maria.
Déjà il menait la vie d’un saint, passant une partie de ses nuits en prière.
De Paola il fut envoyé à Rome, où il exerça plusieurs fonctions, entre autres celle de gardien, qui répond à la charge de supérieur (1830). Il habitait le couvent de Saint-François-de-Paule-des-Monts. Il demeura quinze années à Rome.
En 1845, il fut envoyé au couvent de Paterne, puis deux ans plus tard, rappelé à Rome, après quelques mois de séjour à Naples.
On peut dire du serviteur de Dieu qu’il fut l’un des hommes les plus remarquables de son temps par l’héroïcité de ses vertus, par les prodiges qu’il a opérés, par son caractère aimable et par les dons surnaturels qui lui ont été prodigués.
Il est déjà déclaré Vénérable, et la cause de sa béatification est une des plus intéressantes.
Nul doute qu’un jour il ne soit placé sur les autels.
Nous ne raconterons pas la vie de Bernard Clausi, Dieu, il faudrait un volume, et telle n’est pas notre intention; nous indiquerons seulement quelques-unes des choses extraordinaires qui le rendirent célèbre de son vivant en Italie.
Le démon persécuta le serviteur de Dieu avec un acharnement incroyable, et d’une manière visible.
Il se battait corps à corps avec le père Bernard, et, un jour, on vit celui-ci rouler dans la poussière, aux prises avec un adversaire invisible.
Le démon apparaissait sous des formes sensibles, et il faisait souffrir d’horribles vexations au saint religieux.
Cela dura dix années.
Sans parler des peines intérieures et des troubles profonds de l’âme, des scrupules, qui étaient l’œuvre de l’esprit de mensonge, le démon alla jusqu’à le jeter dans la mer, et le serviteur de Dieu ne dut la vie qu’à la protection de Marie.
Cette chute fut une cause de grande humiliation pour lui.
Quelques-uns ne craignaient pas de dire qu’il était devenu fou, et qu’il avait voulu se noyer. Cette terrible épreuve ne se dissipa qu’au dernier jour de sa vie.
Il eut le don de connaître l’avenir à un degré vraiment extraordinaire. Citons quelques-unes des prédictions que les événements se chargèrent d’accomplir avec exactitude.
Il prophétisa en 1849, à Dom Vincent Palloti, sa mort prochaine en ces termes :
« Vincent, Vincent, sortez de ce monde souillé.
Qu’avez-vous encore à y faire ?
Dans un mois et trois jours nous nous verrons là-haut. »
Et il montrait le ciel. Et, de fait, ce temps s’écoula entre la mort des deux serviteurs de Dieu.
Le père Bernard prédit aussi sa mort, avec les circonstances merveilleuses qui l’accompagnèrent.
Il assurait que saint Michel descendrait pour précipiter dans l’enfer le démon qui le tourmentait; que sa mort serait précédée d’un tremblement de terre, et suivie d’une tempête sur terre et sur mer.
Ce qui arriva comme il l’avait prédit. Il fut délivré, avant de mourir, des angoisses extrêmes dont son âme était tourmentée depuis un an: après avoir communié, il entonna le Te Deum, et il expira doucement les bras en croix et le visage serein.
Le serviteur de Dieu était sur le point de quitter Rome.
La marquise Corti-Lepri, sa fille spirituelle, tout attristée de son départ, lui dit :
« Mon Père qui m’assistera au moment de ma mort ? »
Le Père lui répondit :
« Vous serez seule avec votre crucifix ».
A ces paroles, la marquise effrayée le conjura de ne pas l’abandonner, et de prier le Seigneur d’éloigner d’elle un tel malheur.
Mais le serviteur de Dieu lui répéta de nouveau d’un ton ferme :
« Vous serez seule avec votre crucifix, mais Dieu vous assistera. »
Quelques temps après, la femme de chambre de la marquise, étonnée de ne pas avoir été appelée comme à l’ordinaire, entra dans la chambre. Elle trouva la marquise morte, et tenant entre les mains son crucifix.
Bien d’autres faits sont rapportés dans le procès de la Béatification du serviteur de Dieu...
Ainsi, pendant l’époque néfaste de la république romaine, en 1848 et 1849, où plusieurs curés jugèrent prudent de se cacher, l’un d’eux demanda au père Bernard s’il devait rester à son poste ou se dérober.
Le serviteur de Dieu lui dit de rester et de n’avoir aucune crainte, parce que rie de fâcheux ne lui arriverait; et, de fait, ce prêtre put sortir le jour et la nuit, administrer les sacrements aux malades, sans faire une seule mauvaise rencontre.
Lorsque la vénérable servante de Dieu, Marie-Christine de Savoie, reine de Naples, était malade, le roi Ferdinand, qui était plein d’estime pour la sainteté du père Bernard, le fit appeler, afin qu’il vînt la bénir; mais le Père se cacha dans le couvent de la Stella où il habitait, disant aux religieux que la reine était morte et que sa visite était inutile.
Et, en effet, les personnes venues pour le chercher trouvèrent, en arrivant au palais royal, que la reine était morte au moment ou le père Bernard l’avait annoncé.
Les miracles, dans la vie du saint Religieux, peuvent à peine se compter, tant ils sont nombreux.
Il guérit une foule de malades par ses prières.
On le vit souvent élevé de terre pendant ses oraisons. Il apparut en divers endroits en même temps.
Il lisait, dans les cœurs et dans les consciences, les plus secrètes pensées. Un des plus gracieux et des plus célèbres miracles, raconté par plusieurs témoins, est celui qui arriva au mois de mai 1842, à Chieri, en Piémont, dans un orphelinat.
Le père Bernard était à genoux devant la statue de la sainte Vierge, lorsqu’on vit la statue étendre le bras et présenter des fleurs au serviteur de Dieu.
Dans ce même orphelinat, le père Bernard bénit l’eau d’un puits, et déclara que cette eau guérirait les fièvres intermittentes, et qu’il fallait en donner à quiconque en demanderait.
Depuis ce jour, une foule de personnes viennent chercher de cette eau, et à peine elles en ont bu qu’elles sont guéries. Ce prodige continue.
Enfin, la réputation de sainteté dont jouissait le père Bernard était universelle.
À Rome, il était regardé comme un autre Philippe de Néri.
C’était au couvent des Monts un concours perpétuel de toutes sortes de personnes, qui venaient auprès du serviteur de Dieu pour se confesser à lui, ou lui demander des conseils et des prières, solliciter les secours de sa charité, ou baiser sa petite image de Marie.
Tous le regardaient comme un saint. On le voyait parcourir la ville pour visiter et confesser les malades, qui tous désiraient le voir pour obtenir leur guérison ou être assistés par lui.
Les personnes les plus graves et les plus considérables de Rome avaient cette même estime pour le vénérable serviteur de Dieu. Il était l’ami de Dom Vincent Palloti, regardé, lui aussi, comme un saint, et qui était plein de vénération pour le vénérable religieux.
Ce fut, surtout, au moment de la grande et terrible épreuve à laquelle le père Bernard fut soumis à la fin de sa vie, que Dom Palloti exaltait la vertu de l’homme de Dieu et qu’il répétait:
« C’est un Bienheureux ! Le père Bernard est un saint. Dieu le purifie, comme on purifie l’or dans le creuset. »
La vénérable Anna-Maria Taïgi estimait le saint religieux et avait la plus grande confiance en lui.
Les cardinaux, les prélats, les seigneurs, les religieux et le peuple romain avaient cette même opinion de la sainteté du serviteur de Dieu.
Les Supérieurs ecclésiastiques lui avaient donné la permission d’entrer dans tous les monastères de religieuses, bien que soumis à la plus rigoureuse clôture. Enfin, Grégoire XVI et Pie IX avaient beaucoup d’affection pour lui. On rapporte que Pie IX le faisait souvent venir auprès de sa personne, et s’entretenait plusieurs heures avec lui. On dit même que le Souverain-Pontife se confessa à lui pendant son séjour à Portici.
Ferdinand II, roi de Naples, l’invitait à venir lui parler, Charles-Albert, roi de Sardaigne, voulut l’avoir plusieurs jours auprès de lui lors que le père Bernard vint à Turin, et ce fut le comte Solar de la Margarita qui lui donna l’hospitalité.
La foi, l’amour de Dieu, la charité pour le prochain, qui était à un degré supérieur dans le cœur du père Bernard, lui avaient inspiré un zèle ardent du salut des âmes.
Aussi il gémissait et son cœur était plein de tristesse, à la vue des malheurs qui menaçaient l’Eglise, et il offrait à Dieu bien des prières et des pénitences afin d’apaiser sa justice.
Nous allons maintenant rapporter quelques prophéties remarquables.
Ces prédictions à la fois effrayantes et consolantes, nous viennent de personnes qui ont vu et entendu le Vénérable père Bernard Clausi. Ces révélations sont connues en Italie. Il n’y a, maintenant, aucun inconvénient à les publier. On peut même espérer que plusieurs, touchés des menaces divines, en profiteront pour se convertir.
PRÉDICTIONS
Premier témoignage
“Le serviteur de Dieu fut orné de dons surnaturels.
Et, de fait, je puis dire que le Seigneur lui avait montré plus de cent fois qu’il préparait de grandes choses pour toute l’Eglise et par tout le monde; que tous les démons sortiraient de l’enfer, mais qu’après, ils y seraient relégués et que tout leur pouvoir, dans la suite, serait limité.
Après cela, il y aurait une grande paix et le triomphe de l’Eglise.
Quelles étaient ces choses?...
Le serviteur de Dieu disait qu’il n’avait pas de paroles pour décrire, ou pour faire comprendre à l’esprit, les grandes choses que Dieu préparait.
Quand au temps où elles devaient arriver, le Seigneur ne le lui avait pas manifesté.
Après m’avoir parlé ainsi, il ajouta:
« Souvenez-vous de ce que je vous ai dit en ce jour, jour de Notre-Dame de Compassion. » — J’ajoute que ce jour fut le troisième dimanche du mois de septembre, fête de Notre-Dame des Sept Douleurs”.
Deuxième témoignage
« Je me souviens que, l’an 1831, époque de la Révolution, par un sentiment de crainte, j’interrogeai le serviteur de Dieu, lequel me dit d’être tranquille, que ce n’était rien, mais qu’il viendrait une époque très malheureuse.
Dans la Révolution de 1849, en parlant avec lui, je lui dis que l’époque annoncée par lui était venue; mais il me répondit, en riant, “que ce que je voyais n’était qu’une mascarade de peu de durée, et qu’il viendrait une époque dans laquelle tout serait bouleversé, et où la main de l’homme serait impuissante ; et alors le Seigneur y mettrait ses très saintes mains, et que, comme un éclair, tout serait arrangé de telle sorte que même les méchants seraient forcés de reconnaître la main de Dieu.”
Peu après, le serviteur de Dieu partit, et moi, le jour avant son départ, j’allai le trouver et je l’interrogeai au sujet de ces choses.
A quoi il ne fit pas d’autre réponse que de me répéter les paroles que j’ai rapportées plus haut, ajoutant seulement qu’il y avait encore du temps d’ici là; et aux instances que je faisais pour avoir quelques éclaircissements, il me répondit qu’on ne pouvait l’exprimer par des paroles, qu’il y aurait des choses grandes, dignes de Dieu, et que chacun goûterait, pour parler ainsi, les délices du Paradis.
Et il ajouta que le Seigneur lui avait fait connaître tout cela, maintes et maintes fois, et il me dit même que c’était autant de fois qu’il avait de cheveux sur la tête.
Tout d’abord il croyait, comme il le dit, que c’était une illusion diabolique; mais ensuite il avait pu se persuader du contraire, parce qu’il avait eu ces révélations même pendant le sacrifice de la messe. »
Troisième témoignage
« Quant aux prophéties, je me souviens que le serviteur de Dieu vint dans cette communauté, et je lui demandai, tout d’abord, si le choléra qui parcourait l’Europe viendrait aussi à Rome; le père Bernard répondit qu’il y viendrait, mais que ce serait en effet de la miséricorde de Dieu.
Je ferai remarquer que le serviteur de Dieu fit cette prédiction plusieurs années avant que la peste vînt à Rome.
Quand ensuite le fléau éclata dans cette ville, le père Bernard nous donna l’assurance que non seulement il n’entrerait pas dans la communauté, mais encore que les parents des religieuses ne périraient pas.
De fait, aucun des parents des religieuses ne mourut à cette époque, et aucun membre de la communauté ne fut atteint par le fléau.
Il répétait ensuite, mais d’une manière à jeter la terreur et l’épouvante, qu’il viendrait un grand fléau, mais qu’il tomberait tout sur les impies.
Il ajouta que ce fléau serait tout nouveau, que l’on ne l’aurait jamais vu dans le monde ; qu’il serait terrible; que le ciel et la terre s’uniraient ; mais qu’il arriverait instantanément et passerait en un moment; que de grands pécheurs se convertiraient, parce qu’alors ils connaîtraient Dieu ; que le fléau serait universel par tout le monde.
Mais, avant qu’il arrive, les maux auront tellement augmenté, qu’il paraîtra que tous les démons seront sortis de l’enfer, et les bons vivront dans un véritable martyre par les persécutions des méchants.
Souvent et presque en toutes occasions où il parlait de cela, il me disait:
« Prenez bien garde de croire ceux qui vous diront de quelle sorte sera le fléau, parce que ce sera une chose tout à fait nouvelle, et qui ne s’est jamais vue dans le monde, et Dieu ne l’a pas révélé à personne; il le tient réservé en lui. »
Il ajoutait que ceux qui resteraient libres (des atteintes du fléau) seraient en petit nombre, et qu’ils seraient tous bons et vraiment convertis.
Pour ceux qui seront demeurés, il leur paraîtra qu’ils seront les seuls dans le monde, à cause de la grandeur terrible du fléau (la terribilità).
Il me disait clairement qu’il ne se trouverait pas en ce temps, mais que je m’y trouverais, et qu’après cela j’aurais tant de joie que j’en oublierais la souffrance. Ensuite viendrait le grand triomphe de l’Eglise; et il disait:
« Heureux ceux qui vivront en ces temps de bonheur, où l’on vivra dans une vraie charité fraternelle!. »
NOTE EXPLICATIVE
Voici quelques mots d’explication au sujet de ces prédictions.
Et d’abord ceux qui les liront remarqueront bien vite ce qu’elles ont de grand et de terrible et de consolant, tout à la fois.
On annonce, en effet, des événements pleins de grandeur et dignes de Dieu.
Ce fléau dont il est parlé, et qui est chargé de purifier la terre de ses souillures, d’apaiser la justice de Dieu, de le faire reconnaître de tous comme le souverain Maître, ce fléau est quelque chose d’inconnu, d’inouï, d’extraordinaire.
Pour le produire, le ciel et la terre s’unissent, et il répand la terreur dans l’univers tout entier.
En vérité, c’est bien un sujet de graves et sérieuses réflexions!
Ce fléau qui tombe et éclate sur les impies, comme éclate et tombe la foudre, ce fléau qui fait périr la plupart des ennemis de Dieu, qui ne laisse qu’un petit nombre de justes tellement effrayés, qu’ils s’imaginent être restés seuls au monde, inspire une terreur religieuse, et ce qui augmente cet effroi, c’est la proximité du fléau.
Quelques années, au plus, ,nous en séparent; l’heure de sa visite va peut-être sonner.
Quel motif sérieux de rentrer en soi-même, de se convertir et de faire pénitence!...
Il y a aussi un côté consolant: les justes échapperont, avec la protection divine, aux atteintes du fléau vendeur.
S’ils ont à souffrir, ils auront ensuite la joie et l’allégresse, et ils oublieront bien vite les heures d’angoisses et de peines.
Ils verront le triomphe de la sainte Eglise, et la paix régnera dans le monde.
Bien des larmes auront coulé, bien des gémissements auront retenti en voyant les persécutions multiples, auxquelles l’Eglise, la sainte Epouse de Jésus-Christ, sera en butte ; depuis longtemps elle se plaint, elle appelle Dieu à son secours. Enfin elle retrouvera la paix, l’honneur et la puissance.
C’est donc une douce lueur de bonheur qui nous est montrée, et nous pouvons entrevoir les années de la délivrance et de la paix.
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BERNARD DE CLAIRVAUX
fondateur, docteur de l'Église
1091-1153
CHRONOLOGIE DE LA VIE
DE SAINT BERNARD
L'an 1091 de Notre-Seigneur, quatrième année du pontificat du pape Urbain II, trente-cinquième du règne de l'empereur Henri IV, et trente et unième de celui de Philippe I, roi de France, naquit Bernard, à Fontaines, près de Dijon, en Bourgogne.
Son père, Tescelin Sore, était seigneur de Fontaines, et sa mère Aleth était fille du seigneur de Montbar.
Le château de ses pères a été donné aux religieux Feuillants et changé en monastère.
On peut lire sur la famille de saint Bernard l'Avis placé en tète de sa Vie, ainsi que Jean l'Ermite dans sa quatrième vie de notre saint, où, dit-on, il fait descendre saint Bernard de l'ancienne famille des dites de Bourgogne, par son père.
L'an 1098. Le bienheureux Robert, abbé de Molesmes, prend avec lui douze religieux de ce monastère et se retire dans le désert de Cîteaux, où il construit un nouveau monastère dans le diocèse de Châlons-sur-Saône, environ à trois lieues de Dijon, avec l'aide et l'approbation de Gautier, évêque de Châlons-sur-Saône, et de Hugues, archevêque de Lyon.
Eudes, duc de Bourgogne, lui donna l'endroit où il devait, avec ses compagnons, pratiquer, dans toute sa pureté, la règle de saint Benoît; c'est le jour de la tète de ce saint, qui tombait cette année-là le dimanche des Rameaux, que Robert jeta les premiers fondements de son oeuvre. Parmi ses premiers compagnons, on compte Aubry, Eudes, Jean, Étienne, Latour et Pierre.
L'an 1099, quarante-troisième aimée du règne de l’empereur Henri IV, trente-neuvième de celui de Philippe I, roi de France, le 29 juillet, Pascal, II qui avait été moine à Cluny, succède à Urbain II, mort dans la onzième année de son pontificat.
Le bienheureux Robert, sur les réclamations des religieux de Molesmes dans le concile de Rome, et sur l'ordre du souverain pontife, revient à Molesmes. Aubry, qui était prieur de Cîteaux, lui succède dans cette maison avec le titre d'abbé. L'église de ce monastère est dédiée à la Sainte Vierge dans le courant de cette même année.
En 1100, Aubry envoie Jean et Ilbod, deux de ses religieux, à Rome, avec des lettres de recommandation des cardinaux Jean et Benoît, de Hugues, archevêque et de Lyon,de Gautier, évêque de Châlons-sur-Saône.
C'est à leur prière que le pape Pascal II confirme l'institut de Cîteaux par un privilège particulier donné à Troja, le 18 avril, indiction VIII, seconde année de son pontificat. On peut voir ce privilège dans Baronius et dans Manrique.
En 1101, l'abbé Aubry établit, dans le nouveau monastère, 1a stricte observance de la règle de saint Benoît, et réforme tout ce qui est contraire à cette règle.
La même année, meurt le bienheureux Bruno, fondateur des chartreux.
Cet ordre prit naissance en 1086. Bruno était originaire de Cologne; ce fut un homme non moins remarquable par sa sainteté que par son savoir.
1102. Mort d'Eudes, duc de Bourgogne, fondateur de Cîteaux. Il est inhumé dans l'église de ce monastère.
La même année, Henri son fils prend l'habit religieux à Cîteaux.
1103. On place généralement cette année-là la substitution de l'habit blanc au noir chez les Cisterciens. On croit aussi que c'est alors qu'ils se mirent à réciter l'office de la Sainte Vierge.
1105. C'est le 1er septembre de cette année, suivant le nécrologe de saint Bénigne de Dijon, où elle fut inhumée, qu'on place en général la mort d'Aleth, mère de saint Bernard. Soit corps fut transféré à Clairvaux cent quarante-cinq ans plus tard. Guillaume a décrit sa mort au livre I de la Vie de saint Bernard, chapitre II.
L'an 1106, septième année du pontificat de Pascal II, quarante-sixième du règne de Philippe I, roi de France, Henri IV finit, par une mort malheureuse, un règne de quarante-neuf ans.
Il eut pour successeur Henri V sur le trône impérial comme dans sa haine pour l'église. Il alla à Rome et porta les mains sur le pape Pascal, à qui il extorqua de force les investitures ecclésiastiques, ainsi que la couronne impériale, en 1111.
L'an 1108, le 30 juillet, neuvième année du pontificat de Pascal II, deuxième année du règne de Henri V, mort de Philippe I, roi de France, à Meudon. Louis son Fils surnommé le Gros, lui succède.
1109. Le 25 janvier, mort du bienheureux Aubry, second abbé du Cîteaux, après neuf ans et demi de prélature. Il a pour successeur le bienheureux Etienne Harding, d'une famille d'Angleterre. Il avait rempli auparavant les fonctions de prieur, et il était un de ceux (lui avaient quitté Molesmes pour aller à Cîteaux mener une vie plus austère.
1110. Le 29 avril, mort du bienheureux Robert, abbé de Molesmes, premier fondateur de Cîteaux. C'est à tort que quelques-uns ont placé sa mort en 1098.
1113.Quatorzième année du pontificat de Pascal II, la huitième du règne de Henri V, et la sixième de celui de Louis VI. Cette aimée est devenue bien célèbre par la conversion de Bernard. Il avait environ vingt-trois ans quand il alla se mettre avec trente autres jeunes gens, ses compagnons, sous la conduite d'Etienne, abbé de Cîteaux.
C'est à partir de ce montent-là que l’ordre de Cîteaux commença à se répandre d'une manière extraordinaire.
La même année, fondation de l'abbaye de la Ferté, première fille de Cîteaux, au diocèse de Chalons-sur-Saône , sur la Grône, par les seigneurs de Vergy, Savaric et Guillaume son fils, comtes de Châlons-sur-Saône. Le premier abbé de cette maison fut Bertrand.
1114. Saint Bernard obtient du ciel la force et le Talent de faire la moisson, ce qu'il n'avait pu faire jusqu'alors, à cause de son extrême délicatesse voir sa Vie, livre I, chapitre IV.
Fondation de Pontigny, secundo fille de Cîteaux, à quatre lieues d'Autun, dans la terre allodiale de Héribert, chanoine d'Autun, avec le concours de Hervée, comte de Nevers, sous l’épiscopat de Humbault.
Plus tard, Thibaut comte de Champagne, construisit la basilique de ce monastère et mérita ainsi d'en être appelé le fondateur. Le premier abbé de Pontigny fut Hugues de Mâcon, qui devint ensuite évêque d'Autan. Saint Bernard lui écrivit plusieurs lettres.
1115. Fondation de Clairvaux et Morimond, troisième et quatrième filles de Cîteaux.
Clairvaux, sur l'Aube en Champagne, au diocèse de Langres, fut fondé le 25 juin, non point par Thibaut, comme l'ont cru à tort ceux qui confondent la translation du monastère de Clairvaux en 1035 avec sa fondation, mais par Rogues, comte de Troyes, ainsi qu'il est dit dans les notes de la lettre XXXI. Bernard, premier abbé de ce monastère qui fut béni, en cette qualité, par Guillaume de Champeaux, évêque de Châlons-sur-Marne, en l'absence de Josceran, évêque de Langres, était alors âgé de vingt-quatre ans. Voir sa Vie, livre I, chapitre VII.
Quant à Morimond, il fut fondé dans lu même diocèse, par Odolric d'Aigremont et Adeline sa femme, seigneurs de Choiseul. Son premier abbé fut Arnold, à qui est adressée la lettre IV de saint Bernard.
Ces quatre abbayes sont comme les quatre filles aînées de Cîteaux, dont sont sorties toutes les autres.
La même année mourut Ives, évêque de Chartres, c’était un homme très-instruit.
Il eût pour successeur Geoffroy, qui fut honoré du titre de légat du saint siège.
Il était très-cher à saint Bernard. Il est parlé de lui dans les lettres XV, XLV et LV dans le livre IV de la Considération, chapitre V, ainsi que dans la Vie de saint Bernard, livre II chapitre I et VI, et livre IV, Chapitre IV.
1116. Premier chapitre général de Cîteaux, tenu par l'abbé Etienne. Il est décidé dans ce chapitre qu'il se réunira désormais tous les ans le 13 septembre, selon ce que rapporte Jean de Vitry, dans son histoire d'Occident, chapitre XIV.
1117. Saint. Bernard,atteint d'une maladie grave, est confié aux soins d'un médecin de la campagne, que lui procure Guillaume, évêque de Châons-sur-Marne. Livre I de sa Vie, chapitre VII.
On place vers cette même année la conversion de Tescelin, père de saint Bernard. Il mourut peu de temps après en très-grande odeur de sainteté, le 11 avril, selon ce qui est rapporté dans le nécrologe de saint Benigne de Dijon.
L'an 1118, douzième année du règne de Henri V, et dixième de celui de Louis VI, Pascal II meurt après onze ans et cinq mois de pontificat. Gélase II lui succède; il avait été comme lui moine à Cluny. Henri lui opposa Maurice Bourdin, archevêque de Prague qui prit le nom de Grégoire.
La même année est fondé l'ordre militaire du Temple, dont les premiers chevaliers furent Hugues du Païens, Geoffroy de Saint-Omer, au rapport de Guillaume de Tyr, dans son livre XII de la guerre sainte.
Selon le même auteur, cet ordre fut confirmé au concile de Troyes, en 1128, ainsi que le rapporte aussi Michel, secrétaire du concile. Il devait être aboli plus tard, en 1313, par Clément V, sous Philippe IV, roi de France, au concile de Vienne.
Fondation du monastère de Trois-Fontaines, première fille de Clairvaux, au diocèse de Châlons-sur- Saône. Son premier abbé fut Roger; le second fût Guy, à qui sont adressées les lettres LXIX et LXX de saint Bernard.
Fondation aussi de Fontenay, seconde fille de. Clairvaux, au diocèse d'Autun.
Son premier abbé fut Geoffroy, frère de saint Bernard. Cet abbé, selon le livre des sépultures de Clairvaux, revint à son cher premier monastère, après avoir fondé et parfaitement organisé celui de Fontenay. Il fut le troisième prieur de Clairvaux, et devint évêque de Langres.
L'an 1119, treizième année du règne de Henri V, onzième de celui de Louis VI, le Pape Gélase Il meurt à Cluny ; il a pour successeur, sous le nom de Calliste II, Guy, évêque de Vienne, qui célébra cette même année, le 31 octobre, un concile à Reims, et eut le bonheur de mettre fin au schisme de Bourdin.
C'est cette même année que le bienheureux Étienne, abbé de Cîteaux, assisté de plusieurs autres abbés, établit la charte de la Charité, comme on l'appelle ordinairement, en trente articles ou chapitres, pour assurer la paix et la tranquillité dans l'ordre de Cîteaux. Elle fut approuvée par le pape Calliste II. On la trouve dans Manrique.
1120. Saint Norbert, que saint Bernard appelle la Trompette du Saint-Esprit, dans la lettre LVI, fonda l'ordre de Prémontré, dans le Laonnais. Voir la lettre CCLV de saint Bernard et les notes.
1121. Concile de Soissons contre Abélard, sous la présidence de Conan, évêque de Palestrine, légat du saint siège. Ce concile force Abélard à livrer de ses propres mains aux flammes son livre de la Trinité.
C'est au commencement de cette même année que mourut Guillaume de Champeaux évêque de Châlons-sur-Marne. Voir à son sujet les notes de la lettre III.
Fondation de Foigny, au diocèse de Laon. C'est à son premier abbé Rainaud que Bernard a adressé ses lettres LXXII, LXXIII, et LXXIV.
1122. Pierre Maurice, originaire de l'Auvergne, surnommé le vénérable, que saint Bernard aimait d'une affection singulière, devient abbé de Cluny pendant l'octave de l'Assomption. Voir les notes de la lettre I de saint Bernard.
1123. C'est vers cette année que Pierre, abbé de la Ferté, est élu évêque de la Tarentaise. C'est le premier évêque sorti de la famille de Clairvaux; il a pour successeur, à la Ferté, Barthélémy, frère de saint Bernard.
La même année, Adam, abbé de saint Denys, a pour successeur, d'un commun accord de tous les religieux, l'abbé Suger, à qui saint Bernard écrivit plusieurs fois.
L'an 1124, dix-huitième année du règne de Henri V, seizième de celui de Louis VI, roi de France, le pape Calliste Il meurt dans la sixième année de son pontificat. Il a pour successeur, la même année, l'évêque d'Ostie, Laurent, gniprit le nom de Honorius II.
1125. Mort de Henri V à Utrecht sur le Rhin, après dix-neuf ans de règne.
Comme il ne laissait pas d'enfant, il s'éleva, à sa mort, une longue et funeste division que saint Bernard sera appelé plus tard à apaiser, entre Lothaire, duc de Saxe, et Conrad, neveu de Henri par sa soeur.
Ce dernier avait été proclamé roi par Frédéric son frère et par d'autres seigneurs.
Après avoir franchi les Alpes, il fut repu à bras ouverts par les Milanais, dont l'archevêque, nommé Anselme, le sacra roi à Modène, capitale du royaume d'Italie, selon ce que rapporte Othon de Freinsingen dans le livre VII de ses chroniques, chapitre XVII. Plus tard, comme on le verra, saint Bernard dut se donner bien du mal pour réconcilier les Milanais avec le pape Innocent et Lothaire II, qui fut élu empereur.
La même année, une grande famine désole particulièrement la France et la Bourgogne, et donne à saint Bernard l'occasion d'exercer sa charité, comme on le voit dans sa Vie, livre I chapitre X.
Cette année-là aussi, saint Bernard fait une maladie qui met ses jours en danger; il rien revient que par la protection de la Sainte Vierge, de saint Benoit et de saint Laurent. Dès cette époque, sa réputation de sainteté singulière et de science se répand par la ville et par le monde entier.
1126. Othon, qui devint plus tard évêque de Freisengen, historiographe célèbre, prend l'habit de Morimond.
Radevig, son ami intime, nous apprend qu'il était arrière petit-fils de l'empereur Henri IV, neveu par sa mère de Henri V ; frère utérin de Conrad et oncle de Frédéric par son père, le pieux et illustre prince Léopold, margrave d'Autriche; sa mère était Agnès, fille de Henri IV.
1127. C'est vers cette année que Étienne qui, de chancelier de France était devenu évêque de Paris, s'éloigna de la cour sur les avis de Bernard, pour mener une vie plus régulière, et se vit persécuté par I,nuis VI, qui finit par le recevoir en grâce, sur les instances des Cisterciens et surtout de saint Bernard.
Henri, archevêque de Sens, fut peu de temps après,et pour des motifs semblables, traité par le roi de France de la même manière que l'avait ït4 celui de Paris; Il eut auprès du roi le même avocat et le même défenseur. On peut voir à ce sujet la lettre XLV et ses notes.
Fondation d'Igny, quatrième fille de Clairvaux, dans le diocèse de Reims, par Raynaud Després, archevêque de Reims. Son premier abbé est Humbert, qui de religieux de la Case-Dieu, devint religieux de Clairvaux Peu de temps après, par amour du repos, il se démit de sa prélature et reçut à Clairvaux.
Bernard, qui était alors retenu en Italie pour les affaires du schisme, le blâme beaucoup de cette résolution dans sa lettre CXLI, ce qui ne l'empêcha point de persévérer dans sa retraite jusqu'à sa mort.
Saint Bernard fit, à ses funérailles, l'éloge de ses excellentes vertus. Il eut pour successeur à Igny l'abbé Guerri, célèbre par sa piété et par ses écrits. Ou a ses discours à la suite de ceux de saint Bernard.
1128. Le jour de la fête de saint Hilaire, concile de Troyes, qu'on place à tort en 1129, comme il ressort des témoignages de Michel, qui en fut le secrétaire.
Il fut présidé par Mathieu, évêque d'Albano, légat du Saint siège.
On v compta parmi les assistants, Étienne de Cîteaux, Bernard de Clairvaux et d'autres abbés du même ordre.
C'est dans ce concile qu'on détermina les couleurs blanches ries habits à donner aux Templiers, et la règle qu'ils devaient suivre. Ce n'est que plus tard, que le pape Eugène III. leur fit placer la croix rouge sur leurs habita.
Fondation de Régny, au diocèse d'Autun.
1129. Le jour de la purification de la sainte Vierge, tenue d'un concile à Châlons-sur-Marne, par Mathieu d'Albano, légat du pape, ancien religieux de Cluny. Dans ce concile, sur l'avis de saint Bernard, Henri, évêque de Verdun, donne sa démission; un certain abbé de Saint Denys de Reims, lui succède pendant deux ans.
Fondation du monastère d'Ours-Camps, au diocèse de Noyons, par l'évêque Simon.
L'an 1131, cinquième année du règne de Lothaire II, vingt-deuxième de celui de Louis VI, ronde France, le pape Honorius meurt, le 16 janvier, dans la sixième année de sort pontificat. Un schisme très-grave règne dans l'Église de Dieu, Grègroire, élit canoniquement sous le nom d'Innocent II le 17 février, se vit disputer le trône par Pierre, fils de Pierre de Léon, appuyé par la violence de ses amis qui étaient tout-puissants à Rome, et par Roger, roi usurpateur de Sicile.
Pendant huit ans entiers, Bernard défendit avec courage la cause d'Innocent.
Voir la lettre CXXIV et les suivantes. En effet, entre autres choses, dans le concile tenu à ce sujet, cette même année, à Étampes, il fut choisi tout d'une voix, par les pères du concile, comme arbitre du différend, et se déclara pour innocent contre Anaclet. Il amena le roi d'Angleterre Henri à le reconnaître également. Voir sa Vie, livre II, chapitre I et notre préface générale au tome I.
La même année, Bernard, avec une humilité admirable, refusa l'évêché de Gênes, devenu vacant l’année précédente par la mort de Sigefroy.
Ce fut cette année-là aussi que Baudoin fut le premier des Cisterciens promu au cardinalat dans le concile de Clermont, ainsi, du moins on le croit, que Martin, cet homme si saint, dont Bernard fait mention dans le livre IV de la Considération, chapitre V. Au sujet de Baudouin, on peut consulter les lettres CXLIV et CCXLIV de saisit Bernard.
1131. Innocent, après avoir été reçu avec magnificence à Liége, était revenu en France à la fin de l'armée précédente. Saint Bernard reprit l'empereur Lothaire qui réclamait les investitures ecclésiastiques.
Innocent le couronna roi de Germanie étant encore en France, se réservant de lui donner la couronne impériale deux ans après à Rome.
Il passa le carême de cette année à Liège, et de retour en France il se rendit, au mois d'octobre, à Reims au concile assemblé dans cette ville contre Annelet, et sacra roi Louis-le-Jeune, à là place de Philippe son frère, qui avait péri misérablement, d’une chute de cheval.
Après le concile, dit Suger dans sa Vie de Louis-le-Gros, lu seigneur pape fixa sa résidence à Autun tout le reste de la présente année, après avoir visité Cluny, dont il consacra l'église, puis Clairvaux et quelques autres communautés, accompagné, dans tontes ces courses, par Bernard. Ernald, dans sa vie de saint Bernard, livre II chapitre 1, place le concile de Reims avant le voyage d'innocent à Liège, contrairement à ce que dit Suger.
La seconde année, selon la grande chronique de Belgique, Bernard refusa l'évêché de Châlons-sur-Marne, où il avait été élu, et fit élever à sa place, Geoffroy, qui était abbé de saint Médard de Soissons. Aubry rapporte la même chose, et ajoute de plus que le pape Innocent consacra l'église de Médard, le 15 octobre, avant de se rendre au concile de Reims, selon ce que rapporte la chronique de ce même monastère.
La même année encore, Thomas, prieur de Saint Victor de Paris, homme d'une grande verte, est cruellement assassiné pour la justice, par les neveux de Thibaut de Nottières, archidiacre de Foix, qui le haïssait à cause des reproches qu'il en avait reçus pour ses exactions envers les ecclésiastiques.
Peu du temps après, Archambault, sous-diacre d'Orléans, mourut pour la même cause, et de la même manière, sur les instigations de Jean, également archidiacre de l'église de Sainte-Croix.
Bernard écrivit pour ce prieur de Saint-Victor ses lettres CLVIII, CLIX, CLX, et CLXII, et sa lettre LXI pour le sous-diacre d'Orléans. Les deux causes furent évoquées et agitées au concile de Jouarre, au diocèse de Meaux.
Fondation de Moreruela en Castille, dans le pays de Zarnora; du monastère de, Saint-Jean de Tarouca, en Lusitanie, diocèse de Lamigo; de Longpont, au diocèse de Soissons; de Cherlieu, au diocèse, de Besançon; de Bonnemont, en Savoie, diocèse de Genève ; de Ridal, en Angleterre, diocèse d’York.
1132. Départ du pape Innocent de France, pour l'Italie, Bernard l'accompagne. Il réconcilie les Pisans et les Génois. L’évêché de Gênes lui est offert pour la seconde fois, avant que Syrus y soit nommé, et même après la nomination de Syrus qui veut se démettre. II refuse avec la même persévérance et la même humilité qu'auparavant.
Grande controverse entre les Clunistes et les Cisterciens, à l'occasion d'un privilège par lequel le pape Innocent dispense ces derniers de payer la dîme. Voir la lettre CCLXXXIII.
Fondation du monastère de Paucelles, au diocèse de Cambrai. Voir la lettre CLXXXVI, et de Trois-Fonts en Angleterre, diocèse d'Yorek. Voir les lettres XCII, XCIV et suivantes.
1133. Saint Bernard, qui était allé en Italie avec Innocent, l'année précédente, écrit la lettre CXXVIII à Henri, roi d'Angleterre, pour lui demander des subsides en faveur du pape, qui ne pouvait occuper Rome, avec le peu de troupes dont il disposait; car l'empereur Lothaire ne lui avait donné que deux mille hommes d'armes.
Cependant, Innocent finit par entrer dans la ville, et remet la couronne impériale sur la tête de Lothaire, dans la basilique de Latran.
Mais, après le départ de l'empereur, Anaclet reprit le dessus à Rome, et Innocent, obligé de s'éloigner encore, se retira à Pise. De cette dernière ville, Bernard est envoyé en Germanie , pour réconcilier Conrad avec Lothaire.
Profitant de cette occasion, Roger, tyran de Sicile, décoré du nom de roi par l'antipape Anaclet, s'efforce de retirer les Pisans de l'obédience du pape Innocent.
Mais ils tinrent bon dans leurs sentiments de fidélité, et Bernard leur écrivit sa lettre CXXX, pour les en féliciter.
C'est à l'époque de ce voyage que se place la conversion de Mascenli, dont il est parlé au livre IV de la vie de saint Bernard, chapitre III, ainsi que celle de la duchesse de Lorraine, dont il est question au même endroit.
1134. Concile de Pise. Pendant que Bernard, sur l'ordre du pape Innocent, s'y rendait en traversant la Lombardie, après avoir réconcilié ensemble Lothaire et Conrad, il reçoit des Milanais, excommuniés et privés de la dignité de Métropole, pour avoir, à la suite d'Anselme, leur archevêque, embrassé le parti de Conrad et d'Anaclet, une lettre où ils le prient de les faire rentrer en grâce avec Lothaire et Innocent.
Il leur promet, par ses lettres CXXXII et CXXXIII, de se rendre au milieu d'eux, aussitôt due le concile sera terminé.
En effet, à peine, grâce à sa prudence, le concile fat-il clos, qu'il partit pour Milan, avec les cardinaux Matthieu, évêque d'Albano, et Guy, évêque de Pise, afin de travailler à la réconciliation de cette ville.
Il fut reçu par tons les habitants avec de grandes démonstrations de joie et une très-grande vénération ; on lui offrit la dignité archiépiscopale, et ce n'est pas sans peine qu'il lit agrîer aux Milanais son refus constant de la recevoir.
Il lit beaucoup de conversions parmi eux, comme on le voit par la lettre CXXXV, et fonda, dans leur ville, la première colonie da son ordre, Ciaravalle, qu'on a souvent, mais à tort, désigné aussi sons le nom de Clairvaux.
Après cela, sur l'ordre du pape Innocent, selon ce que rapporte Sigonio dans son histoire d'Italie, livre II, il se rendit dans plusieurs villes de Lombardie pour rétablir la paix entre elles, et particulièrement à Pavie et à Crémone.
Ayant complètement échoué auprès des Crémonais, dans sa mission, il fit part de leur obstination au pape Innocent dans sa lettre CCCXVIII.
Cependant après le concile de Pise, Norbert, fondateur de l'ordre de Prémontré est rappelé de la terre aux cieux, de même que Etienne, abbé de Cîteaux, qui mourut le 28 mars. Guy, qui avait été élu à sa place avant même qu'il eût rendu le dernier soupir et qui retint en ses mains la houlette pastorale pendant six mois, se vit enfin rejeté et laissa la place à Rainaud, fils de Milon comte de Bar-sur-Seine, selon ce que rapporte Ordéric, moine de Clairvaux, dans son livre VIII. Ce fut cet abbé qui, dans un chapitre général de l'ordre, renferma dans quatre-vingt-sept chapitres les beaux instituts de Cîteaux, qu'on peut lire dans les annales de Manrique.
Fondation de Ciaravalle de Milan; d'Hermerode, au diocèse de Trèves; de Vauclair, au diocèse de Laon.
Le premier abbé de cette maison fut Murdach, à qui est adressée la lettre CCCXXI.
1135. Bernard passe par Milan en revenant d'Italie, et revientà Clairvaux, dont on transfère les bâtiments dans un lieu plus commode, ainsi qu'il est rapporté au livre II de sa Vie, chapitre IV et V.
Il eut à peine le temps de poser à son monastère, car il reçut presque aussitôt l'ordre de se rendre en Aquitaine, avec Geoffroy de Chartres, pour ramener Guillaume, comte de Poitiers et plusieurs autres seigneurs que Gérard, évêque d'Angoulême, avait entraînés dans le schisme, comme on le voit dans le livre II de sa Vie, chapitre VI.
Cela fait, et rendu un peu à lui-même, il entreprit, à la prière d'un autre Bernard Desportes, prieur des chartreux l'explication du Cantique des cantiques, ainsi qu'il est dit dans les lettres CLII1 et CLIV.
Fondation de Buzay, au diocèse de Nantes, par Ermengarde, comtesse de Bretagne, qu'il avait, dans son voyage d'Aquitaine, retirée des vanités du monde. Voir les lettres CXVI et CXVII.
Le premier abbé de cette maison fut Jean, à qui est adressée la lettre CCXXXVII. Fondation aussi de Hautecombe, au diocèse de Genève, de la Gràce-de-Dieu, diocèse de Saintes, et d'Éberbach, diocèse de Mayence.
1136. Guy, l'aîné des frères de saint Bernard., meurt à Pontigny, hors de Clairvaux, comme le saint le lui avait prédit, ainsi qu'il est dit an livre il de sa Vie, chapitre XII.
Fondation de Balerne, au diocèse de Besançon ; son premier abbé est Burchard, à qui est adressée la lettre CXLVI; de la Maison-Dieu, sur le Cher, diocèse de Bourges; son premier abbé fut Robert, cousin de Bernard; c'est à lui qu'est adressée la lettre I, et d'Auberine, diocèse de Langres.
Adoption de l'Abbaye des Alpes, diocèse de Genève, sur la proposition de son abbé Guérin, qui devint plus tard évêque de Sion. Voir la lettre CCLII.
L'an 1137, huitième du pontificat d’Innocent, douzième du règne de l'empereur Lothaire, Louis VI meurt à Paris le 1er août, dans la vingt-neuvième année de son règne. Il a pour successeur Louis VII, son fils, surnommé le Jeune, pour le distinguer de son père, du vivant de qui il fut associé au trône.
La même année, Bernard, appelé par le pape Innocent, repasse une troisième fois les Alpes pour retourner en Italie, qui gémissait sous Anaclet, des vexation de Roger de Sicile.
Ce prince, vaincu grâce aux prières de Bernard, par le duc Rainoulphe, voyant qu'il ne pouvait l'emporter par la force des armes, eut recours à la force de l'éloquence et confia la défense de la cause d'Anaclet à Pierre de Pise, homme d'un rare talent pour la parole ; mais le voyant vaincu et ramené du schisme par Bernard, il n'en revint pas lui-même à de meilleurs sentiments.
Fondation de l'abbaye de Colomba, en Italie, diocèse de Plaisance; de Boccon en Hongrie, diocèse de Vesprin. Plusieurs auteurs rapportent, mais à tort, cette fondation à l'année 1153.
Adoption de l'abbaye de Belfont, appelé depuis Valparayso, en Espagne au diocèse de Zamora.
1138. le 3 décembre, Lothaire II cesse de porter la couronne, après treize ans de règne. Il a pour successeur Conrad, duc de Franconie, qui avait été autrefois son rival.
La même année, mort malheureuse de l'antipape Anaclet, à qui la fraction de Roger donna pour successeur le cardinal Grégoire, qui prit le nom de Victor et qui se dépouilla des insignes du pontificat entre les mains de Bernard.
Le schisme se trouva donc ainsi terminé, grâce au zèle et à la prudence de Bernard, après avoir duré sept ans. Voir la lettre CCCXVII.
Cet heureux résultat obtenu, le saint abbé quitta sans retard la cour de Rome, n'emportant d'Italie, pour tout présent de route, qu'une dent de saint Césaire et quelques autres reliques de saints.
Voir le livre IV de sa Vie, chapitre I. Informé en route qu'il avait été procédé à l'élection de l'évêque de Langres, par l'archevêque de Lyon, nonobstant la promesse que ce dernier avait faite à Rome, Bernard écrit sa lettre CLXV et les suivantes.
Mais une douleur plus grande devait s'ajouter à celle-là, c'est celle qu'il ressentit de la perte de Gérard son frère.
Il avait obtenu de Dieu en Italie, où il l'avait accompagné, un répit à cette mort. Il lui fit une oraison funèbre dans son sermon XXVI sur le Cantique des cantiques, en reprenant le cours interrompu de ce commentaire.
La même année, mort de Rainaud, archevêque de Reims, selon l'Aucnaire de Gembloux. Deux ans après, c’est-à-dire en 1140, Samson, évêque de Chartres, est promus à la dignité d’archevêque de Reims, à la place et au refus de Bernard d’accepter ce titre.
Fondation de Bénissons-Dieu, diocèse de Lyon; cette abbaye a pour premier abbé Aubry, à qui est écrite la lettre CLXXIII.
Adoption de l'abbaye des Dunes, diocèse de Bruges; son premier abbé fut Robert, à qui est écrite la lettre CCCXXIV, le même qui devait un jour succéder à Bernard à Clairvaux.
1139. Concile de près de mille évêques assemblés à Rome dans l'église de Latran : il condamne de nouveau les partisans de Pierre de Léon, et annule ses ordinations; il interdit les tournois , et condamne Arnault de Brescia, comme hérétique, à sortir de l'Italie.
Bernard S'efforce de soustraire à la sévérité du décret porté contre les fauteurs de Pierre de Léon, le cardinal Pierre de Pise, qu'il avait réussi à réconcilier auparavant avec le pape Innocent, comme on le voit par la lettre CCXIII.
Peu de temps après, Innocent est fait prisonnier par Roger, duc de Sicile, qui s'empare de lui par la ruse.
Cet événement hâte la conclusion de la paix si longtemps désirée entre le pape et Roger.
La même année, l'archevêque Malachie, primat d'Irlande, entreprend lui voyage à Rome. C'est à tort que Baronius place ce voyage à la date de 1137, puisque saint Bernard lu:-même noirs apprend, dans sa Vie de saint Malachie, que ce dernier ne survécut que neuf ans à ce voyage : or il mourut en 1148.
C'est pendant ce voyage que Malachie vint à Clairvaux, où il laissa six de ses compagnons de route, pour s'y former à l'institut de Cîteaux, afin de l'établir ensuite en Irlande.
1140. Concile de Sens contre Abélard, qui en appela au Saint-Siège de la condamnation de ses principales erreurs; mais, sur le conseil de Pierre-le-Vénérable, il renonça à donner suite à cet appel et se fixa à Cluny. Pierre-le-Vénérable le réconcilia avec l'Église.
Après avoir passé deux ans d'une manière exemplaire à Cluny, il se rendit au monastère de Saint-Marcel de Châlons-sur-Saône, pour y soigner sa santé devenue mauvaise : il y mourut. Voir les lettres CXCVII et suivantes et leurs notes.
Fondation de Clair-Morets, au diocèse de Saint- Omer; de Blanckeland en Angleterre, dans la province de Galles, diocèse de Man ; de l'Oursière, dans le royaume de Galice, diocèse d'Aureuse; de Larivoir, diocèse de Troyes, ayant pour premier abbé Alain, qui devint plus tard archevêque d'Autun, et compila une Vie de saint Bernard.
La même année, Innocent donna le monastère de Trois-Fontaines de Saint-Anastase, aux religieux de Clairvaux, après l'avoir rétabli avec un disciple de saint Bernard, nommé également Bernard, originaire de Pise, lequel devint pape, dans la suite, sous le nom, d'Eugène III.
Adoption du monastère de Benchor, cédé à saint Bernard par Malachie, primat d'Irlande, et de Casamario, à Vérulo en Italie.
1141. Le pape Innocent, au rapport. de Robert du Mont, jette l'interdit sur les terres du roi Louis, parce qu'il ne voulait pas recevoir l'archevêque de Bourges, qu'il reçut pourtant plus tard, et qu'il délia d'un serment qu'il avait fait contre toutes les lois de la raison. Voir les lettres CCXVIII et suivantes.
La même année, le roi Louis, toujours au dire du même auteur, tomba avec toutes ses troupes sur le comte Thibaut, dévasta ses possessions, et particulièrement la Champagne, où il brûla Vitry.
Dans cet incendie, treize cents âmes périrent, toujours selon Robert, dans son supplément à Sigebert, qui place ces événements à l'année 1143. Voir les lettres CCXVII, CCXX, CCXXII, CCXXIII.
Vers la même époque, se place la mort de Humbeline, soeur de saint Bernard, dont il est parlé au livre I de sa Vie, chapitre VI.
Fondation de Mellifont, en Irlande, au diocèse d'Armagh, par les soins de Malachie qui y plaça les compagnons de voyage qu'il avait laissés à Clairvaux, pour s'y former à la règle, et qui eurent Chrétien pour abbé. Voir les lettres CCCXXXV, et CCCLVII.
1142. Yves, qui de chanoine régulier de Saint Victor près Paris, était devenu cardinal prêtre, est envoyé en France pour prononcer la sentence d'excommunication qui frappait Rainoulphe, comte de Saint-Quentin, pour avoir répudié sa femme Pétronille, sœur du comte Thibaut, et avoir épousé ensuite une fille de Guillaume, duc d'Aquitaine, sœur de la reine de France. Dans le même anathème se trouvaient enveloppés Barthélémy, évêque de Laon, Simon, évêque de Noyon, et Pierre, évêque de Senlis, auteurs du divorce du comte. Voir les lettres CCXVI, CCXX, CXXI.
La même année, Alphonse, roi de Portugal, se fait tributaire ainsi que son royaume de l'abbaye de Clairvaux, à laquelle il assigne une rente de cinquante doublons d'or fin.
Cette même année encore, toujours d'après Robert du Mont, ou du moins vers la fin de l'année précédente, comme le rapporte Ortelius, dans Anselme de Gembloux, chez le Mire, mort de Hugues de Saint-Victor, ami et grand admirateur de saint Bernard , l'Augustin de son siècle. Voir la lettre LXX.
Fondation des monastères de Melon en Galice, diocèse de Tuy; de Sobrado, à peu près à la même époque, dans le diocèse de Compostelle; de Haute-Creste en Savoie, diocèse de Lausanne.
L'an 1143, cinquième de Conrad III, sixième de Louis VII roi de France, mort du pape Innocent, le 25 septembre, après un pontificat de quatorze ans. Il eut pour successeur Guy de Castel, qui prit le nom de Célestin II : c'est à lui que sont adressées les lettres CCXXXIV et CCXXXV.
Fondation d'Alvastem, en Suède, diocèse de Lincoping; de Nidal, au même pays. Quelques auteurs placent la fondation du dernier monastère quatre ans plus tard. Fondation de Belle-Perche, diocèse de Montauban; de Meyra en Galice, diocèse de Lugo.
1144. Mort du pape Célestin, qui ne siégea pas même six mois. Il a pour successeur Gérard le Camérier qui, de chanoine régulier, était devenu cardinal prêtre, du litre de sainte croix de Jérusalem. Il prit le nom de Lucius II. A la même époque, Bernard rétablit la bonne intelligence mire le roi de France, Louis VII, et le comte Thibaut. Lire à ce sujet ses lettres CCXX et suivantes.
La même année, mort de Barthélemy, abbé de la Ferté, frère de saint Bernard; et d'Étienne de Châlons, cardinal évêque de Palestrine, de l'ordre de Cîteaux, homme d'une grande sainteté, à qui Bernard écrivit plusieurs lettres.
Fondation de Beaulieu, diocèse de Rhodez.
L'an 1145, septième du règne de l'empereur Conrad III, huitième, de celui de louis VII, roi de France, le pape Lucius II meurt le 25 février. Il a pour successeur Eugène III, abbé de Saint-Anastase aux Trois-Fontaines. C'est l'abbé Bernard, dont il a été parlé à l'année 1140. Voir les lettres CCXXXVII et suivantes.
A la même époque, saint Bernard, consulté parle roi Louis sur la croisade, renvoya la décision de cette affaire au jugement du pape, comme nous l'avons dit dans notre préface générale, à l'article VII.
Fondation de la Prée, au diocèse de Bourges.
1146. Concile de Chartres assemblé à l'occasion de la guerre sainte.
Pierre le Vénérable est invité à y assister par la lettre CCLXIV de saint Bernard; il ne put s'y rendre, ainsi qu'on le voit par sa réponse à saint Bernard. Sa lettre est la XVIII du livre VI. Bernard, élu généralissime des troupes, exhorte, sur l'ordre du pape Eugène, par ses lettres et par ses prédications qu'il appuyait de miracles, les peuples de la Germanie, les Francs orientaux, les Bavarois, les Anglais et d'autres encore, à prendre la croix. Voir ses lettres CCCLXIII et CCCLXV, ainsi que le livre de ses Miracles.
La même année, l'Église de Tournai, qui avait pendant cinq cents ans et plus été gouvernée par les évêques de Noyon, eut un évêque propre, du nom d'Anselme, qui avait été abbé de saint Vincent de Laon.
Cette ville reçut son évêque de la main du pape Eugène, qui le lui donna à la recommandation de plusieurs personnages, mais entre autre de saint Bernard.
Fondation de Boxley en Angleterre, diocèse de Cantorbéry; de Villers en Brabant, diocèse de Namur. L'Auctaire de Gembloux, dans le Mire, p'ace cette fondation à l'année suivante, et s'exprime en ces termes : « Douze moines avec l'abbé Laurent, et cinq convers, envoyés en Brabant par Bernard de Clairvaux, fondèrent le monastère de Villers.»
1147. Eugène, chassé de Rome, l'année précédente par la faction d'Arnaud qui avait soulevé les Romains contre lui, comme on le voit dans la lettre CCXIII, s'était réfugié en France.
Il est reçu en 1147 à Paris avec beaucoup d’honneur, par le roi Louis, qui, le dimanche des Rameaux de l'année précédente, selon ce que rapporte Robert du Mont dans son Appendice à Sigebert, avait pris la croix avec son frère Geoffroy, comte de Meulan et plusieurs autres soigneurs, lesquels quittèrent Paris cette même année, selon la chronique de Cluny, pour aller combattre les Sarrazins en Syrie.
Cette année-là vit plusieurs synodes se réunir en différents endroits ; le premier à Étampes : il y fut, pris, en présence de Bernard, des arrangements pour l'expédition de la terre sainte, et pour l'administration du royaume, qui fut confiée à Suger, abbé de Saint-Denis, comme il est dit au tome II du Spicilège, dans la chronique de Saint-Denis, et dans le livre des Miracles de saint Bernard, chapitre XVI.
Le second est celui d'Autun, sous la présidence du pape Eugène. Le troisième à Paris, selon Othon de Freissingen, dans son histoire de Frédéric, livre I, chapitre L. La cause de Gilbert de la Porrée, appelée à ce concile, fut renvoyée à l'examen de celui qui devait se tenir l'année suivante à Reims. Voir notre préface générale.
La même année, Bernard va combattre l'hérétique Henri en Aquitaine, avec Aubry cardinal évêque d'Ostie et légat du saint siège, et Geoffroy, évêque de Chartres. Il est question de cet Henri dans notre préface générale et dans la lettre CCXLI de saint Bernard.
La même année, Alphonse, roi de Portugal, s'étant emparé de la ville de Santarém par la vertu des prières de saint Bernant, demande par lettres des moines de Cîteaux, pour établir un monastère de cet ordre dans son royaume.
Fondation d'Alcobaza par le même roi de Portugal dans le diocèse de Lisbonne; de Vauricher, au diocèse de Bayeux ; de Morgan, dans le pays de Galle ; de Spina, au diocèse de Valeritia en Castille, par Sanche, soeur du roi Alphonse. Voir la lettre ceci de saint Bernard.
Adoption de Grandselve, de l'ordre de saint Benoit, au diocèse de Toulouse. Son abbé nommé Bernard se donna lui et tous ses religieux à l'ordre de Cîteaux. Voir la lettre CCXLII.
1148. Concile de Reims le 19 mars, sous la présidence du pape Eugène.
Eon, un fou hérétique, est condamné à la prison; Gluant à Gilbert de la Porrée, évêque de Poitiers, convaincu d'être tombé dans l'erreur, par saint Bernard, il rétracte ce qu'il avait enseigné. Peu après le pape Eugène, sur les instances du saint abbé, approuve les écrits d'Hildegarde, dans le concile de Trèves; mais avant de se rendre à ce concile, il avait fait la dédicace de l'église de Toul; saint Bernard assistait à cette cérémonie.
La même année, le pape Eugène assista au chapitre général de Cîteaux, bénit de nouveau le cimetière de cette abbaye, et, après avoir pris congé des religieux qui fondaient en larmes, il reprit le chemin de l'Italie.
Eugène venait de quitter la France, lorsque saint Malachie, primat d'Irlande entreprit un second voyage à Rome pour y aller recevoir le pallium; mais il mourut à Clairvaux le jour et à l'endroit qu'il avait désirés, c'est-à-dire le jour de la commémoration des morts.
Sa mémoire devint célèbre dès les premiers temps qui suivirent sa mort. Voir la lettre que saint Bernard écrivit aux Irlandais pour les consoler, c'est la CCCLXXIV; voir aussi sa Vie dans le tome II et deux sermons de saint Bernard prononcés le jour de ses funérailles, tome III.
Saint Malachie touchait à ses derniers moments quand les bâtiments du nouveau Clairvaux étant terminés, on fit la translation des restes des vénérable pères qui étaient morts dans le premier monastère, de l'ancien cimetière dans le nouveau, le jour de la Toussaint, comme on le voit par le sermon r sur Malachie, n. 2. Sa canonisation, d'après la Chronique de Clairvaux, est rapportée par Chifflet, à l'année 1192.
Fondation de Cambron, an diocèse de Cambrai, avec Fastrad de Clairvaux pour premier abbé, lequel devint plus tard, après Robert, abbé de Clairvaux.
Adoption de l'abbaye d'Alne, qui. fat d'abord une abbaye de Bénédictins, puis de chanoines réguliers, au diocèse de Liège. La même année, dans un chapitre général de Cîteaux, Serbon, abbé de Savigny, se soumet à Clairvaux, lui et trente bénédictins du monastère de Savigny, situé dans le diocèse d'Avranches. En même temps, Etienne, père et instituteur de la congrégation d'Obasine, diocèse de Limoges, soumet quatre maisons à celle de Clairvaux.
1149. Funeste issue de la guerre sainte; Louis revient en France. (Voir la lettre CCCLXXXVI, le livre II, de la Considération, cap. I, et la Vie de saint Bernard, livre III, chapitre IV). Le roi de France se prépare à une seconde expédition; il est arrêté dans ses préparatifs par les Cisterciens selon ce que rapporte l'abbé Robert dans sa Chronique, à l'année 1150.
La même année, Henri, frère de Louis VII, roi de France, selon ce que rapporte la Chronique de Tours, après avoir été trésorier de saint Martin de Tours, et avoir pris l'habit religieux à Clairvaux, est promu à l'évêché de Beauvais. La Chronique de Saint-Pierre-Vif de Sens place ces faits à l'année suivante. Lire sur ce sujet à la lettre CCCVII, et ses notes.
Fondation de Font-Morigny, dans le diocèse de Bourges; d'Aubepierre, dans celui de Limoges ; de Longuay dans celui de Langres, et de Loz dans celui de Tournai.
Adoption de Boullancourt, monastère de chanoines réguliers, du diocèse de Troyes.
1150. Eugène, après bien des traverses, ayant fini par rentrer en possession de Rome et de son siège, saint Bernard lui envoie son livre II de la Considération, en tête duquel il avait placé une justification de la seconde croisade. Il reçoit une lettre de consolation de Jean, abbé de Casamario, monastère situé dans la ville de Verulo. Cette lettre est maintenant la CCCLXXXVI de la collection de celles de saint Bernard.
1151. Vers la fin de l'année précédente, le 1er décembre, l'abbé Rainaud était mort, il eut pour successeur Gosvin, abbé de Bonneval de Vienne. Voir la lettre CCLXX.
Mort de Hugues, évêque d'Auxerre, que la Chronique de Pierre-Vif appelle un homme de bonne mémoire. Voir pour ce qui concerne l'élection de son successeur, les lettres CCLXI, CCLXXIV, et suivantes.
Mort de Suger, abbé de Saint-Denis, homme d'une grande sainteté. Bernard lui écrivit, dans ses derniers moments, une lettre qui est sa CCLVI.
Louis Vil et Éléonore, selon ce que rapporte Robert du Mont, ayan affirmé par serment, pendant le carême de cette même année, à Beaugency, devant une assemblée d'évêques et d'archevêques, qu'ils étaient parents, furent séparés canoniquement.
Fondation du monastère d'Esron, diocèse de Roschilt.
L'an 1152, huitième du pontificat du pape Eugène, quinzième du règne de Louis VII, roi de France, mort de Conrad, qui laissa la pourpre impériale à son neveu de frère.
Le 8 janvier de la même année, mort de Thibaut, comte de Champagne, homme d'une insigne piété; il est inhumé dans le monastère de Lagny-sur-Marne, dont il avait été l'avocat. Saint Bernard lui avait écrit peu de temps avant sa mort une lettre qui est la CCLXXI.
Adoption de Marolles, diocèse de Mallezès.
Fondation de l'abbaye de Clermont, diocèse du Mans.
Vers la même époque, adoption d'Armintéra, en Galice, diocèse de Compostelle.
L'an 1153, deuxième du règne de l'empereur Frédéric I, seizième du règne de Louis VII, roi de France, le 10 juillet, mort du pape Eugène, après un pontificat de huit ans, quatre mois et treize jours.
Il a pour successeur Conrad qui, de chanoine régulier, était devenu évêque de Palerme.
Il prit le nom d'Anastase IV. Peu de temps après, notre très-saint docteur Bernard, après avoir travaillé pour l'Église de Dieu, malade depuis le milieu de l'hiver précèdent, ainsi qu'il le dit lui-même dans ses lettres CCLXXXVIII, CCCIII, et CCCVIII, meurt en paix, après avoir rétabli la paix entre les habitants de Metz, le 20 août à neuf heures du matin, dans la soixante-troisième année de son âge, la quarantième de sa profession religieuse, et la trente-huitième de sa prélature.
Dans la même semaine, la ville très forte d'Ascalon, en Palestine, lut prise parles Chrétiens, selon que le saint l'avait prédit à plusieurs reprises, comme l'atteste Geoffroy dans le livre III de sa Vie de saint Bernard, chapitre IV.
Bernard eut pour successeur à Clairvaux, Robert, qui était abbé des Dunes.
Fondation du monastère de la Pérouse, diocèse de Périgueux, et de Mores, diocèse de Langres.
Adoption de l'abbaye de Monte-Ramo, diocèse d'Orense en Galice.
NOTA :
Œuvres de Saint Bernard : Tome IV, pages 647-662
Pour consulter toute l'œuvre de Saint Bernard suivre le lien suivant :
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/frame.html
fondateur, docteur de l'Église
1091-1153
CHRONOLOGIE DE LA VIE
DE SAINT BERNARD
L'an 1091 de Notre-Seigneur, quatrième année du pontificat du pape Urbain II, trente-cinquième du règne de l'empereur Henri IV, et trente et unième de celui de Philippe I, roi de France, naquit Bernard, à Fontaines, près de Dijon, en Bourgogne.
Son père, Tescelin Sore, était seigneur de Fontaines, et sa mère Aleth était fille du seigneur de Montbar.
Le château de ses pères a été donné aux religieux Feuillants et changé en monastère.
On peut lire sur la famille de saint Bernard l'Avis placé en tète de sa Vie, ainsi que Jean l'Ermite dans sa quatrième vie de notre saint, où, dit-on, il fait descendre saint Bernard de l'ancienne famille des dites de Bourgogne, par son père.
L'an 1098. Le bienheureux Robert, abbé de Molesmes, prend avec lui douze religieux de ce monastère et se retire dans le désert de Cîteaux, où il construit un nouveau monastère dans le diocèse de Châlons-sur-Saône, environ à trois lieues de Dijon, avec l'aide et l'approbation de Gautier, évêque de Châlons-sur-Saône, et de Hugues, archevêque de Lyon.
Eudes, duc de Bourgogne, lui donna l'endroit où il devait, avec ses compagnons, pratiquer, dans toute sa pureté, la règle de saint Benoît; c'est le jour de la tète de ce saint, qui tombait cette année-là le dimanche des Rameaux, que Robert jeta les premiers fondements de son oeuvre. Parmi ses premiers compagnons, on compte Aubry, Eudes, Jean, Étienne, Latour et Pierre.
L'an 1099, quarante-troisième aimée du règne de l’empereur Henri IV, trente-neuvième de celui de Philippe I, roi de France, le 29 juillet, Pascal, II qui avait été moine à Cluny, succède à Urbain II, mort dans la onzième année de son pontificat.
Le bienheureux Robert, sur les réclamations des religieux de Molesmes dans le concile de Rome, et sur l'ordre du souverain pontife, revient à Molesmes. Aubry, qui était prieur de Cîteaux, lui succède dans cette maison avec le titre d'abbé. L'église de ce monastère est dédiée à la Sainte Vierge dans le courant de cette même année.
En 1100, Aubry envoie Jean et Ilbod, deux de ses religieux, à Rome, avec des lettres de recommandation des cardinaux Jean et Benoît, de Hugues, archevêque et de Lyon,de Gautier, évêque de Châlons-sur-Saône.
C'est à leur prière que le pape Pascal II confirme l'institut de Cîteaux par un privilège particulier donné à Troja, le 18 avril, indiction VIII, seconde année de son pontificat. On peut voir ce privilège dans Baronius et dans Manrique.
En 1101, l'abbé Aubry établit, dans le nouveau monastère, 1a stricte observance de la règle de saint Benoît, et réforme tout ce qui est contraire à cette règle.
La même année, meurt le bienheureux Bruno, fondateur des chartreux.
Cet ordre prit naissance en 1086. Bruno était originaire de Cologne; ce fut un homme non moins remarquable par sa sainteté que par son savoir.
1102. Mort d'Eudes, duc de Bourgogne, fondateur de Cîteaux. Il est inhumé dans l'église de ce monastère.
La même année, Henri son fils prend l'habit religieux à Cîteaux.
1103. On place généralement cette année-là la substitution de l'habit blanc au noir chez les Cisterciens. On croit aussi que c'est alors qu'ils se mirent à réciter l'office de la Sainte Vierge.
1105. C'est le 1er septembre de cette année, suivant le nécrologe de saint Bénigne de Dijon, où elle fut inhumée, qu'on place en général la mort d'Aleth, mère de saint Bernard. Soit corps fut transféré à Clairvaux cent quarante-cinq ans plus tard. Guillaume a décrit sa mort au livre I de la Vie de saint Bernard, chapitre II.
L'an 1106, septième année du pontificat de Pascal II, quarante-sixième du règne de Philippe I, roi de France, Henri IV finit, par une mort malheureuse, un règne de quarante-neuf ans.
Il eut pour successeur Henri V sur le trône impérial comme dans sa haine pour l'église. Il alla à Rome et porta les mains sur le pape Pascal, à qui il extorqua de force les investitures ecclésiastiques, ainsi que la couronne impériale, en 1111.
L'an 1108, le 30 juillet, neuvième année du pontificat de Pascal II, deuxième année du règne de Henri V, mort de Philippe I, roi de France, à Meudon. Louis son Fils surnommé le Gros, lui succède.
1109. Le 25 janvier, mort du bienheureux Aubry, second abbé du Cîteaux, après neuf ans et demi de prélature. Il a pour successeur le bienheureux Etienne Harding, d'une famille d'Angleterre. Il avait rempli auparavant les fonctions de prieur, et il était un de ceux (lui avaient quitté Molesmes pour aller à Cîteaux mener une vie plus austère.
1110. Le 29 avril, mort du bienheureux Robert, abbé de Molesmes, premier fondateur de Cîteaux. C'est à tort que quelques-uns ont placé sa mort en 1098.
1113.Quatorzième année du pontificat de Pascal II, la huitième du règne de Henri V, et la sixième de celui de Louis VI. Cette aimée est devenue bien célèbre par la conversion de Bernard. Il avait environ vingt-trois ans quand il alla se mettre avec trente autres jeunes gens, ses compagnons, sous la conduite d'Etienne, abbé de Cîteaux.
C'est à partir de ce montent-là que l’ordre de Cîteaux commença à se répandre d'une manière extraordinaire.
La même année, fondation de l'abbaye de la Ferté, première fille de Cîteaux, au diocèse de Chalons-sur-Saône , sur la Grône, par les seigneurs de Vergy, Savaric et Guillaume son fils, comtes de Châlons-sur-Saône. Le premier abbé de cette maison fut Bertrand.
1114. Saint Bernard obtient du ciel la force et le Talent de faire la moisson, ce qu'il n'avait pu faire jusqu'alors, à cause de son extrême délicatesse voir sa Vie, livre I, chapitre IV.
Fondation de Pontigny, secundo fille de Cîteaux, à quatre lieues d'Autun, dans la terre allodiale de Héribert, chanoine d'Autun, avec le concours de Hervée, comte de Nevers, sous l’épiscopat de Humbault.
Plus tard, Thibaut comte de Champagne, construisit la basilique de ce monastère et mérita ainsi d'en être appelé le fondateur. Le premier abbé de Pontigny fut Hugues de Mâcon, qui devint ensuite évêque d'Autan. Saint Bernard lui écrivit plusieurs lettres.
1115. Fondation de Clairvaux et Morimond, troisième et quatrième filles de Cîteaux.
Clairvaux, sur l'Aube en Champagne, au diocèse de Langres, fut fondé le 25 juin, non point par Thibaut, comme l'ont cru à tort ceux qui confondent la translation du monastère de Clairvaux en 1035 avec sa fondation, mais par Rogues, comte de Troyes, ainsi qu'il est dit dans les notes de la lettre XXXI. Bernard, premier abbé de ce monastère qui fut béni, en cette qualité, par Guillaume de Champeaux, évêque de Châlons-sur-Marne, en l'absence de Josceran, évêque de Langres, était alors âgé de vingt-quatre ans. Voir sa Vie, livre I, chapitre VII.
Quant à Morimond, il fut fondé dans lu même diocèse, par Odolric d'Aigremont et Adeline sa femme, seigneurs de Choiseul. Son premier abbé fut Arnold, à qui est adressée la lettre IV de saint Bernard.
Ces quatre abbayes sont comme les quatre filles aînées de Cîteaux, dont sont sorties toutes les autres.
La même année mourut Ives, évêque de Chartres, c’était un homme très-instruit.
Il eût pour successeur Geoffroy, qui fut honoré du titre de légat du saint siège.
Il était très-cher à saint Bernard. Il est parlé de lui dans les lettres XV, XLV et LV dans le livre IV de la Considération, chapitre V, ainsi que dans la Vie de saint Bernard, livre II chapitre I et VI, et livre IV, Chapitre IV.
1116. Premier chapitre général de Cîteaux, tenu par l'abbé Etienne. Il est décidé dans ce chapitre qu'il se réunira désormais tous les ans le 13 septembre, selon ce que rapporte Jean de Vitry, dans son histoire d'Occident, chapitre XIV.
1117. Saint. Bernard,atteint d'une maladie grave, est confié aux soins d'un médecin de la campagne, que lui procure Guillaume, évêque de Châons-sur-Marne. Livre I de sa Vie, chapitre VII.
On place vers cette même année la conversion de Tescelin, père de saint Bernard. Il mourut peu de temps après en très-grande odeur de sainteté, le 11 avril, selon ce qui est rapporté dans le nécrologe de saint Benigne de Dijon.
L'an 1118, douzième année du règne de Henri V, et dixième de celui de Louis VI, Pascal II meurt après onze ans et cinq mois de pontificat. Gélase II lui succède; il avait été comme lui moine à Cluny. Henri lui opposa Maurice Bourdin, archevêque de Prague qui prit le nom de Grégoire.
La même année est fondé l'ordre militaire du Temple, dont les premiers chevaliers furent Hugues du Païens, Geoffroy de Saint-Omer, au rapport de Guillaume de Tyr, dans son livre XII de la guerre sainte.
Selon le même auteur, cet ordre fut confirmé au concile de Troyes, en 1128, ainsi que le rapporte aussi Michel, secrétaire du concile. Il devait être aboli plus tard, en 1313, par Clément V, sous Philippe IV, roi de France, au concile de Vienne.
Fondation du monastère de Trois-Fontaines, première fille de Clairvaux, au diocèse de Châlons-sur- Saône. Son premier abbé fut Roger; le second fût Guy, à qui sont adressées les lettres LXIX et LXX de saint Bernard.
Fondation aussi de Fontenay, seconde fille de. Clairvaux, au diocèse d'Autun.
Son premier abbé fut Geoffroy, frère de saint Bernard. Cet abbé, selon le livre des sépultures de Clairvaux, revint à son cher premier monastère, après avoir fondé et parfaitement organisé celui de Fontenay. Il fut le troisième prieur de Clairvaux, et devint évêque de Langres.
L'an 1119, treizième année du règne de Henri V, onzième de celui de Louis VI, le Pape Gélase Il meurt à Cluny ; il a pour successeur, sous le nom de Calliste II, Guy, évêque de Vienne, qui célébra cette même année, le 31 octobre, un concile à Reims, et eut le bonheur de mettre fin au schisme de Bourdin.
C'est cette même année que le bienheureux Étienne, abbé de Cîteaux, assisté de plusieurs autres abbés, établit la charte de la Charité, comme on l'appelle ordinairement, en trente articles ou chapitres, pour assurer la paix et la tranquillité dans l'ordre de Cîteaux. Elle fut approuvée par le pape Calliste II. On la trouve dans Manrique.
1120. Saint Norbert, que saint Bernard appelle la Trompette du Saint-Esprit, dans la lettre LVI, fonda l'ordre de Prémontré, dans le Laonnais. Voir la lettre CCLV de saint Bernard et les notes.
1121. Concile de Soissons contre Abélard, sous la présidence de Conan, évêque de Palestrine, légat du saint siège. Ce concile force Abélard à livrer de ses propres mains aux flammes son livre de la Trinité.
C'est au commencement de cette même année que mourut Guillaume de Champeaux évêque de Châlons-sur-Marne. Voir à son sujet les notes de la lettre III.
Fondation de Foigny, au diocèse de Laon. C'est à son premier abbé Rainaud que Bernard a adressé ses lettres LXXII, LXXIII, et LXXIV.
1122. Pierre Maurice, originaire de l'Auvergne, surnommé le vénérable, que saint Bernard aimait d'une affection singulière, devient abbé de Cluny pendant l'octave de l'Assomption. Voir les notes de la lettre I de saint Bernard.
1123. C'est vers cette année que Pierre, abbé de la Ferté, est élu évêque de la Tarentaise. C'est le premier évêque sorti de la famille de Clairvaux; il a pour successeur, à la Ferté, Barthélémy, frère de saint Bernard.
La même année, Adam, abbé de saint Denys, a pour successeur, d'un commun accord de tous les religieux, l'abbé Suger, à qui saint Bernard écrivit plusieurs fois.
L'an 1124, dix-huitième année du règne de Henri V, seizième de celui de Louis VI, roi de France, le pape Calliste Il meurt dans la sixième année de son pontificat. Il a pour successeur, la même année, l'évêque d'Ostie, Laurent, gniprit le nom de Honorius II.
1125. Mort de Henri V à Utrecht sur le Rhin, après dix-neuf ans de règne.
Comme il ne laissait pas d'enfant, il s'éleva, à sa mort, une longue et funeste division que saint Bernard sera appelé plus tard à apaiser, entre Lothaire, duc de Saxe, et Conrad, neveu de Henri par sa soeur.
Ce dernier avait été proclamé roi par Frédéric son frère et par d'autres seigneurs.
Après avoir franchi les Alpes, il fut repu à bras ouverts par les Milanais, dont l'archevêque, nommé Anselme, le sacra roi à Modène, capitale du royaume d'Italie, selon ce que rapporte Othon de Freinsingen dans le livre VII de ses chroniques, chapitre XVII. Plus tard, comme on le verra, saint Bernard dut se donner bien du mal pour réconcilier les Milanais avec le pape Innocent et Lothaire II, qui fut élu empereur.
La même année, une grande famine désole particulièrement la France et la Bourgogne, et donne à saint Bernard l'occasion d'exercer sa charité, comme on le voit dans sa Vie, livre I chapitre X.
Cette année-là aussi, saint Bernard fait une maladie qui met ses jours en danger; il rien revient que par la protection de la Sainte Vierge, de saint Benoit et de saint Laurent. Dès cette époque, sa réputation de sainteté singulière et de science se répand par la ville et par le monde entier.
1126. Othon, qui devint plus tard évêque de Freisengen, historiographe célèbre, prend l'habit de Morimond.
Radevig, son ami intime, nous apprend qu'il était arrière petit-fils de l'empereur Henri IV, neveu par sa mère de Henri V ; frère utérin de Conrad et oncle de Frédéric par son père, le pieux et illustre prince Léopold, margrave d'Autriche; sa mère était Agnès, fille de Henri IV.
1127. C'est vers cette année que Étienne qui, de chancelier de France était devenu évêque de Paris, s'éloigna de la cour sur les avis de Bernard, pour mener une vie plus régulière, et se vit persécuté par I,nuis VI, qui finit par le recevoir en grâce, sur les instances des Cisterciens et surtout de saint Bernard.
Henri, archevêque de Sens, fut peu de temps après,et pour des motifs semblables, traité par le roi de France de la même manière que l'avait ït4 celui de Paris; Il eut auprès du roi le même avocat et le même défenseur. On peut voir à ce sujet la lettre XLV et ses notes.
Fondation d'Igny, quatrième fille de Clairvaux, dans le diocèse de Reims, par Raynaud Després, archevêque de Reims. Son premier abbé est Humbert, qui de religieux de la Case-Dieu, devint religieux de Clairvaux Peu de temps après, par amour du repos, il se démit de sa prélature et reçut à Clairvaux.
Bernard, qui était alors retenu en Italie pour les affaires du schisme, le blâme beaucoup de cette résolution dans sa lettre CXLI, ce qui ne l'empêcha point de persévérer dans sa retraite jusqu'à sa mort.
Saint Bernard fit, à ses funérailles, l'éloge de ses excellentes vertus. Il eut pour successeur à Igny l'abbé Guerri, célèbre par sa piété et par ses écrits. Ou a ses discours à la suite de ceux de saint Bernard.
1128. Le jour de la fête de saint Hilaire, concile de Troyes, qu'on place à tort en 1129, comme il ressort des témoignages de Michel, qui en fut le secrétaire.
Il fut présidé par Mathieu, évêque d'Albano, légat du Saint siège.
On v compta parmi les assistants, Étienne de Cîteaux, Bernard de Clairvaux et d'autres abbés du même ordre.
C'est dans ce concile qu'on détermina les couleurs blanches ries habits à donner aux Templiers, et la règle qu'ils devaient suivre. Ce n'est que plus tard, que le pape Eugène III. leur fit placer la croix rouge sur leurs habita.
Fondation de Régny, au diocèse d'Autun.
1129. Le jour de la purification de la sainte Vierge, tenue d'un concile à Châlons-sur-Marne, par Mathieu d'Albano, légat du pape, ancien religieux de Cluny. Dans ce concile, sur l'avis de saint Bernard, Henri, évêque de Verdun, donne sa démission; un certain abbé de Saint Denys de Reims, lui succède pendant deux ans.
Fondation du monastère d'Ours-Camps, au diocèse de Noyons, par l'évêque Simon.
L'an 1131, cinquième année du règne de Lothaire II, vingt-deuxième de celui de Louis VI, ronde France, le pape Honorius meurt, le 16 janvier, dans la sixième année de sort pontificat. Un schisme très-grave règne dans l'Église de Dieu, Grègroire, élit canoniquement sous le nom d'Innocent II le 17 février, se vit disputer le trône par Pierre, fils de Pierre de Léon, appuyé par la violence de ses amis qui étaient tout-puissants à Rome, et par Roger, roi usurpateur de Sicile.
Pendant huit ans entiers, Bernard défendit avec courage la cause d'Innocent.
Voir la lettre CXXIV et les suivantes. En effet, entre autres choses, dans le concile tenu à ce sujet, cette même année, à Étampes, il fut choisi tout d'une voix, par les pères du concile, comme arbitre du différend, et se déclara pour innocent contre Anaclet. Il amena le roi d'Angleterre Henri à le reconnaître également. Voir sa Vie, livre II, chapitre I et notre préface générale au tome I.
La même année, Bernard, avec une humilité admirable, refusa l'évêché de Gênes, devenu vacant l’année précédente par la mort de Sigefroy.
Ce fut cette année-là aussi que Baudoin fut le premier des Cisterciens promu au cardinalat dans le concile de Clermont, ainsi, du moins on le croit, que Martin, cet homme si saint, dont Bernard fait mention dans le livre IV de la Considération, chapitre V. Au sujet de Baudouin, on peut consulter les lettres CXLIV et CCXLIV de saisit Bernard.
1131. Innocent, après avoir été reçu avec magnificence à Liége, était revenu en France à la fin de l'armée précédente. Saint Bernard reprit l'empereur Lothaire qui réclamait les investitures ecclésiastiques.
Innocent le couronna roi de Germanie étant encore en France, se réservant de lui donner la couronne impériale deux ans après à Rome.
Il passa le carême de cette année à Liège, et de retour en France il se rendit, au mois d'octobre, à Reims au concile assemblé dans cette ville contre Annelet, et sacra roi Louis-le-Jeune, à là place de Philippe son frère, qui avait péri misérablement, d’une chute de cheval.
Après le concile, dit Suger dans sa Vie de Louis-le-Gros, lu seigneur pape fixa sa résidence à Autun tout le reste de la présente année, après avoir visité Cluny, dont il consacra l'église, puis Clairvaux et quelques autres communautés, accompagné, dans tontes ces courses, par Bernard. Ernald, dans sa vie de saint Bernard, livre II chapitre 1, place le concile de Reims avant le voyage d'innocent à Liège, contrairement à ce que dit Suger.
La seconde année, selon la grande chronique de Belgique, Bernard refusa l'évêché de Châlons-sur-Marne, où il avait été élu, et fit élever à sa place, Geoffroy, qui était abbé de saint Médard de Soissons. Aubry rapporte la même chose, et ajoute de plus que le pape Innocent consacra l'église de Médard, le 15 octobre, avant de se rendre au concile de Reims, selon ce que rapporte la chronique de ce même monastère.
La même année encore, Thomas, prieur de Saint Victor de Paris, homme d'une grande verte, est cruellement assassiné pour la justice, par les neveux de Thibaut de Nottières, archidiacre de Foix, qui le haïssait à cause des reproches qu'il en avait reçus pour ses exactions envers les ecclésiastiques.
Peu du temps après, Archambault, sous-diacre d'Orléans, mourut pour la même cause, et de la même manière, sur les instigations de Jean, également archidiacre de l'église de Sainte-Croix.
Bernard écrivit pour ce prieur de Saint-Victor ses lettres CLVIII, CLIX, CLX, et CLXII, et sa lettre LXI pour le sous-diacre d'Orléans. Les deux causes furent évoquées et agitées au concile de Jouarre, au diocèse de Meaux.
Fondation de Moreruela en Castille, dans le pays de Zarnora; du monastère de, Saint-Jean de Tarouca, en Lusitanie, diocèse de Lamigo; de Longpont, au diocèse de Soissons; de Cherlieu, au diocèse, de Besançon; de Bonnemont, en Savoie, diocèse de Genève ; de Ridal, en Angleterre, diocèse d’York.
1132. Départ du pape Innocent de France, pour l'Italie, Bernard l'accompagne. Il réconcilie les Pisans et les Génois. L’évêché de Gênes lui est offert pour la seconde fois, avant que Syrus y soit nommé, et même après la nomination de Syrus qui veut se démettre. II refuse avec la même persévérance et la même humilité qu'auparavant.
Grande controverse entre les Clunistes et les Cisterciens, à l'occasion d'un privilège par lequel le pape Innocent dispense ces derniers de payer la dîme. Voir la lettre CCLXXXIII.
Fondation du monastère de Paucelles, au diocèse de Cambrai. Voir la lettre CLXXXVI, et de Trois-Fonts en Angleterre, diocèse d'Yorek. Voir les lettres XCII, XCIV et suivantes.
1133. Saint Bernard, qui était allé en Italie avec Innocent, l'année précédente, écrit la lettre CXXVIII à Henri, roi d'Angleterre, pour lui demander des subsides en faveur du pape, qui ne pouvait occuper Rome, avec le peu de troupes dont il disposait; car l'empereur Lothaire ne lui avait donné que deux mille hommes d'armes.
Cependant, Innocent finit par entrer dans la ville, et remet la couronne impériale sur la tête de Lothaire, dans la basilique de Latran.
Mais, après le départ de l'empereur, Anaclet reprit le dessus à Rome, et Innocent, obligé de s'éloigner encore, se retira à Pise. De cette dernière ville, Bernard est envoyé en Germanie , pour réconcilier Conrad avec Lothaire.
Profitant de cette occasion, Roger, tyran de Sicile, décoré du nom de roi par l'antipape Anaclet, s'efforce de retirer les Pisans de l'obédience du pape Innocent.
Mais ils tinrent bon dans leurs sentiments de fidélité, et Bernard leur écrivit sa lettre CXXX, pour les en féliciter.
C'est à l'époque de ce voyage que se place la conversion de Mascenli, dont il est parlé au livre IV de la vie de saint Bernard, chapitre III, ainsi que celle de la duchesse de Lorraine, dont il est question au même endroit.
1134. Concile de Pise. Pendant que Bernard, sur l'ordre du pape Innocent, s'y rendait en traversant la Lombardie, après avoir réconcilié ensemble Lothaire et Conrad, il reçoit des Milanais, excommuniés et privés de la dignité de Métropole, pour avoir, à la suite d'Anselme, leur archevêque, embrassé le parti de Conrad et d'Anaclet, une lettre où ils le prient de les faire rentrer en grâce avec Lothaire et Innocent.
Il leur promet, par ses lettres CXXXII et CXXXIII, de se rendre au milieu d'eux, aussitôt due le concile sera terminé.
En effet, à peine, grâce à sa prudence, le concile fat-il clos, qu'il partit pour Milan, avec les cardinaux Matthieu, évêque d'Albano, et Guy, évêque de Pise, afin de travailler à la réconciliation de cette ville.
Il fut reçu par tons les habitants avec de grandes démonstrations de joie et une très-grande vénération ; on lui offrit la dignité archiépiscopale, et ce n'est pas sans peine qu'il lit agrîer aux Milanais son refus constant de la recevoir.
Il lit beaucoup de conversions parmi eux, comme on le voit par la lettre CXXXV, et fonda, dans leur ville, la première colonie da son ordre, Ciaravalle, qu'on a souvent, mais à tort, désigné aussi sons le nom de Clairvaux.
Après cela, sur l'ordre du pape Innocent, selon ce que rapporte Sigonio dans son histoire d'Italie, livre II, il se rendit dans plusieurs villes de Lombardie pour rétablir la paix entre elles, et particulièrement à Pavie et à Crémone.
Ayant complètement échoué auprès des Crémonais, dans sa mission, il fit part de leur obstination au pape Innocent dans sa lettre CCCXVIII.
Cependant après le concile de Pise, Norbert, fondateur de l'ordre de Prémontré est rappelé de la terre aux cieux, de même que Etienne, abbé de Cîteaux, qui mourut le 28 mars. Guy, qui avait été élu à sa place avant même qu'il eût rendu le dernier soupir et qui retint en ses mains la houlette pastorale pendant six mois, se vit enfin rejeté et laissa la place à Rainaud, fils de Milon comte de Bar-sur-Seine, selon ce que rapporte Ordéric, moine de Clairvaux, dans son livre VIII. Ce fut cet abbé qui, dans un chapitre général de l'ordre, renferma dans quatre-vingt-sept chapitres les beaux instituts de Cîteaux, qu'on peut lire dans les annales de Manrique.
Fondation de Ciaravalle de Milan; d'Hermerode, au diocèse de Trèves; de Vauclair, au diocèse de Laon.
Le premier abbé de cette maison fut Murdach, à qui est adressée la lettre CCCXXI.
1135. Bernard passe par Milan en revenant d'Italie, et revientà Clairvaux, dont on transfère les bâtiments dans un lieu plus commode, ainsi qu'il est rapporté au livre II de sa Vie, chapitre IV et V.
Il eut à peine le temps de poser à son monastère, car il reçut presque aussitôt l'ordre de se rendre en Aquitaine, avec Geoffroy de Chartres, pour ramener Guillaume, comte de Poitiers et plusieurs autres seigneurs que Gérard, évêque d'Angoulême, avait entraînés dans le schisme, comme on le voit dans le livre II de sa Vie, chapitre VI.
Cela fait, et rendu un peu à lui-même, il entreprit, à la prière d'un autre Bernard Desportes, prieur des chartreux l'explication du Cantique des cantiques, ainsi qu'il est dit dans les lettres CLII1 et CLIV.
Fondation de Buzay, au diocèse de Nantes, par Ermengarde, comtesse de Bretagne, qu'il avait, dans son voyage d'Aquitaine, retirée des vanités du monde. Voir les lettres CXVI et CXVII.
Le premier abbé de cette maison fut Jean, à qui est adressée la lettre CCXXXVII. Fondation aussi de Hautecombe, au diocèse de Genève, de la Gràce-de-Dieu, diocèse de Saintes, et d'Éberbach, diocèse de Mayence.
1136. Guy, l'aîné des frères de saint Bernard., meurt à Pontigny, hors de Clairvaux, comme le saint le lui avait prédit, ainsi qu'il est dit an livre il de sa Vie, chapitre XII.
Fondation de Balerne, au diocèse de Besançon ; son premier abbé est Burchard, à qui est adressée la lettre CXLVI; de la Maison-Dieu, sur le Cher, diocèse de Bourges; son premier abbé fut Robert, cousin de Bernard; c'est à lui qu'est adressée la lettre I, et d'Auberine, diocèse de Langres.
Adoption de l'Abbaye des Alpes, diocèse de Genève, sur la proposition de son abbé Guérin, qui devint plus tard évêque de Sion. Voir la lettre CCLII.
L'an 1137, huitième du pontificat d’Innocent, douzième du règne de l'empereur Lothaire, Louis VI meurt à Paris le 1er août, dans la vingt-neuvième année de son règne. Il a pour successeur Louis VII, son fils, surnommé le Jeune, pour le distinguer de son père, du vivant de qui il fut associé au trône.
La même année, Bernard, appelé par le pape Innocent, repasse une troisième fois les Alpes pour retourner en Italie, qui gémissait sous Anaclet, des vexation de Roger de Sicile.
Ce prince, vaincu grâce aux prières de Bernard, par le duc Rainoulphe, voyant qu'il ne pouvait l'emporter par la force des armes, eut recours à la force de l'éloquence et confia la défense de la cause d'Anaclet à Pierre de Pise, homme d'un rare talent pour la parole ; mais le voyant vaincu et ramené du schisme par Bernard, il n'en revint pas lui-même à de meilleurs sentiments.
Fondation de l'abbaye de Colomba, en Italie, diocèse de Plaisance; de Boccon en Hongrie, diocèse de Vesprin. Plusieurs auteurs rapportent, mais à tort, cette fondation à l'année 1153.
Adoption de l'abbaye de Belfont, appelé depuis Valparayso, en Espagne au diocèse de Zamora.
1138. le 3 décembre, Lothaire II cesse de porter la couronne, après treize ans de règne. Il a pour successeur Conrad, duc de Franconie, qui avait été autrefois son rival.
La même année, mort malheureuse de l'antipape Anaclet, à qui la fraction de Roger donna pour successeur le cardinal Grégoire, qui prit le nom de Victor et qui se dépouilla des insignes du pontificat entre les mains de Bernard.
Le schisme se trouva donc ainsi terminé, grâce au zèle et à la prudence de Bernard, après avoir duré sept ans. Voir la lettre CCCXVII.
Cet heureux résultat obtenu, le saint abbé quitta sans retard la cour de Rome, n'emportant d'Italie, pour tout présent de route, qu'une dent de saint Césaire et quelques autres reliques de saints.
Voir le livre IV de sa Vie, chapitre I. Informé en route qu'il avait été procédé à l'élection de l'évêque de Langres, par l'archevêque de Lyon, nonobstant la promesse que ce dernier avait faite à Rome, Bernard écrit sa lettre CLXV et les suivantes.
Mais une douleur plus grande devait s'ajouter à celle-là, c'est celle qu'il ressentit de la perte de Gérard son frère.
Il avait obtenu de Dieu en Italie, où il l'avait accompagné, un répit à cette mort. Il lui fit une oraison funèbre dans son sermon XXVI sur le Cantique des cantiques, en reprenant le cours interrompu de ce commentaire.
La même année, mort de Rainaud, archevêque de Reims, selon l'Aucnaire de Gembloux. Deux ans après, c’est-à-dire en 1140, Samson, évêque de Chartres, est promus à la dignité d’archevêque de Reims, à la place et au refus de Bernard d’accepter ce titre.
Fondation de Bénissons-Dieu, diocèse de Lyon; cette abbaye a pour premier abbé Aubry, à qui est écrite la lettre CLXXIII.
Adoption de l'abbaye des Dunes, diocèse de Bruges; son premier abbé fut Robert, à qui est écrite la lettre CCCXXIV, le même qui devait un jour succéder à Bernard à Clairvaux.
1139. Concile de près de mille évêques assemblés à Rome dans l'église de Latran : il condamne de nouveau les partisans de Pierre de Léon, et annule ses ordinations; il interdit les tournois , et condamne Arnault de Brescia, comme hérétique, à sortir de l'Italie.
Bernard S'efforce de soustraire à la sévérité du décret porté contre les fauteurs de Pierre de Léon, le cardinal Pierre de Pise, qu'il avait réussi à réconcilier auparavant avec le pape Innocent, comme on le voit par la lettre CCXIII.
Peu de temps après, Innocent est fait prisonnier par Roger, duc de Sicile, qui s'empare de lui par la ruse.
Cet événement hâte la conclusion de la paix si longtemps désirée entre le pape et Roger.
La même année, l'archevêque Malachie, primat d'Irlande, entreprend lui voyage à Rome. C'est à tort que Baronius place ce voyage à la date de 1137, puisque saint Bernard lu:-même noirs apprend, dans sa Vie de saint Malachie, que ce dernier ne survécut que neuf ans à ce voyage : or il mourut en 1148.
C'est pendant ce voyage que Malachie vint à Clairvaux, où il laissa six de ses compagnons de route, pour s'y former à l'institut de Cîteaux, afin de l'établir ensuite en Irlande.
1140. Concile de Sens contre Abélard, qui en appela au Saint-Siège de la condamnation de ses principales erreurs; mais, sur le conseil de Pierre-le-Vénérable, il renonça à donner suite à cet appel et se fixa à Cluny. Pierre-le-Vénérable le réconcilia avec l'Église.
Après avoir passé deux ans d'une manière exemplaire à Cluny, il se rendit au monastère de Saint-Marcel de Châlons-sur-Saône, pour y soigner sa santé devenue mauvaise : il y mourut. Voir les lettres CXCVII et suivantes et leurs notes.
Fondation de Clair-Morets, au diocèse de Saint- Omer; de Blanckeland en Angleterre, dans la province de Galles, diocèse de Man ; de l'Oursière, dans le royaume de Galice, diocèse d'Aureuse; de Larivoir, diocèse de Troyes, ayant pour premier abbé Alain, qui devint plus tard archevêque d'Autun, et compila une Vie de saint Bernard.
La même année, Innocent donna le monastère de Trois-Fontaines de Saint-Anastase, aux religieux de Clairvaux, après l'avoir rétabli avec un disciple de saint Bernard, nommé également Bernard, originaire de Pise, lequel devint pape, dans la suite, sous le nom, d'Eugène III.
Adoption du monastère de Benchor, cédé à saint Bernard par Malachie, primat d'Irlande, et de Casamario, à Vérulo en Italie.
1141. Le pape Innocent, au rapport. de Robert du Mont, jette l'interdit sur les terres du roi Louis, parce qu'il ne voulait pas recevoir l'archevêque de Bourges, qu'il reçut pourtant plus tard, et qu'il délia d'un serment qu'il avait fait contre toutes les lois de la raison. Voir les lettres CCXVIII et suivantes.
La même année, le roi Louis, toujours au dire du même auteur, tomba avec toutes ses troupes sur le comte Thibaut, dévasta ses possessions, et particulièrement la Champagne, où il brûla Vitry.
Dans cet incendie, treize cents âmes périrent, toujours selon Robert, dans son supplément à Sigebert, qui place ces événements à l'année 1143. Voir les lettres CCXVII, CCXX, CCXXII, CCXXIII.
Vers la même époque, se place la mort de Humbeline, soeur de saint Bernard, dont il est parlé au livre I de sa Vie, chapitre VI.
Fondation de Mellifont, en Irlande, au diocèse d'Armagh, par les soins de Malachie qui y plaça les compagnons de voyage qu'il avait laissés à Clairvaux, pour s'y former à la règle, et qui eurent Chrétien pour abbé. Voir les lettres CCCXXXV, et CCCLVII.
1142. Yves, qui de chanoine régulier de Saint Victor près Paris, était devenu cardinal prêtre, est envoyé en France pour prononcer la sentence d'excommunication qui frappait Rainoulphe, comte de Saint-Quentin, pour avoir répudié sa femme Pétronille, sœur du comte Thibaut, et avoir épousé ensuite une fille de Guillaume, duc d'Aquitaine, sœur de la reine de France. Dans le même anathème se trouvaient enveloppés Barthélémy, évêque de Laon, Simon, évêque de Noyon, et Pierre, évêque de Senlis, auteurs du divorce du comte. Voir les lettres CCXVI, CCXX, CXXI.
La même année, Alphonse, roi de Portugal, se fait tributaire ainsi que son royaume de l'abbaye de Clairvaux, à laquelle il assigne une rente de cinquante doublons d'or fin.
Cette même année encore, toujours d'après Robert du Mont, ou du moins vers la fin de l'année précédente, comme le rapporte Ortelius, dans Anselme de Gembloux, chez le Mire, mort de Hugues de Saint-Victor, ami et grand admirateur de saint Bernard , l'Augustin de son siècle. Voir la lettre LXX.
Fondation des monastères de Melon en Galice, diocèse de Tuy; de Sobrado, à peu près à la même époque, dans le diocèse de Compostelle; de Haute-Creste en Savoie, diocèse de Lausanne.
L'an 1143, cinquième de Conrad III, sixième de Louis VII roi de France, mort du pape Innocent, le 25 septembre, après un pontificat de quatorze ans. Il eut pour successeur Guy de Castel, qui prit le nom de Célestin II : c'est à lui que sont adressées les lettres CCXXXIV et CCXXXV.
Fondation d'Alvastem, en Suède, diocèse de Lincoping; de Nidal, au même pays. Quelques auteurs placent la fondation du dernier monastère quatre ans plus tard. Fondation de Belle-Perche, diocèse de Montauban; de Meyra en Galice, diocèse de Lugo.
1144. Mort du pape Célestin, qui ne siégea pas même six mois. Il a pour successeur Gérard le Camérier qui, de chanoine régulier, était devenu cardinal prêtre, du litre de sainte croix de Jérusalem. Il prit le nom de Lucius II. A la même époque, Bernard rétablit la bonne intelligence mire le roi de France, Louis VII, et le comte Thibaut. Lire à ce sujet ses lettres CCXX et suivantes.
La même année, mort de Barthélemy, abbé de la Ferté, frère de saint Bernard; et d'Étienne de Châlons, cardinal évêque de Palestrine, de l'ordre de Cîteaux, homme d'une grande sainteté, à qui Bernard écrivit plusieurs lettres.
Fondation de Beaulieu, diocèse de Rhodez.
L'an 1145, septième du règne de l'empereur Conrad III, huitième, de celui de louis VII, roi de France, le pape Lucius II meurt le 25 février. Il a pour successeur Eugène III, abbé de Saint-Anastase aux Trois-Fontaines. C'est l'abbé Bernard, dont il a été parlé à l'année 1140. Voir les lettres CCXXXVII et suivantes.
A la même époque, saint Bernard, consulté parle roi Louis sur la croisade, renvoya la décision de cette affaire au jugement du pape, comme nous l'avons dit dans notre préface générale, à l'article VII.
Fondation de la Prée, au diocèse de Bourges.
1146. Concile de Chartres assemblé à l'occasion de la guerre sainte.
Pierre le Vénérable est invité à y assister par la lettre CCLXIV de saint Bernard; il ne put s'y rendre, ainsi qu'on le voit par sa réponse à saint Bernard. Sa lettre est la XVIII du livre VI. Bernard, élu généralissime des troupes, exhorte, sur l'ordre du pape Eugène, par ses lettres et par ses prédications qu'il appuyait de miracles, les peuples de la Germanie, les Francs orientaux, les Bavarois, les Anglais et d'autres encore, à prendre la croix. Voir ses lettres CCCLXIII et CCCLXV, ainsi que le livre de ses Miracles.
La même année, l'Église de Tournai, qui avait pendant cinq cents ans et plus été gouvernée par les évêques de Noyon, eut un évêque propre, du nom d'Anselme, qui avait été abbé de saint Vincent de Laon.
Cette ville reçut son évêque de la main du pape Eugène, qui le lui donna à la recommandation de plusieurs personnages, mais entre autre de saint Bernard.
Fondation de Boxley en Angleterre, diocèse de Cantorbéry; de Villers en Brabant, diocèse de Namur. L'Auctaire de Gembloux, dans le Mire, p'ace cette fondation à l'année suivante, et s'exprime en ces termes : « Douze moines avec l'abbé Laurent, et cinq convers, envoyés en Brabant par Bernard de Clairvaux, fondèrent le monastère de Villers.»
1147. Eugène, chassé de Rome, l'année précédente par la faction d'Arnaud qui avait soulevé les Romains contre lui, comme on le voit dans la lettre CCXIII, s'était réfugié en France.
Il est reçu en 1147 à Paris avec beaucoup d’honneur, par le roi Louis, qui, le dimanche des Rameaux de l'année précédente, selon ce que rapporte Robert du Mont dans son Appendice à Sigebert, avait pris la croix avec son frère Geoffroy, comte de Meulan et plusieurs autres soigneurs, lesquels quittèrent Paris cette même année, selon la chronique de Cluny, pour aller combattre les Sarrazins en Syrie.
Cette année-là vit plusieurs synodes se réunir en différents endroits ; le premier à Étampes : il y fut, pris, en présence de Bernard, des arrangements pour l'expédition de la terre sainte, et pour l'administration du royaume, qui fut confiée à Suger, abbé de Saint-Denis, comme il est dit au tome II du Spicilège, dans la chronique de Saint-Denis, et dans le livre des Miracles de saint Bernard, chapitre XVI.
Le second est celui d'Autun, sous la présidence du pape Eugène. Le troisième à Paris, selon Othon de Freissingen, dans son histoire de Frédéric, livre I, chapitre L. La cause de Gilbert de la Porrée, appelée à ce concile, fut renvoyée à l'examen de celui qui devait se tenir l'année suivante à Reims. Voir notre préface générale.
La même année, Bernard va combattre l'hérétique Henri en Aquitaine, avec Aubry cardinal évêque d'Ostie et légat du saint siège, et Geoffroy, évêque de Chartres. Il est question de cet Henri dans notre préface générale et dans la lettre CCXLI de saint Bernard.
La même année, Alphonse, roi de Portugal, s'étant emparé de la ville de Santarém par la vertu des prières de saint Bernant, demande par lettres des moines de Cîteaux, pour établir un monastère de cet ordre dans son royaume.
Fondation d'Alcobaza par le même roi de Portugal dans le diocèse de Lisbonne; de Vauricher, au diocèse de Bayeux ; de Morgan, dans le pays de Galle ; de Spina, au diocèse de Valeritia en Castille, par Sanche, soeur du roi Alphonse. Voir la lettre ceci de saint Bernard.
Adoption de Grandselve, de l'ordre de saint Benoit, au diocèse de Toulouse. Son abbé nommé Bernard se donna lui et tous ses religieux à l'ordre de Cîteaux. Voir la lettre CCXLII.
1148. Concile de Reims le 19 mars, sous la présidence du pape Eugène.
Eon, un fou hérétique, est condamné à la prison; Gluant à Gilbert de la Porrée, évêque de Poitiers, convaincu d'être tombé dans l'erreur, par saint Bernard, il rétracte ce qu'il avait enseigné. Peu après le pape Eugène, sur les instances du saint abbé, approuve les écrits d'Hildegarde, dans le concile de Trèves; mais avant de se rendre à ce concile, il avait fait la dédicace de l'église de Toul; saint Bernard assistait à cette cérémonie.
La même année, le pape Eugène assista au chapitre général de Cîteaux, bénit de nouveau le cimetière de cette abbaye, et, après avoir pris congé des religieux qui fondaient en larmes, il reprit le chemin de l'Italie.
Eugène venait de quitter la France, lorsque saint Malachie, primat d'Irlande entreprit un second voyage à Rome pour y aller recevoir le pallium; mais il mourut à Clairvaux le jour et à l'endroit qu'il avait désirés, c'est-à-dire le jour de la commémoration des morts.
Sa mémoire devint célèbre dès les premiers temps qui suivirent sa mort. Voir la lettre que saint Bernard écrivit aux Irlandais pour les consoler, c'est la CCCLXXIV; voir aussi sa Vie dans le tome II et deux sermons de saint Bernard prononcés le jour de ses funérailles, tome III.
Saint Malachie touchait à ses derniers moments quand les bâtiments du nouveau Clairvaux étant terminés, on fit la translation des restes des vénérable pères qui étaient morts dans le premier monastère, de l'ancien cimetière dans le nouveau, le jour de la Toussaint, comme on le voit par le sermon r sur Malachie, n. 2. Sa canonisation, d'après la Chronique de Clairvaux, est rapportée par Chifflet, à l'année 1192.
Fondation de Cambron, an diocèse de Cambrai, avec Fastrad de Clairvaux pour premier abbé, lequel devint plus tard, après Robert, abbé de Clairvaux.
Adoption de l'abbaye d'Alne, qui. fat d'abord une abbaye de Bénédictins, puis de chanoines réguliers, au diocèse de Liège. La même année, dans un chapitre général de Cîteaux, Serbon, abbé de Savigny, se soumet à Clairvaux, lui et trente bénédictins du monastère de Savigny, situé dans le diocèse d'Avranches. En même temps, Etienne, père et instituteur de la congrégation d'Obasine, diocèse de Limoges, soumet quatre maisons à celle de Clairvaux.
1149. Funeste issue de la guerre sainte; Louis revient en France. (Voir la lettre CCCLXXXVI, le livre II, de la Considération, cap. I, et la Vie de saint Bernard, livre III, chapitre IV). Le roi de France se prépare à une seconde expédition; il est arrêté dans ses préparatifs par les Cisterciens selon ce que rapporte l'abbé Robert dans sa Chronique, à l'année 1150.
La même année, Henri, frère de Louis VII, roi de France, selon ce que rapporte la Chronique de Tours, après avoir été trésorier de saint Martin de Tours, et avoir pris l'habit religieux à Clairvaux, est promu à l'évêché de Beauvais. La Chronique de Saint-Pierre-Vif de Sens place ces faits à l'année suivante. Lire sur ce sujet à la lettre CCCVII, et ses notes.
Fondation de Font-Morigny, dans le diocèse de Bourges; d'Aubepierre, dans celui de Limoges ; de Longuay dans celui de Langres, et de Loz dans celui de Tournai.
Adoption de Boullancourt, monastère de chanoines réguliers, du diocèse de Troyes.
1150. Eugène, après bien des traverses, ayant fini par rentrer en possession de Rome et de son siège, saint Bernard lui envoie son livre II de la Considération, en tête duquel il avait placé une justification de la seconde croisade. Il reçoit une lettre de consolation de Jean, abbé de Casamario, monastère situé dans la ville de Verulo. Cette lettre est maintenant la CCCLXXXVI de la collection de celles de saint Bernard.
1151. Vers la fin de l'année précédente, le 1er décembre, l'abbé Rainaud était mort, il eut pour successeur Gosvin, abbé de Bonneval de Vienne. Voir la lettre CCLXX.
Mort de Hugues, évêque d'Auxerre, que la Chronique de Pierre-Vif appelle un homme de bonne mémoire. Voir pour ce qui concerne l'élection de son successeur, les lettres CCLXI, CCLXXIV, et suivantes.
Mort de Suger, abbé de Saint-Denis, homme d'une grande sainteté. Bernard lui écrivit, dans ses derniers moments, une lettre qui est sa CCLVI.
Louis Vil et Éléonore, selon ce que rapporte Robert du Mont, ayan affirmé par serment, pendant le carême de cette même année, à Beaugency, devant une assemblée d'évêques et d'archevêques, qu'ils étaient parents, furent séparés canoniquement.
Fondation du monastère d'Esron, diocèse de Roschilt.
L'an 1152, huitième du pontificat du pape Eugène, quinzième du règne de Louis VII, roi de France, mort de Conrad, qui laissa la pourpre impériale à son neveu de frère.
Le 8 janvier de la même année, mort de Thibaut, comte de Champagne, homme d'une insigne piété; il est inhumé dans le monastère de Lagny-sur-Marne, dont il avait été l'avocat. Saint Bernard lui avait écrit peu de temps avant sa mort une lettre qui est la CCLXXI.
Adoption de Marolles, diocèse de Mallezès.
Fondation de l'abbaye de Clermont, diocèse du Mans.
Vers la même époque, adoption d'Armintéra, en Galice, diocèse de Compostelle.
L'an 1153, deuxième du règne de l'empereur Frédéric I, seizième du règne de Louis VII, roi de France, le 10 juillet, mort du pape Eugène, après un pontificat de huit ans, quatre mois et treize jours.
Il a pour successeur Conrad qui, de chanoine régulier, était devenu évêque de Palerme.
Il prit le nom d'Anastase IV. Peu de temps après, notre très-saint docteur Bernard, après avoir travaillé pour l'Église de Dieu, malade depuis le milieu de l'hiver précèdent, ainsi qu'il le dit lui-même dans ses lettres CCLXXXVIII, CCCIII, et CCCVIII, meurt en paix, après avoir rétabli la paix entre les habitants de Metz, le 20 août à neuf heures du matin, dans la soixante-troisième année de son âge, la quarantième de sa profession religieuse, et la trente-huitième de sa prélature.
Dans la même semaine, la ville très forte d'Ascalon, en Palestine, lut prise parles Chrétiens, selon que le saint l'avait prédit à plusieurs reprises, comme l'atteste Geoffroy dans le livre III de sa Vie de saint Bernard, chapitre IV.
Bernard eut pour successeur à Clairvaux, Robert, qui était abbé des Dunes.
Fondation du monastère de la Pérouse, diocèse de Périgueux, et de Mores, diocèse de Langres.
Adoption de l'abbaye de Monte-Ramo, diocèse d'Orense en Galice.
NOTA :
Œuvres de Saint Bernard : Tome IV, pages 647-662
Pour consulter toute l'œuvre de Saint Bernard suivre le lien suivant :
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/frame.html
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
SAINT
BERNARD DE CORLEONE
capucin
(1605-1667)
Dans l'imaginaire collectif, la figure de Bernard de Corleone est celle d'un bagarreur de foire à la manière de Ludovico, le ferrailleur du roman de Manzoni.
Mais cette image déformée, issue d'une vieille et banale biographie ne correspond pas à la personnalité de Filippo Latino ainsi que s'appelait Bernard avant de devenir capucin.
Il est né à Corleone, le 6 février 1605.
Sa maison, au dire des gens, était une "maison de saints".
C'est que le père, Leonardo, habile cordonnier et artisan du cuir, se dépensait en bonté envers les miséreux jusqu'à les amener chez lui pour les layer, les habiller de neuf et les restaurer avec une exquise charité.
Les frères et les sœurs de Filippo aussi étaient gens de grande vertu.
Il était donc à bonne école pour apprendre jeune à pratiquer la charité et à prier le Christ et la Vierge.
Gérant d'une boutique de cordonnier, il savait bien traiter ses employés et il ne lui rebutait pas de solliciter les aumônes "par la ville, durant l'hiver, au profit des pauvres prisonniers".
Il n'avait qu'un seul défaut évident, au dire de deux des témoins de son procès de béatification:
"cette promptitude à prendre l'épée en main à la moindre provocation"
Sa "promptitude" ne manquait pas d'effrayer ses parents.
Spécialement après un incident au cours duquel Filippo avait blessé à la main un provocateur arrogant.
C'était en 1624, alors que Filippo avait 19 ans.
La scène avait eu beaucoup de témoins et avait fait grand bruit.
Ce tueur à gages y avait laissé le bras mais Filippo, promu "meilleure lame de Sicile" en était resté profondément ébranlé, jusqu'à demander le pardon du blessé qui deviendra ensuite son ami.
Cela contribua certainement à mûrir sa vocation.
À 27 ans, le 13 décembre 1631, au noviciat de Caltanissetta, il reçut l'habit des capucins, les frères les plus intimement liés aux classes populaires.
Désormais, il s'appellerait frère Bernard.
Il a mené une vie simple, passée dans les divers couvents de la province:
Bisacquino, Bivona, Castelvetrano, Burgio, Partinico, Agrigento, Chiusa, Caltabellotta, Polizzi et aussi, peut-être, Salemi et Monreale.
Il n'est pourtant pas possible d'en établir la chronologie exacte.
On sait qu'il a passé les 15 dernières années de sa vie à Palerme où il accueillit "sœur la mort" le 12 janvier 1667. Son emploi a toujours été celui de cuisinier ou d'aide-cuisinier.
À cela, cependant, il ajoutait le soin des malades et une foule de tâches supplémentaires qui lui donnaient la satisfaction d'être utile à tout le monde, aux confrères surchargés de travail et aux prêtres dont il lavait les habits.
Avec le temps, il était devenu le buandier de presque tous ses confrères.
Son impressionnante physionomie spirituelle ressort d'un mosaique de faits et de dits assaisonnés de pénitences et de mortifications héroïques, pour ne pas dire incroyables.
Les témoignages des procès qui ont conduit à sa canonisation forment un splendide recueil de traits de sa personnalité à la fois douce et forte, comme sa patrie sicilienne.
"Il nous exhortait toujours à aimer Dieu et à faire penitence pour nos péchés".
"Il était constamment absorbé dans la prière...
Pour lui, aller à l'église, c'était participer à un copieux festin dans l'oraison et l'union à Dieu".
En ces moments, le temps s'arrêtait, il vivait en extase.
Il venait volontiers à l'église durant la nuit et s'en expliquait disant "qu'il n'est pas bon de laisser le Saint Sacrement tout seul et qu'il lui tiendrait compagnie en attendant l'arrivée des autres frères".
Il trouvait le temps d'aider le sacristain puisque cela lui permettait de rester tout près du tabernacle.
À l'encontre de la coutume de son époque, il recevait la communion chaque jour.
À tel point que durant les dernières années de sa vie, ses supérieurs qui le voyaient accablé par ses pénitences constantes, ne lui confièrent plus d'autre emploi que le service de l'autel.
Sa solidarité avec ses confrères s'ouvrait aussi sur une dimension sociale.
À Palerme, en temps de calamité naturelle, tremblements de terres ou ouragans, il se faisait médiateur devant le tabernacle et combattait comme Moïse :
"Doucement, Seigneur, doucement!
Use envers nous de ta miséricorde ! Je veux cette grâce, Seigneur, je la veux !".
Et le fléau cessait, la catastrophe s'atténuait.
Sur son lit de mort, recevant avec joie une dernière bénédiction avant d'expirer, il répétait :
"Allons-y, allons-y !"
C'était le mercredi 12 janvier 1667, à 14 heures.
Fr. Antonino da Partanna, un confrère qui lui était très proche, l'a vu en esprit, tout entouré de lumière et proclamant dans une joie ineffable:
"Le paradis ! Le paradis ! Le paradis! Bénies soient les disciplines !
Bénies soient les veilles !
Bénis les pénitences, les renoncements à la volonté propre et les gestes d'obéissance !
Bénis les jeûnes !
Béni le désir de pratiquer une vie religieuse parfaite !"
Canonisé le 2 juin 2001, place Saint-Pierre par le Pape Jean-Paul II.
BERNARD DE CORLEONE
capucin
(1605-1667)
Dans l'imaginaire collectif, la figure de Bernard de Corleone est celle d'un bagarreur de foire à la manière de Ludovico, le ferrailleur du roman de Manzoni.
Mais cette image déformée, issue d'une vieille et banale biographie ne correspond pas à la personnalité de Filippo Latino ainsi que s'appelait Bernard avant de devenir capucin.
Il est né à Corleone, le 6 février 1605.
Sa maison, au dire des gens, était une "maison de saints".
C'est que le père, Leonardo, habile cordonnier et artisan du cuir, se dépensait en bonté envers les miséreux jusqu'à les amener chez lui pour les layer, les habiller de neuf et les restaurer avec une exquise charité.
Les frères et les sœurs de Filippo aussi étaient gens de grande vertu.
Il était donc à bonne école pour apprendre jeune à pratiquer la charité et à prier le Christ et la Vierge.
Gérant d'une boutique de cordonnier, il savait bien traiter ses employés et il ne lui rebutait pas de solliciter les aumônes "par la ville, durant l'hiver, au profit des pauvres prisonniers".
Il n'avait qu'un seul défaut évident, au dire de deux des témoins de son procès de béatification:
"cette promptitude à prendre l'épée en main à la moindre provocation"
Sa "promptitude" ne manquait pas d'effrayer ses parents.
Spécialement après un incident au cours duquel Filippo avait blessé à la main un provocateur arrogant.
C'était en 1624, alors que Filippo avait 19 ans.
La scène avait eu beaucoup de témoins et avait fait grand bruit.
Ce tueur à gages y avait laissé le bras mais Filippo, promu "meilleure lame de Sicile" en était resté profondément ébranlé, jusqu'à demander le pardon du blessé qui deviendra ensuite son ami.
Cela contribua certainement à mûrir sa vocation.
À 27 ans, le 13 décembre 1631, au noviciat de Caltanissetta, il reçut l'habit des capucins, les frères les plus intimement liés aux classes populaires.
Désormais, il s'appellerait frère Bernard.
Il a mené une vie simple, passée dans les divers couvents de la province:
Bisacquino, Bivona, Castelvetrano, Burgio, Partinico, Agrigento, Chiusa, Caltabellotta, Polizzi et aussi, peut-être, Salemi et Monreale.
Il n'est pourtant pas possible d'en établir la chronologie exacte.
On sait qu'il a passé les 15 dernières années de sa vie à Palerme où il accueillit "sœur la mort" le 12 janvier 1667. Son emploi a toujours été celui de cuisinier ou d'aide-cuisinier.
À cela, cependant, il ajoutait le soin des malades et une foule de tâches supplémentaires qui lui donnaient la satisfaction d'être utile à tout le monde, aux confrères surchargés de travail et aux prêtres dont il lavait les habits.
Avec le temps, il était devenu le buandier de presque tous ses confrères.
Son impressionnante physionomie spirituelle ressort d'un mosaique de faits et de dits assaisonnés de pénitences et de mortifications héroïques, pour ne pas dire incroyables.
Les témoignages des procès qui ont conduit à sa canonisation forment un splendide recueil de traits de sa personnalité à la fois douce et forte, comme sa patrie sicilienne.
"Il nous exhortait toujours à aimer Dieu et à faire penitence pour nos péchés".
"Il était constamment absorbé dans la prière...
Pour lui, aller à l'église, c'était participer à un copieux festin dans l'oraison et l'union à Dieu".
En ces moments, le temps s'arrêtait, il vivait en extase.
Il venait volontiers à l'église durant la nuit et s'en expliquait disant "qu'il n'est pas bon de laisser le Saint Sacrement tout seul et qu'il lui tiendrait compagnie en attendant l'arrivée des autres frères".
Il trouvait le temps d'aider le sacristain puisque cela lui permettait de rester tout près du tabernacle.
À l'encontre de la coutume de son époque, il recevait la communion chaque jour.
À tel point que durant les dernières années de sa vie, ses supérieurs qui le voyaient accablé par ses pénitences constantes, ne lui confièrent plus d'autre emploi que le service de l'autel.
Sa solidarité avec ses confrères s'ouvrait aussi sur une dimension sociale.
À Palerme, en temps de calamité naturelle, tremblements de terres ou ouragans, il se faisait médiateur devant le tabernacle et combattait comme Moïse :
"Doucement, Seigneur, doucement!
Use envers nous de ta miséricorde ! Je veux cette grâce, Seigneur, je la veux !".
Et le fléau cessait, la catastrophe s'atténuait.
Sur son lit de mort, recevant avec joie une dernière bénédiction avant d'expirer, il répétait :
"Allons-y, allons-y !"
C'était le mercredi 12 janvier 1667, à 14 heures.
Fr. Antonino da Partanna, un confrère qui lui était très proche, l'a vu en esprit, tout entouré de lumière et proclamant dans une joie ineffable:
"Le paradis ! Le paradis ! Le paradis! Bénies soient les disciplines !
Bénies soient les veilles !
Bénis les pénitences, les renoncements à la volonté propre et les gestes d'obéissance !
Bénis les jeûnes !
Béni le désir de pratiquer une vie religieuse parfaite !"
Canonisé le 2 juin 2001, place Saint-Pierre par le Pape Jean-Paul II.
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BERNARDIN DE SIENNE
de l'Ordre de Saint-François, saint
(1380-1444)
Le principal caractère de la vie de ce grand Saint, c'est son amour extraordinaire pour la très Sainte Vierge.
Né le 8 septembre 1380, jour de la Nativité de Marie, Bernardin fut privé, tout jeune, de ses nobles et pieux parents; mais il trouva dans une de ses tantes une véritable mère.
Voyant un jour cette femme refuser de donner à un pauvre, il lui dit:
"Pour l'amour de Dieu, donnez à ce pauvre; autrement je ne prendrai rien aujourd'hui."
Sa pureté était si grande, que le moindre mot inconvenant l'affligeait profondément :
"Silence, disaient les étudiants quand ils le voyaient apparaître au milieu de leurs conversations trop libres, silence, voici Bernardin!"
A dix-sept ans, il entra dans une confrérie de garde-malades, et soigna pendant quatre ans, dans un hôpital, avec un dévouement et une douceur rares, toutes les infirmités humaines.
Se traitant lui-même avec la dernière dureté, il ne songeait qu'aux besoins des autres; il parut surtout héroïque dans une peste affreuse, où il s'imposa mille fatigues et brava mille fois la mort.
L'inspiration du Ciel le conduisit alors chez les Franciscains, qui le lancèrent bientôt dans la prédication.
Grâce à la bonté de sa Mère céleste, sa voix, faible et presque éteinte, devint inopinément claire et sonore; Bernardin fut un apôtre aussi brillant par son éloquence que par sa science, et opéra en Italie de merveilleux fruits de salut.
Faisant un jour l'éloge de la Sainte Vierge, il Lui appliqua cette parole de l'Apocalypse:
"Un grand signe est apparu au Ciel."
Au même instant, une étoile brillante parut au-dessus de sa tête.
Une autre fois, parlant en italien, il fut parfaitement compris par des auditeurs grecs qui ne connaissaient que leur langue maternelle.
Un jour, un pauvre lépreux lui demanda l'aumône ; Bernardin, qui ne portait jamais d'argent, lui donna ses souliers; mais à peine le malheureux les eut-il chaussés, qu'il se senti soulagé et vit disparaître toute trace de lèpre.
Bernardin, allant prêcher, devait traverser une rivière et ne pouvait obtenir le passage de la part d'un batelier cupide auquel il n'avait rien à donner.
Confiant en Dieu il étendit son manteau sur les eaux, et, montant sur ce frêle esquif, passa la rivière.
C'est à Bernardin de Sienne que remonte la dévotion au saint Nom de Jésus : il ne pouvait prononcer ce nom sans éprouver des transports extraordinaires.
Il a été aussi un des apôtres les plus zélés du culte de saint Joseph.
de l'Ordre de Saint-François, saint
(1380-1444)
Le principal caractère de la vie de ce grand Saint, c'est son amour extraordinaire pour la très Sainte Vierge.
Né le 8 septembre 1380, jour de la Nativité de Marie, Bernardin fut privé, tout jeune, de ses nobles et pieux parents; mais il trouva dans une de ses tantes une véritable mère.
Voyant un jour cette femme refuser de donner à un pauvre, il lui dit:
"Pour l'amour de Dieu, donnez à ce pauvre; autrement je ne prendrai rien aujourd'hui."
Sa pureté était si grande, que le moindre mot inconvenant l'affligeait profondément :
"Silence, disaient les étudiants quand ils le voyaient apparaître au milieu de leurs conversations trop libres, silence, voici Bernardin!"
A dix-sept ans, il entra dans une confrérie de garde-malades, et soigna pendant quatre ans, dans un hôpital, avec un dévouement et une douceur rares, toutes les infirmités humaines.
Se traitant lui-même avec la dernière dureté, il ne songeait qu'aux besoins des autres; il parut surtout héroïque dans une peste affreuse, où il s'imposa mille fatigues et brava mille fois la mort.
L'inspiration du Ciel le conduisit alors chez les Franciscains, qui le lancèrent bientôt dans la prédication.
Grâce à la bonté de sa Mère céleste, sa voix, faible et presque éteinte, devint inopinément claire et sonore; Bernardin fut un apôtre aussi brillant par son éloquence que par sa science, et opéra en Italie de merveilleux fruits de salut.
Faisant un jour l'éloge de la Sainte Vierge, il Lui appliqua cette parole de l'Apocalypse:
"Un grand signe est apparu au Ciel."
Au même instant, une étoile brillante parut au-dessus de sa tête.
Une autre fois, parlant en italien, il fut parfaitement compris par des auditeurs grecs qui ne connaissaient que leur langue maternelle.
Un jour, un pauvre lépreux lui demanda l'aumône ; Bernardin, qui ne portait jamais d'argent, lui donna ses souliers; mais à peine le malheureux les eut-il chaussés, qu'il se senti soulagé et vit disparaître toute trace de lèpre.
Bernardin, allant prêcher, devait traverser une rivière et ne pouvait obtenir le passage de la part d'un batelier cupide auquel il n'avait rien à donner.
Confiant en Dieu il étendit son manteau sur les eaux, et, montant sur ce frêle esquif, passa la rivière.
C'est à Bernardin de Sienne que remonte la dévotion au saint Nom de Jésus : il ne pouvait prononcer ce nom sans éprouver des transports extraordinaires.
Il a été aussi un des apôtres les plus zélés du culte de saint Joseph.
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BONIFACIA RORDRIGUEZ CASTRO
religieuse, fondatrice, sainte
1837-1905
Bonifacia Rodriguez Castro naît en 1837 à Salamanque (Espagne) dans une famille très chrétienne. Son père est un artisan tailleur.
A l’âge de 15 ans, elle doit travailler dans la passementerie à laquelle elle s’est initiée afin d’aider sa mère devenue veuve, ayant à sa charge une famille nombreuse.
Très tôt, Bonifacia expérimente les dures conditions de la femme travailleuse à cette époque : horaires épuisants et maigre salaire.
Elle monte son propre atelier de passementerie où elle travaille avec le plus grand recueillement, imitant la vie cachée de la Sainte Famille de Nazareth.
A partir de 1865, sa mère, qui a perdu tous ses autres enfants sauf une fille qui s’est mariée, travaille aussi dans l’atelier de Bonifacia.
Elles mènent toutes les deux une vie de grande piété.
Bonifacia nourrit un amour de prédilection pour la Vierge Marie Immaculée, dogme que le bienheureux Pie IX a promulgué naguère (1854), ainsi que pour saint Joseph que Léon XIII déclare Patron de l’Église universelle (1870).
Un groupe de jeunes filles, amies de Bonifacia, se joint à elle, attirées par le témoignage de sa vie.
Elles se réunissent dans sa maison-atelier, spécialement les soirées de Dimanche et jours de fête, pour se libérer des amusements dangereux qui les guettent.
Elles décident ensemble de faire une “Association de l’Immaculée et de Saint Joseph” qu’elles nomment ensuite “l’Association Joséphine”.
Bonifacia, qui se sent appelée à la vie religieuse, songe à entrer dans un couvent de dominicaines à Salamanque.
C’est alors qu’elle rencontre un jésuite, le Père Francisco Butinyà qui l’en dissuade.
Lui aussi est dévoré d’un grand zèle apostolique pour le monde des travailleurs.
Il est en train d’écrire un livre intitulé : “La lumière de l’artisan, ou, collection de vies d’illustres fidèles qui se sont sanctifiés dans des professions humbles”.
Le Père pense à une nouvelle Congrégation féminine qui servirait à protéger les femmes travailleuses par le moyen de femmes travailleuses.
Il propose à Bonifacia d’en être la cofondatrice avec lui.
Ce projet reçoit le soutien enthousiaste de l’évêque de Salamanque, Mgr Lluch i Garriga, qui promulgue le décret d’érection de l’Institut, dénommé : “Congrégation des Servantes de Saint Joseph” (7 janvier 1874).
Son but est de rendre sa dignité à la femme pauvre sans travail “en la préservant du danger de se perdre”.
Quant au Père Butinyà, il pense qu’il faut sanctifier le travail en l’unissant à la prière.
« Ainsi, écrit-il, la prière ne sera pas un obstacle pour le travail, ni le travail ne vous enlèvera le recueillement de la prière. »
Bonifacia fait donc sa fondation avec six autres compagnes…dont sa mère.
Leur résidence n’est autre que leur atelier.
En somme, elles avaient l’intuition implicite que « la société est parfois tentée de tout convertir en marchandise et en gain, en mettant de côté les valeurs et la dignité qui n’ont pas de prix » (Jean Paul II – homélie de béatification).
Or, la personne qui est “l’image et la demeure de Dieu” doit être “protégée (…) quelle que soit sa condition sociale ou son activité professionnelle” (Id). « La vie d’un travailleur vaut tout l’or du monde » dira plus tard Mgr Cardjin, fondateur de la J.O.C.
C’est vrai, mais cela ne se disait pas à l’époque, du moins dans ces termes-là, et, d’autre part, le projet de vie de Bonifacia paraissait trop audacieux.
Aussi rencontre-t-il immédiatement l’opposition du clergé séculier de Salamanque. Le Père Butinyà est exilé hors d’Espagne et l’évêque, transféré à Barcelone.
Les directeurs de la Communauté nommés par le nouvel évêque sèment imprudemment la désunion entre les sœurs.
Bonifacia, la fondatrice, s’emploie à défendre le charisme de son Institut, mais on profite d’un voyage qu’elle entreprend à Gérone pour la destituer.
S’ensuivent humiliations et calomnies.
Sa seule réponse est le silence, l’humilité et le pardon.
Puis elle obtient d’aller fonder un nouvel Atelier à Zamora où elle peut vivre son idéal (25 juillet 1883).
Mais, quand arrive l’approbation pontificale de Léon XIII aux Servantes de Saint Joseph (1er juillet 1901), la maison de Zamora en est exclue.
Malgré tout, Bonifacia, poussée par son désir de communion, décide d’aller voir ses sœurs de Salamanque, mais, quand elle arrive à la maison de Sainte Thérèse, on lui dit
:
“nous avons reçu l’ordre de ne pas vous accueillir”.
Le cœur transpercé, elle revient à Zamora, consciente qu’elle ne reverra plus jamais Salamanque, mais avec la certitude que la réunification de la Communauté se fera après sa mort, laquelle survient en 1905 ; et effectivement, la maison de Zamora s’unit au reste de la Congrégation le 23 janvier 1907.
De nos jours, les “Servantes de Saint Joseph” poursuivent “l’œuvre (de leur fondatrice) dans le monde avec simplicité, joie et abnégation.” (Jean-Paul II)
religieuse, fondatrice, sainte
1837-1905
Bonifacia Rodriguez Castro naît en 1837 à Salamanque (Espagne) dans une famille très chrétienne. Son père est un artisan tailleur.
A l’âge de 15 ans, elle doit travailler dans la passementerie à laquelle elle s’est initiée afin d’aider sa mère devenue veuve, ayant à sa charge une famille nombreuse.
Très tôt, Bonifacia expérimente les dures conditions de la femme travailleuse à cette époque : horaires épuisants et maigre salaire.
Elle monte son propre atelier de passementerie où elle travaille avec le plus grand recueillement, imitant la vie cachée de la Sainte Famille de Nazareth.
A partir de 1865, sa mère, qui a perdu tous ses autres enfants sauf une fille qui s’est mariée, travaille aussi dans l’atelier de Bonifacia.
Elles mènent toutes les deux une vie de grande piété.
Bonifacia nourrit un amour de prédilection pour la Vierge Marie Immaculée, dogme que le bienheureux Pie IX a promulgué naguère (1854), ainsi que pour saint Joseph que Léon XIII déclare Patron de l’Église universelle (1870).
Un groupe de jeunes filles, amies de Bonifacia, se joint à elle, attirées par le témoignage de sa vie.
Elles se réunissent dans sa maison-atelier, spécialement les soirées de Dimanche et jours de fête, pour se libérer des amusements dangereux qui les guettent.
Elles décident ensemble de faire une “Association de l’Immaculée et de Saint Joseph” qu’elles nomment ensuite “l’Association Joséphine”.
Bonifacia, qui se sent appelée à la vie religieuse, songe à entrer dans un couvent de dominicaines à Salamanque.
C’est alors qu’elle rencontre un jésuite, le Père Francisco Butinyà qui l’en dissuade.
Lui aussi est dévoré d’un grand zèle apostolique pour le monde des travailleurs.
Il est en train d’écrire un livre intitulé : “La lumière de l’artisan, ou, collection de vies d’illustres fidèles qui se sont sanctifiés dans des professions humbles”.
Le Père pense à une nouvelle Congrégation féminine qui servirait à protéger les femmes travailleuses par le moyen de femmes travailleuses.
Il propose à Bonifacia d’en être la cofondatrice avec lui.
Ce projet reçoit le soutien enthousiaste de l’évêque de Salamanque, Mgr Lluch i Garriga, qui promulgue le décret d’érection de l’Institut, dénommé : “Congrégation des Servantes de Saint Joseph” (7 janvier 1874).
Son but est de rendre sa dignité à la femme pauvre sans travail “en la préservant du danger de se perdre”.
Quant au Père Butinyà, il pense qu’il faut sanctifier le travail en l’unissant à la prière.
« Ainsi, écrit-il, la prière ne sera pas un obstacle pour le travail, ni le travail ne vous enlèvera le recueillement de la prière. »
Bonifacia fait donc sa fondation avec six autres compagnes…dont sa mère.
Leur résidence n’est autre que leur atelier.
En somme, elles avaient l’intuition implicite que « la société est parfois tentée de tout convertir en marchandise et en gain, en mettant de côté les valeurs et la dignité qui n’ont pas de prix » (Jean Paul II – homélie de béatification).
Or, la personne qui est “l’image et la demeure de Dieu” doit être “protégée (…) quelle que soit sa condition sociale ou son activité professionnelle” (Id). « La vie d’un travailleur vaut tout l’or du monde » dira plus tard Mgr Cardjin, fondateur de la J.O.C.
C’est vrai, mais cela ne se disait pas à l’époque, du moins dans ces termes-là, et, d’autre part, le projet de vie de Bonifacia paraissait trop audacieux.
Aussi rencontre-t-il immédiatement l’opposition du clergé séculier de Salamanque. Le Père Butinyà est exilé hors d’Espagne et l’évêque, transféré à Barcelone.
Les directeurs de la Communauté nommés par le nouvel évêque sèment imprudemment la désunion entre les sœurs.
Bonifacia, la fondatrice, s’emploie à défendre le charisme de son Institut, mais on profite d’un voyage qu’elle entreprend à Gérone pour la destituer.
S’ensuivent humiliations et calomnies.
Sa seule réponse est le silence, l’humilité et le pardon.
Puis elle obtient d’aller fonder un nouvel Atelier à Zamora où elle peut vivre son idéal (25 juillet 1883).
Mais, quand arrive l’approbation pontificale de Léon XIII aux Servantes de Saint Joseph (1er juillet 1901), la maison de Zamora en est exclue.
Malgré tout, Bonifacia, poussée par son désir de communion, décide d’aller voir ses sœurs de Salamanque, mais, quand elle arrive à la maison de Sainte Thérèse, on lui dit
:
“nous avons reçu l’ordre de ne pas vous accueillir”.
Le cœur transpercé, elle revient à Zamora, consciente qu’elle ne reverra plus jamais Salamanque, mais avec la certitude que la réunification de la Communauté se fera après sa mort, laquelle survient en 1905 ; et effectivement, la maison de Zamora s’unit au reste de la Congrégation le 23 janvier 1907.
De nos jours, les “Servantes de Saint Joseph” poursuivent “l’œuvre (de leur fondatrice) dans le monde avec simplicité, joie et abnégation.” (Jean-Paul II)
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BRIGITTE DE SUÈDE
(1302-1373)
La mystique du Nord
“Celui qui n’est pas prêt à suivre son Seigneur jusqu’au martyre
ne pourra pas non plus Le suivre dans la gloire.”
LA VIE DE SAINTE BRIGITTE
Brigitte de Suède était la fille ainée de la deuxième femme de son père, Birger Persson, homme de loi, l’un des plus puissants personnages du royaume de Suède, et grand propriétaire terrien.
Elle fut favorisée de quelques visions pendant son enfance, dont une dramatique vision de Jésus Crucifié:
Brigitte n’avait pas dix ans. Dès lors la Croix sera l’élément central de ses méditations.
Elle avait douze ans à la mort de sa mère.
En 1316, âgée de quatorze ans, elle fut mariée à Ulf Gudmarson d’Ulfasa, de cinq ans son aîné.
De ce mariage naquirent huit enfants (quatre fils et quatre filles) dont cinq atteindront l’âge adulte. Après la mort de son mari en 1344, Brigitte distribua ses biens à ses héritiers et aux pauvres, et s’en alla vivre une vie austère à Alvastra dans un petit logement situé près du monastère cistercien où Ulf avait vécu ses dernières années.
C’est là que le Seigneur commença ses entretiens avec celle dont il voulait faire son épouse.
Plus tard Brigitte fut amenée à fonder un nouvel ordre religieux l’Ordre du Saint Sauveur.
Mais Brigitte n’était pas destinée à vivre une vie cachée dans un monastère: le Seigneur lui assignait une mission de prophète et de prédicateur.
En 1349 Brigitte quitta la Suède, qu’elle ne reverra plus, pour aller à Rome, espérant y trouver le pape afin de faire approuver le nouvel ordre religieux, et surtout, de le convaincre de rentrer à Rome.
Mais ni Clément VI, ni Innocent VI, ne répondront pas aux appels pressants de Brigitte: ils mourront en Avignon.
En 1350, sa fille Catherine, qui sera elle aussi canonisée, rejoignit sa mère à Rome, là où Brigitte rédigea ses lettres, ses Révélations et les quinze célèbres oraisons de la Passion.
En 1367 enfin, le pape Urbain V revint à Rome, mais pour trois ans seulement.
C’est Catherine de Sienne qui reprendra le flambeau de Brigitte après la mort de cette dernière, et verra le retour définitif de la papauté à Rome, en 1377.
Agée de 70 ans, en 1371, Brigitte, sur l’ordre du Seigneur, entreprend un pèlerinage en Terre Sainte.
Le voyage de retour en 1373 fut long et difficile et Brigitte mourut à Rome le 23 juillet 1373.
Elle fut canonisée par Boniface IX en 1391, et la véracité de ses révélations fut reconnue par le Concile de Constance en 1415.
LA VIE MYSTIQUE DE BRIGITTE
“Ne pensez pas qu’aucun péché soit petit...
Craignez Dieu, Confessez vos fautes.
Par la confession l’âme s’approche de plus en plus de Dieu.
Plus la confession est fréquente, et plus elle est exacte,
tant des grandes que des petites fautes, plus elle plaît à Dieu. “
Nous retiendrons surtout les deux thèmes essentiels des enseignements de Brigitte de Suède: la Miséricorde de Dieu manifestée par sa Passion, et la nécessité de l’humilité.
“Pour parvenir au Cœur de Dieu, explique la Vierge Marie à Brigitte, il y a deux voies: la première, c’est l’humilité d’une vraie contrition qui introduit l’homme dans le Cœur de Dieu. La deuxième, c’est la considération de la Passion de Jésus-Christ.”
Prophète, chargée de missions difficiles auprès des papes, Brigitte ne fut pas seulement une grande active.
Elle fut également une grande contemplative, et c’est dans sa vie mystique qu’elle puisa la force de répondre aux appels du Seigneur et d’accomplir sa mission.
Le Cœur de Jésus et le cœur de Marie ne sont qu’un seul cœur
C’est la Vierge Marie qui montra le chemin à Brigitte.
Par les yeux de Marie elle revécut la Passion et la mort de Jésus.
Par Marie, elle connut l’Amour réciproque de Jésus et de sa Mère:
“Nous nous sommes réciproquement aimés, et avec tant de ferveur, que nous avons été tous deux comme un seul cœur...
Je ressentais comme si la moitié de mon cœur sortait de moi, et quand Il souffrait, j’en ressentais la douleur, comme si mon cœur eût enduré ses tourments...
De même, quand mon Fils était frappé et flagellé, mon cœur l’était aussi...
J’ai été la plus proche de lui dans sa Passion...
J’ose dire que sa douleur était ma douleur, d’autant que son Cœur était mon cœur...
Mon cher Fils et moi avons racheté le monde comme par un seul Cœur.”
On remarquera combien les révélations de Brigitte sont orientées vers la souffrance de la Croix et la nécessité de l’humilité
Les souffrances et l’humiliation de la Croix
Le Christ et Marie, en effet, insistèrent beaucoup sur la souffrance et l’humiliation de la Croix.
Le Christ dit à Brigitte:
“Celui qui n’est pas prêt à suivre son Seigneur jusqu’au martyre ne pourra pas non plus Le suivre dans la gloire.
Marie ajouta:
“Vous avez maintenant deux voies pour parvenir jusqu’au Cœur de Dieu.
La première est l’humilité de la vraie contrition, celle qui conduit l’homme jusqu’au Cœur de Dieu et au dialogue spirituel.
La seconde est la contemplation de la souffrance de mon Fils.“
On comprend dès lors que la facette du Cœur de Jésus qui apparaîtra le plus dans les révélations de Brigitte est presque toujours celle de l’amour débordant du Cœur de Jésus pour nous, mais d’un amour souffrant.
Parlant de ses amis, Jésus dit:
“S’ils avaient de l’amour pour Dieu, ils réfléchiraient aux souffrances du Christ et au sacrifice de la Croix, puisqu’Il a préféré mourir sur la Croix plutôt que de les abandonner.” ou encore:
“Écoutez ma voix qui criait au gibet: J’ai soif de vous...”
Mais cette souffrance est pourtant pleine de douceur, car le Christ: “ est vraiment comme une mère qui court au-devant de son fils égaré, lui montre une lumière, afin qu’il voie le chemin, aille à sa rencontre le cœur plein d’amour, lui abrégeant ainsi la route, et l’embrasse en exultant de joie. “
Marie dit de son fils:
” Celui qui est le pain des anges et des hommes, qui rassasie toutes choses et qui n’a besoin de rien, désire d’être repu de l’amour des hommes.”
Jésus complète:
“Je suis très doux, Je suis très charitable, Moi qui suis plus prêt à donner que quelqu’un à demander.
Mes paroles et mon Cœur rassasieront les hommes et les rempliront d’indicibles et abondantes consolations.”
La Miséricorde du Cœur de Jésus
Dieu est miséricorde, mais Il réclame l’humilité.
“Ainsi, parlant à son épouse Brigitte, Jésus lui dit:
“Aimez-moi de tout votre cœur, car Je vous ai aimée.
Je me suis librement donné à mes ennemis...
Partant, vous seriez trop ingrate, si vous ne M’aimiez, en reconnaissance du grand amour que Je vous ai témoigné.
Si ma tête a été percée par les épines et s’est inclinée sur la Croix, votre tête doit bien s’incliner à l’humilité...”
Jésus précise :
” Ma miséricorde pardonne aux méchants... à cause de mon excès d’amour: à raison de ma grande charité, Je les supporte jusqu’aux derniers instants de leur vie...
Ma miséricorde leur pardonne, à raison de la perfection des bons et pour la conversion de quelques méchants.”
Le Cœur de Jésus est plein de miséricorde pour les pécheurs
. Mais le Seigneur demande que les hommes reconnaissent leurs péchés et qu’ils s’en purifient:
“Ne pensez pas qu’aucun péché soit petit; n’en négligez pas un...
Craignez Dieu: la crainte est une introduction au ciel...
Confessez vos fautes.
Par la confession l’âme s’approche de plus en plus de Dieu. Plus la confession est fréquente, et plus elle est exacte, tant des grandes que des petites fautes, plus elle plaît à Dieu.
La confession plaît d’autant plus à Dieu qu’elle introduit l’âme dans le Cœur de Dieu.”
Parlant d’un homme simple, Jésus dit : “... en lui demeure l’humilité qui fait entrer Dieu dans le cœur...
Il m’aime dans son cœur, et d’où lui vient cet amour sinon de mon esprit?..
.Celui qui avec foi et volonté dit:
Jésus, aie miséricorde de moi, me plaît plus que celui qui, distraitement, lit mille versets de la Bible...
Le pain que je désire c’est le perfectionnement des âmes, la contrition du cœur... et l’humilité qui brûle d’amour.”
Et encore :
“J’irai avec amour au-devant de tous mes amis, de tous ceux qui reviennent à Moi, et J’illuminerai leur esprit et leur âme à la sagesse divine.
Je veux les embrasser avec toutes sortes de gloire, et avec mes troupes célestes...
Je vous manifeste mon Amour afin que ceux qui se sont retirés de Moi reviennent à Moi, et me reconnaissent pour leur Créateur, lequel ils ont oublié.”
Car, précise Marie parlant à Brigitte
: “Le Cœur de mon Fils est très suave, comme du miel, et très pur comme une fontaine très pure, car toutes les bontés éparses en cet univers procèdent de Lui comme de leur source, car Lui est doux.”
Pour conclure les enseignements de Jésus et de Marie donnés à Sainte Brigitte
Afin de parvenir au Cœur de Dieu, souvenons-nous que le Cœur de Jésus, Cœur du Fils, est doux, et qu’il est Miséricorde et Amour.
Mais cependant n’oublions jamais l’essentiel, ce que Marie nous a enseigné par l’intermédiaire de Sainte Brigitte:
“Pour parvenir au Cœur de Dieu, il y a deux voies: la première, c’est l’humilité d’une vraie contrition qui introduit l’homme dans le Cœur de Dieu. La deuxième, c’est la considération de la Passion de mon Fils qui fait courir joyeusement jusqu’au Cœur de Dieu.”
Paulette Leblanc
(1302-1373)
La mystique du Nord
“Celui qui n’est pas prêt à suivre son Seigneur jusqu’au martyre
ne pourra pas non plus Le suivre dans la gloire.”
LA VIE DE SAINTE BRIGITTE
Brigitte de Suède était la fille ainée de la deuxième femme de son père, Birger Persson, homme de loi, l’un des plus puissants personnages du royaume de Suède, et grand propriétaire terrien.
Elle fut favorisée de quelques visions pendant son enfance, dont une dramatique vision de Jésus Crucifié:
Brigitte n’avait pas dix ans. Dès lors la Croix sera l’élément central de ses méditations.
Elle avait douze ans à la mort de sa mère.
En 1316, âgée de quatorze ans, elle fut mariée à Ulf Gudmarson d’Ulfasa, de cinq ans son aîné.
De ce mariage naquirent huit enfants (quatre fils et quatre filles) dont cinq atteindront l’âge adulte. Après la mort de son mari en 1344, Brigitte distribua ses biens à ses héritiers et aux pauvres, et s’en alla vivre une vie austère à Alvastra dans un petit logement situé près du monastère cistercien où Ulf avait vécu ses dernières années.
C’est là que le Seigneur commença ses entretiens avec celle dont il voulait faire son épouse.
Plus tard Brigitte fut amenée à fonder un nouvel ordre religieux l’Ordre du Saint Sauveur.
Mais Brigitte n’était pas destinée à vivre une vie cachée dans un monastère: le Seigneur lui assignait une mission de prophète et de prédicateur.
En 1349 Brigitte quitta la Suède, qu’elle ne reverra plus, pour aller à Rome, espérant y trouver le pape afin de faire approuver le nouvel ordre religieux, et surtout, de le convaincre de rentrer à Rome.
Mais ni Clément VI, ni Innocent VI, ne répondront pas aux appels pressants de Brigitte: ils mourront en Avignon.
En 1350, sa fille Catherine, qui sera elle aussi canonisée, rejoignit sa mère à Rome, là où Brigitte rédigea ses lettres, ses Révélations et les quinze célèbres oraisons de la Passion.
En 1367 enfin, le pape Urbain V revint à Rome, mais pour trois ans seulement.
C’est Catherine de Sienne qui reprendra le flambeau de Brigitte après la mort de cette dernière, et verra le retour définitif de la papauté à Rome, en 1377.
Agée de 70 ans, en 1371, Brigitte, sur l’ordre du Seigneur, entreprend un pèlerinage en Terre Sainte.
Le voyage de retour en 1373 fut long et difficile et Brigitte mourut à Rome le 23 juillet 1373.
Elle fut canonisée par Boniface IX en 1391, et la véracité de ses révélations fut reconnue par le Concile de Constance en 1415.
LA VIE MYSTIQUE DE BRIGITTE
“Ne pensez pas qu’aucun péché soit petit...
Craignez Dieu, Confessez vos fautes.
Par la confession l’âme s’approche de plus en plus de Dieu.
Plus la confession est fréquente, et plus elle est exacte,
tant des grandes que des petites fautes, plus elle plaît à Dieu. “
Nous retiendrons surtout les deux thèmes essentiels des enseignements de Brigitte de Suède: la Miséricorde de Dieu manifestée par sa Passion, et la nécessité de l’humilité.
“Pour parvenir au Cœur de Dieu, explique la Vierge Marie à Brigitte, il y a deux voies: la première, c’est l’humilité d’une vraie contrition qui introduit l’homme dans le Cœur de Dieu. La deuxième, c’est la considération de la Passion de Jésus-Christ.”
Prophète, chargée de missions difficiles auprès des papes, Brigitte ne fut pas seulement une grande active.
Elle fut également une grande contemplative, et c’est dans sa vie mystique qu’elle puisa la force de répondre aux appels du Seigneur et d’accomplir sa mission.
Le Cœur de Jésus et le cœur de Marie ne sont qu’un seul cœur
C’est la Vierge Marie qui montra le chemin à Brigitte.
Par les yeux de Marie elle revécut la Passion et la mort de Jésus.
Par Marie, elle connut l’Amour réciproque de Jésus et de sa Mère:
“Nous nous sommes réciproquement aimés, et avec tant de ferveur, que nous avons été tous deux comme un seul cœur...
Je ressentais comme si la moitié de mon cœur sortait de moi, et quand Il souffrait, j’en ressentais la douleur, comme si mon cœur eût enduré ses tourments...
De même, quand mon Fils était frappé et flagellé, mon cœur l’était aussi...
J’ai été la plus proche de lui dans sa Passion...
J’ose dire que sa douleur était ma douleur, d’autant que son Cœur était mon cœur...
Mon cher Fils et moi avons racheté le monde comme par un seul Cœur.”
On remarquera combien les révélations de Brigitte sont orientées vers la souffrance de la Croix et la nécessité de l’humilité
Les souffrances et l’humiliation de la Croix
Le Christ et Marie, en effet, insistèrent beaucoup sur la souffrance et l’humiliation de la Croix.
Le Christ dit à Brigitte:
“Celui qui n’est pas prêt à suivre son Seigneur jusqu’au martyre ne pourra pas non plus Le suivre dans la gloire.
Marie ajouta:
“Vous avez maintenant deux voies pour parvenir jusqu’au Cœur de Dieu.
La première est l’humilité de la vraie contrition, celle qui conduit l’homme jusqu’au Cœur de Dieu et au dialogue spirituel.
La seconde est la contemplation de la souffrance de mon Fils.“
On comprend dès lors que la facette du Cœur de Jésus qui apparaîtra le plus dans les révélations de Brigitte est presque toujours celle de l’amour débordant du Cœur de Jésus pour nous, mais d’un amour souffrant.
Parlant de ses amis, Jésus dit:
“S’ils avaient de l’amour pour Dieu, ils réfléchiraient aux souffrances du Christ et au sacrifice de la Croix, puisqu’Il a préféré mourir sur la Croix plutôt que de les abandonner.” ou encore:
“Écoutez ma voix qui criait au gibet: J’ai soif de vous...”
Mais cette souffrance est pourtant pleine de douceur, car le Christ: “ est vraiment comme une mère qui court au-devant de son fils égaré, lui montre une lumière, afin qu’il voie le chemin, aille à sa rencontre le cœur plein d’amour, lui abrégeant ainsi la route, et l’embrasse en exultant de joie. “
Marie dit de son fils:
” Celui qui est le pain des anges et des hommes, qui rassasie toutes choses et qui n’a besoin de rien, désire d’être repu de l’amour des hommes.”
Jésus complète:
“Je suis très doux, Je suis très charitable, Moi qui suis plus prêt à donner que quelqu’un à demander.
Mes paroles et mon Cœur rassasieront les hommes et les rempliront d’indicibles et abondantes consolations.”
La Miséricorde du Cœur de Jésus
Dieu est miséricorde, mais Il réclame l’humilité.
“Ainsi, parlant à son épouse Brigitte, Jésus lui dit:
“Aimez-moi de tout votre cœur, car Je vous ai aimée.
Je me suis librement donné à mes ennemis...
Partant, vous seriez trop ingrate, si vous ne M’aimiez, en reconnaissance du grand amour que Je vous ai témoigné.
Si ma tête a été percée par les épines et s’est inclinée sur la Croix, votre tête doit bien s’incliner à l’humilité...”
Jésus précise :
” Ma miséricorde pardonne aux méchants... à cause de mon excès d’amour: à raison de ma grande charité, Je les supporte jusqu’aux derniers instants de leur vie...
Ma miséricorde leur pardonne, à raison de la perfection des bons et pour la conversion de quelques méchants.”
Le Cœur de Jésus est plein de miséricorde pour les pécheurs
. Mais le Seigneur demande que les hommes reconnaissent leurs péchés et qu’ils s’en purifient:
“Ne pensez pas qu’aucun péché soit petit; n’en négligez pas un...
Craignez Dieu: la crainte est une introduction au ciel...
Confessez vos fautes.
Par la confession l’âme s’approche de plus en plus de Dieu. Plus la confession est fréquente, et plus elle est exacte, tant des grandes que des petites fautes, plus elle plaît à Dieu.
La confession plaît d’autant plus à Dieu qu’elle introduit l’âme dans le Cœur de Dieu.”
Parlant d’un homme simple, Jésus dit : “... en lui demeure l’humilité qui fait entrer Dieu dans le cœur...
Il m’aime dans son cœur, et d’où lui vient cet amour sinon de mon esprit?..
.Celui qui avec foi et volonté dit:
Jésus, aie miséricorde de moi, me plaît plus que celui qui, distraitement, lit mille versets de la Bible...
Le pain que je désire c’est le perfectionnement des âmes, la contrition du cœur... et l’humilité qui brûle d’amour.”
Et encore :
“J’irai avec amour au-devant de tous mes amis, de tous ceux qui reviennent à Moi, et J’illuminerai leur esprit et leur âme à la sagesse divine.
Je veux les embrasser avec toutes sortes de gloire, et avec mes troupes célestes...
Je vous manifeste mon Amour afin que ceux qui se sont retirés de Moi reviennent à Moi, et me reconnaissent pour leur Créateur, lequel ils ont oublié.”
Car, précise Marie parlant à Brigitte
: “Le Cœur de mon Fils est très suave, comme du miel, et très pur comme une fontaine très pure, car toutes les bontés éparses en cet univers procèdent de Lui comme de leur source, car Lui est doux.”
Pour conclure les enseignements de Jésus et de Marie donnés à Sainte Brigitte
Afin de parvenir au Cœur de Dieu, souvenons-nous que le Cœur de Jésus, Cœur du Fils, est doux, et qu’il est Miséricorde et Amour.
Mais cependant n’oublions jamais l’essentiel, ce que Marie nous a enseigné par l’intermédiaire de Sainte Brigitte:
“Pour parvenir au Cœur de Dieu, il y a deux voies: la première, c’est l’humilité d’une vraie contrition qui introduit l’homme dans le Cœur de Dieu. La deuxième, c’est la considération de la Passion de mon Fils qui fait courir joyeusement jusqu’au Cœur de Dieu.”
Paulette Leblanc
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
BRUNO DE COLOGNE
Fondateur de l'Ordre des Chartreux
(1035-1101)
Saint Bruno naquit à Cologne d'une famille de première noblesse.
Ses magnifiques succès épouvantèrent son âme, désireuse de ne vivre que pour Dieu.
Il songeait à quitter ce monde, où il était déjà appelé aux grandeurs, quand un fait tragique décida complètement sa vocation.
Bruno comptait pour ami, à l'université de Paris, le célèbre chanoine Raymond, dont tout le monde admirait la vertu non moins que la science.
Or cet ami vint à mourir, et pendant ses obsèques solennelles, auxquelles Bruno assistait, à ces paroles de Job:
"Réponds-moi, quelles sont mes iniquités?"
Le mort se releva et dit d'une voix effrayante:
"Je suis accusé par un juste jugement de Dieu!"
Une panique indescriptible s'empara de la foule, et la sépulture fut remise au lendemain; mais le lendemain au même moment de l'office, le mort se leva de nouveau et s'écria:
"Je suis jugé par un juste jugement de Dieu!"
Une nouvelle terreur occasionna un nouveau retard
Enfin, le troisième jour, le mort se leva encore et cria d'une voix plus terrible:
"Je suis condamné au juste jugement de Dieu!"
Bruno brisa dès lors les derniers liens qui le retenaient au monde, et, inspiré du Ciel, il se rendit à Grenoble, où le saint évêque Hugues, répondant à ses aspirations vers la solitude la plus profonde, lui indiqua ce désert affreux et grandiose à la fois, si connu sous le nom de Grande-Chartreuse.
Il fallut franchir de dangereux précipices, s'ouvrir un chemin à coups de hache dans des bois d'une végétation puissante, entremêlés de ronces épaisses et d'immenses fougères; il fallut prendre le terrain pied à pied sur les bêtes sauvages, furieuses d'être troublées dans leur possession paisible.
Quelques cellules en bois et une chapelle furent le premier établissement.
Le travail, la prière, un profond silence du côté des hommes, tel fut pour Bruno l'emploi des premières années de sa retraite.
Il dut aller, pendant plusieurs années, servir de conseiller au saint Pape Urbain II, refusa avec larmes l'archevêché de Reggio, retourna à sa vie solitaire et alla fonder en Calabre un nouveau couvent de son Ordre.
À l'approche de sa dernière heure, pendant que ses frères désolés entouraient son lit de planches couvert de cendres, Bruno parla du bonheur de la vie monastique, fit sa confession générale, demanda humblement la Sainte Eucharistie, et s'endormit paisiblement dans le Seigneur!
Fondateur de l'Ordre des Chartreux
(1035-1101)
Saint Bruno naquit à Cologne d'une famille de première noblesse.
Ses magnifiques succès épouvantèrent son âme, désireuse de ne vivre que pour Dieu.
Il songeait à quitter ce monde, où il était déjà appelé aux grandeurs, quand un fait tragique décida complètement sa vocation.
Bruno comptait pour ami, à l'université de Paris, le célèbre chanoine Raymond, dont tout le monde admirait la vertu non moins que la science.
Or cet ami vint à mourir, et pendant ses obsèques solennelles, auxquelles Bruno assistait, à ces paroles de Job:
"Réponds-moi, quelles sont mes iniquités?"
Le mort se releva et dit d'une voix effrayante:
"Je suis accusé par un juste jugement de Dieu!"
Une panique indescriptible s'empara de la foule, et la sépulture fut remise au lendemain; mais le lendemain au même moment de l'office, le mort se leva de nouveau et s'écria:
"Je suis jugé par un juste jugement de Dieu!"
Une nouvelle terreur occasionna un nouveau retard
Enfin, le troisième jour, le mort se leva encore et cria d'une voix plus terrible:
"Je suis condamné au juste jugement de Dieu!"
Bruno brisa dès lors les derniers liens qui le retenaient au monde, et, inspiré du Ciel, il se rendit à Grenoble, où le saint évêque Hugues, répondant à ses aspirations vers la solitude la plus profonde, lui indiqua ce désert affreux et grandiose à la fois, si connu sous le nom de Grande-Chartreuse.
Il fallut franchir de dangereux précipices, s'ouvrir un chemin à coups de hache dans des bois d'une végétation puissante, entremêlés de ronces épaisses et d'immenses fougères; il fallut prendre le terrain pied à pied sur les bêtes sauvages, furieuses d'être troublées dans leur possession paisible.
Quelques cellules en bois et une chapelle furent le premier établissement.
Le travail, la prière, un profond silence du côté des hommes, tel fut pour Bruno l'emploi des premières années de sa retraite.
Il dut aller, pendant plusieurs années, servir de conseiller au saint Pape Urbain II, refusa avec larmes l'archevêché de Reggio, retourna à sa vie solitaire et alla fonder en Calabre un nouveau couvent de son Ordre.
À l'approche de sa dernière heure, pendant que ses frères désolés entouraient son lit de planches couvert de cendres, Bruno parla du bonheur de la vie monastique, fit sa confession générale, demanda humblement la Sainte Eucharistie, et s'endormit paisiblement dans le Seigneur!
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CALLISTE CARAVARIO
salésien, évêque, martyr
(1903-1930
Calliste (ou Calixte) Caravario naquit à Cuorgnè (Turin) le 18 juin 1903.
Lors d’une rencontre avec Mgr Versiglia en 1921, il lui dit:
«Je vous rejoindrai en Chine».
Il tint parole, et partit deux ans après.
Il fut ordonné prêtre.
Il se montra toujours très fidèle à sa consécration religieuse et animé par une ardente charité.
Le 25 février 1930, il accompagnait Mgr Versiglia dans une visite pastorale dans le district de Lin Chow, en compagnie de deux instituteurs, de deux jeunes femmes catéchistes et d’une élève, quand, à un endroit du fleuve isolé, ils furent assaillis par des pirates communistes.
Dans leur tentative de protéger les jeunes filles – qui réussirent à s’échapper – les deux missionnaires furent frappés brutalement et ensuite fusillés, en haine de leur foi chrétienne qui fait l’éloge de la virginité.
Jean-Paul II les béatifia au titre de premiers martyrs salésiens, reconnaissant ainsi en eux «l’idéal du bon pasteur de l’évangile... qui donne sa vie pour son troupeau... pour la cause de la vérité et de la justice, défenseur des faibles et des pauvres, vainqueur du péché et de la mort».
Leur mémoire est célébrée le 13 novembre, jour anniversaire du départ de Gênes, en 1875, de la première expédition missionnaire salésienne vers Buenos Aires (Argentine)
Béatifié le 15-5-83
Canonisé le 1er-10-2000
salésien, évêque, martyr
(1903-1930
Calliste (ou Calixte) Caravario naquit à Cuorgnè (Turin) le 18 juin 1903.
Lors d’une rencontre avec Mgr Versiglia en 1921, il lui dit:
«Je vous rejoindrai en Chine».
Il tint parole, et partit deux ans après.
Il fut ordonné prêtre.
Il se montra toujours très fidèle à sa consécration religieuse et animé par une ardente charité.
Le 25 février 1930, il accompagnait Mgr Versiglia dans une visite pastorale dans le district de Lin Chow, en compagnie de deux instituteurs, de deux jeunes femmes catéchistes et d’une élève, quand, à un endroit du fleuve isolé, ils furent assaillis par des pirates communistes.
Dans leur tentative de protéger les jeunes filles – qui réussirent à s’échapper – les deux missionnaires furent frappés brutalement et ensuite fusillés, en haine de leur foi chrétienne qui fait l’éloge de la virginité.
Jean-Paul II les béatifia au titre de premiers martyrs salésiens, reconnaissant ainsi en eux «l’idéal du bon pasteur de l’évangile... qui donne sa vie pour son troupeau... pour la cause de la vérité et de la justice, défenseur des faibles et des pauvres, vainqueur du péché et de la mort».
Leur mémoire est célébrée le 13 novembre, jour anniversaire du départ de Gênes, en 1875, de la première expédition missionnaire salésienne vers Buenos Aires (Argentine)
Béatifié le 15-5-83
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CAMILLA BATTISTA VARANO
Vierge, Clarisse, Bienheureuse
1458-1527
Camilla Varano, qui reçut plus tard en religion le nom de Battisa, naquit princesse ; son père, César, souverain de Camérino, fut généralissime des armées pontificales, sa mère Jean e Malatesta était fille des princes-souverains de Rimini.
Dès l'enfance sa vie offrit un singulier mélange de piété et de mondanité; elle priait, s'adonnait à des pratiques pénible de pénitence.
Mais en même temps, dit son biographe, dans le jardin de son âme, l'ivraie germait à côté du bon grain, et les mauvaises herbes menaçaient d'étouffer les fleurs.
Au sortir de l'église elle s'occupait de toilettes et d'amusement ; ses méditations sur la Passion du Sauveur étaient suivies de lectures frivoles, d'amusement mondains .
“Mais Dieu voulait l'avoir tout entière et l'instrument dont il se servit pour la retirer de la voie dangereuse où elle s'était engagée”, fut un enfant du Séraphin, le P. François d'Urbino, prédicateur célèbre dans toute l'Italie.
Un de ses sermons dessilla les yeux de la jeune fille ; elle comprit qu'elle ne pouvait faire mentir la parole du Christ, et qu'elle ne pouvait servir Dieu et le monde.
Elle se mit sous la direction du saint Religieux, qui l'avait devinée, et fit de rapides progrès dans la vertu.
Quelque temps après, agenouillée au pied de l’autel, elle consacrait à Dieu sa virginité.
Toutefois, ce n'était pas encore là l'holocauste que son Créateur demandait d'elle, et la grâce frappa si fort à son cœur, qui essayait de repousser son inspiration, qu'elle fut obligée de céder.
Celui qui est la fleur des champs et le lis des vallées lui apparut à plusieurs reprises et après l'avoir inondée d'un déluge de grâces, lui laissa dans son âme, dit la Bienheureuse elle-même, trois lis d'un parfum délicieux ; une haine du monde invincible, une humilité sincère, et un ardent désir de souffrance, elle embrassa alors la Règle si austère de saint Claire et ni les caresse, ni les menaces, ni les larmes, ni les violences mêmes de ses parents, ne purent ébranler son énergique résolution.
Le Jardinier céleste vint donc arracher du milieu du monde cette plante battue par l'orage et qui avait sous le vent de la tribulation jeté de profondes racines dans la vertu.
Mais la jeune héroïne n'était pas au bout de ses luttes ; des scènes déchirantes pour le cœur d'une enfant, vinrent au monastère comme au palais de son père, éprouvera sa constance de faire éclater sa générosité ; elle fut invincible.
Le second acte de son existence commence alors : la vie religieuse, elle se donne entière aux exercices de la mortification, de la patience t de l'humilité et elle vit dans une union intime avec les douleurs de l'Homme-Dieu.
Puis les maladies les plus diverses semblent se donner rendez-vous pour torturer son corps pendant que son âme est soumise à de pénibles épreuves ; les ténèbres s'épaississement auteur d'elle, de violentes tentations l'assiègent et de longues sécheresses, qui lui font oublier les délices passées, viennent resserrer son cœur, au point qu'on l'entendit murmurer dans une des ses prières :
“Voilà trois ans que j'erre dans les ténèbres, mes forces s'épuisent et le courage va m'abandonner, rappelez-moi à vous, ô mon Jésus, soutenez dans vos bras votre fille qui chancelle.”
Elle devait cependant rester encore de longues années sur la croix, ce ne fut qu'au soir de sa vie que quelques rayons de l'aube éternelle vinrent tempérer ses douloureuses ténèbres et que quelques gouttes de joie infinie tombèrent dans son calice pour en adoucir l'amertume.
Ce fut le 31 mai 1527 que son âme se détachant de son corps prit son essor vers le royaume du paradis.
Vierge, Clarisse, Bienheureuse
1458-1527
Camilla Varano, qui reçut plus tard en religion le nom de Battisa, naquit princesse ; son père, César, souverain de Camérino, fut généralissime des armées pontificales, sa mère Jean e Malatesta était fille des princes-souverains de Rimini.
Dès l'enfance sa vie offrit un singulier mélange de piété et de mondanité; elle priait, s'adonnait à des pratiques pénible de pénitence.
Mais en même temps, dit son biographe, dans le jardin de son âme, l'ivraie germait à côté du bon grain, et les mauvaises herbes menaçaient d'étouffer les fleurs.
Au sortir de l'église elle s'occupait de toilettes et d'amusement ; ses méditations sur la Passion du Sauveur étaient suivies de lectures frivoles, d'amusement mondains .
“Mais Dieu voulait l'avoir tout entière et l'instrument dont il se servit pour la retirer de la voie dangereuse où elle s'était engagée”, fut un enfant du Séraphin, le P. François d'Urbino, prédicateur célèbre dans toute l'Italie.
Un de ses sermons dessilla les yeux de la jeune fille ; elle comprit qu'elle ne pouvait faire mentir la parole du Christ, et qu'elle ne pouvait servir Dieu et le monde.
Elle se mit sous la direction du saint Religieux, qui l'avait devinée, et fit de rapides progrès dans la vertu.
Quelque temps après, agenouillée au pied de l’autel, elle consacrait à Dieu sa virginité.
Toutefois, ce n'était pas encore là l'holocauste que son Créateur demandait d'elle, et la grâce frappa si fort à son cœur, qui essayait de repousser son inspiration, qu'elle fut obligée de céder.
Celui qui est la fleur des champs et le lis des vallées lui apparut à plusieurs reprises et après l'avoir inondée d'un déluge de grâces, lui laissa dans son âme, dit la Bienheureuse elle-même, trois lis d'un parfum délicieux ; une haine du monde invincible, une humilité sincère, et un ardent désir de souffrance, elle embrassa alors la Règle si austère de saint Claire et ni les caresse, ni les menaces, ni les larmes, ni les violences mêmes de ses parents, ne purent ébranler son énergique résolution.
Le Jardinier céleste vint donc arracher du milieu du monde cette plante battue par l'orage et qui avait sous le vent de la tribulation jeté de profondes racines dans la vertu.
Mais la jeune héroïne n'était pas au bout de ses luttes ; des scènes déchirantes pour le cœur d'une enfant, vinrent au monastère comme au palais de son père, éprouvera sa constance de faire éclater sa générosité ; elle fut invincible.
Le second acte de son existence commence alors : la vie religieuse, elle se donne entière aux exercices de la mortification, de la patience t de l'humilité et elle vit dans une union intime avec les douleurs de l'Homme-Dieu.
Puis les maladies les plus diverses semblent se donner rendez-vous pour torturer son corps pendant que son âme est soumise à de pénibles épreuves ; les ténèbres s'épaississement auteur d'elle, de violentes tentations l'assiègent et de longues sécheresses, qui lui font oublier les délices passées, viennent resserrer son cœur, au point qu'on l'entendit murmurer dans une des ses prières :
“Voilà trois ans que j'erre dans les ténèbres, mes forces s'épuisent et le courage va m'abandonner, rappelez-moi à vous, ô mon Jésus, soutenez dans vos bras votre fille qui chancelle.”
Elle devait cependant rester encore de longues années sur la croix, ce ne fut qu'au soir de sa vie que quelques rayons de l'aube éternelle vinrent tempérer ses douloureuses ténèbres et que quelques gouttes de joie infinie tombèrent dans son calice pour en adoucir l'amertume.
Ce fut le 31 mai 1527 que son âme se détachant de son corps prit son essor vers le royaume du paradis.
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CANDIDE MARIE DE JÉSUS CIPITRIA Y BARRIOLA
religieuse, fondatrice, bienheureuse
(1845-1912)
Juana Josefa Cipitria y Barriola naît en 1845 à Andoain, dans la province de Guipuzcoa, au pays basque espagnol.
Encore enfant elle se sent appelée à n’appartenir qu’à Dieu seul.
Ayant fait elle-même l’expérience de l'amour de Dieu pour chacune de ses créature, elle y répond généreusement en se consacrant à Lui par la vie religieuse.
Elle reçoit le nom de Sœur Candida Maria de Jesus.
Toute dévouée à la cause du Royaume, elle fonde à 26 ans, le 8 décembre 1871, la Congrégation des "Filles de Jésus", dont le charisme est l'éducation chrétienne des enfants et de la jeunesse.
Sa spiritualité est fondée sur les Exercices de Saint Ignace, et avec l'aide d'un jésuite, le Père Miguel Herranz, elle rédige les Constitutions.
Elle tient à aller elle-même à Rome pour obtenir l'approbation pontificale qui lui est accordée par le Pape Léon XIII en 1902.
Son amour pour Dieu se manifeste par des attentions à l'égard de toutes et de tous: ses religieuses, les prêtres, les déshérités; bref, une charité universelle.
Elle meurt en 1912, à 67 ans.
Un jour, elle avait dit à une élève de son collège de Tolosa:
"Tu seras Fille de Jésus"; non seulement cette prophétie se réalisa, mais les deux, la Mère Fondatrice et la Sœur Maria Antonia sont béatifiées ensemble le 12 mai 1996 par Jean Paul II.
religieuse, fondatrice, bienheureuse
(1845-1912)
Juana Josefa Cipitria y Barriola naît en 1845 à Andoain, dans la province de Guipuzcoa, au pays basque espagnol.
Encore enfant elle se sent appelée à n’appartenir qu’à Dieu seul.
Ayant fait elle-même l’expérience de l'amour de Dieu pour chacune de ses créature, elle y répond généreusement en se consacrant à Lui par la vie religieuse.
Elle reçoit le nom de Sœur Candida Maria de Jesus.
Toute dévouée à la cause du Royaume, elle fonde à 26 ans, le 8 décembre 1871, la Congrégation des "Filles de Jésus", dont le charisme est l'éducation chrétienne des enfants et de la jeunesse.
Sa spiritualité est fondée sur les Exercices de Saint Ignace, et avec l'aide d'un jésuite, le Père Miguel Herranz, elle rédige les Constitutions.
Elle tient à aller elle-même à Rome pour obtenir l'approbation pontificale qui lui est accordée par le Pape Léon XIII en 1902.
Son amour pour Dieu se manifeste par des attentions à l'égard de toutes et de tous: ses religieuses, les prêtres, les déshérités; bref, une charité universelle.
Elle meurt en 1912, à 67 ans.
Un jour, elle avait dit à une élève de son collège de Tolosa:
"Tu seras Fille de Jésus"; non seulement cette prophétie se réalisa, mais les deux, la Mère Fondatrice et la Sœur Maria Antonia sont béatifiées ensemble le 12 mai 1996 par Jean Paul II.
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CANUT IV DU DANEMARK
roi et martyr, saint
(mort en 1086)
Saint Canut, roi de Danemark, alliait toutes les qualités de l'âme à celles du corps.
Élevé dans la religion chrétienne, encore peu répandue en ce pays, il l'embrassa de cœur et y conforma généreusement sa conduite, chose rare, parmi les jeunes seigneurs de son entourage.
Aux vertus du citoyen et du chrétien, il joignit les qualités qui font les grands rois.
Comprenant qu'il est du devoir d'un prince de défendre ses sujets, il aimait à s'exercer au métier des armes et devint bientôt maître dans l'art militaire.
A la bataille, il était le premier et ne reculait jamais ; placé, jeune encore, à la tête des armées danoises, chacun de ses combats fut une victoire.
Mais ce fut sur le trône qu'éclatèrent complètement ses qualités et ses vertus.
Canut comprenait que l'obéissance au Roi éternel est la seule et véritable grandeur; il estimait peu sa couronne passagère, en comparaison de celle que la pratique de l'Évangile lui mériterait dans le Ciel.
La frugalité de sa table, la simplicité de ses vêtements, faisaient un contraste frappant avec le luxe de sa cour.
Cependant il savait, à l'occasion, faire respecter sa dignité et imposer à tous par sa majesté et par la crainte de sa juste autorité.
En voici un exemple:
Un chef danois, pour faire face à ses folles dépenses, ne rougit pas d'exercer le criminel métier de pirate et de brigand ; un jour le roi de Danemark apprend que son vassal avait pillé un vaisseau norvégien et massacré l'équipage.
Il fait saisir le coupable, le convainc du crime par son propre aveu et le condamne à mort sans craindre la vengeance de sa puissante famille.
Ce roi juste était le plus loyal des hommes, et sa bonté d'âme égalait sa fermeté.
Austère et pieux, comme un moine, il jeûnait souvent, passait les nuits en oraison et n'avait qu'un soin, celui d'étendre la foi dans son royaume, comprenant bien qu'elle est la vraie source de tout progrès et de toute civilisation.
L'enfer suscitait dans l'ombre des ennemis à ce saint roi; pendant qu'il priait dans une église, il fut entouré par des assassins, et, plutôt que de fuir, il continua sa prière et se laissa poignarder à genoux sur les marches de l'autel.
Dieu vengea sa mort en affligeant le Danemark de plusieurs calamités, et des guérisons miraculeuses s'opérèrent à son tombeau.
roi et martyr, saint
(mort en 1086)
Saint Canut, roi de Danemark, alliait toutes les qualités de l'âme à celles du corps.
Élevé dans la religion chrétienne, encore peu répandue en ce pays, il l'embrassa de cœur et y conforma généreusement sa conduite, chose rare, parmi les jeunes seigneurs de son entourage.
Aux vertus du citoyen et du chrétien, il joignit les qualités qui font les grands rois.
Comprenant qu'il est du devoir d'un prince de défendre ses sujets, il aimait à s'exercer au métier des armes et devint bientôt maître dans l'art militaire.
A la bataille, il était le premier et ne reculait jamais ; placé, jeune encore, à la tête des armées danoises, chacun de ses combats fut une victoire.
Mais ce fut sur le trône qu'éclatèrent complètement ses qualités et ses vertus.
Canut comprenait que l'obéissance au Roi éternel est la seule et véritable grandeur; il estimait peu sa couronne passagère, en comparaison de celle que la pratique de l'Évangile lui mériterait dans le Ciel.
La frugalité de sa table, la simplicité de ses vêtements, faisaient un contraste frappant avec le luxe de sa cour.
Cependant il savait, à l'occasion, faire respecter sa dignité et imposer à tous par sa majesté et par la crainte de sa juste autorité.
En voici un exemple:
Un chef danois, pour faire face à ses folles dépenses, ne rougit pas d'exercer le criminel métier de pirate et de brigand ; un jour le roi de Danemark apprend que son vassal avait pillé un vaisseau norvégien et massacré l'équipage.
Il fait saisir le coupable, le convainc du crime par son propre aveu et le condamne à mort sans craindre la vengeance de sa puissante famille.
Ce roi juste était le plus loyal des hommes, et sa bonté d'âme égalait sa fermeté.
Austère et pieux, comme un moine, il jeûnait souvent, passait les nuits en oraison et n'avait qu'un soin, celui d'étendre la foi dans son royaume, comprenant bien qu'elle est la vraie source de tout progrès et de toute civilisation.
L'enfer suscitait dans l'ombre des ennemis à ce saint roi; pendant qu'il priait dans une église, il fut entouré par des assassins, et, plutôt que de fuir, il continua sa prière et se laissa poignarder à genoux sur les marches de l'autel.
Dieu vengea sa mort en affligeant le Danemark de plusieurs calamités, et des guérisons miraculeuses s'opérèrent à son tombeau.
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
SAINTE
CATHERINE DE GÊNES
veuve, religieuse et auteur mystique
(1447-1510)
CATHERINE DE GÊNES
veuve, religieuse et auteur mystique
(1447-1510)
EXTRAIT BIOGRAPHIQUE
Catherine Fieschi, fille d'un vice-roi de Naples, naquit à Gênes.
Sa famille, féconde en grands hommes, avait donné à l'Église deux Papes, neuf cardinaux et deux archevêques.
Dès l'âge de huit ans, conduite par l'Esprit de Dieu, elle se mit à pratiquer de rudes mortifications; elle dormait sur une paillasse, avec un morceau de bois pour oreiller; mais elle avait soin de cacher ses pénitences.
Elle pleurait toutes les fois qu'elle levait les yeux sur une image de Marie tenant Jésus mort dans Ses bras.
Malgré son vif désir du cloître, elle se vit obligée d'entrer dans l'état du mariage, où Dieu allait la préparer par de terribles épreuves à une vie d'une incroyable sainteté.
Après cinq ans d'abandon, de mépris et de froideur de la part de son mari, après cinq ans de peines intérieures sans consolation, elle fut tout à coup éclairée de manière définitive sur la vanité du monde et sur les joies ineffables de l'amour divin: "Plus de monde, plus de péché," s'écria-t-elle.
Jésus lui apparut alors chargé de Sa Croix, et couvert de sang de la tête aux pieds:
"Vois, Ma fille, lui dit-Il, tout ce sang a été répandu au Calvaire pour l'amour de toi, en expiation de tes fautes!
" La vue de cet excès d'amour alluma en Catherine une haine profonde contre elle-même:
"Ô amour! Je ne pécherai plus," s'écria-t-elle.
Trois jours après, elle fit sa confession générale avec larmes, et désormais elle communia tous les jours.
L'Eucharistie devint la nourriture de son corps et de son âme, et pendant vingt-trois ans il lui fut impossible de prendre autre chose que la Sainte Communion; elle buvait seulement chaque jour un verre d'eau mêlée de vinaigre et de sel, pour modérer le feu qui la dévorait, et, malgré cette abstinence, elle jouissait d'une forte santé.
À l'abstinence continuelle se joignaient de grandes mortifications; jamais de paroles inutiles, peu de sommeil; tous les jours six à sept heures de prière à genoux; jamais Catherine ne se départit de ces règles; elle était surtout si détachée d'elle-même, qu'elle en vint à n'avoir plus de désir et à se trouver dans une parfaite indifférence pour ce qui n'était pas Dieu.
Ses trois maximes principales étaient de ne jamais dire:
Je veux, je ne veux pas, mien, tien: – de ne jamais s'excuser, – de se diriger en tout par ces mots:
Que la Volonté de Dieu soit faite!
Elle eut la consolation de voir son époux revenir à Dieu, dans les derniers jours de sa vie, et de l'assister à sa mort.
A partir de ce moment, Catherine se donna tout entière au soin des malades, et y pratiqua les actes les plus héroïques.
Catherine Fieschi, fille d'un vice-roi de Naples, naquit à Gênes.
Sa famille, féconde en grands hommes, avait donné à l'Église deux Papes, neuf cardinaux et deux archevêques.
Dès l'âge de huit ans, conduite par l'Esprit de Dieu, elle se mit à pratiquer de rudes mortifications; elle dormait sur une paillasse, avec un morceau de bois pour oreiller; mais elle avait soin de cacher ses pénitences.
Elle pleurait toutes les fois qu'elle levait les yeux sur une image de Marie tenant Jésus mort dans Ses bras.
Malgré son vif désir du cloître, elle se vit obligée d'entrer dans l'état du mariage, où Dieu allait la préparer par de terribles épreuves à une vie d'une incroyable sainteté.
Après cinq ans d'abandon, de mépris et de froideur de la part de son mari, après cinq ans de peines intérieures sans consolation, elle fut tout à coup éclairée de manière définitive sur la vanité du monde et sur les joies ineffables de l'amour divin: "Plus de monde, plus de péché," s'écria-t-elle.
Jésus lui apparut alors chargé de Sa Croix, et couvert de sang de la tête aux pieds:
"Vois, Ma fille, lui dit-Il, tout ce sang a été répandu au Calvaire pour l'amour de toi, en expiation de tes fautes!
" La vue de cet excès d'amour alluma en Catherine une haine profonde contre elle-même:
"Ô amour! Je ne pécherai plus," s'écria-t-elle.
Trois jours après, elle fit sa confession générale avec larmes, et désormais elle communia tous les jours.
L'Eucharistie devint la nourriture de son corps et de son âme, et pendant vingt-trois ans il lui fut impossible de prendre autre chose que la Sainte Communion; elle buvait seulement chaque jour un verre d'eau mêlée de vinaigre et de sel, pour modérer le feu qui la dévorait, et, malgré cette abstinence, elle jouissait d'une forte santé.
À l'abstinence continuelle se joignaient de grandes mortifications; jamais de paroles inutiles, peu de sommeil; tous les jours six à sept heures de prière à genoux; jamais Catherine ne se départit de ces règles; elle était surtout si détachée d'elle-même, qu'elle en vint à n'avoir plus de désir et à se trouver dans une parfaite indifférence pour ce qui n'était pas Dieu.
Ses trois maximes principales étaient de ne jamais dire:
Je veux, je ne veux pas, mien, tien: – de ne jamais s'excuser, – de se diriger en tout par ces mots:
Que la Volonté de Dieu soit faite!
Elle eut la consolation de voir son époux revenir à Dieu, dans les derniers jours de sa vie, et de l'assister à sa mort.
A partir de ce moment, Catherine se donna tout entière au soin des malades, et y pratiqua les actes les plus héroïques.
A suivre...
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
TRAITÉ DU PURGATOIRE
Comment, par comparaison avec le feu divin qu'elle ressentait au-dedans d'elle-même, elle comprenait ce qu'était le purgatoire et comment les âmes s'y trouvent contentes et souffrantes
Cette sainte âme encore dans sa chair se trouva établie dans le purgatoire du brûlant amour de Dieu.
Il la brûlait toute et la purifiait de ce qu'elle avait à purifier, de façon qu'au sortir de cette vie elle pût être présentée au regard de Dieu son doux amour.
Par le moyen de ce brûlant amour, elle comprenait en elle-même dans quel état se trouvent au purgatoire les âmes des fidèles pour purifier toute espèce de rouille et de tache du péché non encore effacée durant cette vie.
Elle-même, établie au purgatoire du feu divin d'amour, se tenait unie à son divin amour, satisfaite de tout ce qu'il opérait en elle ; comprenant qu'il en était ainsi des âmes qui sont au purgatoire, elle disait :
1. Parfaite conformité des âmes du purgatoire à la volonté de Dieu
Les âmes qui sont au purgatoire, à ce que je crois comprendre, ne peuvent avoir d'autre choix que d'être en ce lieu puisque telle est la volonté de Dieu qui dans sa justice l'a ainsi décidé.
Elles ne peuvent pas davantage se retourner sur elles-mêmes. Elles ne peuvent dire : j'ai fait tels péchés et c'est à cause d'eux que je mérite de me trouver ici.
Il ne leur est pas possible de dire : je voudrais ne pas avoir fait tels péchés, parce qu'ainsi j'irais tout de suite en paradis. Pas davantage : celui-ci sortira d'ici avant moi.
Ni dire : “j'en sortirai avant lui”.
Elles sont incapables d'avoir ni d'elles-mêmes ni des autres aucun souvenir, ni en bien ni en mal, qui puisse augmenter leur souffrance.
Elles ont, au contraire, un tel contentement d'être établies dans la condition voulue par Dieu et que Dieu accomplisse en elles tout ce qu'il veut, comme il le veut, qu'elles ne peuvent penser à elles-mêmes ni en ressentir quelque accroissement de peine.
Elles ne voient qu'une chose, la bonté divine qui travaille en elles, cette miséricorde qui s'exerce sur l'homme pour le ramener à Dieu.
En conséquence, ni bien ni mal qui leur arrive à elles-mêmes ne peut attirer leur regard.
Si ces âmes pouvaient en prendre conscience, elles ne seraient plus dans la pure charité.
Elles ne peuvent non plus considérer qu'elles sont dans ces peines à cause de leurs péchés, cette idée, n'entre pas dans leur esprit.
Ce serait en effet, une imperfection en acte, chose qui ne peut exister en ce lieu où il est impossible de commettre un péché. Pourquoi elles sont en purgatoire, cette cause qui est en elles, il ne leur est donné de la voir qu'une seule fois, au moment qu'elles sortent de cette vie, et dans la suite ne la voient plus jamais.
Autrement, ce regard serait un retour sur soi.
Étant donc établies en charité et n'en pouvant plus dévier par un acte défectueux, elles sont rendues incapables de rien vouloir de rien désirer hormis le pur vouloir de la pure charité. Placées dans ce feu purifiant, elles y sont dans l'ordre voulu par Dieu.
Cette disposition divine est pur amour ; elles ne peuvent s'en écarter en rien, parce qu'elles sont incapables de commettre un péché, comme aussi de faire un acte méritoire.
2. Joie des âmes du purgatoire ; leur croissante vision de Dieu, la raison de la rouille
Je ne crois pas qu'il puisse se trouver un contentement comparable à celui d'une âme du purgatoire, à l'exception de celui des saints en paradis. Chaque jour s'accroît ce contentement par l'action de Dieu en ces âmes, action qui va croissant comme va se consumant ce qui empêche cette action divine. Cet empêchement, c'est la rouille du péché.
[La rouille n'est pas un reste de péché, une disposition mauvaise de la volonté qui serait l'effet en l'âme des péchés qu'elle a commis durant sa vie terrestre ; c'est une souillure de l'âme, un manque de perfection, suite des péchés d'autrefois, dont la volonté s'est totalement détachée au moment de la mort.]
Le feu consume progressivement cette rouille et ainsi l'âme se découvre de plus en plus à l'influx divin.
De même un objet qu'on aurait recouvert ne peut correspondre à l'éclat du soleil, non point parce que le soleil serait insuffisant, lui qui continue de briller, mais par l'empêchement de ce qui recouvre l'objet.
Que vienne à se consumer l'obstacle qui fait écran, l'objet se découvrira à l'action du soleil ; il la subira de plus en plus à mesure que l'obstacle diminuera.
Ainsi la rouille du péché est ce qui recouvre l'âme.
Au purgatoire cette rouille est consumée par le feu. Plus elle se consume, plus aussi l'âme s'expose au vrai soleil, à Dieu.
Sa joie augmente à mesure que la rouille disparaît et que l'âme s'expose au rayon divin. Ainsi l'une croît et l'autre diminue jusqu'à ce que le temps soit accompli.
Ce n'est pas la souffrance qui diminue, c'est uniquement le temps de rester dans cette peine.
Quant à la volonté, ces âmes ne peuvent jamais dire que ces peines soient des peines, tant elles sont satisfaites des dispositions divines auxquelles leur volonté est unie par pure charité.
3. Souffrance des âmes du purgatoire, la séparation d'avec Dieu est leur plus grande peine
D'autre part, la peine qu'elles subissent est si extrême qu'il n'est aucune langue qui puisse l'exprimer ni aucune intelligence qui puisse en saisir la moindre étincelle si Dieu ne la lui découvre par une grâce toute spéciale.
Cette étincelle, Dieu fit à cette âme la grâce de la lui faire voir, mais je ne puis l'exprimer par la langue.
Cette connaissance que Dieu m'a fait voir n'est jamais sortie de mon esprit. J'en dirai ce que je pourrai et ceux-là comprendront à qui le Seigneur daignera ouvrir l'entendement.
La source de toutes les souffrances est le péché, soit originel, soit actuel. Dieu a créé l'âme toute pure et toute simple, sans aucune tache de péché et avec un instinct béatifique qui la porte vers lui.
De cet instinct, le péché originel en quoi elle se trouve, la détourne. Le péché actuel, quand il s'y ajoute, l'en détourne plus encore. Plus elle s'en éloigne, plus elle devient mauvaise, puisque Dieu de moins en moins s'accorde avec elle.
Tout ce qu'il peut y avoir de bon dans les créatures n'existe que par la communication que Dieu en fait. Aux créatures non raisonnables, Dieu en fait part selon ses desseins et il ne leur fait jamais défaut.
A la créature raisonnable, à l'âme, il correspond plus ou moins dans la mesure où il la trouve purifiée de l'empêchement du péché.
Existe-t-il une âme qui revienne à la première pureté de sa création, l'instinct du bonheur se découvre en elle et s'accroît aussitôt avec une telle véhémence, une telle ardeur de charité l'entraînant vers sa fin dernière, que c'est pour elle chose insupportable d'en être écartée. Plus elle en a la conscience, plus extrême est son tourment.
4. Différence entre les damnés et les âmes du purgatoire
Les âmes qui sont au purgatoire se trouvent sans la coulpe du péché.
En conséquence, il n'y a pas d'obstacle entre Dieu et elles, hors cette peine qui les retarde et qui consiste en ce que leur instinct béatifique n'a pas atteint sa pleine perfection.
Voyant en toute certitude combien importe le moindre empêchement, voyant que la justice exige que leur attrait soit retardé, il leur naît au cœur un feu d'une violence extrême, qui ressemble à celui de l'enfer.
Il y a la différence du péché qui rend mauvaise la volonté des damnés de l'enfer ; à ceux- ci Dieu ne fait point part de sa bonté. Ils demeurent dans cette malice désespérée, opposée à la volonté de Dieu.
On voit par là que cette opposition de la volonté mauvaise à la volonté de Dieu est cela même qui constitue le péché. Comme leur volonté s'obstine dans le mal, le péché aussi se maintient.
Ceux de l'enfer sont sortis de cette vie avec leur volonté mauvaise. Aussi leur péché n'est pas remis et ne peut l'être, parce qu'ils ne peuvent plus changer de volonté, une fois qu'ils sont sortis ainsi disposés de cette vie.
En ce passage l'âme s'établit définitivement dans le bien ou dans le mal, selon qu'elle s'y trouve par sa volonté délibérée, conformément à ce qui est écrit :
« Là où je te trouverai, c'est-à-dire au moment de la mort, avec cette volonté ou du péché ou de rejet et de regret du péché, là je te jugerai » [1].
Ce jugement est sans rémission puisque après la mort la liberté du libre vouloir n'est plus sujette au changement. Elle reste fixée dans la disposition où elle se trouvait au moment de la mort.
Ceux de l'enfer, pour s'être trouvés à ce moment avec la volonté de pécher, portent sur eux la coulpe et la peine. La coulpe est infinie ; la peine n'est pas aussi grave qu'ils l'ont méritée, mais ils la porteront sans fin.
Au contraire, ceux du purgatoire ont seulement la peine, puisque le péché fut effacé au moment de la mort, car ils étaient contrits de leurs fautes et se repentaient d'avoir offensé la bonté de Dieu.
Aussi leur peine aura sa fin, elle va diminuant sans cesse dans le temps, comme il a été dit.
O misère au-delà de toute misère et d'autant plus lamentable que les hommes aveugles n'y pensent pas !
5. Dieu montre sa bonté même envers les damnés
Ce châtiment des damnés n'est pas infini en quantité. La raison en est que la douce bonté divine étend le rayon de sa miséricorde jusqu'en enfer.
En effet, l'homme décédé en état de péché mortel mérite un châtiment infini et pour un temps infini.
Mais la miséricorde de Dieu a disposé que seul le temps serait sans fin, et les peines limitées en quantité. En toute justice il aurait pu leur infliger une peine plus grande qu'il ne fait.
Oh ! quel est le danger du péché commis par mauvais vouloir !
C'est à grand-peine que l'homme s'en repent, et tant qu'il n'en a pas de repentir, le péché demeure et ce péché continue aussi longtemps que l'homme reste dans la volonté du péché qu'il a commis ou dans celle de le commettre.
6. Purifiées du péché, c'est avec joie que les âmes du purgatoire s'acquittent de leurs peines
Mais les âmes du purgatoire tiennent leur volonté en tout conforme à celle de Dieu.
En conséquence, Dieu s'accorde avec elles dans sa bonté et elles demeurent contentes (quant à leur volonté) et purifiées de la coulpe du péché actuel.
Ces âmes sont rendues aussi pures que Dieu les a créées. Quand elles sortent de cette vie contrites de tous les péchés qu'elles ont commis, les ayant confessés et animées de la volonté de ne plus les commettre, Dieu les absout aussitôt de leur coulpe et il ne reste plus en elles que la rouille du péché.
Elles s'en purifient ensuite dans le feu par la souffrance.
Ainsi purifiées de toute coulpe et unies à Dieu par leur volonté, elles voient Dieu clairement, selon le degré de connaissance qu'il leur accorde, elles voient aussi de quelle valeur il est de jouir de Dieu et que les âmes sont créées précisément pour cela.
7. De quel violent amour les âmes du purgatoire aspirent à jouir de Dieu. Exemple du pain et de l'affamé
Elles éprouvent de plus en plus une conformité si unifiante à leur Dieu, cette conformité les tire vers lui avec une si grande force par l'instinct de nature qui existe entre Dieu et l'âme qu'on ne peut donner aucun raisonnement, aucune comparaison, aucun exemple qui puisse expliquer assez cette chose au degré où l'âme la ressent dans son opération en elle et par son expérience intime. J'en donnerai cependant un exemple qui se présente à mon esprit.
Supposons qu'il n'y eût dans le monde entier qu'un seul pain pour enlever la faim à toute créature ; supposons de plus que rien qu'à voir ce pain les hommes en seraient rassasiés.
Étant donné que l'homme, à moins d'être malade, a l'instinct naturel de manger, s'il vient à ne plus manger, tout en étant préservé de maladie et de mort, sa faim grandirait continuellement puisque son instinct de manger ne diminuerait jamais.
Il sait que ce pain est seul capable de le rassasier; s'il ne peut l'avoir sa faim ne s'en ira pas, il restera dans un tourment intolérable. Plus il s'en approche sans arriver cependant à le voir, plus aussi s'allume le désir naturel que son instinct ramasse tout entier sur le pain en quoi se trouve tout contentement.
S'il savait avec certitude que jamais il ne lui sera donné de voir ce pain, à ce moment l'enfer s'accomplirait pour lui ; il serait dans l'état des âmes damnées qui sont privées de toute espérance d'arriver jamais à voir le pain qui est Dieu leur vrai Sauveur.
Mais les âmes du purgatoire ont l'espérance de contempler le pain et de s'en rassasier pleinement. Par suite, elles souffrent la faim et restent dans leur tourment aussi longtemps qu'elles sont retenues de se rassasier de ce pain, Jésus-Christ, vrai Dieu Sauveur, notre Amour.
8. L'enfer et le purgatoire font connaître l'admirable sagesse de Dieu
De même que l'esprit net et purifié ne se connaît aucun lieu de repos sinon Dieu même puisqu'il a été créé à cette fin, de même l'âme pécheresse n'a de place nulle part sinon en enfer puisque Dieu le lui a destiné pour sa fin.
C'est pourquoi au moment même où l'esprit est séparé du corps, l'âme se rend au lieu qui lui est destiné, sans autre guide que la nature même de son péché, au cas où l'âme se détache du corps en état de péché mortel.
Si l'âme ne trouvait pas à ce moment même cette destination qui procède de la justice divine, elle serait dans un enfer pire que l'enfer même.
La raison en est que l'âme se trouverait hors de cette disposition divine qui n'est pas sans une part de miséricorde, puisque la peine infligée n' est pas aussi grande qu'elle le mérite.
Aussi l'âme, ne trouvant aucun lieu qui lui convienne davantage, ni lui soit moins douloureux, Dieu l'ayant disposé ainsi, elle se jette d'elle-même en enfer puisque c'est sa place.
Il en est de même du purgatoire dont nous parlons. Séparée du corps, l'âme qui ne se trouve pas dans cette netteté dans laquelle Dieu l'a créée, voyant en elle l'obstacle qui la retient et sachant qu'il ne peut être enlevé que par le moyen du purgatoire, elle s'y jette aussitôt et de grand cœur.
Si elle ne découvrait ce moyen disposé par Dieu pour la débarrasser de cet empêchement, à l'instant se formerait en elle un enfer pire que le purgatoire, parce qu'elle se verrait empêchée d'atteindre sa fin qui est Dieu.
Cela est pour elle d'une telle importance qu'en comparaison le purgatoire est comme rien, quoique, comme il a été dit, le purgatoire est semblable à l'enfer. Mais c'est en comparaison qu'il est comme rien.
9. Nécessité du purgatoire
J'ajoute encore ceci que je vois. De la part de Dieu, le paradis est ouvert, y entre qui veut. C'est que Dieu est toute miséricorde, il reste tourné vers nous, les bras ouverts pour nous recevoir dans sa gloire.
Mais je vois d'autre part comment cette divine essence est d'une telle pureté et netteté, au-delà de tout ce qu'on pourrait imaginer, que l'âme qui aurait en soi une imperfection aussi légère qu'un fétu minuscule, se jetterait en mille enfers plutôt que de se trouver avec cette tache en présence de la majesté divine.
Aussi, voyant que le purgatoire a été fait pour lui enlever ces taches, elle s'y jette. Elle voit que c'est là une grande miséricorde pour elle que ce moyen d'enlever cet empêchement.
10. Comme le purgatoire est chose terrible
De quelle gravité est le purgatoire, ni la langue ne le peut expliquer, ni l'esprit le saisir.
Je ne vois que ceci: que les tourments y égalent ceux de l'enfer. Néanmoins, je vois que l'âme qui découvre la moindre tache d'imperfection le reçoit, selon ce qui a été dit, comme un bienfait qui lui est accordé.
Dans un certain sens, elle le tient pour rien en comparaison de cette tache qui arrête son amour.
Je vois aussi que le tourment des âmes du purgatoire consiste bien davantage en ceci qu'elles voient en elles quelque chose qui déplaît à Dieu et qu'elles l'ont contracté volontairement en agissant contre une si grande bonté, plutôt que dans nul autre tourment qu'elles ressentent en purgatoire.
C'est qu'étant dans la grâce divine elles voient la réalité et l'importance de cet empêchement qui ne leur permet pas d'approcher de Dieu.
Tout ce qu'on vient de dire, qu'est-ce en comparaison des évidences qui me sont données dans mon esprit (pour autant que j'en ai pu concevoir dans cette vie) ?
Devant de telles extrémités, toute vue, toute parole, tout sentiment, toute imagination, toute justice, toute vérité, tout cela n'est pour moi que tromperies et choses de néant
Je reste confuse, faute de pouvoir trouver des expressions plus fortes.
11. L'amour de Dieu qui attire les âmes saintes et l'empêchement qu'elles trouvent dans le péché sont les causes des tourments du purgatoire
Je vois entre Dieu et l'âme une incroyable conformité. Lorsqu'il la voit dans cette pureté où sa majesté l'a créée, il lui donne une certaine force d'attraction faite d'amour brûlant, capable de la réduire au néant, tout immortelle qu'elle soit.
Il la met dans un état de si parfaite transformation en lui son Dieu, qu'elle se voit n'être plus autre chose que Dieu.
Il la tire continuellement à lui, il l'embrasse, il ne la laisse pas jusqu'à ce qu'il l'ait menée à cet être divin dont elle procède, c'est-à-dire à cette pureté dans laquelle il l'a créée.
L'âme se voit, par une vue intérieure, ainsi tirée par Dieu avec un tel feu d'amour. Alors, sous l'ardeur de cet amour embrasé de son doux Seigneur et Dieu qu'elle sent rejaillir en son esprit, elle se liquéfie tout entière.
A la lumière divine, elle voit comment Dieu ne cesse pas un instant de la tirer vers lui pour la conduire à son entière perfection.
Il y met un soin extrême, une continuelle sollicitude ; en tout cela Dieu n'agit que par un pur amour. Mais elle-même, par cet obstacle de péché qui subsiste en elle, se trouve empêchée de se livrer à ce divin attrait, c'est-à-dire à ce regard unitif que Dieu lui a donné pour qu'elle soit tirée à lui.
Elle voit aussi combien lui est douloureux ce retardement qui la retient de contempler la divine lumière. S'y ajoute l'instinct de l'âme impatiente d'être libérée de cet empêchement, attirée qu'elle est par ce regard unitif.
Je dis que tout cela et la vue qu'en ont les âmes, est ce qui engendre en elle la peine du purgatoire.
De cette peine, si grande qu'elle soit cependant elle ne tiennent pas compte. Elles s'occupent bien davantage de l'opposition qu'elles ont à la volonté de Dieu.
Elles le voient brûler pour elles d'un extrême et pur amour. Cet amour, avec son regard unitif, les tire à soi avec une puissance extrême et sans arrêt, comme s'il n'avait autre chose à faire.
C'est au point que si l'âme pouvait découvrir un autre purgatoire plus fort que celui où elle se trouve, elle s'y jetterait aussitôt pour se débarrasser plus vite de cet empêchement. Tant est violent l'amour de conformité entre Dieu et l'âme.
12. Comment Dieu purifie les âmes Exemple de l'or dans le creuset
De ce divin Amour, je vois jaillir vers l'âme certains rayons et flammes brûlantes, si pénétrants et si forts qu'ils sembleraient capables de réduire au néant non seulement le corps, mais l'âme elle- même s'il était possible.
Ces rayons opèrent de deux manières : l'une est de purifier, l'autre d'anéantir.
Vois l'or. A mesure que tu le fonds, à mesure il s'améliore. Tu pourrais le fondre au point de détruire en lui toute imperfection.
Tel est l'effet du feu dans les choses matérielles. Il y a cette différence que l'âme ne peut s'anéantir en Dieu, mais uniquement dans son être propre. Plus tu la purifies, plus aussi elle s'anéantit en elle-même et pour finir elle est toute purifiée en Dieu.
L'or, quand il est purifié à vingt-quatre carats ne se consume plus, quel que soit le feu par où tu le ferais passer. Ce qui peut être consumé en lui, ce n'est que sa propre imperfection.
Ainsi opère dans l'âme le feu divin. Dieu la maintient dans le feu jusqu'à ce que toute imperfection soit consumée. Il la conduit à la pureté totale de vingt-quatre carats, chaque âme cependant selon son degré. Quand elle est purifiée elle reste tout entière en Dieu, sans rien en elle qui lui soit propre, et son être est Dieu.
Une fois que Dieu a ramené à lui l'âme ainsi purifiée, alors celle-ci est mise hors d'état de souffrir encore, puisqu'il ne lui reste plus rien à consumer. Supposé que dans cet état de pureté on la tienne dans le feu, elle n'en sentirait nulle souffrance. Ce feu ne serait autre chose que celui du divin amour de la vie éternelle, sans rien de pénible.
13. Les âmes ont un désir ardent de se transformer en Dieu. Sagesse de Dieu qui leur tient cachées leurs imperfections
L'âme a été créée munie de toutes les bonnes dispositions dont elle est capable, pour la mettre à même d'atteindre sa perfection, à condition qu'elle vive comme Dieu l'ordonne sans se souiller d'aucune tache de péché.
Mais elle s'est contaminée par le péché originel qui lui fait perdre ses dons de grâce.
Elle est morte, elle ne peut ressusciter sinon par Dieu. Quand elle renaît par le baptême, il lui reste l'inclination au mal ; cette inclination la conduit, si elle n' y résiste pas, au péché actuel, par quoi elle meurt de nouveau.
Une nouvelle fois, Dieu lui rend la vie. C'est une grâce toute particulière qu'il lui fait, car elle est salie et tournée vers elle-même. Pour la ramener à son premier état telle que Dieu l'a créée, elle a besoin de ces opérations divines, faute desquelles il lui serait à jamais impossible de se tourner de nouveau vers Dieu.
Quand l'âme se met en route pour retourner à son premier état, si grande est l'ardeur qui la presse de se transformer en Dieu que c'est là son purgatoire. Elle ne regarde pas ce purgatoire comme un purgatoire, mais cet instinct brûlant et entravé constitue son purgatoire.
Ce dernier acte d'amour accomplit son oeuvre, sans que l'homme y ait part.
Il y a dans l'âme tant d'imperfections cachées qu'elle désespérerait s'il lui était donné de les voir. Ce dernier état les consume toutes.
Après qu'elles sont consumées, Dieu les découvre à l'âme pour qu'elle reconnaisse l’œuvre divine accomplie en elle par le feu d'amour. C'est lui qui a consumé en elle toutes ces imperfection qui doivent l'être.
14. Joie et douleur de l'âme du purgatoire
Sache ceci : la perfection que l'homme croit constater en lui n'est pour Dieu que défaut.
En effet, tout ce que l'homme accomplit sous couleur de perfection, toute connaissance, tout sentiment, tout vouloir tout souvenir, dès qu'il ne le fait pas remonter à Dieu, tout cela l'infecte et le souille.
Pour que ces actes soient parfaits, il est nécessaire qu'il soient faits en nous sans nous, sans que nous en soyons le premier agent, et que l'opération de Dieu soit faite en Dieu sans que l'homme en soit la cause principale.
Ces actes seuls sont parfaits, que Dieu accomplit et achève dans son amour pur et net, sans mérite de notre part.
Ils pénètrent l'âme si profondément et l'embrasent à tel point que le corps où elle se trouve se sent brûler comme s'il était dans un grand brasier qui ne s'éteindra pas avant la mort.
Il est vrai, comme je le vois, que l'amour qui procède de Dieu et rejaillit dans l'âme cause en elle un contentement inexprimable ; mais ce contentement n'enlève pas une étincelle de leur peine aux âmes du purgatoire.
Donc, cet amour qui se trouve entravé, c'est lui qui constitue leur souffrance. Cette souffrance est d'autant plus grande que plus grande est la capacité d'amour et de perfection que Dieu a donné à chacune.
Ainsi les âmes du purgatoire ont tout ensemble une joie extrême et une extrême souffrance sans que l'une soit un obstacle pour l'autre.
15. Les âmes du purgatoire sont hors d'état de pouvoir mériter encore. Comment leur volonté est disposée à l'égard des bonnes oeuvres offertes ici-bas en suffrage pour elles
S'il était donné aux âmes du purgatoire de se purifier par la contrition, en un instant elles acquitteraient leur dette entière, tant serait brûlante l'impétuosité de leur contrition.
Car elles voient clairement la gravité de cet empêchement qui les retient de s'unir à Dieu, leur fin et leur amour.
Tiens pour certain que dans ce paiement, elles ne sont quittes d'un seul denier, la justice de Dieu l'ayant ainsi déterminé. Ceci vaut du côté de Dieu.
Du côté de l'âme, elles n'ont plus aucun choix personnel, aucun regard sur elles-mêmes, sans vouloir considérer autre chose que la volonté de Dieu ; elles sont ainsi établies.
Si quelqu'un en ce monde fait une aumône à leur intention et qu'ainsi la durée de leur peine soit diminuée, elles ne peuvent se retourner pour en prendre connaissance et s'y attacher.
Elles abandonnent tout à l'exacte balance de la volonté divine, elles laissent Dieu tout régler à lui seul, qu'il se paie comme il plaît à sa bonté infinie.
S'il leur arrivait de penser à ces aumônes en dehors de la volonté divine, ce serait un retour sur elles-mêmes, elles perdraient de ce fait la vue de ce divin vouloir et cela serait pour elles un enfer.
C'est pourquoi ces âmes restent attachées à tout ce que Dieu accomplit en elles, que ce soit plaisir et contentement ou que ce soit souffrance.
Elles ne peuvent plus se retourner sur elles-mêmes, transformées qu'elles sont totalement dans la volonté de Dieu et contentes de ce qu'il décide dans son infinie sainteté.
16. Ces âmes veulent être pleinement purifiées
Si une âme était présentée aux regards divins ayant encore quelque chose à purger, ce serait lui faire une grande injure, ce serait pour elle un tourment pire que dix purgatoires.
La raison en est que ce serait pour la pure bonté et la souveraine justice de Dieu une chose intolérable.
De son côté, l'âme verrait qu'elle n'a pas encore pleinement satisfait à Dieu. Ne manquerait-il qu'un clin d’œil de purification, ce serait pour elle aussi chose intolérable.
Pour enlever ce rien de rouille, elle irait dans mille enfers (supposé qu'il lui fût accordé de choisir) plutôt que de se trouver face à la présence divine sans être totalement purifiée.
17. Exhortations et reproches aux vivants
Éclairée sur toutes ces choses à la lumière divine, cette âme bénie disait :
Il me vient une envie de crier avec une telle force que sur la Terre tous les hommes en seraient épouvantés.
Je leur dirais : malheureux, pourquoi vous laissez-vous aveugler à ce point par le monde ?
A cette nécessité si pressante où vous vous trouverez au moment de la mort, vous n'avez aucun souci de vous préparer !
Vous vous abritez tous sous l'espérance de la miséricorde divine. Elle est si grande, dites-vous. Mais vous ne voyez pas que cette bonté de Dieu tournera à votre condamnation puisque c'est contre la volonté d'un si bon maître que vous aurez agi.
[= “je n'ai pas à m'en faire car Dieu est bon, il est miséricordieux, il me pardonnera tous mes péchés avant que je le lui demande” se transformera en : “comment ai-je pu tant haïr, tant commettre de péchés contre ce Jésus si incroyablement bon et doux, je suis épouvantablement coupable, je ne mérite aucun pardon, je préfère fuir la présence de cet agneau innocent que j'ai moi-même torturé et crucifié à mort par mes péchés”, c'est maintenant qu'il faut lui dire : “je te (vous) demande pardon pour le mal que je (vous) t'ai fait, j'ai confiance en ta miséricorde, viens à mon secours, donne-moi la force de commencer une vie nouvelle dans ta grâce”, ce n'est que par pur miracle que certains arrivent à changer de volonté et à vouloir, aux abords de la mort, fuir les péchés qu'ils chérissaient pendant leur vie. Les miracles existent mais ils ne sont pas la règle générale, ils sont l'exception.]
Sa bonté devrait au contraire vous forcer à faire sa volonté tout entière et non pas vous porter à la présomption de faire le mal.
Sa justice ne peut être frustrée, il faut de toute façon qu'elle soit pleinement satisfaite.
Ne t'encourage pas en te disant : je me confesserai, j'aurai ensuite l'indulgence plénière, je serai d'un seul coup purgé de tous mes péchés, et ainsi je serai sauvé.
Prends garde que la confession et la contrition, requises pour l'indulgence plénière, sont bien difficiles à réaliser. Si tu en avais conscience, tu tremblerais de terreur ; tu serais plus assuré de ne l'avoir pas que de l'avoir.
18. Au purgatoire, les âmes souffrent volontiers et dans la joie
Au purgatoire, je vois les âmes souffrir avec la vue de deux opérations.
La première, c'est qu'elles souffrent de très bon cœur leurs peines. Elles se rendent compte que Dieu leur fait grande miséricorde, considérant le châtiment qu'elles ont mérité, sachant aussi à quel point il leur est nécessaire.
Si la bonté divine n'avait tempéré sa justice par sa miséricorde (payant pour elles par le précieux sang de Jésus-Christ), un seul péché mériterait mille enfers éternels.
Aussi subissent-elles de si grand cœur leurs peines qu'elles ne voudraient en retirer un seul carat. Elles savent que ces peines elles les ont méritées en toute justice et qu'elles sont parfaitement réglées. Par suite, elles ne se plaignent pas plus de Dieu (quant à la volonté) que si elles étaient dans la vie éternelle.
L'autre opération est un contentement qu'elles éprouvent à voir comment Dieu agit envers elles, avec quel amour et quelle miséricorde.
Ces deux vues, Dieu les imprime en elles instantanément. Puisqu'elles sont en état de grâce, elles saisissent et comprennent à la mesure de leur capacité. Elles en éprouvent une immense joie, qui ne leur manquera plus ; au contraire, elle ira toujours croissant au fur et à mesure qu'elles s'approchent davantage de Dieu.
Ces âmes ne voient point cela en elles-mêmes ni par elles-mêmes ni comme quelque chose qui serait à elles, mais seulement en Dieu.
Elles s'occupent intensément de lui beaucoup plus que de leurs peines, elles tiennent celles-ci pour rien en comparaison de lui.
La moindre vues qu'on puisse avoir de Dieu surpasse toute peine et toute joie que l'homme puisse avoir mais sans leur enlever une étincelle ni de joie ni de peine.
19. La sainte conclut son exposé sur les âmes du purgatoire en leur attribuant ce qu'elle ressent dans son âme
Cette forme de purification que je vois appliquée aux âmes du purgatoire, je l'éprouve dans mon esprit, surtout depuis deux ans. De jour en jour je la ressens et la vois plus clairement.
Mon âme, à ce que je vois, est dans ce corps comme dans un purgatoire, mais à la mesure réduite que le corps peut supporter, pour éviter qu'il ne meure. Néanmoins cela s'aggrave peu à peu, jusqu'à ce qu'enfin mort s'ensuive.
Je vois l'esprit rendu étranger à toute chose, même d'ordre spirituel, où il pourrait trouver quelque aliment, comme serait joie, plaisir, consolation. Il est hors d'état de prendre goût à quelque chose que ce soit, temporelle ou spirituelle, ni par la volonté, ni par l'entendement, ni par la mémoire.
Il m'est devenu impossible de dire : je prends plus plaisir à ceci qu'à cela.
Mon intérieur est assiégé. De toute chose qui portait rafraîchissement à sa vie spirituelle et corporelle il a été dépouillé petit à petit.
Chaque fois qu'une de ces choses lui est enlevée il reconnaît qu'elle était de nature à lui donner aliment et réconfort. Aussitôt que l'esprit en prend conscience, il les prend en haine et en abomination et elles s'en vont sans aucun remède.
La raison en est que l'esprit porte en soi l'instinct de se débarrasser de toute chose qui puisse faire obstacle à sa perfection. Il s'y acharne au point qu'il irait presque jusqu'à se laisser mettre en enfer pour atteindre à son but.
Il va rejetant toute chose dont l'homme intérieur pourrait se nourrir, il l'investit de façon si subtile que ne peut passer le moindre fétu d'imperfection sans qu'il ne l'aperçoive et ne le prenne en horreur.
Quant à la partie extérieure, puisque l'esprit n'a plus de correspondance avec elle, elle aussi est assiégée étroitement; il lui devient impossible de se rafraîchir au gré de son instinct humain.
Il ne lui reste d'autre soutien que Dieu. C'est lui qui opère tout cela par amour et avec grande miséricorde pour satisfaire à sa justice.
Cette vue donne à l'esprit grande paix et contentement. Mais ce contentement ne diminue en rien la souffrance ni la compression qu'il subit. Jamais la souffrance ne pourrait devenir cruelle au point qu'il puisse désirer de se dégager de ce que Dieu dispose à son sujet.
Il ne sort pas de sa prison, il ne cherche pas à en sortir, tant que Dieu n'aura pas accompli en lui tout ce qui est nécessaire. Ce qui me contente c'est que Dieu soit satisfait. Il n'y aurait pas pour moi de souffrance pire que de m'écarter des desseins de Dieu sur moi, tant j'y vois de justice et de miséricorde.
Tout ce qui vient d'être dit, je le vois, je le touche, mais je n'arrive pas à trouver d'expressions satisfaisantes pour le dire comme je voudrais. Ce que j'en ai dit, je le sens s'opérer en moi spirituellement et c'est pour cela que je l'ai dit.
La prison dans laquelle je me vois, c'est le monde ; la chaîne, c'est le corps. L'âme illuminée par la grâce, c'est elle qui connaît l'importance d'être retenue ou retardée d'atteindre sa fin, par quelque empêchement que ce soit. Cela lui cause une peine extrême, car elle est d'une sensibilité aiguë.
De plus, cette âme reçoit de Dieu une certaine dignité qui la rend semblable à Dieu même. Il la fait une même chose avec lui en la rendant participante de sa bonté.
Et comme il est impossible qu'une peine quelconque atteigne Dieu, ainsi en advient-il des âmes qui s'approchent de lui. Plus elles s'approchent, plus aussi elles reçoivent de ce qui est propre à la divinité.
Par suite, le retardement qui atteint l'âme lui cause une souffrance intolérable. Cette souffrance et ce retard la rendent dissemblable de ces propriétés qu'elle avait de nature, et que la grâce lui montre ; elle est empêchée d'y atteindre, alors qu'elle y est apte, et cela lui cause une souffrance très grande, à la mesure de l'estime qu'elle a de Dieu.
Mieux elle le connaît, plus elle l'estime ; plus elle est dégagée du péché, mieux elle le connaît. A mesure aussi, l'empêchement lui devient plus terrible d'autant plus que l'âme est toute recueillie en Dieu et rien ne l'empêche de le connaître sans aucune erreur.
L'homme qui est prêt à se laisser tuer plutôt que d'offenser Dieu ressent la mort et en éprouve toute la peine. Mais dans le zèle que lui donne la lumière divine, il place l'honneur de Dieu au-dessus de la mort.
Ainsi l'âme qui connaît les desseins de Dieu en fait plus de cas que de toute torture intérieure ou extérieure, si grande qu'elle soit. C'est que Dieu qui opère en elle ces choses dépasse tout ce qu'on peut en ressentir ou imaginer.
L'occupation, pour faible qu'elle soit, que Dieu donne de lui-même à une âme l'absorbe en lui au point qu'elle ne peut tenir compte de rien d'autre. Par suite elle perd tout retour sur soi, elle ne voit plus rien en elle-même, ni dommage ni peine, elle n'en parle pas, elle n'en sait plus rien. Un instant seulement elle en a connaissance, comme il a été dit, au moment qu'elle sort de cette vie.
Finalement, tirons cette conclusion: Dieu fait perdre à l'homme tout ce qui est de l'homme, et le purgatoire le purifie.
FIN DU TRAITÉ
Comment, par comparaison avec le feu divin qu'elle ressentait au-dedans d'elle-même, elle comprenait ce qu'était le purgatoire et comment les âmes s'y trouvent contentes et souffrantes
Cette sainte âme encore dans sa chair se trouva établie dans le purgatoire du brûlant amour de Dieu.
Il la brûlait toute et la purifiait de ce qu'elle avait à purifier, de façon qu'au sortir de cette vie elle pût être présentée au regard de Dieu son doux amour.
Par le moyen de ce brûlant amour, elle comprenait en elle-même dans quel état se trouvent au purgatoire les âmes des fidèles pour purifier toute espèce de rouille et de tache du péché non encore effacée durant cette vie.
Elle-même, établie au purgatoire du feu divin d'amour, se tenait unie à son divin amour, satisfaite de tout ce qu'il opérait en elle ; comprenant qu'il en était ainsi des âmes qui sont au purgatoire, elle disait :
1. Parfaite conformité des âmes du purgatoire à la volonté de Dieu
Les âmes qui sont au purgatoire, à ce que je crois comprendre, ne peuvent avoir d'autre choix que d'être en ce lieu puisque telle est la volonté de Dieu qui dans sa justice l'a ainsi décidé.
Elles ne peuvent pas davantage se retourner sur elles-mêmes. Elles ne peuvent dire : j'ai fait tels péchés et c'est à cause d'eux que je mérite de me trouver ici.
Il ne leur est pas possible de dire : je voudrais ne pas avoir fait tels péchés, parce qu'ainsi j'irais tout de suite en paradis. Pas davantage : celui-ci sortira d'ici avant moi.
Ni dire : “j'en sortirai avant lui”.
Elles sont incapables d'avoir ni d'elles-mêmes ni des autres aucun souvenir, ni en bien ni en mal, qui puisse augmenter leur souffrance.
Elles ont, au contraire, un tel contentement d'être établies dans la condition voulue par Dieu et que Dieu accomplisse en elles tout ce qu'il veut, comme il le veut, qu'elles ne peuvent penser à elles-mêmes ni en ressentir quelque accroissement de peine.
Elles ne voient qu'une chose, la bonté divine qui travaille en elles, cette miséricorde qui s'exerce sur l'homme pour le ramener à Dieu.
En conséquence, ni bien ni mal qui leur arrive à elles-mêmes ne peut attirer leur regard.
Si ces âmes pouvaient en prendre conscience, elles ne seraient plus dans la pure charité.
Elles ne peuvent non plus considérer qu'elles sont dans ces peines à cause de leurs péchés, cette idée, n'entre pas dans leur esprit.
Ce serait en effet, une imperfection en acte, chose qui ne peut exister en ce lieu où il est impossible de commettre un péché. Pourquoi elles sont en purgatoire, cette cause qui est en elles, il ne leur est donné de la voir qu'une seule fois, au moment qu'elles sortent de cette vie, et dans la suite ne la voient plus jamais.
Autrement, ce regard serait un retour sur soi.
Étant donc établies en charité et n'en pouvant plus dévier par un acte défectueux, elles sont rendues incapables de rien vouloir de rien désirer hormis le pur vouloir de la pure charité. Placées dans ce feu purifiant, elles y sont dans l'ordre voulu par Dieu.
Cette disposition divine est pur amour ; elles ne peuvent s'en écarter en rien, parce qu'elles sont incapables de commettre un péché, comme aussi de faire un acte méritoire.
2. Joie des âmes du purgatoire ; leur croissante vision de Dieu, la raison de la rouille
Je ne crois pas qu'il puisse se trouver un contentement comparable à celui d'une âme du purgatoire, à l'exception de celui des saints en paradis. Chaque jour s'accroît ce contentement par l'action de Dieu en ces âmes, action qui va croissant comme va se consumant ce qui empêche cette action divine. Cet empêchement, c'est la rouille du péché.
[La rouille n'est pas un reste de péché, une disposition mauvaise de la volonté qui serait l'effet en l'âme des péchés qu'elle a commis durant sa vie terrestre ; c'est une souillure de l'âme, un manque de perfection, suite des péchés d'autrefois, dont la volonté s'est totalement détachée au moment de la mort.]
Le feu consume progressivement cette rouille et ainsi l'âme se découvre de plus en plus à l'influx divin.
De même un objet qu'on aurait recouvert ne peut correspondre à l'éclat du soleil, non point parce que le soleil serait insuffisant, lui qui continue de briller, mais par l'empêchement de ce qui recouvre l'objet.
Que vienne à se consumer l'obstacle qui fait écran, l'objet se découvrira à l'action du soleil ; il la subira de plus en plus à mesure que l'obstacle diminuera.
Ainsi la rouille du péché est ce qui recouvre l'âme.
Au purgatoire cette rouille est consumée par le feu. Plus elle se consume, plus aussi l'âme s'expose au vrai soleil, à Dieu.
Sa joie augmente à mesure que la rouille disparaît et que l'âme s'expose au rayon divin. Ainsi l'une croît et l'autre diminue jusqu'à ce que le temps soit accompli.
Ce n'est pas la souffrance qui diminue, c'est uniquement le temps de rester dans cette peine.
Quant à la volonté, ces âmes ne peuvent jamais dire que ces peines soient des peines, tant elles sont satisfaites des dispositions divines auxquelles leur volonté est unie par pure charité.
3. Souffrance des âmes du purgatoire, la séparation d'avec Dieu est leur plus grande peine
D'autre part, la peine qu'elles subissent est si extrême qu'il n'est aucune langue qui puisse l'exprimer ni aucune intelligence qui puisse en saisir la moindre étincelle si Dieu ne la lui découvre par une grâce toute spéciale.
Cette étincelle, Dieu fit à cette âme la grâce de la lui faire voir, mais je ne puis l'exprimer par la langue.
Cette connaissance que Dieu m'a fait voir n'est jamais sortie de mon esprit. J'en dirai ce que je pourrai et ceux-là comprendront à qui le Seigneur daignera ouvrir l'entendement.
La source de toutes les souffrances est le péché, soit originel, soit actuel. Dieu a créé l'âme toute pure et toute simple, sans aucune tache de péché et avec un instinct béatifique qui la porte vers lui.
De cet instinct, le péché originel en quoi elle se trouve, la détourne. Le péché actuel, quand il s'y ajoute, l'en détourne plus encore. Plus elle s'en éloigne, plus elle devient mauvaise, puisque Dieu de moins en moins s'accorde avec elle.
Tout ce qu'il peut y avoir de bon dans les créatures n'existe que par la communication que Dieu en fait. Aux créatures non raisonnables, Dieu en fait part selon ses desseins et il ne leur fait jamais défaut.
A la créature raisonnable, à l'âme, il correspond plus ou moins dans la mesure où il la trouve purifiée de l'empêchement du péché.
Existe-t-il une âme qui revienne à la première pureté de sa création, l'instinct du bonheur se découvre en elle et s'accroît aussitôt avec une telle véhémence, une telle ardeur de charité l'entraînant vers sa fin dernière, que c'est pour elle chose insupportable d'en être écartée. Plus elle en a la conscience, plus extrême est son tourment.
4. Différence entre les damnés et les âmes du purgatoire
Les âmes qui sont au purgatoire se trouvent sans la coulpe du péché.
En conséquence, il n'y a pas d'obstacle entre Dieu et elles, hors cette peine qui les retarde et qui consiste en ce que leur instinct béatifique n'a pas atteint sa pleine perfection.
Voyant en toute certitude combien importe le moindre empêchement, voyant que la justice exige que leur attrait soit retardé, il leur naît au cœur un feu d'une violence extrême, qui ressemble à celui de l'enfer.
Il y a la différence du péché qui rend mauvaise la volonté des damnés de l'enfer ; à ceux- ci Dieu ne fait point part de sa bonté. Ils demeurent dans cette malice désespérée, opposée à la volonté de Dieu.
On voit par là que cette opposition de la volonté mauvaise à la volonté de Dieu est cela même qui constitue le péché. Comme leur volonté s'obstine dans le mal, le péché aussi se maintient.
Ceux de l'enfer sont sortis de cette vie avec leur volonté mauvaise. Aussi leur péché n'est pas remis et ne peut l'être, parce qu'ils ne peuvent plus changer de volonté, une fois qu'ils sont sortis ainsi disposés de cette vie.
En ce passage l'âme s'établit définitivement dans le bien ou dans le mal, selon qu'elle s'y trouve par sa volonté délibérée, conformément à ce qui est écrit :
« Là où je te trouverai, c'est-à-dire au moment de la mort, avec cette volonté ou du péché ou de rejet et de regret du péché, là je te jugerai » [1].
Ce jugement est sans rémission puisque après la mort la liberté du libre vouloir n'est plus sujette au changement. Elle reste fixée dans la disposition où elle se trouvait au moment de la mort.
Ceux de l'enfer, pour s'être trouvés à ce moment avec la volonté de pécher, portent sur eux la coulpe et la peine. La coulpe est infinie ; la peine n'est pas aussi grave qu'ils l'ont méritée, mais ils la porteront sans fin.
Au contraire, ceux du purgatoire ont seulement la peine, puisque le péché fut effacé au moment de la mort, car ils étaient contrits de leurs fautes et se repentaient d'avoir offensé la bonté de Dieu.
Aussi leur peine aura sa fin, elle va diminuant sans cesse dans le temps, comme il a été dit.
O misère au-delà de toute misère et d'autant plus lamentable que les hommes aveugles n'y pensent pas !
5. Dieu montre sa bonté même envers les damnés
Ce châtiment des damnés n'est pas infini en quantité. La raison en est que la douce bonté divine étend le rayon de sa miséricorde jusqu'en enfer.
En effet, l'homme décédé en état de péché mortel mérite un châtiment infini et pour un temps infini.
Mais la miséricorde de Dieu a disposé que seul le temps serait sans fin, et les peines limitées en quantité. En toute justice il aurait pu leur infliger une peine plus grande qu'il ne fait.
Oh ! quel est le danger du péché commis par mauvais vouloir !
C'est à grand-peine que l'homme s'en repent, et tant qu'il n'en a pas de repentir, le péché demeure et ce péché continue aussi longtemps que l'homme reste dans la volonté du péché qu'il a commis ou dans celle de le commettre.
6. Purifiées du péché, c'est avec joie que les âmes du purgatoire s'acquittent de leurs peines
Mais les âmes du purgatoire tiennent leur volonté en tout conforme à celle de Dieu.
En conséquence, Dieu s'accorde avec elles dans sa bonté et elles demeurent contentes (quant à leur volonté) et purifiées de la coulpe du péché actuel.
Ces âmes sont rendues aussi pures que Dieu les a créées. Quand elles sortent de cette vie contrites de tous les péchés qu'elles ont commis, les ayant confessés et animées de la volonté de ne plus les commettre, Dieu les absout aussitôt de leur coulpe et il ne reste plus en elles que la rouille du péché.
Elles s'en purifient ensuite dans le feu par la souffrance.
Ainsi purifiées de toute coulpe et unies à Dieu par leur volonté, elles voient Dieu clairement, selon le degré de connaissance qu'il leur accorde, elles voient aussi de quelle valeur il est de jouir de Dieu et que les âmes sont créées précisément pour cela.
7. De quel violent amour les âmes du purgatoire aspirent à jouir de Dieu. Exemple du pain et de l'affamé
Elles éprouvent de plus en plus une conformité si unifiante à leur Dieu, cette conformité les tire vers lui avec une si grande force par l'instinct de nature qui existe entre Dieu et l'âme qu'on ne peut donner aucun raisonnement, aucune comparaison, aucun exemple qui puisse expliquer assez cette chose au degré où l'âme la ressent dans son opération en elle et par son expérience intime. J'en donnerai cependant un exemple qui se présente à mon esprit.
Supposons qu'il n'y eût dans le monde entier qu'un seul pain pour enlever la faim à toute créature ; supposons de plus que rien qu'à voir ce pain les hommes en seraient rassasiés.
Étant donné que l'homme, à moins d'être malade, a l'instinct naturel de manger, s'il vient à ne plus manger, tout en étant préservé de maladie et de mort, sa faim grandirait continuellement puisque son instinct de manger ne diminuerait jamais.
Il sait que ce pain est seul capable de le rassasier; s'il ne peut l'avoir sa faim ne s'en ira pas, il restera dans un tourment intolérable. Plus il s'en approche sans arriver cependant à le voir, plus aussi s'allume le désir naturel que son instinct ramasse tout entier sur le pain en quoi se trouve tout contentement.
S'il savait avec certitude que jamais il ne lui sera donné de voir ce pain, à ce moment l'enfer s'accomplirait pour lui ; il serait dans l'état des âmes damnées qui sont privées de toute espérance d'arriver jamais à voir le pain qui est Dieu leur vrai Sauveur.
Mais les âmes du purgatoire ont l'espérance de contempler le pain et de s'en rassasier pleinement. Par suite, elles souffrent la faim et restent dans leur tourment aussi longtemps qu'elles sont retenues de se rassasier de ce pain, Jésus-Christ, vrai Dieu Sauveur, notre Amour.
8. L'enfer et le purgatoire font connaître l'admirable sagesse de Dieu
De même que l'esprit net et purifié ne se connaît aucun lieu de repos sinon Dieu même puisqu'il a été créé à cette fin, de même l'âme pécheresse n'a de place nulle part sinon en enfer puisque Dieu le lui a destiné pour sa fin.
C'est pourquoi au moment même où l'esprit est séparé du corps, l'âme se rend au lieu qui lui est destiné, sans autre guide que la nature même de son péché, au cas où l'âme se détache du corps en état de péché mortel.
Si l'âme ne trouvait pas à ce moment même cette destination qui procède de la justice divine, elle serait dans un enfer pire que l'enfer même.
La raison en est que l'âme se trouverait hors de cette disposition divine qui n'est pas sans une part de miséricorde, puisque la peine infligée n' est pas aussi grande qu'elle le mérite.
Aussi l'âme, ne trouvant aucun lieu qui lui convienne davantage, ni lui soit moins douloureux, Dieu l'ayant disposé ainsi, elle se jette d'elle-même en enfer puisque c'est sa place.
Il en est de même du purgatoire dont nous parlons. Séparée du corps, l'âme qui ne se trouve pas dans cette netteté dans laquelle Dieu l'a créée, voyant en elle l'obstacle qui la retient et sachant qu'il ne peut être enlevé que par le moyen du purgatoire, elle s'y jette aussitôt et de grand cœur.
Si elle ne découvrait ce moyen disposé par Dieu pour la débarrasser de cet empêchement, à l'instant se formerait en elle un enfer pire que le purgatoire, parce qu'elle se verrait empêchée d'atteindre sa fin qui est Dieu.
Cela est pour elle d'une telle importance qu'en comparaison le purgatoire est comme rien, quoique, comme il a été dit, le purgatoire est semblable à l'enfer. Mais c'est en comparaison qu'il est comme rien.
9. Nécessité du purgatoire
J'ajoute encore ceci que je vois. De la part de Dieu, le paradis est ouvert, y entre qui veut. C'est que Dieu est toute miséricorde, il reste tourné vers nous, les bras ouverts pour nous recevoir dans sa gloire.
Mais je vois d'autre part comment cette divine essence est d'une telle pureté et netteté, au-delà de tout ce qu'on pourrait imaginer, que l'âme qui aurait en soi une imperfection aussi légère qu'un fétu minuscule, se jetterait en mille enfers plutôt que de se trouver avec cette tache en présence de la majesté divine.
Aussi, voyant que le purgatoire a été fait pour lui enlever ces taches, elle s'y jette. Elle voit que c'est là une grande miséricorde pour elle que ce moyen d'enlever cet empêchement.
10. Comme le purgatoire est chose terrible
De quelle gravité est le purgatoire, ni la langue ne le peut expliquer, ni l'esprit le saisir.
Je ne vois que ceci: que les tourments y égalent ceux de l'enfer. Néanmoins, je vois que l'âme qui découvre la moindre tache d'imperfection le reçoit, selon ce qui a été dit, comme un bienfait qui lui est accordé.
Dans un certain sens, elle le tient pour rien en comparaison de cette tache qui arrête son amour.
Je vois aussi que le tourment des âmes du purgatoire consiste bien davantage en ceci qu'elles voient en elles quelque chose qui déplaît à Dieu et qu'elles l'ont contracté volontairement en agissant contre une si grande bonté, plutôt que dans nul autre tourment qu'elles ressentent en purgatoire.
C'est qu'étant dans la grâce divine elles voient la réalité et l'importance de cet empêchement qui ne leur permet pas d'approcher de Dieu.
Tout ce qu'on vient de dire, qu'est-ce en comparaison des évidences qui me sont données dans mon esprit (pour autant que j'en ai pu concevoir dans cette vie) ?
Devant de telles extrémités, toute vue, toute parole, tout sentiment, toute imagination, toute justice, toute vérité, tout cela n'est pour moi que tromperies et choses de néant
Je reste confuse, faute de pouvoir trouver des expressions plus fortes.
11. L'amour de Dieu qui attire les âmes saintes et l'empêchement qu'elles trouvent dans le péché sont les causes des tourments du purgatoire
Je vois entre Dieu et l'âme une incroyable conformité. Lorsqu'il la voit dans cette pureté où sa majesté l'a créée, il lui donne une certaine force d'attraction faite d'amour brûlant, capable de la réduire au néant, tout immortelle qu'elle soit.
Il la met dans un état de si parfaite transformation en lui son Dieu, qu'elle se voit n'être plus autre chose que Dieu.
Il la tire continuellement à lui, il l'embrasse, il ne la laisse pas jusqu'à ce qu'il l'ait menée à cet être divin dont elle procède, c'est-à-dire à cette pureté dans laquelle il l'a créée.
L'âme se voit, par une vue intérieure, ainsi tirée par Dieu avec un tel feu d'amour. Alors, sous l'ardeur de cet amour embrasé de son doux Seigneur et Dieu qu'elle sent rejaillir en son esprit, elle se liquéfie tout entière.
A la lumière divine, elle voit comment Dieu ne cesse pas un instant de la tirer vers lui pour la conduire à son entière perfection.
Il y met un soin extrême, une continuelle sollicitude ; en tout cela Dieu n'agit que par un pur amour. Mais elle-même, par cet obstacle de péché qui subsiste en elle, se trouve empêchée de se livrer à ce divin attrait, c'est-à-dire à ce regard unitif que Dieu lui a donné pour qu'elle soit tirée à lui.
Elle voit aussi combien lui est douloureux ce retardement qui la retient de contempler la divine lumière. S'y ajoute l'instinct de l'âme impatiente d'être libérée de cet empêchement, attirée qu'elle est par ce regard unitif.
Je dis que tout cela et la vue qu'en ont les âmes, est ce qui engendre en elle la peine du purgatoire.
De cette peine, si grande qu'elle soit cependant elle ne tiennent pas compte. Elles s'occupent bien davantage de l'opposition qu'elles ont à la volonté de Dieu.
Elles le voient brûler pour elles d'un extrême et pur amour. Cet amour, avec son regard unitif, les tire à soi avec une puissance extrême et sans arrêt, comme s'il n'avait autre chose à faire.
C'est au point que si l'âme pouvait découvrir un autre purgatoire plus fort que celui où elle se trouve, elle s'y jetterait aussitôt pour se débarrasser plus vite de cet empêchement. Tant est violent l'amour de conformité entre Dieu et l'âme.
12. Comment Dieu purifie les âmes Exemple de l'or dans le creuset
De ce divin Amour, je vois jaillir vers l'âme certains rayons et flammes brûlantes, si pénétrants et si forts qu'ils sembleraient capables de réduire au néant non seulement le corps, mais l'âme elle- même s'il était possible.
Ces rayons opèrent de deux manières : l'une est de purifier, l'autre d'anéantir.
Vois l'or. A mesure que tu le fonds, à mesure il s'améliore. Tu pourrais le fondre au point de détruire en lui toute imperfection.
Tel est l'effet du feu dans les choses matérielles. Il y a cette différence que l'âme ne peut s'anéantir en Dieu, mais uniquement dans son être propre. Plus tu la purifies, plus aussi elle s'anéantit en elle-même et pour finir elle est toute purifiée en Dieu.
L'or, quand il est purifié à vingt-quatre carats ne se consume plus, quel que soit le feu par où tu le ferais passer. Ce qui peut être consumé en lui, ce n'est que sa propre imperfection.
Ainsi opère dans l'âme le feu divin. Dieu la maintient dans le feu jusqu'à ce que toute imperfection soit consumée. Il la conduit à la pureté totale de vingt-quatre carats, chaque âme cependant selon son degré. Quand elle est purifiée elle reste tout entière en Dieu, sans rien en elle qui lui soit propre, et son être est Dieu.
Une fois que Dieu a ramené à lui l'âme ainsi purifiée, alors celle-ci est mise hors d'état de souffrir encore, puisqu'il ne lui reste plus rien à consumer. Supposé que dans cet état de pureté on la tienne dans le feu, elle n'en sentirait nulle souffrance. Ce feu ne serait autre chose que celui du divin amour de la vie éternelle, sans rien de pénible.
13. Les âmes ont un désir ardent de se transformer en Dieu. Sagesse de Dieu qui leur tient cachées leurs imperfections
L'âme a été créée munie de toutes les bonnes dispositions dont elle est capable, pour la mettre à même d'atteindre sa perfection, à condition qu'elle vive comme Dieu l'ordonne sans se souiller d'aucune tache de péché.
Mais elle s'est contaminée par le péché originel qui lui fait perdre ses dons de grâce.
Elle est morte, elle ne peut ressusciter sinon par Dieu. Quand elle renaît par le baptême, il lui reste l'inclination au mal ; cette inclination la conduit, si elle n' y résiste pas, au péché actuel, par quoi elle meurt de nouveau.
Une nouvelle fois, Dieu lui rend la vie. C'est une grâce toute particulière qu'il lui fait, car elle est salie et tournée vers elle-même. Pour la ramener à son premier état telle que Dieu l'a créée, elle a besoin de ces opérations divines, faute desquelles il lui serait à jamais impossible de se tourner de nouveau vers Dieu.
Quand l'âme se met en route pour retourner à son premier état, si grande est l'ardeur qui la presse de se transformer en Dieu que c'est là son purgatoire. Elle ne regarde pas ce purgatoire comme un purgatoire, mais cet instinct brûlant et entravé constitue son purgatoire.
Ce dernier acte d'amour accomplit son oeuvre, sans que l'homme y ait part.
Il y a dans l'âme tant d'imperfections cachées qu'elle désespérerait s'il lui était donné de les voir. Ce dernier état les consume toutes.
Après qu'elles sont consumées, Dieu les découvre à l'âme pour qu'elle reconnaisse l’œuvre divine accomplie en elle par le feu d'amour. C'est lui qui a consumé en elle toutes ces imperfection qui doivent l'être.
14. Joie et douleur de l'âme du purgatoire
Sache ceci : la perfection que l'homme croit constater en lui n'est pour Dieu que défaut.
En effet, tout ce que l'homme accomplit sous couleur de perfection, toute connaissance, tout sentiment, tout vouloir tout souvenir, dès qu'il ne le fait pas remonter à Dieu, tout cela l'infecte et le souille.
Pour que ces actes soient parfaits, il est nécessaire qu'il soient faits en nous sans nous, sans que nous en soyons le premier agent, et que l'opération de Dieu soit faite en Dieu sans que l'homme en soit la cause principale.
Ces actes seuls sont parfaits, que Dieu accomplit et achève dans son amour pur et net, sans mérite de notre part.
Ils pénètrent l'âme si profondément et l'embrasent à tel point que le corps où elle se trouve se sent brûler comme s'il était dans un grand brasier qui ne s'éteindra pas avant la mort.
Il est vrai, comme je le vois, que l'amour qui procède de Dieu et rejaillit dans l'âme cause en elle un contentement inexprimable ; mais ce contentement n'enlève pas une étincelle de leur peine aux âmes du purgatoire.
Donc, cet amour qui se trouve entravé, c'est lui qui constitue leur souffrance. Cette souffrance est d'autant plus grande que plus grande est la capacité d'amour et de perfection que Dieu a donné à chacune.
Ainsi les âmes du purgatoire ont tout ensemble une joie extrême et une extrême souffrance sans que l'une soit un obstacle pour l'autre.
15. Les âmes du purgatoire sont hors d'état de pouvoir mériter encore. Comment leur volonté est disposée à l'égard des bonnes oeuvres offertes ici-bas en suffrage pour elles
S'il était donné aux âmes du purgatoire de se purifier par la contrition, en un instant elles acquitteraient leur dette entière, tant serait brûlante l'impétuosité de leur contrition.
Car elles voient clairement la gravité de cet empêchement qui les retient de s'unir à Dieu, leur fin et leur amour.
Tiens pour certain que dans ce paiement, elles ne sont quittes d'un seul denier, la justice de Dieu l'ayant ainsi déterminé. Ceci vaut du côté de Dieu.
Du côté de l'âme, elles n'ont plus aucun choix personnel, aucun regard sur elles-mêmes, sans vouloir considérer autre chose que la volonté de Dieu ; elles sont ainsi établies.
Si quelqu'un en ce monde fait une aumône à leur intention et qu'ainsi la durée de leur peine soit diminuée, elles ne peuvent se retourner pour en prendre connaissance et s'y attacher.
Elles abandonnent tout à l'exacte balance de la volonté divine, elles laissent Dieu tout régler à lui seul, qu'il se paie comme il plaît à sa bonté infinie.
S'il leur arrivait de penser à ces aumônes en dehors de la volonté divine, ce serait un retour sur elles-mêmes, elles perdraient de ce fait la vue de ce divin vouloir et cela serait pour elles un enfer.
C'est pourquoi ces âmes restent attachées à tout ce que Dieu accomplit en elles, que ce soit plaisir et contentement ou que ce soit souffrance.
Elles ne peuvent plus se retourner sur elles-mêmes, transformées qu'elles sont totalement dans la volonté de Dieu et contentes de ce qu'il décide dans son infinie sainteté.
16. Ces âmes veulent être pleinement purifiées
Si une âme était présentée aux regards divins ayant encore quelque chose à purger, ce serait lui faire une grande injure, ce serait pour elle un tourment pire que dix purgatoires.
La raison en est que ce serait pour la pure bonté et la souveraine justice de Dieu une chose intolérable.
De son côté, l'âme verrait qu'elle n'a pas encore pleinement satisfait à Dieu. Ne manquerait-il qu'un clin d’œil de purification, ce serait pour elle aussi chose intolérable.
Pour enlever ce rien de rouille, elle irait dans mille enfers (supposé qu'il lui fût accordé de choisir) plutôt que de se trouver face à la présence divine sans être totalement purifiée.
17. Exhortations et reproches aux vivants
Éclairée sur toutes ces choses à la lumière divine, cette âme bénie disait :
Il me vient une envie de crier avec une telle force que sur la Terre tous les hommes en seraient épouvantés.
Je leur dirais : malheureux, pourquoi vous laissez-vous aveugler à ce point par le monde ?
A cette nécessité si pressante où vous vous trouverez au moment de la mort, vous n'avez aucun souci de vous préparer !
Vous vous abritez tous sous l'espérance de la miséricorde divine. Elle est si grande, dites-vous. Mais vous ne voyez pas que cette bonté de Dieu tournera à votre condamnation puisque c'est contre la volonté d'un si bon maître que vous aurez agi.
[= “je n'ai pas à m'en faire car Dieu est bon, il est miséricordieux, il me pardonnera tous mes péchés avant que je le lui demande” se transformera en : “comment ai-je pu tant haïr, tant commettre de péchés contre ce Jésus si incroyablement bon et doux, je suis épouvantablement coupable, je ne mérite aucun pardon, je préfère fuir la présence de cet agneau innocent que j'ai moi-même torturé et crucifié à mort par mes péchés”, c'est maintenant qu'il faut lui dire : “je te (vous) demande pardon pour le mal que je (vous) t'ai fait, j'ai confiance en ta miséricorde, viens à mon secours, donne-moi la force de commencer une vie nouvelle dans ta grâce”, ce n'est que par pur miracle que certains arrivent à changer de volonté et à vouloir, aux abords de la mort, fuir les péchés qu'ils chérissaient pendant leur vie. Les miracles existent mais ils ne sont pas la règle générale, ils sont l'exception.]
Sa bonté devrait au contraire vous forcer à faire sa volonté tout entière et non pas vous porter à la présomption de faire le mal.
Sa justice ne peut être frustrée, il faut de toute façon qu'elle soit pleinement satisfaite.
Ne t'encourage pas en te disant : je me confesserai, j'aurai ensuite l'indulgence plénière, je serai d'un seul coup purgé de tous mes péchés, et ainsi je serai sauvé.
Prends garde que la confession et la contrition, requises pour l'indulgence plénière, sont bien difficiles à réaliser. Si tu en avais conscience, tu tremblerais de terreur ; tu serais plus assuré de ne l'avoir pas que de l'avoir.
18. Au purgatoire, les âmes souffrent volontiers et dans la joie
Au purgatoire, je vois les âmes souffrir avec la vue de deux opérations.
La première, c'est qu'elles souffrent de très bon cœur leurs peines. Elles se rendent compte que Dieu leur fait grande miséricorde, considérant le châtiment qu'elles ont mérité, sachant aussi à quel point il leur est nécessaire.
Si la bonté divine n'avait tempéré sa justice par sa miséricorde (payant pour elles par le précieux sang de Jésus-Christ), un seul péché mériterait mille enfers éternels.
Aussi subissent-elles de si grand cœur leurs peines qu'elles ne voudraient en retirer un seul carat. Elles savent que ces peines elles les ont méritées en toute justice et qu'elles sont parfaitement réglées. Par suite, elles ne se plaignent pas plus de Dieu (quant à la volonté) que si elles étaient dans la vie éternelle.
L'autre opération est un contentement qu'elles éprouvent à voir comment Dieu agit envers elles, avec quel amour et quelle miséricorde.
Ces deux vues, Dieu les imprime en elles instantanément. Puisqu'elles sont en état de grâce, elles saisissent et comprennent à la mesure de leur capacité. Elles en éprouvent une immense joie, qui ne leur manquera plus ; au contraire, elle ira toujours croissant au fur et à mesure qu'elles s'approchent davantage de Dieu.
Ces âmes ne voient point cela en elles-mêmes ni par elles-mêmes ni comme quelque chose qui serait à elles, mais seulement en Dieu.
Elles s'occupent intensément de lui beaucoup plus que de leurs peines, elles tiennent celles-ci pour rien en comparaison de lui.
La moindre vues qu'on puisse avoir de Dieu surpasse toute peine et toute joie que l'homme puisse avoir mais sans leur enlever une étincelle ni de joie ni de peine.
19. La sainte conclut son exposé sur les âmes du purgatoire en leur attribuant ce qu'elle ressent dans son âme
Cette forme de purification que je vois appliquée aux âmes du purgatoire, je l'éprouve dans mon esprit, surtout depuis deux ans. De jour en jour je la ressens et la vois plus clairement.
Mon âme, à ce que je vois, est dans ce corps comme dans un purgatoire, mais à la mesure réduite que le corps peut supporter, pour éviter qu'il ne meure. Néanmoins cela s'aggrave peu à peu, jusqu'à ce qu'enfin mort s'ensuive.
Je vois l'esprit rendu étranger à toute chose, même d'ordre spirituel, où il pourrait trouver quelque aliment, comme serait joie, plaisir, consolation. Il est hors d'état de prendre goût à quelque chose que ce soit, temporelle ou spirituelle, ni par la volonté, ni par l'entendement, ni par la mémoire.
Il m'est devenu impossible de dire : je prends plus plaisir à ceci qu'à cela.
Mon intérieur est assiégé. De toute chose qui portait rafraîchissement à sa vie spirituelle et corporelle il a été dépouillé petit à petit.
Chaque fois qu'une de ces choses lui est enlevée il reconnaît qu'elle était de nature à lui donner aliment et réconfort. Aussitôt que l'esprit en prend conscience, il les prend en haine et en abomination et elles s'en vont sans aucun remède.
La raison en est que l'esprit porte en soi l'instinct de se débarrasser de toute chose qui puisse faire obstacle à sa perfection. Il s'y acharne au point qu'il irait presque jusqu'à se laisser mettre en enfer pour atteindre à son but.
Il va rejetant toute chose dont l'homme intérieur pourrait se nourrir, il l'investit de façon si subtile que ne peut passer le moindre fétu d'imperfection sans qu'il ne l'aperçoive et ne le prenne en horreur.
Quant à la partie extérieure, puisque l'esprit n'a plus de correspondance avec elle, elle aussi est assiégée étroitement; il lui devient impossible de se rafraîchir au gré de son instinct humain.
Il ne lui reste d'autre soutien que Dieu. C'est lui qui opère tout cela par amour et avec grande miséricorde pour satisfaire à sa justice.
Cette vue donne à l'esprit grande paix et contentement. Mais ce contentement ne diminue en rien la souffrance ni la compression qu'il subit. Jamais la souffrance ne pourrait devenir cruelle au point qu'il puisse désirer de se dégager de ce que Dieu dispose à son sujet.
Il ne sort pas de sa prison, il ne cherche pas à en sortir, tant que Dieu n'aura pas accompli en lui tout ce qui est nécessaire. Ce qui me contente c'est que Dieu soit satisfait. Il n'y aurait pas pour moi de souffrance pire que de m'écarter des desseins de Dieu sur moi, tant j'y vois de justice et de miséricorde.
Tout ce qui vient d'être dit, je le vois, je le touche, mais je n'arrive pas à trouver d'expressions satisfaisantes pour le dire comme je voudrais. Ce que j'en ai dit, je le sens s'opérer en moi spirituellement et c'est pour cela que je l'ai dit.
La prison dans laquelle je me vois, c'est le monde ; la chaîne, c'est le corps. L'âme illuminée par la grâce, c'est elle qui connaît l'importance d'être retenue ou retardée d'atteindre sa fin, par quelque empêchement que ce soit. Cela lui cause une peine extrême, car elle est d'une sensibilité aiguë.
De plus, cette âme reçoit de Dieu une certaine dignité qui la rend semblable à Dieu même. Il la fait une même chose avec lui en la rendant participante de sa bonté.
Et comme il est impossible qu'une peine quelconque atteigne Dieu, ainsi en advient-il des âmes qui s'approchent de lui. Plus elles s'approchent, plus aussi elles reçoivent de ce qui est propre à la divinité.
Par suite, le retardement qui atteint l'âme lui cause une souffrance intolérable. Cette souffrance et ce retard la rendent dissemblable de ces propriétés qu'elle avait de nature, et que la grâce lui montre ; elle est empêchée d'y atteindre, alors qu'elle y est apte, et cela lui cause une souffrance très grande, à la mesure de l'estime qu'elle a de Dieu.
Mieux elle le connaît, plus elle l'estime ; plus elle est dégagée du péché, mieux elle le connaît. A mesure aussi, l'empêchement lui devient plus terrible d'autant plus que l'âme est toute recueillie en Dieu et rien ne l'empêche de le connaître sans aucune erreur.
L'homme qui est prêt à se laisser tuer plutôt que d'offenser Dieu ressent la mort et en éprouve toute la peine. Mais dans le zèle que lui donne la lumière divine, il place l'honneur de Dieu au-dessus de la mort.
Ainsi l'âme qui connaît les desseins de Dieu en fait plus de cas que de toute torture intérieure ou extérieure, si grande qu'elle soit. C'est que Dieu qui opère en elle ces choses dépasse tout ce qu'on peut en ressentir ou imaginer.
L'occupation, pour faible qu'elle soit, que Dieu donne de lui-même à une âme l'absorbe en lui au point qu'elle ne peut tenir compte de rien d'autre. Par suite elle perd tout retour sur soi, elle ne voit plus rien en elle-même, ni dommage ni peine, elle n'en parle pas, elle n'en sait plus rien. Un instant seulement elle en a connaissance, comme il a été dit, au moment qu'elle sort de cette vie.
Finalement, tirons cette conclusion: Dieu fait perdre à l'homme tout ce qui est de l'homme, et le purgatoire le purifie.
FIN DU TRAITÉ
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
DIALOGUES
PREMIÈRE PARTIE
Qui embrasse le discours de l'âme avec son corps
et avec l'amour-propre et de l'esprit avec l'humanité
CHAPITRE PREMIER
Comment l'âme et le corps se proposent d'aller de compagnie et comment ils prennent l'amour-propre en tiers.
Je vis une âme et un corps deviser ensemble.
L'âme disait la première :
Mon corps, Dieu m'a créée pour aimer et pour me délecter ; je voudrais donc me diriger vers quelque lieu où je puisse trouver ce que je désire ; je te prie de me suivre paisiblement, tu t'en accommoderas aussi.
Nous irons par le monde ; si je rencontre quelque chose à ma convenance, j'en jouirai : tu feras de même lorsque tu découvriras ce qui t'agréé ; et chacun de nous se délectera de ce qu'il trouvera de plus conforme à son goût.
Le corps répondit :
Quoique obligé de faire ce qui te plaît, je vois cependant que sans moi tu ne peux faire ce qui te convient.
Si donc tu veux que nous allions de compagnie entendons-nous d'abord, afin de ne pas nous disputer par les chemins.
Ce que tu as proposé me satisfait ; — mais il faudra que chacun de nous laisse patiemment jouir son compagnon du bien que ce dernier aura trouvé.
Ainsi, nous nous supporterons l'un l'autre, et nous demeurerons en paix ; — je te dis ceci, parce que quand j'aurai rencontré une chose agréable, je ne voudrais pas que tu me trompasses et me disses :
" je ne veux point que tu t'arrêtes si longtemps ici, je désire aller ailleurs pour m'occuper de mes affaires."
s'il me fallait laisser alors ce à quoi j'aspire, pour suivre ta volonté, je te déclare que j'en mourrais et que notre dessein serait rompu.
Afin d'obvier à cela, il me semble qu'il conviendrait de prendre un tiers qui fût une personne juste et qui n'eût rien en propre.
Nous remettrions tous nos différents à son jugement.
L'âme : J'en tombe parfaitement d'accord.
Mais qui sera ce tiers ?
Le corps :
Ce sera l'amour-propre qui vit avec nous deux.
Il me donnera ce qui me revient, et j'en jouirai avec lui : il en fera autant pour toi, te donnant ce qu'il te faudra : de cette façon chacun de nous aura, conformément à sa nature ce à quoi il prétend.
L'âme.
Et si nous trouvions nourriture qui nous plût à tous deux que ferions-nous ?
Le corps.
Alors celui qui pourra manger le plus mangera davantage, pourvu qu'il y en ait suffisamment pour tous les deux ; ainsi nous n'aurons pas de différend ; et, s'il n'y en a pas assez, l'amour-propre nous donnera à chacun la portion qui nous revient.
Mais il serait extraordinaire qu'il se trouvât une nourriture qui convint à deux personnes de goût différent, à moins ne changeât dans l'un de nous, ce qui ne se peut naturellement.
L'âme.
Par nature je suis plus puissante que toi ; je ne crains donc pas que tu me convertisses à tes goûts.
Le corps.
Et moi je suis dans ma maison, j'y ai la jouissance d'une foule de choses propres à me divertir ; tu ne réussiras donc pas à me faire prendre les tiens, quoique tu sois plus puissante que moi.
Au contraire en ma propre demeure, ainsi que je viens de le dire, je te convertirai plutôt à mes inclinaisons, voulant d'ailleurs t'aimer et te délecter ; car tu vas à la recherche de choses que tu ne vois pas et qui ne te réjouissent point.
Souvent même tu ne sais où tu en es.
L'âme :
Faisons-en donc l'épreuve : mais adoptons d'abord quelque ordre afin de pouvoir demeurer en paix.
Que chacun de nous ait sa semaine ; pendant la mienne je veux que tu fasses tout ce qui me plairas ; de même que lorsque viendra la tienne, je ferai ce que tu voudras, en exceptant toujours, tant que je vivrai, l'offense de notre Créateur.
Mais si je venais à mourir, c'est-à-dire si tu me conduisais au péché, alors, à partir de ce moment, j'accomplirai, en qualité de ta servante, et je me délecterai de ce qui te délectera.
Nous étant unis de la sorte, personne, autre que Dieu, ne pourra jamais rompre notre union, car elle sera toujours défendue par le libre arbitre : et ainsi, dans ce monde et dans l'autre, nous goûterons ensemble tout le bien et le mal qui nous adviendra.
Et toi tu feras de même si je puis te vaincre.
Voici maintenant l'amour-propre. Je sais que tu as tout entendu, veux-tu notre tiers, notre juge, et notre compagnon dans le voyage que nous entreprenons ?
L'amour-propre :
J'en suis satisfait, car je sens que je serai fort bien avec vous.
Je donnerai à chacun ce qui lui revient, cela ne saurait me nuire. Je vivrai avec l'un comme avec l'autre ; et, quand même l'un de vous voudrait user de violence à mon égard et me refuser les vivres, je me retirerais aussitôt avec l'adverse partie, car je ne veux, sous aucun prétexte, que ma nourriture me manque.
Le corps.
Assurément je ne t'abandonnerai jamais.
L'âme.
Ni moi non plus, car nous sommes tous d'accord, et il est entendu, avant toutes choses, que l'offense envers Dieu forme un cas réservé, et que celui de nous qui péchera aura les deux autres contre lui.
Maintenant, au nom du Seigneur, partons, et, comme je suis la plus élevée en dignité, je ferai la première semaine.
Le corps.
J'en conviens. Mène-moi et fais de moi ce que veut la raison : voici l'amour-propre qui y consent comme moi.
A suivre...
PREMIÈRE PARTIE
Qui embrasse le discours de l'âme avec son corps
et avec l'amour-propre et de l'esprit avec l'humanité
CHAPITRE PREMIER
Comment l'âme et le corps se proposent d'aller de compagnie et comment ils prennent l'amour-propre en tiers.
Je vis une âme et un corps deviser ensemble.
L'âme disait la première :
Mon corps, Dieu m'a créée pour aimer et pour me délecter ; je voudrais donc me diriger vers quelque lieu où je puisse trouver ce que je désire ; je te prie de me suivre paisiblement, tu t'en accommoderas aussi.
Nous irons par le monde ; si je rencontre quelque chose à ma convenance, j'en jouirai : tu feras de même lorsque tu découvriras ce qui t'agréé ; et chacun de nous se délectera de ce qu'il trouvera de plus conforme à son goût.
Le corps répondit :
Quoique obligé de faire ce qui te plaît, je vois cependant que sans moi tu ne peux faire ce qui te convient.
Si donc tu veux que nous allions de compagnie entendons-nous d'abord, afin de ne pas nous disputer par les chemins.
Ce que tu as proposé me satisfait ; — mais il faudra que chacun de nous laisse patiemment jouir son compagnon du bien que ce dernier aura trouvé.
Ainsi, nous nous supporterons l'un l'autre, et nous demeurerons en paix ; — je te dis ceci, parce que quand j'aurai rencontré une chose agréable, je ne voudrais pas que tu me trompasses et me disses :
" je ne veux point que tu t'arrêtes si longtemps ici, je désire aller ailleurs pour m'occuper de mes affaires."
s'il me fallait laisser alors ce à quoi j'aspire, pour suivre ta volonté, je te déclare que j'en mourrais et que notre dessein serait rompu.
Afin d'obvier à cela, il me semble qu'il conviendrait de prendre un tiers qui fût une personne juste et qui n'eût rien en propre.
Nous remettrions tous nos différents à son jugement.
L'âme : J'en tombe parfaitement d'accord.
Mais qui sera ce tiers ?
Le corps :
Ce sera l'amour-propre qui vit avec nous deux.
Il me donnera ce qui me revient, et j'en jouirai avec lui : il en fera autant pour toi, te donnant ce qu'il te faudra : de cette façon chacun de nous aura, conformément à sa nature ce à quoi il prétend.
L'âme.
Et si nous trouvions nourriture qui nous plût à tous deux que ferions-nous ?
Le corps.
Alors celui qui pourra manger le plus mangera davantage, pourvu qu'il y en ait suffisamment pour tous les deux ; ainsi nous n'aurons pas de différend ; et, s'il n'y en a pas assez, l'amour-propre nous donnera à chacun la portion qui nous revient.
Mais il serait extraordinaire qu'il se trouvât une nourriture qui convint à deux personnes de goût différent, à moins ne changeât dans l'un de nous, ce qui ne se peut naturellement.
L'âme.
Par nature je suis plus puissante que toi ; je ne crains donc pas que tu me convertisses à tes goûts.
Le corps.
Et moi je suis dans ma maison, j'y ai la jouissance d'une foule de choses propres à me divertir ; tu ne réussiras donc pas à me faire prendre les tiens, quoique tu sois plus puissante que moi.
Au contraire en ma propre demeure, ainsi que je viens de le dire, je te convertirai plutôt à mes inclinaisons, voulant d'ailleurs t'aimer et te délecter ; car tu vas à la recherche de choses que tu ne vois pas et qui ne te réjouissent point.
Souvent même tu ne sais où tu en es.
L'âme :
Faisons-en donc l'épreuve : mais adoptons d'abord quelque ordre afin de pouvoir demeurer en paix.
Que chacun de nous ait sa semaine ; pendant la mienne je veux que tu fasses tout ce qui me plairas ; de même que lorsque viendra la tienne, je ferai ce que tu voudras, en exceptant toujours, tant que je vivrai, l'offense de notre Créateur.
Mais si je venais à mourir, c'est-à-dire si tu me conduisais au péché, alors, à partir de ce moment, j'accomplirai, en qualité de ta servante, et je me délecterai de ce qui te délectera.
Nous étant unis de la sorte, personne, autre que Dieu, ne pourra jamais rompre notre union, car elle sera toujours défendue par le libre arbitre : et ainsi, dans ce monde et dans l'autre, nous goûterons ensemble tout le bien et le mal qui nous adviendra.
Et toi tu feras de même si je puis te vaincre.
Voici maintenant l'amour-propre. Je sais que tu as tout entendu, veux-tu notre tiers, notre juge, et notre compagnon dans le voyage que nous entreprenons ?
L'amour-propre :
J'en suis satisfait, car je sens que je serai fort bien avec vous.
Je donnerai à chacun ce qui lui revient, cela ne saurait me nuire. Je vivrai avec l'un comme avec l'autre ; et, quand même l'un de vous voudrait user de violence à mon égard et me refuser les vivres, je me retirerais aussitôt avec l'adverse partie, car je ne veux, sous aucun prétexte, que ma nourriture me manque.
Le corps.
Assurément je ne t'abandonnerai jamais.
L'âme.
Ni moi non plus, car nous sommes tous d'accord, et il est entendu, avant toutes choses, que l'offense envers Dieu forme un cas réservé, et que celui de nous qui péchera aura les deux autres contre lui.
Maintenant, au nom du Seigneur, partons, et, comme je suis la plus élevée en dignité, je ferai la première semaine.
Le corps.
J'en conviens. Mène-moi et fais de moi ce que veut la raison : voici l'amour-propre qui y consent comme moi.
A suivre...
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE II
Comment l'âme et le corps commencent à faire chacun leur semaine, et se restaurent tour à tour selon leur plaisir et leur goût.
L'âme :
Moi, qui suis pure et sans tache de péché, je commencerai par considérer le principe de ma création et tous les autres bienfaits que j'ai reçus de Dieu.
Je reconnais avoir été destinée à une grande béatitude et créée en si haute dignité, que je dépasse, pour ainsi dire, les choeurs des anges.
Je suis une âme presque divine ; je me sens attirée sans cesse à méditer purement, à contempler les choses du ciel, j'ai un désir continuel de manger le même pain que les anges.
Vraiment je suis invisible : je veux donc aussi que toute ma nourriture et toute ma joie consistent en des choses invisibles ; car j'ai été faite pour cette fin et j'y trouve mon repos.
Je n'éprouve que le besoin de me retrancher ici au-dessus des cieux, et de mettre tout le reste sous mes pieds ; je veux demeurer ; toute cette semaine dans ma contemplation, je ne tiens compte de rien autre ; que celui qui peut se nourrir de même se nourrisse, que celui qui ne le peut prenne patience...
Mais je vois que mes associés sont de mauvaise humeur, allons vers eux. — " Or ça, compagnons, j'ai achevé ma semaine ; toi, ô Corps, traite-moi dans la tienne comme tu voudras. Mais dites-moi comment vous vous êtes comportés durant la mienne ?".
L'amour-propre.
Nous avons été très mal, car ni amour-propre, ni corps mortel ne pénètrent dans les régions où tu as été ; nous n'avons pas eu la moindre nourriture, au contraire, nous sommes restés comme morts ; mais nous espérons bien prendre notre revanche.
Le corps.
Cette semaine est la mienne : viens avec moi, ô mon âme ; je veux te montrer combien de choses Dieu a faites pour moi.
Vois et admire le ciel avec tous leurs ornements, la mer avec ses poissons, l'air avec ses oiseaux ; et puis tant de royaumes, de seigneuries, de villes, de provinces, avec leur gloire et leur puissance ; tant de hautes dignités, de grands trésors, de chants, d'accords mélodieux, de mets de toute sorte, qui doivent me nourrir, et ne me manqueront jamais tant que je serai dans le monde ; contemple encore mille autres plaisirs dont je puis jouir sans offense de Dieu, parce que Dieu a créé tout cela pour moi ! — tu ne m'as pas montré ton pays comme je te montre le mien.
Toutefois, ne pouvant avoir ce que je désire si tu ne condescends à m'en accorder la jouissance, je dois te rappeler que tu as de grandes obligations envers moi ; ne songe donc plus à t'en aller dans ton pays et à me laisser ici, en terre, sans nourriture, tu n'en as pas le droit : j'en mourrais, tu en serais cause, et tu offenserais le Seigneur ; d'ailleurs nous serions tous contre toi.
J'ai sur toi l'avantage de pouvoir jouir de ces choses tant que je vivrai, puis enfin de jouir aussi de ton pays dans l'autre vie, si je me sauve avec toi, ainsi que je le désire.
Sache bien qu'il m'importe que tu te sauves, car je suis destiné à être toujours avec toi ; ne te persuade donc pas que je veuille rien rechercher qui soit contre la raison ou contre Dieu.
Demande à l'amour-propre, notre compagnon, si je ne dis pas la vérité.
Je n'ai pas de prétentions injustes, je m'en remets à son jugement. Je suis certain que, même selon les vues de Dieu, on ne peut exiger moins que ce que je réclame de ta part
CHAPITRE III
L'amour-propre blâme le corps et l'âme et veut les régler. Lamentation de l'âme. Le corps s'accorde avec l'amour-propre et réclame ses nécessités.
L'amour-propre.
J'ai examiné vos motifs, je les aurais trouvés raisonnables, si vous n'eussiez passé tous les deux les bornes, quant à l'ordre de la charité ; car Dieu a dit :
Aime ton prochain comme toi-même
.D'abord l'âme n'a tenu aucun compte de nous, de sorte que nous nous sommes trouvés presque en péril de mort.
Puis le Corps a montré à l'âme tant de choses, qu'il y avait excès, car elles n'étaient pas toutes nécessaires.
Ainsi, ô âme, il faut que tu modères ton impétuosité, et que tu condescendes aux besoins du prochain, c'est-à-dire, de ton corps, et aux miens encore, puisque je suis venu pour vivre avec vous.
Je n'ai rien trouvé qui me convienne dans ton pays : c'est le lieu où je puis le moins habiter ; et toi, ô Corps, qu'il te suffise d'avoir le nécessaire, car tout superflu te serait nuisible à toi-même, et à l'âme, si elle te l'accordait.
Mais si tu ne recherches aucune superfluité, chacun vivra modérément selon son rang, et je pourrai demeurer avec vous.
Étant unis de la sorte, nous participerons discrètement les uns aux biens des autres.
Pour pouvoir te servir de ton corps, ô âme, il est nécessaire que tu lui accordes ce dont il a besoin, autrement il mourra ; si tu as soin de lui donner ce qu'il lui faut, il se tiendra tranquille, tu en feras ce que tu voudras, vous serez en paix, et je resterai avec vous deux.
Si au contraire tu n'y consens, il faudra que je m'en aille, ne pouvant exister en votre compagnie.
Tel est mon avis.
L'âme.
Je suis fort mécontente et affligée de devoir condescendre au corps en tant de choses, et je crains qu'en m'obligeant à le repaître sous ce beau prétexte de nécessité, vous ne me poussiez à prendre part moi-même à ses plaisirs, et à perdre le plus pour le moins ; en vous voyant si affamés, j'ai peur que vous ne me donniez fort à faire et que vous ne me rendiez terrestre, de spirituelle que je suis ; car, en goûtant les choses terrestres, je perdrai le goût des choses spirituelles.
Et je crains aussi que mon intelligence ne s'obscurcisse et que ma volonté ne se souille.
Aidez-moi, ô mon Dieu !
Le corps.
Il me semble que l'amour-propre a dit tout ce qu'il y avait à dire, et que nous pouvons demeurer joyeusement en sa compagnie.
Quant à ce qui le touche, ô âme, tu dois comprendre que Dieu n'aurait pas créé les choses qu'il a faites, si elles devaient porter dommage aux âmes.
L'âme a été créée en si haute puissance et dignité, qu'elle ne peut être empêchée que par sa propre volonté, et cette volonté est si respectée de Dieu, que jamais il ne la force.
Donc ni moi, ni qui que soit, ne pourrons obtenir de toi que ce que tu voudras, de la manière et dans le temps qui te feront plaisir. Tu tiens la bride à la main, donne à chacun ce dont il a besoin, et, quant au reste, laisse crier qui voudra.
L'âme.
Quelles sont donc ces nécessités dont tu prétends ne pouvoir te passer ? Nomme-les-moi, j'y veux pouvoir afin de n'avoir à m'en occuper, car cette seule pensée me donne grand travail.
Le corps.
J'ai nécessité de me vêtir, de manger, boire et dormir, d'être soigné, et de me recréer en quelque chose, afin de pouvoir te servir lorsque tu auras besoin de moi ; et, si tu veux être en état de prêter attention au spirituel, garde-toi de me fatiguer.
Car, étant affaibli, je ne saurais être attentif à tes œuvres ; si, au contraire, tu condescends à mes nécessités, tu pourras recueillir ton esprit, et penser, que si Dieu a fait tant de choses charmantes pour ce corps mortel, il doit en avoir de bien autrement grandes pour toi, ô âme immortelle.
Ainsi Dieu sera toujours loué, et chacun de nous sera nourri suivant ses besoins. Si quelque différend survient encore entre vous, il sera réglé par notre amour-propre qui est extrêmement subtil, et il vivra avec nous, et nous avec lui, dans une très sainte paix.
L'âme
Or sus, je pourvoirai à vos nécessités, ne pouvant faire autrement ; mais je soupçonne que déjà vous êtes d'accord contre moi. Vos dires me semblent si fondés en justice, que je suis obligée d'y condescendre.
Cependant je vous tiens pour suspects, car je vous entends trop mettre en avant mes intérêts, et répéter que vous ne sauriez rien faire sans moi ; mais peut-être qu'avec l'aide de Dieu je me tirerai un jour de vos mains, et qu'alors je vivrai sans vous, uniquement pour son honneur.
Comment l'âme et le corps commencent à faire chacun leur semaine, et se restaurent tour à tour selon leur plaisir et leur goût.
L'âme :
Moi, qui suis pure et sans tache de péché, je commencerai par considérer le principe de ma création et tous les autres bienfaits que j'ai reçus de Dieu.
Je reconnais avoir été destinée à une grande béatitude et créée en si haute dignité, que je dépasse, pour ainsi dire, les choeurs des anges.
Je suis une âme presque divine ; je me sens attirée sans cesse à méditer purement, à contempler les choses du ciel, j'ai un désir continuel de manger le même pain que les anges.
Vraiment je suis invisible : je veux donc aussi que toute ma nourriture et toute ma joie consistent en des choses invisibles ; car j'ai été faite pour cette fin et j'y trouve mon repos.
Je n'éprouve que le besoin de me retrancher ici au-dessus des cieux, et de mettre tout le reste sous mes pieds ; je veux demeurer ; toute cette semaine dans ma contemplation, je ne tiens compte de rien autre ; que celui qui peut se nourrir de même se nourrisse, que celui qui ne le peut prenne patience...
Mais je vois que mes associés sont de mauvaise humeur, allons vers eux. — " Or ça, compagnons, j'ai achevé ma semaine ; toi, ô Corps, traite-moi dans la tienne comme tu voudras. Mais dites-moi comment vous vous êtes comportés durant la mienne ?".
L'amour-propre.
Nous avons été très mal, car ni amour-propre, ni corps mortel ne pénètrent dans les régions où tu as été ; nous n'avons pas eu la moindre nourriture, au contraire, nous sommes restés comme morts ; mais nous espérons bien prendre notre revanche.
Le corps.
Cette semaine est la mienne : viens avec moi, ô mon âme ; je veux te montrer combien de choses Dieu a faites pour moi.
Vois et admire le ciel avec tous leurs ornements, la mer avec ses poissons, l'air avec ses oiseaux ; et puis tant de royaumes, de seigneuries, de villes, de provinces, avec leur gloire et leur puissance ; tant de hautes dignités, de grands trésors, de chants, d'accords mélodieux, de mets de toute sorte, qui doivent me nourrir, et ne me manqueront jamais tant que je serai dans le monde ; contemple encore mille autres plaisirs dont je puis jouir sans offense de Dieu, parce que Dieu a créé tout cela pour moi ! — tu ne m'as pas montré ton pays comme je te montre le mien.
Toutefois, ne pouvant avoir ce que je désire si tu ne condescends à m'en accorder la jouissance, je dois te rappeler que tu as de grandes obligations envers moi ; ne songe donc plus à t'en aller dans ton pays et à me laisser ici, en terre, sans nourriture, tu n'en as pas le droit : j'en mourrais, tu en serais cause, et tu offenserais le Seigneur ; d'ailleurs nous serions tous contre toi.
J'ai sur toi l'avantage de pouvoir jouir de ces choses tant que je vivrai, puis enfin de jouir aussi de ton pays dans l'autre vie, si je me sauve avec toi, ainsi que je le désire.
Sache bien qu'il m'importe que tu te sauves, car je suis destiné à être toujours avec toi ; ne te persuade donc pas que je veuille rien rechercher qui soit contre la raison ou contre Dieu.
Demande à l'amour-propre, notre compagnon, si je ne dis pas la vérité.
Je n'ai pas de prétentions injustes, je m'en remets à son jugement. Je suis certain que, même selon les vues de Dieu, on ne peut exiger moins que ce que je réclame de ta part
CHAPITRE III
L'amour-propre blâme le corps et l'âme et veut les régler. Lamentation de l'âme. Le corps s'accorde avec l'amour-propre et réclame ses nécessités.
L'amour-propre.
J'ai examiné vos motifs, je les aurais trouvés raisonnables, si vous n'eussiez passé tous les deux les bornes, quant à l'ordre de la charité ; car Dieu a dit :
Aime ton prochain comme toi-même
.D'abord l'âme n'a tenu aucun compte de nous, de sorte que nous nous sommes trouvés presque en péril de mort.
Puis le Corps a montré à l'âme tant de choses, qu'il y avait excès, car elles n'étaient pas toutes nécessaires.
Ainsi, ô âme, il faut que tu modères ton impétuosité, et que tu condescendes aux besoins du prochain, c'est-à-dire, de ton corps, et aux miens encore, puisque je suis venu pour vivre avec vous.
Je n'ai rien trouvé qui me convienne dans ton pays : c'est le lieu où je puis le moins habiter ; et toi, ô Corps, qu'il te suffise d'avoir le nécessaire, car tout superflu te serait nuisible à toi-même, et à l'âme, si elle te l'accordait.
Mais si tu ne recherches aucune superfluité, chacun vivra modérément selon son rang, et je pourrai demeurer avec vous.
Étant unis de la sorte, nous participerons discrètement les uns aux biens des autres.
Pour pouvoir te servir de ton corps, ô âme, il est nécessaire que tu lui accordes ce dont il a besoin, autrement il mourra ; si tu as soin de lui donner ce qu'il lui faut, il se tiendra tranquille, tu en feras ce que tu voudras, vous serez en paix, et je resterai avec vous deux.
Si au contraire tu n'y consens, il faudra que je m'en aille, ne pouvant exister en votre compagnie.
Tel est mon avis.
L'âme.
Je suis fort mécontente et affligée de devoir condescendre au corps en tant de choses, et je crains qu'en m'obligeant à le repaître sous ce beau prétexte de nécessité, vous ne me poussiez à prendre part moi-même à ses plaisirs, et à perdre le plus pour le moins ; en vous voyant si affamés, j'ai peur que vous ne me donniez fort à faire et que vous ne me rendiez terrestre, de spirituelle que je suis ; car, en goûtant les choses terrestres, je perdrai le goût des choses spirituelles.
Et je crains aussi que mon intelligence ne s'obscurcisse et que ma volonté ne se souille.
Aidez-moi, ô mon Dieu !
Le corps.
Il me semble que l'amour-propre a dit tout ce qu'il y avait à dire, et que nous pouvons demeurer joyeusement en sa compagnie.
Quant à ce qui le touche, ô âme, tu dois comprendre que Dieu n'aurait pas créé les choses qu'il a faites, si elles devaient porter dommage aux âmes.
L'âme a été créée en si haute puissance et dignité, qu'elle ne peut être empêchée que par sa propre volonté, et cette volonté est si respectée de Dieu, que jamais il ne la force.
Donc ni moi, ni qui que soit, ne pourrons obtenir de toi que ce que tu voudras, de la manière et dans le temps qui te feront plaisir. Tu tiens la bride à la main, donne à chacun ce dont il a besoin, et, quant au reste, laisse crier qui voudra.
L'âme.
Quelles sont donc ces nécessités dont tu prétends ne pouvoir te passer ? Nomme-les-moi, j'y veux pouvoir afin de n'avoir à m'en occuper, car cette seule pensée me donne grand travail.
Le corps.
J'ai nécessité de me vêtir, de manger, boire et dormir, d'être soigné, et de me recréer en quelque chose, afin de pouvoir te servir lorsque tu auras besoin de moi ; et, si tu veux être en état de prêter attention au spirituel, garde-toi de me fatiguer.
Car, étant affaibli, je ne saurais être attentif à tes œuvres ; si, au contraire, tu condescends à mes nécessités, tu pourras recueillir ton esprit, et penser, que si Dieu a fait tant de choses charmantes pour ce corps mortel, il doit en avoir de bien autrement grandes pour toi, ô âme immortelle.
Ainsi Dieu sera toujours loué, et chacun de nous sera nourri suivant ses besoins. Si quelque différend survient encore entre vous, il sera réglé par notre amour-propre qui est extrêmement subtil, et il vivra avec nous, et nous avec lui, dans une très sainte paix.
L'âme
Or sus, je pourvoirai à vos nécessités, ne pouvant faire autrement ; mais je soupçonne que déjà vous êtes d'accord contre moi. Vos dires me semblent si fondés en justice, que je suis obligée d'y condescendre.
Cependant je vous tiens pour suspects, car je vous entends trop mettre en avant mes intérêts, et répéter que vous ne sauriez rien faire sans moi ; mais peut-être qu'avec l'aide de Dieu je me tirerai un jour de vos mains, et qu'alors je vivrai sans vous, uniquement pour son honneur.
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE IV
L'âme, le corps et l'amour-propre poursuivent leur voyage ; l'âme ne peut plus faire sa semaine entière, le corps augmente la sienne. L'âme se laisse persuader par l'amour-propre et du corps ; elle se lamente et propose de ne plus faire de semaine.
Le corps.
Poursuivons donc notre voyage, et allons d'accord de par le monde ; chacun s'occupera de ses affaires, cherchant à se repaître et à se charmer selon sa condition.
L'âme.
Je recommence à faire une semaine. Mais, hélas, elle est fort dissemblable de la première ; mes compagnons me tirent en bas, et mettent en avant leurs nécessités auxquelles il me faut pourvoir ; c'est ainsi que j'emploie mon temps, il m'en reste à peine la moitié pour moi-même, et cependant je suis avec eux du mieux que je puis.
Je me sens les épaules chargées du poids d'une énorme contrariété, lorsque je dois quitter une chose aussi auguste que la contemplation divine, pour songer à procurer de la nourriture aux bêtes.
Il y a une grande différence de cette semaine à l'autre, c'est presque du blanc au noir.
Le corps.
Voici ma semaine, je me sens affamé à cause des jeûnes que m'a fait l'âme, bien qu'elle corresponde à présent à mes besoins.
Je veux donc me repaître et me fortifier maintenant.
Je suis déjà très engraissé ; je ne crains pas que l'âme me cause du détriment avec sa semaine, d'autant qu'elle ne saurait plus se tenir à la hauteur de la première ; elle condescend à mes exigences et à celles de l'amour-propre ; nous faisons tous les jours des progrès, et nos avantages augmentent de telle sorte que j'ai ma semaine et la moitié de la sienne ; car mes nécessités croissent et deviennent plus grandes de jour en jour ; elle est incapable d'y résister.
L'âme.
Ô Amour-propre ! je reconnais maintenant que vous avez mis en avant mes intérêts pour m'obliger à condescendre à vos nombreux besoins ; je crains de dépasser toutes les bornes en me laissant guider par vous, qui êtes si pleins de vous-mêmes, et qu'à la fin nous ne nous en trouvions mal tous ensemble.
Mais toi, qui es notre intermédiaire, dis-moi au juste ce qu'il t'en semble ?
L'amour-propre.
Âme, tu t'étais tellement éloignée de nous, sans raison, et tu t'étais élevée à une si prodigieuse hauteur, qu'il te semble maintenant que c'est une grande affaire de céder aux nécessités d'au-trui ; peu à peu tu te règleras, notre compagnie ne te semblera plus aussi fâcheuse que maintenant ; ne crains rien, Dieu y pourvoira.
Tu peux être complètement heureuse dès ce monde ; ta béatitude sera en l'autre vie, prends maintenant ce que tu peux avoir, et fais du mieux que tu pourras.
L'âme.
Je le vois, je ne puis me défendre de vous, qui êtes dans votre demeure et unis contre moi.
Il m'est utile de faire ma semaine, car vous ne me laissez pas un seul jour de repos avec vos continuels besoins, et vous me prenez plus de temps pour y satisfaire qu'il ne m'en reste à moi.
Puis, quand vient le tour de la vôtre, vous l'exigez toute sans aucun empêchement, disant qu'elle vous appartient entière ; en somme, je ne m'en puis trouver que mal, de sorte que j'ai résolu de ne plus faire de semaine ; que chacun cherche sa vie et sa nourriture où il pourra. Je tâcherai de me comporter avec vous le mieux possible, ne sachant faire autrement.
Le corps et l'amour-propre.
Nous jugeons aussi que ce sera bien fait ; ainsi chacun vivra en paix sans sortir des justes bornes, toi, surtout, ô Âme, puisque tu as reconnu ton erreur.
CHAPITRE V
L'âme se laisse attirer aux délectations du corps et de l'amour-propre, et elle tombe dans l'abîme du péché.
Du peu de contentement que l'âme reçoit des choses de la terre, et du peu qu'il faut au corps pour se rassasier. De l'angoisse de l'âme.
Et, allant ainsi par le monde, l'un voulait une chose, l'autre une autre, et chacun se repaissait à sa guise.
L'âme cheminait en regardant les domaines du corps, et permettait à celui-ci beaucoup de choses qu'il affirmait lui être indispensables.
Mais les appétits du corps, unis avec l'amour-propre, croissaient de jour en jour, et ce dernier liait fortement tous ces appétits en un seul faisceau afin qu'ils demeurassent réunis.
Tout semblait raisonnable et nécessaire au corps et à l'amour-propre, jamais ils ne voulaient manquer de rien ; et, lorsque l'âme ne consentait pas chaque jour à quelque chose de nouveau, qui leur donnât nourriture nouvelle, ils murmuraient et disaient qu'on leur faisait tort.
L'âme se trouva plongée ainsi dans le vaste et profond océan de l'amour et de la délectation des choses de la terre ; elles s'unissaient toutes pour la transformer, de manière qu'on ne causait plus que de ce que voulaient le corps et l'amour-propre, et qu'on ne pensait plus à autre chose.
Et, lorsque cette âme désirait s'occuper d'elle-même, elle était tellement repoussée par les appétits désordonnés de ses compagnons qu'elle n'osait parler.
Mécontente, elle se disait alors :
"Si ceux-ci parviennent à me conduire aussi avant dans leur pays que je les ai menés dans le mien pendant la première semaine, qui pourra encore me retirer de leurs mains ?
Certes ils feront de moi ce qu'ils voudront, sous prétexte de leurs besoins."
Cependant cette âme, qui voulait essayer de vivre au moyen de quelque nourriture pour ne pas tomber dans l'abattement, et qui se sentait créée pour aimer et pour se réjouir, commença à se laisser aller au vent, malgré qu'il fût contraire au but de sa navigation.
Ne pouvant plus être en son pays, elle se nourrissait par les chemins de ce qu'elle trouvait.
Elle se disait aussi, sous prétexte de bien :
Ces beautés, ces bontés, ces joies, ces grandeurs et tous les ornements des choses créées sont des moyens pour connaître et goûter les choses divines ; puis elle ajoutait : — Oh que les choses célestes doivent être bonnes et belles !
Et en cheminant ainsi avec ses compagnons, elle perdait de jour en jour davantage l'instinct divin qui lui était naturel, et elle se repaissait de la nourriture des pourceaux et des bêtes, tout comme le corps, de sorte qu'en peu de temps les trois compagnons furent dans une union parfaite.
Se trouvant ainsi d'accord entre eux, en grand amour et paix, sans contradiction, je laisse à penser comment devait aller l'ordre de la raison supérieure. Personne n'en parlait plus. On n'était à la recherche que des biens de la terre.
Les goûts, les amours, les plaisirs, étaient tous terrestres ; les choses spirituelles paraissaient amères aux voyageurs, ils ne s'en occupaient point, et ne voulaient pas s'en occuper, de peur d'être troublés dans leurs jouissances.
Le voyage dura ainsi fort longtemps ; il ne restait à l'âme qu'un petit remords, dont elle tenait très peu de compte ; il est vrai que parfois elle en faisait plus de cas qu'habituellement, lorsque le risque de tout perdre à la fois, par la mort, lui revenait à la mémoire.
Alors elle éprouvait une grande crainte ; mais, ce moment passé, elle recommençait à agir comme auparavant.
Une seule chose était contraire aux associés, à savoir : que, bien qu'ils s'entendissent pour satisfaire leurs appétits de toute leur puissance, ils n'y pouvaient réussir ; car l'âme, l'une des trois alliés, étant d'une capacité infinie, et toutes les choses de la terre étant finies, il était impossible qu'elle arrivât à se rassasier, ou à avoir la paix.
Plus elle la cherchait, moins elle y arrivait ; car chaque jour elle s'éloignait davantage de Dieu, sa fin et son vrai repos.
Cependant les choses de ce monde aveuglèrent si fort cette âme, qu'elle se flatta de trouver le bonheur ici-bas.
Elle ne travaillait qu'à se rassasier et lorsqu'un objet ne la satisfaisait pas, ou même l'ennuyait, sa cécité intérieure la poussait à espérer en un nouveau caprice.
Passant de cette sorte d'une chose à l'autre, elle s'oubliait elle-même, elle perdait son temps à aller d'espérance en espérance, mais jamais elle n'atteignait son but ; Dieu, notre Seigneur, l'ayant ainsi miséricordieusement ordonné.
Certainement si l'homme pouvait trouver son repos en terre, peu d'âmes se sauveraient ; mais elles se transformeraient tellement en les choses d'ici-bas, qu'elles ne travailleraient plus à en sortir.
L'âme aspire par instinct naturel à se délecter ; lorsqu'elle est aveuglée par le corps, elle cherche toutes ses joies au moyen de ce dernier : alors le corps la mène d'objet en objet, afin qu'ils s'en nourrissent ensemble ; mais l'âme, étant capable de saisir l'infini, ne saurait découvrir, par l'entremise du corps, rien qui lui puisse procurer la paix ; et cependant, semblable à une insensée, elle se laisse guider par lui, sans en recevoir aucune satisfaction.
Le corps, au contraire, plus il convertit l'âme à lui-même, plus il a de moyens de se réjouir et de se rassasier des choses de la terre ; car toute la délectation que peut avoir le corps, il l'a uniquement par condescendance de l'âme, de telle sorte que si l'âme ne lui donnait pas son consentement, le corps resterait sans aucune joie.
Mais, comme il est étroitement uni avec l'âme à laquelle les choses de la terre ne suffisent pas, et que d'ailleurs il ne peut ni la suivre, ni lui donner autant de joie et de délices qu'elle en voudrait, il la tient affamée.
Ceci arrive nécessairement parce que le corps a des appétits qui peuvent se rassasier, et quand il a ce dont il avait besoin, en quelque genre que ce soit, il demeure satisfait et ne peut plus s'en délecter.
Il lui reste, à la vérité, un désir de chercher du nouveau pour suivre ses goûts naturels, cependant il a également bien vite assez de tout ce qu'il trouve, non que l'âme manque de condescendance, ou que la santé y mette obstacle, mais parce que sa capacité n'en saurait porter davantage.
Et il en résulte que le corps et l'âme demeurent ensemble dans la peine.
L'âme est angoissée de se voir en un vaisseau de si petite contenance, qu'un peu de nourriture contente, et dans lequel il faut qu'elle reste, bien qu'il la fasse mourir de faim, et qu'il l'empêche de satisfaire son instinct naturel et infini de délectation.
Son tourment est causé et augmenté par l'instinct de correspondance qui l'excite à se repaître par le moyen du corps, car avant que ce dernier ait satisfait son appétit, il semblerait que rien de ce qui a été créé ne puisse suffire pour l'apaiser ; et quand l'âme est ensuite forcée de reconnaître qu'une petite chose a rassasié ce compagnon si affamé, et qu'il ne peut plus réveiller son goût après l'avoir perdu, qu'il est travaillé parce qu'il est incapable de jouir des choses qui se présentent à lui, que plus il s'efforce en ses goûts, moins il les sent, et que s'il voulait se faire violence pour les recouvrer, il se mettrait en danger de mort, sans y réussir ; alors elle s'adresse, désolée, à l'amour-propre et lui dit :....
L'âme, le corps et l'amour-propre poursuivent leur voyage ; l'âme ne peut plus faire sa semaine entière, le corps augmente la sienne. L'âme se laisse persuader par l'amour-propre et du corps ; elle se lamente et propose de ne plus faire de semaine.
Le corps.
Poursuivons donc notre voyage, et allons d'accord de par le monde ; chacun s'occupera de ses affaires, cherchant à se repaître et à se charmer selon sa condition.
L'âme.
Je recommence à faire une semaine. Mais, hélas, elle est fort dissemblable de la première ; mes compagnons me tirent en bas, et mettent en avant leurs nécessités auxquelles il me faut pourvoir ; c'est ainsi que j'emploie mon temps, il m'en reste à peine la moitié pour moi-même, et cependant je suis avec eux du mieux que je puis.
Je me sens les épaules chargées du poids d'une énorme contrariété, lorsque je dois quitter une chose aussi auguste que la contemplation divine, pour songer à procurer de la nourriture aux bêtes.
Il y a une grande différence de cette semaine à l'autre, c'est presque du blanc au noir.
Le corps.
Voici ma semaine, je me sens affamé à cause des jeûnes que m'a fait l'âme, bien qu'elle corresponde à présent à mes besoins.
Je veux donc me repaître et me fortifier maintenant.
Je suis déjà très engraissé ; je ne crains pas que l'âme me cause du détriment avec sa semaine, d'autant qu'elle ne saurait plus se tenir à la hauteur de la première ; elle condescend à mes exigences et à celles de l'amour-propre ; nous faisons tous les jours des progrès, et nos avantages augmentent de telle sorte que j'ai ma semaine et la moitié de la sienne ; car mes nécessités croissent et deviennent plus grandes de jour en jour ; elle est incapable d'y résister.
L'âme.
Ô Amour-propre ! je reconnais maintenant que vous avez mis en avant mes intérêts pour m'obliger à condescendre à vos nombreux besoins ; je crains de dépasser toutes les bornes en me laissant guider par vous, qui êtes si pleins de vous-mêmes, et qu'à la fin nous ne nous en trouvions mal tous ensemble.
Mais toi, qui es notre intermédiaire, dis-moi au juste ce qu'il t'en semble ?
L'amour-propre.
Âme, tu t'étais tellement éloignée de nous, sans raison, et tu t'étais élevée à une si prodigieuse hauteur, qu'il te semble maintenant que c'est une grande affaire de céder aux nécessités d'au-trui ; peu à peu tu te règleras, notre compagnie ne te semblera plus aussi fâcheuse que maintenant ; ne crains rien, Dieu y pourvoira.
Tu peux être complètement heureuse dès ce monde ; ta béatitude sera en l'autre vie, prends maintenant ce que tu peux avoir, et fais du mieux que tu pourras.
L'âme.
Je le vois, je ne puis me défendre de vous, qui êtes dans votre demeure et unis contre moi.
Il m'est utile de faire ma semaine, car vous ne me laissez pas un seul jour de repos avec vos continuels besoins, et vous me prenez plus de temps pour y satisfaire qu'il ne m'en reste à moi.
Puis, quand vient le tour de la vôtre, vous l'exigez toute sans aucun empêchement, disant qu'elle vous appartient entière ; en somme, je ne m'en puis trouver que mal, de sorte que j'ai résolu de ne plus faire de semaine ; que chacun cherche sa vie et sa nourriture où il pourra. Je tâcherai de me comporter avec vous le mieux possible, ne sachant faire autrement.
Le corps et l'amour-propre.
Nous jugeons aussi que ce sera bien fait ; ainsi chacun vivra en paix sans sortir des justes bornes, toi, surtout, ô Âme, puisque tu as reconnu ton erreur.
CHAPITRE V
L'âme se laisse attirer aux délectations du corps et de l'amour-propre, et elle tombe dans l'abîme du péché.
Du peu de contentement que l'âme reçoit des choses de la terre, et du peu qu'il faut au corps pour se rassasier. De l'angoisse de l'âme.
Et, allant ainsi par le monde, l'un voulait une chose, l'autre une autre, et chacun se repaissait à sa guise.
L'âme cheminait en regardant les domaines du corps, et permettait à celui-ci beaucoup de choses qu'il affirmait lui être indispensables.
Mais les appétits du corps, unis avec l'amour-propre, croissaient de jour en jour, et ce dernier liait fortement tous ces appétits en un seul faisceau afin qu'ils demeurassent réunis.
Tout semblait raisonnable et nécessaire au corps et à l'amour-propre, jamais ils ne voulaient manquer de rien ; et, lorsque l'âme ne consentait pas chaque jour à quelque chose de nouveau, qui leur donnât nourriture nouvelle, ils murmuraient et disaient qu'on leur faisait tort.
L'âme se trouva plongée ainsi dans le vaste et profond océan de l'amour et de la délectation des choses de la terre ; elles s'unissaient toutes pour la transformer, de manière qu'on ne causait plus que de ce que voulaient le corps et l'amour-propre, et qu'on ne pensait plus à autre chose.
Et, lorsque cette âme désirait s'occuper d'elle-même, elle était tellement repoussée par les appétits désordonnés de ses compagnons qu'elle n'osait parler.
Mécontente, elle se disait alors :
"Si ceux-ci parviennent à me conduire aussi avant dans leur pays que je les ai menés dans le mien pendant la première semaine, qui pourra encore me retirer de leurs mains ?
Certes ils feront de moi ce qu'ils voudront, sous prétexte de leurs besoins."
Cependant cette âme, qui voulait essayer de vivre au moyen de quelque nourriture pour ne pas tomber dans l'abattement, et qui se sentait créée pour aimer et pour se réjouir, commença à se laisser aller au vent, malgré qu'il fût contraire au but de sa navigation.
Ne pouvant plus être en son pays, elle se nourrissait par les chemins de ce qu'elle trouvait.
Elle se disait aussi, sous prétexte de bien :
Ces beautés, ces bontés, ces joies, ces grandeurs et tous les ornements des choses créées sont des moyens pour connaître et goûter les choses divines ; puis elle ajoutait : — Oh que les choses célestes doivent être bonnes et belles !
Et en cheminant ainsi avec ses compagnons, elle perdait de jour en jour davantage l'instinct divin qui lui était naturel, et elle se repaissait de la nourriture des pourceaux et des bêtes, tout comme le corps, de sorte qu'en peu de temps les trois compagnons furent dans une union parfaite.
Se trouvant ainsi d'accord entre eux, en grand amour et paix, sans contradiction, je laisse à penser comment devait aller l'ordre de la raison supérieure. Personne n'en parlait plus. On n'était à la recherche que des biens de la terre.
Les goûts, les amours, les plaisirs, étaient tous terrestres ; les choses spirituelles paraissaient amères aux voyageurs, ils ne s'en occupaient point, et ne voulaient pas s'en occuper, de peur d'être troublés dans leurs jouissances.
Le voyage dura ainsi fort longtemps ; il ne restait à l'âme qu'un petit remords, dont elle tenait très peu de compte ; il est vrai que parfois elle en faisait plus de cas qu'habituellement, lorsque le risque de tout perdre à la fois, par la mort, lui revenait à la mémoire.
Alors elle éprouvait une grande crainte ; mais, ce moment passé, elle recommençait à agir comme auparavant.
Une seule chose était contraire aux associés, à savoir : que, bien qu'ils s'entendissent pour satisfaire leurs appétits de toute leur puissance, ils n'y pouvaient réussir ; car l'âme, l'une des trois alliés, étant d'une capacité infinie, et toutes les choses de la terre étant finies, il était impossible qu'elle arrivât à se rassasier, ou à avoir la paix.
Plus elle la cherchait, moins elle y arrivait ; car chaque jour elle s'éloignait davantage de Dieu, sa fin et son vrai repos.
Cependant les choses de ce monde aveuglèrent si fort cette âme, qu'elle se flatta de trouver le bonheur ici-bas.
Elle ne travaillait qu'à se rassasier et lorsqu'un objet ne la satisfaisait pas, ou même l'ennuyait, sa cécité intérieure la poussait à espérer en un nouveau caprice.
Passant de cette sorte d'une chose à l'autre, elle s'oubliait elle-même, elle perdait son temps à aller d'espérance en espérance, mais jamais elle n'atteignait son but ; Dieu, notre Seigneur, l'ayant ainsi miséricordieusement ordonné.
Certainement si l'homme pouvait trouver son repos en terre, peu d'âmes se sauveraient ; mais elles se transformeraient tellement en les choses d'ici-bas, qu'elles ne travailleraient plus à en sortir.
L'âme aspire par instinct naturel à se délecter ; lorsqu'elle est aveuglée par le corps, elle cherche toutes ses joies au moyen de ce dernier : alors le corps la mène d'objet en objet, afin qu'ils s'en nourrissent ensemble ; mais l'âme, étant capable de saisir l'infini, ne saurait découvrir, par l'entremise du corps, rien qui lui puisse procurer la paix ; et cependant, semblable à une insensée, elle se laisse guider par lui, sans en recevoir aucune satisfaction.
Le corps, au contraire, plus il convertit l'âme à lui-même, plus il a de moyens de se réjouir et de se rassasier des choses de la terre ; car toute la délectation que peut avoir le corps, il l'a uniquement par condescendance de l'âme, de telle sorte que si l'âme ne lui donnait pas son consentement, le corps resterait sans aucune joie.
Mais, comme il est étroitement uni avec l'âme à laquelle les choses de la terre ne suffisent pas, et que d'ailleurs il ne peut ni la suivre, ni lui donner autant de joie et de délices qu'elle en voudrait, il la tient affamée.
Ceci arrive nécessairement parce que le corps a des appétits qui peuvent se rassasier, et quand il a ce dont il avait besoin, en quelque genre que ce soit, il demeure satisfait et ne peut plus s'en délecter.
Il lui reste, à la vérité, un désir de chercher du nouveau pour suivre ses goûts naturels, cependant il a également bien vite assez de tout ce qu'il trouve, non que l'âme manque de condescendance, ou que la santé y mette obstacle, mais parce que sa capacité n'en saurait porter davantage.
Et il en résulte que le corps et l'âme demeurent ensemble dans la peine.
L'âme est angoissée de se voir en un vaisseau de si petite contenance, qu'un peu de nourriture contente, et dans lequel il faut qu'elle reste, bien qu'il la fasse mourir de faim, et qu'il l'empêche de satisfaire son instinct naturel et infini de délectation.
Son tourment est causé et augmenté par l'instinct de correspondance qui l'excite à se repaître par le moyen du corps, car avant que ce dernier ait satisfait son appétit, il semblerait que rien de ce qui a été créé ne puisse suffire pour l'apaiser ; et quand l'âme est ensuite forcée de reconnaître qu'une petite chose a rassasié ce compagnon si affamé, et qu'il ne peut plus réveiller son goût après l'avoir perdu, qu'il est travaillé parce qu'il est incapable de jouir des choses qui se présentent à lui, que plus il s'efforce en ses goûts, moins il les sent, et que s'il voulait se faire violence pour les recouvrer, il se mettrait en danger de mort, sans y réussir ; alors elle s'adresse, désolée, à l'amour-propre et lui dit :....
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE VI
Nouveau discours de l'âme avec l'amour-propre, afin de procéder d'une autre façon.
De la nature de l'amour-propre.
Du peu dont le corps a besoin pour se rassasier, en comparaison de ce qu'il demande. De quelle manière l'âme arrive à l'abîme de la misère et du désespoir.
L'Âme.
Oh, Amour-Propre, reconnais-tu maintenant que nous sommes tous les deux en peine et mal nourris ?
Vous m'avez fait condescendre à tel point à vos appétits, que je m'en trouve fort mal ; je ne me nourris plus au ciel, et en terre, vous me faites mourir de faim. Pour toi, que te semble de ce voyage ?
L'Amour-Propre.
Je vous vois mécontents tous deux, et tous deux vous avez raison de l'être : poursuivons cependant et avançons, peut-être découvrirons-nous en chemin quelque pâturage qui nous convienne à tous.
L'expérience m'a appris que le corps est bien vite rassasié, et je ne puis me nourrir moi même suivant ma capacité.
Je mange en un instant ce qui suffirait au corps pour une année ; songe donc, à ce que tu as à faire, toi qui as infiniment plus de capacité encore que moi.
Voici le parti qu'il nous faut prendre, allons cherchons ; il se peut que nous trouvions une nourriture plus convenable que celle que nous avons rencontrée jusqu'ici, et alors nous donnerons au corps de quoi satisfaire à ses besoins ; il se repaît de fort peu de chose en comparaison de nous deux ; et puis nous le laisserons crier tant qu'il voudra.
L' Âme.
De quelles viandes te nourris-tu ?
Et quel aliment pourrons-nous trouver qui nous contente tous deux, et qui rassasie également le corps ?
L'Amour-Propre.
Je suis de bonne composition, je me nourris de viandes terrestres et de viandes spirituelles, et, pourvu que tu ne me conduises pas là où tu as été pendant la première semaine, je saurai me repaître en tout lieu.
Quand je tiens compagnie à quelqu'un et que je trouve à vivre, je ne l'abandonne pour ainsi jamais, j'amasse assez de choses pour ne pas laisser mes adhérents dans le besoin : loin de là, je les enrichis tous.
L'Âme.
Je reconnais qu'en terre on ne saurait avoir cette nourriture qui nous contente tous deux, car elle n'y est pas assez abondante pour nous rassasier ; et quant au ciel, où il y en a à profusion, nous nous en sommes si fort éloignés que je ne sais ni ne puis retrouver la voie qui y mène ; Dieu nous a fermé les portes de sa grâce, et nous a laissés courir après nos appétits, du moment même où nous avons délibéré d'aller nous repaître des plaisirs de ce monde.
Maintenant que nous sommes confus et désespérés en nos pâturages, nous voudrions retourner vers lui ; mais nous y sommes poussés par la considération de notre avantage propre, et non point par cette vraie et pure charité que le Seigneur demande, et au moyen de laquelle il opère sans cesse en nous.
Quand je pense à tout ce que j'ai fait pour vous, à tout ce que j'ai justement perdu, je reconnais que je dois être en horreur à Dieu, à vous, au monde, et à l'enfer. Je suis quasi poussée au désespoir par la confusion que j'éprouve en voyant que votre direction m'a retournée vers ces choses d'ici-bas, où je pensais trouver quelque appui pour nos nécessités communes, tant que nous serions à habiter ensemble. Ayant essayé de tout, je reconnais qu'aucun de nous n'aurait de repos et de satisfaction réels, lors même qu'il posséderait tout ce que nous pourrions demander à la terre.
J'ai éprouvé aussi vos appétits, je les connais, je vous ai vus pleins d'ardeur pour en faire l'expérience en vos sens, mais ils étaient bien vite rassasiés ; et ils demeuraient confus du peu de plaisir qu'ils recevaient des choses mêmes qu'ils avaient désirées avec le plus d'impétuosité : toutefois, bien que confus, ils ne sentaient pas la confusion, ils espéraient toujours en l'avenir et toujours aussi l'avenir reproduisait les mêmes déceptions.
Lorsque vos appétits étaient rassasiés, je demeurais affamée : et quand je voulais retourner à mon pays, afin de me nourrir d'une façon conforme à mon inclinaison, je ne trouvais plus la correspondance à laquelle j'étais accoutumée, parce que je m'étais éloignée de ma première voie, laquelle était pure, droite, nette et propre à toutes les opérations spirituelles.
Je m'en étais séparée pour consentir aux désordres du corps, sous prétexte de ses nécessités ; après la nécessité, est venue la superfluité ; en peu de temps, je me suis vue enveloppée du péché, captive dans ses liens, j'ai perdu la grâce, je suis restée aveugle et pesante ; de spirituelle je suis devenue toute terrestre, et maintenant, misérable que je suis, je me sens en tel état, que je ne puis plus me mouvoir que vers la terre. Celle-ci m'attire à tout mal, car je suis un être exilé de son pays ; je me laisse entraîner par vous, ô Corps et Amour-Propre, en tous les lieux où il vous plaît de me conduire ; vous m'avez fait arriver au point de ne plus m'opposer à aucun de vos appétits.
Insensiblement vous m'avez tellement convertie, ou plutôt pervertie, que je me nourris de tout ce dont vous vous repaissez vous autres ; nous sommes si fort d'accord et unis, que semblable à un aveugle, je veux tout ce que vous voulez.
Ainsi, bien que je sois une âme spirituelle, je suis devenue pour ainsi dire un corps terrestre ; et, quant à toi, ô Amour-Propre, tu es si étroitement enchaîné avec nous, et tu nous tiens si inséparablement étreints, que moi, pauvre malheureuse, liée et suffoquée, je reste comme morte aux choses spirituelles.
Je suis privée de lumière et de goût intérieur ; je vais regardant avec les yeux, jouissant des choses terrestres et corporelles : il ne me reste plus rien de bon, qu'un remords intérieur, lequel est cause que j'ai peu de repos.
Et encore je cherche à m'oublier du mieux que je puis, avec ces choses de la terre dont je me nourris ; j'y passe, j'y perds mon temps, elles m'assujettissent de jour en jour davantage ; et plus je me sépare de Dieu, plus aussi je me trouve mécontente de m'être éloignée de mon bien qui est Dieu même.
Telles étaient les raisons qui faisaient souvent soupirer cette âme infortunée ; toutefois, elle ne démêlait pas la cause de sa douleur.
Cette cause était l'instinct naturel qui la poussait vers Dieu ; car, le Seigneur, qui est plein de bonté, n'abandonne pas sa créature, tant qu'elle est en cette vie, il lui donne fréquemment quelques bonnes inspirations et ainsi l'homme se sent aidé et assisté lorsqu'il y consent ; quant au contraire il résiste, son ingratitude envers la grâce prévenante le rend de plus en plus mauvais.
Cette âme malheureuse se trouva en peu de temps les épaules tellement chargées de péchés et d'ingratitude, sans y voir aucun remède, qu'il ne lui restait plus d'espérance de sortir de cet état.
Elle en vint au point, que non seulement elle prenait plaisir au péché, mais que même elle s'en vantait.
Plus elle avait reçu de grâce, plus son aveuglement était grand, plus aussi elle désespérait de revenir au bien.
Il était impossible qu'elle fût délivrée de sa misère par des moyens humains, Dieu seul pouvait l'en tirer par sa bonté infinie et par sa grâce.
Quant à elle, tous ses goûts, son amour, ses désirs, ses joies étaient dans les choses de la terre.
Elle avait le reste en haine, elle n'en pouvait pas même parler, sans un grand ennui ; et elle trouvait amer ce qui lui avait semblé jadis plein de charmes ; elle avait changé le goût du ciel en celui d'ici-bas.
CHAPITRE VII
De la lumière au moyen de laquelle Dieu fit voir à l'âme toutes ses chutes et l'état dans laquelle elle se trouvait.
De sa résignation, confiance et conversion.
La bonté de Dieu laissa pour un temps vagabonder cette âme dans les choses de ce monde, les nombreuses expériences qu'elle fit lui causèrent un profond dégoût ; loin de la satisfaire jamais, elles l'avaient de plus en plus fatiguée ; alors ce Dieu miséricordieux lui envoya une lumière qui lui ouvrit l'intelligence et lui fit connaître toutes ses erreurs et les dangers dont le Tout-Puissant pouvait seul la délivrer encore.
L'âme voyant enfin où elle en était, et quelle était la voie qu'elle suivait ; reconnaissant que la mort corporelle en résultait d'un côté et celle de l'âme de l'autre, qu'elle se trouvait au milieu de ses ennemis, et se laissait mener par eux et comme une bête à la boucherie, et qu'encore il semblait qu'elle y allât gaîment ; l'âme, disons-nous demeura épouvantée, et, se tournant tout entière vers Dieu, elle lui dit avec un grand et lamentable soupir et de la meilleure façon qu'elle pût :
L'Âme.
Oh, malheureuse que je suis ! qui me tirera jamais de tant de maux ? Dieu seul peut m'en faire sortir.
Domine, facut videam lumen (Seigneur, faites-moi voir la lumière), afin que je puisse échapper à tous ces pièges.
Ayant imploré ainsi l'assistance de Dieu (car elle comprenait que sans cette assistance elle ne pouvait plus se mouvoir et qu'elle irait de mal en pis), l'âme mit aussitôt toute sa confiance en lui, et le laissa agir comme il voulait, et en la manière qu'il lui plaisait ; puis elle ajouta :
L'Âme.
Dorénavant je veux accepter de la bénigne main de Dieu tout ce qui m'arrivera... sauf les péchés, car ils sont tous miens, en les commettant on agit contre la volonté divine ; ils sont donc notre propriété, et toute propriété est péché volontaire.
Ce ferme propos que l'âme fit avec Dieu s'opéra secrètement en son esprit, sans aucune démonstration extérieure.
Or, quand Dieu voit que l'homme se défie de lui-même, qu'il s'abandonne, qu'il espère en la Providence, et attend d'elle tout le bien qu'il puisse avoir, alors le Seigneur ouvre sans délai sa sainte main pour pourvoir aux besoins de sa créature, il reste toujours à ses côtés, il frappe et il rentre si on le reçoit ; il fait sortir peu à peu ses ennemis, et ramène l'âme à l'innocence dans laquelle il l'avait créée. Dieu fait cela par divers moyens, chemins et états, selon ce qu'il peut opérer avec l'homme.
Maintenant nous parlerons de l'opération qu'il fait par son pur amour et de la manière dont il dépouille une âme de son amour-propre.
Nouveau discours de l'âme avec l'amour-propre, afin de procéder d'une autre façon.
De la nature de l'amour-propre.
Du peu dont le corps a besoin pour se rassasier, en comparaison de ce qu'il demande. De quelle manière l'âme arrive à l'abîme de la misère et du désespoir.
L'Âme.
Oh, Amour-Propre, reconnais-tu maintenant que nous sommes tous les deux en peine et mal nourris ?
Vous m'avez fait condescendre à tel point à vos appétits, que je m'en trouve fort mal ; je ne me nourris plus au ciel, et en terre, vous me faites mourir de faim. Pour toi, que te semble de ce voyage ?
L'Amour-Propre.
Je vous vois mécontents tous deux, et tous deux vous avez raison de l'être : poursuivons cependant et avançons, peut-être découvrirons-nous en chemin quelque pâturage qui nous convienne à tous.
L'expérience m'a appris que le corps est bien vite rassasié, et je ne puis me nourrir moi même suivant ma capacité.
Je mange en un instant ce qui suffirait au corps pour une année ; songe donc, à ce que tu as à faire, toi qui as infiniment plus de capacité encore que moi.
Voici le parti qu'il nous faut prendre, allons cherchons ; il se peut que nous trouvions une nourriture plus convenable que celle que nous avons rencontrée jusqu'ici, et alors nous donnerons au corps de quoi satisfaire à ses besoins ; il se repaît de fort peu de chose en comparaison de nous deux ; et puis nous le laisserons crier tant qu'il voudra.
L' Âme.
De quelles viandes te nourris-tu ?
Et quel aliment pourrons-nous trouver qui nous contente tous deux, et qui rassasie également le corps ?
L'Amour-Propre.
Je suis de bonne composition, je me nourris de viandes terrestres et de viandes spirituelles, et, pourvu que tu ne me conduises pas là où tu as été pendant la première semaine, je saurai me repaître en tout lieu.
Quand je tiens compagnie à quelqu'un et que je trouve à vivre, je ne l'abandonne pour ainsi jamais, j'amasse assez de choses pour ne pas laisser mes adhérents dans le besoin : loin de là, je les enrichis tous.
L'Âme.
Je reconnais qu'en terre on ne saurait avoir cette nourriture qui nous contente tous deux, car elle n'y est pas assez abondante pour nous rassasier ; et quant au ciel, où il y en a à profusion, nous nous en sommes si fort éloignés que je ne sais ni ne puis retrouver la voie qui y mène ; Dieu nous a fermé les portes de sa grâce, et nous a laissés courir après nos appétits, du moment même où nous avons délibéré d'aller nous repaître des plaisirs de ce monde.
Maintenant que nous sommes confus et désespérés en nos pâturages, nous voudrions retourner vers lui ; mais nous y sommes poussés par la considération de notre avantage propre, et non point par cette vraie et pure charité que le Seigneur demande, et au moyen de laquelle il opère sans cesse en nous.
Quand je pense à tout ce que j'ai fait pour vous, à tout ce que j'ai justement perdu, je reconnais que je dois être en horreur à Dieu, à vous, au monde, et à l'enfer. Je suis quasi poussée au désespoir par la confusion que j'éprouve en voyant que votre direction m'a retournée vers ces choses d'ici-bas, où je pensais trouver quelque appui pour nos nécessités communes, tant que nous serions à habiter ensemble. Ayant essayé de tout, je reconnais qu'aucun de nous n'aurait de repos et de satisfaction réels, lors même qu'il posséderait tout ce que nous pourrions demander à la terre.
J'ai éprouvé aussi vos appétits, je les connais, je vous ai vus pleins d'ardeur pour en faire l'expérience en vos sens, mais ils étaient bien vite rassasiés ; et ils demeuraient confus du peu de plaisir qu'ils recevaient des choses mêmes qu'ils avaient désirées avec le plus d'impétuosité : toutefois, bien que confus, ils ne sentaient pas la confusion, ils espéraient toujours en l'avenir et toujours aussi l'avenir reproduisait les mêmes déceptions.
Lorsque vos appétits étaient rassasiés, je demeurais affamée : et quand je voulais retourner à mon pays, afin de me nourrir d'une façon conforme à mon inclinaison, je ne trouvais plus la correspondance à laquelle j'étais accoutumée, parce que je m'étais éloignée de ma première voie, laquelle était pure, droite, nette et propre à toutes les opérations spirituelles.
Je m'en étais séparée pour consentir aux désordres du corps, sous prétexte de ses nécessités ; après la nécessité, est venue la superfluité ; en peu de temps, je me suis vue enveloppée du péché, captive dans ses liens, j'ai perdu la grâce, je suis restée aveugle et pesante ; de spirituelle je suis devenue toute terrestre, et maintenant, misérable que je suis, je me sens en tel état, que je ne puis plus me mouvoir que vers la terre. Celle-ci m'attire à tout mal, car je suis un être exilé de son pays ; je me laisse entraîner par vous, ô Corps et Amour-Propre, en tous les lieux où il vous plaît de me conduire ; vous m'avez fait arriver au point de ne plus m'opposer à aucun de vos appétits.
Insensiblement vous m'avez tellement convertie, ou plutôt pervertie, que je me nourris de tout ce dont vous vous repaissez vous autres ; nous sommes si fort d'accord et unis, que semblable à un aveugle, je veux tout ce que vous voulez.
Ainsi, bien que je sois une âme spirituelle, je suis devenue pour ainsi dire un corps terrestre ; et, quant à toi, ô Amour-Propre, tu es si étroitement enchaîné avec nous, et tu nous tiens si inséparablement étreints, que moi, pauvre malheureuse, liée et suffoquée, je reste comme morte aux choses spirituelles.
Je suis privée de lumière et de goût intérieur ; je vais regardant avec les yeux, jouissant des choses terrestres et corporelles : il ne me reste plus rien de bon, qu'un remords intérieur, lequel est cause que j'ai peu de repos.
Et encore je cherche à m'oublier du mieux que je puis, avec ces choses de la terre dont je me nourris ; j'y passe, j'y perds mon temps, elles m'assujettissent de jour en jour davantage ; et plus je me sépare de Dieu, plus aussi je me trouve mécontente de m'être éloignée de mon bien qui est Dieu même.
Telles étaient les raisons qui faisaient souvent soupirer cette âme infortunée ; toutefois, elle ne démêlait pas la cause de sa douleur.
Cette cause était l'instinct naturel qui la poussait vers Dieu ; car, le Seigneur, qui est plein de bonté, n'abandonne pas sa créature, tant qu'elle est en cette vie, il lui donne fréquemment quelques bonnes inspirations et ainsi l'homme se sent aidé et assisté lorsqu'il y consent ; quant au contraire il résiste, son ingratitude envers la grâce prévenante le rend de plus en plus mauvais.
Cette âme malheureuse se trouva en peu de temps les épaules tellement chargées de péchés et d'ingratitude, sans y voir aucun remède, qu'il ne lui restait plus d'espérance de sortir de cet état.
Elle en vint au point, que non seulement elle prenait plaisir au péché, mais que même elle s'en vantait.
Plus elle avait reçu de grâce, plus son aveuglement était grand, plus aussi elle désespérait de revenir au bien.
Il était impossible qu'elle fût délivrée de sa misère par des moyens humains, Dieu seul pouvait l'en tirer par sa bonté infinie et par sa grâce.
Quant à elle, tous ses goûts, son amour, ses désirs, ses joies étaient dans les choses de la terre.
Elle avait le reste en haine, elle n'en pouvait pas même parler, sans un grand ennui ; et elle trouvait amer ce qui lui avait semblé jadis plein de charmes ; elle avait changé le goût du ciel en celui d'ici-bas.
CHAPITRE VII
De la lumière au moyen de laquelle Dieu fit voir à l'âme toutes ses chutes et l'état dans laquelle elle se trouvait.
De sa résignation, confiance et conversion.
La bonté de Dieu laissa pour un temps vagabonder cette âme dans les choses de ce monde, les nombreuses expériences qu'elle fit lui causèrent un profond dégoût ; loin de la satisfaire jamais, elles l'avaient de plus en plus fatiguée ; alors ce Dieu miséricordieux lui envoya une lumière qui lui ouvrit l'intelligence et lui fit connaître toutes ses erreurs et les dangers dont le Tout-Puissant pouvait seul la délivrer encore.
L'âme voyant enfin où elle en était, et quelle était la voie qu'elle suivait ; reconnaissant que la mort corporelle en résultait d'un côté et celle de l'âme de l'autre, qu'elle se trouvait au milieu de ses ennemis, et se laissait mener par eux et comme une bête à la boucherie, et qu'encore il semblait qu'elle y allât gaîment ; l'âme, disons-nous demeura épouvantée, et, se tournant tout entière vers Dieu, elle lui dit avec un grand et lamentable soupir et de la meilleure façon qu'elle pût :
L'Âme.
Oh, malheureuse que je suis ! qui me tirera jamais de tant de maux ? Dieu seul peut m'en faire sortir.
Domine, facut videam lumen (Seigneur, faites-moi voir la lumière), afin que je puisse échapper à tous ces pièges.
Ayant imploré ainsi l'assistance de Dieu (car elle comprenait que sans cette assistance elle ne pouvait plus se mouvoir et qu'elle irait de mal en pis), l'âme mit aussitôt toute sa confiance en lui, et le laissa agir comme il voulait, et en la manière qu'il lui plaisait ; puis elle ajouta :
L'Âme.
Dorénavant je veux accepter de la bénigne main de Dieu tout ce qui m'arrivera... sauf les péchés, car ils sont tous miens, en les commettant on agit contre la volonté divine ; ils sont donc notre propriété, et toute propriété est péché volontaire.
Ce ferme propos que l'âme fit avec Dieu s'opéra secrètement en son esprit, sans aucune démonstration extérieure.
Or, quand Dieu voit que l'homme se défie de lui-même, qu'il s'abandonne, qu'il espère en la Providence, et attend d'elle tout le bien qu'il puisse avoir, alors le Seigneur ouvre sans délai sa sainte main pour pourvoir aux besoins de sa créature, il reste toujours à ses côtés, il frappe et il rentre si on le reçoit ; il fait sortir peu à peu ses ennemis, et ramène l'âme à l'innocence dans laquelle il l'avait créée. Dieu fait cela par divers moyens, chemins et états, selon ce qu'il peut opérer avec l'homme.
Maintenant nous parlerons de l'opération qu'il fait par son pur amour et de la manière dont il dépouille une âme de son amour-propre.
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE VIII
De plusieurs lumières que reçoit l'âme, et du pur amour de Dieu. De la syndérèse et du remords qu'il nous envoie.
D'abord, lorsque Dieu veut purger une âme de l'amour-propre, il lui envoie sa divine lumière, et lui fait voir une étincelle du pur amour qu'il nous porte, et les grandes choses qu'il a opérées et opère par cet amour.
Il lui montre aussi qu'il n'a aucun besoin de nous en quoi que ce soit, que nous lui sommes ennemis par beaucoup d'offenses commises, et que par notre nature nous sommes prompts à les commettre, car cette nature n'est guère propre qu'à mal faire.
Il montre encore à cette âme que nos fautes ne peuvent jamais assez l'irriter pour qu'il cesse de nous faire du bien, tant que nous sommes en ce monde.
Il semble au contraire que plus nous nous éloignons de lui par nos péchés, plus il nous rappelle par des stimulants et des inspirations diverses, afin que nous ne sortions pas tout à fait de son amour et qu'il puisse toujours nous aimer et agir pour notre utilité ; et, pour mieux arriver à cette fin, il prend une infinité de moyens et de voies, en sorte que toute âme attentive à cette vue s'écrie, pleine d'admiration :
" Qui suis-je donc, pour que Dieu paraisse n'avoir soin que de moi seule ?."
Et, entre autres choses, il lui fait connaître le pur et sincère amour avec lequel il nous a créés, nous et les anges, ne nous demandant que de lui rendre ce même amour et de rester toujours avec lui, et n'attendant rien en retour de ses bienfaits que l'union avec nous et l'obéissance.
Car Dieu n'eût assujetti à quelque chose notre père Adam, ainsi que sa postérité, après l'avoir fait de si grande excellence ; chacun, considérant les perfections de l'âme et du corps, et l'existence accompagnée de l'empire sur toutes les choses créées. Se serait cru Dieu en son particulier.
Et cependant le Seigneur n'obligea Adam qu'à une sujétion minime, afin qu'il reconnût toujours son Créateur et lui fût soumis.
Il fait voir encore à l'âme qu'il avait créé l'homme pour un plus grand bonheur, c'est-à-dire afin qu'il fût placé un jour en âme et en corps dans la patrie céleste.
Puis il lui montre la disgrâce qu'avait encourue l'âme par le péché, laquelle disgrâce ne pouvait être réparée que par une nouvelle démonstration d'amour qui devait nécessairement être faite.
Il lui fait connaître aussi l'amour ardent que nous témoigna ici-bas Notre-Seigneur Jésus-Christ en tout ce qu'il a fait depuis le moment de son Incarnation jusqu'à celui de son Ascension, afin de nous délivrer de la damnation éternelle.
Dieu montra en un instant, par son opération très pure, toutes ces choses à l'âme dont nous écrivons l'histoire.
Puis par après il lui fit voir la liberté en laquelle il l'avait créée, ne l'assujettissant à aucune créature, mais uniquement à son créateur, et la douant d'un franc arbitre, qui, tant qu'elle est en cette vie, ne peut être contraint par personne, ni en terre, ni au ciel.
Il lui fit comprendre aussi la patience avec laquelle il l'avait attendue et supportée, quoiqu'elle fut souillée de tant de péchés, qu'en mourant en cet état elle eût été justement damnée pour l'éternité.
Il lui démontra encore qu'elle avait été plusieurs fois en danger de mort et qu'il l'en avait délivrée par pur amour, afin qu'elle eût le temps de reconnaître son erreur et d'échapper à la damnation.
Il lui rappela ensuite les inspirations qu'il lui avait données pour la retirer du péché, et il lui fit voir que bien qu'elle n'y eût pas correspondu, et qu'elle eût fait tout le contraire de la volonté divine, sa miséricorde n'avait pas cessé, pour cela, de l'attirer, tantôt par un autre, en flattant son libre arbitre, et en le forçant, pour ainsi dire, à faire ce que voulait sa bonté.
Il lui montra de plus qu'il avait opéré en cela avec tant de soins et de patience, qu'on ne peut s'en faire une idée par comparaison avec quelque grand amour humain que ce soit qui ait jamais existé sur la terre.
Dieu fit comprendre également à cette âme que la grandeur de son amour ne lui permet jamais de s'irriter complètement contre l'homme ; que toujours il l'aime, cherche à s'unir avec lui, et que jamais cette tendance à l'union ne manque de son côté.
C'est pourquoi il ne cesse d'opérer envers nous par son pur amour, lequel brûle, mais ne se consume pas. Il ne se montre terrible et redoutable qu'au péché, car la moindre imperfection ne peut subsister auprès de lui ; il hait le péché seul, parce que, seul aussi, le péché empêche son amour d'opérer en nous ; et n'étaient la misère et la gravité du péché, les démons eux-mêmes seraient enflammés de l'amour divin.
En outre, il lui montra qu'il avait toujours en mains des rayons ardents d'amour, pour embraser et pénétrer les coeurs des hommes, et que c'était le péché qui s'opposait à lui.
Ôtez donc le péché et tout sera en paix ; replacez le péché et tout sera dans le trouble.
Elle reconnut aussi que l'amour de Dieu envers l'homme, quelque grand pécheur que soit ce dernier, ne pouvait être assez complètement éteint pour qu'il cessât de le supporter tant qu'il est en cette vie ; mais qu'au delà de l'existence présente tout devient haine et fureur éternelle.
Cependant elle vit un rayon de la miséricorde reluire même en enfer.
Car l'homme impie mériterait une peine infinie en temps infini ; et la miséricorde éternelle, si elle ne termine pas la peine dans le temps, la termine en intensité : Dieu pouvait donc condamner en toute justice l'impie à une peine plus grande que celle qu'il lui a infligée.
Cette âme vit encore un certain rayon d'amour sortir de la source divine, et se diriger vers l'homme pour le faire mourir à lui-même ; et il lui fut montré que lorsque ce rayon rencontre des obstacles, il en résulterait une des plus grandes peines que Dieu pût avoir, s'il était possible que Dieu eût de la peine.
Et il lui semblait que ce rayon n'avait autre chose à faire que de chercher à pénétrer l'âme, et que si elle n'en était pas pénétrée, la faute en était à l'âme seule.
Car le rayon l'entoure de toutes parts pour y entrer ; mais l'âme, lorsqu'elle est aveuglée par l'amour-propre, ne l'aperçoit pas.
Et elle comprit que lorsque Dieu voit une âme se damner, sans pouvoir la pénétrer à cause de son obstination, il semble dire : " L'amour que je lui porte est si grand, que jamais je ne voudrais l'abandonner."
Quant à l'âme, privée de l'amour divin, elle devient quasi aussi maligne, que cet amour lui-même est suave et bon. (Je dis quasi, parce que Dieu lui fait encore quelque miséricorde.)
Il lui parut que le Seigneur disait encore :
"Par ma volonté, je ne voudrais jamais que tu te damnasses : l'amour que je ressens pour toi est tel, que s'il m'était possible de souffrir à ta place, je le ferais avec joie ; mais, l'amour ne pouvant demeurer avec le péché, je suis forcé de t'abandonner. Unie à moi, tu serais capable de toute béatitude ; mais séparée de moi, tu deviens capable de mal."
Elle vit encore tant d'opérations et tant d'effets de l'amour envers les âmes, qu'on ne saurait les expliquer en aucun langage.
Or, ce fut précisément ce rayon d'amour qui frappa l'âme dont nous parlons.
Au même instant, elle aperçut et sentit un certain feu sorti de la source divine et qui la mit immédiatement presque hors d'elle-même.
Elle demeura sans intelligence, sans parole ni sentiment et tout occupé dès lors de cet amour pur et simple, tel que Dieu le lui montra. Cette vue me sortit plus jamais de son esprit, et toujours elle vit le pur amour tourné vers elle.
Mais il lui fut montré aussi qu'elle n'avait pas répondu à cet amour ; elle vit la grandeur des défauts dans lesquels elle se reconnut, et elle comprit ce qu'elle eût été capable de faire envers le pur amour.
Elle éprouva alors un tel mépris d'elle-même et un tel abaissement qu'elle eût volontiers publié ses péchés dans la ville entière ; elle ne pouvait plus proférer autre chose que ces mots, accompagnés d'un cri intérieur qui lui transperçait le cœur :
" Ô Seigneur, plus jamais ni monde ni péché."
Néanmoins cette dernière connaissance ne l'empêchait pas de voir continuellement le premier amour, infus par le rayon dont il a été question ci-dessus, et cette vue opérait sans cesse ; il en résultait que cette âme était toujours occupée du pur amour, à la lumière duquel elle apercevait toutes les autres choses, celles surtout dont elle avait à se purger.
Ce n'était pas d'ailleurs à cause du châtiment mérité, qu'elle estimé la grièveté de ses péchés, mais uniquement parce qu'ils offensaient la si grande bonté de Dieu ; car elle voyait le très pur amour que le Seigneur portait à l'âme ; ce pur amour lui fut toujours laissé au coeur, et sans cesse il retournait du coeur vers Dieu, duquel il était descendu.
Il le poussait à s'anéantir de façon à faire toutes ses opérations avec la netteté qu'elle sentait en elle. Et elle demeura si étroitement unie au rayon divin que dès lors rien de ce qui est au-dessous de Dieu ne put se poser entre le rayon et l'âme, c'est-à-dire quant à la volonté et à l'affection.
CHAPITRE IX
L'âme parle au corps et à l'amour-propre de la vérité qu'elle a vue, et leur dit qu'elle se perdait en les suivant.
Elle les menace de leur faire à eux ce qu'ils avaient voulu lui faire à elle, et de se les assujettir. – Du mécontentement qu'ils en eurent
L’âme ayant contemplé les grandes opérations de l’amour accomplis en elles avec tant de pureté et sollicitude, s’arrêta, et dit au Corps et à l’Amour-Propre :
L’Âme.
J’ai vu le bien que l’amour de Dieu veut faire en moi, et je ne me soucie plus de vous ; car je reconnais véritablement qu’en m’occupant de vous je me perdrais ; — si je ne le savais par expérience, je ne croirais pas.
Sous prétexte de bien et de nécessité, vous m’avez menée jusqu’à la mort du péché, et il n’a pas tenu à vous que je ne sois arrivée à la damnation éternelle.
Maintenant, j’ai l’intention de vous faire à vous-mêmes ce que vous vouliez me faire à moi, je n’aurai plus pour vous d’autres égards que ceux que l’on a pour les ennemis mortels.
N’ayez pas la pensée de réussir jamais à vous entendre avec moi, perdez-en l’espérance aussi complètement que les damnés.
Je vais m’efforcer de retourner à cette première voie que j’avais suivie d’abord, et dont vous m’avez fait sortir par vos fourberies ; j’espère — moyennant la divine lumière —, que vous ne me tromperez plus, et je pense cependant diriger si bien les choses, que chacun aura ce dont il a besoin.
Si vous m’avez poussée à agir contre mon devoir, pour satisfaire à vos appétits — je vous conduirai, à mon tour, où vous ne voudrez pas aller, pour satisfaire à l’esprit.
Je ne me soucierai pas plus de votre dommage, dussiez-vous en mourir, que vous ne vous êtes souciés de moi, qui m’étais livrée à vous de telle sorte que vous faisiez de moi tout ce que vous vouliez.
J’espère vous assujettir assez complètement pour vous tirer hors de votre être naturel.
Quand le Corps et l’Amour-Propre virent que l’Âme avait trop de lumières pour qu’ils pussent la tromper encore,, ils en furent très mécontents, et dirent :
Le Corps et l’Amour-Propre.
Ô Âme, nous te sommes soumis ; — que la justice soit sauve, puis fait de nous ce qui te plaira.
Si nous ne pouvons vivre autrement, nous vivrons de rapine ; — tu feras contre nous tout ce que tu pourras — ; de notre côté, nous te ferons tout le mal dont nous serons capables ; à la fin, chacun sera payé selon ce qu’il aura mérité.
L’Âme.
Je veux cependant vous donner encore un motif de consolation ; le voici :
Tandis que nous avancerons de cette sorte, vous semblerez désolés ; mais quand je vous aurai privés de vos superfluités — ce qui à la vérité vous causera d’abord grand peine —, vous finirez par vous réjouir de tout ce que j’aurai dit et fait, et vous deviendrez éternellement participants de mon bien avec moi-même.
Disposez-vous donc à la patience ; un jour nous goûterons tous la paix divine.
À présent, je ne vous accorderai que votre strict nécessaire, plus tard vous aurez t out ce que vous voudrez ; — je vous mènerai à une satisfaction si grande et si certaine, que vous-mêmes, et dès la vie présente, ne pourrez plus désirer autre chose.
Jusqu’à ce jour, vous n’avez trouvé encore moyen de vous contenter parfaitement, quelles que soient les choses dont vous avez joui, et bien que — comme vous le savez fort bien —, vous ayez essayé de tout ; maintenant, j’espère vous conduire en un lieu de grand contentement qui durera toujours. Ce contentement commencera peu à peu, et il croîtra de telle sorte que finalement la paix de l’âme, qui se communiquera au corps, suffirait pour adoucir mille enfers.
Toutefois, avant que je puisse vous faire arriver à cet état, il y aura fort à faire ; cependant ; — moyennant la lumière et l’aide de Dieu —, j’espère que nous y parviendrons tous sains et saufs ; — que cette assurance vous donne du courage, car maintenant je ne parlerai plus, j’agirai.
Le Corps.
Je te vois si terrible et si décidée o me courir sus, que j’ai peur que tu ne te livres à quelque excès, et que nous ne nous en trouvions mal tous les deux.
Je veux donc te rappeler diverses choses, et t’adresser quelques prières, puis je te laisserai faire à ta guise.
Souviens-toi qu’après l’amour de Dieu vient l’amour du prochain, lequel, en ce qui concerne les choses physiques, doit avoir ton propre corps pour premier objet ; tu es obligée de lui conserver non seulement la vie, mais encore la santé : tu ne peux faire moins que cela, si tu veux parvenir à ce que tu as résolu.
Quant à la vie, je te déclare que je te suis nécessaire ; car, lorsque je serai mort, tu n’auras plus ni le moyen d’augmenter ta gloire, ni le temps de te purifier de toutes les imperfections, comme tu le désires : il faudra donc alors que tu passes par le purgatoire, et tu trouveras cette pénitence bien plus rude que de supporter un corps en ce monde.
Venons-en à la santé ; quand le corps est sain, les puissances de l'âme et les sens sont plus aptes à recevoir les lumières divines et les inspirations avec un sentiment de joie, lequel se communique de l'âme au corps ; si au contraire, je suis malade, tu seras privée de cet avantage, et de beaucoup d'autres encore, dont je ne parle pas, de peur d'être prolixe.
Je t'ai dit ce qui me semble à propos dans ton intérêt et dans le mien, afin que chacun de nous ait ce qui lui est dû, et que nous puissions parvenir au port du salut sans reproches au ciel ni en terre.
L'Âme.
Je suis instruite de tout ce que j'ai besoin de savoir : intérieurement, par la lumière divine ; extérieurement, par les raisons que tu m'as données, et par d'autres encore qui se devinent.
Mais désormais je veux qu'il ne soit plus question de raisons et de persuasions extérieures, et je n'aurai égard qu'aux motifs supérieurs.
Ceux-ci sont si bien ordonnés, qu'ils ne font injustice à qui que ce soit ; ils donnent à chacun ce dont il a besoin, de telle sorte que personne ne peut se plaindre que par sa propre faute.
Celui qui se lamente prouve simplement qu'il n'est pas encore bien réglé, et qu'il n'a pas soumis ses appétits à la raison supérieure.
Laisse-moi agir, ô Corps, je ferai en sorte que toi-même tu changeras d'avis, et tu vivras en si grand contentement, que si tu n'en faisais l'expérience tu ne le croirais toi-même.
J'ai été maîtresse une fois au commencement de notre association ; alors je voulais suivre les voies de l'esprit ; puis, par les tromperies, tu m'as induite à te traiter de frère, et, pour bien faire, nous nous sommes arrangés avec l'Amour-Propre, afin que l'un de nous ne supplantât pas l'autre ; mais peu à peu vous m'avez mené de telle sorte, que je me suis vue votre esclave, et que je ne pouvais plus agir que comme vous le vouliez.
Maintenant je suis décidée à redevenir maîtresse ; si tu consens à m'obéir en serviteur fidèle, j'en serai contente, et je ne te laisserai manquer de rien de ce qui est nécessaire à un serviteur : si au contraire tu refuses d'être mon serviteur, je te forcerai à devenir mon esclave ; et tu seras si maltraité qu'il te prendra envie de me servir par amour.
Tous les débats finiront ainsi ; car, en quelque façon que ce soit, je prétends être servie et rester maîtresse.
CHAPITRE X
L'âme reçoit la vue de la bonté et de la Providence de Dieu.
Des défauts et des péchés qui étaient en elle. De la considération de soi-même.
De la haine de l'âme contre son humanité.
Cette âme illuminée commença à voir de la sorte ; tous ses défauts, les désordres dans lesquels elle se trouvait, les périls que sans s'en douter, elle avait courus pour elle-même et pour le corps ; elle compris aussi qu'elle eût continué à rétrograder sans la providence de Dieu.
Elle demeura stupéfaite et ébahie à la vue de l'immense bonté du Seigneur envers l'homme, plongé dans tant de péchés, mais Dieu, lorsque la créature est disposée à reconnaître sa miséricorde et sa providence, lui montre tous les défauts auxquels il veut porter remède ; l'âme les découvre en un instant, à cette lumière surnaturelle.
L'âme ayant reçu ces deux connaissances certaines, claires et nettes, c'est-à-dire, celle de la bonté de la providence divine, et celle de l'état d'une âme plongée dans le péché et allant volontairement contre l'infinie miséricorde de Dieu, s'arrêta et dit :
L'Âme.
Ô Seigneur je ne veux plus jamais vous offenser, ni rien faire qui soit contraire à votre bonté ; car cette bonté incommensurable m'a remplie de confusion, et m'a si étroitement liée à vous, que j'ai résolu de ne plus me départir de vos disposition, quand bien même il devait m'en coûter mille vies corporelles.
Puis elle se retourna vers elle-même, considéra encore ses défauts et ses mauvais instinct, et se dit :
"Te trouves-tu maintenant bien ornée pour te présenter devant ton Seigneur ?
En quel état es-tu ?
Qui te tirera jamais de tant de misères ?
Tu vois à présent à quel point tu es hideuse et souillée, toi qui t'estimais si belle et si bonne !
Tu t'étais retirée en toi-même avec un amour-propre si démesuré, que tu croyais qu'il n'y avait pas d'autre paradis que de suivre la sensualité. De là vient tout le mal. Tu comprends aujourd'hui ce que sont, en présence de Dieu, toutes ces choses auxquelles tu aspirais ; elles ne sont en vérité que des opérations sataniques et infernales."
Ensuite l'âme, s'adressant à l'humanité avec un sentiment de haine profonde et pénétrante, s'écria :
"Je t'avertis, ô Humanité, que si désormais tu me parles de choses qui ne soient convenables, je t'en ferai endurer, qui seront au contraire fort convenables.
Je ne veux pas avoir d'égards pour toi que si tu étais un démon ; car tu as toujours fait des oeuvres diaboliques, tu en feras toujours et tu seras toujours disposée à en faire.
Et, puisque tu vois comme moi la grièveté de l'offense de Dieu, je ne comprendrais pas que tu eusses encore l'audace de penser à des choses, ou d'en proposer, qui seraient conformes à ton appétit, sachant bien que tu es toujours opposée à la volonté divine.
Mais je me donnerai garde de toi comme de Satan ; et, si tu t'avises de me tromper comme fait Satan, je t'infligerai une telle pénitence, que tu t'en souviendras une autre fois."
L'Humanité, ayant entendu le discours de l'âme, et reconnaissant la grandeur de ses offenses, ne répondit pas... Mais elle s'humilia comme un criminel qu'on mène au tribunal.
De plusieurs lumières que reçoit l'âme, et du pur amour de Dieu. De la syndérèse et du remords qu'il nous envoie.
D'abord, lorsque Dieu veut purger une âme de l'amour-propre, il lui envoie sa divine lumière, et lui fait voir une étincelle du pur amour qu'il nous porte, et les grandes choses qu'il a opérées et opère par cet amour.
Il lui montre aussi qu'il n'a aucun besoin de nous en quoi que ce soit, que nous lui sommes ennemis par beaucoup d'offenses commises, et que par notre nature nous sommes prompts à les commettre, car cette nature n'est guère propre qu'à mal faire.
Il montre encore à cette âme que nos fautes ne peuvent jamais assez l'irriter pour qu'il cesse de nous faire du bien, tant que nous sommes en ce monde.
Il semble au contraire que plus nous nous éloignons de lui par nos péchés, plus il nous rappelle par des stimulants et des inspirations diverses, afin que nous ne sortions pas tout à fait de son amour et qu'il puisse toujours nous aimer et agir pour notre utilité ; et, pour mieux arriver à cette fin, il prend une infinité de moyens et de voies, en sorte que toute âme attentive à cette vue s'écrie, pleine d'admiration :
" Qui suis-je donc, pour que Dieu paraisse n'avoir soin que de moi seule ?."
Et, entre autres choses, il lui fait connaître le pur et sincère amour avec lequel il nous a créés, nous et les anges, ne nous demandant que de lui rendre ce même amour et de rester toujours avec lui, et n'attendant rien en retour de ses bienfaits que l'union avec nous et l'obéissance.
Car Dieu n'eût assujetti à quelque chose notre père Adam, ainsi que sa postérité, après l'avoir fait de si grande excellence ; chacun, considérant les perfections de l'âme et du corps, et l'existence accompagnée de l'empire sur toutes les choses créées. Se serait cru Dieu en son particulier.
Et cependant le Seigneur n'obligea Adam qu'à une sujétion minime, afin qu'il reconnût toujours son Créateur et lui fût soumis.
Il fait voir encore à l'âme qu'il avait créé l'homme pour un plus grand bonheur, c'est-à-dire afin qu'il fût placé un jour en âme et en corps dans la patrie céleste.
Puis il lui montre la disgrâce qu'avait encourue l'âme par le péché, laquelle disgrâce ne pouvait être réparée que par une nouvelle démonstration d'amour qui devait nécessairement être faite.
Il lui fait connaître aussi l'amour ardent que nous témoigna ici-bas Notre-Seigneur Jésus-Christ en tout ce qu'il a fait depuis le moment de son Incarnation jusqu'à celui de son Ascension, afin de nous délivrer de la damnation éternelle.
Dieu montra en un instant, par son opération très pure, toutes ces choses à l'âme dont nous écrivons l'histoire.
Puis par après il lui fit voir la liberté en laquelle il l'avait créée, ne l'assujettissant à aucune créature, mais uniquement à son créateur, et la douant d'un franc arbitre, qui, tant qu'elle est en cette vie, ne peut être contraint par personne, ni en terre, ni au ciel.
Il lui fit comprendre aussi la patience avec laquelle il l'avait attendue et supportée, quoiqu'elle fut souillée de tant de péchés, qu'en mourant en cet état elle eût été justement damnée pour l'éternité.
Il lui démontra encore qu'elle avait été plusieurs fois en danger de mort et qu'il l'en avait délivrée par pur amour, afin qu'elle eût le temps de reconnaître son erreur et d'échapper à la damnation.
Il lui rappela ensuite les inspirations qu'il lui avait données pour la retirer du péché, et il lui fit voir que bien qu'elle n'y eût pas correspondu, et qu'elle eût fait tout le contraire de la volonté divine, sa miséricorde n'avait pas cessé, pour cela, de l'attirer, tantôt par un autre, en flattant son libre arbitre, et en le forçant, pour ainsi dire, à faire ce que voulait sa bonté.
Il lui montra de plus qu'il avait opéré en cela avec tant de soins et de patience, qu'on ne peut s'en faire une idée par comparaison avec quelque grand amour humain que ce soit qui ait jamais existé sur la terre.
Dieu fit comprendre également à cette âme que la grandeur de son amour ne lui permet jamais de s'irriter complètement contre l'homme ; que toujours il l'aime, cherche à s'unir avec lui, et que jamais cette tendance à l'union ne manque de son côté.
C'est pourquoi il ne cesse d'opérer envers nous par son pur amour, lequel brûle, mais ne se consume pas. Il ne se montre terrible et redoutable qu'au péché, car la moindre imperfection ne peut subsister auprès de lui ; il hait le péché seul, parce que, seul aussi, le péché empêche son amour d'opérer en nous ; et n'étaient la misère et la gravité du péché, les démons eux-mêmes seraient enflammés de l'amour divin.
En outre, il lui montra qu'il avait toujours en mains des rayons ardents d'amour, pour embraser et pénétrer les coeurs des hommes, et que c'était le péché qui s'opposait à lui.
Ôtez donc le péché et tout sera en paix ; replacez le péché et tout sera dans le trouble.
Elle reconnut aussi que l'amour de Dieu envers l'homme, quelque grand pécheur que soit ce dernier, ne pouvait être assez complètement éteint pour qu'il cessât de le supporter tant qu'il est en cette vie ; mais qu'au delà de l'existence présente tout devient haine et fureur éternelle.
Cependant elle vit un rayon de la miséricorde reluire même en enfer.
Car l'homme impie mériterait une peine infinie en temps infini ; et la miséricorde éternelle, si elle ne termine pas la peine dans le temps, la termine en intensité : Dieu pouvait donc condamner en toute justice l'impie à une peine plus grande que celle qu'il lui a infligée.
Cette âme vit encore un certain rayon d'amour sortir de la source divine, et se diriger vers l'homme pour le faire mourir à lui-même ; et il lui fut montré que lorsque ce rayon rencontre des obstacles, il en résulterait une des plus grandes peines que Dieu pût avoir, s'il était possible que Dieu eût de la peine.
Et il lui semblait que ce rayon n'avait autre chose à faire que de chercher à pénétrer l'âme, et que si elle n'en était pas pénétrée, la faute en était à l'âme seule.
Car le rayon l'entoure de toutes parts pour y entrer ; mais l'âme, lorsqu'elle est aveuglée par l'amour-propre, ne l'aperçoit pas.
Et elle comprit que lorsque Dieu voit une âme se damner, sans pouvoir la pénétrer à cause de son obstination, il semble dire : " L'amour que je lui porte est si grand, que jamais je ne voudrais l'abandonner."
Quant à l'âme, privée de l'amour divin, elle devient quasi aussi maligne, que cet amour lui-même est suave et bon. (Je dis quasi, parce que Dieu lui fait encore quelque miséricorde.)
Il lui parut que le Seigneur disait encore :
"Par ma volonté, je ne voudrais jamais que tu te damnasses : l'amour que je ressens pour toi est tel, que s'il m'était possible de souffrir à ta place, je le ferais avec joie ; mais, l'amour ne pouvant demeurer avec le péché, je suis forcé de t'abandonner. Unie à moi, tu serais capable de toute béatitude ; mais séparée de moi, tu deviens capable de mal."
Elle vit encore tant d'opérations et tant d'effets de l'amour envers les âmes, qu'on ne saurait les expliquer en aucun langage.
Or, ce fut précisément ce rayon d'amour qui frappa l'âme dont nous parlons.
Au même instant, elle aperçut et sentit un certain feu sorti de la source divine et qui la mit immédiatement presque hors d'elle-même.
Elle demeura sans intelligence, sans parole ni sentiment et tout occupé dès lors de cet amour pur et simple, tel que Dieu le lui montra. Cette vue me sortit plus jamais de son esprit, et toujours elle vit le pur amour tourné vers elle.
Mais il lui fut montré aussi qu'elle n'avait pas répondu à cet amour ; elle vit la grandeur des défauts dans lesquels elle se reconnut, et elle comprit ce qu'elle eût été capable de faire envers le pur amour.
Elle éprouva alors un tel mépris d'elle-même et un tel abaissement qu'elle eût volontiers publié ses péchés dans la ville entière ; elle ne pouvait plus proférer autre chose que ces mots, accompagnés d'un cri intérieur qui lui transperçait le cœur :
" Ô Seigneur, plus jamais ni monde ni péché."
Néanmoins cette dernière connaissance ne l'empêchait pas de voir continuellement le premier amour, infus par le rayon dont il a été question ci-dessus, et cette vue opérait sans cesse ; il en résultait que cette âme était toujours occupée du pur amour, à la lumière duquel elle apercevait toutes les autres choses, celles surtout dont elle avait à se purger.
Ce n'était pas d'ailleurs à cause du châtiment mérité, qu'elle estimé la grièveté de ses péchés, mais uniquement parce qu'ils offensaient la si grande bonté de Dieu ; car elle voyait le très pur amour que le Seigneur portait à l'âme ; ce pur amour lui fut toujours laissé au coeur, et sans cesse il retournait du coeur vers Dieu, duquel il était descendu.
Il le poussait à s'anéantir de façon à faire toutes ses opérations avec la netteté qu'elle sentait en elle. Et elle demeura si étroitement unie au rayon divin que dès lors rien de ce qui est au-dessous de Dieu ne put se poser entre le rayon et l'âme, c'est-à-dire quant à la volonté et à l'affection.
CHAPITRE IX
L'âme parle au corps et à l'amour-propre de la vérité qu'elle a vue, et leur dit qu'elle se perdait en les suivant.
Elle les menace de leur faire à eux ce qu'ils avaient voulu lui faire à elle, et de se les assujettir. – Du mécontentement qu'ils en eurent
L’âme ayant contemplé les grandes opérations de l’amour accomplis en elles avec tant de pureté et sollicitude, s’arrêta, et dit au Corps et à l’Amour-Propre :
L’Âme.
J’ai vu le bien que l’amour de Dieu veut faire en moi, et je ne me soucie plus de vous ; car je reconnais véritablement qu’en m’occupant de vous je me perdrais ; — si je ne le savais par expérience, je ne croirais pas.
Sous prétexte de bien et de nécessité, vous m’avez menée jusqu’à la mort du péché, et il n’a pas tenu à vous que je ne sois arrivée à la damnation éternelle.
Maintenant, j’ai l’intention de vous faire à vous-mêmes ce que vous vouliez me faire à moi, je n’aurai plus pour vous d’autres égards que ceux que l’on a pour les ennemis mortels.
N’ayez pas la pensée de réussir jamais à vous entendre avec moi, perdez-en l’espérance aussi complètement que les damnés.
Je vais m’efforcer de retourner à cette première voie que j’avais suivie d’abord, et dont vous m’avez fait sortir par vos fourberies ; j’espère — moyennant la divine lumière —, que vous ne me tromperez plus, et je pense cependant diriger si bien les choses, que chacun aura ce dont il a besoin.
Si vous m’avez poussée à agir contre mon devoir, pour satisfaire à vos appétits — je vous conduirai, à mon tour, où vous ne voudrez pas aller, pour satisfaire à l’esprit.
Je ne me soucierai pas plus de votre dommage, dussiez-vous en mourir, que vous ne vous êtes souciés de moi, qui m’étais livrée à vous de telle sorte que vous faisiez de moi tout ce que vous vouliez.
J’espère vous assujettir assez complètement pour vous tirer hors de votre être naturel.
Quand le Corps et l’Amour-Propre virent que l’Âme avait trop de lumières pour qu’ils pussent la tromper encore,, ils en furent très mécontents, et dirent :
Le Corps et l’Amour-Propre.
Ô Âme, nous te sommes soumis ; — que la justice soit sauve, puis fait de nous ce qui te plaira.
Si nous ne pouvons vivre autrement, nous vivrons de rapine ; — tu feras contre nous tout ce que tu pourras — ; de notre côté, nous te ferons tout le mal dont nous serons capables ; à la fin, chacun sera payé selon ce qu’il aura mérité.
L’Âme.
Je veux cependant vous donner encore un motif de consolation ; le voici :
Tandis que nous avancerons de cette sorte, vous semblerez désolés ; mais quand je vous aurai privés de vos superfluités — ce qui à la vérité vous causera d’abord grand peine —, vous finirez par vous réjouir de tout ce que j’aurai dit et fait, et vous deviendrez éternellement participants de mon bien avec moi-même.
Disposez-vous donc à la patience ; un jour nous goûterons tous la paix divine.
À présent, je ne vous accorderai que votre strict nécessaire, plus tard vous aurez t out ce que vous voudrez ; — je vous mènerai à une satisfaction si grande et si certaine, que vous-mêmes, et dès la vie présente, ne pourrez plus désirer autre chose.
Jusqu’à ce jour, vous n’avez trouvé encore moyen de vous contenter parfaitement, quelles que soient les choses dont vous avez joui, et bien que — comme vous le savez fort bien —, vous ayez essayé de tout ; maintenant, j’espère vous conduire en un lieu de grand contentement qui durera toujours. Ce contentement commencera peu à peu, et il croîtra de telle sorte que finalement la paix de l’âme, qui se communiquera au corps, suffirait pour adoucir mille enfers.
Toutefois, avant que je puisse vous faire arriver à cet état, il y aura fort à faire ; cependant ; — moyennant la lumière et l’aide de Dieu —, j’espère que nous y parviendrons tous sains et saufs ; — que cette assurance vous donne du courage, car maintenant je ne parlerai plus, j’agirai.
Le Corps.
Je te vois si terrible et si décidée o me courir sus, que j’ai peur que tu ne te livres à quelque excès, et que nous ne nous en trouvions mal tous les deux.
Je veux donc te rappeler diverses choses, et t’adresser quelques prières, puis je te laisserai faire à ta guise.
Souviens-toi qu’après l’amour de Dieu vient l’amour du prochain, lequel, en ce qui concerne les choses physiques, doit avoir ton propre corps pour premier objet ; tu es obligée de lui conserver non seulement la vie, mais encore la santé : tu ne peux faire moins que cela, si tu veux parvenir à ce que tu as résolu.
Quant à la vie, je te déclare que je te suis nécessaire ; car, lorsque je serai mort, tu n’auras plus ni le moyen d’augmenter ta gloire, ni le temps de te purifier de toutes les imperfections, comme tu le désires : il faudra donc alors que tu passes par le purgatoire, et tu trouveras cette pénitence bien plus rude que de supporter un corps en ce monde.
Venons-en à la santé ; quand le corps est sain, les puissances de l'âme et les sens sont plus aptes à recevoir les lumières divines et les inspirations avec un sentiment de joie, lequel se communique de l'âme au corps ; si au contraire, je suis malade, tu seras privée de cet avantage, et de beaucoup d'autres encore, dont je ne parle pas, de peur d'être prolixe.
Je t'ai dit ce qui me semble à propos dans ton intérêt et dans le mien, afin que chacun de nous ait ce qui lui est dû, et que nous puissions parvenir au port du salut sans reproches au ciel ni en terre.
L'Âme.
Je suis instruite de tout ce que j'ai besoin de savoir : intérieurement, par la lumière divine ; extérieurement, par les raisons que tu m'as données, et par d'autres encore qui se devinent.
Mais désormais je veux qu'il ne soit plus question de raisons et de persuasions extérieures, et je n'aurai égard qu'aux motifs supérieurs.
Ceux-ci sont si bien ordonnés, qu'ils ne font injustice à qui que ce soit ; ils donnent à chacun ce dont il a besoin, de telle sorte que personne ne peut se plaindre que par sa propre faute.
Celui qui se lamente prouve simplement qu'il n'est pas encore bien réglé, et qu'il n'a pas soumis ses appétits à la raison supérieure.
Laisse-moi agir, ô Corps, je ferai en sorte que toi-même tu changeras d'avis, et tu vivras en si grand contentement, que si tu n'en faisais l'expérience tu ne le croirais toi-même.
J'ai été maîtresse une fois au commencement de notre association ; alors je voulais suivre les voies de l'esprit ; puis, par les tromperies, tu m'as induite à te traiter de frère, et, pour bien faire, nous nous sommes arrangés avec l'Amour-Propre, afin que l'un de nous ne supplantât pas l'autre ; mais peu à peu vous m'avez mené de telle sorte, que je me suis vue votre esclave, et que je ne pouvais plus agir que comme vous le vouliez.
Maintenant je suis décidée à redevenir maîtresse ; si tu consens à m'obéir en serviteur fidèle, j'en serai contente, et je ne te laisserai manquer de rien de ce qui est nécessaire à un serviteur : si au contraire tu refuses d'être mon serviteur, je te forcerai à devenir mon esclave ; et tu seras si maltraité qu'il te prendra envie de me servir par amour.
Tous les débats finiront ainsi ; car, en quelque façon que ce soit, je prétends être servie et rester maîtresse.
CHAPITRE X
L'âme reçoit la vue de la bonté et de la Providence de Dieu.
Des défauts et des péchés qui étaient en elle. De la considération de soi-même.
De la haine de l'âme contre son humanité.
Cette âme illuminée commença à voir de la sorte ; tous ses défauts, les désordres dans lesquels elle se trouvait, les périls que sans s'en douter, elle avait courus pour elle-même et pour le corps ; elle compris aussi qu'elle eût continué à rétrograder sans la providence de Dieu.
Elle demeura stupéfaite et ébahie à la vue de l'immense bonté du Seigneur envers l'homme, plongé dans tant de péchés, mais Dieu, lorsque la créature est disposée à reconnaître sa miséricorde et sa providence, lui montre tous les défauts auxquels il veut porter remède ; l'âme les découvre en un instant, à cette lumière surnaturelle.
L'âme ayant reçu ces deux connaissances certaines, claires et nettes, c'est-à-dire, celle de la bonté de la providence divine, et celle de l'état d'une âme plongée dans le péché et allant volontairement contre l'infinie miséricorde de Dieu, s'arrêta et dit :
L'Âme.
Ô Seigneur je ne veux plus jamais vous offenser, ni rien faire qui soit contraire à votre bonté ; car cette bonté incommensurable m'a remplie de confusion, et m'a si étroitement liée à vous, que j'ai résolu de ne plus me départir de vos disposition, quand bien même il devait m'en coûter mille vies corporelles.
Puis elle se retourna vers elle-même, considéra encore ses défauts et ses mauvais instinct, et se dit :
"Te trouves-tu maintenant bien ornée pour te présenter devant ton Seigneur ?
En quel état es-tu ?
Qui te tirera jamais de tant de misères ?
Tu vois à présent à quel point tu es hideuse et souillée, toi qui t'estimais si belle et si bonne !
Tu t'étais retirée en toi-même avec un amour-propre si démesuré, que tu croyais qu'il n'y avait pas d'autre paradis que de suivre la sensualité. De là vient tout le mal. Tu comprends aujourd'hui ce que sont, en présence de Dieu, toutes ces choses auxquelles tu aspirais ; elles ne sont en vérité que des opérations sataniques et infernales."
Ensuite l'âme, s'adressant à l'humanité avec un sentiment de haine profonde et pénétrante, s'écria :
"Je t'avertis, ô Humanité, que si désormais tu me parles de choses qui ne soient convenables, je t'en ferai endurer, qui seront au contraire fort convenables.
Je ne veux pas avoir d'égards pour toi que si tu étais un démon ; car tu as toujours fait des oeuvres diaboliques, tu en feras toujours et tu seras toujours disposée à en faire.
Et, puisque tu vois comme moi la grièveté de l'offense de Dieu, je ne comprendrais pas que tu eusses encore l'audace de penser à des choses, ou d'en proposer, qui seraient conformes à ton appétit, sachant bien que tu es toujours opposée à la volonté divine.
Mais je me donnerai garde de toi comme de Satan ; et, si tu t'avises de me tromper comme fait Satan, je t'infligerai une telle pénitence, que tu t'en souviendras une autre fois."
L'Humanité, ayant entendu le discours de l'âme, et reconnaissant la grandeur de ses offenses, ne répondit pas... Mais elle s'humilia comme un criminel qu'on mène au tribunal.
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE XI
L'âme se retourne vers Dieu et reconnaît sa bassesse.
On lui montre ce qu'elle serait devenue si elle avait continué.
De ses lamentations et de son abattement à cause de ses offenses ; et de la confiance que lui donna Notre-Seigneur lui apparaissant en esprit.
De la plaie qu'elle reçut.
L'âme dirigea ensuite son regard vers Dieu, et ayant cette pure vue elle dit :
L'Âme.
Ô Seigneur, comment avez-vous été poussé à donner tant de lumières à une âme aveugle, fétide, hostile, qui vous fuyait, qui cheminait par des voies opposées à votre volonté et se repaissait toujours de choses sensuelles, à une âme qui ne désirait pas être tirée de son très mauvais état, et qui évitait pour cette raison tout ce qui l'en pouvait faire sortir ? je demeure stupéfaite en considérant ce que je suis, car je me reconnais une créature très vile.
Et cette âme étant dans cette allait disposition, il lui fut montré en quel lieu elle se trouvait, où elle allait, où elle serait arrivée, et ce qu'elle eût emporté finalement avec elle, en poursuivant la voie dans laquelle elle s'était engagée.
Elle aperçut en un instant ces choses telles qu'elles étaient, et telles qu'elles eussent été, si Dieu n'y eût pourvu.
A cette vue, elle resta comme morte, dans une si grande frayeur et souffrance, qu'elle paraissait hors d'elle-même ; et ne pouvant que pleurer, soupirer et gémir intérieurement, elle disait :
L'Âme.
Oh, que j'eusse été misérable et malheureuse, si j'avais continué de la sorte ! que de peines et de travaux je me forgeais en ce monde ! puis, après en l'autre vie, je me serais trouvé ennemie de Dieu, et condamnée à l'enfer pour l'éternité !
Elle resta pendant quelque temps absorbée par cette vision, laquelle lui causait une peine si intime, qu'elle ne pouvait penser à autre chose, ni faire aucun acte d'allégresse. Plongée dans la plus profonde mélancolie, elle ne savait que faire d'elle-même, car elle ne découvrait aucun lieu de repos ; elle ne le trouvait, ni au ciel, parce qu'elle sentait qu'elle n'y serait pas à sa place, ni en terre, parce qu'elle eût mérité d'y être engloutie ; de même, il lui semblait qu'il ne lui était permis, ni de paraître devant les hommes, ni d'avoir mémoire de rien qui eût rapport à sa commodité ou à son incommodité.
Elle reconnaissait que seule elle avait fait tout le mal ; seule aussi elle voulait satisfaire sans l'assistance de personne et elle s'écriait :
L'Âme.
Je le vois, ma place est en enfer.
Mais je ne la puis avoir qu'au moyen de la mort.
Hélas, mon Dieu, que ferais-je de moi ?
Je ne sais où me cacher, je cherche une retraite et je ne la trouve pas !
je n'ose comparaître en votre présence, étant couverte de souillures, et cependant je vous retrouve partout !
Dans cet état je me suis insupportable à moi-même, je suis revêtue d'une robe impure et pleine de taches !
Pleurer ne me sert de rien, soupirer ne m'aide point, ma contrition n'est pas acceptable, mes pénitences sont infructueuses : car comment satisfaire à la peine que méritent mes péchés, à moins que vous n'ayez pitié de moi et que vous ne m'aidiez, ô mon Dieu ?
L'Âme était ainsi dans une profonde désolation ; il lui semblait que jamais elle ne pourrait satisfaire, ni recourir à la miséricorde de Dieu ; elle ne découvrait en elle-même rien qui lui donnât confiance.
Elle se tourmentait ; elle ne voulait pas désespérer entièrement, et en même temps elle se voyait plier sous le poids du désespoir et reconnaissait la gravité du mal qu'elle avait fait.
Son coeur travaillé d'une douleur immense, accompagnée de larmes intérieures, sans que cependant elle pût pleurer ; elle soupirait en secret et consumait sa vie.
Elle était incapable de parler, de manger, de dormir, de rire, de regarder le ciel ; elle n'avait plus aucun goût, ni spirituel ni corporel ; elle ignorait où elle se trouvait, elle était comme une créature insensée, étonnée ; volontiers elle se fût cachée, afin qu'on ne la trouvât point, et qu'elle n'eût aucune occasion d'être en compagnie avec autrui.
Cette âme, en un mot, était tellement accablée et abîmée dans la vue des péchés qu'elle avait commis contre Dieu, qu'elle avait plutôt l'air d'une bête sauvage épouvantée que d'un être raisonnable.
Cela provenait de la claire connaissance qui lui avait été donnée, de la gravité de ses offenses et du grand dommage qui en résultait ; de manière que si elle eût conservé plus longtemps cette claire connaissance, son corps se fût consumé, quand même il eût été de diamant ; mais Dieu, après la lui avoir laissé assez pour qu'elle fût profondément imprimée en elle, la consola de la manière suivante :
“Notre- Seigneur lui apparut dans une vision intérieur ; il était couvert de sang de la tête aux pieds, de telle sorte qu'on eût dit que ce corps arrosait d'une pluie de sang tous les lieux où il allait ; et ces mots furent dits à l'Âme :
Vois-tu ce sang ?
Il a été répandu jusqu'à la dernière goutte pour l'amour de toi et pour la satisfaction de tes péchés.
Ces paroles lui firent une grande blessure d'amour pour Jésus-Christ, et lui inspirèrent une confiance telle, que la première impression de désespoir et qu'elle se réjouit un peu en son Seigneur.
CHAPITRE XII
D'une autre vue par laquelle Dieu montre à l'âme l'amour avec lequel il avait souffert pour elle. Elle reconnaît la malignité de l'homme et la bénignité du pur amour de Dieu. De l'offrande d'elle-même qu'elle fit à Dieu, et de la plaie qu'elle reçut. Des cinq fontaines de Jésus, de son consentement et de sa jalouse garde.
Elle eut une autre vision plus étonnante encore que la précédente et, plus admirable, qu'on ne saurait bien l'exprimer en langage humain, ni même l'imaginer par intelligence.
Ce fut la suivante. Jésus lui fit comprendre la grandeur de l'amour qui l'avait poussé à souffrir pour elle ; et, lorsque l'âme connut la pureté et la force de l'amour que lui portait le Seigneur, elle en reçut une si profonde blessure intérieure, qu'elle en ressentit plus que du mépris pour tout autre amour et pour tout autre objet qui eût pu se placer comme empêchement entre elle et Dieu.
Mais la connaissance de la perversité de l'homme lui fut donnée en même temps que l'intelligence de la bénigne et pure affection divine.
Cette double vue ne sortit plus jamais de la mémoire ; l'une y rappelait l'autre.
Et si, l'âme eût pu sonder un peu davantage cette infinie bonté de Dieu, opérant de si excellentes choses envers nous par pur amour, elle se fût anéantie à force de douceur.
Elle reconnut alors que c'est presque malgré la créature que Dieu agit constamment pour lui faire du bien.
Elle vit aussi que ce bon Dieu ne cesse pas, quel que soit le mal que l'homme commet, d'opérer une infinité de manières pour notre avantage, et que, loin de s'irriter de nos offenses, il travaille à notre amendement avec le plus pur amour, et en ayant toujours égard à ce qui nous est utile.
Se retournant ensuite vers elle-même, et estimant le degré de sa perversité d'après l'opposition qu'elle avait faite à la bonté de Dieu, cette âme commença à comprendre ce qu'est l'être propre de l'homme déchu, et elle le reconnut pour ainsi dire aussi mauvais et méchant que Dieu est bon.
Cette contemplation lui inspira un si profond dégoût d'elle-même, qu'à partir de ce moment elle ne put plus voir l'homme en aucune de ses puissances, que comme on voit le démon, c'est-à-dire avec toute sa perversité.
Si Dieu n'eût tempéré cette vue, l'âme et le corps en eussent été consumés, tout comme de l'intuition de l'amour du Seigneur envers nous.
Regardant dès lors ce mal comme incurable, elle ne voulut plus perdre son temps à y chercher quelque remède ; elle plaça toute sa confiance en Jésus, et elle lui dit :
"Seigneur, je me donne à vous, car je reconnais que par moi seule, je ne puis faire de moi qu'un enfer.
Je désire vous proposer un échange, et vous remettre entre les mains mon être malin (car vous pouvez l'ensevelir dans votre bonté, et me régler de telle sorte, qu'on ne voie plus en moi-même) ; vous me donnerez, par contre, l'occupation de votre pur amour, afin qu'il éteigne en moi tout autre sentiment, me fasse m'anéantir en vous, et me tienne tellement absorbée, qu'aucun objet étranger n'ait jamais ni temps, ni lieu de demeurer avec moi."
Son très doux Seigneur lui répondit qu'il acceptait l'échange, et en cet instant, la partie maligne de sa mémoire lui fut ôtée, et elle n'en eut plus jamais de souci.
Puis aussi un rayon d'amour fut répandu dans son coeur, et ce rayon était tellement ardent et pénétrant, et transperça si complètement cette âme en son intérieur, qu'il lui enleva tous les amours, appétits, délectations et propriétés, que jamais elle avait eus, ou pu avoir, en ce monde.
Elle demeura ainsi dépouillée, de toutes choses, avec un certain consentement de correspondance à l'amour qui lui avait été montré ; cet amour l'attirait, au point qu'elle en était étonnée, occupée, transformée, et hors d'elle-même.
Elle criait et soupirait incomparablement plus qu'à l'occasion de ce qu'elle avait vu d'abord, touchant la perversité de son propre être.
Ce rayon d'amour demeura imprimé en son coeur avec les cinq fontaines du Christ, desquelles découlent des gouttes d'un sang ardent et d'un amour enflammé pour l'homme.
Et Dieu lui octroya de pouvoir connaître ce qu'est l'homme, sans en éprouver de peine ; de telle sorte que l'âme contemplait à la fois et la malice humaine et la bonté divine, au degré quelle pouvait porter sans que la vie en souffrit.
La vue d'elle-même ne lui causait plus aucune douleur, car son Dieu très élément lui avait ôté toute affliction à cet égard ; et, cependant, elle voyait clairement ce qu'elle était, et comment le Seigneur la soutenait.
Il lui était montré aussi que pour peu que Dieu l'eût délaissée, elle eût été prête à faire toutes ses opérations avec autant de malignité que Satan lui-même.
Toutefois, étant entre les mains de Dieu, elle ne pouvait avoir aucune crainte ; elle se savait bien gardée.
Mais ce qui la crucifiait et la faisait se consumer était la vue de cet ardent de Dieu pour l'homme ; elle disait ne pouvoir expliquer le feu violent qu'elle en ressentait.
Cet amour que Dieu lui montrait l'invitait à repousser tout ce qui déplaisait au Seigneur, avec une jalousie extrême, et à exercer la surveillance la plus exacte sur tous les défauts, pour petits qu'ils fussent.
Ses yeux furent ouverts de façon à reconnaître non seulement les défauts, mais encore toutes les imperfections et habitudes inutiles, qu'elle eût jamais eues.
Cette connaissance lui donnait la force et la fermeté nécessaire pour retrancher toutes les superfluités, sans faire aucun cas de la contrariété qui en devait résulter.
Elle ne tenait pas plus de compte de l'humanité que si elle ne l'avait pas eue ; elle n'estimait ni la chair, ni le monde, ni le malin esprit.
Avec l'amour divin, elle se sentait plus forte que les peines et que les démons, car elle était unie à Dieu ; or, Dieu est la force véritable de ceux qui le craignent, l'aiment et le servent.
Elle comprenait, d'ailleurs, qu'elle ne pouvait se nuire à elle-même, parce qu'elle voyait sa partie propre entre les mains du Seigneur et surveillée par sa bonté.
CHAPITRE XIII
De l'instinct qui la pousse à s'ôter toutes les choses superflues, et même celles qui paraissent nécessaires ; de l'instinct qu'elle eut pour l'oraison, et de ses mortifications.
Dieu donna encore à cette âme l'instinct de se mépriser elle-même, de sorte que, pour ce qui la regardait, elle ne se souciait pas plus de toutes les choses qui se trouvent sous le ciel, que si elles n'eussent pas existé.
L'amour qu'elle éprouvait l'incita également à enlever à l'humanité non seulement les nourritures superflues, mais encore celles qui paraissaient nécessaires ; elle en fit autant pour les vêtements et pour les sociétés, bonnes ou mauvaises.
Cet amour l'attirait à la solitude d'esprit et de corps, et la réduisit à sa seule compagnie. Il réveilla de plus en elle l'instinct de l'oraison, de sorte qu'elle restait six ou sept heures de suite sur ses genoux nus, à l'encontre de la volonté de l"humanité ; bien qu'elle en souffrit beaucoup, elle n'en tenait aucun compte et ne refusait pas pour cela de demeurer prête à faire ce à quoi l'esprit l'attirait.
Tous ses mouvements étaient opérés par Dieu seul ; l'âme n'y avait aucun vouloir, ni aucun objet :
Dieu, qui en avait pris la direction, prétendait régler et diriger ce qui lui appartenait, et lui enlever les instincts qui étaient selon la chair et selon le monde pour y arriver, il lui en donnait de contraires.
Il ordonnait à sa créature de ne se nourrir, ni de fruits qui la délectaient naturellement et qui lui plaisaient beaucoup, ni de viande, ni de rien qui parût superflu ; on eût dit que toujours il avait en mains la mesure de ce qu'elle devait manger.
Et comme il voulait qu'elle perdit le goût des aliments, il lui fit tenir toujours sur elle de l'aloès épatique et de l'agaric pulvérisée, et quand elle s'apercevait de quelque saveur, ou qu'il lui semblait que telle chose lui plaisait plus que telle autre, elle y mêlait secrètement un peu de cette poudre très amère, avant de manger.
Ses yeux étaient toujours fixés vers la terre, jamais elle ne riait ; elle ne reconnaissait pas ceux qui passaient auprès d'elle, parce qu'elle était si constamment occupée en son intérieur, que l'extérieur était pour ainsi dire éteint.
Toujours elle avait l'air mécontent, et cependant elle était très satisfaite.
Elle cherchait à se priver du sommeil, au moyen de certains objets qu'elle mettait sous elle, dans son lit, et qui la piquaient ; Dieu, toutefois, ne lui enleva jamais le dormir, quelque chose qu'elle fit pour cela ; elle dormait quoiqu'elle ne le voulût pas.
Lorsque l'Humanité reconnut, d'après cette grande véhémence de l'esprit, qu'on ne faisait pas plus d'estime d'elle que si elle n'eût pas existé, et qu'elle n'y pouvait apporter aucun remède, elle demeura fort mécontente, mais sans oser alléguer la moindre excuse en sa faveur.
Voyant Jésus-Christ, le juge, irrité contre elle, elle était semblable à un voleur emprisonné, lequel n'a pas le courage de parler, parce qu'il a conscience du mal qu'il a fait, et qu'il craint, s'il réclame, d'être traité plus rudement encore.
Cependant, il lui restait encore une espérance (la seule qu'elle pût conserver ), c'était celle qu'on a quand il pleut bien fort, on pense alors que le mauvais temps ne peut pas durer.
Ce peu d'espoir la maintenait dans la patience ; mais l'esprit, étant en telle furie, resserra son Humanité de tant de parts, que bientôt elle put plus se restaurer en aucune façon, si ce n'est pendant le sommeil.
Elle en devint sèche, aride et pâle, et semblable à une pièce de bois.
Alors un jour, l'esprit et l'Humanité eurent la conversation suivante :
L'âme se retourne vers Dieu et reconnaît sa bassesse.
On lui montre ce qu'elle serait devenue si elle avait continué.
De ses lamentations et de son abattement à cause de ses offenses ; et de la confiance que lui donna Notre-Seigneur lui apparaissant en esprit.
De la plaie qu'elle reçut.
L'âme dirigea ensuite son regard vers Dieu, et ayant cette pure vue elle dit :
L'Âme.
Ô Seigneur, comment avez-vous été poussé à donner tant de lumières à une âme aveugle, fétide, hostile, qui vous fuyait, qui cheminait par des voies opposées à votre volonté et se repaissait toujours de choses sensuelles, à une âme qui ne désirait pas être tirée de son très mauvais état, et qui évitait pour cette raison tout ce qui l'en pouvait faire sortir ? je demeure stupéfaite en considérant ce que je suis, car je me reconnais une créature très vile.
Et cette âme étant dans cette allait disposition, il lui fut montré en quel lieu elle se trouvait, où elle allait, où elle serait arrivée, et ce qu'elle eût emporté finalement avec elle, en poursuivant la voie dans laquelle elle s'était engagée.
Elle aperçut en un instant ces choses telles qu'elles étaient, et telles qu'elles eussent été, si Dieu n'y eût pourvu.
A cette vue, elle resta comme morte, dans une si grande frayeur et souffrance, qu'elle paraissait hors d'elle-même ; et ne pouvant que pleurer, soupirer et gémir intérieurement, elle disait :
L'Âme.
Oh, que j'eusse été misérable et malheureuse, si j'avais continué de la sorte ! que de peines et de travaux je me forgeais en ce monde ! puis, après en l'autre vie, je me serais trouvé ennemie de Dieu, et condamnée à l'enfer pour l'éternité !
Elle resta pendant quelque temps absorbée par cette vision, laquelle lui causait une peine si intime, qu'elle ne pouvait penser à autre chose, ni faire aucun acte d'allégresse. Plongée dans la plus profonde mélancolie, elle ne savait que faire d'elle-même, car elle ne découvrait aucun lieu de repos ; elle ne le trouvait, ni au ciel, parce qu'elle sentait qu'elle n'y serait pas à sa place, ni en terre, parce qu'elle eût mérité d'y être engloutie ; de même, il lui semblait qu'il ne lui était permis, ni de paraître devant les hommes, ni d'avoir mémoire de rien qui eût rapport à sa commodité ou à son incommodité.
Elle reconnaissait que seule elle avait fait tout le mal ; seule aussi elle voulait satisfaire sans l'assistance de personne et elle s'écriait :
L'Âme.
Je le vois, ma place est en enfer.
Mais je ne la puis avoir qu'au moyen de la mort.
Hélas, mon Dieu, que ferais-je de moi ?
Je ne sais où me cacher, je cherche une retraite et je ne la trouve pas !
je n'ose comparaître en votre présence, étant couverte de souillures, et cependant je vous retrouve partout !
Dans cet état je me suis insupportable à moi-même, je suis revêtue d'une robe impure et pleine de taches !
Pleurer ne me sert de rien, soupirer ne m'aide point, ma contrition n'est pas acceptable, mes pénitences sont infructueuses : car comment satisfaire à la peine que méritent mes péchés, à moins que vous n'ayez pitié de moi et que vous ne m'aidiez, ô mon Dieu ?
L'Âme était ainsi dans une profonde désolation ; il lui semblait que jamais elle ne pourrait satisfaire, ni recourir à la miséricorde de Dieu ; elle ne découvrait en elle-même rien qui lui donnât confiance.
Elle se tourmentait ; elle ne voulait pas désespérer entièrement, et en même temps elle se voyait plier sous le poids du désespoir et reconnaissait la gravité du mal qu'elle avait fait.
Son coeur travaillé d'une douleur immense, accompagnée de larmes intérieures, sans que cependant elle pût pleurer ; elle soupirait en secret et consumait sa vie.
Elle était incapable de parler, de manger, de dormir, de rire, de regarder le ciel ; elle n'avait plus aucun goût, ni spirituel ni corporel ; elle ignorait où elle se trouvait, elle était comme une créature insensée, étonnée ; volontiers elle se fût cachée, afin qu'on ne la trouvât point, et qu'elle n'eût aucune occasion d'être en compagnie avec autrui.
Cette âme, en un mot, était tellement accablée et abîmée dans la vue des péchés qu'elle avait commis contre Dieu, qu'elle avait plutôt l'air d'une bête sauvage épouvantée que d'un être raisonnable.
Cela provenait de la claire connaissance qui lui avait été donnée, de la gravité de ses offenses et du grand dommage qui en résultait ; de manière que si elle eût conservé plus longtemps cette claire connaissance, son corps se fût consumé, quand même il eût été de diamant ; mais Dieu, après la lui avoir laissé assez pour qu'elle fût profondément imprimée en elle, la consola de la manière suivante :
“Notre- Seigneur lui apparut dans une vision intérieur ; il était couvert de sang de la tête aux pieds, de telle sorte qu'on eût dit que ce corps arrosait d'une pluie de sang tous les lieux où il allait ; et ces mots furent dits à l'Âme :
Vois-tu ce sang ?
Il a été répandu jusqu'à la dernière goutte pour l'amour de toi et pour la satisfaction de tes péchés.
Ces paroles lui firent une grande blessure d'amour pour Jésus-Christ, et lui inspirèrent une confiance telle, que la première impression de désespoir et qu'elle se réjouit un peu en son Seigneur.
CHAPITRE XII
D'une autre vue par laquelle Dieu montre à l'âme l'amour avec lequel il avait souffert pour elle. Elle reconnaît la malignité de l'homme et la bénignité du pur amour de Dieu. De l'offrande d'elle-même qu'elle fit à Dieu, et de la plaie qu'elle reçut. Des cinq fontaines de Jésus, de son consentement et de sa jalouse garde.
Elle eut une autre vision plus étonnante encore que la précédente et, plus admirable, qu'on ne saurait bien l'exprimer en langage humain, ni même l'imaginer par intelligence.
Ce fut la suivante. Jésus lui fit comprendre la grandeur de l'amour qui l'avait poussé à souffrir pour elle ; et, lorsque l'âme connut la pureté et la force de l'amour que lui portait le Seigneur, elle en reçut une si profonde blessure intérieure, qu'elle en ressentit plus que du mépris pour tout autre amour et pour tout autre objet qui eût pu se placer comme empêchement entre elle et Dieu.
Mais la connaissance de la perversité de l'homme lui fut donnée en même temps que l'intelligence de la bénigne et pure affection divine.
Cette double vue ne sortit plus jamais de la mémoire ; l'une y rappelait l'autre.
Et si, l'âme eût pu sonder un peu davantage cette infinie bonté de Dieu, opérant de si excellentes choses envers nous par pur amour, elle se fût anéantie à force de douceur.
Elle reconnut alors que c'est presque malgré la créature que Dieu agit constamment pour lui faire du bien.
Elle vit aussi que ce bon Dieu ne cesse pas, quel que soit le mal que l'homme commet, d'opérer une infinité de manières pour notre avantage, et que, loin de s'irriter de nos offenses, il travaille à notre amendement avec le plus pur amour, et en ayant toujours égard à ce qui nous est utile.
Se retournant ensuite vers elle-même, et estimant le degré de sa perversité d'après l'opposition qu'elle avait faite à la bonté de Dieu, cette âme commença à comprendre ce qu'est l'être propre de l'homme déchu, et elle le reconnut pour ainsi dire aussi mauvais et méchant que Dieu est bon.
Cette contemplation lui inspira un si profond dégoût d'elle-même, qu'à partir de ce moment elle ne put plus voir l'homme en aucune de ses puissances, que comme on voit le démon, c'est-à-dire avec toute sa perversité.
Si Dieu n'eût tempéré cette vue, l'âme et le corps en eussent été consumés, tout comme de l'intuition de l'amour du Seigneur envers nous.
Regardant dès lors ce mal comme incurable, elle ne voulut plus perdre son temps à y chercher quelque remède ; elle plaça toute sa confiance en Jésus, et elle lui dit :
"Seigneur, je me donne à vous, car je reconnais que par moi seule, je ne puis faire de moi qu'un enfer.
Je désire vous proposer un échange, et vous remettre entre les mains mon être malin (car vous pouvez l'ensevelir dans votre bonté, et me régler de telle sorte, qu'on ne voie plus en moi-même) ; vous me donnerez, par contre, l'occupation de votre pur amour, afin qu'il éteigne en moi tout autre sentiment, me fasse m'anéantir en vous, et me tienne tellement absorbée, qu'aucun objet étranger n'ait jamais ni temps, ni lieu de demeurer avec moi."
Son très doux Seigneur lui répondit qu'il acceptait l'échange, et en cet instant, la partie maligne de sa mémoire lui fut ôtée, et elle n'en eut plus jamais de souci.
Puis aussi un rayon d'amour fut répandu dans son coeur, et ce rayon était tellement ardent et pénétrant, et transperça si complètement cette âme en son intérieur, qu'il lui enleva tous les amours, appétits, délectations et propriétés, que jamais elle avait eus, ou pu avoir, en ce monde.
Elle demeura ainsi dépouillée, de toutes choses, avec un certain consentement de correspondance à l'amour qui lui avait été montré ; cet amour l'attirait, au point qu'elle en était étonnée, occupée, transformée, et hors d'elle-même.
Elle criait et soupirait incomparablement plus qu'à l'occasion de ce qu'elle avait vu d'abord, touchant la perversité de son propre être.
Ce rayon d'amour demeura imprimé en son coeur avec les cinq fontaines du Christ, desquelles découlent des gouttes d'un sang ardent et d'un amour enflammé pour l'homme.
Et Dieu lui octroya de pouvoir connaître ce qu'est l'homme, sans en éprouver de peine ; de telle sorte que l'âme contemplait à la fois et la malice humaine et la bonté divine, au degré quelle pouvait porter sans que la vie en souffrit.
La vue d'elle-même ne lui causait plus aucune douleur, car son Dieu très élément lui avait ôté toute affliction à cet égard ; et, cependant, elle voyait clairement ce qu'elle était, et comment le Seigneur la soutenait.
Il lui était montré aussi que pour peu que Dieu l'eût délaissée, elle eût été prête à faire toutes ses opérations avec autant de malignité que Satan lui-même.
Toutefois, étant entre les mains de Dieu, elle ne pouvait avoir aucune crainte ; elle se savait bien gardée.
Mais ce qui la crucifiait et la faisait se consumer était la vue de cet ardent de Dieu pour l'homme ; elle disait ne pouvoir expliquer le feu violent qu'elle en ressentait.
Cet amour que Dieu lui montrait l'invitait à repousser tout ce qui déplaisait au Seigneur, avec une jalousie extrême, et à exercer la surveillance la plus exacte sur tous les défauts, pour petits qu'ils fussent.
Ses yeux furent ouverts de façon à reconnaître non seulement les défauts, mais encore toutes les imperfections et habitudes inutiles, qu'elle eût jamais eues.
Cette connaissance lui donnait la force et la fermeté nécessaire pour retrancher toutes les superfluités, sans faire aucun cas de la contrariété qui en devait résulter.
Elle ne tenait pas plus de compte de l'humanité que si elle ne l'avait pas eue ; elle n'estimait ni la chair, ni le monde, ni le malin esprit.
Avec l'amour divin, elle se sentait plus forte que les peines et que les démons, car elle était unie à Dieu ; or, Dieu est la force véritable de ceux qui le craignent, l'aiment et le servent.
Elle comprenait, d'ailleurs, qu'elle ne pouvait se nuire à elle-même, parce qu'elle voyait sa partie propre entre les mains du Seigneur et surveillée par sa bonté.
CHAPITRE XIII
De l'instinct qui la pousse à s'ôter toutes les choses superflues, et même celles qui paraissent nécessaires ; de l'instinct qu'elle eut pour l'oraison, et de ses mortifications.
Dieu donna encore à cette âme l'instinct de se mépriser elle-même, de sorte que, pour ce qui la regardait, elle ne se souciait pas plus de toutes les choses qui se trouvent sous le ciel, que si elles n'eussent pas existé.
L'amour qu'elle éprouvait l'incita également à enlever à l'humanité non seulement les nourritures superflues, mais encore celles qui paraissaient nécessaires ; elle en fit autant pour les vêtements et pour les sociétés, bonnes ou mauvaises.
Cet amour l'attirait à la solitude d'esprit et de corps, et la réduisit à sa seule compagnie. Il réveilla de plus en elle l'instinct de l'oraison, de sorte qu'elle restait six ou sept heures de suite sur ses genoux nus, à l'encontre de la volonté de l"humanité ; bien qu'elle en souffrit beaucoup, elle n'en tenait aucun compte et ne refusait pas pour cela de demeurer prête à faire ce à quoi l'esprit l'attirait.
Tous ses mouvements étaient opérés par Dieu seul ; l'âme n'y avait aucun vouloir, ni aucun objet :
Dieu, qui en avait pris la direction, prétendait régler et diriger ce qui lui appartenait, et lui enlever les instincts qui étaient selon la chair et selon le monde pour y arriver, il lui en donnait de contraires.
Il ordonnait à sa créature de ne se nourrir, ni de fruits qui la délectaient naturellement et qui lui plaisaient beaucoup, ni de viande, ni de rien qui parût superflu ; on eût dit que toujours il avait en mains la mesure de ce qu'elle devait manger.
Et comme il voulait qu'elle perdit le goût des aliments, il lui fit tenir toujours sur elle de l'aloès épatique et de l'agaric pulvérisée, et quand elle s'apercevait de quelque saveur, ou qu'il lui semblait que telle chose lui plaisait plus que telle autre, elle y mêlait secrètement un peu de cette poudre très amère, avant de manger.
Ses yeux étaient toujours fixés vers la terre, jamais elle ne riait ; elle ne reconnaissait pas ceux qui passaient auprès d'elle, parce qu'elle était si constamment occupée en son intérieur, que l'extérieur était pour ainsi dire éteint.
Toujours elle avait l'air mécontent, et cependant elle était très satisfaite.
Elle cherchait à se priver du sommeil, au moyen de certains objets qu'elle mettait sous elle, dans son lit, et qui la piquaient ; Dieu, toutefois, ne lui enleva jamais le dormir, quelque chose qu'elle fit pour cela ; elle dormait quoiqu'elle ne le voulût pas.
Lorsque l'Humanité reconnut, d'après cette grande véhémence de l'esprit, qu'on ne faisait pas plus d'estime d'elle que si elle n'eût pas existé, et qu'elle n'y pouvait apporter aucun remède, elle demeura fort mécontente, mais sans oser alléguer la moindre excuse en sa faveur.
Voyant Jésus-Christ, le juge, irrité contre elle, elle était semblable à un voleur emprisonné, lequel n'a pas le courage de parler, parce qu'il a conscience du mal qu'il a fait, et qu'il craint, s'il réclame, d'être traité plus rudement encore.
Cependant, il lui restait encore une espérance (la seule qu'elle pût conserver ), c'était celle qu'on a quand il pleut bien fort, on pense alors que le mauvais temps ne peut pas durer.
Ce peu d'espoir la maintenait dans la patience ; mais l'esprit, étant en telle furie, resserra son Humanité de tant de parts, que bientôt elle put plus se restaurer en aucune façon, si ce n'est pendant le sommeil.
Elle en devint sèche, aride et pâle, et semblable à une pièce de bois.
Alors un jour, l'esprit et l'Humanité eurent la conversation suivante :
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE XIV
De l'entretien de l'Esprit et de l'Humanité.
L'Humanité se lamente de la véhémence de l'Esprit, qu'elle pense ne pas pouvoir supérieur davantage.
L'Esprit. Humanité, que te semble cette manière de vivre ?
L'Humanité.
Ô Esprit, tu t'es engagé dans cette voie avec tant d'emportement, qu'il me semble impossible d'y persévérer. J'espère que la mort, ou au moins la maladie, s'ensuivront, et plus tôt peut-être que tu ne le penses ; ainsi tu n'obtiendras pas ce que tu cherches en ce monde ; mais tu seras forcé d'aller en purgatoire ; dans ce lieu tu souffriras plus en un moment, que tu n'eusses enduré pendant tout le temps que nous aurions pu passer ici-bas. Je serai alors dans le tombeau, et ce me sera un moindre mal que d'exister de cette façon ; quant à toi tu vivras dans le feu, et tu y seras plus mal que moi : va-t'en à présent, je n'ai plus rien à te dire.
L'Esprit.
Je pense que ni mort, ni maladie, n'en résulteront ; mais tu es dans la furie du mal. Les mauvaises humeurs sont maintenant toutes purgées ; l'abstinence t'a été saine : tu n'as plus ni chair, ni couleur.
La meule de l'amour divin aura bientôt tout broyé, et je reconnais que si je n'y mettais du grain, elle travaillerait à sec et que tout se gâterait.
J'y pourvoirai tellement que chacun sera satisfait, sans décès, ni infirmité.
Et, en effet, cet esprit avait reçu une si grande lumière, qu'il voyait jusqu'au moindre atome qui lui était contraire, son humanité tout ce qu'il voulait, sans qu'elle osât essayer de s'y opposer.
Car il était si vigoureux, que, si elle fût avisée de regimber, il aurait fait pis encore.
Or, quand l'Humanité, ainsi réduite, eut reconnu qu'elle n'avait pas à espérer le plus léger soulagement, elle se dit à elle-même :
L'Humanité.
Si au moins je recevais quelque nourriture des choses spirituelles et si je pouvais me contenter de ce qui contente l'esprit, je reprendrais des forces ; autrement je ne sais ce que je ferai, ni comment je demeurai patiente au milieu de tant de détresse, et des supplices en lesquels je me vois liée et comme emprisonnée.
Étant en ce penser, il advint que cette créature se trouvant à l'église, et y ayant communié, reçut un rayon et eut une lumière éclatante, accompagnés d'un sentiment de béatitude tel, que l'Âme et le Coprs pensaient être dans la vie éternelle, selon ces paroles :
Cor meum et caro mea exulta verunt in Deum vivum.
Le goût et la lumière divine étaient si grands, que l'Humanité elle-même s'en nourrit et dit :
De cette manière, moi aussi je pourrai vivre !
Mais le premier moment passé, le Pur-Amour se prit à crier à la vue de cette nouveauté, et dit :
"Oh, Seigneur, je ne veux pas de preuves de votre part ; je ne cherche point les sentiments : loin de là, je les fuis tous comme autant de démons, parce qu'ils empêchent le Pur-Amour, lequel doit être absolument nu ; l'homme peut s'attacher aux sentiments par l'esprit et par le corps, sous prétexte de perfection ; je vous prie donc, Seigneur, de ne plus me donner de choses semblables, elles ne sont faites ni pour moi, ni pour ceux qui n'aspirent qu'au seul amour divin."
CHAPITRE XV
L'Humanité se plaint que l'Esprit ne tient pas ses promesses.
L'Esprit s'en défend.
Du danger des goûts spirituels, sous couleur de bien : ils sont dangereux que les goûts corporels, lesquels sont évidemment contraires à l'Esprit.
Des menaces que l'Esprit fait à son Humanité.
Lorsque l'Humanité vit l'Esprit irrité de ce qu'elle se fût repue de ces sentiments et de ce qu'elle espérait s'en repaître encore, elle en témoigna un grand mécontentement et s'adressa de nouveau à lui ; il lui semblait qu'elle avait de justes raisons de se plaindre, et qu'on ne devait pas lui refuser un peu de récréation ; elle se croyait d'autant plus fondée à réclamer, que cette récréation était toute spirituelle, et que l'Âme lui avait dit qu'un temps viendrait où elle se nourrirait et se contenterait de ce qui serait selon l'Esprit : voyant maintenant arriver le contraire, et que l'Esprit ne voulait ni se repaître lui-même des choses spirituelles, ni qu'elle s'en repût, elle lui dit :
L'Humanité.
Tu ne tiens pas ce que tu m'as promis, ô Esprit ; il est impossible que je persévère en si grande détresse, dépourvue de tout soulagement corporel ou spirituel.
L'Esprit.
Tu te lamentes, et il te semble que tu as de justes motifs pour le faire ; je veux donc te répondre et te satisfaire.
Tu as mal compris mes paroles.
Il est vrai que je t'ai annoncé qu'à la fin tu recevrais du contentement de tout ce qui m'en procura à moi-même.
Mais tu recherches encore ce qui te donne nourriture et délectation, et non pas ce qui doit te procurer la vraie satisfaction.
Et comme, loin de me contenter de tels sentiments et pâtures, je les abhorre, je veux que tu les abhorres comme moi.
Tes instincts te poussent à satisfaire tes goûts, et tu crois que je dois les entretenir.
Je veux au contraire les régler et les éteindre, afin qu'ils ne puissent plus rien désirer qu'autant qu'il me plaira : tu es malade, je le sais, et par conséquent je ne te donnerai que ce qui convient à un malade : ce que tu désires est contraire à ta santé.
Tu dis que ce sont des goûts spirituels donnés de Dieu, et qui ne peuvent faire de mal ; mais ton intelligence participe à la sensualité, et pour cette raison tu n'as pas bon jugement.
Quant à moi, je n'aspire qu'à l'amour pur et nu, lequel ne peut s'attacher à rien de ce qui flatte le goût ou les sentiments corporels et spirituels ; et je te déclare que je redoute beaucoup plus l'attache au goût et au sentiment spirituel qu'au corporel.
La raison en est que le spirituel enlace l'homme sous apparence de bien, et sans que l'on puisse, si ce n'est avec la plus grande difficulté, lui faire comprendre que c'est tout autre chose que du bien ; et la créature se repaît ainsi de ce qui sort de Dieu.
Mais je te le dis en vérité, celui qui veut Dieu seul doit nécessairement éviter ces choses, car elles sont comme un poison pour le Pur-Amour.
Oui, les goûts spirituels doivent être fuis plus encore que le diable ; car ils engendrent, là où ils s'attachent, une maladie incurable, sans que l'homme s'en aperçoive : se croyant en bonne voie,il ne voit pas que ces goûts font obstacle au bien parfait, lequel bien est Dieu lui-même, et nullement l'homme.
Les goûts corporels, étant évidemment contre l'Esprit, ne se peuvent cacher sous apparence de bien ; donc je ne les crains pas autant.
La satisfaction et la paix que je veux te donner sont ceux dont je me contenterai moi-même, et dont je suis sûr que tu contenteras également ; mais tu ne peux les avoir encore, tu es trop souillée.
D'abord, je veux nettoyer la maison ; puis je la parerai et je la remplirai de bonnes choses, qui nous satisferont tous deux ; mais qui ne nous repaîtront ni l'un ni l'autre.
Tu dis que tu ne peux supporter cela, il le faudra bien pourtant ; ce qui ne pourra se faire en un an se fera en dix.
Peu m'importe de te combattre ; car de quelque façon que ce soit, je veux vaincre : je veux me délivrer de ton aiguillon, autrement jamais je ne me trouverai bien.
Tu es pour moi fiel et poison dans toutes les nourritures auxquelles je prétends, et tant que je ne serai pas parvenue à t'éteindre, je ne serai pas content.
Tu es disposée à faire du pis que tu pourras et sauras ; je ferai de même afin de me délivrer plus vite de tes actes ; mais ce pis que je ferai à ton endroit tournera à ton bien et à ton profit.
Je t'avertis de ne rien entreprendre contre moi ; car, loin d'obtenir ainsi ce que tu désires, et ce à quoi tu prétends, tu auras bien plutôt le contraire. Je t'exhorte donc à la patience, et à n'avoir aucun espoir ; maintenant fais ma volonté, puis à la fin je ferai la tienne.
CHAPITRE XVI
L'Humanité prie l'esprit de faire justice équitablement.
Elle lui dit qu'il a péché le premier, et qu'elle n'a été qu'instrument.
L'esprit lui prouve le contraire.
De la cause de leur chute. L'esprit lui démontre qu'il faut se purifier ici-bas, et que mieux vaut souffrir mille ans en ce monde qu'une heure en Purgatoire.
L'Humanité.
Je suis fort dolente et mécontente, et je ne puis éviter de t'obéir, ni par raison, ni par force.
Mais je te prie de me satisfaire encore en un point ; puis, tu poursuivras ce que tu as commencé, et je tâcherai de patienter du mieux que je pourrai.
Ô Esprit, toi qui exerces une justice si rigoureuse envers moi, je te supplie de procéder au moins avec équité.
Je suis, tu le sais, un corps animal, sans raison, sans puissance, sans volonté, ni mémoire, car toutes ces facultés sont dans l'Esprit.
J'opère comme instrument et ne saurais faire que ce que tu veux.
Dis-moi, n'as-tu pas été le premier à pécher par la raison et la volonté?
J'ai été le simple instrument au moyen duquel tu as effectué le péché déjà commis intérieurement en toi...
Or donc, lequel de nous mérite le châtiment ?
L'Esprit.
Tes raisons semblent bonnes à première vue, néanmoins je vais les réfuter promptement et à ta satisfaction ; tu seras forcée de le reconnaître.
Si, comme tu le dis, tu n'avais jamais péché, ni ne pouvais pécher, il s'ensuivrait que Dieu, qui veut que le corps aille où l'âme va, soit en paradis, soit en enfer, rendrait un jugement injuste ; car quiconque ne fait ni bien, ni mal ne doit avoir ni châtiment, ni récompense.
Or, Dieu ne pouvant être injuste, il en résulte que cet argument est très fort. Je suis le premier qui pèche, je le confesse ; car étant doué du libre arbitre, je ne puis être contraint si je ne le veux ; et ni bien, ni mal, ne se font que je n'y consente d'abord.
Lorsque je me tourne vers le bien, le ciel et la terre me sont en aide, de tous côtés je suis excité à le faire ; et je ne puis en être empêché ni par les démons, ni par le monde, ni par la chair.
Si je me tourne du côté du mal, je suis également aidé de toutes parts, des diables, du monde et de moi-même, c'est-à-dire de la chair, et de l'instinct malin que l'homme trouve en soi, par le penchant qu'il a au mal.
Et comme Dieu récompense tout ce qui est bien, et punit tout ce qui est mal, on en doit conclure que tous ceux qui coopèrent au mal seront punis.
Tu sais que dans le principe je voulais être fidèle à mon instinct spirituel ; j'ai commencé à le suivre avec une grande véhémence : mais tu m'as donné tant de stimulants contraires, tu as allégué de si nombreuses raisons, tu m'as fait voir en telle quantité tes nécessités, que nous avons eu de grandes contestations ; puis, l'Amour-Propre est venu en tiers, s'est attaché à l'un et à l'autre de nous, et nous a souillés tous deux de telle sorte, que pour subvenir à tes prétendus besoins et y condescendre, j'ai quitté le droit chemin.
Tous deux nous en serons punis avec justice.
Il est vrai que si la grande misère du péché mortel se trouvait en nous ( Dieu nous en garde ! ), je serai plus tourmenté que toi, en ma qualité d'être principal et noble ; cependant tous deux alors nous désirerions de ne pas avoir été créés.
Il est donc nécessaire que nous nous purifions ici-bas, non seulement de toutes nos souillures, mais encore des moindres imperfections que nos mauvaises habitudes nous ont fait contracter.
De plus, je te déclare que Dieu m'a donné une lumière si pénétrante et si claire, que je suis certain ( à moins que cette lumière ne me manque avant que je me sépare de toi ), qu'il ne me restera pas la plus petite tache non seulement dans l'âme, mais aussi dans le corps.
Remarque bien ce que je dis :
Combien penses-tu que puisse durer ce temps de nous purifier ?
Tu sais qu'il durera fort peu.
Au commencement la chose te semble terrible ; mais, à mesure que tu iras en avant, tu ressentiras moins de peine, parce que tes mauvaises habitudes se consumeront.
Tu crains de ne pas recevoir l'aide nécessaire pour pouvoir supporter cela, sois tranquille et apprends que la très sainte disposition de Dieu ne laisse jamais porter à l'homme un poids supérieur à ses forces.
Si nous voulons avoir égard à notre propre bien, il nous est plus avantageux de patienter un peu ici-bas, que d'être ensuite dans les tourments éternels.
Il vaudrait mieux demeurer mille ans avec toutes les douleurs dont on peut être affligé en cette chair et en ce monde, que de rester une heure en purgatoire.
Je t'ai dit brièvement ce peu de paroles pour te réconforter.
De l'entretien de l'Esprit et de l'Humanité.
L'Humanité se lamente de la véhémence de l'Esprit, qu'elle pense ne pas pouvoir supérieur davantage.
L'Esprit. Humanité, que te semble cette manière de vivre ?
L'Humanité.
Ô Esprit, tu t'es engagé dans cette voie avec tant d'emportement, qu'il me semble impossible d'y persévérer. J'espère que la mort, ou au moins la maladie, s'ensuivront, et plus tôt peut-être que tu ne le penses ; ainsi tu n'obtiendras pas ce que tu cherches en ce monde ; mais tu seras forcé d'aller en purgatoire ; dans ce lieu tu souffriras plus en un moment, que tu n'eusses enduré pendant tout le temps que nous aurions pu passer ici-bas. Je serai alors dans le tombeau, et ce me sera un moindre mal que d'exister de cette façon ; quant à toi tu vivras dans le feu, et tu y seras plus mal que moi : va-t'en à présent, je n'ai plus rien à te dire.
L'Esprit.
Je pense que ni mort, ni maladie, n'en résulteront ; mais tu es dans la furie du mal. Les mauvaises humeurs sont maintenant toutes purgées ; l'abstinence t'a été saine : tu n'as plus ni chair, ni couleur.
La meule de l'amour divin aura bientôt tout broyé, et je reconnais que si je n'y mettais du grain, elle travaillerait à sec et que tout se gâterait.
J'y pourvoirai tellement que chacun sera satisfait, sans décès, ni infirmité.
Et, en effet, cet esprit avait reçu une si grande lumière, qu'il voyait jusqu'au moindre atome qui lui était contraire, son humanité tout ce qu'il voulait, sans qu'elle osât essayer de s'y opposer.
Car il était si vigoureux, que, si elle fût avisée de regimber, il aurait fait pis encore.
Or, quand l'Humanité, ainsi réduite, eut reconnu qu'elle n'avait pas à espérer le plus léger soulagement, elle se dit à elle-même :
L'Humanité.
Si au moins je recevais quelque nourriture des choses spirituelles et si je pouvais me contenter de ce qui contente l'esprit, je reprendrais des forces ; autrement je ne sais ce que je ferai, ni comment je demeurai patiente au milieu de tant de détresse, et des supplices en lesquels je me vois liée et comme emprisonnée.
Étant en ce penser, il advint que cette créature se trouvant à l'église, et y ayant communié, reçut un rayon et eut une lumière éclatante, accompagnés d'un sentiment de béatitude tel, que l'Âme et le Coprs pensaient être dans la vie éternelle, selon ces paroles :
Cor meum et caro mea exulta verunt in Deum vivum.
Le goût et la lumière divine étaient si grands, que l'Humanité elle-même s'en nourrit et dit :
De cette manière, moi aussi je pourrai vivre !
Mais le premier moment passé, le Pur-Amour se prit à crier à la vue de cette nouveauté, et dit :
"Oh, Seigneur, je ne veux pas de preuves de votre part ; je ne cherche point les sentiments : loin de là, je les fuis tous comme autant de démons, parce qu'ils empêchent le Pur-Amour, lequel doit être absolument nu ; l'homme peut s'attacher aux sentiments par l'esprit et par le corps, sous prétexte de perfection ; je vous prie donc, Seigneur, de ne plus me donner de choses semblables, elles ne sont faites ni pour moi, ni pour ceux qui n'aspirent qu'au seul amour divin."
CHAPITRE XV
L'Humanité se plaint que l'Esprit ne tient pas ses promesses.
L'Esprit s'en défend.
Du danger des goûts spirituels, sous couleur de bien : ils sont dangereux que les goûts corporels, lesquels sont évidemment contraires à l'Esprit.
Des menaces que l'Esprit fait à son Humanité.
Lorsque l'Humanité vit l'Esprit irrité de ce qu'elle se fût repue de ces sentiments et de ce qu'elle espérait s'en repaître encore, elle en témoigna un grand mécontentement et s'adressa de nouveau à lui ; il lui semblait qu'elle avait de justes raisons de se plaindre, et qu'on ne devait pas lui refuser un peu de récréation ; elle se croyait d'autant plus fondée à réclamer, que cette récréation était toute spirituelle, et que l'Âme lui avait dit qu'un temps viendrait où elle se nourrirait et se contenterait de ce qui serait selon l'Esprit : voyant maintenant arriver le contraire, et que l'Esprit ne voulait ni se repaître lui-même des choses spirituelles, ni qu'elle s'en repût, elle lui dit :
L'Humanité.
Tu ne tiens pas ce que tu m'as promis, ô Esprit ; il est impossible que je persévère en si grande détresse, dépourvue de tout soulagement corporel ou spirituel.
L'Esprit.
Tu te lamentes, et il te semble que tu as de justes motifs pour le faire ; je veux donc te répondre et te satisfaire.
Tu as mal compris mes paroles.
Il est vrai que je t'ai annoncé qu'à la fin tu recevrais du contentement de tout ce qui m'en procura à moi-même.
Mais tu recherches encore ce qui te donne nourriture et délectation, et non pas ce qui doit te procurer la vraie satisfaction.
Et comme, loin de me contenter de tels sentiments et pâtures, je les abhorre, je veux que tu les abhorres comme moi.
Tes instincts te poussent à satisfaire tes goûts, et tu crois que je dois les entretenir.
Je veux au contraire les régler et les éteindre, afin qu'ils ne puissent plus rien désirer qu'autant qu'il me plaira : tu es malade, je le sais, et par conséquent je ne te donnerai que ce qui convient à un malade : ce que tu désires est contraire à ta santé.
Tu dis que ce sont des goûts spirituels donnés de Dieu, et qui ne peuvent faire de mal ; mais ton intelligence participe à la sensualité, et pour cette raison tu n'as pas bon jugement.
Quant à moi, je n'aspire qu'à l'amour pur et nu, lequel ne peut s'attacher à rien de ce qui flatte le goût ou les sentiments corporels et spirituels ; et je te déclare que je redoute beaucoup plus l'attache au goût et au sentiment spirituel qu'au corporel.
La raison en est que le spirituel enlace l'homme sous apparence de bien, et sans que l'on puisse, si ce n'est avec la plus grande difficulté, lui faire comprendre que c'est tout autre chose que du bien ; et la créature se repaît ainsi de ce qui sort de Dieu.
Mais je te le dis en vérité, celui qui veut Dieu seul doit nécessairement éviter ces choses, car elles sont comme un poison pour le Pur-Amour.
Oui, les goûts spirituels doivent être fuis plus encore que le diable ; car ils engendrent, là où ils s'attachent, une maladie incurable, sans que l'homme s'en aperçoive : se croyant en bonne voie,il ne voit pas que ces goûts font obstacle au bien parfait, lequel bien est Dieu lui-même, et nullement l'homme.
Les goûts corporels, étant évidemment contre l'Esprit, ne se peuvent cacher sous apparence de bien ; donc je ne les crains pas autant.
La satisfaction et la paix que je veux te donner sont ceux dont je me contenterai moi-même, et dont je suis sûr que tu contenteras également ; mais tu ne peux les avoir encore, tu es trop souillée.
D'abord, je veux nettoyer la maison ; puis je la parerai et je la remplirai de bonnes choses, qui nous satisferont tous deux ; mais qui ne nous repaîtront ni l'un ni l'autre.
Tu dis que tu ne peux supporter cela, il le faudra bien pourtant ; ce qui ne pourra se faire en un an se fera en dix.
Peu m'importe de te combattre ; car de quelque façon que ce soit, je veux vaincre : je veux me délivrer de ton aiguillon, autrement jamais je ne me trouverai bien.
Tu es pour moi fiel et poison dans toutes les nourritures auxquelles je prétends, et tant que je ne serai pas parvenue à t'éteindre, je ne serai pas content.
Tu es disposée à faire du pis que tu pourras et sauras ; je ferai de même afin de me délivrer plus vite de tes actes ; mais ce pis que je ferai à ton endroit tournera à ton bien et à ton profit.
Je t'avertis de ne rien entreprendre contre moi ; car, loin d'obtenir ainsi ce que tu désires, et ce à quoi tu prétends, tu auras bien plutôt le contraire. Je t'exhorte donc à la patience, et à n'avoir aucun espoir ; maintenant fais ma volonté, puis à la fin je ferai la tienne.
CHAPITRE XVI
L'Humanité prie l'esprit de faire justice équitablement.
Elle lui dit qu'il a péché le premier, et qu'elle n'a été qu'instrument.
L'esprit lui prouve le contraire.
De la cause de leur chute. L'esprit lui démontre qu'il faut se purifier ici-bas, et que mieux vaut souffrir mille ans en ce monde qu'une heure en Purgatoire.
L'Humanité.
Je suis fort dolente et mécontente, et je ne puis éviter de t'obéir, ni par raison, ni par force.
Mais je te prie de me satisfaire encore en un point ; puis, tu poursuivras ce que tu as commencé, et je tâcherai de patienter du mieux que je pourrai.
Ô Esprit, toi qui exerces une justice si rigoureuse envers moi, je te supplie de procéder au moins avec équité.
Je suis, tu le sais, un corps animal, sans raison, sans puissance, sans volonté, ni mémoire, car toutes ces facultés sont dans l'Esprit.
J'opère comme instrument et ne saurais faire que ce que tu veux.
Dis-moi, n'as-tu pas été le premier à pécher par la raison et la volonté?
J'ai été le simple instrument au moyen duquel tu as effectué le péché déjà commis intérieurement en toi...
Or donc, lequel de nous mérite le châtiment ?
L'Esprit.
Tes raisons semblent bonnes à première vue, néanmoins je vais les réfuter promptement et à ta satisfaction ; tu seras forcée de le reconnaître.
Si, comme tu le dis, tu n'avais jamais péché, ni ne pouvais pécher, il s'ensuivrait que Dieu, qui veut que le corps aille où l'âme va, soit en paradis, soit en enfer, rendrait un jugement injuste ; car quiconque ne fait ni bien, ni mal ne doit avoir ni châtiment, ni récompense.
Or, Dieu ne pouvant être injuste, il en résulte que cet argument est très fort. Je suis le premier qui pèche, je le confesse ; car étant doué du libre arbitre, je ne puis être contraint si je ne le veux ; et ni bien, ni mal, ne se font que je n'y consente d'abord.
Lorsque je me tourne vers le bien, le ciel et la terre me sont en aide, de tous côtés je suis excité à le faire ; et je ne puis en être empêché ni par les démons, ni par le monde, ni par la chair.
Si je me tourne du côté du mal, je suis également aidé de toutes parts, des diables, du monde et de moi-même, c'est-à-dire de la chair, et de l'instinct malin que l'homme trouve en soi, par le penchant qu'il a au mal.
Et comme Dieu récompense tout ce qui est bien, et punit tout ce qui est mal, on en doit conclure que tous ceux qui coopèrent au mal seront punis.
Tu sais que dans le principe je voulais être fidèle à mon instinct spirituel ; j'ai commencé à le suivre avec une grande véhémence : mais tu m'as donné tant de stimulants contraires, tu as allégué de si nombreuses raisons, tu m'as fait voir en telle quantité tes nécessités, que nous avons eu de grandes contestations ; puis, l'Amour-Propre est venu en tiers, s'est attaché à l'un et à l'autre de nous, et nous a souillés tous deux de telle sorte, que pour subvenir à tes prétendus besoins et y condescendre, j'ai quitté le droit chemin.
Tous deux nous en serons punis avec justice.
Il est vrai que si la grande misère du péché mortel se trouvait en nous ( Dieu nous en garde ! ), je serai plus tourmenté que toi, en ma qualité d'être principal et noble ; cependant tous deux alors nous désirerions de ne pas avoir été créés.
Il est donc nécessaire que nous nous purifions ici-bas, non seulement de toutes nos souillures, mais encore des moindres imperfections que nos mauvaises habitudes nous ont fait contracter.
De plus, je te déclare que Dieu m'a donné une lumière si pénétrante et si claire, que je suis certain ( à moins que cette lumière ne me manque avant que je me sépare de toi ), qu'il ne me restera pas la plus petite tache non seulement dans l'âme, mais aussi dans le corps.
Remarque bien ce que je dis :
Combien penses-tu que puisse durer ce temps de nous purifier ?
Tu sais qu'il durera fort peu.
Au commencement la chose te semble terrible ; mais, à mesure que tu iras en avant, tu ressentiras moins de peine, parce que tes mauvaises habitudes se consumeront.
Tu crains de ne pas recevoir l'aide nécessaire pour pouvoir supporter cela, sois tranquille et apprends que la très sainte disposition de Dieu ne laisse jamais porter à l'homme un poids supérieur à ses forces.
Si nous voulons avoir égard à notre propre bien, il nous est plus avantageux de patienter un peu ici-bas, que d'être ensuite dans les tourments éternels.
Il vaudrait mieux demeurer mille ans avec toutes les douleurs dont on peut être affligé en cette chair et en ce monde, que de rester une heure en purgatoire.
Je t'ai dit brièvement ce peu de paroles pour te réconforter.
A suivre...
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE XVII
Dieu verse et répand une douceur divine dans l'âme ; l'âme se récrie à ce propos, ne voulant pas de preuves de l'amour.
Dieu cependant ne laisse pas de la tenir abîmée dans l'océan de l'amour divin.
Il lui donna une vue du très pur amour, une autre de l'amour-propre et de ses mauvaises inclinations.
Quand l'esprit eut donné satisfaction à l'humanité, il la laissa, et s'en retourna à son premier et unique objet.
Il demeurait étroitement uni à son intime amour, lequel restait si complètement resserré dans l'intérieur, qu'il ne permettait pour ainsi dire pas à l'humanité de reprendre haleine ni en chose spirituelle, ni en corporelle, de sorte qu'elle semblait hors de ses conditions d'existence.
Dieu, ayant ainsi disposé ce vaisseau à un pur et net amour, commença à éprouver sa créature par des tentations convenables et fort spirituelles.
Il répandit en elle la douceur divine d'un très grand et très suave amour.
L'âme et le corps en étaient tellement remplis, qu'ils ne pouvaient presque plus demeurer sur pieds : mais rien n'échappe à l'œil de l'amour ; l'âme, dès qu'elle vit ces grandes choses, se mit à crier et à dire qu'elle ne voulait pas de ces suavités et de ces goûts en cette vie, et qu'elle ne se souciait pas de la preuve de l'amour parce que la preuve gâte l'amour lui-même.
Je me défendrai de ces douceurs, disait-elle, et ne m'en approcherai pas ; je ne leur donnerai aucun lieu séparé et tranquille où je puisse m'en repaître, car elles sont un poison pour le pur amour.
Dieu cependant continuait à la tenir occupé dans la source de cette suavité infinie.
L'âme avait beau protester, elle n'en restait pas moins continuellement abîmée dans l'océan de l'amour divin, et cet amour lui était montré en des visions multiples et variées.
L'une de ces visions consistait en ce que Dieu lui fit voir un rayon du très pur amour dont il l'aimait ; et cette vue fut tellement puissante, que, si le Seigneur n'en eût modéré la flamme, en faisant connaître en même temps à l'âme l'amour-propre dont elle était souillée, elle n'aurait pas pu vivre davantage.
Une autre fois il tempéra la grande ardeur à laquelle elle était en proie, en lui donnant une claire vue d'elle-même, c'est-à-dire de ses mauvaises inclinaisons contraires au pur amour ; et elle comprit qu'elle eût mieux aimé ne pas exister que d'avoir offensé son amour, non seulement par le moindre péché, mais encore par le plus petit défaut.
Or, l'esprit, étant ainsi occupé, ne pensait plus à son humanité, et n'y voulait pas penser davantage, que s'il ne l'eût pas eue.
Par ce moyen il s'en déchargeait et lui faisait prendre telles habitudes que bon lui semblait.
CHAPITRE XVIII
L'humanité se lamente et demande à faire quelque chose.
L'esprit le lui accorde et lui ordonne d'être obéissante envers tout le monde, et de ne s'arrêter nulle part pour y prendre plaisir ou déplaisir.
De la règle qu'il lui donne et de la défense qu'il lui fait de contracter amitié avec qui que ce soit en particulier.
L'Humanité, voyant que sa voie se rétrécissait de jour en jour, parla de nouveau à l'Esprit, et lui dit humblement avec beaucoup de crainte et de respect :
L'Humanité. Tu m'as privée, quant à l'extérieur, de tout confort humain ; je puis donc me considérer comme morte au monde ; et si tu persévères à me tenir si resserrée, le temps viendra où je préférerai une prompte mort à une vie semblable.
L'Esprit.
Je consens à te donner quelque chose à faire à l'extérieur, à condition que ce soit sans y prendre goût.
Ce seront des oeuvres que tu abhorreras, et si tu cries, tant pis pour toi.
L'Humanité.
Je me contente de tout, pourvu que je fasse quelque chose.
L'Esprit.
D'abord, je te déclare que je veux que tu éprouves ce que c'est qu'être obéissante, il faut que tu deviennes humble et soumise à toute créature, et afin que tu puisses te livrer à quelque exercice, tu pourvoiras à ta vie par ton travail.
Je veux aussi que toutes les fois que tu seras appelée pour faire des oeuvres de piété, tu te rendes auprès des malades et des pauvres sans jamais refuser.
"Tu feras tout ce à quoi je te pousserai : ainsi tu nettoieras les immondices que tu verras aux malades, et lorsqu'on te demandera de faire cela, quand bien même tu serais à parler avec Dieu, tu quitteras tout, tu te rendras promptement vers la personne qui réclamera ton assistance, et au lieu où l'on te conduira.
Jamais tu ne considéreras, ni quel est celui qui t'appelle, ni quelle est la chose que tu vas faire.
Jamais tu n'agiras par choix, il faut, au contraire, que la volonté d'autrui devienne la tienne et qu'en aucun cas tu ne fasses la tienne propre.
Je te tiendrai en ces exercices, tant que je le reconnaîtrai nécessaire, car je prétends éteindre en toi tout désordre provenant des plaisirs ou des déplaisirs que tu pourrais avoir en cette vie.
Je t'enlèverai toute imperfection, et je veux que la joie ou la peine ne t'arrête pas plus que si tu étais morte.
Et ceci je m'en assurerai par l'expérience ; je te soumettrai donc aux épreuves qui me sembleront nécessaires pour accomplir mon dessein ; et si en te faisant quelque œuvre propre à t'inspirer l'horreur ou le dégoût, je m'aperçois que tu la sentes et la voies, je t'y retiendrai, jusqu'à ce que tu ne la sentes ni ne la voies plus.
J'en dis autant de toutes les choses dont tu pourrais recevoir quelque confort ; je te ferai embrasser le contraire, jusqu'à ce que tu ne voies ni ne sentes plus rien qui puisse t'agréer ou te contenter.
Et, afin de mieux faire ces expériences, je ne m'entendrai avec toi sur rien de ce qui pourrait te plaire ou te déplaire.
Je veux pas non plus que tu contractes amitié avec personne, ni que tu retiennes une affection particulière pour des parents ; je prétends que tu aimes chacun, pauvres et riches, amis et proches, mais indifféremment, sans amour, ni attachement.
Je veux que tu ne distingues pas les uns des autres, et que tu ne te lies avec aucune personne, quelque religieuse et spirituelle qu'elle soit.
Tu n'iras chez qui que ce soit par amitié : il suffit (comme je l'ai dit) que tu ailles quand tu seras appelée : voilà la règle que tu tiendras en conversant avec les créatures sur la terre[1]."
[1] Il ne faudrait pas conclure de ce passage que la sainte défende toute affection, puisqu'il est parlé dans l'Évangile du disciple que Jésus aimait.
Elle défend au corps d'aimer, selon les sens, tandis qu'il lui est permis, à elle et à l'Esprit, d'aimer selon Dieu.
CHAPITRE XIX
De la pauvreté en laquelle l'esprit fit vivre l'humanité. Comment il lui fit visiter les pauvres et les malades.
Des calamités qu'elle y trouvait ; de l'oppression et des attaques intérieures qu'elle ressentait.
Après que l'Esprit eut parlé de la sorte à l'Humanité, il mit les choses à exécution de la manière suivante :
D'abord il la rendit si pauvre, qu'elle n'eût pas pu vivre, si Dieu n'y eût pourvu par le moyen des aumônes.
Puis, quand les dames de la Miséricorde la demandaient, selon la coutume, pour rendre divers services aux malheureux, elle y allait toujours avec elles.
Elle trouvait alors des créatures pleines de toutes sortes d'immondices, couvertes de vermine, et dont la puanteur était presque intolérable ; certains malades proféraient de terribles paroles de désespoir à cause de la grande calamité et misère en lesquelles ils étaient.
Il semblait donc qu'en entrant dans ces lieux, on pénétrait dans des sépulcres, dont toute humanité se serait épouvantée.
Mais celle-ci, au contraire, touchait ces malades, pour donner quelque rafraîchissement à leurs âmes et à leur corps.
Quelquefois aussi elle rencontrait de ces infirmes qui, outre leurs immondices et leur puanteur, criaient toujours, se plaignaient de ceux qui les servaient et leur disaient des injures.
Elle allait de plus visiter les pauvres de Saint-Lazare, et en ce lieu elle rencontrait de très grandes douleurs ; car il semblait que l'Esprit l'envoyât à la recherche de toutes les peines et de toutes les misères.
Cette créature trouva donc ces exercices bien plus pénibles qu'elle ne s'y était attendu.
Elle se sentait alors combattue de part et d'autre, à savoir : de l'horreur que lui inspiraient ces misères, et de l'occupation intérieur que lui donnait l'Esprit lorsqu'elle demeurait étrangère à toutes les impressions extérieures, sans pouvoir converser avec personne.
L'Humanité, étant dans cette situation, demeura très affligée et ne savait quel parti prendre.
Quand elle voyait l'assaut que lui livrait l'Esprit, elle lui préférait toute autre chose ; puis, quand elle contemplait les misères, il lui semblait qu'elle les voulût fuir ; mais elle ne le pouvait.
Tout cela lui paraissait excessif, considérant surtout que l'Esprit voulait qu'elle s'exerçât en ces choses sans en éprouver plus d'ennui ou d'horreur que s'il se fût agi de manger du pain, et qu'elle fût disposée à mettre à la bouche les objets les plus dégoûtants, si cela eût été nécessaire.
Cette pauvre humanité se trouvait réduite ainsi aux dernières extrémités, sans aucun remède.
Quiconque l'eût vue en ces terribles conflits en eût eu grande compassion.
Mais, comme cela se faisait pour arriver à la liberté de l'Esprit, tout paraissait facile à ce dernier, et il exécuta ces choses avec plein effet.
CHAPITRE XX
L'Humanité ayant éprouvé les deux voies des misères extérieures et de l'oppression intérieure, l'Esprit lui permet de choisir.
Et comment, lorsque le coeur lui soulevait à la vue de quelque corruption, l'Esprit lui en faisait manger.
Lorsque l'Esprit eut fait éprouver à l'Humanité toutes les misères qui ont été rapportées ci-dessus et qu'il lui eût fait comprendre tout ce qu'il exigeait d'elle, il lui parla ainsi :
L'Esprit.
Maintenant que tu connais par les effets ce que d'abord tu ne comprenais pas aussi bien par les paroles, que penses-tu faire ?
Tu as éprouvé les deux voies par lesquelles il te faut passer ; je consens à ce que tu choisisses celle qu'il te plaira de suivre.
Mais j'ajoute que je prétends te faire vivre avec les créatures, en grande sujétion, aussi longtemps qu'il me plaira ; car je ne veux pas que la partie propre ait moyen de se complaire et de s'arrêter au moindre repos en ce monde ; et ce que je dis, je le réaliserai promptement.
L'Humanité.
J'ai vu et éprouvé les deux voies et, quelque grandes et horribles que soient les misères que j'ai entendues et connues, il me semble que je vivrai plutôt avec elles, qu'avec l'assaut du rayon divin.
Mais je crains d'avoir l'une et l'autre souffrance ; c'est-à-dire, extérieurement les misères, et intérieurement l'assaut divin, lequel m'épouvante encore bien davantage : aussi je me trouve dans une grande angoisse.
L'Esprit.
Sache que quand tu auras l'une de ces choses, tu n'auras pas l'autre.
Mais je t'annonce que je te veux ôter tout ce qui est superflu, afin de vivre, autant que faire se pourra, dans la pureté et la netteté en lesquelles j'ai été créé ; et, pour arriver à cette fin, je ne ferai cas de rien de ce qui s'opposera à moi.
L'Humanité.
Puisque tu es aussi décidé, il me semble que ce serait perdre le temps d'en parler davantage.
Je m'en remets à tout ce que tu veux ; je me livre en tes mains comme morte, bien que je sois encore vivante ; mais j'espère mourir.
Et, à partir de ce moment, lorsque l'Humanité trouvait des immondices et de la vermine sur les pauvres, et qu'en les maniant il lui prenait envie de vomir, l'Esprit, afin de l'anéantir de plus en plus, lui disait :
" Prends une partie de cette "vermine, mets-la en bouche, et mange-la, si tu veux être délivrée de tes vomissements."
Quand l'Humanité entendit cela pour la première fois, elle en fut un peu épouvantée ; mais elle résolut promptement de faire la chose, et en obéissant elle fut délivrée en effet de son dégoût ; car s'efforçant d'accomplir, sans disputer, l'ordre qu'elle avait reçu, elle prit dès lors cette vermine et les autres ordures, comme on prend une médecine : cette médecine la guérit de l'angoisse et du vomissement ; de façon qu'à partir de là elle n'en tint plus compte et n'en souffrit plus ; elle se mettait en bouche les immondices, comme s'il se fût agi de perles précieuses.
Après cela, l'Esprit lui montra d'autres misères en des personnes qui avaient des ulcères incurables, et quelquefois elle les trouvait en telle puanteur, que c'était chose presque insupportable de demeurer auprès.
Mais l'Esprit l'incitait à accomplir tout ce qui était nécessaire ; de sorte qu'elle était obligée de faire de cette corruption ce qu'elle avait fait de la vermine dont il a été question ci-dessus.
Ces choses étaient si contraires à toute humanité, que par nature jamais on n'aurait pu les faire, et qu'elles semblaient suffisantes pour donner la mort.
Mais, quand elle s'était fait violence il lui en restait un contentement qui augmentait de plus en plus son courage pour l'avenir, et qui lui faisait supporter les personnes désespérées et impatientes, et tout ce qui exige de l'abnégation.
L'Esprit la tint ainsi pendant trois ans environ ; outre cela, il l'occupait toujours intérieurement, de sorte qu'elle accomplissait ces choses extérieures, sans aucune correspondance intérieure.
Il fit persévérer l'Humanité dans cette voie, jusqu'à ce qu'il fût évident que tous ces actes lui était parfaitement indifférents.
Dieu verse et répand une douceur divine dans l'âme ; l'âme se récrie à ce propos, ne voulant pas de preuves de l'amour.
Dieu cependant ne laisse pas de la tenir abîmée dans l'océan de l'amour divin.
Il lui donna une vue du très pur amour, une autre de l'amour-propre et de ses mauvaises inclinations.
Quand l'esprit eut donné satisfaction à l'humanité, il la laissa, et s'en retourna à son premier et unique objet.
Il demeurait étroitement uni à son intime amour, lequel restait si complètement resserré dans l'intérieur, qu'il ne permettait pour ainsi dire pas à l'humanité de reprendre haleine ni en chose spirituelle, ni en corporelle, de sorte qu'elle semblait hors de ses conditions d'existence.
Dieu, ayant ainsi disposé ce vaisseau à un pur et net amour, commença à éprouver sa créature par des tentations convenables et fort spirituelles.
Il répandit en elle la douceur divine d'un très grand et très suave amour.
L'âme et le corps en étaient tellement remplis, qu'ils ne pouvaient presque plus demeurer sur pieds : mais rien n'échappe à l'œil de l'amour ; l'âme, dès qu'elle vit ces grandes choses, se mit à crier et à dire qu'elle ne voulait pas de ces suavités et de ces goûts en cette vie, et qu'elle ne se souciait pas de la preuve de l'amour parce que la preuve gâte l'amour lui-même.
Je me défendrai de ces douceurs, disait-elle, et ne m'en approcherai pas ; je ne leur donnerai aucun lieu séparé et tranquille où je puisse m'en repaître, car elles sont un poison pour le pur amour.
Dieu cependant continuait à la tenir occupé dans la source de cette suavité infinie.
L'âme avait beau protester, elle n'en restait pas moins continuellement abîmée dans l'océan de l'amour divin, et cet amour lui était montré en des visions multiples et variées.
L'une de ces visions consistait en ce que Dieu lui fit voir un rayon du très pur amour dont il l'aimait ; et cette vue fut tellement puissante, que, si le Seigneur n'en eût modéré la flamme, en faisant connaître en même temps à l'âme l'amour-propre dont elle était souillée, elle n'aurait pas pu vivre davantage.
Une autre fois il tempéra la grande ardeur à laquelle elle était en proie, en lui donnant une claire vue d'elle-même, c'est-à-dire de ses mauvaises inclinaisons contraires au pur amour ; et elle comprit qu'elle eût mieux aimé ne pas exister que d'avoir offensé son amour, non seulement par le moindre péché, mais encore par le plus petit défaut.
Or, l'esprit, étant ainsi occupé, ne pensait plus à son humanité, et n'y voulait pas penser davantage, que s'il ne l'eût pas eue.
Par ce moyen il s'en déchargeait et lui faisait prendre telles habitudes que bon lui semblait.
CHAPITRE XVIII
L'humanité se lamente et demande à faire quelque chose.
L'esprit le lui accorde et lui ordonne d'être obéissante envers tout le monde, et de ne s'arrêter nulle part pour y prendre plaisir ou déplaisir.
De la règle qu'il lui donne et de la défense qu'il lui fait de contracter amitié avec qui que ce soit en particulier.
L'Humanité, voyant que sa voie se rétrécissait de jour en jour, parla de nouveau à l'Esprit, et lui dit humblement avec beaucoup de crainte et de respect :
L'Humanité. Tu m'as privée, quant à l'extérieur, de tout confort humain ; je puis donc me considérer comme morte au monde ; et si tu persévères à me tenir si resserrée, le temps viendra où je préférerai une prompte mort à une vie semblable.
L'Esprit.
Je consens à te donner quelque chose à faire à l'extérieur, à condition que ce soit sans y prendre goût.
Ce seront des oeuvres que tu abhorreras, et si tu cries, tant pis pour toi.
L'Humanité.
Je me contente de tout, pourvu que je fasse quelque chose.
L'Esprit.
D'abord, je te déclare que je veux que tu éprouves ce que c'est qu'être obéissante, il faut que tu deviennes humble et soumise à toute créature, et afin que tu puisses te livrer à quelque exercice, tu pourvoiras à ta vie par ton travail.
Je veux aussi que toutes les fois que tu seras appelée pour faire des oeuvres de piété, tu te rendes auprès des malades et des pauvres sans jamais refuser.
"Tu feras tout ce à quoi je te pousserai : ainsi tu nettoieras les immondices que tu verras aux malades, et lorsqu'on te demandera de faire cela, quand bien même tu serais à parler avec Dieu, tu quitteras tout, tu te rendras promptement vers la personne qui réclamera ton assistance, et au lieu où l'on te conduira.
Jamais tu ne considéreras, ni quel est celui qui t'appelle, ni quelle est la chose que tu vas faire.
Jamais tu n'agiras par choix, il faut, au contraire, que la volonté d'autrui devienne la tienne et qu'en aucun cas tu ne fasses la tienne propre.
Je te tiendrai en ces exercices, tant que je le reconnaîtrai nécessaire, car je prétends éteindre en toi tout désordre provenant des plaisirs ou des déplaisirs que tu pourrais avoir en cette vie.
Je t'enlèverai toute imperfection, et je veux que la joie ou la peine ne t'arrête pas plus que si tu étais morte.
Et ceci je m'en assurerai par l'expérience ; je te soumettrai donc aux épreuves qui me sembleront nécessaires pour accomplir mon dessein ; et si en te faisant quelque œuvre propre à t'inspirer l'horreur ou le dégoût, je m'aperçois que tu la sentes et la voies, je t'y retiendrai, jusqu'à ce que tu ne la sentes ni ne la voies plus.
J'en dis autant de toutes les choses dont tu pourrais recevoir quelque confort ; je te ferai embrasser le contraire, jusqu'à ce que tu ne voies ni ne sentes plus rien qui puisse t'agréer ou te contenter.
Et, afin de mieux faire ces expériences, je ne m'entendrai avec toi sur rien de ce qui pourrait te plaire ou te déplaire.
Je veux pas non plus que tu contractes amitié avec personne, ni que tu retiennes une affection particulière pour des parents ; je prétends que tu aimes chacun, pauvres et riches, amis et proches, mais indifféremment, sans amour, ni attachement.
Je veux que tu ne distingues pas les uns des autres, et que tu ne te lies avec aucune personne, quelque religieuse et spirituelle qu'elle soit.
Tu n'iras chez qui que ce soit par amitié : il suffit (comme je l'ai dit) que tu ailles quand tu seras appelée : voilà la règle que tu tiendras en conversant avec les créatures sur la terre[1]."
[1] Il ne faudrait pas conclure de ce passage que la sainte défende toute affection, puisqu'il est parlé dans l'Évangile du disciple que Jésus aimait.
Elle défend au corps d'aimer, selon les sens, tandis qu'il lui est permis, à elle et à l'Esprit, d'aimer selon Dieu.
CHAPITRE XIX
De la pauvreté en laquelle l'esprit fit vivre l'humanité. Comment il lui fit visiter les pauvres et les malades.
Des calamités qu'elle y trouvait ; de l'oppression et des attaques intérieures qu'elle ressentait.
Après que l'Esprit eut parlé de la sorte à l'Humanité, il mit les choses à exécution de la manière suivante :
D'abord il la rendit si pauvre, qu'elle n'eût pas pu vivre, si Dieu n'y eût pourvu par le moyen des aumônes.
Puis, quand les dames de la Miséricorde la demandaient, selon la coutume, pour rendre divers services aux malheureux, elle y allait toujours avec elles.
Elle trouvait alors des créatures pleines de toutes sortes d'immondices, couvertes de vermine, et dont la puanteur était presque intolérable ; certains malades proféraient de terribles paroles de désespoir à cause de la grande calamité et misère en lesquelles ils étaient.
Il semblait donc qu'en entrant dans ces lieux, on pénétrait dans des sépulcres, dont toute humanité se serait épouvantée.
Mais celle-ci, au contraire, touchait ces malades, pour donner quelque rafraîchissement à leurs âmes et à leur corps.
Quelquefois aussi elle rencontrait de ces infirmes qui, outre leurs immondices et leur puanteur, criaient toujours, se plaignaient de ceux qui les servaient et leur disaient des injures.
Elle allait de plus visiter les pauvres de Saint-Lazare, et en ce lieu elle rencontrait de très grandes douleurs ; car il semblait que l'Esprit l'envoyât à la recherche de toutes les peines et de toutes les misères.
Cette créature trouva donc ces exercices bien plus pénibles qu'elle ne s'y était attendu.
Elle se sentait alors combattue de part et d'autre, à savoir : de l'horreur que lui inspiraient ces misères, et de l'occupation intérieur que lui donnait l'Esprit lorsqu'elle demeurait étrangère à toutes les impressions extérieures, sans pouvoir converser avec personne.
L'Humanité, étant dans cette situation, demeura très affligée et ne savait quel parti prendre.
Quand elle voyait l'assaut que lui livrait l'Esprit, elle lui préférait toute autre chose ; puis, quand elle contemplait les misères, il lui semblait qu'elle les voulût fuir ; mais elle ne le pouvait.
Tout cela lui paraissait excessif, considérant surtout que l'Esprit voulait qu'elle s'exerçât en ces choses sans en éprouver plus d'ennui ou d'horreur que s'il se fût agi de manger du pain, et qu'elle fût disposée à mettre à la bouche les objets les plus dégoûtants, si cela eût été nécessaire.
Cette pauvre humanité se trouvait réduite ainsi aux dernières extrémités, sans aucun remède.
Quiconque l'eût vue en ces terribles conflits en eût eu grande compassion.
Mais, comme cela se faisait pour arriver à la liberté de l'Esprit, tout paraissait facile à ce dernier, et il exécuta ces choses avec plein effet.
CHAPITRE XX
L'Humanité ayant éprouvé les deux voies des misères extérieures et de l'oppression intérieure, l'Esprit lui permet de choisir.
Et comment, lorsque le coeur lui soulevait à la vue de quelque corruption, l'Esprit lui en faisait manger.
Lorsque l'Esprit eut fait éprouver à l'Humanité toutes les misères qui ont été rapportées ci-dessus et qu'il lui eût fait comprendre tout ce qu'il exigeait d'elle, il lui parla ainsi :
L'Esprit.
Maintenant que tu connais par les effets ce que d'abord tu ne comprenais pas aussi bien par les paroles, que penses-tu faire ?
Tu as éprouvé les deux voies par lesquelles il te faut passer ; je consens à ce que tu choisisses celle qu'il te plaira de suivre.
Mais j'ajoute que je prétends te faire vivre avec les créatures, en grande sujétion, aussi longtemps qu'il me plaira ; car je ne veux pas que la partie propre ait moyen de se complaire et de s'arrêter au moindre repos en ce monde ; et ce que je dis, je le réaliserai promptement.
L'Humanité.
J'ai vu et éprouvé les deux voies et, quelque grandes et horribles que soient les misères que j'ai entendues et connues, il me semble que je vivrai plutôt avec elles, qu'avec l'assaut du rayon divin.
Mais je crains d'avoir l'une et l'autre souffrance ; c'est-à-dire, extérieurement les misères, et intérieurement l'assaut divin, lequel m'épouvante encore bien davantage : aussi je me trouve dans une grande angoisse.
L'Esprit.
Sache que quand tu auras l'une de ces choses, tu n'auras pas l'autre.
Mais je t'annonce que je te veux ôter tout ce qui est superflu, afin de vivre, autant que faire se pourra, dans la pureté et la netteté en lesquelles j'ai été créé ; et, pour arriver à cette fin, je ne ferai cas de rien de ce qui s'opposera à moi.
L'Humanité.
Puisque tu es aussi décidé, il me semble que ce serait perdre le temps d'en parler davantage.
Je m'en remets à tout ce que tu veux ; je me livre en tes mains comme morte, bien que je sois encore vivante ; mais j'espère mourir.
Et, à partir de ce moment, lorsque l'Humanité trouvait des immondices et de la vermine sur les pauvres, et qu'en les maniant il lui prenait envie de vomir, l'Esprit, afin de l'anéantir de plus en plus, lui disait :
" Prends une partie de cette "vermine, mets-la en bouche, et mange-la, si tu veux être délivrée de tes vomissements."
Quand l'Humanité entendit cela pour la première fois, elle en fut un peu épouvantée ; mais elle résolut promptement de faire la chose, et en obéissant elle fut délivrée en effet de son dégoût ; car s'efforçant d'accomplir, sans disputer, l'ordre qu'elle avait reçu, elle prit dès lors cette vermine et les autres ordures, comme on prend une médecine : cette médecine la guérit de l'angoisse et du vomissement ; de façon qu'à partir de là elle n'en tint plus compte et n'en souffrit plus ; elle se mettait en bouche les immondices, comme s'il se fût agi de perles précieuses.
Après cela, l'Esprit lui montra d'autres misères en des personnes qui avaient des ulcères incurables, et quelquefois elle les trouvait en telle puanteur, que c'était chose presque insupportable de demeurer auprès.
Mais l'Esprit l'incitait à accomplir tout ce qui était nécessaire ; de sorte qu'elle était obligée de faire de cette corruption ce qu'elle avait fait de la vermine dont il a été question ci-dessus.
Ces choses étaient si contraires à toute humanité, que par nature jamais on n'aurait pu les faire, et qu'elles semblaient suffisantes pour donner la mort.
Mais, quand elle s'était fait violence il lui en restait un contentement qui augmentait de plus en plus son courage pour l'avenir, et qui lui faisait supporter les personnes désespérées et impatientes, et tout ce qui exige de l'abnégation.
L'Esprit la tint ainsi pendant trois ans environ ; outre cela, il l'occupait toujours intérieurement, de sorte qu'elle accomplissait ces choses extérieures, sans aucune correspondance intérieure.
Il fit persévérer l'Humanité dans cette voie, jusqu'à ce qu'il fût évident que tous ces actes lui était parfaitement indifférents.
A suivre....
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE XXI
L'Esprit fait condescendre l'Humanité à demeurer dans un hôpital, où elle serait comme une servante, obéissant à tout ce qu'on lui commandait.
Et, lorsqu'elle fut accoutumée aux choses qu'elle abhorrait naturellement, elle fut faite gouvernante de l'hôpital, et reçut la prudence nécessaire pour remplir une telle charge.
Le feu amoureux va sans cesse croissant en elle.
Un autre exercice de grande sujétion d'esprit et de corps fut ensuite imposé à cette créature en la façon suivante :
Elle fut requise de demeurer à l'hôpital pour y servir.
La chose se fit et en ce lieu elle était soumise à ceux qui dirigeaient l'hospice comme si elle eût été leur servante.
Elle n'osait presque pas parler ; elle demeurait tranquille dans une des chambres et obéissait à tout ce qu'on commandait.
Quand on lui donnait le soin d'une chose quelconque, elle la faisait en toute diligence ; et cependant les habitants de l'hôpital ne faisaient d'elle aucun cas.
Jamais elle n'avait de correspondance intérieure en rien, étant toujours ravie hors d'elle-même.
Alors l'Humanité dit à l'Esprit :
L'Humanité.
Si tu veux que je persévère en ces exercices, fais que je puisse les accomplir ; je ne refuse rien.
Mais il faut nécessairement qu'ils soient accompagnés d'un peu d'amour accidentel, autrement ils seront mal gouvernés.
Et une correspondance, avec laquelle et par laquelle elle opérait, lui fut donnée.
Mais elle ne lui était accordée qu'en tant qu'il était nécessaire, en l'instant qu'elle agissait et pour l'œuvre qu'elle faisait ; immédiatement après, cette correspondance et la mémoire de l'œuvre lui étaient ôtées.
L'Esprit la laissa pendant de longues années en tels exercices et en grande pauvreté.
Quand il eut éprouvé l'Humanité dans les misères et sujétions susdites, et qu'il s'en vit complètement le maître à la suite de l'expérience qu'elle avait faite des choses les plus en horreur à la nature, et qui maintenant ne lui soulevaient plus le coeur, et, après qu'il eut reconnu qu'elle s'employait à toutes ces choses sans ennuis ni contradiction, quelque abjectes et puantes qu'elles fussent, alors il la mit à une autre épreuve.
Il la fit supérieur du même hôpital pour le gouverner et le régir ; afin de voir si, à la suite de l'estime et des éloges, sa partie maligne reparaîtrait.
Il la tint pendant un bon nombre d'années dans cette nouvelle occupation.
Elle y était fort avisée et avait mémoire des besoins et des nécessités de chacun ; mais l'Esprit l'assistait, car sans son aide elle n'aurait pu y suffire.
Et avec tout ce grand travail cette créature était fort resserrée dans son intérieur, car son amour s'était secrètement accru par l'anéantissement des sentiments humains.
A mesure qu'elle avait perdu l'habitude de l'amour-propre, elle avait acquis la possession de l'amour pur et net, lequel la faisait s'anéantir de plus en plus, en pénétrant dans son intérieur et en y habitant.
Ainsi cette âme brûlante d'amour se consumait dans le feu divin ; et, comme le feu croissait continuellement, elle se consumait de plus en plus.
C'est pourquoi elle faisait ses services avec grande vélocité et ne se reposait jamais, afin de se distraire de ce feu qui chaque jour l'assiégeait davantage ; elle n'en pouvait parler à personne mais, elle en discourait seulement avec elle-même sans être entendue.
Alors l'Esprit, qui avait gouverné l'Humanité de cette sorte dit :
Désormais je ne l'appellerai plus créature humaine, parce que je la vois toute perdue dans le Seigneur et que je n'y retrouve rien qui vienne du principe purement humain séparé de Dieu.
FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE
L'Esprit fait condescendre l'Humanité à demeurer dans un hôpital, où elle serait comme une servante, obéissant à tout ce qu'on lui commandait.
Et, lorsqu'elle fut accoutumée aux choses qu'elle abhorrait naturellement, elle fut faite gouvernante de l'hôpital, et reçut la prudence nécessaire pour remplir une telle charge.
Le feu amoureux va sans cesse croissant en elle.
Un autre exercice de grande sujétion d'esprit et de corps fut ensuite imposé à cette créature en la façon suivante :
Elle fut requise de demeurer à l'hôpital pour y servir.
La chose se fit et en ce lieu elle était soumise à ceux qui dirigeaient l'hospice comme si elle eût été leur servante.
Elle n'osait presque pas parler ; elle demeurait tranquille dans une des chambres et obéissait à tout ce qu'on commandait.
Quand on lui donnait le soin d'une chose quelconque, elle la faisait en toute diligence ; et cependant les habitants de l'hôpital ne faisaient d'elle aucun cas.
Jamais elle n'avait de correspondance intérieure en rien, étant toujours ravie hors d'elle-même.
Alors l'Humanité dit à l'Esprit :
L'Humanité.
Si tu veux que je persévère en ces exercices, fais que je puisse les accomplir ; je ne refuse rien.
Mais il faut nécessairement qu'ils soient accompagnés d'un peu d'amour accidentel, autrement ils seront mal gouvernés.
Et une correspondance, avec laquelle et par laquelle elle opérait, lui fut donnée.
Mais elle ne lui était accordée qu'en tant qu'il était nécessaire, en l'instant qu'elle agissait et pour l'œuvre qu'elle faisait ; immédiatement après, cette correspondance et la mémoire de l'œuvre lui étaient ôtées.
L'Esprit la laissa pendant de longues années en tels exercices et en grande pauvreté.
Quand il eut éprouvé l'Humanité dans les misères et sujétions susdites, et qu'il s'en vit complètement le maître à la suite de l'expérience qu'elle avait faite des choses les plus en horreur à la nature, et qui maintenant ne lui soulevaient plus le coeur, et, après qu'il eut reconnu qu'elle s'employait à toutes ces choses sans ennuis ni contradiction, quelque abjectes et puantes qu'elles fussent, alors il la mit à une autre épreuve.
Il la fit supérieur du même hôpital pour le gouverner et le régir ; afin de voir si, à la suite de l'estime et des éloges, sa partie maligne reparaîtrait.
Il la tint pendant un bon nombre d'années dans cette nouvelle occupation.
Elle y était fort avisée et avait mémoire des besoins et des nécessités de chacun ; mais l'Esprit l'assistait, car sans son aide elle n'aurait pu y suffire.
Et avec tout ce grand travail cette créature était fort resserrée dans son intérieur, car son amour s'était secrètement accru par l'anéantissement des sentiments humains.
A mesure qu'elle avait perdu l'habitude de l'amour-propre, elle avait acquis la possession de l'amour pur et net, lequel la faisait s'anéantir de plus en plus, en pénétrant dans son intérieur et en y habitant.
Ainsi cette âme brûlante d'amour se consumait dans le feu divin ; et, comme le feu croissait continuellement, elle se consumait de plus en plus.
C'est pourquoi elle faisait ses services avec grande vélocité et ne se reposait jamais, afin de se distraire de ce feu qui chaque jour l'assiégeait davantage ; elle n'en pouvait parler à personne mais, elle en discourait seulement avec elle-même sans être entendue.
Alors l'Esprit, qui avait gouverné l'Humanité de cette sorte dit :
Désormais je ne l'appellerai plus créature humaine, parce que je la vois toute perdue dans le Seigneur et que je n'y retrouve rien qui vienne du principe purement humain séparé de Dieu.
FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE
DIALOGUES
DEUXIÈME PARTIE
QUELQUES RÉFLEXIONS
sur le second livre des Dialogues de Sainte Catherine de Gênes
Le second livre des Dialogues est de tous les écrits de sainte Catherine de Gênes le plus difficile à comprendre, pour ceux qui ne connaissent ni le langage ni les habitudes des mystiques ; nous croyons devoir en prévenir le lecteur.
Nous avons traduit ce livre avec toute l'exactitude dont nous avons été capable.
Il expose une série d'opérations surnaturelles, dépassant la portée de l'entendement humain, et par lesquelles Dieu fait arriver une âme à la pureté parfaite, et à l'union la plus intime avec son créateur.
Ces opérations dans lesquelles le Seigneur agit, après avoir pris le consentement de l'âme, la transforment en quelque sorte en Dieu, la lavent de toutes ses taches, et la rendent, pour ainsi dire, un pur esprit semblable à ceux qui entourent le trône de l'Éternel.
Catherine décrit ces opérations, elle peint les souffrances par lesquelles il faut que l'âme passe pour se dépouiller entièrement du moi du vieil homme, et les douleurs auxquelles est condamnée l'humanité, qui doit être purifiée ici-bas de toutes ses souillures et qui se trouve liée à une âme placée en dehors des conditions habituelles de l'existence présente, et déjà toute céleste.
L'entendement, la mémoire et la volonté de cette âme étant entièrement perdues en Dieu, l'humanité reste privée de la correspondance de toutes ces facultés, et cependant il semble impossible qu'elle puisse vivre sans cette correspondance.
Il règne dans le second livre des Dialogues une apparente confusion qui en rend l'intelligence excessivement difficile lorsqu'on n'y prête pas l'attention la plus soutenue.
Ainsi, au chapitre III, l'humanité, menacée de nouvelles douleurs, désire connaître la cause de cette nécessité de souffrir, il lui est promis qu'elle la saura, et cependant on ne trouve la réponse à cette question que dans les chapitres VI et suivants.
Ainsi encore Catherine revient dans plusieurs chapitres à diverses opérations déjà traitées sous un autre point de vue dans le livre premier ; et le lecteur, sachant que les Dialogues ne sont autre chose que l'histoire de la vie intérieure et mystique de la sainte elle-même, et considérant le livre second comme la suite de celui qui le précède, est momentanément dérouté.
La conversion de l'âme par exemple, la manière dont elle répond à l'appel divin, sa douleur, ses remords, ses pénitences, et ses mortifications, déjà racontées à la suite du voyage avec le corps et l'amour-propre ( Liv. I, ch. VIIe et suivants ), sont encore rappelés au livre second (ch. IIIe et suivants), mais d'une manière différente, pour établir la liaison avec ce qui suit, et sans que rien indique ce retour vers une chose déjà traitée précédemment.
Il faut donc s'efforcer d'entrer tout à fait dans la pensée de la sainte, pour la comprendre et ne pas perdre le fil de ses idées.
Les chapitres IVe, Ve et suivants peignent la sollicitude et l'amour de Dieu envers l'homme, et leurs merveilleux effets ;au chapitre VIIIe le Seigneur montre à l'âme que sans son aide elle n'eût rien fait, et qu'ayant employé à se purifier de ses péchés passés tout le temps qui lui avait été donné pour croître en grâce et en gloire, elle n'a proprement encore rien mérité.
La partie la plus sublime et en même temps la plus difficile du livre second commence avec le chapitre IXe.
Catherine décrit dans ce chapitre et dans ceux qui le suivent les opérations par lesquelles il fut passer pour arriver à la parfaite pauvreté d'esprit, c'est-à-dire à ce dépouillement complet du moi du vieil homme auquel le royaume du ciel a été promis (Mt. v, 3).
La sainte explique sa pensée au moyen d'une conversation dans laquelle l'esprit menace l'âme et le corps de leur infliger les douleurs et les afflictions les plus cruelles, en les laissant dans un abandon complet, sans aucune correspondance de sa part, pour les punir de l'avoir laissé lui-même autrefois dans la privation de toute vie spirituelle.
Il déclare à l'âme qu'il veut se séparer d'elle et se perdre tout en Dieu ; mais d'abord il lui reproche les larcins dont elle s'est rendue coupable, depuis sa conversion, en s'appropriant les grâces dont le Seigneur l'a comblée pour la tirer de l'état misérable dans lequel elle se trouvait, en attribuant à elle-même et à ses mérites des choses qui étaient un don purement gratuit de la miséricorde divine.
Il faudra qu'elle souffre volontairement et qu'il lui semble être abandonnée de Dieu en expiation de ce crime, et afin d'arriver à être parfaitement nue et dépouillée.
L'âme s'y soumet. Catherine dépeint ensuite son abandon, son délaissement, ses souffrances, le double martyre de l'âme et du corps, tandis que l'amour divin, dont elle n'avait plus la conscience, consommait en lui l'esprit, l'âme et les sentiments corporels.
Elle consacre à ce sujet les derniers chapitres du livre second, et elle termine en décrivant les peines auxquelles est livrée la créature qui vit en terre tout en avant déjà l'esprit au ciel, et les douleurs par lesquelles il faut passer ici-bas pour satisfaire à la justice divine, de manière à être exempte du purgatoire et à arriver de la vie présente à la béatitude éternelle.
M. Le Vicomte Marie-Théodore de Bussièrre
DEUXIÈME PARTIE
Des colloques de Dieu, et quelquefois aussi de l'esprit avec l'ami. Des moyens admirables par lesquels Dieu dépouille l'âme et consume toutes ses imperfections.
CHAPITRE PREMIER
D'un nouvel amour que Dieu lui verse et lui répand dans le coeur, et par lequel il tire à soi l'esprit ; celui-ci est suivi de l'âme dont les puissances sont comme noyées et submergées en cet amour.
Le corps qui est assujetti à l'âme reste comme perdu, et hors de son être naturel.
Après que cette créature eut été dépouillée du monde de la chair, des biens, des exercices, des affections, et de toutes choses, Dieu seul excepté, le Seigneur voulut encore la dépouiller d'elle-même, et séparer l'âme de l'esprit[1].
Cette séparation est accompagnée d'une souffrance fort grande et fort subtile, difficile à exprimer et à comprendre, pour quiconque n'en a pas connaissance par l'expérience propre éclairée de la lumière divine.
Dieu lui versa donc dans le coeur un nouvel amour, si véhément, qu'il tira à lui l'âme avec toutes ses puissances, de telle manière qu'elle était enlevée à son être naturel.
La continuelle occupation que lui donnait ce nouvel amour l'empêchait de se délecter en quoi que ce soit, et de regarder le ciel ou la terre.
Cette âme ne pouvait plus correspondre aux sentiments du corps ; celui-ci également demeurait donc, en quelque sorte, en dehors de son être naturel : il restait confus, étonné, ne sachant où il était, ni ce qu'il devait faire ou dire.
De ce mode d'existence qui n'était encore ni compris ni connu de la créature résultèrent alors de nouvelles opérations également inconnues ; c'était comme une chaîne tirée ainsi que nous allons le dire :
Dieu, qui est esprit, attire à soi l'esprit de l'homme, et cet esprit y demeure occupé.
L'âme, qui ne peut rester sans son esprit, le suit, et y est tenue occupé à son tour, car elle ne saurait vivre sans lui ; elle demeure ainsi, ne pouvant faire autrement, tant que Dieu tient l'esprit en soi.
Le corps, qui est sujet de l'âme, reste comme perdu et en dehors de ses conditions d'existence, car il ne trouve point, dans ses propres sentiments, sa nourriture naturelle ; il ne peut l'avoir que par le moyen de l'âme, et celle-ci ne lui correspond plus ; l'esprit seul reste quasi dans son être, conformément à la fin pour laquelle Dieu l'a créé ; dépouillé de la sorte, il demeure nu en Dieu, et il y est retenu tant que cela plaît au Seigneur, lequel ne lui laisse que ce qui est nécessaire pour animer le corps.
L'âme et le corps retournent ensuite à leurs opérations naturelles puis, lorsqu'ils sont restaurés par le repos de l'esprit, Dieu tire de nouveau cet esprit à sa précédente opération de cette manière, toutes les imperfections animales se consument peu à peu.
L'âme étant ainsi purgée, reste un pur esprit ; le corps, nettoyé et dépouillé de ses habitudes et inclinaisons mauvaises, demeure apte à s'unir à son esprit en temps opportun et sans empêchement.
Le Seigneur fait cette oeuvre uniquement par amour ; et cet amour est si grand, qu'il opère continuellement pour le profit et l'utilité de l'âme sa bien-aimée, sans que cette dernière y concoure ; Dieu agit de la manière suivante : il remplit l'âme d'un amour secret lequel la dépouille de tout son être naturel ; l'oeuvre est donc surnaturelle, elle s'accomplit dans l'océan de ce secret amour, lequel est si grand, qu'il faut qu'un chacun qui y est porté y demeure noyé et comme mort.
Cet amour surpasse l'entendement, la mémoire et la volonté ; et ces puissances étant ainsi submergées dans cette mer du divin amour et tirées hors des conditions d'existences dans lesquelles l'âme a été créée, tout ce qui d'ailleurs se présenterait à elles leur serait un enfer.
L'âme alors, bien qu'elle soit encore en cette vie, participe en quelque sorte au bonheur des bienheureux ; mais cela lui est caché à elle-même : car une chose si grande et si haute ne se peut comprendre, elle excède les facultés de ses puissances ; celle-ci cependant ne veulent s'occuper de rien d'autre, elles demeurent contentes et plongées dans ce subtil amour : et quand on leur parle des objets créés, elles semblent privées de sens, sans vigueur, ni vertu ; elles ne savent pas même où elles se trouvent, car toute cette oeuvre reste ensevelie en Dieu : et toujours elle va croissant ; et l'esprit se trouve de jour en jour plus content et plus fort pour supporter ce qu'il plaira à Dieu de lui ménager.
Mais, cependant, il n'est attentif qu'à cela ; car l'âme, comme si elle était morte, ne s'en mêle pas et n'a aucune nouvelle de cette œuvre.
Mais Dieu voulant tirer par ce moyen l'âme à la perfection à laquelle il l'a destinée, et le corps devant vivre encore en terre, comment vivra-t-il en telle aliénation de son être naturel ? Il ne peut se servir, ni de l'entendement, ni de la mémoire, ni de la volonté en choses de ce monde, ni se délecter en choses spirituelles, il vivra donc en grands tourments de cette manière.
Toutefois, Dieu, ayant pris le soin de cette affaire, et ne voulant pas qu'aucun autre que lui s'en mêlât, procédait ainsi que nous allons le dire :
.
DEUXIÈME PARTIE
QUELQUES RÉFLEXIONS
sur le second livre des Dialogues de Sainte Catherine de Gênes
Le second livre des Dialogues est de tous les écrits de sainte Catherine de Gênes le plus difficile à comprendre, pour ceux qui ne connaissent ni le langage ni les habitudes des mystiques ; nous croyons devoir en prévenir le lecteur.
Nous avons traduit ce livre avec toute l'exactitude dont nous avons été capable.
Il expose une série d'opérations surnaturelles, dépassant la portée de l'entendement humain, et par lesquelles Dieu fait arriver une âme à la pureté parfaite, et à l'union la plus intime avec son créateur.
Ces opérations dans lesquelles le Seigneur agit, après avoir pris le consentement de l'âme, la transforment en quelque sorte en Dieu, la lavent de toutes ses taches, et la rendent, pour ainsi dire, un pur esprit semblable à ceux qui entourent le trône de l'Éternel.
Catherine décrit ces opérations, elle peint les souffrances par lesquelles il faut que l'âme passe pour se dépouiller entièrement du moi du vieil homme, et les douleurs auxquelles est condamnée l'humanité, qui doit être purifiée ici-bas de toutes ses souillures et qui se trouve liée à une âme placée en dehors des conditions habituelles de l'existence présente, et déjà toute céleste.
L'entendement, la mémoire et la volonté de cette âme étant entièrement perdues en Dieu, l'humanité reste privée de la correspondance de toutes ces facultés, et cependant il semble impossible qu'elle puisse vivre sans cette correspondance.
Il règne dans le second livre des Dialogues une apparente confusion qui en rend l'intelligence excessivement difficile lorsqu'on n'y prête pas l'attention la plus soutenue.
Ainsi, au chapitre III, l'humanité, menacée de nouvelles douleurs, désire connaître la cause de cette nécessité de souffrir, il lui est promis qu'elle la saura, et cependant on ne trouve la réponse à cette question que dans les chapitres VI et suivants.
Ainsi encore Catherine revient dans plusieurs chapitres à diverses opérations déjà traitées sous un autre point de vue dans le livre premier ; et le lecteur, sachant que les Dialogues ne sont autre chose que l'histoire de la vie intérieure et mystique de la sainte elle-même, et considérant le livre second comme la suite de celui qui le précède, est momentanément dérouté.
La conversion de l'âme par exemple, la manière dont elle répond à l'appel divin, sa douleur, ses remords, ses pénitences, et ses mortifications, déjà racontées à la suite du voyage avec le corps et l'amour-propre ( Liv. I, ch. VIIe et suivants ), sont encore rappelés au livre second (ch. IIIe et suivants), mais d'une manière différente, pour établir la liaison avec ce qui suit, et sans que rien indique ce retour vers une chose déjà traitée précédemment.
Il faut donc s'efforcer d'entrer tout à fait dans la pensée de la sainte, pour la comprendre et ne pas perdre le fil de ses idées.
Les chapitres IVe, Ve et suivants peignent la sollicitude et l'amour de Dieu envers l'homme, et leurs merveilleux effets ;au chapitre VIIIe le Seigneur montre à l'âme que sans son aide elle n'eût rien fait, et qu'ayant employé à se purifier de ses péchés passés tout le temps qui lui avait été donné pour croître en grâce et en gloire, elle n'a proprement encore rien mérité.
La partie la plus sublime et en même temps la plus difficile du livre second commence avec le chapitre IXe.
Catherine décrit dans ce chapitre et dans ceux qui le suivent les opérations par lesquelles il fut passer pour arriver à la parfaite pauvreté d'esprit, c'est-à-dire à ce dépouillement complet du moi du vieil homme auquel le royaume du ciel a été promis (Mt. v, 3).
La sainte explique sa pensée au moyen d'une conversation dans laquelle l'esprit menace l'âme et le corps de leur infliger les douleurs et les afflictions les plus cruelles, en les laissant dans un abandon complet, sans aucune correspondance de sa part, pour les punir de l'avoir laissé lui-même autrefois dans la privation de toute vie spirituelle.
Il déclare à l'âme qu'il veut se séparer d'elle et se perdre tout en Dieu ; mais d'abord il lui reproche les larcins dont elle s'est rendue coupable, depuis sa conversion, en s'appropriant les grâces dont le Seigneur l'a comblée pour la tirer de l'état misérable dans lequel elle se trouvait, en attribuant à elle-même et à ses mérites des choses qui étaient un don purement gratuit de la miséricorde divine.
Il faudra qu'elle souffre volontairement et qu'il lui semble être abandonnée de Dieu en expiation de ce crime, et afin d'arriver à être parfaitement nue et dépouillée.
L'âme s'y soumet. Catherine dépeint ensuite son abandon, son délaissement, ses souffrances, le double martyre de l'âme et du corps, tandis que l'amour divin, dont elle n'avait plus la conscience, consommait en lui l'esprit, l'âme et les sentiments corporels.
Elle consacre à ce sujet les derniers chapitres du livre second, et elle termine en décrivant les peines auxquelles est livrée la créature qui vit en terre tout en avant déjà l'esprit au ciel, et les douleurs par lesquelles il faut passer ici-bas pour satisfaire à la justice divine, de manière à être exempte du purgatoire et à arriver de la vie présente à la béatitude éternelle.
M. Le Vicomte Marie-Théodore de Bussièrre
DEUXIÈME PARTIE
Des colloques de Dieu, et quelquefois aussi de l'esprit avec l'ami. Des moyens admirables par lesquels Dieu dépouille l'âme et consume toutes ses imperfections.
CHAPITRE PREMIER
D'un nouvel amour que Dieu lui verse et lui répand dans le coeur, et par lequel il tire à soi l'esprit ; celui-ci est suivi de l'âme dont les puissances sont comme noyées et submergées en cet amour.
Le corps qui est assujetti à l'âme reste comme perdu, et hors de son être naturel.
Après que cette créature eut été dépouillée du monde de la chair, des biens, des exercices, des affections, et de toutes choses, Dieu seul excepté, le Seigneur voulut encore la dépouiller d'elle-même, et séparer l'âme de l'esprit[1].
Cette séparation est accompagnée d'une souffrance fort grande et fort subtile, difficile à exprimer et à comprendre, pour quiconque n'en a pas connaissance par l'expérience propre éclairée de la lumière divine.
Dieu lui versa donc dans le coeur un nouvel amour, si véhément, qu'il tira à lui l'âme avec toutes ses puissances, de telle manière qu'elle était enlevée à son être naturel.
La continuelle occupation que lui donnait ce nouvel amour l'empêchait de se délecter en quoi que ce soit, et de regarder le ciel ou la terre.
Cette âme ne pouvait plus correspondre aux sentiments du corps ; celui-ci également demeurait donc, en quelque sorte, en dehors de son être naturel : il restait confus, étonné, ne sachant où il était, ni ce qu'il devait faire ou dire.
De ce mode d'existence qui n'était encore ni compris ni connu de la créature résultèrent alors de nouvelles opérations également inconnues ; c'était comme une chaîne tirée ainsi que nous allons le dire :
Dieu, qui est esprit, attire à soi l'esprit de l'homme, et cet esprit y demeure occupé.
L'âme, qui ne peut rester sans son esprit, le suit, et y est tenue occupé à son tour, car elle ne saurait vivre sans lui ; elle demeure ainsi, ne pouvant faire autrement, tant que Dieu tient l'esprit en soi.
Le corps, qui est sujet de l'âme, reste comme perdu et en dehors de ses conditions d'existence, car il ne trouve point, dans ses propres sentiments, sa nourriture naturelle ; il ne peut l'avoir que par le moyen de l'âme, et celle-ci ne lui correspond plus ; l'esprit seul reste quasi dans son être, conformément à la fin pour laquelle Dieu l'a créé ; dépouillé de la sorte, il demeure nu en Dieu, et il y est retenu tant que cela plaît au Seigneur, lequel ne lui laisse que ce qui est nécessaire pour animer le corps.
L'âme et le corps retournent ensuite à leurs opérations naturelles puis, lorsqu'ils sont restaurés par le repos de l'esprit, Dieu tire de nouveau cet esprit à sa précédente opération de cette manière, toutes les imperfections animales se consument peu à peu.
L'âme étant ainsi purgée, reste un pur esprit ; le corps, nettoyé et dépouillé de ses habitudes et inclinaisons mauvaises, demeure apte à s'unir à son esprit en temps opportun et sans empêchement.
Le Seigneur fait cette oeuvre uniquement par amour ; et cet amour est si grand, qu'il opère continuellement pour le profit et l'utilité de l'âme sa bien-aimée, sans que cette dernière y concoure ; Dieu agit de la manière suivante : il remplit l'âme d'un amour secret lequel la dépouille de tout son être naturel ; l'oeuvre est donc surnaturelle, elle s'accomplit dans l'océan de ce secret amour, lequel est si grand, qu'il faut qu'un chacun qui y est porté y demeure noyé et comme mort.
Cet amour surpasse l'entendement, la mémoire et la volonté ; et ces puissances étant ainsi submergées dans cette mer du divin amour et tirées hors des conditions d'existences dans lesquelles l'âme a été créée, tout ce qui d'ailleurs se présenterait à elles leur serait un enfer.
L'âme alors, bien qu'elle soit encore en cette vie, participe en quelque sorte au bonheur des bienheureux ; mais cela lui est caché à elle-même : car une chose si grande et si haute ne se peut comprendre, elle excède les facultés de ses puissances ; celle-ci cependant ne veulent s'occuper de rien d'autre, elles demeurent contentes et plongées dans ce subtil amour : et quand on leur parle des objets créés, elles semblent privées de sens, sans vigueur, ni vertu ; elles ne savent pas même où elles se trouvent, car toute cette oeuvre reste ensevelie en Dieu : et toujours elle va croissant ; et l'esprit se trouve de jour en jour plus content et plus fort pour supporter ce qu'il plaira à Dieu de lui ménager.
Mais, cependant, il n'est attentif qu'à cela ; car l'âme, comme si elle était morte, ne s'en mêle pas et n'a aucune nouvelle de cette œuvre.
Mais Dieu voulant tirer par ce moyen l'âme à la perfection à laquelle il l'a destinée, et le corps devant vivre encore en terre, comment vivra-t-il en telle aliénation de son être naturel ? Il ne peut se servir, ni de l'entendement, ni de la mémoire, ni de la volonté en choses de ce monde, ni se délecter en choses spirituelles, il vivra donc en grands tourments de cette manière.
Toutefois, Dieu, ayant pris le soin de cette affaire, et ne voulant pas qu'aucun autre que lui s'en mêlât, procédait ainsi que nous allons le dire :
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[1] Or la parole de Dieu est vivante et efficace ; elle perce plus qu'une épée à deux tranchants, elle entre et pénètre jusque dans les replis de l'âme et de l'esprit, jusque dans les jointures et dans les moelles ; elle démêle les pensées et les mouvements du cœur (S. Paul. Heb. IV, 12)
A suivre...
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE II
Du mode que Dieu tient dans les opérations de son amour.
De la faiblesse du corps, et de l'aide qu'il a des choses créées.
De la grandeur de la peine de l'humanité, elle s'en plaint sans se plaindre, l'intérieur étant conforme à la volonté de Dieu.
Combien le Purgatoire est doux, sévère et plein de miséricorde, en cette vie.
Quelquefois il allégeait cette opération de l'amour, il permettait à l'âme de respirer, et laissait correspondre l'esprit avec l'âme, et l'âme avec le corps ; et les sentiments de l'âme et du corps se trouvaient aptes à recevoir quelque soulagement des choses créées et étaient ainsi vivifiés.
Mais quand Dieu attirait l'esprit à soi tout le reste le suivait, alors que le corps demeurait comme mort, et si étranger à son être naturel, que lorsqu'il revenait à lui, il était tout débile et ne se pouvait aider de rien.
L'humanité était incapable de manger, de boire, de faire acte de créature vivante : elle était, pour ainsi dire, hors de tout sentiment et avait besoin d'être gouvernée comme un petit enfant qui ne sait que pleurer et, ce qui était pis encore, elle ne pouvait se complaire en ce que la nature désire, car ce qu'on appelle goût n'existait plus en elle, et était tiré violemment hors de son être.
Quand l'âme fut demeurée quelque temps ainsi, elle se tourna vers son Seigneur, lui fit une grande complainte, et lui dit :
L'Âme.
Ô mon Seigneur ! jusqu'à présent je me trouvais en grande paix, contentement et délectation ; toutes mes puissances jouissaient de l'amour que vous me donniez, et il leur semblait être en paradis.
Mais à présent elles sont comme chassées hors de leur demeure, reléguées dans un pays qui leur est inconnu, où tout est contraire à leur vie habituelle.
Autrefois l'entendement, la mémoire et la volonté sentaient votre amour en chaque opération qui s'y faisait, selon votre disposition ; mes facultés en éprouvaient grande satisfaction, et ceux que je hantais également ; votre douce correspondance donnait de la saveur à toutes choses.
Maintenant, au contraire, je suis nue et dépouillée de tout, et je me trouve empêchée d'aimer et d'opérer selon ma coutume.
Que ferais-je donc étant à la fois vive et morte, et privée de l'entendement, de la mémoire, de la volonté, et, ce qui est pis encore, de l'amour ; de cet amour en l'absence duquel je ne croyais pas qu'on pût vivre ; car l'homme est créé pour aimer et surtout pour se réjouir en Dieu, notre premier objet et notre dernière fin ?
Cette opération nouvelle, que je vois se faire, m'enlève l'amour et la joie ; je demeure perdue en moi-même, ne sachant que faire ni que dire.
Oh ! combien cette manière de vivre me paraît dure et intolérable !
voyant surtout que mes puissances sont d'accord entre elles, car elles ont trouvé leur repos en leur objet et fin, qui est Dieu ; et, bien qu'ignorantes de cette œuvre, elles sont cependant satisfaites en leur ignorance !
Mais l'humanité, abandonnée, délaissée, comment vivra-t-elle, demeurant sèche, nue et sans vigueur ?
Elle a des yeux et ne peux voir, un nez et ne peut sentir, des oreilles et ne peut entendre, une bouche et ne peut goûter, un coeur et ne peut aimer.
Tous les modes de sa vie sont renfermés dans ce secret amour ; mais celui qui, loin de vivre de cet amour, en reçoit plutôt la mort, comment existera-t-il, étant en sa maison avec tous les sentiments vifs et sains, sans pouvoir cependant en user comme en usent les autres ?
C'est pour cela aussi que l'Humanité disait en se lamentant :
"Que ferai-je malheureuse, condamnée à demeurer au monde seule et différente du reste des mortels ?
J'existerai en désespérée et personne n'aura pitié de moi ; car on ne reconnaîtra pas que cette opération vient de Dieu, d'autant plus qu'il faudra me conduire presque toujours au contraire des autres, tant religieux que séculiers, et faire des choses qui seront jugées autant de folies ; je ne tiens plus ni ordre, ni méthode, et partant ma manière de vivre sera plutôt une occasion de mauvais exemple que d'édification !
Hélas ! hélas ! que cette opération est cruelle à l'humanité, il me semble être dans une fournaise ardente avec la bouche fermée, sans pouvoir ni vivre, ni mourir ; il me paraît impossible que je ne sois réduite en poussière, et je ne puis me plaindre, parce que tout mon intérieur est conforme à la volonté de Dieu, lequel le tient ainsi selon sa disposition : cette disposition n'est ni comprise, ni connue de l'âme elle-même ; mais l'effet s'en démontre en l'oeuvre.
L'Humanité est celle qui sent le tourment sans l'exécution de se plaindre ; et, si elle pouvait se plaindre, ce lui serait un rafraîchissement !"
Oh ! que ce purgatoire enduré sur la terre, où cependant il est inconnu, est à la fois doux et cruel !
Qu'il est doux en comparaison de celui de l'autre vie ! il nous semble rigoureux, à nous autres aveugles, lorsque nous voyons ici-bas un corps affligé de martyres presque intolérables ; mais ce qui nous paraît cruauté est en réalité grande générosité de la part de Dieu.
Celui qui est éclairé reconnaît que toute cette oeuvre est faite par amour ; celui qui est aveugle la fuit : mais, comme nous ne pouvons l'éviter à tout jamais, étant tous pécheurs, oh ! qu'il vaut mieux la subir ici que dans l'autre vie ; car celui qui se purifie en ce monde ne paie pas un sol sur mille écus, à cause de l'élection de son libre arbitre, joint à la grâce infuse.
Dieu ne soumet jamais l'homme à une opération semblable qu'il n'ait obtenu son consentement ; il la montre en un instant à la volonté, celle-ci l'accepte avec pleine liberté et se remet aux mains du Seigneur, afin qu'il fasse tout ce qui lui plaît, mais elle n'en communique aucune connaissance à l'humanité.
Ce consentement étant ainsi donné en esprit, Dieu lie l'âme à soi, et elle demeure toujours avec ce lien, lequel ne se rompt jamais.
Et tout cela se fait sans l'humanité, laquelle reste de nécessité sujette à la disposition de Dieu et à la discrétion de l'esprit.
Se voyant aussi complètement soumise, elle crie comme les animaux, lorsqu'on leur fait mal ; mais, comme elle ne connaît pas le but de tout cela, on la laisse crier, et Dieu poursuit son oeuvre sans avoir égard à ses gémissements et à ses lamentations.
CHAPITRE III
L'humanité qui se voit menacée en désire connaître la cause ; il lui est promis qu'elle la saura.
Comment Dieu, recherchant les hommes, les attire par divers moyens et opérations.
De la continuelle douleur de cette créature, et comment, étant ainsi affligée, elle crie vers Dieu, qui la vivifie d'un rayon de son amour.
Elle voit la grâce que Dieu lui avait faite, et elle en demeure blessée d'un nouvel amour.
De sa confession et contrition.
L'humanité, se voyant menacée de divers martyres par lesquels il fallait passer, et ne pouvant se défendre, voulut savoir pourquoi elle méritait un si grand tourment, sans avoir aucun espoir de secours.
Il lui fut répondu en esprit que cette grâce lui serait accordée en temps opportun, de même qu'elle l'est aux criminels condamnés à la peine capitale, lesquels, après avoir entendu lire la sentence de leurs forfaits, supportent plus patiemment une mort ignominieuse, et se sauvent grâce à cette circonstance.
C'est moi d'abord, dit Dieu, dont l'amour infini va continuellement à la recherche des âmes pour les conduire à la vie éternelle ; je les éclaire, je meus leur libre arbitre par des moyens nombreux et variés ; et, quand l'homme accepte, et consent à mes inspirations, j'augmente en lui ma lumière, et il reconnaît qu'il est l'homme enfermé dans une ténébreuse étable, plongé dans la fange, et entouré d'une multitude de bêtes venimeuses qui cherchent à lui donner la mort.(D'abord il ne s'apercevait pas de tout cela étant dans les ténèbres).
Il reconnaît aussi que par lui-même il ne peut sortir de là et, se voyant, grâce à ma lumière, en si grand danger, il crie vers moi afin que ma miséricorde l'arrache aux misères qui l'enveloppent de toutes parts ; alors je l'illumine de plus en plus et, étant plus éclairé, il reconnaît mieux encore le péril de sa situation ; il crie fort, et dit en versant des larmes très amères :
"Ô mon Dieu ! tire-moi d'ici, et faites ensuite de moi tout ce qu'il vous plaira ; je supporterai tout, pourvu que vous me fassiez sortir des maux et des dangers dans lesquels je me trouve."
Or, lorsque l'âme dont nous parlons fut arrivée à ce point, il lui paraissait que le Seigneur était sourd à ses gémissements ; mais il l'illuminait de jour en jour davantage, et elle se consumait de plus en plus parce que, à mesure que la lumière croissait, elle voyait mieux la grandeur de son péril ; et l'espérance d'en sortir ne lui était pas encore donnée.
Dieu laissa longtemps cette âme crier, sans lui donner de réponse.
Mais il la conservait dans la persévérance, continuant à lui accorder sa grâce infuse, allumant dans son coeur un feu caché, et lui laissant la vue de ses défauts.
Elle fut tenue pendant un temps ainsi resserrée et occupée en sa misère.
Une douleur continue et intime était sa seule nourriture, car la grâce et la lumière allaient sans cesse croissant ; ainsi la chair, le sang, et toutes les humeurs superflues qu'elle avait intérieurement se consumèrent ; elle demeura ainsi si faible et si affligée, qu'elle ne pouvait plus se mouvoir.
Délaissée de la sorte en elle-même elle cria vers Dieu :
Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam (Ps. L).
Et Dieu, quand il vit qu'elle s'abandonnait entièrement à lui, et qu'elle désespérait d'elle-même, la vivifia d'un rayon de son amour, et, en même temps, il l'éclaira d'une nouvelle lumière ; elle comprit alors que ses défauts lui avaient mérité l'enfer, et elle reconnut aussi la grâce singulière que Dieu lui avait faite.
Cette vue lui fit une blessure nouvelle d'amour et augmenta sa douleur d'avoir tant offensé une si grande bonté, et elle commença à confesser ses péchés avec une contrition si profonde, que c'était chose merveilleuse ; elle eût été prête à en faire toute la pénitence possible, tant de l'âme que du corps.
La contrition, la confession et la satisfaction sont les premières opérations de l'âme, après que Dieu l'a illuminée par ce moyen elle se dépouille de tous les vices et péchés, et se revêt de vertu ; et elle est tenue en cet état jusqu'à ce qu'elle ait pris l'habitude des vertus.
CHAPITRE IV
Dieu verse et répand dans son coeur un autre rayon d'amour dont l'âme se remplit.
Le corps est restauré, et ce n'est qu'amour et joie excessive jusqu'à ce que l'amour qui est au-dessous de Dieu soit consumé.
Dieu lui verse ensuite un autre rayon dont l'âme se remplit, et sa surabondance restaure même le corps.
On ne sent plus alors qu'amour et jubilation du coeur, on croit être en paradis.
L'âme est tenue en cet état jusqu'à ce que tout amour qui est au-dessous de Dieu soit consumé, et qu'elle demeure avec l'amour de Dieu seul, toute recueillie en lui, le Seigneur lui accorde une foule de grâces, et lui envoie des goûts fort suaves ; elle s'en nourrit avec tous ses amis en Dieu, en proférant des paroles d'amour semblables à des flèches ardentes qui pénètrent les cœurs de ses auditeurs.
Le corps même s'en enflamme tellement, qu'on dirait que l'âme en veuille sortir pour s'unir à l'objet de son amour.
C'est un temps de grande paix et de grand contentement, car toute sa nourriture est de vie éternelle.
En cet état, on ne craint ni martyre, ni enfer, ni contrariété ou adversité qui puisse arriver : il semble qu'avec cet amour tout se supporte et s'endure aisément.
Ô coeur amoureux et joyeux !
Ô âme heureuse qui as joui de cet amour !
Tu ne peux plus ni goûter, ni voir autre chose, car ceci est vraiment ton pays, le pays pour lequel tu as été créée !
Ô très doux amour non connu, quiconque t'a goûté ne peut plus exister sans toi.
Ô homme ! toi qui es créé pour cet amour, comment pourras-tu te contenter sans lui.
Comment pourras-tu être en repos, comment vivras-tu ?
Tu trouves en lui tout ce qui se peut désirer ; et avec une si extrême satisfaction, qu'on ne saurait l'exprimer, ni se la figurer.
Celui-là seul qui l'éprouve peut en comprendre quelque chose.
Ô Amour, en toi sont rassemblées toutes les joies et toutes les saveurs ; en toi tous les désirs sont satisfaits !
Celui qui saurait exprimer ce que ressent un cœur embrasé de l'amour de Dieu ferait fondre ou se briser tous les autres cœurs, quand même ils seraient durs que le diamant et plus obstinés que le démon.
Ô flamme d'amour ! tu consumes toute rouille, tu chasses de l'âme toutes ténèbres produites par un défaut ; tu agis d'une façon si subtile, que la moindre ombre d'imperfection ne saurait subsister en ta présence : tu opères de telle sorte sur cette âme, que tu la nettoies de ce qui peut se découvrir qu'avec tes yeux, lesquels vient que ce qui parait perfection aux autres est en réalité défaut.
Ô Amour ! tu purifies et tu consumes nos imperfections.
Tu illumines et tu fortifies nos sentiments.
Tu fais toi-même ce que nous devons faire de toute nécessité, et tu y es poussé uniquement par ta pureté et sans être aimé de nous.
Alors cette âme, stupéfaite de voir Dieu si embrasé d'amour pour elle dit :
CHAPITRE V
L'âme demande ce que c'est que l'amour. Notre-Seigneur lui répond en partie, et lui parle de la grandeur, des qualités, propriétés, causes et effets de son amour.
L'Âme.
Ô Seigneur, qu'est donc cette âme dont vous avez tant de soin, dont vous faites tant d'estime, et que nous estimons si peu nous-mêmes ?
Ah ! s'il m'était donné de connaître la cause de votre si grand et si pur amour envers la créature raisonnable, que je vois cependant vous être si contraire en toutes choses !
Le Seigneur, l'exauçant en partie, lui répondit ainsi :
Si tu savais combien j'aime les âmes, tu ne pourrais plus savoir autre chose en cette vie, car cette connaissance te ferait mourir : et si tu vivais ce serait par l'effet d'un miracle.
Et, par contre, si tu voyais bien ta misère tout en connaissant ma bonté, et l'amour pur et grand avec lequel je ne cesse jamais d'opérer envers l'homme, tu vivrais en désespérée ; car mon amour est tel, qu'il ferait anéantir non seulement le corps, mais même l'âme (si c'était possible).
Mon amour est infini et je ne puis qu'aimer ce que j'ai créé : mon amour est pur, simple et net, et je ne puis aimer qu'avec cet amour.
Tout autre amour paraîtrait erreur, comme il l'est en effet, à quiconque aurait la moindre intelligence du mien.
La cause de mon amour n'est autre que lui-même ; et, comme tu n'es pas capable de l'entendre, demeure en paix et n'entreprends pas de chercher ce que tu ne saurais trouver.
Mon amour se connaît mieux par sentiment intérieur que par toute autre voie ; pour l'acquérir il faut que l'amour, par son œuvre, sépare l'homme de l'homme, car l'homme est à lui-même son propre empêchement.
Cet amour consume et annihile la malignité, il rend la créature apte à connaître et à entendre un jour ce qu'est l'amour.
Ô œuvre admirable et merveilleuse de l'amour ?
Dieu le donne à l'homme, afin qu'il puisse faire ce qui est nécessaire pour parvenir à la perfection à laquelle il est destiné.
Il lui accorde encore les grâces et la lumière dont il a besoin, et il les augmente peu à peu de telle manière et en telle quantité, que jamais il n'en a ni plus ni moins qu'il ne faut : car, s'il n'en avait pas assez, il se pourrait excuser de n'avoir pas opéré parce que la grâce lui manquait : si elle surabondait, il serait puni pour avoir manqué d'y correspondre.
La grâce se multiplie selon que l'homme l'emploie : lorsque l'œuvre croît, la grâce aussi ; l'œuvre ne croissant pas, la grâce ne croît pas non plus.
En cette façon, il est clair que, de point en point, Dieu donne à l'homme ce qui lui est nécessaire, ni plus ni moins ; à chacun selon son degré et sa capacité et tout cela, Dieu le fait par amour et pour l'utilité de l'homme.
Mais nous sommes froids et négligents pour opérer, et l'instinct de l'esprit étant de parvenir promptement à sa perfection, il nous semble que la grâce nous manque, bien qu'il n'en soit pas ainsi.
C'est notre faute uniquement si nous ne coopérons pas selon la grâce présente que nous avons et c'est pour cela qu'elle ne croît pas à l'avenir.
Ô homme misérable ! comment pourras-tu t'excuser de ne point correspondre aux soins si grands avec lesquels Dieu t'a toujours pourvu et te pourvoit encore ?
Tu les comprendras et les verras mieux au temps de la mort.
Alors tu demeuras muet et étonné et, reconnaissant qu'il en est ainsi, tu ne pourras rien alléguer pour la défense ; tu auras grande confusion de toi-même, pour n'avoir pas voulu bien opérer, avec tant d'assistance, tant de grâce, tant d'amour et tant de soins de ton Seigneur, lequel, pour satisfaire à ton autre requête, te répond ainsi qu'il suit :
Du mode que Dieu tient dans les opérations de son amour.
De la faiblesse du corps, et de l'aide qu'il a des choses créées.
De la grandeur de la peine de l'humanité, elle s'en plaint sans se plaindre, l'intérieur étant conforme à la volonté de Dieu.
Combien le Purgatoire est doux, sévère et plein de miséricorde, en cette vie.
Quelquefois il allégeait cette opération de l'amour, il permettait à l'âme de respirer, et laissait correspondre l'esprit avec l'âme, et l'âme avec le corps ; et les sentiments de l'âme et du corps se trouvaient aptes à recevoir quelque soulagement des choses créées et étaient ainsi vivifiés.
Mais quand Dieu attirait l'esprit à soi tout le reste le suivait, alors que le corps demeurait comme mort, et si étranger à son être naturel, que lorsqu'il revenait à lui, il était tout débile et ne se pouvait aider de rien.
L'humanité était incapable de manger, de boire, de faire acte de créature vivante : elle était, pour ainsi dire, hors de tout sentiment et avait besoin d'être gouvernée comme un petit enfant qui ne sait que pleurer et, ce qui était pis encore, elle ne pouvait se complaire en ce que la nature désire, car ce qu'on appelle goût n'existait plus en elle, et était tiré violemment hors de son être.
Quand l'âme fut demeurée quelque temps ainsi, elle se tourna vers son Seigneur, lui fit une grande complainte, et lui dit :
L'Âme.
Ô mon Seigneur ! jusqu'à présent je me trouvais en grande paix, contentement et délectation ; toutes mes puissances jouissaient de l'amour que vous me donniez, et il leur semblait être en paradis.
Mais à présent elles sont comme chassées hors de leur demeure, reléguées dans un pays qui leur est inconnu, où tout est contraire à leur vie habituelle.
Autrefois l'entendement, la mémoire et la volonté sentaient votre amour en chaque opération qui s'y faisait, selon votre disposition ; mes facultés en éprouvaient grande satisfaction, et ceux que je hantais également ; votre douce correspondance donnait de la saveur à toutes choses.
Maintenant, au contraire, je suis nue et dépouillée de tout, et je me trouve empêchée d'aimer et d'opérer selon ma coutume.
Que ferais-je donc étant à la fois vive et morte, et privée de l'entendement, de la mémoire, de la volonté, et, ce qui est pis encore, de l'amour ; de cet amour en l'absence duquel je ne croyais pas qu'on pût vivre ; car l'homme est créé pour aimer et surtout pour se réjouir en Dieu, notre premier objet et notre dernière fin ?
Cette opération nouvelle, que je vois se faire, m'enlève l'amour et la joie ; je demeure perdue en moi-même, ne sachant que faire ni que dire.
Oh ! combien cette manière de vivre me paraît dure et intolérable !
voyant surtout que mes puissances sont d'accord entre elles, car elles ont trouvé leur repos en leur objet et fin, qui est Dieu ; et, bien qu'ignorantes de cette œuvre, elles sont cependant satisfaites en leur ignorance !
Mais l'humanité, abandonnée, délaissée, comment vivra-t-elle, demeurant sèche, nue et sans vigueur ?
Elle a des yeux et ne peux voir, un nez et ne peut sentir, des oreilles et ne peut entendre, une bouche et ne peut goûter, un coeur et ne peut aimer.
Tous les modes de sa vie sont renfermés dans ce secret amour ; mais celui qui, loin de vivre de cet amour, en reçoit plutôt la mort, comment existera-t-il, étant en sa maison avec tous les sentiments vifs et sains, sans pouvoir cependant en user comme en usent les autres ?
C'est pour cela aussi que l'Humanité disait en se lamentant :
"Que ferai-je malheureuse, condamnée à demeurer au monde seule et différente du reste des mortels ?
J'existerai en désespérée et personne n'aura pitié de moi ; car on ne reconnaîtra pas que cette opération vient de Dieu, d'autant plus qu'il faudra me conduire presque toujours au contraire des autres, tant religieux que séculiers, et faire des choses qui seront jugées autant de folies ; je ne tiens plus ni ordre, ni méthode, et partant ma manière de vivre sera plutôt une occasion de mauvais exemple que d'édification !
Hélas ! hélas ! que cette opération est cruelle à l'humanité, il me semble être dans une fournaise ardente avec la bouche fermée, sans pouvoir ni vivre, ni mourir ; il me paraît impossible que je ne sois réduite en poussière, et je ne puis me plaindre, parce que tout mon intérieur est conforme à la volonté de Dieu, lequel le tient ainsi selon sa disposition : cette disposition n'est ni comprise, ni connue de l'âme elle-même ; mais l'effet s'en démontre en l'oeuvre.
L'Humanité est celle qui sent le tourment sans l'exécution de se plaindre ; et, si elle pouvait se plaindre, ce lui serait un rafraîchissement !"
Oh ! que ce purgatoire enduré sur la terre, où cependant il est inconnu, est à la fois doux et cruel !
Qu'il est doux en comparaison de celui de l'autre vie ! il nous semble rigoureux, à nous autres aveugles, lorsque nous voyons ici-bas un corps affligé de martyres presque intolérables ; mais ce qui nous paraît cruauté est en réalité grande générosité de la part de Dieu.
Celui qui est éclairé reconnaît que toute cette oeuvre est faite par amour ; celui qui est aveugle la fuit : mais, comme nous ne pouvons l'éviter à tout jamais, étant tous pécheurs, oh ! qu'il vaut mieux la subir ici que dans l'autre vie ; car celui qui se purifie en ce monde ne paie pas un sol sur mille écus, à cause de l'élection de son libre arbitre, joint à la grâce infuse.
Dieu ne soumet jamais l'homme à une opération semblable qu'il n'ait obtenu son consentement ; il la montre en un instant à la volonté, celle-ci l'accepte avec pleine liberté et se remet aux mains du Seigneur, afin qu'il fasse tout ce qui lui plaît, mais elle n'en communique aucune connaissance à l'humanité.
Ce consentement étant ainsi donné en esprit, Dieu lie l'âme à soi, et elle demeure toujours avec ce lien, lequel ne se rompt jamais.
Et tout cela se fait sans l'humanité, laquelle reste de nécessité sujette à la disposition de Dieu et à la discrétion de l'esprit.
Se voyant aussi complètement soumise, elle crie comme les animaux, lorsqu'on leur fait mal ; mais, comme elle ne connaît pas le but de tout cela, on la laisse crier, et Dieu poursuit son oeuvre sans avoir égard à ses gémissements et à ses lamentations.
CHAPITRE III
L'humanité qui se voit menacée en désire connaître la cause ; il lui est promis qu'elle la saura.
Comment Dieu, recherchant les hommes, les attire par divers moyens et opérations.
De la continuelle douleur de cette créature, et comment, étant ainsi affligée, elle crie vers Dieu, qui la vivifie d'un rayon de son amour.
Elle voit la grâce que Dieu lui avait faite, et elle en demeure blessée d'un nouvel amour.
De sa confession et contrition.
L'humanité, se voyant menacée de divers martyres par lesquels il fallait passer, et ne pouvant se défendre, voulut savoir pourquoi elle méritait un si grand tourment, sans avoir aucun espoir de secours.
Il lui fut répondu en esprit que cette grâce lui serait accordée en temps opportun, de même qu'elle l'est aux criminels condamnés à la peine capitale, lesquels, après avoir entendu lire la sentence de leurs forfaits, supportent plus patiemment une mort ignominieuse, et se sauvent grâce à cette circonstance.
C'est moi d'abord, dit Dieu, dont l'amour infini va continuellement à la recherche des âmes pour les conduire à la vie éternelle ; je les éclaire, je meus leur libre arbitre par des moyens nombreux et variés ; et, quand l'homme accepte, et consent à mes inspirations, j'augmente en lui ma lumière, et il reconnaît qu'il est l'homme enfermé dans une ténébreuse étable, plongé dans la fange, et entouré d'une multitude de bêtes venimeuses qui cherchent à lui donner la mort.(D'abord il ne s'apercevait pas de tout cela étant dans les ténèbres).
Il reconnaît aussi que par lui-même il ne peut sortir de là et, se voyant, grâce à ma lumière, en si grand danger, il crie vers moi afin que ma miséricorde l'arrache aux misères qui l'enveloppent de toutes parts ; alors je l'illumine de plus en plus et, étant plus éclairé, il reconnaît mieux encore le péril de sa situation ; il crie fort, et dit en versant des larmes très amères :
"Ô mon Dieu ! tire-moi d'ici, et faites ensuite de moi tout ce qu'il vous plaira ; je supporterai tout, pourvu que vous me fassiez sortir des maux et des dangers dans lesquels je me trouve."
Or, lorsque l'âme dont nous parlons fut arrivée à ce point, il lui paraissait que le Seigneur était sourd à ses gémissements ; mais il l'illuminait de jour en jour davantage, et elle se consumait de plus en plus parce que, à mesure que la lumière croissait, elle voyait mieux la grandeur de son péril ; et l'espérance d'en sortir ne lui était pas encore donnée.
Dieu laissa longtemps cette âme crier, sans lui donner de réponse.
Mais il la conservait dans la persévérance, continuant à lui accorder sa grâce infuse, allumant dans son coeur un feu caché, et lui laissant la vue de ses défauts.
Elle fut tenue pendant un temps ainsi resserrée et occupée en sa misère.
Une douleur continue et intime était sa seule nourriture, car la grâce et la lumière allaient sans cesse croissant ; ainsi la chair, le sang, et toutes les humeurs superflues qu'elle avait intérieurement se consumèrent ; elle demeura ainsi si faible et si affligée, qu'elle ne pouvait plus se mouvoir.
Délaissée de la sorte en elle-même elle cria vers Dieu :
Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam (Ps. L).
Et Dieu, quand il vit qu'elle s'abandonnait entièrement à lui, et qu'elle désespérait d'elle-même, la vivifia d'un rayon de son amour, et, en même temps, il l'éclaira d'une nouvelle lumière ; elle comprit alors que ses défauts lui avaient mérité l'enfer, et elle reconnut aussi la grâce singulière que Dieu lui avait faite.
Cette vue lui fit une blessure nouvelle d'amour et augmenta sa douleur d'avoir tant offensé une si grande bonté, et elle commença à confesser ses péchés avec une contrition si profonde, que c'était chose merveilleuse ; elle eût été prête à en faire toute la pénitence possible, tant de l'âme que du corps.
La contrition, la confession et la satisfaction sont les premières opérations de l'âme, après que Dieu l'a illuminée par ce moyen elle se dépouille de tous les vices et péchés, et se revêt de vertu ; et elle est tenue en cet état jusqu'à ce qu'elle ait pris l'habitude des vertus.
CHAPITRE IV
Dieu verse et répand dans son coeur un autre rayon d'amour dont l'âme se remplit.
Le corps est restauré, et ce n'est qu'amour et joie excessive jusqu'à ce que l'amour qui est au-dessous de Dieu soit consumé.
Dieu lui verse ensuite un autre rayon dont l'âme se remplit, et sa surabondance restaure même le corps.
On ne sent plus alors qu'amour et jubilation du coeur, on croit être en paradis.
L'âme est tenue en cet état jusqu'à ce que tout amour qui est au-dessous de Dieu soit consumé, et qu'elle demeure avec l'amour de Dieu seul, toute recueillie en lui, le Seigneur lui accorde une foule de grâces, et lui envoie des goûts fort suaves ; elle s'en nourrit avec tous ses amis en Dieu, en proférant des paroles d'amour semblables à des flèches ardentes qui pénètrent les cœurs de ses auditeurs.
Le corps même s'en enflamme tellement, qu'on dirait que l'âme en veuille sortir pour s'unir à l'objet de son amour.
C'est un temps de grande paix et de grand contentement, car toute sa nourriture est de vie éternelle.
En cet état, on ne craint ni martyre, ni enfer, ni contrariété ou adversité qui puisse arriver : il semble qu'avec cet amour tout se supporte et s'endure aisément.
Ô coeur amoureux et joyeux !
Ô âme heureuse qui as joui de cet amour !
Tu ne peux plus ni goûter, ni voir autre chose, car ceci est vraiment ton pays, le pays pour lequel tu as été créée !
Ô très doux amour non connu, quiconque t'a goûté ne peut plus exister sans toi.
Ô homme ! toi qui es créé pour cet amour, comment pourras-tu te contenter sans lui.
Comment pourras-tu être en repos, comment vivras-tu ?
Tu trouves en lui tout ce qui se peut désirer ; et avec une si extrême satisfaction, qu'on ne saurait l'exprimer, ni se la figurer.
Celui-là seul qui l'éprouve peut en comprendre quelque chose.
Ô Amour, en toi sont rassemblées toutes les joies et toutes les saveurs ; en toi tous les désirs sont satisfaits !
Celui qui saurait exprimer ce que ressent un cœur embrasé de l'amour de Dieu ferait fondre ou se briser tous les autres cœurs, quand même ils seraient durs que le diamant et plus obstinés que le démon.
Ô flamme d'amour ! tu consumes toute rouille, tu chasses de l'âme toutes ténèbres produites par un défaut ; tu agis d'une façon si subtile, que la moindre ombre d'imperfection ne saurait subsister en ta présence : tu opères de telle sorte sur cette âme, que tu la nettoies de ce qui peut se découvrir qu'avec tes yeux, lesquels vient que ce qui parait perfection aux autres est en réalité défaut.
Ô Amour ! tu purifies et tu consumes nos imperfections.
Tu illumines et tu fortifies nos sentiments.
Tu fais toi-même ce que nous devons faire de toute nécessité, et tu y es poussé uniquement par ta pureté et sans être aimé de nous.
Alors cette âme, stupéfaite de voir Dieu si embrasé d'amour pour elle dit :
CHAPITRE V
L'âme demande ce que c'est que l'amour. Notre-Seigneur lui répond en partie, et lui parle de la grandeur, des qualités, propriétés, causes et effets de son amour.
L'Âme.
Ô Seigneur, qu'est donc cette âme dont vous avez tant de soin, dont vous faites tant d'estime, et que nous estimons si peu nous-mêmes ?
Ah ! s'il m'était donné de connaître la cause de votre si grand et si pur amour envers la créature raisonnable, que je vois cependant vous être si contraire en toutes choses !
Le Seigneur, l'exauçant en partie, lui répondit ainsi :
Si tu savais combien j'aime les âmes, tu ne pourrais plus savoir autre chose en cette vie, car cette connaissance te ferait mourir : et si tu vivais ce serait par l'effet d'un miracle.
Et, par contre, si tu voyais bien ta misère tout en connaissant ma bonté, et l'amour pur et grand avec lequel je ne cesse jamais d'opérer envers l'homme, tu vivrais en désespérée ; car mon amour est tel, qu'il ferait anéantir non seulement le corps, mais même l'âme (si c'était possible).
Mon amour est infini et je ne puis qu'aimer ce que j'ai créé : mon amour est pur, simple et net, et je ne puis aimer qu'avec cet amour.
Tout autre amour paraîtrait erreur, comme il l'est en effet, à quiconque aurait la moindre intelligence du mien.
La cause de mon amour n'est autre que lui-même ; et, comme tu n'es pas capable de l'entendre, demeure en paix et n'entreprends pas de chercher ce que tu ne saurais trouver.
Mon amour se connaît mieux par sentiment intérieur que par toute autre voie ; pour l'acquérir il faut que l'amour, par son œuvre, sépare l'homme de l'homme, car l'homme est à lui-même son propre empêchement.
Cet amour consume et annihile la malignité, il rend la créature apte à connaître et à entendre un jour ce qu'est l'amour.
Ô œuvre admirable et merveilleuse de l'amour ?
Dieu le donne à l'homme, afin qu'il puisse faire ce qui est nécessaire pour parvenir à la perfection à laquelle il est destiné.
Il lui accorde encore les grâces et la lumière dont il a besoin, et il les augmente peu à peu de telle manière et en telle quantité, que jamais il n'en a ni plus ni moins qu'il ne faut : car, s'il n'en avait pas assez, il se pourrait excuser de n'avoir pas opéré parce que la grâce lui manquait : si elle surabondait, il serait puni pour avoir manqué d'y correspondre.
La grâce se multiplie selon que l'homme l'emploie : lorsque l'œuvre croît, la grâce aussi ; l'œuvre ne croissant pas, la grâce ne croît pas non plus.
En cette façon, il est clair que, de point en point, Dieu donne à l'homme ce qui lui est nécessaire, ni plus ni moins ; à chacun selon son degré et sa capacité et tout cela, Dieu le fait par amour et pour l'utilité de l'homme.
Mais nous sommes froids et négligents pour opérer, et l'instinct de l'esprit étant de parvenir promptement à sa perfection, il nous semble que la grâce nous manque, bien qu'il n'en soit pas ainsi.
C'est notre faute uniquement si nous ne coopérons pas selon la grâce présente que nous avons et c'est pour cela qu'elle ne croît pas à l'avenir.
Ô homme misérable ! comment pourras-tu t'excuser de ne point correspondre aux soins si grands avec lesquels Dieu t'a toujours pourvu et te pourvoit encore ?
Tu les comprendras et les verras mieux au temps de la mort.
Alors tu demeuras muet et étonné et, reconnaissant qu'il en est ainsi, tu ne pourras rien alléguer pour la défense ; tu auras grande confusion de toi-même, pour n'avoir pas voulu bien opérer, avec tant d'assistance, tant de grâce, tant d'amour et tant de soins de ton Seigneur, lequel, pour satisfaire à ton autre requête, te répond ainsi qu'il suit :
A suivre...
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Re: Saints et Bienheureux!! (Ordre Alphabétique)
CHAPITRE VI
Dieu déclare à l'âme qu'il lui fait de son corps un purgatoire en ce monde.
De la nécessité que l'homme a de se renoncer et de se submerger entièrement en Dieu ; et de la misère de l'homme qui s'occupe d'autre chose n'ayant que le temps de cette vie pour mériter.
Le Seigneur.
Tu comprends mieux, par l'expérience que par le raisonnement, la cause des grandes souffrances par lesquelles tu dois passer.
Sache cependant que je fais à l'âme un purgatoire de son corps ; par ce moyen, j'augmente sa gloire afin de l'attirer à moi sans autre purgatoire.
Pour y parvenir, je frappe sans cesse à la porte du coeur de l'homme ; s'il consent, et m'ouvre, je le conduis, avec une sollicitude continuelle, au degré de gloire pour lequel je l'ai créé.
Et, s'il voyait, s'il comprenait, le soin avec lequel je m'occupe de mon salut et de son avantage, il s'abandonnerait à moi tout entier, sans réserve ; il laisserait et mépriserait le reste, quand bien même il pourrait avoir tout ce que j'ai créé et, pour ne point perdre mon assistance, qui le conduit à la gloire suprême, il n'est sorte de martyre qu'il n'endurât volontiers.
Mais je veux que l'homme se donne à moi uniquement par amour et avec foi ; la crainte et la considération de l'avantage personnel sont contraires à cet amour et à cette foi, car ils demeurent en l'amour-propre.
Or celui-ci ne peut coexister avec mon pur et simple amour, dans lequel il est nécessaire que l'esprit de l'homme soit submergé pour demeurer uniquement livré au soin que je prends de lui ; à ce soin sans lequel la créature ne saurait entrer dans l'abîme simple et pur de mon être, parce que autrement ce lui serait un grand enfer.
Et l'homme n'ayant d'autre temps que celui de la vie présente pour purifier son âme en mon dit amour, au moyen de la foi et de mes nombreux secours, n'est-il pas bien misérable et bien fou de s'occuper d'autre chose, et de perdre ces moments précieux qui lui sont donnés uniquement pour cet effet, sans que jamais il en puisse avoir d'autres, et qui, une fois passés, ne reviennent plus ?
Écoute donc, ô Ame très chère, écoute ma voix, ouvre tes oreilles à ton Seigneur, lequel t'aime de la plus vive tendresse et te fait infiniment de bien.
Personne autre que lui ne peut t'en faire ; car tu es enveloppée d'une foule de péchés, tu es plongée dans les misères et chargée d'une masse de mauvaises habitudes ; ma lumière t'en fera voir et connaître la gravité par ta propre expérience, lorsque tu en seras délivrée.
L'Âme.
Vous m'avez dit, Seigneur, beaucoup de raisons qui me persuadent de supporter volontiers et avec constance tout ce que j'ai enduré jusqu'ici et tout ce que j'aurai à endurer encore.
Mais, dites-moi, je vous en prie, si cela vous plaît ainsi, une raison de cette nécessité de souffrir qui satisfasse mon entendement.
J'en ai grand besoin, car je sens venir sur moi la véhémence de votre amour.
Le Seigneur.
Tu sais que lorsque tu m'as donné ton consentement au moyen de ton libre arbitre, tu étais tellement souillée, que, sans ma providence, tu eusses été condamnée à l'enfer ; car, ayant été conduite à la misère du péché, tu étais comme morte.
Je t'ai pourvue de la lumière et de la contrition à l'aide desquelles tu t'es confessée.
Depuis lors, tu as fait beaucoup de pénitences, d'oraisons et d'aumônes, durant un long espace de temps, pour la satisfaction de tes péchés.
Je t'ai laissée combattre et t'affliger, jusqu'à ce que tu fusses assez affermie pour n'y plus retomber.
Puis je t'ai fait t'exercer en mille vertus dont tu as contracté l'habitude, au point d'y prendre plaisir, et de ne plus rechercher d'autres délectations.
En ce même temps, cette âme commença à se délecter en choses spirituelles ; et une foule de tentations qui lui survinrent la rendirent très expérimentée dans la voie de Dieu ; et le Seigneur lui fit voir un grand nombre de traits de sa providence au milieu des nombreuses et diverses oppressions et tribulations qu'elle eût à subir de la part des hommes, du monde, des démons, et d'elle-même, qui était pleine de mauvaises habitudes.
Il lui fallut combattre avec ces divers ennemis, jusqu'à ce qu'elle eût consumé toutes ces mauvaises habitudes, tant intérieures, qu'extérieures ; car ce sont elles qui font la guerre à l'homme.
Si ce n'étaient les mauvaises habitudes, personne ne serait jamais tenté que pour recevoir augmentation de grâce ; et la tentation serait presque sans péril, car Dieu, qui la permet par amour pour nous, en soutient l'effort.
CHAPITRE VII
L'âme, revêtue de vertus, commence à respirer en son Seigneur.
Dieu lui fait voir l'opération amoureuse dont il a usé envers elle, par sa seule bonté, pour la délivrer.
L'âme, reconnaissant ses misères, en est dans un continuel embrasement, ne pouvant ni parler, ni penser à autre chose.
Quand Dieu eut dépouillé cette âme de ces mauvaises habitudes et l'eût revêtue de vertus ; lorsqu'elle fut bien instruite en la voie spirituelle, et qu'elle commença à respirer un peu en son Seigneur (comme étant hors de bataille et libre de servitude), elle demeura fort contente ; car Dieu lui ouvrit les yeux et lui montra combien il l'avait aidée, et comment il l'avait défendue de ses nombreux ennemis, visibles et invisibles, et d'elle-même, qui était le pire de tous.
Alors l'âme, voyant tant de soins et tant d'amour, et se trouvant intérieurement tout allégée de l'affliction passée, se tourna de plus en plus vers son Seigneur ; et celui-ci, voulant la tirer à un état plus excellent encore, lui fit voir aussi, avec l'œil du divin amour, l'opération que son immense et constance sollicitude avait fait en elle.
Elle demeura étonnée et stupéfaite, après avoir considéré ce qu'était Dieu et ce qu'elle était elle-même; en d'autres termes, en reconnaissant que la bonté de Dieu l'avait délivrée par son pur et simple amour, elle pauvre, malheureuse, et plongée dans une foule de misères, et l'avait rendue capable de recevoir ce divin amour.
Cette vue la faisait crier ; elle confessait ses misères et ses péchés : et cet amour que Dieu lui avait montré l'embrasait sans cesse, tellement qu'elle ne savait ni ne pouvait s'occuper d'autre chose ; elle resta dans cet état jusqu'à tant que les autres amours, tant spirituels que corporels fussent consumés.
Or, plus l'amour de Dieu dure, plus il est délivré des autres liens, plus aussi il devient fort, et plus sa secrète opération est puissante et retient l'âme occupée.
Cette âme se trouvant en cet état, jouissait donc de toute chose en paix et en délectation, tant extérieure qu'intérieure ; car elle ne connaissait pas encore la voie par laquelle le Seigneur voulait la mener, quoiqu'elle en fût bien proche : et Dieu lui dit ce qui suit :
CHAPITRE VIII
Notre Seigneur montre à l'âme qu'elle n'avait purement rien mérité, ayant employé, à se purifier, le temps qui lui avait été donné pour croître en grâce et en gloire ; et que sans son aide elle n'eût rien su faire.
Le Seigneur.
Ma fille, jusqu'à présent, tu as suivi mes goûts et mes parfums ; ils t'ont conduite et portée dans toutes les voies que tu as traversées ; mais sans mon aide tu n'aurais rien pu faire.
Par ma grâce, tu t'es purgée ainsi de tes péchés, et dépouillée de tes affections ; tu t'es revêtue de vertus, enflammée d'amour, et quasi unie à moi dans cet amour, et tu y es tellement délectée, intérieurement et extérieurement qu'il te semblait presque être en paradis.
Mais je te le déclare, jusqu'à présent, tu n'as rien mérité, parce que tu étais obligée de faire tout ce que tu as fait : les pénitences, les jeûnes, les aumônes et les oraisons ; il fallait opérer ces choses avec l'assistance de ma lumière, pour le paiement de tes dettes et comme tu n'avais pas de quoi satisfaire, cela t'a été octroyé gratuitement, afin que tu y parvinsses.
Et sache que tout le temps que tu as dépensé à satisfaire pour tes péchés reste perdu, pour ainsi dire ; car ce temps en amour, en grâce et en gloire.
Il en résulte, je le répète, que tu n'as rien mérité encore, bien qu'il te semble avoir fait de grandes choses, et qu'elles soient en haute estime chez ceux qui n'en ont pas une entière connaissance.
Il fallait aussi te revêtir de vertus, parce qu'elles attirent l'amour ; cela était nécessaire également pour te défendre des vices et te rendre apte à recevoir plus de lumières.
Et, te reconnaissant incapable par toi-même et inhabile à toute bonne œuvre ( et voulant cependant que tu opérasses avec persévérance ), je t'ai donné un amour caché, au moyen duquel toutes les puissances, ainsi que les sentiments du corps, ont été disposées volontairement à satisfaire.
Je t'ai enseigné à m'aimer, pour te dépouiller de tout autre amour ; puis je t'ai menée jusqu'à la porte de mon vrai et parfait amour et tu n'as pas été plus avant, parce que cela excède ton intelligence et surpasse tes facultés.
Mais, avec tout cela, tu n'es pas contente, car tu as l'instinct de passer outre : toutefois, tu ne sais ce que tu dois vouloir.
Dieu déclare à l'âme qu'il lui fait de son corps un purgatoire en ce monde.
De la nécessité que l'homme a de se renoncer et de se submerger entièrement en Dieu ; et de la misère de l'homme qui s'occupe d'autre chose n'ayant que le temps de cette vie pour mériter.
Le Seigneur.
Tu comprends mieux, par l'expérience que par le raisonnement, la cause des grandes souffrances par lesquelles tu dois passer.
Sache cependant que je fais à l'âme un purgatoire de son corps ; par ce moyen, j'augmente sa gloire afin de l'attirer à moi sans autre purgatoire.
Pour y parvenir, je frappe sans cesse à la porte du coeur de l'homme ; s'il consent, et m'ouvre, je le conduis, avec une sollicitude continuelle, au degré de gloire pour lequel je l'ai créé.
Et, s'il voyait, s'il comprenait, le soin avec lequel je m'occupe de mon salut et de son avantage, il s'abandonnerait à moi tout entier, sans réserve ; il laisserait et mépriserait le reste, quand bien même il pourrait avoir tout ce que j'ai créé et, pour ne point perdre mon assistance, qui le conduit à la gloire suprême, il n'est sorte de martyre qu'il n'endurât volontiers.
Mais je veux que l'homme se donne à moi uniquement par amour et avec foi ; la crainte et la considération de l'avantage personnel sont contraires à cet amour et à cette foi, car ils demeurent en l'amour-propre.
Or celui-ci ne peut coexister avec mon pur et simple amour, dans lequel il est nécessaire que l'esprit de l'homme soit submergé pour demeurer uniquement livré au soin que je prends de lui ; à ce soin sans lequel la créature ne saurait entrer dans l'abîme simple et pur de mon être, parce que autrement ce lui serait un grand enfer.
Et l'homme n'ayant d'autre temps que celui de la vie présente pour purifier son âme en mon dit amour, au moyen de la foi et de mes nombreux secours, n'est-il pas bien misérable et bien fou de s'occuper d'autre chose, et de perdre ces moments précieux qui lui sont donnés uniquement pour cet effet, sans que jamais il en puisse avoir d'autres, et qui, une fois passés, ne reviennent plus ?
Écoute donc, ô Ame très chère, écoute ma voix, ouvre tes oreilles à ton Seigneur, lequel t'aime de la plus vive tendresse et te fait infiniment de bien.
Personne autre que lui ne peut t'en faire ; car tu es enveloppée d'une foule de péchés, tu es plongée dans les misères et chargée d'une masse de mauvaises habitudes ; ma lumière t'en fera voir et connaître la gravité par ta propre expérience, lorsque tu en seras délivrée.
L'Âme.
Vous m'avez dit, Seigneur, beaucoup de raisons qui me persuadent de supporter volontiers et avec constance tout ce que j'ai enduré jusqu'ici et tout ce que j'aurai à endurer encore.
Mais, dites-moi, je vous en prie, si cela vous plaît ainsi, une raison de cette nécessité de souffrir qui satisfasse mon entendement.
J'en ai grand besoin, car je sens venir sur moi la véhémence de votre amour.
Le Seigneur.
Tu sais que lorsque tu m'as donné ton consentement au moyen de ton libre arbitre, tu étais tellement souillée, que, sans ma providence, tu eusses été condamnée à l'enfer ; car, ayant été conduite à la misère du péché, tu étais comme morte.
Je t'ai pourvue de la lumière et de la contrition à l'aide desquelles tu t'es confessée.
Depuis lors, tu as fait beaucoup de pénitences, d'oraisons et d'aumônes, durant un long espace de temps, pour la satisfaction de tes péchés.
Je t'ai laissée combattre et t'affliger, jusqu'à ce que tu fusses assez affermie pour n'y plus retomber.
Puis je t'ai fait t'exercer en mille vertus dont tu as contracté l'habitude, au point d'y prendre plaisir, et de ne plus rechercher d'autres délectations.
En ce même temps, cette âme commença à se délecter en choses spirituelles ; et une foule de tentations qui lui survinrent la rendirent très expérimentée dans la voie de Dieu ; et le Seigneur lui fit voir un grand nombre de traits de sa providence au milieu des nombreuses et diverses oppressions et tribulations qu'elle eût à subir de la part des hommes, du monde, des démons, et d'elle-même, qui était pleine de mauvaises habitudes.
Il lui fallut combattre avec ces divers ennemis, jusqu'à ce qu'elle eût consumé toutes ces mauvaises habitudes, tant intérieures, qu'extérieures ; car ce sont elles qui font la guerre à l'homme.
Si ce n'étaient les mauvaises habitudes, personne ne serait jamais tenté que pour recevoir augmentation de grâce ; et la tentation serait presque sans péril, car Dieu, qui la permet par amour pour nous, en soutient l'effort.
CHAPITRE VII
L'âme, revêtue de vertus, commence à respirer en son Seigneur.
Dieu lui fait voir l'opération amoureuse dont il a usé envers elle, par sa seule bonté, pour la délivrer.
L'âme, reconnaissant ses misères, en est dans un continuel embrasement, ne pouvant ni parler, ni penser à autre chose.
Quand Dieu eut dépouillé cette âme de ces mauvaises habitudes et l'eût revêtue de vertus ; lorsqu'elle fut bien instruite en la voie spirituelle, et qu'elle commença à respirer un peu en son Seigneur (comme étant hors de bataille et libre de servitude), elle demeura fort contente ; car Dieu lui ouvrit les yeux et lui montra combien il l'avait aidée, et comment il l'avait défendue de ses nombreux ennemis, visibles et invisibles, et d'elle-même, qui était le pire de tous.
Alors l'âme, voyant tant de soins et tant d'amour, et se trouvant intérieurement tout allégée de l'affliction passée, se tourna de plus en plus vers son Seigneur ; et celui-ci, voulant la tirer à un état plus excellent encore, lui fit voir aussi, avec l'œil du divin amour, l'opération que son immense et constance sollicitude avait fait en elle.
Elle demeura étonnée et stupéfaite, après avoir considéré ce qu'était Dieu et ce qu'elle était elle-même; en d'autres termes, en reconnaissant que la bonté de Dieu l'avait délivrée par son pur et simple amour, elle pauvre, malheureuse, et plongée dans une foule de misères, et l'avait rendue capable de recevoir ce divin amour.
Cette vue la faisait crier ; elle confessait ses misères et ses péchés : et cet amour que Dieu lui avait montré l'embrasait sans cesse, tellement qu'elle ne savait ni ne pouvait s'occuper d'autre chose ; elle resta dans cet état jusqu'à tant que les autres amours, tant spirituels que corporels fussent consumés.
Or, plus l'amour de Dieu dure, plus il est délivré des autres liens, plus aussi il devient fort, et plus sa secrète opération est puissante et retient l'âme occupée.
Cette âme se trouvant en cet état, jouissait donc de toute chose en paix et en délectation, tant extérieure qu'intérieure ; car elle ne connaissait pas encore la voie par laquelle le Seigneur voulait la mener, quoiqu'elle en fût bien proche : et Dieu lui dit ce qui suit :
CHAPITRE VIII
Notre Seigneur montre à l'âme qu'elle n'avait purement rien mérité, ayant employé, à se purifier, le temps qui lui avait été donné pour croître en grâce et en gloire ; et que sans son aide elle n'eût rien su faire.
Le Seigneur.
Ma fille, jusqu'à présent, tu as suivi mes goûts et mes parfums ; ils t'ont conduite et portée dans toutes les voies que tu as traversées ; mais sans mon aide tu n'aurais rien pu faire.
Par ma grâce, tu t'es purgée ainsi de tes péchés, et dépouillée de tes affections ; tu t'es revêtue de vertus, enflammée d'amour, et quasi unie à moi dans cet amour, et tu y es tellement délectée, intérieurement et extérieurement qu'il te semblait presque être en paradis.
Mais je te le déclare, jusqu'à présent, tu n'as rien mérité, parce que tu étais obligée de faire tout ce que tu as fait : les pénitences, les jeûnes, les aumônes et les oraisons ; il fallait opérer ces choses avec l'assistance de ma lumière, pour le paiement de tes dettes et comme tu n'avais pas de quoi satisfaire, cela t'a été octroyé gratuitement, afin que tu y parvinsses.
Et sache que tout le temps que tu as dépensé à satisfaire pour tes péchés reste perdu, pour ainsi dire ; car ce temps en amour, en grâce et en gloire.
Il en résulte, je le répète, que tu n'as rien mérité encore, bien qu'il te semble avoir fait de grandes choses, et qu'elles soient en haute estime chez ceux qui n'en ont pas une entière connaissance.
Il fallait aussi te revêtir de vertus, parce qu'elles attirent l'amour ; cela était nécessaire également pour te défendre des vices et te rendre apte à recevoir plus de lumières.
Et, te reconnaissant incapable par toi-même et inhabile à toute bonne œuvre ( et voulant cependant que tu opérasses avec persévérance ), je t'ai donné un amour caché, au moyen duquel toutes les puissances, ainsi que les sentiments du corps, ont été disposées volontairement à satisfaire.
Je t'ai enseigné à m'aimer, pour te dépouiller de tout autre amour ; puis je t'ai menée jusqu'à la porte de mon vrai et parfait amour et tu n'as pas été plus avant, parce que cela excède ton intelligence et surpasse tes facultés.
Mais, avec tout cela, tu n'es pas contente, car tu as l'instinct de passer outre : toutefois, tu ne sais ce que tu dois vouloir.
Fin!
M1234- Hiérophante contre le nouvel ordre mondial
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