Fatima: au seuil du Triomphe ?

par **Danielle** Sam 5 Mai - 1:06

Le nouveau livre de Bernard Balayn

Fatima: au seuil du Triomphe?

STELLA MARIS 436 SOMMAIRE
Littérature de Bernard Balayn

La double année 2007-08 voit l’heureuse succession d’anniversaires de grandes apparitions mariales. Ce mois de Marie de 2007 inaugure en effet la série par la célébration du 90e anniversaire de la venue de Notre-Dame à Fatima. Cet anniversaire marque une étape importante dans la révélation de la miséricorde divine sur le monde par la maternité de la Vierge, et en même temps un appel puissant à reconnaître dans l’autre sens la grandeur et la victoire de la Trinité sur le Mal. Tout Fatima est là. C’est un mystère d’une profondeur inouïe, qui doit toucher à tout prix notre coeur.
Le nouveau livre de Bernard Balayn «Fatima au seuil du Triomphe?» paraîtra à la fin du mois de mai au Parvis. L’auteur, qui est assurément le meilleur spécialiste français de Fatima et sa grande dévotion à Notre-Dame du Rosaire, nous laissent espérer que ce magnifique livre trouvera un accueil chaleureux auprès des lectrices et lecteurs de Stella Maris. Le Triomphe de Fatima, c’est le Triomphe de Jésus et Marie, donc une espérance de salut pour nous tous.

Fatima, foyer à plusieurs centres

Les articles précédents on tenté de résumer l’«extraordinaire»1 charisme de Fatima. Extraordinaire parce qu’il est vraiment, comme aurait dit Pascal: «Un foyer dont le centre est partout, la circonférence nulle part»2. C’est un mystère infini qui s’enracine à la fois dans l’éternité et dans le temps. L’éternité parce qu’il est un écoulement de l’amour divin; le temps, parce qu’il débute à la Genèse («La Femme écrasera la tête du Serpent»), trouve son épanouissement dans l’Apocalypse johannique («La Femme couronnée d’étoiles» terrassant le Dragon), et son expression actuelle dans les luttes acharnées des XXe-XXIe siècles.

Fatima est avant tout une célébration de la Très Sainte Trinité, qui veut renouveler la face de la Terre, par la volonté du Père, la force de l’Esprit-Saint et les mérites rédempteurs du Christ dans son Eglise. La Trinité veut être glorifiée par la conversion de l’humanité, via la médiation de Marie, qui est au coeur de cette Trinité souveraine.

Fatima est ensuite un puissant appel à la «résurrection» de l’homme par le renouveau de l’Eglise, de haut en bas, par les sacrements qui ramènent à Dieu, par l’évangélisation que ses ministres ont mission de propager, et par la souffrance qui soutient, sanctifie et décuple l’action ecclésiale. Fatima renferme une force de catéchèse incroyable, face au Maître de l’erreur et du mensonge dont Marie a montré aux bergers l’horrible royaume de perdition et de tourments. C’est un hymne à la Vérité qui délivre l’homme de ses chaînes et lui ouvre le ciel.

Fatima est encore la manifestation pour notre temps de la maternité de Marie en sa quadruple dimension, symbolisée sous l’appellation de «Cœur Immaculé». Le Cœur de Marie, de par sa vocation suréminente, fait le lien entre Dieu et l’homme et entre l’homme et Dieu.

De ce fait, Fatima est aussi la démonstration voulue par Dieu, dans la plénitude des temps, de la magnificence, de la puissance intercédante de la Dame du Rosaire, qui écrase la laideur satanique, entraîne l’humanité repentante vers son Rédempteur. Marie est la chrétienne par excellence qui conduit le Troupeau («Je suis refuge et chemin...») vers le Dieu de toute la création rachetée. Elle coopère auprès de la Trinité dans le grand combat vainqueur dont parle l’Ecriture en vue de la Jérusalem céleste.

Fatima est donc la promesse de la victoire totale et finale de la Trinité sur le Mal. D’où le mot de triomphe employé par la Madone. Triomphe est un terme très fort qui absolutise cette victoire. L’environnement de lumière dans lequel se déroulent les apparitions et dont le miracle du soleil est le point d’orgue, constitue le signe qui rejoint la prophétie johannique et donne la mesure et la caractéristique de la suprématie divine servie par la maternité multiforme de Marie.

Tels sont les aspects essentiels du message fatimide, un message destiné à toute l’humanité, dans une perspective eschatologique, et qui s’inscrit donc dans le temps,impérativement.

Un message incarné dans le temps...
Fatima est un passage d’éternité intercalé dans l’espace et le temps, conformément au déroulement de l’histoire du salut. Le message en montre aisément les articulations. Les situations du monde d’alors (1914- 18 ) comme les craintes à venir (l’expectative d’une seconde guerre mondiale, de l’extension de la persécution religieuse...), ne laissent aucun doute sur la gravité des paroles de la Vierge. Elle est donc envoyée au préalable, concrètement, pour secourir l’humanité et l’Eglise des grands maux qui la blessent ou l’attendent, si l’on ne revient pas à Dieu. C’est ainsi un message de miséricorde:

Dieu se soucie en priorité du salut des âmes, Marie évoquant le ciel, le purgatoire, l’enfer. Il a pitié de l’Eglise, à cause des souffrances de la Hiérarchie; des peuples, soumis aux tribulations, le tout entrevu par Jacinthe. D’une manière plus proche, Dieu donne à la Mère le pouvoir de consoler, de soulager, de guérir les angoisses et les infirmités touchant les foules, comme le raconte Lucie dans ses Mémoires.

L’ensemble étant soumis toujours aux mêmes conditions: repentir, conversion, retour aux sacrements, prière (rosaire et dévotion à Marie en général, dont la consécration vécue à son Coeur immaculé), sacrifices: «Si vous faites ce que je demande, on aura la paix... (des armes et des âmes ...); sinon...». Et Marie d’énoncer les risques encourus si le monde ne croit pas et reste rebelle.

... et cependant longtemps sous-estimé
Justement, pourquoi attendons-nous depuis près d’un siècle l’achèvement des prophéties fatimides, à la fois douloureuses, mais finalement heureuses: «A la fin, mon Coeur Immaculé triomphera»? Car Fatima n’est pas une épée de Damoclès, un message de peur. Une mère ne crée que des relations de confiance et d’amour; Marie ne vient pas pour nous terroriser! Fatima n’est craint que dans la mesure où l’on n’écoute pas les avertissements préventifs, les conseils d’amour déversés par la Fille du Père des miséricordes. L’Evangile est rempli de promesses, mais aussi de mises en garde. Souvenons-nous des pleurs de Jésus sur la destruction future de la Jérusalem incroyante. Les admonestations sont des preuves d’amour: «La Dame du message perce les signes des temps. L’appel à la pénitence est maternel et, en même temps, ferme et déterminé. La charité sait être franche et décidée...» (Jean Paul II à Fatima, 13 mai 1982).

Un siècle donc parce que l’on n’a pas assez cru à Fatima. Les Eglises occidentales – mise à part celle du Portugal - sont tout aussi responsables que leurs sociétés civiles. Elles ont sous-estimé la gravité des appels marials. Il a fallu attendre le septième pape de Fatima pour que soit enfin réalisée la consécration complète de la Russie (avec la collégialité des évêques comprise)! Pendant quatre décennies, la section française de l’«Armée Bleue» (devenue «Apostolat Mondial de Fatima») a été le témoin direct de la froideur de l’Eglise officielle, seuls les grands ordres monastiques et la foule des petites gens croyant à la vérité et à l’urgence criantes des annonces mariales. Pendant ce temps, les Eglises orientales et extrême-orientales enduraient sur le terrain la plus terrible des persécutions de tous les temps, comme l’a affirmé le Pape venu de l’Est dans divers discours, dont celui d’Otrante (Italie, 1980), de Lourdes (14 août 1983), et, au sommet, son homélie de consécration de Fatima, lorsqu’il a dénoncé lui-même ces retards et cette inertie en des termes sans équivoque: «Alors quel mal nous fait tout ce qui, dans l’Eglise et en chacun de nous, s’oppose à la sainteté et à la consécration! Et quel mal suscite en nous le fait que l’invitation à la pénitence, à la conversion, à la prière, n’ait pas rencontré l’accueil qu’elle aurait dû! Quel mal nous procure le fait que beaucoup participent si froidement à l’oeuvre de la Rédemption du Christ!...» (13.5.82). Ce n’est pas pour rien qu’il a célébré au Colisée, le 7 mai 2000, juste avant de partir béatifier François et Jacinthe, les «martyrs de la foi du XXe siècle»: des millions, de la Russie à la Chine et ailleurs, de Mgr Romero au Père Popieluszko et au Père Men, assassinés en haine de la foi. On touche là au mystère de la grandeur et de la fragilité de l’Eglise dont l’apôtre Pierre a été le précurseur au soir de Gethsémani...

Sommes-nous au seuil du triomphe?
Le temps a passé; la plupart des prophéties conditionnelles de Notre-Dame se sont accomplies, par le martyre des uns, les sacrifices des autres, et les actes officiels de Rome, ainsi de Pie XII à Jean Paul II surtout. On peut dire qu’à lui seul, ce dernier, le «Pape du secret, le vrai pape de Fatima», a réalisé les trois quarts du chemin demandé par la Dame du Rosaire. Maintenant qu’il l’a rejointe, que reste t-il? Trois promesses heureuses: celles de la paix, de la conversion de la Russie, le tout étant le prélude à la troisième, la grande promesse, l’immense espérance biblique: la prophétie inconditionnelle du triomphe de son Coeur Immaculé, que le monde et le Ciel attendent de tous leurs voeux, dans la situation tragique où l’humanité, en perte de la foi, gît.

Au tournant du siècle, de la béatification des deux plus jeunes bergers à la disparition des deux derniers grands protagonistes de Fatima, soeur Lucie et Karol Wojtyla (2005), à l’heure du 90e anniversaire des apparitions, le moment paraît donc venu de dresser une sorte de bilan du siècle écoulé, avec ses réalisations, ce que l’on attend et ce qui reste à faire.

C’est pourquoi, avec le recul nécessaire et dans le souci de «scruter les signes de nos temps», j’ai essayé de voir où nous en sommes, à la lumière des Ecritures et de l’œuvre réalisée par Notre-Dame pendant ces 9 décennies. Ceci dans mon troisième livre consacré au sujet: «Fatima: au seuil du triomphe?».

Le premier: «Fatima, message extraordinaire pour notre temps – vers le triomphe des deux très Saints Coeurs», paru en 1987 et réédité en 1991, parrainé et préfacé par M. l’abbé André Richard, fondateur en France de l’Armée Bleue, expliquait en profondeur la substance spirituelle et historique du message. Le deuxième: «Les bergers de l’aurore», paru en 1994 et préfacé par Mgr l’évêque de Fatima, reprend, actualise et réoriente la biographie des pastoureaux de Fatima, là où l’avait laissée le chanoine Barthas. Il est destiné surtout à la jeunesse, en marge des JMJ.

Le présent ouvrage ne veut pas tomber dans le piège des supputations et des dates, mais désire simplement mesurer, à partir de ce qui a été déjà largement accompli, ce qui reste à faire pour obtenir le triomphe promis. Il reprend l’ensemble de la question, remémorant succinctement l’histoire des apparitions et leur contenu salutaire pour notre époque; montrant ensuite la prise de conscience progressive du message par le monde et l’Eglise, avec les réalisations de Pie XII et de Paul VI, puis l’accélération et l’ampleur inégalée de l’oeuvre de Jean Paul II, le pape du «Totus Tuus», qui n’a cessé de répondre au grand appel pendant ses 26 ans de pontificat, par ses documents et ses actes, notamment ses consécrations solennelles et répétées, sans parler de son calvaire. Là, comme pour le reste, il a obéi à la Dame de lumière: «Acceptez toutes les souffrances que le Seigneur vous enverra.»

Pendant ce temps, on voit s’organiser le sanctuaire de Fatima et les pèlerinages, s’établir – avec les efforts de Soeur Lucie – la dévotion au Coeur Immaculé dans le monde, parallèlement à l’évolution de celui-ci, jusqu’à l’obtention des consécrations souhaitées.

Il traite évidemment du triomphe, en expliquant sa nature selon l’Ecriture et le message lui-même, en rappelant les conditions inchangées et nécessaires établies par la Vierge pour y parvenir. Il montre comment le triomphe du Coeur Immaculé de Marie sera en fait la préface et les prémices d’un triomphe plus grand encore, celui de la Très Sainte Trinité. A cet égard, l’ouvrage sera notre modeste contribution à la consécration, le 13 octobre prochain, de la nouvelle basilique de Fatima, qui est dédiée à la glorieuse Trinité.

Dans ce livre on essaie enfin d’indiquer l’intérêt majeur du message de Fatima qui permet aux âmes de savoir où le monde en est et où il va; et il va vers une issue extraordinairement heureuse: le triomphe du Bien sur le Mal, comme le montrent bien les messages actuels de Notre-Dame dans ceux du Mouvement Sacerdotal Marial, continuation, explicitation et actualisation du message de Fatima.

Que l’on en soit bien persuadé: la révélation tant attendue du 3e secret n’atténue en rien l’importance du message fatimide, qui garde toute son acuité, son actualité et sa portée puisque le meilleur est devant nous. Le charisme de Fatima ne sera entièrement dévoilé que lors du triomphe! De toute façon, un message, un pèlerinage, ne sont jamais clos, car ils sont toujours une démarche d’Evangile. Et Jean Paul II a dit à Fatima qu’il n’est jamais trop tard pour rattraper le temps perdu: «L’appel de Marie ne vaut pas pour une seule fois. Il est ouvert aux générations toujours nouvelles. Il faut sans cesse revenir à lui, toujours le reprendre à nouveau». Travaillons donc en toute confiance pour que vienne enfin le «Règne de Dieu», la «Civilisation de l’Amour», que postule le triomphe si espéré. Par le Coeur Immaculé de Marie, auquel la Trinité veut en même temps lui donner toute la magnificence qui lui est due.

Bernard Balayn

Notes:
1. Le mot est de Jean Paul II, sur place, le 13 mai 1982.
2. Pensées: «Les deux infinis».

Littérature:
«Fatima: Au seuil du triomphe?, 240 pages, 14.5x22 cm Euro 18.– CHF 29.–