Catéchisme du Concile de Trente
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Chapitre quarante-deuxième — Troisième demande de l’Oraison Dominicale
QUE VOTRE VOLONTE SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.
Puisque Notre-Seigneur Jésus-Christ nous assure que « tous ceux qui lui disent: Seigneur, Seigneur, n’entreront point dans le Royaume des cieux ; mais que celui-là seul y entrera qui fait la Volonté de son Père qui est dans le ciel », il est donc de toute nécessité que tous ceux qui désirent parvenir à ce Royaume céleste, demandent à Dieu que sa Volonté soit faite. Voilà pourquoi cette demande vient immédiatement après celle du Royaume des cieux.
Mais pour mieux faire comprendre aux Fidèles combien ce que nous demandons par cette Prière nous est indispensable, et quelle abondance de salutaires faveurs elle nous obtient, les Pasteurs auront soin de bien montrer toutes les misères et toutes les calamités qui ont accablé le genre humain, depuis le péché de nos premiers parents.
§ I. — MISERES DU GENRE HUMAIN, LEUR CAUSE.
Dès le commencement, Dieu donna à chaque créature le désir du bien qui lui est propre ; de sorte que par une inclination naturelle, toute créature désire et cherche sa fin, dont, au reste, on ne la voit jamais s’écarter, à moins qu’un obstacle étranger ne vienne l’en détourner. Pour l’homme sortant des mains de son Créateur, cette inclination qui le poussait vers Dieu, le Principe et l’Auteur de sa félicité, était d’autant plus noble et plus ardente, qu’il était doué de raison et de jugement.
Mais tandis que les autres créatures qui ne jouissaient pas de la raison, conservaient cette disposition de la nature et cette bonté première que Dieu leur avait données en les créant, et qu’elles possèdent encore maintenant, l’infortuné genre humain sortit de sa voie. Et non seulement il perdit les biens de la justice originelle dont Dieu l’avait orné et enrichi par un privilège qui dépassait sa nature, mais il affaiblit encore ce goût de la vertu qui avait été gravé dans son mur. « Tous se sont éloignés, dit le Prophète , ils se sont corrompus ; ils n’y en a plus qui fassent le bien, il n’y en a plus un seul. »
En effet, « l’esprit et le cœur de l’homme sont inclinés vers le mal dés sa jeunesse. » D’où il est facile de voir que nul, par lui-même, ne saurait avoir le goût des choses du salut, mais au contraire que tons les hommes sont portés au mal ; que leurs passions déréglées sont innombrables et les entraînent, et les précipitent avec une force incroyable dans la colère, dans la haine, dans l’orgueil, dans l’ambition, en un mot dans toutes sortes de vices.
Toutes ces misères ne sont que trop réelles, nous les sentons sans cesse en nous. Et pourtant notre plus grande misère c’est qu’un bon nombre de ces maux sont loin de nous paraître de véritables maux. témoignage effrayant de notre malheureuse condition ! Aveuglés par nos passions et nos excès, nous ne voyons pas que ce qui nous paraît bon et salutaire est trop souvent détestable. Bien plus, nous courons avec empressement après ces biens funestes comme s’ils étaient vraiment désirables et parfaits ; et nous n’éprouvons que de l’éloignement et de l’aversion pour ce qui constitue le vrai Bien et la Vertu même, comme s’ils étaient contraires à notre bonheur. Mais Dieu ne peut souffrir ces pensées fausses, ces jugements corrompus. Il les condamne et les maudit par la bouche d’Isaïe: « Malheur à vous qui appelez le mal un bien, et le bien un mal ; qui prenez la lumière pour les ténèbres, et les ténèbres pour la lumière ; qui choisissez l’amer pour le doux et le doux pour l’amer ! »
Aussi, pour nous faire mieux comprendre l’énormité de nos misères, nos Saints Livres ne craignent pas de nous comparer à ceux qui ont perdu le sens du goût, et qui repoussent la nourriture saine et fortifiante, pour lui préférer des mets pernicieux. Ils nous comparent également à des malades, lesquels, tant que dure leur maladie, sont incapables d’accomplir les devoirs et de remplir les fonctions des personnes qui jouissent de leurs forces et de leur santé. Ainsi nous-mêmes, sans le secours de la Grâce de Dieu, nous ne pouvons rien faire qui lui soit agréable.
Que si dans cet état nous entreprenons ou faisons quelque bien, ce bien sera sans importance, et nous servira à peine pour le ciel. Mais aimer Dieu et Le servir comme il convient, c’est quelque chose de trop noble et de trop sublime pour que, dans l’état de faiblesse et d’abaissement où nous sommes, nous puissions le faire de nous-mêmes. Pour atteindre à cette hauteur, il faut que nous soyons soulevés en quelque sorte par la Grâce de Dieu.
Voici encore une comparaison bien propre à faire ressortir la misère de notre condition. Un peut dire que nous ressemblons à des enfants qui, abandonnés à eux-mêmes, se portent sans réflexion sur toute sorte d’objets. Oui, nous sommes de vrais enfants, des êtres inconsidérés, tout entiers aux entretiens frivoles et aux actions futiles, si le secours de Dieu nous abandonne. De là ce reproche que nous adresse la Sagesse: « Jusques à quand aimerez-vous la vanité comme des enfants ? Jusques à quand les insensés désireront-ils ce qui leur est pernicieux ? » et cette recommandation de l’Apôtre: « Ne vous faites pas enfants, sans prudence et sans discernement. »
Au surplus, notre vanité et notre aveuglement surpassent de beaucoup les illusions des enfants. Car ils ne manquent, eux, que de la sagesse humaine qu’ils peuvent acquérir avec le temps. nous, au contraire, sans le secours et la grâce de Dieu, nous ne pouvons pas même aspirer à cette prudence divine qui pourtant est nécessaire au salut. Et si ce secours cesse de nous soutenir un seul instant, nous repoussons aussitôt les biens véritables, et nous nous précipitons de nous-mêmes dans la mort.
Mais que, grâce à la Lumière divine qui dissipe les ténèbres de l’esprit, un Chrétien aperçoive nos misères trop réelles ; que, secouant son insensibilité, il se rende compte de l’opposition de nos passions et de la loi des membres contre la loi de l’esprit ; qu’il considère enfin la violence de notre entraînement naturel vers le mal, comment pourra-t-il ne pas chercher avec le plus vif empressement le remède à ces maux si grands dont la nature nous accable, et ne pas désirer ardemment de trouver enfin une règle salutaire pour y conformer sa conduite et sa vie ?
§ II. — NOUS DEMANDONS LE REMEDE A NOS MISERES PAR CES MOTS QUE VOTRE VOLONTE SOIT FAITE, ETC...
Or, voilà précisément ce que nous demandons à Dieu, quand nous lui disons: Que votre volonté soit faite ! C’est en désobéissant à Dieu et en méprisant sa volonté, que nous sommes tombés dans toutes ces misères ; dés lors l’unique, le véritable remède à tous nos maux, celui que Dieu Lui-même nous a donné, sera de vivre enfin selon cette Volonté divine que nous avons foulée aux pieds en nous livrant au péché, et de régler désormais toutes nos pensées et toutes nos actions sur ce qu’elle prescrit. C’est pour arriver à ce but que nous disons humblement à Dieu dans notre prière : Que votre Volonté soit faite !
Et les justes eux-mêmes, ceux en qui Dieu règne déjà, et qui ont été éclairés des rayons de la divine Lumière, doivent demander avec ardeur la grâce dont ils ont besoin pour demeurer soumis à sa sainte Volonté. Car, malgré leurs bonnes dispositions actuelles, ils n’en ont pas moins à lutter contre leurs propres passions, à cause de l’inclination au mal que nous portons tous en dedans de nous-même. Et cela est si vrai que, fussions-nous réellement justes, nous serions encore pour nous-mêmes un très grand danger ici-bas. Oui, nous devrions craindre « qu’entraînés et séduits par les convoitises qui combattent dans nos membres » nous n’abandonnions le chemin du salut. C’est pour nous prémunir contre ce danger que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous dit : « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation ; car l’esprit est prompt, mais la chair est faible. »
C’est qu’en effet il n’est pas donné à l’homme, même à celui qui a été justifié par la Grâce de Dieu, et qui la possède, de dompter les appétits de la chair au point qu’ils ne se révoltent plus jamais. La Grâce de Dieu, à la vérité, guérit l’âme de ceux qui ont été justifiés par elle, mais elle ne guérit point la chair. Et c’est ce qui a fait dire à l’Apôtre Saint Paul : « Je sais que le bien n’habite point en moi, c’est-à-dire dans ma chair. » Dés le moment même où le premier homme eut perdu la justice originelle, qui, comme un frein, retenait toutes ses passions dans l’ordre, la raison est devenue radicalement impuissante à les contenir dans le devoir, et à les empêcher de désirer ce qu’elle-même repousse. C’est pourquoi l’Apôtre nous dit que le péché, c’est-à-dire, un foyer de péché, habite dans la chair de l’homme, afin de nous faire bien comprendre qu’il n’est pas en nous pour un temps et comme un hôte qui passe, mais que, tant que nous vivons, il demeure en nous comme dans sa propre et perpétuelle habitation.
Ainsi donc, puisque nous sommes sans cesse aux prises avec des ennemis domestiques et intérieurs, il nous est facile de comprendre que nous devons chercher et trouver en Dieu notre secours, en Lui demandant que sa Volonté se fasse en nous.
QUE VOTRE VOLONTE SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.
Puisque Notre-Seigneur Jésus-Christ nous assure que « tous ceux qui lui disent: Seigneur, Seigneur, n’entreront point dans le Royaume des cieux ; mais que celui-là seul y entrera qui fait la Volonté de son Père qui est dans le ciel », il est donc de toute nécessité que tous ceux qui désirent parvenir à ce Royaume céleste, demandent à Dieu que sa Volonté soit faite. Voilà pourquoi cette demande vient immédiatement après celle du Royaume des cieux.
Mais pour mieux faire comprendre aux Fidèles combien ce que nous demandons par cette Prière nous est indispensable, et quelle abondance de salutaires faveurs elle nous obtient, les Pasteurs auront soin de bien montrer toutes les misères et toutes les calamités qui ont accablé le genre humain, depuis le péché de nos premiers parents.
§ I. — MISERES DU GENRE HUMAIN, LEUR CAUSE.
Dès le commencement, Dieu donna à chaque créature le désir du bien qui lui est propre ; de sorte que par une inclination naturelle, toute créature désire et cherche sa fin, dont, au reste, on ne la voit jamais s’écarter, à moins qu’un obstacle étranger ne vienne l’en détourner. Pour l’homme sortant des mains de son Créateur, cette inclination qui le poussait vers Dieu, le Principe et l’Auteur de sa félicité, était d’autant plus noble et plus ardente, qu’il était doué de raison et de jugement.
Mais tandis que les autres créatures qui ne jouissaient pas de la raison, conservaient cette disposition de la nature et cette bonté première que Dieu leur avait données en les créant, et qu’elles possèdent encore maintenant, l’infortuné genre humain sortit de sa voie. Et non seulement il perdit les biens de la justice originelle dont Dieu l’avait orné et enrichi par un privilège qui dépassait sa nature, mais il affaiblit encore ce goût de la vertu qui avait été gravé dans son mur. « Tous se sont éloignés, dit le Prophète , ils se sont corrompus ; ils n’y en a plus qui fassent le bien, il n’y en a plus un seul. »
En effet, « l’esprit et le cœur de l’homme sont inclinés vers le mal dés sa jeunesse. » D’où il est facile de voir que nul, par lui-même, ne saurait avoir le goût des choses du salut, mais au contraire que tons les hommes sont portés au mal ; que leurs passions déréglées sont innombrables et les entraînent, et les précipitent avec une force incroyable dans la colère, dans la haine, dans l’orgueil, dans l’ambition, en un mot dans toutes sortes de vices.
Toutes ces misères ne sont que trop réelles, nous les sentons sans cesse en nous. Et pourtant notre plus grande misère c’est qu’un bon nombre de ces maux sont loin de nous paraître de véritables maux. témoignage effrayant de notre malheureuse condition ! Aveuglés par nos passions et nos excès, nous ne voyons pas que ce qui nous paraît bon et salutaire est trop souvent détestable. Bien plus, nous courons avec empressement après ces biens funestes comme s’ils étaient vraiment désirables et parfaits ; et nous n’éprouvons que de l’éloignement et de l’aversion pour ce qui constitue le vrai Bien et la Vertu même, comme s’ils étaient contraires à notre bonheur. Mais Dieu ne peut souffrir ces pensées fausses, ces jugements corrompus. Il les condamne et les maudit par la bouche d’Isaïe: « Malheur à vous qui appelez le mal un bien, et le bien un mal ; qui prenez la lumière pour les ténèbres, et les ténèbres pour la lumière ; qui choisissez l’amer pour le doux et le doux pour l’amer ! »
Aussi, pour nous faire mieux comprendre l’énormité de nos misères, nos Saints Livres ne craignent pas de nous comparer à ceux qui ont perdu le sens du goût, et qui repoussent la nourriture saine et fortifiante, pour lui préférer des mets pernicieux. Ils nous comparent également à des malades, lesquels, tant que dure leur maladie, sont incapables d’accomplir les devoirs et de remplir les fonctions des personnes qui jouissent de leurs forces et de leur santé. Ainsi nous-mêmes, sans le secours de la Grâce de Dieu, nous ne pouvons rien faire qui lui soit agréable.
Que si dans cet état nous entreprenons ou faisons quelque bien, ce bien sera sans importance, et nous servira à peine pour le ciel. Mais aimer Dieu et Le servir comme il convient, c’est quelque chose de trop noble et de trop sublime pour que, dans l’état de faiblesse et d’abaissement où nous sommes, nous puissions le faire de nous-mêmes. Pour atteindre à cette hauteur, il faut que nous soyons soulevés en quelque sorte par la Grâce de Dieu.
Voici encore une comparaison bien propre à faire ressortir la misère de notre condition. Un peut dire que nous ressemblons à des enfants qui, abandonnés à eux-mêmes, se portent sans réflexion sur toute sorte d’objets. Oui, nous sommes de vrais enfants, des êtres inconsidérés, tout entiers aux entretiens frivoles et aux actions futiles, si le secours de Dieu nous abandonne. De là ce reproche que nous adresse la Sagesse: « Jusques à quand aimerez-vous la vanité comme des enfants ? Jusques à quand les insensés désireront-ils ce qui leur est pernicieux ? » et cette recommandation de l’Apôtre: « Ne vous faites pas enfants, sans prudence et sans discernement. »
Au surplus, notre vanité et notre aveuglement surpassent de beaucoup les illusions des enfants. Car ils ne manquent, eux, que de la sagesse humaine qu’ils peuvent acquérir avec le temps. nous, au contraire, sans le secours et la grâce de Dieu, nous ne pouvons pas même aspirer à cette prudence divine qui pourtant est nécessaire au salut. Et si ce secours cesse de nous soutenir un seul instant, nous repoussons aussitôt les biens véritables, et nous nous précipitons de nous-mêmes dans la mort.
Mais que, grâce à la Lumière divine qui dissipe les ténèbres de l’esprit, un Chrétien aperçoive nos misères trop réelles ; que, secouant son insensibilité, il se rende compte de l’opposition de nos passions et de la loi des membres contre la loi de l’esprit ; qu’il considère enfin la violence de notre entraînement naturel vers le mal, comment pourra-t-il ne pas chercher avec le plus vif empressement le remède à ces maux si grands dont la nature nous accable, et ne pas désirer ardemment de trouver enfin une règle salutaire pour y conformer sa conduite et sa vie ?
§ II. — NOUS DEMANDONS LE REMEDE A NOS MISERES PAR CES MOTS QUE VOTRE VOLONTE SOIT FAITE, ETC...
Or, voilà précisément ce que nous demandons à Dieu, quand nous lui disons: Que votre volonté soit faite ! C’est en désobéissant à Dieu et en méprisant sa volonté, que nous sommes tombés dans toutes ces misères ; dés lors l’unique, le véritable remède à tous nos maux, celui que Dieu Lui-même nous a donné, sera de vivre enfin selon cette Volonté divine que nous avons foulée aux pieds en nous livrant au péché, et de régler désormais toutes nos pensées et toutes nos actions sur ce qu’elle prescrit. C’est pour arriver à ce but que nous disons humblement à Dieu dans notre prière : Que votre Volonté soit faite !
Et les justes eux-mêmes, ceux en qui Dieu règne déjà, et qui ont été éclairés des rayons de la divine Lumière, doivent demander avec ardeur la grâce dont ils ont besoin pour demeurer soumis à sa sainte Volonté. Car, malgré leurs bonnes dispositions actuelles, ils n’en ont pas moins à lutter contre leurs propres passions, à cause de l’inclination au mal que nous portons tous en dedans de nous-même. Et cela est si vrai que, fussions-nous réellement justes, nous serions encore pour nous-mêmes un très grand danger ici-bas. Oui, nous devrions craindre « qu’entraînés et séduits par les convoitises qui combattent dans nos membres » nous n’abandonnions le chemin du salut. C’est pour nous prémunir contre ce danger que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous dit : « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation ; car l’esprit est prompt, mais la chair est faible. »
C’est qu’en effet il n’est pas donné à l’homme, même à celui qui a été justifié par la Grâce de Dieu, et qui la possède, de dompter les appétits de la chair au point qu’ils ne se révoltent plus jamais. La Grâce de Dieu, à la vérité, guérit l’âme de ceux qui ont été justifiés par elle, mais elle ne guérit point la chair. Et c’est ce qui a fait dire à l’Apôtre Saint Paul : « Je sais que le bien n’habite point en moi, c’est-à-dire dans ma chair. » Dés le moment même où le premier homme eut perdu la justice originelle, qui, comme un frein, retenait toutes ses passions dans l’ordre, la raison est devenue radicalement impuissante à les contenir dans le devoir, et à les empêcher de désirer ce qu’elle-même repousse. C’est pourquoi l’Apôtre nous dit que le péché, c’est-à-dire, un foyer de péché, habite dans la chair de l’homme, afin de nous faire bien comprendre qu’il n’est pas en nous pour un temps et comme un hôte qui passe, mais que, tant que nous vivons, il demeure en nous comme dans sa propre et perpétuelle habitation.
Ainsi donc, puisque nous sommes sans cesse aux prises avec des ennemis domestiques et intérieurs, il nous est facile de comprendre que nous devons chercher et trouver en Dieu notre secours, en Lui demandant que sa Volonté se fasse en nous.
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§ III. — CE QUE C’EST QUE LA VOLONTE DE DIEU.
Il ne faut pas laisser ignorer aux Fidèles quelle est la portée de cette demande. Sans entrer dans toutes les explications que les Docteurs scolastiques ont données sur cette question avec autant d’utilité que d’abondance, disons que la Volonté de Dieu dont il s’agit ici, est celle que l’on appelle communément la volonté de signe, c’est-à-dire ce que Dieu nous a ordonné ou conseillé de faire ou d’éviter.
Ainsi, sous le nom de volonté, nous comprenons tout ce qui a été établi, soit dans l’ordre de la Foi, soit dans l’ordre des mœurs, pour nous procurer le bonheur céleste ; enfin tout ce que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a ordonné ou défendu soit par Lui-même, soit par son Eglise. C’est de cette volonté que l’Apôtre nous dit : « Ne soyez point impudents, mais comprenez quelle est la Volonté de Dieu. »
Lors donc que dans notre Prière nous disons à Dieu que votre Volonté soit faite, nous demandons avant tout à notre Père céleste de nous donner la force d’obéir à ses Commandements et de le servir dans la sainteté et la justice tous les jours de notre vie.
De faire tout selon sa volonté et son bon plaisir. De nous acquitter de tous les devoirs qui nous sont prescrits dans nos Saints Livres.
D’accomplir sous sa conduite et par son impulsion tout ce qui convient à ceux qui sont nés non de la chair, mais de Dieu , suivant l’exemple de Jésus-Christ, qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort et la mort de la Croix. . Enfin d’être prêts à tout souffrir plutôt que de nous écarter en rien de sa Volonté:
Mais nul ne saurait réciter cette demande avec un amour plus intense et une ardeur plus vive que celui à qui il a été donné de comprendre la dignité sublime du Chrétien qui obéit à Dieu. Celui-là sent toute la vérité de cette parole: servir Dieu et Lui obéir, c’est régner ; et de celle-ci de Notre-Seigneur : « Quiconque fera la Volonté de mon Père qui est dans les cieux, sera mon frère, ma sœur, et ma mère, c’est-à-dire. Je lui demeurerai attaché par les liens les plus étroits de la bienveillance et de l’amour. »
Parmi les saints, il n’en est presque point qui n’aient fait de la précieuse faveur renfermée dans cette demande, l’objet de leurs prières les plus instantes. très souvent même ils se sont servis pour cela de paroles aussi belles que variées. Mais l’un des plus admirables et des plus touchants dans cette diversité de prières, c’est David. tantôt il dit : « Faites que mes voies se dirigent vers l’observation de vos Commandements ; tantôt: conduisez-moi dans la voie de vos Commandements ; d’autres fois: dirigez mes pas selon votre parole et ne permettez pas que l’in justice domine en moi ; ou bien: donnez-moi l’intelligence, pour que je connaisse vos préceptes. Enseignez-moi vos jugements, et donnez-moi l’intelligence pour que j’entende vos témoignages. » Il répète et retourne la même pensée dans une multitude d’autres endroits, qu’il sera bon de signaler et d’expliquer avec soin aux fidèles, afin qu’ils comprennent parfaitement la grandeur et l’abondance de tous les biens renfermés dans cette demande.
En second lieu, lorsque nous disons: que votre Volonté soit faite, nous détestons les œuvres de la chair, dont l’Apôtre a dit: les œuvres de la chair, c’est-à-dire toutes sortes d’impuretés sont manifestes, etc. Et: si vous vivez selon la chair, vous mourrez. Dés lors nous demandons à Dieu de ne pas nous laisser accomplir ce que les sens, les passions et notre faiblesse pourraient nous conseiller, mais de régler notre volonté sur la sienne.
Les voluptueux, dont les pensées et les affections sont absorbées tout entières par l’amour du plaisir, sont bien éloignés de cette sainte Volonté de Dieu. Emportés par leurs passions, ils se précipitent à la conquête de ce qu’ils ont désiré, et placent le bonheur dans la satisfaction de leurs criminelles convoitises. Et ils en viennent à cet excès, de regarder comme heureux quiconque possède tout ce qu’il désire. nous, au contraire, nous demandons à Dieu, comme dit l’Apôtre , « de ne point noue laisser aller à contenter la chair dans ses convoitises ; mais de faire la Volonté de Dieu. » Cependant, il faut convenir que c’est une chose difficile pour nous de demander à Dieu qu’Il ne contente pas nos passions. Sous ce rapport, notre esprit est difficile à persuader. D’une part, en faisant cette demande, nous paraissons avoir de la haine contre nous-mêmes ; et, de l’autre, ceux qui sont entièrement attachés à leurs corps, nous en font un crime et une folie. Mais subissons volontiers ce reproche de folie pour l’amour de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous dit clairement : « Si quelqu’un veut venir après Moi, qu’il se renonce lui-même. » ne savons-nous pas, d’ailleurs, qu’il vaut infiniment mieux désirer ce qui est juste et raisonnable que d’atteindre et posséder ce qui est contraire à la raison, à la vertu et à la Loi de Dieu ? Et celui-là n’est-il pas bien plus à plaindre, qui a obtenu ce qu’il recherchait inconsidérément et sous l’impulsion de la passion, que celui qui demeure privé même des choses légitimes qu’il souhaitait ? Au reste, non seulement nous demandons à Dieu de nous refuser l’objet de nos désirs naturels, puisqu’il est constant que nos désirs sont déréglés, mais encore de ne pas nous accorder ce que parfois nous demandons comme une chose qui nous paraît bonne, sous l’inspiration et la suggestion du démon, qui se transforme alors en ange de lumière.
Certes, le Prince des Apôtres paraissait animé du zèle le plus pur et de l’amour le plus vrai, lorsqu’il s’efforçait de détourner Notre-Seigneur de ce voyage qui ne pouvait que Le conduire à la mort. Et cependant, comme il était mû par des sentiments trop humains, et non point par une raison surnaturelle, il en est vivement repris par Jésus-Christ.
Et pouvait-on, ce semble, faire une demande dictée par un amour plus sincère envers Notre-Seigneur, que celle de Saint Jacques et de Saint Jean, lorsque, remplis d’indignation contre les Samaritains qui avaient refusé de recevoir leur Maître, ils Le conjuraient de faire descendre le feu du ciel pour punir ces êtres durs et inhumains. Et pourtant Jésus-Christ les condamne en ces termes : « Vous ne savez point à quel esprit vous appartenez ; le Fils de l’homme n’est pas venu pour perdre les âmes, mais pour les sauver. »
Et ce n’est pas seulement quand l’objet de nos désirs est mauvais, ou bien quand il a quelque apparence de mal, que nous devons demander à Dieu que sa Volonté soit faite ; mais encore lorsque la chose que nous désirons n’est point mauvaise en réalité, comme, par exemple, lorsque la volonté, suivant le premier mouvement de la nature, se jette sur ce qui peut nous sauver la vie, et repousse au contraire ce qui semble lui -être nuisible.
Si donc nous nous trouvons dans le cas de demander à Dieu quelque chose de ce genre, disons-lui du fond du cœur: que votre Volonté soit faite ! imitons Celui qui nous a donné le salut, et la science du salut. Lorsque la nature Lui inspira cette crainte si vive de la mort cruelle qui L’attendait, et que son âme fut en proie à la tristesse la plus accablante, Il soumit entièrement sa Volonté à celle de Dieu son Père, en disant: « Que votre volonté se fasse, et non pas la mienne. »
Mais, hélas ! notre nature a été si profondément atteinte par le péché d’Adam, que, même après avoir courageusement résisté à nos passions, après avoir humblement soumis notre volonté à celle de Dieu, il nous est impossible d’éviter le péché sans un secours surnaturel qui nous protège contre le mal et nous dirige vers le bien. nous avons donc besoin de recourir à cette Prière et de demander à Dieu d’achever en nous ce qu’il a commencé, de comprimer les mouvements impétueux de notre cœur. de soumettre nos appétits à la raison, et enfin de nous rendre en tout conformes à sa Volonté.
Nous demandons aussi que la terre entière connaisse la Volonté de Dieu, afin que le Mystère divin, qui demeura caché à tant de générations et à tant de siècles, soit maintenant révélé et manifesté à tous les hommes.
Il ne faut pas laisser ignorer aux Fidèles quelle est la portée de cette demande. Sans entrer dans toutes les explications que les Docteurs scolastiques ont données sur cette question avec autant d’utilité que d’abondance, disons que la Volonté de Dieu dont il s’agit ici, est celle que l’on appelle communément la volonté de signe, c’est-à-dire ce que Dieu nous a ordonné ou conseillé de faire ou d’éviter.
Ainsi, sous le nom de volonté, nous comprenons tout ce qui a été établi, soit dans l’ordre de la Foi, soit dans l’ordre des mœurs, pour nous procurer le bonheur céleste ; enfin tout ce que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a ordonné ou défendu soit par Lui-même, soit par son Eglise. C’est de cette volonté que l’Apôtre nous dit : « Ne soyez point impudents, mais comprenez quelle est la Volonté de Dieu. »
Lors donc que dans notre Prière nous disons à Dieu que votre Volonté soit faite, nous demandons avant tout à notre Père céleste de nous donner la force d’obéir à ses Commandements et de le servir dans la sainteté et la justice tous les jours de notre vie.
De faire tout selon sa volonté et son bon plaisir. De nous acquitter de tous les devoirs qui nous sont prescrits dans nos Saints Livres.
D’accomplir sous sa conduite et par son impulsion tout ce qui convient à ceux qui sont nés non de la chair, mais de Dieu , suivant l’exemple de Jésus-Christ, qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort et la mort de la Croix. . Enfin d’être prêts à tout souffrir plutôt que de nous écarter en rien de sa Volonté:
Mais nul ne saurait réciter cette demande avec un amour plus intense et une ardeur plus vive que celui à qui il a été donné de comprendre la dignité sublime du Chrétien qui obéit à Dieu. Celui-là sent toute la vérité de cette parole: servir Dieu et Lui obéir, c’est régner ; et de celle-ci de Notre-Seigneur : « Quiconque fera la Volonté de mon Père qui est dans les cieux, sera mon frère, ma sœur, et ma mère, c’est-à-dire. Je lui demeurerai attaché par les liens les plus étroits de la bienveillance et de l’amour. »
Parmi les saints, il n’en est presque point qui n’aient fait de la précieuse faveur renfermée dans cette demande, l’objet de leurs prières les plus instantes. très souvent même ils se sont servis pour cela de paroles aussi belles que variées. Mais l’un des plus admirables et des plus touchants dans cette diversité de prières, c’est David. tantôt il dit : « Faites que mes voies se dirigent vers l’observation de vos Commandements ; tantôt: conduisez-moi dans la voie de vos Commandements ; d’autres fois: dirigez mes pas selon votre parole et ne permettez pas que l’in justice domine en moi ; ou bien: donnez-moi l’intelligence, pour que je connaisse vos préceptes. Enseignez-moi vos jugements, et donnez-moi l’intelligence pour que j’entende vos témoignages. » Il répète et retourne la même pensée dans une multitude d’autres endroits, qu’il sera bon de signaler et d’expliquer avec soin aux fidèles, afin qu’ils comprennent parfaitement la grandeur et l’abondance de tous les biens renfermés dans cette demande.
En second lieu, lorsque nous disons: que votre Volonté soit faite, nous détestons les œuvres de la chair, dont l’Apôtre a dit: les œuvres de la chair, c’est-à-dire toutes sortes d’impuretés sont manifestes, etc. Et: si vous vivez selon la chair, vous mourrez. Dés lors nous demandons à Dieu de ne pas nous laisser accomplir ce que les sens, les passions et notre faiblesse pourraient nous conseiller, mais de régler notre volonté sur la sienne.
Les voluptueux, dont les pensées et les affections sont absorbées tout entières par l’amour du plaisir, sont bien éloignés de cette sainte Volonté de Dieu. Emportés par leurs passions, ils se précipitent à la conquête de ce qu’ils ont désiré, et placent le bonheur dans la satisfaction de leurs criminelles convoitises. Et ils en viennent à cet excès, de regarder comme heureux quiconque possède tout ce qu’il désire. nous, au contraire, nous demandons à Dieu, comme dit l’Apôtre , « de ne point noue laisser aller à contenter la chair dans ses convoitises ; mais de faire la Volonté de Dieu. » Cependant, il faut convenir que c’est une chose difficile pour nous de demander à Dieu qu’Il ne contente pas nos passions. Sous ce rapport, notre esprit est difficile à persuader. D’une part, en faisant cette demande, nous paraissons avoir de la haine contre nous-mêmes ; et, de l’autre, ceux qui sont entièrement attachés à leurs corps, nous en font un crime et une folie. Mais subissons volontiers ce reproche de folie pour l’amour de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous dit clairement : « Si quelqu’un veut venir après Moi, qu’il se renonce lui-même. » ne savons-nous pas, d’ailleurs, qu’il vaut infiniment mieux désirer ce qui est juste et raisonnable que d’atteindre et posséder ce qui est contraire à la raison, à la vertu et à la Loi de Dieu ? Et celui-là n’est-il pas bien plus à plaindre, qui a obtenu ce qu’il recherchait inconsidérément et sous l’impulsion de la passion, que celui qui demeure privé même des choses légitimes qu’il souhaitait ? Au reste, non seulement nous demandons à Dieu de nous refuser l’objet de nos désirs naturels, puisqu’il est constant que nos désirs sont déréglés, mais encore de ne pas nous accorder ce que parfois nous demandons comme une chose qui nous paraît bonne, sous l’inspiration et la suggestion du démon, qui se transforme alors en ange de lumière.
Certes, le Prince des Apôtres paraissait animé du zèle le plus pur et de l’amour le plus vrai, lorsqu’il s’efforçait de détourner Notre-Seigneur de ce voyage qui ne pouvait que Le conduire à la mort. Et cependant, comme il était mû par des sentiments trop humains, et non point par une raison surnaturelle, il en est vivement repris par Jésus-Christ.
Et pouvait-on, ce semble, faire une demande dictée par un amour plus sincère envers Notre-Seigneur, que celle de Saint Jacques et de Saint Jean, lorsque, remplis d’indignation contre les Samaritains qui avaient refusé de recevoir leur Maître, ils Le conjuraient de faire descendre le feu du ciel pour punir ces êtres durs et inhumains. Et pourtant Jésus-Christ les condamne en ces termes : « Vous ne savez point à quel esprit vous appartenez ; le Fils de l’homme n’est pas venu pour perdre les âmes, mais pour les sauver. »
Et ce n’est pas seulement quand l’objet de nos désirs est mauvais, ou bien quand il a quelque apparence de mal, que nous devons demander à Dieu que sa Volonté soit faite ; mais encore lorsque la chose que nous désirons n’est point mauvaise en réalité, comme, par exemple, lorsque la volonté, suivant le premier mouvement de la nature, se jette sur ce qui peut nous sauver la vie, et repousse au contraire ce qui semble lui -être nuisible.
Si donc nous nous trouvons dans le cas de demander à Dieu quelque chose de ce genre, disons-lui du fond du cœur: que votre Volonté soit faite ! imitons Celui qui nous a donné le salut, et la science du salut. Lorsque la nature Lui inspira cette crainte si vive de la mort cruelle qui L’attendait, et que son âme fut en proie à la tristesse la plus accablante, Il soumit entièrement sa Volonté à celle de Dieu son Père, en disant: « Que votre volonté se fasse, et non pas la mienne. »
Mais, hélas ! notre nature a été si profondément atteinte par le péché d’Adam, que, même après avoir courageusement résisté à nos passions, après avoir humblement soumis notre volonté à celle de Dieu, il nous est impossible d’éviter le péché sans un secours surnaturel qui nous protège contre le mal et nous dirige vers le bien. nous avons donc besoin de recourir à cette Prière et de demander à Dieu d’achever en nous ce qu’il a commencé, de comprimer les mouvements impétueux de notre cœur. de soumettre nos appétits à la raison, et enfin de nous rendre en tout conformes à sa Volonté.
Nous demandons aussi que la terre entière connaisse la Volonté de Dieu, afin que le Mystère divin, qui demeura caché à tant de générations et à tant de siècles, soit maintenant révélé et manifesté à tous les hommes.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ IV. — SUR LA TERRE COMME AU CIEL.
Nous demandons, de plus, la forme et la mesure de notre obéissance, c’est-à-dire qu’elle soit semblable à cette règle, que les saints Anges et tout le chœur des Bienheureux observent dans le ciel. nous demandons en un mot que si les Anges et les Saints se conforment spontanément et avec un souverain plaisir à la très sainte Volonté de Dieu, nous, de notre côté, nous obéissions volontiers à tous ses ordres, et de la manière qui Lui plaît le plus.
Et de fait, dans tout ce que nous faisons et accomplissons à son service, Dieu demande de nous une véritable plénitude de Charité et d’amour ; de telle sorte que si nous nous consacrons entièrement à Lui par l’espoir des récompenses d’outre tombe, nous ne devons cependant les espérer que parce qu’il a plu à sa divine Majesté de nous donner cette espérance. Il faut donc que notre espérance soit tout entière fondée sur notre amour pour Dieu, puisqu’Il n’a promis qu’à l’amour la béatitude éternelle.
Il en est qui obéissent avec amour, mais cependant en vue de la récompense qui les attend. D’autres, uniquement conduits par l’amour et le dévouement, ne voient dans Celui qu’ils servent que sa Bonté et ses perfections dont la pensée les ravit d’admiration, et ils se trouvent très heureux de pouvoir Lui marquer leur soumission, en se consacrant à son service. Voilà le sens dans lequel nous disons: sur la terre comme au ciel. Car nous devons nous efforcer d’obéir à Dieu sur la terre, comme les Bienheureux lui obéissent dans le ciel. Or, n’oublions pas que David célèbre leur parfaite soumission dans ce beau cantique: « Bénissez le Seigneur, vous qui êtes ses Anges et ses Ministres, et qui faites sa Volonté. »
Il est permis d’adopter ici l’interprétation de Saint Cyprien, qui par le ciel entend les bons et les justes, et par la terre, les méchants et les impies. On peut penser aussi comme lui que le ciel, c’est l’esprit, et la terre, la chair. En sorte que le fruit de cette demande est que tous les hommes et toutes les créatures soient en toutes choses parfaitement soumis à Dieu.
Cette même demande contient aussi une action de Grâces. Par elle, en effet, nous témoignons notre vénération pour la très sainte Volonté de Dieu, et dans le transport de notre joie, nous exaltons toutes ses œuvres par la louange et la reconnaissance la plus vive, nous qui savons mieux que personne qu’Il a bien fait toutes choses. Dieu est tout Puissant, cela est certain. Dès lors nous sommes obligés de reconnaître que tout a été fait par sa Volonté. Et comme d’autre part nous affirmons, sans crainte de nous tromper, qu’Il est infiniment bon, nous proclamons par là même qu’il n’y a rien dans ses œuvres qui ne soit bon, puisqu’Il a dû nécessairement leur communiquer sa Bonté. Mais comme, malgré tout, nous sommes loin de saisir les raisons de Dieu en toutes choses, cependant nous devons reconnaître sans hésitation, et en dépit de l’obscurité, que les voies de Dieu sont impénétrables.
Nous avons encore un autre puissant motif de vénérer la Volonté de Dieu, c’est qu’Il a daigné nous éclairer de sa céleste Lumière, et nous arracher à la puissance des ténèbres, pour nous transporter dans le Royaume de son Fils bien aimé.
Mais, pour terminer ici ce qui se rapporte à l’explication de cette demande, il nous faut revenir à ce que nous avons dit au début, et rappeler aux Fidèles qu’ils doivent faire cette Prière avec une profonde humilité d’esprit et de cœur, réfléchissant en eux-mêmes à la violence de leurs passions naturelles, si opposées à la Volonté divine, et ne doutant point que dans les hommages rendus à cette Volonté sainte, ils sont inférieurs à toutes les créatures, dont l’Esprit Saint a dit: « elles lui obéissent toutes », reconnaissant enfin qu’il faut être bien faible pour ne pas pouvoir sans le secours du ciel, non seulement achever, mais même entreprendre une seule action qui puisse être agréable à Dieu.
Mais puisqu’il y a rien de plus grand, rien de plus noble, comme nous l’avons dit, que de servir Dieu, et de régler sa vie sur ses Commandements, que peut-il y avoir de plus désirable pour un Chrétien que de marcher dans les voies du Seigneur, de ne rien penser, de ne rien faire qui s’écarte en quoi que ce soit de sa divine Volonté ?
Et pour adopter ces saintes habitudes, et pour y persévérer plus fidèlement, le Chrétien aura soin de chercher dans nos Saints Livres les exemples de ceux qui, n’ayant pas voulu soumettre tous leurs desseins à la Volonté de Dieu, ont vu tout se tourner contre eux.
Enfin il faut recommander aux Fidèles de se reposer uniquement et absolument dans la Volonté de Dieu.
Que celui-là donc supporte patiemment sa condition, qui se croit dans une situation inférieure à son mérite. Qu’il n’abandonne point son état, mais qu’il demeure dans celui où Dieu l’a placé. Qu’il soumette son propre jugement à la Volonté de Dieu, car Dieu veille mieux sur tous nos intérêts que nous ne pouvons le désirer nous-mêmes. Si la pauvreté, si la maladie, si les persécutions, les chagrins ou d’autres peines nous écrasent, n’oublions jamais que rien de tout cela ne peut nous arriver sans la Volonté de Dieu, qui est la raison souveraine et dernière de toutes choses. Et bien loin d’en être troublés ou de nous en affliger trop, supportons tout, avec un invincible courage et ces paroles sur les lèvres: « Que la volonté du Seigneur se fasse », ou le mot du saint homme Job: « Comme le Seigneur a voulu, il a été fait: que le nom du Seigneur soit béni ! »
Nous demandons, de plus, la forme et la mesure de notre obéissance, c’est-à-dire qu’elle soit semblable à cette règle, que les saints Anges et tout le chœur des Bienheureux observent dans le ciel. nous demandons en un mot que si les Anges et les Saints se conforment spontanément et avec un souverain plaisir à la très sainte Volonté de Dieu, nous, de notre côté, nous obéissions volontiers à tous ses ordres, et de la manière qui Lui plaît le plus.
Et de fait, dans tout ce que nous faisons et accomplissons à son service, Dieu demande de nous une véritable plénitude de Charité et d’amour ; de telle sorte que si nous nous consacrons entièrement à Lui par l’espoir des récompenses d’outre tombe, nous ne devons cependant les espérer que parce qu’il a plu à sa divine Majesté de nous donner cette espérance. Il faut donc que notre espérance soit tout entière fondée sur notre amour pour Dieu, puisqu’Il n’a promis qu’à l’amour la béatitude éternelle.
Il en est qui obéissent avec amour, mais cependant en vue de la récompense qui les attend. D’autres, uniquement conduits par l’amour et le dévouement, ne voient dans Celui qu’ils servent que sa Bonté et ses perfections dont la pensée les ravit d’admiration, et ils se trouvent très heureux de pouvoir Lui marquer leur soumission, en se consacrant à son service. Voilà le sens dans lequel nous disons: sur la terre comme au ciel. Car nous devons nous efforcer d’obéir à Dieu sur la terre, comme les Bienheureux lui obéissent dans le ciel. Or, n’oublions pas que David célèbre leur parfaite soumission dans ce beau cantique: « Bénissez le Seigneur, vous qui êtes ses Anges et ses Ministres, et qui faites sa Volonté. »
Il est permis d’adopter ici l’interprétation de Saint Cyprien, qui par le ciel entend les bons et les justes, et par la terre, les méchants et les impies. On peut penser aussi comme lui que le ciel, c’est l’esprit, et la terre, la chair. En sorte que le fruit de cette demande est que tous les hommes et toutes les créatures soient en toutes choses parfaitement soumis à Dieu.
Cette même demande contient aussi une action de Grâces. Par elle, en effet, nous témoignons notre vénération pour la très sainte Volonté de Dieu, et dans le transport de notre joie, nous exaltons toutes ses œuvres par la louange et la reconnaissance la plus vive, nous qui savons mieux que personne qu’Il a bien fait toutes choses. Dieu est tout Puissant, cela est certain. Dès lors nous sommes obligés de reconnaître que tout a été fait par sa Volonté. Et comme d’autre part nous affirmons, sans crainte de nous tromper, qu’Il est infiniment bon, nous proclamons par là même qu’il n’y a rien dans ses œuvres qui ne soit bon, puisqu’Il a dû nécessairement leur communiquer sa Bonté. Mais comme, malgré tout, nous sommes loin de saisir les raisons de Dieu en toutes choses, cependant nous devons reconnaître sans hésitation, et en dépit de l’obscurité, que les voies de Dieu sont impénétrables.
Nous avons encore un autre puissant motif de vénérer la Volonté de Dieu, c’est qu’Il a daigné nous éclairer de sa céleste Lumière, et nous arracher à la puissance des ténèbres, pour nous transporter dans le Royaume de son Fils bien aimé.
Mais, pour terminer ici ce qui se rapporte à l’explication de cette demande, il nous faut revenir à ce que nous avons dit au début, et rappeler aux Fidèles qu’ils doivent faire cette Prière avec une profonde humilité d’esprit et de cœur, réfléchissant en eux-mêmes à la violence de leurs passions naturelles, si opposées à la Volonté divine, et ne doutant point que dans les hommages rendus à cette Volonté sainte, ils sont inférieurs à toutes les créatures, dont l’Esprit Saint a dit: « elles lui obéissent toutes », reconnaissant enfin qu’il faut être bien faible pour ne pas pouvoir sans le secours du ciel, non seulement achever, mais même entreprendre une seule action qui puisse être agréable à Dieu.
Mais puisqu’il y a rien de plus grand, rien de plus noble, comme nous l’avons dit, que de servir Dieu, et de régler sa vie sur ses Commandements, que peut-il y avoir de plus désirable pour un Chrétien que de marcher dans les voies du Seigneur, de ne rien penser, de ne rien faire qui s’écarte en quoi que ce soit de sa divine Volonté ?
Et pour adopter ces saintes habitudes, et pour y persévérer plus fidèlement, le Chrétien aura soin de chercher dans nos Saints Livres les exemples de ceux qui, n’ayant pas voulu soumettre tous leurs desseins à la Volonté de Dieu, ont vu tout se tourner contre eux.
Enfin il faut recommander aux Fidèles de se reposer uniquement et absolument dans la Volonté de Dieu.
Que celui-là donc supporte patiemment sa condition, qui se croit dans une situation inférieure à son mérite. Qu’il n’abandonne point son état, mais qu’il demeure dans celui où Dieu l’a placé. Qu’il soumette son propre jugement à la Volonté de Dieu, car Dieu veille mieux sur tous nos intérêts que nous ne pouvons le désirer nous-mêmes. Si la pauvreté, si la maladie, si les persécutions, les chagrins ou d’autres peines nous écrasent, n’oublions jamais que rien de tout cela ne peut nous arriver sans la Volonté de Dieu, qui est la raison souveraine et dernière de toutes choses. Et bien loin d’en être troublés ou de nous en affliger trop, supportons tout, avec un invincible courage et ces paroles sur les lèvres: « Que la volonté du Seigneur se fasse », ou le mot du saint homme Job: « Comme le Seigneur a voulu, il a été fait: que le nom du Seigneur soit béni ! »
Re: Catéchisme du Concile de Trente
Chapitre quarante-troisième — Quatrième demande de l’Oraison Dominicale
DONNEZ-NOUS AUJOURD’HUI NOTRE PAIN QUOTIDIEN
La quatrième demande, et les autres qui suivent ont pour objet spécial, et nettement exprimé, les biens propres de l’âme et du corps. Elles se rattachent de très près et logiquement aux trois précédentes. tel est en effet l’ordre et la disposition de l’Oraison Dominicale, qu’après avoir demandé à Dieu ce qui se rapporte directement à Lui, nous passons ensuite à ce qui regarde le corps et la conservation de la vie présente.
De même en effet que les hommes doivent se porter vers Dieu, comme vers leur fin dernière, de même aussi, et par une raison identique, les biens de la vie humaine sont subordonnés aux biens du ciel, et nous ne devons les désirer et les demander qu’autant que l’ordre providentiel le permet, ou bien parce qu’ils nous servent de moyens pour acquérir les biens divins, et pour atteindre le but que nous devons toujours nous proposer. Ce but, c’est notre fin dernière ; en d’autres termes, le Royaume et la Gloire du Père céleste. Et cette fin nous ne pouvons l’obtenir que par l’observation des Commandements de Dieu et de toutes ses volontés. Ainsi tout ce qui est renfermé dans cette demande, avec toute la portée qu’elle possède, nous devons le rapporter exclusivement à Dieu et à sa Gloire.
§ I. — DE QUELLE MANIERE IL FAUT DEMANDER LES BIENS DE LA VIE.
Les Pasteurs devront s’appliquer à bien faire comprendre aux Fidèles qu’en demandant des choses qui touchent à l’usage et à la jouissance des biens terrestres, nous devons toujours diriger notre cœur et nos désirs sur les prescriptions de Dieu, sans nous en écarter aucunement. Car c’est principalement en demandant ces biens vains et fragiles que nous tombons dans la faute que nous reproche l’Apôtre: « Nous ne savons point ce que nous devons demander ni le faire comme il faut. » II faut donc demander ces choses d’une manière convenable. Autrement, si nous les demandons mal, Dieu pourrait nous répondre « Vous ne savez pas ce que vous demandez. »
Nous possédons une marque certaine pour juger notre Prière, et savoir si elle est bonne ou mauvaise ; nous n’avons qu’à consulter notre intention et notre dessein. Ainsi demander les biens de la terre comme s’ils étaient des biens véritables, s’y arrêter et s’y reposer comme dans sa fin dernière, sans rien désirer au delà, ce n’est évidemment pas prier comme il faut. « En effet, dit Saint Augustin, nous ne demandons point ces choses temporelles comme des biens mais comme des besoins. » Et l’Apôtre Saint Paul, écrivant aux Corinthiens, enseigne positivement que tout ce qui regarde les nécessités de la vie, doit être rapporté à la Gloire de Dieu. « Soit que vous mangiez, dit-il, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelqu’autre chose, faites tout pour la Gloire de Dieu. »
Afin de faire sentir aux Fidèles l’extrême nécessité de cette demande, les Pasteurs leur mettront sous les yeux. En quelque sorte, les choses dont nous avons besoin pour la nourriture et la conservation de notre vie. Et pour leur rendre cette démonstration plus sensible, ils feront bien de comparer les besoins de notre premier Père avec ceux de ses descendants. Il est vrai que dans cet état de parfaite innocence où il avait été créé, et dont il fut privé par sa faute avec toute sa postérité, il eût été obligé de recourir à la nourriture pour réparer ses forces ; mais quelle différence entre ses besoins et les nôtres ! Il ne lui fallait ni vêtements pour se couvrir, ni habitation pour s’y retirer, ni armes pour se défendre, ni remèdes pour se guérir, ni beaucoup d’autres choses qui nous sont nécessaires à nous, pour protéger notre faiblesse et notre fragilité naturelle. II lui suffisait, pour se rendre immortel, de manger le fruit précieux que l’arbre de vie lui aurait procuré sans aucun travail de lui ou de ses descendants.
Cependant, au milieu de toutes les délices de ce paradis, l’homme ne devait point rester oisif. C’était pour travailler que Dieu l’avait placé dans ce séjour du bonheur. Mais mille occupation ne lui eût été pénible, nul devoir désagréable. Il aurait recueilli perpétuellement les fruits les plus délicieux de la culture de ses heureux jardins ; ni ses espérances, ni son travail ne l’auraient jamais trompé.
Mais sa postérité n’a pas été seulement privée du fruit de l’arbre de vie, elle s’est encore vue condamnée par cette sentence effroyable: « La terre est maudite dans votre travail ; vous mangerez de ses fruits dans vos travaux tous tes jours de votre vie ; elle vous produira des ronces et des épines, et vous mangerez tes herbes de la terre: à la sueur de votre front vous vivrez de votre pain jusqu’à ce que vous retourniez à la terre d’où vous avez été tiré ; vous êtes poussière et vous retournerez en poussière. »
Il nous est donc arrivé tout le contraire de ce que nous eussions éprouvé, Adam et nous, s’il eût été fidèle au Commandement de Dieu. tout a été retourné et changé de la manière la plus déplorable. Et ce qu’il y a de plus malheureux pour nous, c’est que, très souvent, les plus grandes dépenses, les travaux les plus durs, les sueurs elles-mêmes, tout reste vain et sans résultat. Les grains confiés à une terre ingrate sont étouffés par les mauvaises herbes qui les couvrent, ou bien ils périssent détruits par les pluies, le vent, la grêle, la chaleur ou la rouille, de sorte que l’on voit le labeur de toute une année réduit à rien en un instant par quelque injure de l’air ou des saisons. Malheur trop mérité, par l’énormité de nos fautes qui éloignent Dieu de nous, et L’empêchent de bénir nos efforts. Ainsi s’accomplit la terrible sentence prononcée contre nous dés le commencement.
Les Pasteurs voudront bien insister sur ce point, afin que les Fidèles n’ignorent pas que c’est par leur faute que les hommes éprouvent ces maux et ces calamités ; afin qu’ils comprennent aussi que si d’une part il faut travailler et souffrir pour se procurer les choses nécessaires à la vie, de l’autre toute espérance sera trompeuse, tout effort inutile, si Dieu ne bénit nos travaux. Car ni celui qui plante, n’est quelque chose, ni celui qui arrose ; mais Dieu qui donne l’accroissement . Et: si Dieu Lui-même ne bâtit point la maison, ceux qui l’élèvent travaillent en vain .
C’est pourquoi les Pasteurs enseigneront que nous avons besoin d’une multitude de choses, soit pour conserver notre vie, soit pour la passer d’une manière agréable. Lorsque les Fidèles auront conscience de ces besoins et de l’infirmité de notre nature, ils se sentiront obligés de recourir au Père céleste, et de Lui demander humblement les biens de la terre et du ciel, ils imiteront l’enfant prodigue qui, pressé par le besoin dans une contrée lointaine, et ne trouvant personne pour apaiser sa faim, même en lui donnant la plus vile nourriture, rentra enfin en lui-même et comprit qu’il ne trouverait qu’auprès de son Père le remède à ses maux.
Mais ce qui augmentera encore la confiance des Fidèles dans cette Prière, ce sera de penser que Dieu, dans sa Bonté infinie, est toujours attentif à la voix de ses enfants. Et de fait, puisqu’il nous exhorte à Lui demander notre pain, n’est-ce pas une véritable promesse qu’Il nous fait de l’accorder en abondance à tous ceux qui le demanderont comme il convient ? en nous apprenant à prier, Il nous exhorte à le faire ; en nous exhortant, II nous y porte ; en nous y portant Il promet, et en promettant Il fait naître en nous l’espérance certaine d’être exaucés.
Après avoir excité et enflammé l’ardeur des Fidèles, le Pasteur ne manquera pas de leur expliquer ensuite ce que l’on sollicite comme fruit de cette demande, et d’abord quel est ce pain que nous demandons.
DONNEZ-NOUS AUJOURD’HUI NOTRE PAIN QUOTIDIEN
La quatrième demande, et les autres qui suivent ont pour objet spécial, et nettement exprimé, les biens propres de l’âme et du corps. Elles se rattachent de très près et logiquement aux trois précédentes. tel est en effet l’ordre et la disposition de l’Oraison Dominicale, qu’après avoir demandé à Dieu ce qui se rapporte directement à Lui, nous passons ensuite à ce qui regarde le corps et la conservation de la vie présente.
De même en effet que les hommes doivent se porter vers Dieu, comme vers leur fin dernière, de même aussi, et par une raison identique, les biens de la vie humaine sont subordonnés aux biens du ciel, et nous ne devons les désirer et les demander qu’autant que l’ordre providentiel le permet, ou bien parce qu’ils nous servent de moyens pour acquérir les biens divins, et pour atteindre le but que nous devons toujours nous proposer. Ce but, c’est notre fin dernière ; en d’autres termes, le Royaume et la Gloire du Père céleste. Et cette fin nous ne pouvons l’obtenir que par l’observation des Commandements de Dieu et de toutes ses volontés. Ainsi tout ce qui est renfermé dans cette demande, avec toute la portée qu’elle possède, nous devons le rapporter exclusivement à Dieu et à sa Gloire.
§ I. — DE QUELLE MANIERE IL FAUT DEMANDER LES BIENS DE LA VIE.
Les Pasteurs devront s’appliquer à bien faire comprendre aux Fidèles qu’en demandant des choses qui touchent à l’usage et à la jouissance des biens terrestres, nous devons toujours diriger notre cœur et nos désirs sur les prescriptions de Dieu, sans nous en écarter aucunement. Car c’est principalement en demandant ces biens vains et fragiles que nous tombons dans la faute que nous reproche l’Apôtre: « Nous ne savons point ce que nous devons demander ni le faire comme il faut. » II faut donc demander ces choses d’une manière convenable. Autrement, si nous les demandons mal, Dieu pourrait nous répondre « Vous ne savez pas ce que vous demandez. »
Nous possédons une marque certaine pour juger notre Prière, et savoir si elle est bonne ou mauvaise ; nous n’avons qu’à consulter notre intention et notre dessein. Ainsi demander les biens de la terre comme s’ils étaient des biens véritables, s’y arrêter et s’y reposer comme dans sa fin dernière, sans rien désirer au delà, ce n’est évidemment pas prier comme il faut. « En effet, dit Saint Augustin, nous ne demandons point ces choses temporelles comme des biens mais comme des besoins. » Et l’Apôtre Saint Paul, écrivant aux Corinthiens, enseigne positivement que tout ce qui regarde les nécessités de la vie, doit être rapporté à la Gloire de Dieu. « Soit que vous mangiez, dit-il, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelqu’autre chose, faites tout pour la Gloire de Dieu. »
Afin de faire sentir aux Fidèles l’extrême nécessité de cette demande, les Pasteurs leur mettront sous les yeux. En quelque sorte, les choses dont nous avons besoin pour la nourriture et la conservation de notre vie. Et pour leur rendre cette démonstration plus sensible, ils feront bien de comparer les besoins de notre premier Père avec ceux de ses descendants. Il est vrai que dans cet état de parfaite innocence où il avait été créé, et dont il fut privé par sa faute avec toute sa postérité, il eût été obligé de recourir à la nourriture pour réparer ses forces ; mais quelle différence entre ses besoins et les nôtres ! Il ne lui fallait ni vêtements pour se couvrir, ni habitation pour s’y retirer, ni armes pour se défendre, ni remèdes pour se guérir, ni beaucoup d’autres choses qui nous sont nécessaires à nous, pour protéger notre faiblesse et notre fragilité naturelle. II lui suffisait, pour se rendre immortel, de manger le fruit précieux que l’arbre de vie lui aurait procuré sans aucun travail de lui ou de ses descendants.
Cependant, au milieu de toutes les délices de ce paradis, l’homme ne devait point rester oisif. C’était pour travailler que Dieu l’avait placé dans ce séjour du bonheur. Mais mille occupation ne lui eût été pénible, nul devoir désagréable. Il aurait recueilli perpétuellement les fruits les plus délicieux de la culture de ses heureux jardins ; ni ses espérances, ni son travail ne l’auraient jamais trompé.
Mais sa postérité n’a pas été seulement privée du fruit de l’arbre de vie, elle s’est encore vue condamnée par cette sentence effroyable: « La terre est maudite dans votre travail ; vous mangerez de ses fruits dans vos travaux tous tes jours de votre vie ; elle vous produira des ronces et des épines, et vous mangerez tes herbes de la terre: à la sueur de votre front vous vivrez de votre pain jusqu’à ce que vous retourniez à la terre d’où vous avez été tiré ; vous êtes poussière et vous retournerez en poussière. »
Il nous est donc arrivé tout le contraire de ce que nous eussions éprouvé, Adam et nous, s’il eût été fidèle au Commandement de Dieu. tout a été retourné et changé de la manière la plus déplorable. Et ce qu’il y a de plus malheureux pour nous, c’est que, très souvent, les plus grandes dépenses, les travaux les plus durs, les sueurs elles-mêmes, tout reste vain et sans résultat. Les grains confiés à une terre ingrate sont étouffés par les mauvaises herbes qui les couvrent, ou bien ils périssent détruits par les pluies, le vent, la grêle, la chaleur ou la rouille, de sorte que l’on voit le labeur de toute une année réduit à rien en un instant par quelque injure de l’air ou des saisons. Malheur trop mérité, par l’énormité de nos fautes qui éloignent Dieu de nous, et L’empêchent de bénir nos efforts. Ainsi s’accomplit la terrible sentence prononcée contre nous dés le commencement.
Les Pasteurs voudront bien insister sur ce point, afin que les Fidèles n’ignorent pas que c’est par leur faute que les hommes éprouvent ces maux et ces calamités ; afin qu’ils comprennent aussi que si d’une part il faut travailler et souffrir pour se procurer les choses nécessaires à la vie, de l’autre toute espérance sera trompeuse, tout effort inutile, si Dieu ne bénit nos travaux. Car ni celui qui plante, n’est quelque chose, ni celui qui arrose ; mais Dieu qui donne l’accroissement . Et: si Dieu Lui-même ne bâtit point la maison, ceux qui l’élèvent travaillent en vain .
C’est pourquoi les Pasteurs enseigneront que nous avons besoin d’une multitude de choses, soit pour conserver notre vie, soit pour la passer d’une manière agréable. Lorsque les Fidèles auront conscience de ces besoins et de l’infirmité de notre nature, ils se sentiront obligés de recourir au Père céleste, et de Lui demander humblement les biens de la terre et du ciel, ils imiteront l’enfant prodigue qui, pressé par le besoin dans une contrée lointaine, et ne trouvant personne pour apaiser sa faim, même en lui donnant la plus vile nourriture, rentra enfin en lui-même et comprit qu’il ne trouverait qu’auprès de son Père le remède à ses maux.
Mais ce qui augmentera encore la confiance des Fidèles dans cette Prière, ce sera de penser que Dieu, dans sa Bonté infinie, est toujours attentif à la voix de ses enfants. Et de fait, puisqu’il nous exhorte à Lui demander notre pain, n’est-ce pas une véritable promesse qu’Il nous fait de l’accorder en abondance à tous ceux qui le demanderont comme il convient ? en nous apprenant à prier, Il nous exhorte à le faire ; en nous exhortant, II nous y porte ; en nous y portant Il promet, et en promettant Il fait naître en nous l’espérance certaine d’être exaucés.
Après avoir excité et enflammé l’ardeur des Fidèles, le Pasteur ne manquera pas de leur expliquer ensuite ce que l’on sollicite comme fruit de cette demande, et d’abord quel est ce pain que nous demandons.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ II. — NOTRE PAIN QUOTIDIEN.
Ce nom de pain, dans la sainte Ecriture, signifie beaucoup de choses, mais spécialement les deux suivantes premièrement tout ce qui sert à notre nourriture, et en général à tous les besoins du corps, secondement toutes les grâces que Dieu nous accorde pour la vie de notre âme et pour notre salut.
C’est sur l’autorité des saints Pères, très affirmatifs sur ce point, que nous demandons tout ce qui est nécessaire pour notre vie terrestre. Il ne faut donc pas écouter ceux qui prétendent qu’il n’est pas permis à des Chrétiens de demander à Dieu les biens matériels de cette vie. C’est une erreur combattue par tous les saints Pères, et contraire à un grand nombre d’exemples de l’Ancien et du nouveau testament. Ainsi Jacob, en faisant son vœu, disait: « Si le Seigneur est avec moi, qu’Il me garde dans la route que je fais, et qu’Il me donne du pain pour me nourrir et des vêtements pour m’habiller, et que je retourne heureusement à la maison de mon père, le Seigneur sera mon Dieu, et cette pierre que j’ai élevée pour témoignage sera appelée maison de Dieu, et je Lui ofrirai la dfme de tout ce, qu’Il m’aura donné. »
Salomon demandait aussi ce qui est nécessaire à la vie matérielle, lorsqu’il faisait cette Prière: « Ne me donnez ni la pauvreté, ni les richesses, mais accordez-moi seulement les choses nécessaires pour ma subsistance. »
Et notre Sauveur Lui-même ne nous ordonne-t-Il pas de demander des choses dont personne n’oserait nier qu’elles se rapportent à la vie du corps ? Priez, disait-il , que votre fuite n’arrive pas en hiver, ni le jour du Sabbat. Que dirons-nous de Saint Jacques, dont voici les paroles: « Si quelqu’un de vous est triste, qu’il prie ; s’il est dans la joie, qu’il chante. » Que dirons-nous enfin de l’Apôtre Saint Paul, qui parlait ainsi aux Romains: « Je vous conjure, mes Frères, par Notre-Seigneur Jésus-Christ, et par la Charité du Saint-Esprit, de m’aider dans vos Prières pour moi auprès de Dieu, afin que je sois délivré des infidèles qui sont en Judée. »
Ainsi donc, puisque Dieu permet aux Fidèles de Lui demander le secours des biens temporels, et que d’autre part Notre-Seigneur nous a laissé une formule de prières qui renferme tous nos besoins, il est impossible de douter que sur les sept demandes, il n’y en ait une pour ces sortes de biens.
Nous demandons le pain quotidien, c’est-à-dire ce qui est nécessaire à la vie, et par là nous devons entendre les vêtements pour nous couvrir et les aliments pour nous nourrir, quelle que soit d’ailleurs cette nourriture, pain ; viande, poisson ou toute autre chose. C’est dans ce sens que nous voyons ce mot employé par le Prophète Elisée, lorsqu’il avertit le Roi d’Israël de fournir du pain aux soldats Assyriens: car on leur donna toutes sortes d’aliments en abondance. Voici également ce que nous lisons de Jésus-Christ: « Il entra un jour de Sabbat dans la maison de l’un des principaux Pharisiens pour y manger le pain, » c’est-à-dire pour y prendre un repas, lequel se compose du boire et du manger.
Mais pour bien marquer le sens précis de cette demande, il ne faut point perdre de vue que par ces mots de pain nous entendons signifier non des mets et des vêtements recherchés et nombreux mais seulement le simple nécessaire.
C’est la pensée de l’Apôtre Saint Paul, dans ce passage « ayant de quoi nous nourrir et nous vêtir, soyons, contents ». Et Salomon que nous avons déjà cité, ne demandait pas autre chose: « donnez-moi seulement, disait-il ce qui est nécessaire pour sa subsistance »
Le mot notre qui accompagne celui de pain nous rappelle aussi cette modération et cette frugalité dont nous parlons. En effet, lorsque nous disons notre pain, nous demandons positivement le pain de la nécessité, et non pas le pain du luxe. Et il faut remarquer de plus que nous disons notre, non point parce que nous pouvons nous le procurer par notre travail et sans le secours de Dieu — car toutes les créatures, dit David en s’adressant à Dieu, attendent que Vous leur donniez leur nourriture au temps marqué. Vous la donnerez, et elles la recevront ; Vous ouvrirez votre main, et elles seront toutes rassasiés de vos biens. Ailleurs il dit encore: les yeux de toutes les créatures espèrent en vous, Seigneur, et Vous leur donnez leur nourriture au temps convenable — nous disons notre pain, parce qu’il nous est nécessaire, et que Dieu seul nous le donne, Dieu qui est le Père de toutes choses et qui nourrit tous les êtres animés par sa sainte Providence.
Nous l’appelons encore notre, ce pain, parce que nous ne devons l’acquérir que par des moyens légitimes, et ne pas nous le procurer par l’injustice, la fraude, ou le vol. Ce que nous obtenons par des voies coupables, n’est point à nous, mais aux autres ; et trop souvent de graves ennuis en accompagnent l’acquisition, ou la possession ou à coup sûr la perte. Au contraire les richesses honnêtement acquises par le travail sont, au témoignage du Prophète, une source de paix et de grande satisfaction pour les gens vertueux. « Parce que vous vous nourrirez du travail de vos mains, dit-il , vous serez heureux et comblés de biens. » C’est qu’en effet Dieu dans sa Bonté promet de bénir et de faire fructifier le travail de ceux qui ne voient dans leurs fatigues quotidiennes que le moyen providentiel de gagner leur vie. « Le Seigneur, est-il dit dans nos Saints Livres , versera ses bénédictions sur vos celliers, et sur tous les ouvrages de vos mains, et Il vous bénira. » Et non seulement nous demandons à Dieu qu’Il nous permette d’user de ce que nous avons acquis grâce à Lui, par nos sueurs et notre énergie — et qu’à ce titre nous appelons vraiment notre — mais encore nous Lui demandons la bonne disposition du cœur qui nous fera user avec sagesse et légitimement de ce que nous aurons légitimement acquis.
Quotidien. Ce mot nous rappelle aussi cette frugalité et cette modération dont nous pariions tout à l’heure. nous ne demandons ni la variété, ni la délicatesse des mets, mais uniquement ce qui est nécessaire aux besoins de la nature. nous ne craignons pas de faire rougir de honte certaines personnes qui dédaignent une nourriture et une boisson communes, et sont toujours en quête de ce qu’il y a de pies exquis dans les aliments et dans les vins.
Ce même mot: quotidien, n’est-il pas aussi la condamnation de ceux à qui s’adressent ces terribles menaces d’Isaïe: « Malheur à vous, qui joignez une maison à une autre, un champ à un autre, jusqu’à l’extrémité du pays où vous êtes ? est-ce que vous habiterez seuls au milieu de la ferre ? » Ces hommes en effet, sont d’une avidité insatiable ; et c’est d’eux que Salomon disait:. « L’avare ne sera jamais rassasié d’or », et Saint Paul: « Ceux qui veulent devenir riches tomberont dans la tentation et dans les filets du démon. »
Nous appelons encore ce pain quotidien, parce que nous nous en nourrissons, pour réparer le principe vital qui se consume tous les jours par l’effet de la chaleur naturelle.
Enfin, une dernière raison de nous servir de ce mot quotidien, c’est que nous devons demander ce pain tous les jours, afin de nous retenir dans l’habitude d’aimer et d’adorer Dieu tous les jours, et de nous convaincre absolument de cette vérité essentielle, que notre vie et notre salut dépendent entièrement de Dieu.
Ce nom de pain, dans la sainte Ecriture, signifie beaucoup de choses, mais spécialement les deux suivantes premièrement tout ce qui sert à notre nourriture, et en général à tous les besoins du corps, secondement toutes les grâces que Dieu nous accorde pour la vie de notre âme et pour notre salut.
C’est sur l’autorité des saints Pères, très affirmatifs sur ce point, que nous demandons tout ce qui est nécessaire pour notre vie terrestre. Il ne faut donc pas écouter ceux qui prétendent qu’il n’est pas permis à des Chrétiens de demander à Dieu les biens matériels de cette vie. C’est une erreur combattue par tous les saints Pères, et contraire à un grand nombre d’exemples de l’Ancien et du nouveau testament. Ainsi Jacob, en faisant son vœu, disait: « Si le Seigneur est avec moi, qu’Il me garde dans la route que je fais, et qu’Il me donne du pain pour me nourrir et des vêtements pour m’habiller, et que je retourne heureusement à la maison de mon père, le Seigneur sera mon Dieu, et cette pierre que j’ai élevée pour témoignage sera appelée maison de Dieu, et je Lui ofrirai la dfme de tout ce, qu’Il m’aura donné. »
Salomon demandait aussi ce qui est nécessaire à la vie matérielle, lorsqu’il faisait cette Prière: « Ne me donnez ni la pauvreté, ni les richesses, mais accordez-moi seulement les choses nécessaires pour ma subsistance. »
Et notre Sauveur Lui-même ne nous ordonne-t-Il pas de demander des choses dont personne n’oserait nier qu’elles se rapportent à la vie du corps ? Priez, disait-il , que votre fuite n’arrive pas en hiver, ni le jour du Sabbat. Que dirons-nous de Saint Jacques, dont voici les paroles: « Si quelqu’un de vous est triste, qu’il prie ; s’il est dans la joie, qu’il chante. » Que dirons-nous enfin de l’Apôtre Saint Paul, qui parlait ainsi aux Romains: « Je vous conjure, mes Frères, par Notre-Seigneur Jésus-Christ, et par la Charité du Saint-Esprit, de m’aider dans vos Prières pour moi auprès de Dieu, afin que je sois délivré des infidèles qui sont en Judée. »
Ainsi donc, puisque Dieu permet aux Fidèles de Lui demander le secours des biens temporels, et que d’autre part Notre-Seigneur nous a laissé une formule de prières qui renferme tous nos besoins, il est impossible de douter que sur les sept demandes, il n’y en ait une pour ces sortes de biens.
Nous demandons le pain quotidien, c’est-à-dire ce qui est nécessaire à la vie, et par là nous devons entendre les vêtements pour nous couvrir et les aliments pour nous nourrir, quelle que soit d’ailleurs cette nourriture, pain ; viande, poisson ou toute autre chose. C’est dans ce sens que nous voyons ce mot employé par le Prophète Elisée, lorsqu’il avertit le Roi d’Israël de fournir du pain aux soldats Assyriens: car on leur donna toutes sortes d’aliments en abondance. Voici également ce que nous lisons de Jésus-Christ: « Il entra un jour de Sabbat dans la maison de l’un des principaux Pharisiens pour y manger le pain, » c’est-à-dire pour y prendre un repas, lequel se compose du boire et du manger.
Mais pour bien marquer le sens précis de cette demande, il ne faut point perdre de vue que par ces mots de pain nous entendons signifier non des mets et des vêtements recherchés et nombreux mais seulement le simple nécessaire.
C’est la pensée de l’Apôtre Saint Paul, dans ce passage « ayant de quoi nous nourrir et nous vêtir, soyons, contents ». Et Salomon que nous avons déjà cité, ne demandait pas autre chose: « donnez-moi seulement, disait-il ce qui est nécessaire pour sa subsistance »
Le mot notre qui accompagne celui de pain nous rappelle aussi cette modération et cette frugalité dont nous parlons. En effet, lorsque nous disons notre pain, nous demandons positivement le pain de la nécessité, et non pas le pain du luxe. Et il faut remarquer de plus que nous disons notre, non point parce que nous pouvons nous le procurer par notre travail et sans le secours de Dieu — car toutes les créatures, dit David en s’adressant à Dieu, attendent que Vous leur donniez leur nourriture au temps marqué. Vous la donnerez, et elles la recevront ; Vous ouvrirez votre main, et elles seront toutes rassasiés de vos biens. Ailleurs il dit encore: les yeux de toutes les créatures espèrent en vous, Seigneur, et Vous leur donnez leur nourriture au temps convenable — nous disons notre pain, parce qu’il nous est nécessaire, et que Dieu seul nous le donne, Dieu qui est le Père de toutes choses et qui nourrit tous les êtres animés par sa sainte Providence.
Nous l’appelons encore notre, ce pain, parce que nous ne devons l’acquérir que par des moyens légitimes, et ne pas nous le procurer par l’injustice, la fraude, ou le vol. Ce que nous obtenons par des voies coupables, n’est point à nous, mais aux autres ; et trop souvent de graves ennuis en accompagnent l’acquisition, ou la possession ou à coup sûr la perte. Au contraire les richesses honnêtement acquises par le travail sont, au témoignage du Prophète, une source de paix et de grande satisfaction pour les gens vertueux. « Parce que vous vous nourrirez du travail de vos mains, dit-il , vous serez heureux et comblés de biens. » C’est qu’en effet Dieu dans sa Bonté promet de bénir et de faire fructifier le travail de ceux qui ne voient dans leurs fatigues quotidiennes que le moyen providentiel de gagner leur vie. « Le Seigneur, est-il dit dans nos Saints Livres , versera ses bénédictions sur vos celliers, et sur tous les ouvrages de vos mains, et Il vous bénira. » Et non seulement nous demandons à Dieu qu’Il nous permette d’user de ce que nous avons acquis grâce à Lui, par nos sueurs et notre énergie — et qu’à ce titre nous appelons vraiment notre — mais encore nous Lui demandons la bonne disposition du cœur qui nous fera user avec sagesse et légitimement de ce que nous aurons légitimement acquis.
Quotidien. Ce mot nous rappelle aussi cette frugalité et cette modération dont nous pariions tout à l’heure. nous ne demandons ni la variété, ni la délicatesse des mets, mais uniquement ce qui est nécessaire aux besoins de la nature. nous ne craignons pas de faire rougir de honte certaines personnes qui dédaignent une nourriture et une boisson communes, et sont toujours en quête de ce qu’il y a de pies exquis dans les aliments et dans les vins.
Ce même mot: quotidien, n’est-il pas aussi la condamnation de ceux à qui s’adressent ces terribles menaces d’Isaïe: « Malheur à vous, qui joignez une maison à une autre, un champ à un autre, jusqu’à l’extrémité du pays où vous êtes ? est-ce que vous habiterez seuls au milieu de la ferre ? » Ces hommes en effet, sont d’une avidité insatiable ; et c’est d’eux que Salomon disait:. « L’avare ne sera jamais rassasié d’or », et Saint Paul: « Ceux qui veulent devenir riches tomberont dans la tentation et dans les filets du démon. »
Nous appelons encore ce pain quotidien, parce que nous nous en nourrissons, pour réparer le principe vital qui se consume tous les jours par l’effet de la chaleur naturelle.
Enfin, une dernière raison de nous servir de ce mot quotidien, c’est que nous devons demander ce pain tous les jours, afin de nous retenir dans l’habitude d’aimer et d’adorer Dieu tous les jours, et de nous convaincre absolument de cette vérité essentielle, que notre vie et notre salut dépendent entièrement de Dieu.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ III. — DONNEZ-NOUS AUJOURD’HUI.
Donnez-nous. Dans ces deux simples mots, quelle abondante matière offerte aux Pasteurs pour exhorter les Fidèles à honorer et à respecter, avec toute la piété possible, l’infinie Puissance de Dieu qui dispose de tout absolument. Et à détester le crime exécrable de Satan, l’orgueilleux et le menteur qui osa dire à Jésus-Christ: « Toutes choses m’ont été livrées, et je les donne à qui je veux. » Car c’est le seul bon plaisir de Dieu qui distribue, qui conserve, et qui augmente tout.
Mais, dira-t-on, pourquoi imposer aux riches la nécessité de demander leur pain quotidien, puisqu’ils sont dans l’abondance de toutes choses ? C’est, répondons-nous, non afin qu’ils obtiennent des biens dont la bonté de Dieu les a comblés, mais afin qu’ils ne les perdent point. Au surplus c’est pour eux que l’Apôtre Saint Paul a écrit: « Que les riches ne devaient point être orgueilleux, ni mettre leur confiance dans l’incertain des richesses, mais dans le Dieu vivant qui nous donne abondamment de quoi fournir à nos besoins. » Une autre raison que donne Saint Chrysostome, de la nécessité de cette Prière: « C’est que nous devons demander, non pas seulement que la nourriture nous soit donnée, mais qu’elle nous soit donnée par la main du Seigneur qui, en lui communiquant une vertu bienfaisante et tout à fait salutaire, fait que cette nourriture profite au corps, et que le corps sert l’âme. »
Mais pourquoi disons-nous: donnez-nous, au pluriel, et non pas: donnez-moi ? Parce que c’est le propre de la Charité chrétienne, que chacun ne songe pas seulement à soi-même, mais qu’il s’intéresse aussi au prochain, et qu’en s’occupant de ses propres intérêts, il se souvienne aussi de ceux des autres. Joignez à cela que lorsque Dieu accorde des avantages à quelqu’un, ce n’est pas pour que celui-là en profite seul, ou qu’il en jouisse avec intempérance, mais pour qu’il distribue aux autres son superflu . « Car, disent Saint Basile et Saint Ambroise, C’est le pain de ceux qui ont faim que vous retenez, c’est le vêtement de ceux qui sont nus que vous cachez, et cet argent que vous enfouissez dans la terre, c’est le rachat, c’est la délivrance des malheureux. »
Aujourd’hui. Ce mot nous avertit tous de notre commune faiblesse. Car quel est l’homme qui, même s’il n’espère pas pouvoir par ses seules ressources s’assurer pour un temps un peu long les choses nécessaires à la vie, ne se flatterait du moins de se suffire à lui-même durant l’espace d’un jour ? et cependant Dieu n’autorise pas cette confiance en nous, puisqu’Il nous a fait un commandement de Lui demander notre pain de tous les jours. Et ceci est fondé sur cette raison capitale, qu’ayant tous et chaque jour besoin de nourriture, chaque jour aussi nous devons tous la demander dans l’Oraison Dominicale.
Voilà ce@ que nous avions à dire du pain matériel qui nourrit et soutient le corps, qui est commun aux Fidèles et aux infidèles, aux justes et aux impies, qui est distribué à tous par l’admirable bonté de Dieu, « qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et qui fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. »
§ IV. — DU PAIN SPIRITUEL.
Reste le Pain spirituel dont nous avons également à parler ici. Or, ce Pain signifie et comprend tout ce don nous avons besoin en cette vie pour le salut et la sanctification de notre âme. Car de même qu’il y a différente espèces d’aliments propres à nourrir notre corps, de même aussi il existe plus d’un. genre de nourriture capable d’entretenir la vie de l’esprit et de l’âme.
Et d’abord la Parole de Dieu est véritablement une nourriture de l’âme. « Venez, dit la Sagesse , mangez mon Pain et buvez le Vin que j’ai préparé pour vous. »
Et lorsque Dieu enlève aux hommes le bienfait de sa Parole — ce qu’Il fait ordinairement pour les punir de quelque grand crime — on dit alors qu’Il les afflige par la famine. Ecoutons le Prophète Amos: « J’enverrai la famine sur la terre ; non la famine du pain, ni la soif de l’eau, mais celle de la parole de Dieu. »
Et comme c’est un signe certain de mort prochaine de ne pouvoir plus prendre de nourriture, ou de ne plus supporter celle que l’on a prise, ainsi c’est une marque presque certaine d’éternelle réprobation de ne point rechercher la Parole de Dieu, de ne la point supporter, lorsqu’on l’entend, et d’oser répéter à Dieu ces paroles épouvantables « Retirez-Vous de nous, nous n’avons que faire de connaître la science de vos voies. »
On trouve cet aveuglement, cette fureur insensée, chez ceux qui abandonnent leurs chefs légitimes, c’est-à-dire les Evêques et les Prêtres, qui se séparent de la sainte Eglise Romaine, pour se faire les disciples des hérétiques qui ne savent que corrompre la Parole de Dieu. Ensuite Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même est ce Pain qui est vraiment la nourriture de l’âme. n’a-t-il pas dit Lui-même: « Je suis le pain vivant descendu du ciel » ? et il est impossible d’imaginer la joie et le bonheur que ce Pain surnaturel procure aux âmes pieuses, même lorsqu’elles sont aux prises avec les plus grands chagrins et les plus cruels mécomptes. nous le voyons par l’exemple des saints Apôtres dont il est dit: « qu’ils sortirent du conseil, et s’en allèrent pleins de joie. » Les vies des Saints sont remplies de traits semblables ; et Dieu Lui-même, en parlant de ces délices intérieures des âmes justes, nous dit: « Je donnerai au vainqueur une manne cachée. »
Mais c’est principalement dans le Sacrement de l’Eucharistie, où il est substantiellement présent, que notre Seigneur Jésus-Christ est, à proprement parler, notre Pain, [le Pain de nos âmes]. Et c’est lorsqu’Il était sur le point de retourner à son Père qu’Il nous donna ce gage incompréhensible de son amour, dont Il a dit Lui-même: « Celui qui mange ma Chair et qui boit mon Sang, demeure en Moi, et Moi en lui ; venez et mangez, ceci est mon Corps. »
Pour l’utilité et l’instruction des Fidèles, les Pasteurs feront bien, sur le point qui nous occupe, de consulter le chapitre de ce catéchisme, où nous traitons séparément de la nature et de la vertu de l’Eucharistie.
Ce Pain, que nous appelons notre Pain n’est cependant que le Pain des Fidèles, c’est-à-dire de ceux qui, remplis de Foi et de Charité, effacent les souillures de leurs péchés dans le sacrement de Pénitence, et qui, se gardant bien d’oublier qu’ils sont les enfants de Dieu, honorent et reçoivent ce divin Sacrement avec toute la piété et le respect dont ils sont capables.
Mais pourquoi Jésus-Christ est-il notre Pain quotidien ? en voici deux raisons excellentes: La première, c’est que chaque jour, dans les sacrés Mystères de l’Eglise, on L’offre à Dieu, et on Le distribue à ceux qui Le demandent avec innocence et piété. La seconde, c’est que. nous devrions chaque jour prendre cette nourriture, ou tout au moins vivre de telle sorte que nous puissions tous les jours nous en nourrir, si cela nous était possible. Ecoutez, vous qui prétendez que l’on ne doit prendre cette nourriture de l’âme qu’à de longs intervalles, écoutez Saint Ambroise: « Si c’est un Pain quotidien, dit-il, pourquoi ne le mangez-vous qu’une fois l’an ? »
Mais, en expliquant cette demande, l’un des points sur lesquels il importe le plus de donner une conviction aux Fidèles, c’est que, après avoir employé toute leur sagesse et toute leur habileté pour se procurer les choses nécessaires à la vie, ils doivent en remettre le succès à Dieu, et régler leurs désirs sur sa Volonté. Car Dieu, dit le Prophète , ne laissera point le juste dans une éternelle agitation. En effet, ou bien Dieu leur accordera ce qu’ils Lui demandent, et alors leurs désirs seront satisfaits ; ou bien Il ne l’accordera pas, et alors ils auront une preuve manifeste qu’il n’y avait rien ni de salutaire ni d’utile dans ce qu’Il aura refusé à ses justes. Car Il a bien plus de sollicitude pour leur salut, qu’ils ne peuvent en avoir eux-mêmes. Les Pasteurs, pour développer davantage cette considération et la mettre en lumière, pourront consulter avec fruit la remarquable lettre de Saint Augustin à Proba.
Enfin, nous terminons ce que nous avions à dire sur cette quatrième demande, en rappelant aux riches qu’ils doivent rapporter à Dieu, de qui ils les tiennent, leur fortune et leurs grandes ressources, et ne jamais oublier qu’ils n’ont été comblés de tous ces biens que pour en faire part aux indigents. Ainsi l’enseigne l’Apôtre Saint Paul dans sa première épître à Timothée. Les Pasteurs n’ont qu’à la consulter ; ils y trouveront en abondance tout ce dont ils ont besoin, pour expliquer clairement aux Fidèles un si important sujet.
Donnez-nous. Dans ces deux simples mots, quelle abondante matière offerte aux Pasteurs pour exhorter les Fidèles à honorer et à respecter, avec toute la piété possible, l’infinie Puissance de Dieu qui dispose de tout absolument. Et à détester le crime exécrable de Satan, l’orgueilleux et le menteur qui osa dire à Jésus-Christ: « Toutes choses m’ont été livrées, et je les donne à qui je veux. » Car c’est le seul bon plaisir de Dieu qui distribue, qui conserve, et qui augmente tout.
Mais, dira-t-on, pourquoi imposer aux riches la nécessité de demander leur pain quotidien, puisqu’ils sont dans l’abondance de toutes choses ? C’est, répondons-nous, non afin qu’ils obtiennent des biens dont la bonté de Dieu les a comblés, mais afin qu’ils ne les perdent point. Au surplus c’est pour eux que l’Apôtre Saint Paul a écrit: « Que les riches ne devaient point être orgueilleux, ni mettre leur confiance dans l’incertain des richesses, mais dans le Dieu vivant qui nous donne abondamment de quoi fournir à nos besoins. » Une autre raison que donne Saint Chrysostome, de la nécessité de cette Prière: « C’est que nous devons demander, non pas seulement que la nourriture nous soit donnée, mais qu’elle nous soit donnée par la main du Seigneur qui, en lui communiquant une vertu bienfaisante et tout à fait salutaire, fait que cette nourriture profite au corps, et que le corps sert l’âme. »
Mais pourquoi disons-nous: donnez-nous, au pluriel, et non pas: donnez-moi ? Parce que c’est le propre de la Charité chrétienne, que chacun ne songe pas seulement à soi-même, mais qu’il s’intéresse aussi au prochain, et qu’en s’occupant de ses propres intérêts, il se souvienne aussi de ceux des autres. Joignez à cela que lorsque Dieu accorde des avantages à quelqu’un, ce n’est pas pour que celui-là en profite seul, ou qu’il en jouisse avec intempérance, mais pour qu’il distribue aux autres son superflu . « Car, disent Saint Basile et Saint Ambroise, C’est le pain de ceux qui ont faim que vous retenez, c’est le vêtement de ceux qui sont nus que vous cachez, et cet argent que vous enfouissez dans la terre, c’est le rachat, c’est la délivrance des malheureux. »
Aujourd’hui. Ce mot nous avertit tous de notre commune faiblesse. Car quel est l’homme qui, même s’il n’espère pas pouvoir par ses seules ressources s’assurer pour un temps un peu long les choses nécessaires à la vie, ne se flatterait du moins de se suffire à lui-même durant l’espace d’un jour ? et cependant Dieu n’autorise pas cette confiance en nous, puisqu’Il nous a fait un commandement de Lui demander notre pain de tous les jours. Et ceci est fondé sur cette raison capitale, qu’ayant tous et chaque jour besoin de nourriture, chaque jour aussi nous devons tous la demander dans l’Oraison Dominicale.
Voilà ce@ que nous avions à dire du pain matériel qui nourrit et soutient le corps, qui est commun aux Fidèles et aux infidèles, aux justes et aux impies, qui est distribué à tous par l’admirable bonté de Dieu, « qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et qui fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. »
§ IV. — DU PAIN SPIRITUEL.
Reste le Pain spirituel dont nous avons également à parler ici. Or, ce Pain signifie et comprend tout ce don nous avons besoin en cette vie pour le salut et la sanctification de notre âme. Car de même qu’il y a différente espèces d’aliments propres à nourrir notre corps, de même aussi il existe plus d’un. genre de nourriture capable d’entretenir la vie de l’esprit et de l’âme.
Et d’abord la Parole de Dieu est véritablement une nourriture de l’âme. « Venez, dit la Sagesse , mangez mon Pain et buvez le Vin que j’ai préparé pour vous. »
Et lorsque Dieu enlève aux hommes le bienfait de sa Parole — ce qu’Il fait ordinairement pour les punir de quelque grand crime — on dit alors qu’Il les afflige par la famine. Ecoutons le Prophète Amos: « J’enverrai la famine sur la terre ; non la famine du pain, ni la soif de l’eau, mais celle de la parole de Dieu. »
Et comme c’est un signe certain de mort prochaine de ne pouvoir plus prendre de nourriture, ou de ne plus supporter celle que l’on a prise, ainsi c’est une marque presque certaine d’éternelle réprobation de ne point rechercher la Parole de Dieu, de ne la point supporter, lorsqu’on l’entend, et d’oser répéter à Dieu ces paroles épouvantables « Retirez-Vous de nous, nous n’avons que faire de connaître la science de vos voies. »
On trouve cet aveuglement, cette fureur insensée, chez ceux qui abandonnent leurs chefs légitimes, c’est-à-dire les Evêques et les Prêtres, qui se séparent de la sainte Eglise Romaine, pour se faire les disciples des hérétiques qui ne savent que corrompre la Parole de Dieu. Ensuite Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même est ce Pain qui est vraiment la nourriture de l’âme. n’a-t-il pas dit Lui-même: « Je suis le pain vivant descendu du ciel » ? et il est impossible d’imaginer la joie et le bonheur que ce Pain surnaturel procure aux âmes pieuses, même lorsqu’elles sont aux prises avec les plus grands chagrins et les plus cruels mécomptes. nous le voyons par l’exemple des saints Apôtres dont il est dit: « qu’ils sortirent du conseil, et s’en allèrent pleins de joie. » Les vies des Saints sont remplies de traits semblables ; et Dieu Lui-même, en parlant de ces délices intérieures des âmes justes, nous dit: « Je donnerai au vainqueur une manne cachée. »
Mais c’est principalement dans le Sacrement de l’Eucharistie, où il est substantiellement présent, que notre Seigneur Jésus-Christ est, à proprement parler, notre Pain, [le Pain de nos âmes]. Et c’est lorsqu’Il était sur le point de retourner à son Père qu’Il nous donna ce gage incompréhensible de son amour, dont Il a dit Lui-même: « Celui qui mange ma Chair et qui boit mon Sang, demeure en Moi, et Moi en lui ; venez et mangez, ceci est mon Corps. »
Pour l’utilité et l’instruction des Fidèles, les Pasteurs feront bien, sur le point qui nous occupe, de consulter le chapitre de ce catéchisme, où nous traitons séparément de la nature et de la vertu de l’Eucharistie.
Ce Pain, que nous appelons notre Pain n’est cependant que le Pain des Fidèles, c’est-à-dire de ceux qui, remplis de Foi et de Charité, effacent les souillures de leurs péchés dans le sacrement de Pénitence, et qui, se gardant bien d’oublier qu’ils sont les enfants de Dieu, honorent et reçoivent ce divin Sacrement avec toute la piété et le respect dont ils sont capables.
Mais pourquoi Jésus-Christ est-il notre Pain quotidien ? en voici deux raisons excellentes: La première, c’est que chaque jour, dans les sacrés Mystères de l’Eglise, on L’offre à Dieu, et on Le distribue à ceux qui Le demandent avec innocence et piété. La seconde, c’est que. nous devrions chaque jour prendre cette nourriture, ou tout au moins vivre de telle sorte que nous puissions tous les jours nous en nourrir, si cela nous était possible. Ecoutez, vous qui prétendez que l’on ne doit prendre cette nourriture de l’âme qu’à de longs intervalles, écoutez Saint Ambroise: « Si c’est un Pain quotidien, dit-il, pourquoi ne le mangez-vous qu’une fois l’an ? »
Mais, en expliquant cette demande, l’un des points sur lesquels il importe le plus de donner une conviction aux Fidèles, c’est que, après avoir employé toute leur sagesse et toute leur habileté pour se procurer les choses nécessaires à la vie, ils doivent en remettre le succès à Dieu, et régler leurs désirs sur sa Volonté. Car Dieu, dit le Prophète , ne laissera point le juste dans une éternelle agitation. En effet, ou bien Dieu leur accordera ce qu’ils Lui demandent, et alors leurs désirs seront satisfaits ; ou bien Il ne l’accordera pas, et alors ils auront une preuve manifeste qu’il n’y avait rien ni de salutaire ni d’utile dans ce qu’Il aura refusé à ses justes. Car Il a bien plus de sollicitude pour leur salut, qu’ils ne peuvent en avoir eux-mêmes. Les Pasteurs, pour développer davantage cette considération et la mettre en lumière, pourront consulter avec fruit la remarquable lettre de Saint Augustin à Proba.
Enfin, nous terminons ce que nous avions à dire sur cette quatrième demande, en rappelant aux riches qu’ils doivent rapporter à Dieu, de qui ils les tiennent, leur fortune et leurs grandes ressources, et ne jamais oublier qu’ils n’ont été comblés de tous ces biens que pour en faire part aux indigents. Ainsi l’enseigne l’Apôtre Saint Paul dans sa première épître à Timothée. Les Pasteurs n’ont qu’à la consulter ; ils y trouveront en abondance tout ce dont ils ont besoin, pour expliquer clairement aux Fidèles un si important sujet.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
Chapitre quarante-quatrième — Cinquième demande de l’Oraison Dominicale
PARDONNEZ-NOUS NOS OFFENSES COMME NOUS PARDONNONS A CEUX QUI NOUS ONT OFFENSES.
Il n’y a qu’à ouvrir les yeux pour apercevoir la Puissance infinie, la Sagesse et la Bonté de Dieu. Elles éclatent de toutes parts, dans une multitude de choses. Partout où nous pouvons porter nos regards et notre pensée, nous sommes en face des preuves les plus admirables et les plus certaines de ce pouvoir et de cette bienveillance sans bornes. néanmoins, rien ne manifeste mieux l’amour immense que Dieu a pour nous, et son incompréhensible Charité, que l’ineffable mystère de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Voilà la Source intarissable qui purifie les souillures de nos péchés, et où nous demandons à Dieu la grâce d’être plongés et purifiés quand nous disons: pardonnez-nous nos offenses.
Cette Prière renferme donc, comme en une sorte d’abrégé, tous les biens dont le genre humain a été comblé par Jésus-Christ. C’est l’affirmation formelle d’Isaïe: « L’iniquité de la maison de Jacob, dit-il, lui sera pardonnée et le comble des avantages pour elle, c’est que son péché sera effacé. » David dit aussi la même chose, en chantant le bonheur de ceux qui ont pu participer à cette faveur si précieuse: « Heureux, ceux dont les iniquités ont été remises. »
Les Pasteurs auront donc à étudier et à expliquer avec beaucoup de soin cette cinquième demande dont nous connaissons l’extrême importance au point de vue du Salut.
Ici, nous entrons dans un nouvel ordre de Prière. Jusqu’ici en effet, nous avons demandé à Dieu non seulement les biens éternels et spirituels, mais encore les avantages périssables qui se rapportent à cette vie. Maintenant nous Le prions d’éloigner de nous les maux de l’âme et ceux du corps, les maux du temps et ceux de l’éternité. Mais comme il est nécessaire, pour être exaucé, de demander convenablement, il nous parait utile de bien marquer les dispositions dans lesquelles il faut être pour adresser à Dieu cette Prière.
§ I. — DES DISPOSITIONS NECESSAIRES POUR FAIRE CETTE PRIERE. — REPENTIR.
Les Pasteurs ont donc à prévenir les Fidèles que celui qui veut s’approcher de Dieu pour Lui faire cette demande, est obligé d’abord de reconnaître ses propres fautes, puis de ressentir une véritable douleur de les avoir commises, et en même temps d’être bien persuadé que Dieu a la volonté de pardonner à tous les pécheurs qui sont dans les dispositions que nous venons de rappeler. Autrement, le souvenir plein d’amertume et la vue effrayante de tous nos péchés pourraient nous jeter dans le désespoir de Caïn et de Judas, qui ne voulurent voir en Dieu qu’un Vengeur et un Justicier, et non point la Bonté même de la Miséricorde infinie.
La principale disposition que nous devons apporter à cette Prière est donc de reconnaître nos fautes avec une vraie Contrition, et de nous adresser à Dieu comme à un Père et non point comme à un Juge. En un mot nous devons Lui demander de nous traiter non d’après sa Justice, mais selon sa Miséricorde.
Or, nous n’aurons aucune peine à confesser que nous sommes de pauvres pécheurs, si nous voulons écouter ce que Dieu Lui-même nous dit dans nos Saints Livres par la bouche de David: « Ils se sont tous égarés ; tous se sont corrompus. Il n’en est pas qui fasse le bien, non, pas un seul, » Salomon dit dans le même sens: « Il n’y a point de juste sur la terre qui fasse le bien et ne pèche jamais ; » puis encore: « Qui peut dire: mon cœur est pur ; je suis exempt de péché ? » et pour détourner les hommes de l’orgueil, Saint Jean a écrit: « Si nous nous disons sans péché nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous ; » enfin Jérémie: « Tu as dit: Je suis sans péché, je suis innocent, éloignez donc de moi votre colère. Eh bien ! voilà que Je vais entrer en jugement avec toi, parce que tu as dit: Je n’ai pas péché. »
Tous ces témoignages que Notre-Seigneur Jésus-Christ avait donnés au monde par la bouche des Prophètes, II a voulu les confirmer Lui-même en nous prescrivant une Prière qui nous oblige à confesser nos fautes. Il est défendu d’entendre cette demande dans un autre sens, le décret du Concile de Milève est formel: « Si quelqu’un interprète ces paroles de l’Oraison Dominicale: pardonnez-nous nos offenses, comme si les Saints ne les prononçaient que par humilité et non point avec sincérité et vérité, nous voulons qu’il soit anathème. » Et en effet, qui pourrait souffrir un homme capable de mentir non aux hommes mais à Dieu même, et affirmant de bouche qu’il veut être pardonné, pendant que dans son cœur il prétendrait n’avoir pas besoin de pardon !
Mais dans cette reconnaissance nécessaire de nos péchés, il ne suffit pas de nous les rappeler légèrement, il faut que ce souvenir nous soit amer, qu’il pénètre au fond de notre cœur, y éveille le remords et nous inspire une vive douleur. Aussi bien les Pasteurs auront grand soin d’insister sur cette vérité, pour convaincre les Fidèles qui sont obligés non seulement de se rappeler leurs iniquités et leurs désordres, mais de se les rappeler avec une douleur profonde et un repentir sincère. Ainsi, le cœur vraiment contrit, ils se jetteront dans les bras de Dieu leur Père, et ils Le supplieront en toute humilité d’arracher de leurs âmes les terribles aiguillons du péché.
Et ils ne se contenteront pas de mettre sous les yeux des Fidèles toute la laideur du péché, ils leur représenteront encore l’indignité et la bassesse de l’homme, qui n’étant rien par lui-même que corruption et péché ne laisse pas d’offenser lâchement l’incompréhensible Majesté, l’Excellence infinie de ce Dieu qui l’a créé, qui l’a racheté et l’a enrichi d’une multitude innombrable de grâces et de bienfaits.
Et pourquoi ? pour se séparer de Dieu son Père qui est le souverain Bien, et pour aller, séduit par la honteuse récompense du péché, se vouer au démon et à la plus misérable des servitudes. Car on ne saurait dire avec quelle cruauté Satan règne sur l’esprit de ceux qui ont abandonné le joug si léger de la Loi de Dieu, et rompu le lien si doux qui nous attache à Lui, pour passer à cet ennemi acharné que nos Saints Livres appellent: « Le prince et le maître de ce monde, le prince des ténèbres, le roi de tous les fils de l’orgueil. » Car c’est bien aux malheureux opprimés sous la tyrannie du démon, que peuvent s’appliquer les paroles d’Isaïe: « Seigneur notre Dieu, d’autres maîtres que vous nous ont possédés. »
Si nous sommes peu touchés d’avoir perdu la Charité de Dieu et d’en avoir brisé les liens, soyons-le du moins par les calamités et les misères dans lesquelles nous précipite le péché. Il viole la sainteté de notre âme que nous savons être l’épouse de Jésus-Christ, il profane en elle le temple du Seigneur, et l’Apôtre prononce contre ceux qui souillent ce temple, ce terrible anathème: « Si quelqu’un viole le temple du Seigneur, le Seigneur le perdra. » Enfin les maux que le péché attire sur l’homme sont innombrables ; c’est comme une peste générale que David a exprimée en ces termes: « A la vue de votre colère, il ne reste rien de sain dans mon corps ; et il n’y a plus de paix dans mes os à la vue de mes péchés. » Pouvait-il mieux caractériser la gravité du mal que le péché lui avait fait, que d’avouer qu’il n’y avait aucune partie de son corps qui n’en eût été blessée, que cette peste avait pénétré jusque dans ses os, c’est-à-dire, avait infecté sa raison et sa volonté qui sont les deux parties les plus fortes de l’âme ? La sainte Ecriture nous peint bien l’étendue des ravages du péché, quand elle donne au pécheur le nom de boiteux, de sourd, de muet, d’aveugle, et de paralytique de tous les membres.
Mais il faut le dire, outre la douleur que David ressentait de la grandeur de son crime, il était surtout plongé dans la plus cruelle affliction à la vue de la colère de Dieu qu’il savait avoir allumée par son péché. Car Dieu, qui se sent offensé par nos crimes, au delà de ce que nous pouvons concevoir, déclare au pécheur une guerre implacable, Saint Paul le dit: « La colère et l’indignation, la tribulation et l’angoisse, voilà le partage de tout homme qui fait le mal ! »
Sans doute l’acte du péché passe, mais la tache et la culpabilité restent ; et la colère de Dieu, toujours menaçante, suit le pécheur comme l’ombre suit le corps. David se sentant pressé par les aiguillons de cette redoutable colère, demandait avec ardeur le pardon de ses fautes. Il nous a laissé dans le Psaume cinquantième un modèle de douleur, avec les raisons et les motifs de cette douleur. Les Pasteurs feront bien de le mettre sous les yeux des Fidèles afin qu’à l’exemple du Prophète ils puissent s’exciter à un véritable repentir, à une douleur sincère de leurs péchés, et concevoir l’espérance du pardon.
II est en effet très utile d’enseigner aux Fidèles les moyens d’exciter en eux le repentir de leurs fautes ; et Dieu Lui-même, par la bouche du Prophète Jérémie, exhortant les enfants d’Israël à faire pénitence, leur recommandait de bien méditer sur les effets toujours désastreux du péché. « Voyez, leur dit-Il, les maux et les afflictions qui vous arrivent pour avoir abandonné le Seigneur votre Dieu, et pour n’avoir pas conservé ma crainte en votre cœur, dit le Seigneur Dieu des armées. »
Ceux qui ne reconnaissent point leurs péchés et n’en éprouvent point un sincère repentir, n’ont qu’un cœur dur , un cœur de pierre , un cœur de diamant , selon les expressions d’Isaïe, d’Ezéchiel et de Zacharie. Semblables en effet à la pierre, aucune douleur ne les amollit ; ils n’ont aucun sentiment de vie véritable, précisément parce qu’ils manquent de ce double sentiment dont nous venons de parler, l’aveu et le repentir de leurs péchés.
PARDONNEZ-NOUS NOS OFFENSES COMME NOUS PARDONNONS A CEUX QUI NOUS ONT OFFENSES.
Il n’y a qu’à ouvrir les yeux pour apercevoir la Puissance infinie, la Sagesse et la Bonté de Dieu. Elles éclatent de toutes parts, dans une multitude de choses. Partout où nous pouvons porter nos regards et notre pensée, nous sommes en face des preuves les plus admirables et les plus certaines de ce pouvoir et de cette bienveillance sans bornes. néanmoins, rien ne manifeste mieux l’amour immense que Dieu a pour nous, et son incompréhensible Charité, que l’ineffable mystère de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Voilà la Source intarissable qui purifie les souillures de nos péchés, et où nous demandons à Dieu la grâce d’être plongés et purifiés quand nous disons: pardonnez-nous nos offenses.
Cette Prière renferme donc, comme en une sorte d’abrégé, tous les biens dont le genre humain a été comblé par Jésus-Christ. C’est l’affirmation formelle d’Isaïe: « L’iniquité de la maison de Jacob, dit-il, lui sera pardonnée et le comble des avantages pour elle, c’est que son péché sera effacé. » David dit aussi la même chose, en chantant le bonheur de ceux qui ont pu participer à cette faveur si précieuse: « Heureux, ceux dont les iniquités ont été remises. »
Les Pasteurs auront donc à étudier et à expliquer avec beaucoup de soin cette cinquième demande dont nous connaissons l’extrême importance au point de vue du Salut.
Ici, nous entrons dans un nouvel ordre de Prière. Jusqu’ici en effet, nous avons demandé à Dieu non seulement les biens éternels et spirituels, mais encore les avantages périssables qui se rapportent à cette vie. Maintenant nous Le prions d’éloigner de nous les maux de l’âme et ceux du corps, les maux du temps et ceux de l’éternité. Mais comme il est nécessaire, pour être exaucé, de demander convenablement, il nous parait utile de bien marquer les dispositions dans lesquelles il faut être pour adresser à Dieu cette Prière.
§ I. — DES DISPOSITIONS NECESSAIRES POUR FAIRE CETTE PRIERE. — REPENTIR.
Les Pasteurs ont donc à prévenir les Fidèles que celui qui veut s’approcher de Dieu pour Lui faire cette demande, est obligé d’abord de reconnaître ses propres fautes, puis de ressentir une véritable douleur de les avoir commises, et en même temps d’être bien persuadé que Dieu a la volonté de pardonner à tous les pécheurs qui sont dans les dispositions que nous venons de rappeler. Autrement, le souvenir plein d’amertume et la vue effrayante de tous nos péchés pourraient nous jeter dans le désespoir de Caïn et de Judas, qui ne voulurent voir en Dieu qu’un Vengeur et un Justicier, et non point la Bonté même de la Miséricorde infinie.
La principale disposition que nous devons apporter à cette Prière est donc de reconnaître nos fautes avec une vraie Contrition, et de nous adresser à Dieu comme à un Père et non point comme à un Juge. En un mot nous devons Lui demander de nous traiter non d’après sa Justice, mais selon sa Miséricorde.
Or, nous n’aurons aucune peine à confesser que nous sommes de pauvres pécheurs, si nous voulons écouter ce que Dieu Lui-même nous dit dans nos Saints Livres par la bouche de David: « Ils se sont tous égarés ; tous se sont corrompus. Il n’en est pas qui fasse le bien, non, pas un seul, » Salomon dit dans le même sens: « Il n’y a point de juste sur la terre qui fasse le bien et ne pèche jamais ; » puis encore: « Qui peut dire: mon cœur est pur ; je suis exempt de péché ? » et pour détourner les hommes de l’orgueil, Saint Jean a écrit: « Si nous nous disons sans péché nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous ; » enfin Jérémie: « Tu as dit: Je suis sans péché, je suis innocent, éloignez donc de moi votre colère. Eh bien ! voilà que Je vais entrer en jugement avec toi, parce que tu as dit: Je n’ai pas péché. »
Tous ces témoignages que Notre-Seigneur Jésus-Christ avait donnés au monde par la bouche des Prophètes, II a voulu les confirmer Lui-même en nous prescrivant une Prière qui nous oblige à confesser nos fautes. Il est défendu d’entendre cette demande dans un autre sens, le décret du Concile de Milève est formel: « Si quelqu’un interprète ces paroles de l’Oraison Dominicale: pardonnez-nous nos offenses, comme si les Saints ne les prononçaient que par humilité et non point avec sincérité et vérité, nous voulons qu’il soit anathème. » Et en effet, qui pourrait souffrir un homme capable de mentir non aux hommes mais à Dieu même, et affirmant de bouche qu’il veut être pardonné, pendant que dans son cœur il prétendrait n’avoir pas besoin de pardon !
Mais dans cette reconnaissance nécessaire de nos péchés, il ne suffit pas de nous les rappeler légèrement, il faut que ce souvenir nous soit amer, qu’il pénètre au fond de notre cœur, y éveille le remords et nous inspire une vive douleur. Aussi bien les Pasteurs auront grand soin d’insister sur cette vérité, pour convaincre les Fidèles qui sont obligés non seulement de se rappeler leurs iniquités et leurs désordres, mais de se les rappeler avec une douleur profonde et un repentir sincère. Ainsi, le cœur vraiment contrit, ils se jetteront dans les bras de Dieu leur Père, et ils Le supplieront en toute humilité d’arracher de leurs âmes les terribles aiguillons du péché.
Et ils ne se contenteront pas de mettre sous les yeux des Fidèles toute la laideur du péché, ils leur représenteront encore l’indignité et la bassesse de l’homme, qui n’étant rien par lui-même que corruption et péché ne laisse pas d’offenser lâchement l’incompréhensible Majesté, l’Excellence infinie de ce Dieu qui l’a créé, qui l’a racheté et l’a enrichi d’une multitude innombrable de grâces et de bienfaits.
Et pourquoi ? pour se séparer de Dieu son Père qui est le souverain Bien, et pour aller, séduit par la honteuse récompense du péché, se vouer au démon et à la plus misérable des servitudes. Car on ne saurait dire avec quelle cruauté Satan règne sur l’esprit de ceux qui ont abandonné le joug si léger de la Loi de Dieu, et rompu le lien si doux qui nous attache à Lui, pour passer à cet ennemi acharné que nos Saints Livres appellent: « Le prince et le maître de ce monde, le prince des ténèbres, le roi de tous les fils de l’orgueil. » Car c’est bien aux malheureux opprimés sous la tyrannie du démon, que peuvent s’appliquer les paroles d’Isaïe: « Seigneur notre Dieu, d’autres maîtres que vous nous ont possédés. »
Si nous sommes peu touchés d’avoir perdu la Charité de Dieu et d’en avoir brisé les liens, soyons-le du moins par les calamités et les misères dans lesquelles nous précipite le péché. Il viole la sainteté de notre âme que nous savons être l’épouse de Jésus-Christ, il profane en elle le temple du Seigneur, et l’Apôtre prononce contre ceux qui souillent ce temple, ce terrible anathème: « Si quelqu’un viole le temple du Seigneur, le Seigneur le perdra. » Enfin les maux que le péché attire sur l’homme sont innombrables ; c’est comme une peste générale que David a exprimée en ces termes: « A la vue de votre colère, il ne reste rien de sain dans mon corps ; et il n’y a plus de paix dans mes os à la vue de mes péchés. » Pouvait-il mieux caractériser la gravité du mal que le péché lui avait fait, que d’avouer qu’il n’y avait aucune partie de son corps qui n’en eût été blessée, que cette peste avait pénétré jusque dans ses os, c’est-à-dire, avait infecté sa raison et sa volonté qui sont les deux parties les plus fortes de l’âme ? La sainte Ecriture nous peint bien l’étendue des ravages du péché, quand elle donne au pécheur le nom de boiteux, de sourd, de muet, d’aveugle, et de paralytique de tous les membres.
Mais il faut le dire, outre la douleur que David ressentait de la grandeur de son crime, il était surtout plongé dans la plus cruelle affliction à la vue de la colère de Dieu qu’il savait avoir allumée par son péché. Car Dieu, qui se sent offensé par nos crimes, au delà de ce que nous pouvons concevoir, déclare au pécheur une guerre implacable, Saint Paul le dit: « La colère et l’indignation, la tribulation et l’angoisse, voilà le partage de tout homme qui fait le mal ! »
Sans doute l’acte du péché passe, mais la tache et la culpabilité restent ; et la colère de Dieu, toujours menaçante, suit le pécheur comme l’ombre suit le corps. David se sentant pressé par les aiguillons de cette redoutable colère, demandait avec ardeur le pardon de ses fautes. Il nous a laissé dans le Psaume cinquantième un modèle de douleur, avec les raisons et les motifs de cette douleur. Les Pasteurs feront bien de le mettre sous les yeux des Fidèles afin qu’à l’exemple du Prophète ils puissent s’exciter à un véritable repentir, à une douleur sincère de leurs péchés, et concevoir l’espérance du pardon.
II est en effet très utile d’enseigner aux Fidèles les moyens d’exciter en eux le repentir de leurs fautes ; et Dieu Lui-même, par la bouche du Prophète Jérémie, exhortant les enfants d’Israël à faire pénitence, leur recommandait de bien méditer sur les effets toujours désastreux du péché. « Voyez, leur dit-Il, les maux et les afflictions qui vous arrivent pour avoir abandonné le Seigneur votre Dieu, et pour n’avoir pas conservé ma crainte en votre cœur, dit le Seigneur Dieu des armées. »
Ceux qui ne reconnaissent point leurs péchés et n’en éprouvent point un sincère repentir, n’ont qu’un cœur dur , un cœur de pierre , un cœur de diamant , selon les expressions d’Isaïe, d’Ezéchiel et de Zacharie. Semblables en effet à la pierre, aucune douleur ne les amollit ; ils n’ont aucun sentiment de vie véritable, précisément parce qu’ils manquent de ce double sentiment dont nous venons de parler, l’aveu et le repentir de leurs péchés.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ II. — CONFIANCE EN DIEU.
Mais dans la crainte que les Fidèles, épouvantés à la vue de leurs péchés, ne désespèrent d’en obtenir le pardon, les Pasteurs ne manqueront pas de les rappeler à l’Espérance par les considérations que voici: d’abord, notre Seigneur Jésus-Christ a donné à l’Eglise le pouvoir de remettre les péchés, comme le déclare le dixième article du Symbole des Apôtres ; ensuite, dans cette demande même, II nous montre clairement combien Dieu est bon et généreux envers le genre humain. Car s’il n’était pas toujours prêt et empressé à pardonner à ceux qui se repentent, jamais Il ne nous eût imposé cette formule de Prière : pardonnez-nous nos offenses.
Croyons donc fermement et sans aucun doute, que Celui-là ne manquera jamais d’étendre sur nous sa paternelle Miséricorde, qui nous ordonne de L’implorer en ces termes. Car le vrai sens attaché à cette demande, c’est que Dieu a pour nous des sentiments tels qu’Il nous pardonne volontiers dès que notre repentir est sincère.
Sans aucun doute, c’est un Dieu que nous offensons par notre désobéissance, un Dieu dont nous troublons, autant qu’il est en nous, l’ordre si sage qu’il a établi, un Dieu que nous outrageons par nos paroles et par nos actes, mais ce Dieu est en même temps le plus tendre des Pères. Il peut tout nous pardonner ; et non seulement il nous a déclaré qu’Il en avait la Volonté, mais encore Il nous oblige à Lui demander pardon et nous apprend même en quels termes nous devons le faire, pour être exaucés. Il n’est donc pas douteux qu’avec l’aide de Dieu il est toujours en notre pouvoir de nous réconcilier avec Lui.
Cette certitude que nous avons des dispositions constantes de Dieu à nous pardonner ne peut qu’augmenter notre Foi, nourrir notre espérance et enflammer notre Charité. C’est pourquoi il est bien à propos que les Pasteurs, en traitant cette matière, rapportent quelques-uns des témoignages divins et des exemples les plus frappants pour prouver que Dieu a accordé le pardon des plus grands crimes. Mais cette considération ayant été développée par nous, autant qu’elle pouvait l’être, dans la préface de l’Oraison Dominicale, et dans l’article du Symbole sur la rémission des péchés, les Pasteurs pourront prendre en ces deux endroits ce dont ils auront besoin pour leurs explications. Le reste, ils le puiseront aux sources mêmes de la Sainte Ecriture.
§ III. — CE QU’ON ENTEND PAR LE MOT DETTES.
Et ils voudront bien suivre le même ordre que celui que nous leur avons indiqué dans les demandes précédentes. De cette manière les Fidèles comprendront ce qu’il faut entendre par le mot dettes, ils ne seront pas trompés par une équivoque et ils ne demanderont pas autre chose que ce qu’ils doivent demander.
Et d’abord il faut leur apprendre que nous ne demandons pas du tout à Dieu de nous dispenser de L’aimer de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit. Cette dette est irrémissible. nous sommes obligés de la payer, si nous voulons être sauvés.
Ce mot de dette exprime aussi, comme il les renferme, l’obéissance, le culte, l’adoration, et tous les autres devoirs de ce genre envers Dieu. Par conséquent nous ne demandons pas non plus ici d’en être dispensés. Mais nous prions Dieu de nous délivrer de nos péchés. Ainsi l’a compris Saint Luc, qui s’est servi du mot de péché au lieu de celui de dette. C’est qu’en effet par le péché nous devenons coupables devant Dieu, nous contractons une véritable dette de peines que nous acquittons soit par la satisfaction, soit par la souffrance. C’est de cette dette que parlait Notre-Seigneur quand Il disait par la bouche du Prophète: «J’ai payé ce que Je ne devais pas. »
Il suit de ces paroles, entendues en ce sens, que non seulement nous sommes débiteurs envers Dieu, mais même des débiteurs insolvables, puisque le pécheur ne saurait en aucune façon satisfaire par lui-même. Voilà pourquoi nous avons besoin de nous réfugier dans le sein de la Miséricorde de Dieu. Et comme cette Miséricorde ne va pas en Dieu sans une Justice non moins grande, et dont Dieu est aussi très jaloux, nous devons employer en même temps la Prière et l’appui de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, sans laquelle nul n’obtient jamais le pardon de ses péchés, et qui est le principe et la source de toutes nos satisfactions.
Le prix que le Sauveur a payé sur la Croix, et que nous nous approprions par les Sacrements, lorsque nous les recevons en réalité, ou même lorsque nous désirons seulement les recevoir, ce prix est d’une valeur si haute qu’il obtient et qu’il opère ce que nous demandons ici: la Rémission de nos péchés. Et non seulement la Rémission de nos péchés légers, et dont le pardon est très facile à obtenir, mais encore des fautes graves et mortelles. toutefois, quand il s’agit de péché mortel, notre Prière n’a de vertu que celle qui lui vient du sacrement de Pénitence reçu au moins en désir, sinon dans la réalité.
Mais nous disons: nos dettes, bien autrement que plus haut nous disions: notre pain. Ce pain est notre pain, parce que Dieu dans sa Bonté veut bien nous le donner, mais les péchés sont nos péchés, parce que la culpabilité en réside en nous: C’est notre volonté qui les fait ce qu’ils sont. Ce ne seraient point des péchés, s’ils n’étaient point volontaires.
C’est donc en nous avouant coupables, et en assumant la responsabilité de nos fautes, que nous implorons la Clémence divine seule capable de nous purifier. nous n’apportons aucune excuse, nous ne rejetons notre faute sur personne, comme firent Adam et Eve, nos premiers parents ; mais nous nous accusons nous-mêmes, si nous avons la vraie sagesse, et nous empruntons au Prophète sa Prière: « Seigneur, ne permettez pas que mon cœur s’égare dans des paroles de malice, pour chercher des excuses à mes iniquités. »
Nous ne disons pas non plus: pardonnez-moi, mais pardonnez-nous, parce que l’union et la Charité fraternelle qui doivent exister entre tous les hommes exigent de chacun de nous que nous nous intéressions au salut de tous, et que, en priant pour nous, nous n’oublions pas de prier pour les autres. C’est Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même qui nous a appris cette manière de prier ; puis, l’Eglise de Dieu l’a reçue et conservée fidèlement, et le Apôtres l’ont pratiquée et enseignée aux Fidèles. L’Ancien et le Nouveau testament nous fournissent deux beaux modèles de ces Prières vraiment brûlantes de charité pour le salut du prochain. L’une est de Moise: « ou pardonnez-leur cette faute, ou, si Vous ne la leur pardonne pas, effacez-moi de votre livre », l’autre est de Saint Paul: « Je souhaitais que Jésus-Christ me rendit moi-même anathème pour mes Frères. »
IV. — COMME NOUS PARDONNONS A CEUX QUI NOUS ONT OFFENSES.
Ce mot comme peut s’entendre ici de deux manières d’abord, dans le sens de comparaison. nous demandons à Dieu que, de même que nous pardonnons les injures et les outrages de ceux qui nous ont offensés, de même aussi Il nous pardonne nos offenses envers Lui. En second lieu ce mot marque une condition, et c’est précisément le sens que Notre-Seigneur lui donne dans ces paroles: « Si vous pardonnez aux hommes leurs fautes envers vous, votre Père céleste vous pardonnera aussi les vôtres contre Lui ; mais si vous ne pardonnez rien aux hommes, votre Père ne pardonnera point non plus vos péchés. »
Or ces deux choses sont également nécessaires pour obtenir de Dieu le pardon de nos infidélités. Si nous voulons que Dieu nous pardonne, il est de toute nécessité que nous pardonnions à ceux de qui nous avons reçu quelque offense. Dieu exige de nous d’une part l’oubli des injures, et de l’autre des sentiments de Charité mutuelle, et ces deux choses Il les exige à tel point qu’Il repousse et méprise. les sacrifices et les offrandes de ceux qui ne veulent pas se réconcilier ensemble. C’est aussi une loi de la nature que nous soyons envers les autres tels que nous désirons qu’ils soient pour nous. Et celui-là serait un parfait impudent, qui demanderait à Dieu de lui remettre la peine de son péché, pendant qu’il conserverait, dans son cœur des sentiments d’inimitié pour son prochain.
Ainsi donc nous devons être toujours disposés et prêts à pardonner les injures que nous avons reçues. La Prière que nous récitons nous en fait un devoir, et Dieu Lui-même nous l’ordonne dans Saint Luc: « Si votre frère a péché contre vous, reprenez-le, et s’il se repent, pardonnnez-lui ; et s’il pèche contre vous sept fois le jour, et que sept fois le jour il se retourne vers vous en disant: Je me repens, pardonnez-lui. » Saint Matthieu nous dit de même: « Aimez vos ennemis ; » et Saint Paul, après Salomon, veut que « nous donnions à manger à notre ennemi s’il a faim, et à boire s’il a soif. » Enfin Notre-Seigneur, dans Saint Marc, nous dit: « Quand vous serez au moment de prier, si quelqu’un vous a offensé, pardonnez-lui, afin que votre Père qui est dans les cieux, vous pardonne aussi vos péchés. »
§ V. — MOTIFS ET MANIERES DE PARDONNER AU PROCHAIN.
Mais comme il n’y a rien de plus difficile à notre nature dégradée que de pardonner les injures, les Pasteurs se feront un devoir d’employer toutes les ressources de leur zèle et de leur intelligence pour changer le cœur des Fidèles et pour les plier à cet esprit de douceur et de miséricorde si nécessaire au Chrétien. Ils insisteront le plus possible sur ces oracles divins dans lesquels Dieu Lui-même commande expressément de pardonner aux ennemis. Ils proclameront cette Vérité incontestable que l’une des meilleures preuves que nous sommes vraiment les enfants de Dieu, c’est que nous pardonnons facilement les injures, et que nous aimons nos ennemis du fond du cœur. C’est qu’en effet, l’amour pour nos ennemis fait briller en nous une ressemblance particulière avec Dieu notre Père qui s’est réconcilié avec les hommes, ses ennemis acharnés, en les rachetant de la damnation éternelle par la mort de son propre Fils. Enfin ils termineront leurs instructions et leurs exhortations par ce précepte de Notre-Seigneur, que nous ne pourrions repousser sans nous couvrir de honte, et sans nous condamner aux plus grands malheurs: « Priez pour ceux qui vous persécutent et qui vous calomnient, afin que vous soyez les enfants de votre Père qui est dans les cieux. »
C’est ici qu’il faut aux Pasteurs une prudence consommée pour ne porter personne au découragement et au désespoir, en faisant connaître d’une part la difficulté. Et de l’autre la nécessité de ce devoir. Car il en est qui, comprenant fort bien qu’ils doivent ensevelir les injures dans un oubli volontaire, et aimer ceux qui les ont offensés, désirent de le faire, et le font en effet autant qu’ils le peuvent. Mais cependant ils se sentent dans l’impossibilité d’épuiser jusqu’au dernier souvenir des injures reçues, et parce qu’ils trouvent encore dans leur cœur certains restes d’inimitié, ils s’agitent et se tourmentent d’une manière terrible, craignant de n’avoir point pardonné avec assez de franchise et de sincérité, et d’avoir ainsi résisté au commandement de Dieu.
C’est alors que les Pasteurs devront expliquer clairement l’opposition constante de la chair et de l’esprit. La chair est portée à la vengeance, mais l’esprit est enclin au pardon. De là entre eux ces luttes incessantes, ces combats sans trêve. Ils diront et enseigneront aux Fidèles qu’ils n’ont rien à craindre pour leur Salut, malgré l’opposition et les combats de la nature corrompue contre la raison, pourvu que l’esprit persiste dans le devoir, et dans la volonté sincère de pardonner les injures et d’aimer le prochain.
Que si, par hasard, il s’en rencontrait quelques-uns, qui n’auraient pu se résoudre encore à oublier les injures reçues, et à aimer leurs ennemis, et qui par suite négligeraient de réciter l’Oraison Dominicale, précisément parce qu’ils ne peuvent remplir la double condition exigée, — il faudrait, pour détruire en eux cette erreur funeste, employer les deux raisons suivantes :
Premièrement, chaque Fidèle fait cette Prière au nom de toute l’Eglise: Or il est certain qu’il y a nécessairement dans l’Eglise un grand nombre de Fidèles qui remettent à leurs débiteurs ces sortes de dettes que nous rappelons ici.
Secondement, en faisant cette demande, nous prions Dieu en même temps de nous accorder tout ce qui nous est nécessaire pour mériter d’être exaucés. nous demandons en effet et le pardon de nos péchés et le don d’une vraie pénitence ; nous demandons la douleur intérieure, l’horreur et la détestation de nos fautes, et la grâce d’en faire au Prêtre une pieuse et sincère confession. Et comme il est nécessaire que nous pardonnions à ceux qui nous ont fait quelque tort, ou causé quelque dommage, lorsque nous prions Dieu de nous pardonner, nous Lui demandons en même temps qu’Il nous accorde la grâce de nous réconcilier avec ceux que nous haïssons. Il y a donc lieu d’arracher à leur opinion ceux qui sont frappés de cette crainte mal fondée et même criminelle, qu’en priant ainsi ils ne feraient qu’irriter Dieu davantage. Il faut même les exhorter à réciter souvent l’Oraison Dominicale, pour demander à Dieu leur Père cet esprit qui nous fait pardonner à ceux qui nous offensent, et aimer même nos ennemis.
Mais dans la crainte que les Fidèles, épouvantés à la vue de leurs péchés, ne désespèrent d’en obtenir le pardon, les Pasteurs ne manqueront pas de les rappeler à l’Espérance par les considérations que voici: d’abord, notre Seigneur Jésus-Christ a donné à l’Eglise le pouvoir de remettre les péchés, comme le déclare le dixième article du Symbole des Apôtres ; ensuite, dans cette demande même, II nous montre clairement combien Dieu est bon et généreux envers le genre humain. Car s’il n’était pas toujours prêt et empressé à pardonner à ceux qui se repentent, jamais Il ne nous eût imposé cette formule de Prière : pardonnez-nous nos offenses.
Croyons donc fermement et sans aucun doute, que Celui-là ne manquera jamais d’étendre sur nous sa paternelle Miséricorde, qui nous ordonne de L’implorer en ces termes. Car le vrai sens attaché à cette demande, c’est que Dieu a pour nous des sentiments tels qu’Il nous pardonne volontiers dès que notre repentir est sincère.
Sans aucun doute, c’est un Dieu que nous offensons par notre désobéissance, un Dieu dont nous troublons, autant qu’il est en nous, l’ordre si sage qu’il a établi, un Dieu que nous outrageons par nos paroles et par nos actes, mais ce Dieu est en même temps le plus tendre des Pères. Il peut tout nous pardonner ; et non seulement il nous a déclaré qu’Il en avait la Volonté, mais encore Il nous oblige à Lui demander pardon et nous apprend même en quels termes nous devons le faire, pour être exaucés. Il n’est donc pas douteux qu’avec l’aide de Dieu il est toujours en notre pouvoir de nous réconcilier avec Lui.
Cette certitude que nous avons des dispositions constantes de Dieu à nous pardonner ne peut qu’augmenter notre Foi, nourrir notre espérance et enflammer notre Charité. C’est pourquoi il est bien à propos que les Pasteurs, en traitant cette matière, rapportent quelques-uns des témoignages divins et des exemples les plus frappants pour prouver que Dieu a accordé le pardon des plus grands crimes. Mais cette considération ayant été développée par nous, autant qu’elle pouvait l’être, dans la préface de l’Oraison Dominicale, et dans l’article du Symbole sur la rémission des péchés, les Pasteurs pourront prendre en ces deux endroits ce dont ils auront besoin pour leurs explications. Le reste, ils le puiseront aux sources mêmes de la Sainte Ecriture.
§ III. — CE QU’ON ENTEND PAR LE MOT DETTES.
Et ils voudront bien suivre le même ordre que celui que nous leur avons indiqué dans les demandes précédentes. De cette manière les Fidèles comprendront ce qu’il faut entendre par le mot dettes, ils ne seront pas trompés par une équivoque et ils ne demanderont pas autre chose que ce qu’ils doivent demander.
Et d’abord il faut leur apprendre que nous ne demandons pas du tout à Dieu de nous dispenser de L’aimer de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit. Cette dette est irrémissible. nous sommes obligés de la payer, si nous voulons être sauvés.
Ce mot de dette exprime aussi, comme il les renferme, l’obéissance, le culte, l’adoration, et tous les autres devoirs de ce genre envers Dieu. Par conséquent nous ne demandons pas non plus ici d’en être dispensés. Mais nous prions Dieu de nous délivrer de nos péchés. Ainsi l’a compris Saint Luc, qui s’est servi du mot de péché au lieu de celui de dette. C’est qu’en effet par le péché nous devenons coupables devant Dieu, nous contractons une véritable dette de peines que nous acquittons soit par la satisfaction, soit par la souffrance. C’est de cette dette que parlait Notre-Seigneur quand Il disait par la bouche du Prophète: «J’ai payé ce que Je ne devais pas. »
Il suit de ces paroles, entendues en ce sens, que non seulement nous sommes débiteurs envers Dieu, mais même des débiteurs insolvables, puisque le pécheur ne saurait en aucune façon satisfaire par lui-même. Voilà pourquoi nous avons besoin de nous réfugier dans le sein de la Miséricorde de Dieu. Et comme cette Miséricorde ne va pas en Dieu sans une Justice non moins grande, et dont Dieu est aussi très jaloux, nous devons employer en même temps la Prière et l’appui de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, sans laquelle nul n’obtient jamais le pardon de ses péchés, et qui est le principe et la source de toutes nos satisfactions.
Le prix que le Sauveur a payé sur la Croix, et que nous nous approprions par les Sacrements, lorsque nous les recevons en réalité, ou même lorsque nous désirons seulement les recevoir, ce prix est d’une valeur si haute qu’il obtient et qu’il opère ce que nous demandons ici: la Rémission de nos péchés. Et non seulement la Rémission de nos péchés légers, et dont le pardon est très facile à obtenir, mais encore des fautes graves et mortelles. toutefois, quand il s’agit de péché mortel, notre Prière n’a de vertu que celle qui lui vient du sacrement de Pénitence reçu au moins en désir, sinon dans la réalité.
Mais nous disons: nos dettes, bien autrement que plus haut nous disions: notre pain. Ce pain est notre pain, parce que Dieu dans sa Bonté veut bien nous le donner, mais les péchés sont nos péchés, parce que la culpabilité en réside en nous: C’est notre volonté qui les fait ce qu’ils sont. Ce ne seraient point des péchés, s’ils n’étaient point volontaires.
C’est donc en nous avouant coupables, et en assumant la responsabilité de nos fautes, que nous implorons la Clémence divine seule capable de nous purifier. nous n’apportons aucune excuse, nous ne rejetons notre faute sur personne, comme firent Adam et Eve, nos premiers parents ; mais nous nous accusons nous-mêmes, si nous avons la vraie sagesse, et nous empruntons au Prophète sa Prière: « Seigneur, ne permettez pas que mon cœur s’égare dans des paroles de malice, pour chercher des excuses à mes iniquités. »
Nous ne disons pas non plus: pardonnez-moi, mais pardonnez-nous, parce que l’union et la Charité fraternelle qui doivent exister entre tous les hommes exigent de chacun de nous que nous nous intéressions au salut de tous, et que, en priant pour nous, nous n’oublions pas de prier pour les autres. C’est Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même qui nous a appris cette manière de prier ; puis, l’Eglise de Dieu l’a reçue et conservée fidèlement, et le Apôtres l’ont pratiquée et enseignée aux Fidèles. L’Ancien et le Nouveau testament nous fournissent deux beaux modèles de ces Prières vraiment brûlantes de charité pour le salut du prochain. L’une est de Moise: « ou pardonnez-leur cette faute, ou, si Vous ne la leur pardonne pas, effacez-moi de votre livre », l’autre est de Saint Paul: « Je souhaitais que Jésus-Christ me rendit moi-même anathème pour mes Frères. »
IV. — COMME NOUS PARDONNONS A CEUX QUI NOUS ONT OFFENSES.
Ce mot comme peut s’entendre ici de deux manières d’abord, dans le sens de comparaison. nous demandons à Dieu que, de même que nous pardonnons les injures et les outrages de ceux qui nous ont offensés, de même aussi Il nous pardonne nos offenses envers Lui. En second lieu ce mot marque une condition, et c’est précisément le sens que Notre-Seigneur lui donne dans ces paroles: « Si vous pardonnez aux hommes leurs fautes envers vous, votre Père céleste vous pardonnera aussi les vôtres contre Lui ; mais si vous ne pardonnez rien aux hommes, votre Père ne pardonnera point non plus vos péchés. »
Or ces deux choses sont également nécessaires pour obtenir de Dieu le pardon de nos infidélités. Si nous voulons que Dieu nous pardonne, il est de toute nécessité que nous pardonnions à ceux de qui nous avons reçu quelque offense. Dieu exige de nous d’une part l’oubli des injures, et de l’autre des sentiments de Charité mutuelle, et ces deux choses Il les exige à tel point qu’Il repousse et méprise. les sacrifices et les offrandes de ceux qui ne veulent pas se réconcilier ensemble. C’est aussi une loi de la nature que nous soyons envers les autres tels que nous désirons qu’ils soient pour nous. Et celui-là serait un parfait impudent, qui demanderait à Dieu de lui remettre la peine de son péché, pendant qu’il conserverait, dans son cœur des sentiments d’inimitié pour son prochain.
Ainsi donc nous devons être toujours disposés et prêts à pardonner les injures que nous avons reçues. La Prière que nous récitons nous en fait un devoir, et Dieu Lui-même nous l’ordonne dans Saint Luc: « Si votre frère a péché contre vous, reprenez-le, et s’il se repent, pardonnnez-lui ; et s’il pèche contre vous sept fois le jour, et que sept fois le jour il se retourne vers vous en disant: Je me repens, pardonnez-lui. » Saint Matthieu nous dit de même: « Aimez vos ennemis ; » et Saint Paul, après Salomon, veut que « nous donnions à manger à notre ennemi s’il a faim, et à boire s’il a soif. » Enfin Notre-Seigneur, dans Saint Marc, nous dit: « Quand vous serez au moment de prier, si quelqu’un vous a offensé, pardonnez-lui, afin que votre Père qui est dans les cieux, vous pardonne aussi vos péchés. »
§ V. — MOTIFS ET MANIERES DE PARDONNER AU PROCHAIN.
Mais comme il n’y a rien de plus difficile à notre nature dégradée que de pardonner les injures, les Pasteurs se feront un devoir d’employer toutes les ressources de leur zèle et de leur intelligence pour changer le cœur des Fidèles et pour les plier à cet esprit de douceur et de miséricorde si nécessaire au Chrétien. Ils insisteront le plus possible sur ces oracles divins dans lesquels Dieu Lui-même commande expressément de pardonner aux ennemis. Ils proclameront cette Vérité incontestable que l’une des meilleures preuves que nous sommes vraiment les enfants de Dieu, c’est que nous pardonnons facilement les injures, et que nous aimons nos ennemis du fond du cœur. C’est qu’en effet, l’amour pour nos ennemis fait briller en nous une ressemblance particulière avec Dieu notre Père qui s’est réconcilié avec les hommes, ses ennemis acharnés, en les rachetant de la damnation éternelle par la mort de son propre Fils. Enfin ils termineront leurs instructions et leurs exhortations par ce précepte de Notre-Seigneur, que nous ne pourrions repousser sans nous couvrir de honte, et sans nous condamner aux plus grands malheurs: « Priez pour ceux qui vous persécutent et qui vous calomnient, afin que vous soyez les enfants de votre Père qui est dans les cieux. »
C’est ici qu’il faut aux Pasteurs une prudence consommée pour ne porter personne au découragement et au désespoir, en faisant connaître d’une part la difficulté. Et de l’autre la nécessité de ce devoir. Car il en est qui, comprenant fort bien qu’ils doivent ensevelir les injures dans un oubli volontaire, et aimer ceux qui les ont offensés, désirent de le faire, et le font en effet autant qu’ils le peuvent. Mais cependant ils se sentent dans l’impossibilité d’épuiser jusqu’au dernier souvenir des injures reçues, et parce qu’ils trouvent encore dans leur cœur certains restes d’inimitié, ils s’agitent et se tourmentent d’une manière terrible, craignant de n’avoir point pardonné avec assez de franchise et de sincérité, et d’avoir ainsi résisté au commandement de Dieu.
C’est alors que les Pasteurs devront expliquer clairement l’opposition constante de la chair et de l’esprit. La chair est portée à la vengeance, mais l’esprit est enclin au pardon. De là entre eux ces luttes incessantes, ces combats sans trêve. Ils diront et enseigneront aux Fidèles qu’ils n’ont rien à craindre pour leur Salut, malgré l’opposition et les combats de la nature corrompue contre la raison, pourvu que l’esprit persiste dans le devoir, et dans la volonté sincère de pardonner les injures et d’aimer le prochain.
Que si, par hasard, il s’en rencontrait quelques-uns, qui n’auraient pu se résoudre encore à oublier les injures reçues, et à aimer leurs ennemis, et qui par suite négligeraient de réciter l’Oraison Dominicale, précisément parce qu’ils ne peuvent remplir la double condition exigée, — il faudrait, pour détruire en eux cette erreur funeste, employer les deux raisons suivantes :
Premièrement, chaque Fidèle fait cette Prière au nom de toute l’Eglise: Or il est certain qu’il y a nécessairement dans l’Eglise un grand nombre de Fidèles qui remettent à leurs débiteurs ces sortes de dettes que nous rappelons ici.
Secondement, en faisant cette demande, nous prions Dieu en même temps de nous accorder tout ce qui nous est nécessaire pour mériter d’être exaucés. nous demandons en effet et le pardon de nos péchés et le don d’une vraie pénitence ; nous demandons la douleur intérieure, l’horreur et la détestation de nos fautes, et la grâce d’en faire au Prêtre une pieuse et sincère confession. Et comme il est nécessaire que nous pardonnions à ceux qui nous ont fait quelque tort, ou causé quelque dommage, lorsque nous prions Dieu de nous pardonner, nous Lui demandons en même temps qu’Il nous accorde la grâce de nous réconcilier avec ceux que nous haïssons. Il y a donc lieu d’arracher à leur opinion ceux qui sont frappés de cette crainte mal fondée et même criminelle, qu’en priant ainsi ils ne feraient qu’irriter Dieu davantage. Il faut même les exhorter à réciter souvent l’Oraison Dominicale, pour demander à Dieu leur Père cet esprit qui nous fait pardonner à ceux qui nous offensent, et aimer même nos ennemis.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ VII. — DISPOSITIONS NECESSAIRES POUR FAIRE CETTE PRIERE AVEC FRUIT.
Mais pour faire cette Prière avec tout le fruit possible, il faut d’abord y entrer avec cette pensée et cette préoccupation très vives que nous nous présentons devant Dieu comme des suppliants, et que nous Lui demandons un pardon qui ne s’accorde qu’au vrai pénitent. Dès lors notre cœur doit être rempli de cette Charité et de cette piété qui vont si bien avec le repentir. Et rien ne convient mieux au pénitent sincère que d’expier dans les larmes les iniquités et les crimes dont le triste tableau afflige ses regards.
A cette pensée il faut joindre certaines précautions pour éviter à l’avenir ce qui a été pour nous une occasion de péché, et qui pourrait l’être encore, vis-à -vis de Dieu, notre Père. Ces sentiments étaient ceux de David, quand il disait: « Mon péché est toujours devant moi ; » et dans un autre endroit: « chaque nuit ma couche est baignée de mes pleurs, et mon lit est arrosé de mes larmes. »
Chacun de nous pourra se rappeler très utilement que ceux qui ont obtenu de Dieu le pardon de leurs péchés le Lui avaient demandé avec les désirs les plus ardents. Par exemple, ce Publicain qui restait loin de l’Autel, tout pénétré de confusion et de douleur, les yeux humblement baissés, et se frappait la poitrine en disant: « Mon Dieu, ayez pitié de moi qui ne suis qu’un pécheur ! » Par exemple encore, cette pécheresse qui se tenait derrière le Sauveur, arrosait ses pieds de ses larmes, les essuyait avec ses cheveux et les baisait. Et enfin Pierre, le Prince des Apôtres qui, « étant sorti, pleura amèrement ».
Il faut bien voir aussi que plus les hommes sont faibles et prédisposés aux maladies de l’âme, qui sont le péché, plus ils ont besoin de remèdes nombreux et fréquents. Or, les remèdes de l’âme malade sont la Pénitence et l’Eucharistie. Les Fidèles ne sauraient donc y recourir trop souvent.
L’Aumône ensuite, comme nous le disent nos Saints Livres, est également un remède très salutaire pour guérir les plaies de l’âme. C’est pourquoi ceux qui désirent réciter cette Prière avec une parfaite piété, n’oublieront pas de faire aux pauvres tout le bien possible. L’Aumône possède une vertu merveilleuse pour effacer les taches du péché. C’est la parole de l’ange Raphaël au jeune Tobie « L’Aumône délivre de la mort, c’est elle qui lave les péchés et fait trouver la miséricorde et la Vie Eternelle. »C’est aussi celle de Daniel au Roi nabuchodonosor: « Rachetez vos péchés par des aumônes, et vos iniquités par la miséricorde envers les pauvres. »
Mais la meilleure Aumône, la meilleure manière d’exercer la miséricorde, c’est d’oublier les injures et de vouloir du bien à ceux qui nous ont fait tort à nous, ou aux nôtres, dans nos biens, dans notre réputation et dans notre personne. Quiconque veut trouver Dieu miséricordieux pour soi-même, doit Lui sacrifier généreusement toutes ses inimitiés, pardonner toute espèce d’offense, prier très volontiers pour ses ennemis, et profiter de toutes les occasions pour leur rendre service.
Mais comme nous avons déjà traité ce sujet, en parlant de l’homicide, nous y renvoyons les Pasteurs.
En terminant l’explication de cette demande, ils ne manqueront pas de faire voir qu’il n’y a rien, qu’on ne peut même imaginer rien de plus injuste que de demander à Dieu d’être pour nous plein de douceur et de miséricorde, si nous-mêmes nous sommes durs pour notre prochain, et ne pratiquons la douceur envers personne.
Mais pour faire cette Prière avec tout le fruit possible, il faut d’abord y entrer avec cette pensée et cette préoccupation très vives que nous nous présentons devant Dieu comme des suppliants, et que nous Lui demandons un pardon qui ne s’accorde qu’au vrai pénitent. Dès lors notre cœur doit être rempli de cette Charité et de cette piété qui vont si bien avec le repentir. Et rien ne convient mieux au pénitent sincère que d’expier dans les larmes les iniquités et les crimes dont le triste tableau afflige ses regards.
A cette pensée il faut joindre certaines précautions pour éviter à l’avenir ce qui a été pour nous une occasion de péché, et qui pourrait l’être encore, vis-à -vis de Dieu, notre Père. Ces sentiments étaient ceux de David, quand il disait: « Mon péché est toujours devant moi ; » et dans un autre endroit: « chaque nuit ma couche est baignée de mes pleurs, et mon lit est arrosé de mes larmes. »
Chacun de nous pourra se rappeler très utilement que ceux qui ont obtenu de Dieu le pardon de leurs péchés le Lui avaient demandé avec les désirs les plus ardents. Par exemple, ce Publicain qui restait loin de l’Autel, tout pénétré de confusion et de douleur, les yeux humblement baissés, et se frappait la poitrine en disant: « Mon Dieu, ayez pitié de moi qui ne suis qu’un pécheur ! » Par exemple encore, cette pécheresse qui se tenait derrière le Sauveur, arrosait ses pieds de ses larmes, les essuyait avec ses cheveux et les baisait. Et enfin Pierre, le Prince des Apôtres qui, « étant sorti, pleura amèrement ».
Il faut bien voir aussi que plus les hommes sont faibles et prédisposés aux maladies de l’âme, qui sont le péché, plus ils ont besoin de remèdes nombreux et fréquents. Or, les remèdes de l’âme malade sont la Pénitence et l’Eucharistie. Les Fidèles ne sauraient donc y recourir trop souvent.
L’Aumône ensuite, comme nous le disent nos Saints Livres, est également un remède très salutaire pour guérir les plaies de l’âme. C’est pourquoi ceux qui désirent réciter cette Prière avec une parfaite piété, n’oublieront pas de faire aux pauvres tout le bien possible. L’Aumône possède une vertu merveilleuse pour effacer les taches du péché. C’est la parole de l’ange Raphaël au jeune Tobie « L’Aumône délivre de la mort, c’est elle qui lave les péchés et fait trouver la miséricorde et la Vie Eternelle. »C’est aussi celle de Daniel au Roi nabuchodonosor: « Rachetez vos péchés par des aumônes, et vos iniquités par la miséricorde envers les pauvres. »
Mais la meilleure Aumône, la meilleure manière d’exercer la miséricorde, c’est d’oublier les injures et de vouloir du bien à ceux qui nous ont fait tort à nous, ou aux nôtres, dans nos biens, dans notre réputation et dans notre personne. Quiconque veut trouver Dieu miséricordieux pour soi-même, doit Lui sacrifier généreusement toutes ses inimitiés, pardonner toute espèce d’offense, prier très volontiers pour ses ennemis, et profiter de toutes les occasions pour leur rendre service.
Mais comme nous avons déjà traité ce sujet, en parlant de l’homicide, nous y renvoyons les Pasteurs.
En terminant l’explication de cette demande, ils ne manqueront pas de faire voir qu’il n’y a rien, qu’on ne peut même imaginer rien de plus injuste que de demander à Dieu d’être pour nous plein de douceur et de miséricorde, si nous-mêmes nous sommes durs pour notre prochain, et ne pratiquons la douceur envers personne.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
Chapitre quarante-cinquième — Sixième demande de l’Oraison Dominicale
ET NE NOUS INDUISEZ POINT EN TENTATION.
Lorsque les enfants de Dieu ont obtenu la Rémission de leurs péchés, ils se sentent embrasés du désir de Lui rendre l’adoration et le culte qu’Il mérite, ils soupirent après le Royaume céleste, ils s’acquittent fidèlement envers la Majesté divine de tous les devoirs de la piété, et ils en viennent à être entièrement soumis à sa Volonté paternelle et à sa sainte Providence. Mais c’est alors aussi, cela est bien connu, que l’ennemi du genre humain déploie tous ses artifices, met en œuvre toutes ses ruses et apprête toutes ses machines de guerre, pour les attaquer. Il y a donc lieu de craindre que leurs résolutions ne soient ébranlées et changées, qu’eux-mêmes ne retombent de nouveau dans le mal et ne deviennent pires qu’auparavant. C’est d’eux que le Prince des Apôtres a pu dire avec raison: « Il eût mieux valu pour eux qu’ils n’eussent point connu la voie de la justice, que de retourner en arrière après l’avoir connue, et d’abandonner la Loi Sainte qui leur avait été donnée. »
§ I. — POURQUOI JESUS-CHRIST NOUS A ORDONNE CETTE SIXIEME DEMANDE ?
Aussi Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a-t-Il fait de cette Prière un Commandement, afin de nous obliger à implorer tous les jours le secours de Dieu, et à nous recommander à sa Bonté paternelle. Car il n’est pas douteux, s’Il vient à nous abandonner, que nous ne soyons bientôt pris dans les filets de nos perfides ennemis. Et ce n’est pas seulement dans l’Oraison Dominicale que Jésus-Christ nous a ordonné de demander à Dieu de ne pas nous induire en tentation ; Il a porté le même Commandement dans cet entretien qu’Il eut avec ses Apôtres, quelques heures avant sa Mort. Après leur avoir dit en effet: « qu’ils étaient tous purs, » Il ajouta: « priez, pour que vous n’entriez point en tentation ». Ce double Commandement de notre Seigneur est pour les Pasteurs un motif très pressant d’exhorter avec le plus grand soin les Fidèles à réciter fréquemment cette Prière. Puisque le démon notre ennemi sème à toute heure sous nos pas les plus terribles dangers, il faut qu’à toute heure aussi nous puissions nous adresser à Dieu, qui seul peut nous en préserver, et Lui dire: ne nous induisez point en tentation.
Or les Fidèles comprendront parfaitement tout le besoin qu’ils ont de l’assistance divine, s’ils se souviennent de leur faiblesse et de leur ignorance, s’ils se rappellent cette maxime de Notre-Seigneur Jésus-Christ: « L’esprit est prompt, et la chair est faible ; » et s’ils considèrent enfin que nos chutes, avec la malice et la haine du démon, sont presque toujours graves et mortelles, si la main de Dieu ne nous soutient. Quel exemple plus sensible de la faiblesse humaine que celui du collège sacré des Apôtres ! Ils avaient fait preuve de la plus grande fermeté, et un instant après, au premier péril, ils abandonnent le Seigneur, et prennent la fuite. Exemple plus frappant encore ! Saint Pierre, le Prince des Apôtres, avait tiré de son cœur une magnifique profession de courage et en même temps de l’amour le plus sincère pour Jésus-Christ, il avait dit, plein de confiance en ses propres sentiments: « Quand même il me faudrait mourir avec Vous, je ne Vous renierai point, » et une heure plus tard, à la voix d’une servante, il se trouble, et va jusqu’à jurer qu’il ne connaît point le Seigneur. Ses forces, à coup sûr, ne répondaient pas à la vivacité de ses sentiments.
Mais si les hommes les plus saints ont été les victimes de la fragilité humaine, dont ils ne se défiaient pas assez, et sont tombés dans les fautes les plus humiliantes, que ne doivent pas craindre les autres qui sont si éloignés de leur sainteté !
§ II. — DES TENTATIONS ; DE LEURS CAUSES.
Il importe donc que les Pasteurs montrent bien aux Fidèles les combats et les dangers auxquels nous sommes sans cesse exposés. tant que notre âme habite dans ce corps mortel, la chair, le monde et le démon nous attaquent de toutes parts.
Quel est celui qui ne connaît point, à ses dépens, les effets de la colère et de la cupidité ! qui ne s’est senti blessé de leurs traits, déchiré de leurs aiguillons, et brûlé de leurs flammes ? et en effet, les coups qu’elles frappent sont si variés, leurs attaques si diverses, qu’il est bien difficile de ne pas recevoir quelque grave blessure.
Mais outre ces ennemis qui habitent et vivent avec nous, il en est d’autres plus terribles encore dont il est écrit: « Nous n’avons pas à combattre contre la chair et le sang, mais contre les principautés et les puissances, contre les maîtres des ténèbres de ce monde, contre les esprits de malice répandus dans les airs. » Aux combats intérieurs se joignent les attaques et les coups des démons, qui tantôt se précipitent sur nous à découvert, et tantôt se glissent si furtivement dans nos âmes que nous pouvons à peine nous en défendre.
§ III. — DES DEMONS.
L’Apôtre les appelle princes à cause de l’excellence de leur nature. Par ce côté, ils l’emportent en effet sur l’homme, et sur toutes les autres créatures. Il les nomme aussi puissances, parce qu’ils nous surpassent non seulement par la supériorité de leur nature mais encore par leur réel pouvoir ; puis, maîtres des ténèbres de ce monde, parce qu’ils régissent non pas le monde de la lumière et de la clarté, c’est-à-dire les bons et les justes, mais le monde sombre et obscur, c’est-à-dire ceux qui vivent plongés dans les souillures d’une vie criminelle, aveuglés par leurs passions ténébreuses et sans autre guide que le démon, ce prince des ténèbres ; enfin, esprits de malice, parce qu’il y a une malice de l’esprit, comme il y a une malice de la chair.
La malice de la chair allume les appétits déréglés des passions, et le désir des voluptés sensibles.
La malice de l’esprit se confond avec les passions et les inclinations dépravées de l’âme, mais qui toutefois appartiennent à sa partie supérieure. Elles sont d’autant plus dangereuses et plus criminelles que la raison et l’esprit sont au-dessus de la nature et des sens. Et comme la malice de Satan a pour but principal de nous priver de l’héritage du ciel, l’Apôtre a ajouté, à cause de cela, qu’ils sont « répandus dans l’air ».
Il n’est que trop aisé de conclure de là que nos ennemis sont forts et redoutables, qu’ils ont une ardeur invincible et sont animés contre nous d’une haine furieuse et inimaginable. Aussi bien ils nous font une guerre sans relâche, sans paix ni trêve possible. Leur audace est incroyable, nous en pouvons juger par cette parole que le Prophète fait dire à Satan: « Je monterai au ciel. » Au surplus le démon a attaqué nos premiers parents dans le paradis, il a livré combat aux Prophètes, « il a cherché les Apôtres, pour les cribler comme le froment, » c’est l’expression même de Notre-Seigneur dans l’Evangile ; Il n’a même pas rougi de tenter Jésus-Christ. L’Apôtre Saint Pierre a donc bien exprimé ses désirs insatiables et son activité inouïe quand il a dit: « Le démon votre ennemi tourne autour de vous comme un lion rugissant cherchant quelqu’un à dévorer. »
Et Satan n’est pas seul pour attaquer les hommes, c’est en troupe quelquefois que les démons fondent sur chacun de nous. On le vit bien par l’aveu de celui à qui Jésus demanda: quel est ton nom ? et qui répondit: mon nom est légion , c’est-à-dire qu’une multitude de démons tourmentaient ce malheureux. Et puis, l’Evangile ne dit-il pas d’un autre démon: « qu’il prend avec lui sept autres esprits plus méchants que lui, qu’ils entrent dans la maison (c’est-à-dire dans l’âme) et qu’ils y habitent » ?
Il n’est pas rare de rencontrer des Chrétiens qui, ne sentant pas en eux-mêmes ces attaques du démon, s’imaginent que notre Doctrine est fausse. Mais peut-on s’étonner que les démons n’attaquent point des hommes qui se sont volontairement donnés à eux, et dans lesquels on ne trouve ni piété, ni Charité, ni aucune vertu digne d’un Chrétien ? Ils appartiennent entièrement à Satan. Comment aurait-il besoin de les tenter pour les vaincre, puisque, de leur plein consentement, il règne déjà dans leur cœur.
Mais ceux qui se sont consacrés à Dieu, et qui mènent sur la terre une vie toute céleste, sont plus que tous les autres en butte aux assauts du démon. C’est pour eux qu’il réserve toute sa haine, c’est contre eux qu’à chaque instant il dresse des pièges et des embûches.
L’Histoire Sainte est pleine d’exemples de grands et vertueux personnages qui même en se tenant sur leurs gardes ont été victimes de sa rage ou de sa duplicité. Adam, David, Salomon et tant d’autres qu’il serait trop long de citer ont éprouvé la violence de ses attaques et la perfidie de ses ruses, auxquelles ni la prudence ni les forces humaines ne sauraient résister. Qui oserait après cela se croire en sûreté avec ses seules forces ? Demandons donc à Dieu avec Foi et pureté de cœur: « qu’Il ne permette pas que nous soyons tentés au-dessus de nos forces, et qu’Il nous donne, dans la tentation, le secours de son assistance, afin que nous puissions résister. »
Mais s’il se rencontre des Fidèles qui par faiblesse d’esprit ou par ignorance sont épouvantés de la puissance des démons, il faut leur persuader de se réfugier dans le port de la Prière, quand ils sont agités par les flots de la tentation.
Car Satan, quelles que soient sa puissance, son obstination, et sa haine contre nous ne peut cependant nous tenter et nous tourmenter ni autant ni aussi longtemps qu’il le voudrait. tout son pouvoir est subordonné à la Volonté et au bon plaisir de Dieu. Qui ne connaît l’histoire de Job, que Satan n’eût jamais touché, si le Seigneur ne lui eût dit: « Voilà que Je te livre tout ce qu’il possède. » Mais si au contraire, Dieu n’avait point ajouté: « seulement n’étends pas la main sur lui », Satan l’eût fait périr d’un seul coup avec ses enfants et tous ses biens. Et même Dieu a enchaîné tellement la puissance des démons que, sans sa permission, ils n’auraient pas pu passer dans ces pourceaux, dont il est question dans l’Evangile.
Mais pour mieux faire comprendre le sens et la portée de cette demande, nous avons à expliquer ce que l’on doit entendre par tentation, et par être induit en tentation.
ET NE NOUS INDUISEZ POINT EN TENTATION.
Lorsque les enfants de Dieu ont obtenu la Rémission de leurs péchés, ils se sentent embrasés du désir de Lui rendre l’adoration et le culte qu’Il mérite, ils soupirent après le Royaume céleste, ils s’acquittent fidèlement envers la Majesté divine de tous les devoirs de la piété, et ils en viennent à être entièrement soumis à sa Volonté paternelle et à sa sainte Providence. Mais c’est alors aussi, cela est bien connu, que l’ennemi du genre humain déploie tous ses artifices, met en œuvre toutes ses ruses et apprête toutes ses machines de guerre, pour les attaquer. Il y a donc lieu de craindre que leurs résolutions ne soient ébranlées et changées, qu’eux-mêmes ne retombent de nouveau dans le mal et ne deviennent pires qu’auparavant. C’est d’eux que le Prince des Apôtres a pu dire avec raison: « Il eût mieux valu pour eux qu’ils n’eussent point connu la voie de la justice, que de retourner en arrière après l’avoir connue, et d’abandonner la Loi Sainte qui leur avait été donnée. »
§ I. — POURQUOI JESUS-CHRIST NOUS A ORDONNE CETTE SIXIEME DEMANDE ?
Aussi Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a-t-Il fait de cette Prière un Commandement, afin de nous obliger à implorer tous les jours le secours de Dieu, et à nous recommander à sa Bonté paternelle. Car il n’est pas douteux, s’Il vient à nous abandonner, que nous ne soyons bientôt pris dans les filets de nos perfides ennemis. Et ce n’est pas seulement dans l’Oraison Dominicale que Jésus-Christ nous a ordonné de demander à Dieu de ne pas nous induire en tentation ; Il a porté le même Commandement dans cet entretien qu’Il eut avec ses Apôtres, quelques heures avant sa Mort. Après leur avoir dit en effet: « qu’ils étaient tous purs, » Il ajouta: « priez, pour que vous n’entriez point en tentation ». Ce double Commandement de notre Seigneur est pour les Pasteurs un motif très pressant d’exhorter avec le plus grand soin les Fidèles à réciter fréquemment cette Prière. Puisque le démon notre ennemi sème à toute heure sous nos pas les plus terribles dangers, il faut qu’à toute heure aussi nous puissions nous adresser à Dieu, qui seul peut nous en préserver, et Lui dire: ne nous induisez point en tentation.
Or les Fidèles comprendront parfaitement tout le besoin qu’ils ont de l’assistance divine, s’ils se souviennent de leur faiblesse et de leur ignorance, s’ils se rappellent cette maxime de Notre-Seigneur Jésus-Christ: « L’esprit est prompt, et la chair est faible ; » et s’ils considèrent enfin que nos chutes, avec la malice et la haine du démon, sont presque toujours graves et mortelles, si la main de Dieu ne nous soutient. Quel exemple plus sensible de la faiblesse humaine que celui du collège sacré des Apôtres ! Ils avaient fait preuve de la plus grande fermeté, et un instant après, au premier péril, ils abandonnent le Seigneur, et prennent la fuite. Exemple plus frappant encore ! Saint Pierre, le Prince des Apôtres, avait tiré de son cœur une magnifique profession de courage et en même temps de l’amour le plus sincère pour Jésus-Christ, il avait dit, plein de confiance en ses propres sentiments: « Quand même il me faudrait mourir avec Vous, je ne Vous renierai point, » et une heure plus tard, à la voix d’une servante, il se trouble, et va jusqu’à jurer qu’il ne connaît point le Seigneur. Ses forces, à coup sûr, ne répondaient pas à la vivacité de ses sentiments.
Mais si les hommes les plus saints ont été les victimes de la fragilité humaine, dont ils ne se défiaient pas assez, et sont tombés dans les fautes les plus humiliantes, que ne doivent pas craindre les autres qui sont si éloignés de leur sainteté !
§ II. — DES TENTATIONS ; DE LEURS CAUSES.
Il importe donc que les Pasteurs montrent bien aux Fidèles les combats et les dangers auxquels nous sommes sans cesse exposés. tant que notre âme habite dans ce corps mortel, la chair, le monde et le démon nous attaquent de toutes parts.
Quel est celui qui ne connaît point, à ses dépens, les effets de la colère et de la cupidité ! qui ne s’est senti blessé de leurs traits, déchiré de leurs aiguillons, et brûlé de leurs flammes ? et en effet, les coups qu’elles frappent sont si variés, leurs attaques si diverses, qu’il est bien difficile de ne pas recevoir quelque grave blessure.
Mais outre ces ennemis qui habitent et vivent avec nous, il en est d’autres plus terribles encore dont il est écrit: « Nous n’avons pas à combattre contre la chair et le sang, mais contre les principautés et les puissances, contre les maîtres des ténèbres de ce monde, contre les esprits de malice répandus dans les airs. » Aux combats intérieurs se joignent les attaques et les coups des démons, qui tantôt se précipitent sur nous à découvert, et tantôt se glissent si furtivement dans nos âmes que nous pouvons à peine nous en défendre.
§ III. — DES DEMONS.
L’Apôtre les appelle princes à cause de l’excellence de leur nature. Par ce côté, ils l’emportent en effet sur l’homme, et sur toutes les autres créatures. Il les nomme aussi puissances, parce qu’ils nous surpassent non seulement par la supériorité de leur nature mais encore par leur réel pouvoir ; puis, maîtres des ténèbres de ce monde, parce qu’ils régissent non pas le monde de la lumière et de la clarté, c’est-à-dire les bons et les justes, mais le monde sombre et obscur, c’est-à-dire ceux qui vivent plongés dans les souillures d’une vie criminelle, aveuglés par leurs passions ténébreuses et sans autre guide que le démon, ce prince des ténèbres ; enfin, esprits de malice, parce qu’il y a une malice de l’esprit, comme il y a une malice de la chair.
La malice de la chair allume les appétits déréglés des passions, et le désir des voluptés sensibles.
La malice de l’esprit se confond avec les passions et les inclinations dépravées de l’âme, mais qui toutefois appartiennent à sa partie supérieure. Elles sont d’autant plus dangereuses et plus criminelles que la raison et l’esprit sont au-dessus de la nature et des sens. Et comme la malice de Satan a pour but principal de nous priver de l’héritage du ciel, l’Apôtre a ajouté, à cause de cela, qu’ils sont « répandus dans l’air ».
Il n’est que trop aisé de conclure de là que nos ennemis sont forts et redoutables, qu’ils ont une ardeur invincible et sont animés contre nous d’une haine furieuse et inimaginable. Aussi bien ils nous font une guerre sans relâche, sans paix ni trêve possible. Leur audace est incroyable, nous en pouvons juger par cette parole que le Prophète fait dire à Satan: « Je monterai au ciel. » Au surplus le démon a attaqué nos premiers parents dans le paradis, il a livré combat aux Prophètes, « il a cherché les Apôtres, pour les cribler comme le froment, » c’est l’expression même de Notre-Seigneur dans l’Evangile ; Il n’a même pas rougi de tenter Jésus-Christ. L’Apôtre Saint Pierre a donc bien exprimé ses désirs insatiables et son activité inouïe quand il a dit: « Le démon votre ennemi tourne autour de vous comme un lion rugissant cherchant quelqu’un à dévorer. »
Et Satan n’est pas seul pour attaquer les hommes, c’est en troupe quelquefois que les démons fondent sur chacun de nous. On le vit bien par l’aveu de celui à qui Jésus demanda: quel est ton nom ? et qui répondit: mon nom est légion , c’est-à-dire qu’une multitude de démons tourmentaient ce malheureux. Et puis, l’Evangile ne dit-il pas d’un autre démon: « qu’il prend avec lui sept autres esprits plus méchants que lui, qu’ils entrent dans la maison (c’est-à-dire dans l’âme) et qu’ils y habitent » ?
Il n’est pas rare de rencontrer des Chrétiens qui, ne sentant pas en eux-mêmes ces attaques du démon, s’imaginent que notre Doctrine est fausse. Mais peut-on s’étonner que les démons n’attaquent point des hommes qui se sont volontairement donnés à eux, et dans lesquels on ne trouve ni piété, ni Charité, ni aucune vertu digne d’un Chrétien ? Ils appartiennent entièrement à Satan. Comment aurait-il besoin de les tenter pour les vaincre, puisque, de leur plein consentement, il règne déjà dans leur cœur.
Mais ceux qui se sont consacrés à Dieu, et qui mènent sur la terre une vie toute céleste, sont plus que tous les autres en butte aux assauts du démon. C’est pour eux qu’il réserve toute sa haine, c’est contre eux qu’à chaque instant il dresse des pièges et des embûches.
L’Histoire Sainte est pleine d’exemples de grands et vertueux personnages qui même en se tenant sur leurs gardes ont été victimes de sa rage ou de sa duplicité. Adam, David, Salomon et tant d’autres qu’il serait trop long de citer ont éprouvé la violence de ses attaques et la perfidie de ses ruses, auxquelles ni la prudence ni les forces humaines ne sauraient résister. Qui oserait après cela se croire en sûreté avec ses seules forces ? Demandons donc à Dieu avec Foi et pureté de cœur: « qu’Il ne permette pas que nous soyons tentés au-dessus de nos forces, et qu’Il nous donne, dans la tentation, le secours de son assistance, afin que nous puissions résister. »
Mais s’il se rencontre des Fidèles qui par faiblesse d’esprit ou par ignorance sont épouvantés de la puissance des démons, il faut leur persuader de se réfugier dans le port de la Prière, quand ils sont agités par les flots de la tentation.
Car Satan, quelles que soient sa puissance, son obstination, et sa haine contre nous ne peut cependant nous tenter et nous tourmenter ni autant ni aussi longtemps qu’il le voudrait. tout son pouvoir est subordonné à la Volonté et au bon plaisir de Dieu. Qui ne connaît l’histoire de Job, que Satan n’eût jamais touché, si le Seigneur ne lui eût dit: « Voilà que Je te livre tout ce qu’il possède. » Mais si au contraire, Dieu n’avait point ajouté: « seulement n’étends pas la main sur lui », Satan l’eût fait périr d’un seul coup avec ses enfants et tous ses biens. Et même Dieu a enchaîné tellement la puissance des démons que, sans sa permission, ils n’auraient pas pu passer dans ces pourceaux, dont il est question dans l’Evangile.
Mais pour mieux faire comprendre le sens et la portée de cette demande, nous avons à expliquer ce que l’on doit entendre par tentation, et par être induit en tentation.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ IV. — QU’EST-CE QU’ETRE TENTE ET INDUIT EN TENTATION.
Tenter, c’est mettre quelqu’un à l’épreuve, pour tirer de lui ce que nous désirons savoir, et par là connaître la vérité. On ne peut pas dire que Dieu puisse tenter en ce sens, car, y-a-t-il quelque chose qu’Il ignore ? « Tout, dit l’Apôtre, est à nu et à découvert devant ses yeux. »
Il y a une autre manière de tenter qui va beaucoup plus avant, c’est de mettre quelqu’un à l’épreuve, soit en vue du bien, soit en vue du mal.
On tente un homme en vue du bien, lorsqu’on l’éprouve dans le but de constater et de manifester sa vertu, afin de la récompenser ensuite par des avantages et des honneurs, de proposer son exemple à imiter aux autres et par suite d’engager tout le monde à louer et à bénir le Seigneur.
Cette manière de tenter est la seule qui convienne à Dieu. Et nous en trouvons un exemple dans le Deutéronome ; « Le Seigneur votre Dieu vous tente, dit Moise aux Hébreux, pour qu’il apparaisse visiblement si vous L’aimez. » On dit encore que Dieu tente les siens, lorsqu’Il les accable par la pauvreté, la maladie et autres calamités de ce genre. Mais Il n’agit ainsi envers eux que pour éprouver leur patience, et afin qu’ils deviennent pour les autres des modèles de vertu chrétienne. C’est ainsi que nous voyons Abraham tenté par Dieu, lorsqu’il reçoit de Lui l’ordre d’immoler son propre fils. Mais cet acte d’obéissance fait de lui un exemple immortel de soumission et de patience.
C’est dans le même sens qu’il est dit de Tobie dans nos Saints Livres: « Parce que vous étiez agréable à Dieu, il était nécessaire que la tentation vînt vous éprouver. »
On tente les hommes en vue du mal, lorsqu’on les éprouve pour les pousser au péché ou à leur perte. Il appartient au démon de nous tenter de la sorte ; car il ne s’adresse à nous que pour nous perdre et nous jeter dans le précipice. Aussi l’Ecriture Sainte l’appelle-t-elle d’un seul mot: le tentateur.
Tantôt il excite en nous les désirs et les mouvements déréglés de nos passions et de nos affections mauvaises ; tantôt, il nous attaque par le dehors, et se sert des choses extérieures pour nous enorgueillir, si elles sont heureuses, ou nous abattre, si elles sont malheureuses. D’autres fois il a pour agents et émissaires des hommes pervertis, et surtout des hérétiques, qui sont assis dans la chaire de pestilence, et répandent le poison mortel de leurs doctrines malsaines pour perdre entièrement les hommes qui ne font aucun choix et aucune différence entre le vice et la vertu, et qui de leur naturel ne sont déjà que trop enclins au mal et toujours prêts à succomber.
Etre induit en tentation, c’est succomber à la tentation. Or nous y sommes induits en deux manières, premièrement lorsque, renversés par le choc, nous tombons dans le mal où veut nous jeter notre tentateur. En ce sens Dieu ne tente et n’a jamais tenté personne, car Il n’est l’Auteur du péché pour personne: au contraire, « Il déteste tous ceux qui commettent l’iniquité. » Aussi bien, dit l’Apôtre Saint Jacques, « que personne ne dise, quand il est tenté, que c’est Dieu qui le tente ; car Dieu n’est point tentateur pour le mal. »
On dit en second lieu que nous sommes induits en tentation par quelqu’un qui, sans nous tenter lui-même, sans même contribuer à nous tenter, passe cependant pour nous éprouver réellement parce qu’il n’empêche ni la tentation ni la victoire de la tentation sur nous, bien qu’il le puisse. C’est de cette manière que Dieu permet que les bons et les justes soient tentés ; mais alors Il les soutient de sa Grâce et ne les abandonne point. Quelquefois aussi, par un secret et juste jugement, si nos crimes le demandent, Il nous abandonne à nous-mêmes, et nous succombons.
On dit encore que Dieu nous induit en tentation, lorsque nous abusons pour notre malheur des bienfaits qu’Il nous avait accordés en vue de notre Salut, et qu’à l’exemple de l’enfant prodigue nous dissipons l’héritage de notre Père en vivant dans la luxure, et en esclaves de toutes nos passions. C’est alors que nous pouvons nous appliquer ce que l’Apôtre disait de la Loi de Dieu: « Il est arrivé que le Commandement qui devait servir à nous donner la vie, a servi à nous donner la mort. »
Jérusalem en est pour nous un exemple bien frappant. Au témoignage d’Ezéchiel, Dieu l’avait enrichie et parée de tous les genres d’ornements, et Il lui disait par la bouche de son Prophète: « Vous étiez parfaitement belle, de cette beauté que Moi-même Je vous avais donnée. » Et cependant cette ville comblée de tous les bienfaits divins, bien loin de rendre grâces à Dieu des faveurs qu’elle en avait reçues, bien loin d’employer tous ces dons pour acquérir le bonheur du ciel, cette ville par une horrible ingratitude envers son Père et son Dieu, repousse l’espérance et même la pensée du bonheur éternel, et ne songe, dans l’abondance des biens terrestres, qu’à s’abandonner au plaisir et à la débauche ! Mais il faut lire tout le passage dans Ezéchiel.
Ceux-là ressemblent à cette ville ingrate qui, pour offenser Dieu, se servent précisément des moyens si nombreux qu’Il leur avait donnés de faire le bien.
Mais il est un usage de la Sainte Ecriture qu’il faut signaler avec soin. Pour exprimer ce qui n’est qu’une permission de la part de Dieu, elle emploie quelquefois des termes qui, pris à la lettre, désigneraient une action. Ainsi il est dit dans l’Exode : « J’endurcirai le cœur de Pharaon ; » dans Isaïe . « Aveuglez l’esprit de ce peuple ; » dans l’Epître aux Romains : « Dieu les a livrés aux passions ignominieuses et à leur sens réprouvé. » Dans ces passages, et dans les autres semblables, il ne s’agit point d’une action positive de Dieu, mais d’une simple permission.
Ceci bien compris, il ne sera point difficile de savoir ce que nous devons demander à Dieu dans cette sixième partie de l’Oraison Dominicale.
§ V. — QU’EST-CE QU’ON DEMANDE A DIEU PAR CES PAROLES NE NOUS INDUISEZ POINT EN TENTATION.
Nous ne demandons point de n’être jamais tentés. Car la vie de l’homme sur la terre n’est qu’une tentation. Et il nous est utile et avantageux qu’il en soit ainsi. C’est dans la tentation en effet que nous nous connaissons nous-mêmes, c’est-à-dire nos propres forces. C’est dans la tentation par conséquent que nous nous humilions sous la main puissante de Dieu, et que, combattant généreusement, nous méritons la couronne de gloire qui ne se flétrira jamais. Car, dit Saint Paul , « celui qui combat dans la carrière ne sera couronné qu’après avoir légitimement combattu. » Saint Jacques dit à son tour: « Bienheureux l’homme qui souffre la tentation, parce qu’après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie que Dieu a promise à ceux qui L’aiment. » Que si parfois la tentation de l’ennemi est trop pressante, nous penserons, pour soutenir notre courage, que « nous avons pour nous aider un Pontife qui peut compatir à nos infirmités, ayant été Lui-même tenté et éprouvé en toutes choses. »
Que demandons-nous donc ici ? nous demandons d’être toujours assistés par le Secours divin, afin de ne pas consentir à la tentation en nous laissant séduire par elle, et de n’y point céder non plus par faiblesse. Et si nos forces venaient à nous manquer, nous demandons que la Grâce de Dieu soit toujours avec nous pour les réparer et les ranimer immédiatement.
C’est pourquoi nous devons implorer le Secours de Dieu d’une manière générale dans toutes les tentations, et quand l’une d’elles nous tourmente davantage, recourir contre elle à la Prière, et d’une manière très expresse. C’est ce que pratiquait David dans presque toutes ses tentations. Ainsi contre le mensonge, il disait: « N’ôtez point de ma bouche la parole de vérité ; » contre l’avarice: « Inclinez mon cœur vers vos préceptes et non vers l’avarice. » Contre les futilités de la vie et l’attrait des passions : « Détournez mes yeux pour qu’ils ne voient point la vanité. » En somme nous demandons de ne pas obéir à nos passions, de ne pas nous lasser de résister aux tentations., de ne pas nous écarter de la voie du Seigneur, de conserver l’égalité d’âme et la constance dans les succès et dans les malheurs, de n’être jamais, en aucune manière, privés de la protection de Dieu.
Nous Le prions enfin d’abattre Satan sous nos pieds.
§ VI. — MOTIFS ET MOYENS DE RESISTER AU DEMON
Le Pasteur n’a plus maintenant qu’à exhorter les Fidèles aux pensées et aux considérations qui doivent principalement accompagner cette demande.
Dans cette ordre d’idées, rien de plus avantageux d’abord que de bien se pénétrer de la grande faiblesse de l’humanité, de nous défier de nos forces et de mettre en Dieu seul et en sa Bonté l’espérance de notre Salut. Si nous avons la sagesse de nous appuyer sur Lui, nous ferons preuve, même au milieu des plus grands périls, d’un courage d’autant plus invincible que nous pourrons nous rappeler alors combien avant nous, avec le même courage et la même confiance que nous, ont été retirés par Dieu Lui-même — il faut dire le mot — de la gueule béante de Satan. n’avons-nous pas vu Joseph en butte à la passion insensée d’une femme, arraché par Dieu à ce pressant péril, et élevé par Lui au faîte de la gloire ? n’avons-nous pas vu Suzanne, victime innocente de véritables suppôts de l’enfer, sur le point de périr d’une mort infâme, ne l’avons-nous pas vue, rendue par Lui à la vie et à l’honneur ? Sans doute, il devait en être ainsi, car son cœur était plein de confiance dans le Seigneur. C’est aussi la gloire immortelle du saint homme Job d’avoir triomphé du monde, de la chair et du démon. Il est encore une foule d’autres exemples de ce genre dont le Pasteur saura se servir pour inspirer aux Fidèles cet espoir et cette confiance.
Il importe également de ne jamais perdre de vue le Chef que nous devons suivre dans ce combat acharné contre les tentations, c’est-à-dire Notre-Seigneur Jésus-Christ qui nous a montré comment on remporte la victoire.
C’est qu’en effet Il a vaincu le démon. Il est « cet homme plus fort qui survient, qui ferrasse le fort armé et qui lui arrache ses armes et ses dépouilles » . Voici ce que dit Saint Jean de la victoire qu’Il a remportée sur le monde: « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde. » Et dans l’Apocalypse, il est appelé le lion vainqueur qui est sorti victorieux pour vaincre encore , parce que dans sa victoire il a acquis à ses partisans le pouvoir de vaincre à leur tour.
L’Epître de Saint Paul aux Hébreux est toute pleine des victoires des Saints qui par la Foi ont vaincu les royaumes, qui ont fermé la gueule des lions, etc. .
Ces victoires que nous raconte l’histoire, doivent nous faire penser à celles que les hommes remplis de Foi, d’Espérance et de Charité, remportent tous les jours dans ces combats intérieurs et extérieurs que leur livre le démon. Victoires si nombreuses et si belles que si nous pouvions les contempler de nos yeux, nous ne pourrions rien voir en même temps de plus fréquent et de plus glorieux. C’est en parlant de ces sortes d’ennemis et de leur honteuse défaite que l’Apôtre Saint Jean a dit: « Je vous écris, jeunes gens, parce que vous êtes très forts, parce que la parole de Dieu demeure en vous, et que vous avez vaincu l’esprit malin. »
Or ce n’est ni par l’oisiveté, le sommeil, le vin, la bonne chère, les plaisirs que l’on triomphe de Satan, mais par la Prière, le travail, les veilles, la tempérance et la vertu de pureté. « Veillez et priez, est-il dit, ainsi que nous l’avons déjà remarqué, afin de ne point entrer en tentation. »
Employons ces armes pour combattre, et nous mettrons nos ennemis en fuite. Car « ceux qui résistent au démon, le verront fuir devant eux »
Cependant, à la vue de ces magnifiques triomphes des Saints, prenons garde de nous complaire en nous-mêmes. Que nul d’entre nous ne soit assez présomptueux pour s’imaginer qu’avec ses seules forces il sera en mesure de résister aux tentations et aux attaques de l’ennemi. non, ces succès-là ne sont point le fait de notre nature ni de l’humaine faiblesse ; les forces avec lesquelles nous terrassons les satellites de Satan, c’est Dieu qui nous les donne, Dieu qui fait de nos bras comme autant d’arcs d’airain ; qui, dans sa Bonté, brise l’arc des forts, et revêt de force les faibles ; qui prend notre Salut sous sa protection ; dont la droite nous soutient ; qui forme nos bras aux combats et nos mains à la guerre.
C’est donc à Dieu seul que nous devons rendre grâces pour nos victoires, car c’est par Lui seul. Et avec son secours, que nous pouvons vaincre. Saint Paul n’y manque pas: « Grâces soient rendues à Dieu, dit-il, qui nous a donné la victoire par Jésus-Christ Notre-Seigneur ! » Après lui, la voix céleste de l’Apocalypse célèbre à son tour le triomphe de notre Dieu: « Voici le temps du Salut, de la Puissance et du Règne de notre Dieu, et de la Puissance de son Christ, parce que l’accusateur de nos frères a été précipité, et qu’ils l’ont vaincu par le Sang de l’Agneau. » Remarquons encore un passage du même Livre qui atteste la victoire que Jésus-Christ a remportée sur la chair et sur le monde: « Ceux-ci combattront contre l’Agneau, mais l’Agneau les vaincra. »
Mais c’est assez sur les motifs et les moyens de vaincre le tentateur.
Après ces explications, les Pasteurs ne manqueront pas de montrer aux Fidèles les couronnes que Dieu prépare aux vainqueurs et les récompenses infinies qu’Il leur réserve dans l’éternité. Ce même livre de l’Apocalypse leur en fournira les preuves. « Celui qui sera victorieux, y est-il dit, ne sera point frappé de la seconde mort ; et ailleurs: Celui qui sera victorieux, sera ainsi vêtu de blanc, et Je n’effacerai point son nom du Livre de vie, et Je confesserai son nom devant mon Père et devant ses Anges. » Puis un peu après, Jésus-Christ notre Dieu, Notre-Seigneur Lui-même, s’adresse en ces termes à Saint Jean: « Celui qui sera victorieux, J’en ferai une colonne dans le temple de mon Dieu, et il n’en sortira plus ; » puis encore: « Celui qui sera victorieux, Je lui donnerai de s’asseoir avec Moi sur mon trône, comme J’ai vaincu Moi-même et Me suis assis avec mon Père sur son trône. » Enfin, après avoir fait le tableau de la gloire des Saints et de l’immensité de ces biens éternels dont ils jouiront dans le ciel, il ajoute : « Celui qui vaincra possédera ces choses. »
Tenter, c’est mettre quelqu’un à l’épreuve, pour tirer de lui ce que nous désirons savoir, et par là connaître la vérité. On ne peut pas dire que Dieu puisse tenter en ce sens, car, y-a-t-il quelque chose qu’Il ignore ? « Tout, dit l’Apôtre, est à nu et à découvert devant ses yeux. »
Il y a une autre manière de tenter qui va beaucoup plus avant, c’est de mettre quelqu’un à l’épreuve, soit en vue du bien, soit en vue du mal.
On tente un homme en vue du bien, lorsqu’on l’éprouve dans le but de constater et de manifester sa vertu, afin de la récompenser ensuite par des avantages et des honneurs, de proposer son exemple à imiter aux autres et par suite d’engager tout le monde à louer et à bénir le Seigneur.
Cette manière de tenter est la seule qui convienne à Dieu. Et nous en trouvons un exemple dans le Deutéronome ; « Le Seigneur votre Dieu vous tente, dit Moise aux Hébreux, pour qu’il apparaisse visiblement si vous L’aimez. » On dit encore que Dieu tente les siens, lorsqu’Il les accable par la pauvreté, la maladie et autres calamités de ce genre. Mais Il n’agit ainsi envers eux que pour éprouver leur patience, et afin qu’ils deviennent pour les autres des modèles de vertu chrétienne. C’est ainsi que nous voyons Abraham tenté par Dieu, lorsqu’il reçoit de Lui l’ordre d’immoler son propre fils. Mais cet acte d’obéissance fait de lui un exemple immortel de soumission et de patience.
C’est dans le même sens qu’il est dit de Tobie dans nos Saints Livres: « Parce que vous étiez agréable à Dieu, il était nécessaire que la tentation vînt vous éprouver. »
On tente les hommes en vue du mal, lorsqu’on les éprouve pour les pousser au péché ou à leur perte. Il appartient au démon de nous tenter de la sorte ; car il ne s’adresse à nous que pour nous perdre et nous jeter dans le précipice. Aussi l’Ecriture Sainte l’appelle-t-elle d’un seul mot: le tentateur.
Tantôt il excite en nous les désirs et les mouvements déréglés de nos passions et de nos affections mauvaises ; tantôt, il nous attaque par le dehors, et se sert des choses extérieures pour nous enorgueillir, si elles sont heureuses, ou nous abattre, si elles sont malheureuses. D’autres fois il a pour agents et émissaires des hommes pervertis, et surtout des hérétiques, qui sont assis dans la chaire de pestilence, et répandent le poison mortel de leurs doctrines malsaines pour perdre entièrement les hommes qui ne font aucun choix et aucune différence entre le vice et la vertu, et qui de leur naturel ne sont déjà que trop enclins au mal et toujours prêts à succomber.
Etre induit en tentation, c’est succomber à la tentation. Or nous y sommes induits en deux manières, premièrement lorsque, renversés par le choc, nous tombons dans le mal où veut nous jeter notre tentateur. En ce sens Dieu ne tente et n’a jamais tenté personne, car Il n’est l’Auteur du péché pour personne: au contraire, « Il déteste tous ceux qui commettent l’iniquité. » Aussi bien, dit l’Apôtre Saint Jacques, « que personne ne dise, quand il est tenté, que c’est Dieu qui le tente ; car Dieu n’est point tentateur pour le mal. »
On dit en second lieu que nous sommes induits en tentation par quelqu’un qui, sans nous tenter lui-même, sans même contribuer à nous tenter, passe cependant pour nous éprouver réellement parce qu’il n’empêche ni la tentation ni la victoire de la tentation sur nous, bien qu’il le puisse. C’est de cette manière que Dieu permet que les bons et les justes soient tentés ; mais alors Il les soutient de sa Grâce et ne les abandonne point. Quelquefois aussi, par un secret et juste jugement, si nos crimes le demandent, Il nous abandonne à nous-mêmes, et nous succombons.
On dit encore que Dieu nous induit en tentation, lorsque nous abusons pour notre malheur des bienfaits qu’Il nous avait accordés en vue de notre Salut, et qu’à l’exemple de l’enfant prodigue nous dissipons l’héritage de notre Père en vivant dans la luxure, et en esclaves de toutes nos passions. C’est alors que nous pouvons nous appliquer ce que l’Apôtre disait de la Loi de Dieu: « Il est arrivé que le Commandement qui devait servir à nous donner la vie, a servi à nous donner la mort. »
Jérusalem en est pour nous un exemple bien frappant. Au témoignage d’Ezéchiel, Dieu l’avait enrichie et parée de tous les genres d’ornements, et Il lui disait par la bouche de son Prophète: « Vous étiez parfaitement belle, de cette beauté que Moi-même Je vous avais donnée. » Et cependant cette ville comblée de tous les bienfaits divins, bien loin de rendre grâces à Dieu des faveurs qu’elle en avait reçues, bien loin d’employer tous ces dons pour acquérir le bonheur du ciel, cette ville par une horrible ingratitude envers son Père et son Dieu, repousse l’espérance et même la pensée du bonheur éternel, et ne songe, dans l’abondance des biens terrestres, qu’à s’abandonner au plaisir et à la débauche ! Mais il faut lire tout le passage dans Ezéchiel.
Ceux-là ressemblent à cette ville ingrate qui, pour offenser Dieu, se servent précisément des moyens si nombreux qu’Il leur avait donnés de faire le bien.
Mais il est un usage de la Sainte Ecriture qu’il faut signaler avec soin. Pour exprimer ce qui n’est qu’une permission de la part de Dieu, elle emploie quelquefois des termes qui, pris à la lettre, désigneraient une action. Ainsi il est dit dans l’Exode : « J’endurcirai le cœur de Pharaon ; » dans Isaïe . « Aveuglez l’esprit de ce peuple ; » dans l’Epître aux Romains : « Dieu les a livrés aux passions ignominieuses et à leur sens réprouvé. » Dans ces passages, et dans les autres semblables, il ne s’agit point d’une action positive de Dieu, mais d’une simple permission.
Ceci bien compris, il ne sera point difficile de savoir ce que nous devons demander à Dieu dans cette sixième partie de l’Oraison Dominicale.
§ V. — QU’EST-CE QU’ON DEMANDE A DIEU PAR CES PAROLES NE NOUS INDUISEZ POINT EN TENTATION.
Nous ne demandons point de n’être jamais tentés. Car la vie de l’homme sur la terre n’est qu’une tentation. Et il nous est utile et avantageux qu’il en soit ainsi. C’est dans la tentation en effet que nous nous connaissons nous-mêmes, c’est-à-dire nos propres forces. C’est dans la tentation par conséquent que nous nous humilions sous la main puissante de Dieu, et que, combattant généreusement, nous méritons la couronne de gloire qui ne se flétrira jamais. Car, dit Saint Paul , « celui qui combat dans la carrière ne sera couronné qu’après avoir légitimement combattu. » Saint Jacques dit à son tour: « Bienheureux l’homme qui souffre la tentation, parce qu’après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie que Dieu a promise à ceux qui L’aiment. » Que si parfois la tentation de l’ennemi est trop pressante, nous penserons, pour soutenir notre courage, que « nous avons pour nous aider un Pontife qui peut compatir à nos infirmités, ayant été Lui-même tenté et éprouvé en toutes choses. »
Que demandons-nous donc ici ? nous demandons d’être toujours assistés par le Secours divin, afin de ne pas consentir à la tentation en nous laissant séduire par elle, et de n’y point céder non plus par faiblesse. Et si nos forces venaient à nous manquer, nous demandons que la Grâce de Dieu soit toujours avec nous pour les réparer et les ranimer immédiatement.
C’est pourquoi nous devons implorer le Secours de Dieu d’une manière générale dans toutes les tentations, et quand l’une d’elles nous tourmente davantage, recourir contre elle à la Prière, et d’une manière très expresse. C’est ce que pratiquait David dans presque toutes ses tentations. Ainsi contre le mensonge, il disait: « N’ôtez point de ma bouche la parole de vérité ; » contre l’avarice: « Inclinez mon cœur vers vos préceptes et non vers l’avarice. » Contre les futilités de la vie et l’attrait des passions : « Détournez mes yeux pour qu’ils ne voient point la vanité. » En somme nous demandons de ne pas obéir à nos passions, de ne pas nous lasser de résister aux tentations., de ne pas nous écarter de la voie du Seigneur, de conserver l’égalité d’âme et la constance dans les succès et dans les malheurs, de n’être jamais, en aucune manière, privés de la protection de Dieu.
Nous Le prions enfin d’abattre Satan sous nos pieds.
§ VI. — MOTIFS ET MOYENS DE RESISTER AU DEMON
Le Pasteur n’a plus maintenant qu’à exhorter les Fidèles aux pensées et aux considérations qui doivent principalement accompagner cette demande.
Dans cette ordre d’idées, rien de plus avantageux d’abord que de bien se pénétrer de la grande faiblesse de l’humanité, de nous défier de nos forces et de mettre en Dieu seul et en sa Bonté l’espérance de notre Salut. Si nous avons la sagesse de nous appuyer sur Lui, nous ferons preuve, même au milieu des plus grands périls, d’un courage d’autant plus invincible que nous pourrons nous rappeler alors combien avant nous, avec le même courage et la même confiance que nous, ont été retirés par Dieu Lui-même — il faut dire le mot — de la gueule béante de Satan. n’avons-nous pas vu Joseph en butte à la passion insensée d’une femme, arraché par Dieu à ce pressant péril, et élevé par Lui au faîte de la gloire ? n’avons-nous pas vu Suzanne, victime innocente de véritables suppôts de l’enfer, sur le point de périr d’une mort infâme, ne l’avons-nous pas vue, rendue par Lui à la vie et à l’honneur ? Sans doute, il devait en être ainsi, car son cœur était plein de confiance dans le Seigneur. C’est aussi la gloire immortelle du saint homme Job d’avoir triomphé du monde, de la chair et du démon. Il est encore une foule d’autres exemples de ce genre dont le Pasteur saura se servir pour inspirer aux Fidèles cet espoir et cette confiance.
Il importe également de ne jamais perdre de vue le Chef que nous devons suivre dans ce combat acharné contre les tentations, c’est-à-dire Notre-Seigneur Jésus-Christ qui nous a montré comment on remporte la victoire.
C’est qu’en effet Il a vaincu le démon. Il est « cet homme plus fort qui survient, qui ferrasse le fort armé et qui lui arrache ses armes et ses dépouilles » . Voici ce que dit Saint Jean de la victoire qu’Il a remportée sur le monde: « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde. » Et dans l’Apocalypse, il est appelé le lion vainqueur qui est sorti victorieux pour vaincre encore , parce que dans sa victoire il a acquis à ses partisans le pouvoir de vaincre à leur tour.
L’Epître de Saint Paul aux Hébreux est toute pleine des victoires des Saints qui par la Foi ont vaincu les royaumes, qui ont fermé la gueule des lions, etc. .
Ces victoires que nous raconte l’histoire, doivent nous faire penser à celles que les hommes remplis de Foi, d’Espérance et de Charité, remportent tous les jours dans ces combats intérieurs et extérieurs que leur livre le démon. Victoires si nombreuses et si belles que si nous pouvions les contempler de nos yeux, nous ne pourrions rien voir en même temps de plus fréquent et de plus glorieux. C’est en parlant de ces sortes d’ennemis et de leur honteuse défaite que l’Apôtre Saint Jean a dit: « Je vous écris, jeunes gens, parce que vous êtes très forts, parce que la parole de Dieu demeure en vous, et que vous avez vaincu l’esprit malin. »
Or ce n’est ni par l’oisiveté, le sommeil, le vin, la bonne chère, les plaisirs que l’on triomphe de Satan, mais par la Prière, le travail, les veilles, la tempérance et la vertu de pureté. « Veillez et priez, est-il dit, ainsi que nous l’avons déjà remarqué, afin de ne point entrer en tentation. »
Employons ces armes pour combattre, et nous mettrons nos ennemis en fuite. Car « ceux qui résistent au démon, le verront fuir devant eux »
Cependant, à la vue de ces magnifiques triomphes des Saints, prenons garde de nous complaire en nous-mêmes. Que nul d’entre nous ne soit assez présomptueux pour s’imaginer qu’avec ses seules forces il sera en mesure de résister aux tentations et aux attaques de l’ennemi. non, ces succès-là ne sont point le fait de notre nature ni de l’humaine faiblesse ; les forces avec lesquelles nous terrassons les satellites de Satan, c’est Dieu qui nous les donne, Dieu qui fait de nos bras comme autant d’arcs d’airain ; qui, dans sa Bonté, brise l’arc des forts, et revêt de force les faibles ; qui prend notre Salut sous sa protection ; dont la droite nous soutient ; qui forme nos bras aux combats et nos mains à la guerre.
C’est donc à Dieu seul que nous devons rendre grâces pour nos victoires, car c’est par Lui seul. Et avec son secours, que nous pouvons vaincre. Saint Paul n’y manque pas: « Grâces soient rendues à Dieu, dit-il, qui nous a donné la victoire par Jésus-Christ Notre-Seigneur ! » Après lui, la voix céleste de l’Apocalypse célèbre à son tour le triomphe de notre Dieu: « Voici le temps du Salut, de la Puissance et du Règne de notre Dieu, et de la Puissance de son Christ, parce que l’accusateur de nos frères a été précipité, et qu’ils l’ont vaincu par le Sang de l’Agneau. » Remarquons encore un passage du même Livre qui atteste la victoire que Jésus-Christ a remportée sur la chair et sur le monde: « Ceux-ci combattront contre l’Agneau, mais l’Agneau les vaincra. »
Mais c’est assez sur les motifs et les moyens de vaincre le tentateur.
Après ces explications, les Pasteurs ne manqueront pas de montrer aux Fidèles les couronnes que Dieu prépare aux vainqueurs et les récompenses infinies qu’Il leur réserve dans l’éternité. Ce même livre de l’Apocalypse leur en fournira les preuves. « Celui qui sera victorieux, y est-il dit, ne sera point frappé de la seconde mort ; et ailleurs: Celui qui sera victorieux, sera ainsi vêtu de blanc, et Je n’effacerai point son nom du Livre de vie, et Je confesserai son nom devant mon Père et devant ses Anges. » Puis un peu après, Jésus-Christ notre Dieu, Notre-Seigneur Lui-même, s’adresse en ces termes à Saint Jean: « Celui qui sera victorieux, J’en ferai une colonne dans le temple de mon Dieu, et il n’en sortira plus ; » puis encore: « Celui qui sera victorieux, Je lui donnerai de s’asseoir avec Moi sur mon trône, comme J’ai vaincu Moi-même et Me suis assis avec mon Père sur son trône. » Enfin, après avoir fait le tableau de la gloire des Saints et de l’immensité de ces biens éternels dont ils jouiront dans le ciel, il ajoute : « Celui qui vaincra possédera ces choses. »
Re: Catéchisme du Concile de Trente
Chapitre quarante-sixième — Septième demande de l’Oraison Dominicale
DELIVREZ-NOUS DU MAL.
Cette dernière demande, par laquelle le Fils de Dieu a voulu finir sa divine Prière, est comme le résumé et la résultante de toutes les autres. Pour en montrer l’importance et la vertu, Il l’employa Lui-même, la veille de sa mort, en priant Dieu son Père pour le salut des hommes. « Je Vous prie, dit-Il, de les préserver du mal. » Nous avons donc ici, dans cette Prière qu’Il nous a enseignée par ses préceptes et qu’Il a confirmée par ses exemples, une sorte d’abrégé qui renferme en substance la force et l’esprit de toutes les autres demandes. Lorsque, au témoignage de Saint Cyprien, nous avons obtenu ce qu’elle renferme, nous n’avons plus rien à demander. Par le seul fait que nous avons imploré et obtenu la Protection de Dieu contre le mal, nous sommes tranquilles et en sûreté contre tous les assauts du monde et du démon.
Mais si cette demande a l’importance que nous venons de dire, le Pasteur se fera un devoir de l’expliquer aux Fidèles avec le plus grand soin.
§ I. — COMMENT ON DOIT DEMANDER D’ETRE DELIVRE DU MAL.
Dans la demande précédente nous sollicitons la grâce d’éviter la faute, et dans celle-ci nous prions Dieu de nous délivrer de la peine.
Il ne paraît pas nécessaire ici de rappeler aux Fidèles les maux dont ils souffrent, les ennuis qui les dévorent, les calamités qui les accablent, et par suite le besoin pressant qu’ils ont du secours d’En-Haut. La vie humaine est en proie à toutes les misères, les écrivains sacrés et profanes sont d’accord sur cette triste vérité qu’ils ont développée de toutes manières. Personne du reste ne peut en douter raisonnablement ; qu’il le sache par sa propre expérience ou par celle des autres. tout le monde est convaincu que Job, cet admirable modèle de patience, n’a rien exagéré. « L’homme né de la femme, dit-il, ne vit que peu de temps, et ce peu de temps est rempli de beaucoup de misères. Il est comme une fleur qui serait foulée aux pieds en naissant, il fuit comme l’ombre, et jamais ne demeure dans le même état. » Nous ne pouvons en effet passer aucun jour sans chagrin et sans afflictions. Notre-Seigneur nous en avertit: « A chaque jour suffit sa peine. » Au surplus, n’était-ce pas assez nous avertir de la misère de notre condition en nous disant que chaque jour il faut prendre notre croix et marcher à sa suite ?
Mais comme chacun sent par lui-même toutes les charges et tous les dangers de la vie, il ne sera pas difficile de persuader aux Fidèles qu’ils doivent demander à Dieu d’être délivrés de leurs maux. Et cela est d’autant plus vrai que rien ne porte plus les hommes à la Prière que le désir et l’espoir d’être à l’abri des maux qui les affligent, ou qui les menacent. nous sommes naturellement portés à recourir à Dieu à l’heure de l’épreuve, et sans aucun délai. C’est pour cela sans doute qu’il est écrit
« Couvrez leur visage d’ignominie, Seigneur, et ils invoqueront votre Nom. » Mais si nous nous portons presque spontanément à invoquer le secours de Dieu, dans les périls et dans les calamités, nous avons besoin d’être instruits, par ceux à qui notre salut a été confié, sur la méthode à suivre, pour le faire dignement.
Il n’est pas rare en effet de trouver des Chrétiens qui renversent l’ordre établi par Jésus-Christ. Car, en nous ordonnant de recourir à Lui au jour de la tribulation , Il nous a prescrit en même temps l’ordre à suivre pour faire cette Prière. Avant donc de Le prier de nous délivrer du mal, Il nous oblige à Lui demander que son nom soit sanctifié, que son Royaume arrive, en un mot Il veut que nous fassions toutes les autres demandes, qui sont comme autant de degrés pour arriver à celle-ci. Mais si l’on souffre de la tête, de la poitrine, ou d’ailleurs, si l’on éprouve quelque perte dans ses biens, si les ennemis font des menaces et nous mettent en danger, si la famine, la guerre et la peste se font sentir, aussitôt on voit des Chrétiens qui ne tiennent plus aucun compte des degrés intermédiaires de la Prière et qui songent uniquement à solliciter la délivrance de leurs maux. Une telle conduite est contraire au Commandement de Notre-Seigneur Jésus-Christ: « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu ».
Ainsi donc, pour bien prier, il faut tout rapporter à la Gloire de Dieu, même lorsqu’on Lui demande d’éloigner les peines, les calamités et les maux présents. Lorsque David disait à Dieu: Seigneur, ne me reprenez pas dans votre colère, il ajoutait immédiatement à cette Prière une raison qui prouvait bien l’ardent désir qu’il avait de la Gloire de Dieu. La mort, disait-il , ne garde pas votre souvenir, et qui est-ce qui chantera vos louanges dans le tombeau ? De même lorsqu’il implorait la Miséricorde de Dieu, il avait soin d’ajouter: « J’enseignerai vos voies aux pécheurs, et les impies se convertiront à Vous. »
Il faut engager fortement les Fidèles, à l’exemple du Prophète, à prier de cette manière vraiment salutaire, et bien leur montrer la différence qui existe entre la prière des infidèles et celle des Chrétiens. C’est qu’en effet les infidèles prient aussi et avec ardeur. Ils demandent à la Divinité la guérison de leurs plaies et de leurs maladies, ils la supplient de les faire sortir des maux qui les accablent, ou qui les menacent. Mais en même temps, ils placent le principal espoir de leur délivrance dans les remèdes de la nature ou de l’art. Ils vont plus loin même, car ils acceptent sans scrupule les remèdes du premier venu, quand même ils sauraient que ces remèdes ont été préparés avec sortilèges, magie et intervention du démon. Il suffit pour les déterminer qu’ils aient le moindre espoir de recouvrer la santé.
Mais la conduite des Chrétiens est bien différente. Dans leurs maladies, dans leurs adversités, Dieu est leur principal refuge et, à vrai dire, leur seul soutien. Précisément parce qu’ils Le reconnaissent, et L’adorent comme l’Auteur de tout bien, et leur Libérateur, ils n’oublient point que les remèdes n’ont de vertu curative que celle que Dieu leur a donnée, et par suite qu’ils ne sont utiles aux malades qu’autant que Dieu le veut. La médecine en effet vient de Dieu, qui l’a donnée Lui-même aux hommes pour guérir leurs maladies. De là ces paroles de l’Ecclésiastique: « Le très Haut a fait produire à la terre les remèdes, et l’homme prudent ne les dédaignera pas. » Aussi ceux qui appartiennent à Jésus-Christ ne mettent point dans ces remèdes leur principal espoir de guérison ; mais ils se confient surtout en Dieu qui est le Créateur même de la médecine.
C’est pourquoi nos Saints Livres reprennent fortement ceux qui ont trop de confiance dans la science, et ne demandent aucun secours à Dieu. Il y a plus, ceux qui mènent une vie conforme aux préceptes du Seigneur, s’abstiennent de tous les remèdes que Dieu n’a pas destinés à cette fin ; quand même ils seraient assurés de guérir par ce moyen, ils ne laisseraient pas de les avoir en horreur comme des artifices et des enchantements du démon.
Il faut donc exhorter les Fidèles à mettre en Dieu toute leur confiance. En nous ordonnant de Lui demander la délivrance de nos maux, ce Père, plein de Bonté, nous donne par là même l’espérance d’être exaucés. nous trouvons dans la Sainte Ecriture un grand nombre d’exemples où brille cette confiance dont nous parlons, et qui sont très propres à l’inspirer, même à ceux que le raisonnement ne convaincrait pas. n’avons-nous pas dans la personne d’Abraham, de Jacob, de Lot, de Joseph et de David autant de précieux témoins de la Bonté divine ? et le nouveau testament ne nous montre-t-il pas un très grand nombre de personnes qui ont échappé aux plus grands dangers par la vertu de la Prière ? Aussi bien, nous n’avons pas à les nommer ici. nous nous bornerons donc à rapporter ces paroles du Prophète, bien capables de nous rassurer tous, même les plus faibles: « Les justes ont crié, et le Seigneur les a exaucés ; et Il les a délivrés de toutes leurs tribulations. »
DELIVREZ-NOUS DU MAL.
Cette dernière demande, par laquelle le Fils de Dieu a voulu finir sa divine Prière, est comme le résumé et la résultante de toutes les autres. Pour en montrer l’importance et la vertu, Il l’employa Lui-même, la veille de sa mort, en priant Dieu son Père pour le salut des hommes. « Je Vous prie, dit-Il, de les préserver du mal. » Nous avons donc ici, dans cette Prière qu’Il nous a enseignée par ses préceptes et qu’Il a confirmée par ses exemples, une sorte d’abrégé qui renferme en substance la force et l’esprit de toutes les autres demandes. Lorsque, au témoignage de Saint Cyprien, nous avons obtenu ce qu’elle renferme, nous n’avons plus rien à demander. Par le seul fait que nous avons imploré et obtenu la Protection de Dieu contre le mal, nous sommes tranquilles et en sûreté contre tous les assauts du monde et du démon.
Mais si cette demande a l’importance que nous venons de dire, le Pasteur se fera un devoir de l’expliquer aux Fidèles avec le plus grand soin.
§ I. — COMMENT ON DOIT DEMANDER D’ETRE DELIVRE DU MAL.
Dans la demande précédente nous sollicitons la grâce d’éviter la faute, et dans celle-ci nous prions Dieu de nous délivrer de la peine.
Il ne paraît pas nécessaire ici de rappeler aux Fidèles les maux dont ils souffrent, les ennuis qui les dévorent, les calamités qui les accablent, et par suite le besoin pressant qu’ils ont du secours d’En-Haut. La vie humaine est en proie à toutes les misères, les écrivains sacrés et profanes sont d’accord sur cette triste vérité qu’ils ont développée de toutes manières. Personne du reste ne peut en douter raisonnablement ; qu’il le sache par sa propre expérience ou par celle des autres. tout le monde est convaincu que Job, cet admirable modèle de patience, n’a rien exagéré. « L’homme né de la femme, dit-il, ne vit que peu de temps, et ce peu de temps est rempli de beaucoup de misères. Il est comme une fleur qui serait foulée aux pieds en naissant, il fuit comme l’ombre, et jamais ne demeure dans le même état. » Nous ne pouvons en effet passer aucun jour sans chagrin et sans afflictions. Notre-Seigneur nous en avertit: « A chaque jour suffit sa peine. » Au surplus, n’était-ce pas assez nous avertir de la misère de notre condition en nous disant que chaque jour il faut prendre notre croix et marcher à sa suite ?
Mais comme chacun sent par lui-même toutes les charges et tous les dangers de la vie, il ne sera pas difficile de persuader aux Fidèles qu’ils doivent demander à Dieu d’être délivrés de leurs maux. Et cela est d’autant plus vrai que rien ne porte plus les hommes à la Prière que le désir et l’espoir d’être à l’abri des maux qui les affligent, ou qui les menacent. nous sommes naturellement portés à recourir à Dieu à l’heure de l’épreuve, et sans aucun délai. C’est pour cela sans doute qu’il est écrit
« Couvrez leur visage d’ignominie, Seigneur, et ils invoqueront votre Nom. » Mais si nous nous portons presque spontanément à invoquer le secours de Dieu, dans les périls et dans les calamités, nous avons besoin d’être instruits, par ceux à qui notre salut a été confié, sur la méthode à suivre, pour le faire dignement.
Il n’est pas rare en effet de trouver des Chrétiens qui renversent l’ordre établi par Jésus-Christ. Car, en nous ordonnant de recourir à Lui au jour de la tribulation , Il nous a prescrit en même temps l’ordre à suivre pour faire cette Prière. Avant donc de Le prier de nous délivrer du mal, Il nous oblige à Lui demander que son nom soit sanctifié, que son Royaume arrive, en un mot Il veut que nous fassions toutes les autres demandes, qui sont comme autant de degrés pour arriver à celle-ci. Mais si l’on souffre de la tête, de la poitrine, ou d’ailleurs, si l’on éprouve quelque perte dans ses biens, si les ennemis font des menaces et nous mettent en danger, si la famine, la guerre et la peste se font sentir, aussitôt on voit des Chrétiens qui ne tiennent plus aucun compte des degrés intermédiaires de la Prière et qui songent uniquement à solliciter la délivrance de leurs maux. Une telle conduite est contraire au Commandement de Notre-Seigneur Jésus-Christ: « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu ».
Ainsi donc, pour bien prier, il faut tout rapporter à la Gloire de Dieu, même lorsqu’on Lui demande d’éloigner les peines, les calamités et les maux présents. Lorsque David disait à Dieu: Seigneur, ne me reprenez pas dans votre colère, il ajoutait immédiatement à cette Prière une raison qui prouvait bien l’ardent désir qu’il avait de la Gloire de Dieu. La mort, disait-il , ne garde pas votre souvenir, et qui est-ce qui chantera vos louanges dans le tombeau ? De même lorsqu’il implorait la Miséricorde de Dieu, il avait soin d’ajouter: « J’enseignerai vos voies aux pécheurs, et les impies se convertiront à Vous. »
Il faut engager fortement les Fidèles, à l’exemple du Prophète, à prier de cette manière vraiment salutaire, et bien leur montrer la différence qui existe entre la prière des infidèles et celle des Chrétiens. C’est qu’en effet les infidèles prient aussi et avec ardeur. Ils demandent à la Divinité la guérison de leurs plaies et de leurs maladies, ils la supplient de les faire sortir des maux qui les accablent, ou qui les menacent. Mais en même temps, ils placent le principal espoir de leur délivrance dans les remèdes de la nature ou de l’art. Ils vont plus loin même, car ils acceptent sans scrupule les remèdes du premier venu, quand même ils sauraient que ces remèdes ont été préparés avec sortilèges, magie et intervention du démon. Il suffit pour les déterminer qu’ils aient le moindre espoir de recouvrer la santé.
Mais la conduite des Chrétiens est bien différente. Dans leurs maladies, dans leurs adversités, Dieu est leur principal refuge et, à vrai dire, leur seul soutien. Précisément parce qu’ils Le reconnaissent, et L’adorent comme l’Auteur de tout bien, et leur Libérateur, ils n’oublient point que les remèdes n’ont de vertu curative que celle que Dieu leur a donnée, et par suite qu’ils ne sont utiles aux malades qu’autant que Dieu le veut. La médecine en effet vient de Dieu, qui l’a donnée Lui-même aux hommes pour guérir leurs maladies. De là ces paroles de l’Ecclésiastique: « Le très Haut a fait produire à la terre les remèdes, et l’homme prudent ne les dédaignera pas. » Aussi ceux qui appartiennent à Jésus-Christ ne mettent point dans ces remèdes leur principal espoir de guérison ; mais ils se confient surtout en Dieu qui est le Créateur même de la médecine.
C’est pourquoi nos Saints Livres reprennent fortement ceux qui ont trop de confiance dans la science, et ne demandent aucun secours à Dieu. Il y a plus, ceux qui mènent une vie conforme aux préceptes du Seigneur, s’abstiennent de tous les remèdes que Dieu n’a pas destinés à cette fin ; quand même ils seraient assurés de guérir par ce moyen, ils ne laisseraient pas de les avoir en horreur comme des artifices et des enchantements du démon.
Il faut donc exhorter les Fidèles à mettre en Dieu toute leur confiance. En nous ordonnant de Lui demander la délivrance de nos maux, ce Père, plein de Bonté, nous donne par là même l’espérance d’être exaucés. nous trouvons dans la Sainte Ecriture un grand nombre d’exemples où brille cette confiance dont nous parlons, et qui sont très propres à l’inspirer, même à ceux que le raisonnement ne convaincrait pas. n’avons-nous pas dans la personne d’Abraham, de Jacob, de Lot, de Joseph et de David autant de précieux témoins de la Bonté divine ? et le nouveau testament ne nous montre-t-il pas un très grand nombre de personnes qui ont échappé aux plus grands dangers par la vertu de la Prière ? Aussi bien, nous n’avons pas à les nommer ici. nous nous bornerons donc à rapporter ces paroles du Prophète, bien capables de nous rassurer tous, même les plus faibles: « Les justes ont crié, et le Seigneur les a exaucés ; et Il les a délivrés de toutes leurs tribulations. »
Re: Catéchisme du Concile de Trente
§ II. — QUELS SONT LES MAUX DONT NOUS DEMANDONS ICI D’ETRE DELIVRES.
Il nous reste à parler du sens et de l’étendue de cette demande. C’est le moyen de bien faire comprendre aux Fidèles que nous ne demandons pas d’être absolument délivrés de tous les maux. Car il y a des choses que l’on regarde habituellement comme des maux, et qui, néanmoins, sont très utiles à ceux qui les endurent. Ainsi cet aiguillon de la chair, que ressentait si vivement Saint Paul, servait, avec le secours de la grâce, à affermir sa vertu dans la faiblesse . Voilà pourquoi les personnes de piété, connaissant le prix et les avantages de ces épreuves. les supportent avec une très grande joie, bien loin de demander à Dieu d’en être délivrées.
Nous nous bornons donc à conjurer par la Prière ces sortes de maux sans profit pour notre âme, mais nullement ceux qui peuvent nous apporter quelques fruits de salut.
Le véritable sens de cette demande est donc qu’après avoir été délivrés du péché et du danger des tentations, nous soyons aussi préservés de tous les maux, tant intérieurs qu’extérieurs, de l’eau, du feu et de la foudre ; que la grêle n’atteigne point nos moissons, et que nous n’ayons à souffrir ni de la disette, ni de la sédition, ni de la guerre.
Nous demandons à Dieu d’éloigner de nous les maladies, la peste, les ravages, les chaînes, la prison, l’exil, les trahisons, les embûches, et en général tous les maux qui épouvantent et désolent le plus la vie humaine.
Enfin nous Lui demandons d’anéantir toutes les causes d’iniquités et de crimes.
Mais nous ne demandons pas seulement d’être préservés de ces choses qui, de l’aveu de tout le monde, sont des maux véritables. nous demandons aussi que ce que l’on regarde généralement comme des biens, à savoir les richesses, les honneurs, la santé, la force, la vie même, ne tournent point à notre malheur, ni à la perte de notre âme.
Nous prions Dieu de ne point être frappés de mort subite, de ne point soulever contre nous sa colère, de ne point encourir les châtiments réservés aux impies, de ne point passer par le feu du purgatoire. nous le supplions en même temps, avec toute la piété possible, de délivrer les âmes qui y sont détenues. Enfin le sens que l’Eglise donne à cette demande, à la Messe et dans ses Litanies, c’est que nous soyons délivrés des maux passés, présents et futurs.
Mais Dieu, dans sa Bonté infinie, nous délivre des maux, de plus d’une manière. Il éloigne les calamités qui nous menacent. C’est ainsi qu’Il sauve le grand Patriarche Jacob des ennemis que le meurtre des Sichimites avait soulevés contre lui ; car nous lisons: « La terreur de Dieu se répandit sur toutes les villes d’alentour, et nul n’osa poursuivre les enfants de Jacob, au moment de leur retraite. » Tous les Bienheureux qui règnent dans le ciel avec Notre-Seigneur Jésus-Christ ont été eux-mêmes délivrés de tous les maux par la Miséricorde de Dieu ; pour nous, tant que nous sommes dans notre pèlerinage, ce même Dieu ne veut pas que nous soyons exempts de toutes les misères. II veut seulement nous préserver de quelques-unes.
Au reste, les consolations qu’il accorde parfois à ceux que l’adversité accable, sont comme une véritable délivrance de tous les maux. C’est ainsi que David se consolait en disant: « Vos consolations, Seigneur, ont rempli mon âme de joie, à proportion même des cruelles douleurs que j’éprouvais. » Dieu délivre encore les hommes du mal lorsqu’Il les retire sains et saufs, du milieu des dangers les plus grands, auxquels ils se trouvaient exposés, comme Il fit pour les trois jeunes gens dans la fournaise, et pour Daniel dans la fosse aux lions. Les lions le respectèrent, comme les flammes avaient respecté les jeunes gens.
Saint Basile le Grand, Saint Jean Chrysostome et Saint Augustin nous disent que le mal dont il est question dans cette demande, serait particulièrement le démon, parce que le démon fut l’auteur des péchés et des crimes des hommes, et que Dieu se sert de lui pour punir les criminels et les impies. Car c’est Dieu qui nous envoie tous les maux que nous souffrons pour nos péchés: « Y aura-t-il dans la ville un mal qui ne vienne du Seigneur ? dit le Prophète Amos. C’est Moi qui suis le Seigneur , est-il dit dans Isaïe, et il n’y en a point d’autre. Je forme la lumière et Je crée les ténèbres, Je fais la paix et Je produis le mal. »
Le démon est encore appelé le mal, parce que sans aucune agression de notre part, il nous fait une guerre sans relâche et nous poursuit d’une haine mortelle. Et, bien qu’il soit incapable de nous nuire, lorsque nous avons en mains les armes de la Foi, et le bouclier de l’innocence, cependant, il ne cesse de nous tenter par les maux extérieurs et de nous tourmenter par tous les moyens possibles. Voilà pourquoi nous supplions Dieu de nous délivrer du mal ; (ou du méchant, ou du malin).
Nous disons du mal et non pas des maux, parce que les maux qui nous viennent du prochain, doivent être imputés au démon. II en est sûrement l’auteur et l’instigateur. Ainsi loin de nous irriter contre nos Frères, nous devons tourner notre colère et notre haine contre Satan lui-même qui a poussé les hommes à commettre l’injustice envers nous. Si donc votre prochain vous a offensé en quelque manière, lorsque vous priez Dieu votre Père, demandez-Lui non seulement de vous délivrer du mal, c’est-à-dire des injustices dont vous avez été victime, mais encore d’arracher votre prochain des mains du démon, qui ne cherche qu’à précipiter les hommes dans le vice.
§ III. — DE LA PATIENCE NECESSAIRE DANS LES MAUX.
Enfin il importe de savoir que si nos Prières et nos vœux ne nous délivrent point des maux que nous souffrons, nous devons alors les supporter avec patience, et aussi avec cette conviction que Dieu désire extrêmement nous les voir endurer de la sorte. Donc pas d’indignation, pas de tristesse, si Dieu ne nous exauce pas ! Ne devons-nous pas tout soumettre à sa sainte Volonté et à son bon plaisir ? ne devons-nous pas regarder comme utiles et salutaires les choses que Dieu approuve et non pas celles qui nous plaisent ?
Que les Pasteurs s’appliquent donc à bien représenter aux Fidèles qu’ils doivent être prêts, tant qu’ils sont sur la terre, à supporter les incommodités et les calamités de tout genre, non seulement sans se plaindre, mais même avec une certaine joie. Tous ceux, est-il dit dans nos Saints Livres, qui veulent vivre avec piété en Jésus-Christ, souffriront persécution. C’est par beaucoup de tribulations que nous devons entrer dans le Royaume de Dieu. Ne fallait-il pas que le Christ souffrît, et qu’il entrât ainsi dans sa Gloire ? Or, il n’est pas juste que le serviteur soit au-dessus du maître ; il est même honteux, dit Saint Bernard, que les membres soient délicats sous un Chef couronné d’épines.
Nous avons à cet égard un bel exemple dans la personne d’Urie. Pressé par David d’aller se reposer dans sa maison, il répondit: « L’Arche de Dieu, Israël et Juda habitent sous des tentes, et moi, j’irais dans ma maison ? »
Si nous savons nous présenter devant Dieu avec les pensées et les dispositions que nous venons de marquer, nous obtiendrons infailliblement, ou d’être entièrement délivrés de tous les maux qui nous assiègent, comme les trois jeunes gens furent préservés du feu dans la fournaise ; ou du moins comme les Macchabées, de supporter l’adversité avec un courage à toute épreuve.
Au milieu des mépris et des tourments, nous imiterons les saints Apôtres qui, accablés de coups de fouets, se réjouissaient vivement , parce qu’ils avaient été trouvés dignes de souffrir des affronts pour Jésus-Christ. Remplis des mêmes sentiments, nous chanterons avec allégresse ce cantique de David: « Les princes m’ont persécuté sans sujet, mais mon cœur n’a craint qu’Il cause de votre parole. Je me réjouis de vos oracles, comme celui qui a trouvé de riches dépouilles. »
§ IV. — CONCLUSION DE L’ORAISON DOMINICALE. AMEN. (AINSI SOIT-IL !)
Saint Jérôme, dans ses commentaires sur Saint Matthieu, nous dit — et il ne se trompe pas — que ce mot Amen est comme le sceau de l’Oraison Dominicale. Aussi, comme nous avons prévenu les Fidèles de la nécessité de se préparer à la Prière, avant de l’entreprendre, nous avons à leur expliquer maintenant quelle est la raison et le sens de cette conclusion ; car il n’est pas plus important de bien commencer la Prière que de la bien finir.
Que les. Fidèles sachent donc que nous retirons des fruits nombreux et excellents de l’Oraison Dominicale. Mais le meilleur et le plus agréable de tous c’est l’assurance que nous obtiendrons ce que nous avons demandé. nous avons suffisamment parlé plus haut de cette consolante vérité, mais nous devons ajouter ici que par cette dernière partie de notre Prière, nous n’obtenons pas seulement que nos demandes soient exaucées, nous recueillons encore des avantages si grands et si remarquables, que la parole peut à peine en donner une idée.
Lorsque les hommes conversent avec Dieu par la Prière, dit Saint Cyprien, la Majesté divine se rapproche, d’une manière incompréhensible, de celui qui prie, bien plus que de tous les autres hommes, et elle l’enrichit des dons les plus précieux. On peut comparer celui qui prie avec piété à un homme qui s’approche du feu. Le feu échauffe celui qui a froid ; il fait suer celui qui a déjà chaud: de même ceux qui s’approchent de Dieu par la Prière en deviennent plus ardents, selon la mesure de leur piété et de leur Foi. Leur cœur s’enflamme pour la Gloire de Dieu ; leur esprit est éclairé d’une lumière admirable ; et en outre ils sont comblés des dons célestes. La Sainte Ecriture nous le dit: « Vous l’avez prévenu des bénédictions de votre douceur. » Moïse, cet illustre personnage, en est un exemple des plus remarquables. Au sortir de ses entretiens intimes avec Dieu, son front et son visage resplendissaient d’une lumière si éclatante que les Israélites ne pouvaient pas le regarder. tous ceux qui prient avec cette piété, avec cette sainte ardeur, participent aux effets admirables de la Bonté et de la Majesté de Dieu. « Dés le matin, dit le Prophète, je me présenterai devant Vous, et je verrai que Vous n’êtes pas un Dieu qui aime l’iniquité. »
Plus nous connaissons ces merveilles, plus aussi nous sommes pénétrés d’amour et de respect pour Dieu, plus nous goûtons combien le Seigneur est doux, et combien sont heureux ceux qui espèrent en lui.
A la clarté de cette lumière incomparable qui nous environne, nous commençons à comprendre le néant que nous sommes, devant l’infinie Grandeur et la Majesté de Dieu. nous faisons ce que demande Saint Augustin: « Seigneur, faites que je Vous connaisse et que je me connaisse moi-même ! » Dès lors nous avons de nous-mêmes et de nos propres forces une juste défiance, et nous nous confions entièrement en la Bonté de Dieu, ne doutant point qu’Il ne nous reçoive avec une Charité toute paternelle et une admirable tendresse, et qu’il ne nous donne en abondance tout ce qui nous est nécessaire pour la vie et pour le salut. Alors nous rendons à Dieu toutes les actions de grâces dont notre cœur et notre bouche sont capables, heureux d’imiter en cela le saint roi David, qui, après avoir commencé sa Prière par ces mots: « Sauvez-moi de tous ceux qui me persécutent, » finit par ceux-ci: « Je rendrai grâces à Dieu selon sa justice, et je chanterai à l’honneur du nom du Seigneur très Haut. »
Presque toutes les Prières des Saints commencent par la crainte et finissent par l’espérance et la joie. Mais les plus remarquables en ce genre sont celles du Prophète David. Après avoir commencé à prier sous l’empire de la crainte et du trouble, en disant : Combien qui s’élèvent contre moi ! combien qui crient à mon âme: point de salut pour toi en Dieu, bientôt il se rassure, et dans la joie qui l’inonde, il ajoute : Je ne craindrai pas les milliers d’ennemis qui m’environnent. Dans un autre Psaume, après avoir déploré sa misère, nous le voyons plein de confiance en Dieu faire éclater une joie extraordinaire dans l’espérance de la béatitude éternelle. Je m’endormirai, dit-il , et je reposerai dans la paix. Et ce cri: Seigneur, ne me reprenez point dans votre colère, ne me châtiez point dans votre fureur, avec quelle terreur, avec quel effroi n’est-il pas à croire qu’il le prononça ! Mais aussi quelle confiance et quelle joie dans les paroles qui suivent: Retirez-vous de moi, vous tous qui commettez l’iniquité, car le Seigneur a exaucé la voix de mes pleurs ! enfin lorsqu’il avait à redouter la colère et la fureur de Saül, avec quelle humilité n’implorait-il pas le secours de Dieu ! Seigneur, disait-il , sauvez-moi par votre nom, et défendez ma cause par votre Puissance. Puis la confiance et la joie revenant, il ajoute dans le même Psaume: Voilà que Dieu est mon aide, et que le Seigneur est le défenseur de ma vie.
Que celui donc qui, le cœur plein de Foi et d’Espérance, se dispose à prier, se présente devant Dieu son Père avec la confiance ferme qu’il obtiendra ce dont il a besoin.
Or ce mot Amen, qui termine l’Oraison Dominicale, contient en germe toutes les pensées et toutes les considérations que nous venons d’exposer.
D’autre part Notre-Seigneur Jésus-Christ s’en sert si souvent dans l’Evangile, qu’il a plu à l’Esprit-Saint de le conserver dans l’Eglise de Dieu.
Voici donc, en quelque sorte, le sens qui y est attaché: Sachez que vos prières sont exaucées. C’est comme la réponse de Dieu renvoyant gracieusement celui qui priait, en lui accordant ce qu’il demandait.
Cette interprétation a pour elle la coutume constante de l’Eglise. Et en effet, dans le saint Sacrifice de la Messe, lorsqu’elle récite l’Oraison Dominicale, l’Eglise n’a pas laissé le mot amen aux assistants qui doivent simplement dire : mais délivrez-nous du mal ; elle l’a réservé pour le Prêtre qui, étant Médiateur entre Dieu et les hommes, répond au peuple que le Seigneur est apaisé.
Cette règle n’est cependant point commune à toutes les Prières, puisque dans les autres, c’est le peuple qui répond: Amen, elle ne s’applique qu’à l’Oraison Dominicale. Et en voici la raison, c’est que dans toutes les autres Prières, ce mot exprime seulement un assentiment ou un désir, tandis qu’ici il signifie que Dieu exauce les demandes de ceux qui prient.
Il faut dire d’ailleurs que les interprètes traduisent diversement ce mot amen. Les Septante lui ont donné le sens de: ainsi soit-il ! D’autres ont dit: vraiment. Aquila le traduit par fidèlement. Mais il importe peu qu’on l’entende de telle ou telle manière, pourvu que l’on reconnaisse que dans la bouche du Prêtre, à la Messe, il exprime bien l’assurance que ce qu’on a demandé est obtenu. Saint Paul autorise ce sens en disant aux Corinthiens : « Toutes promesses de Dieu ont en Jésus-Christ leur vérité ; et c’est par Lui aussi que nous disons ; Amen à Dieu pour la gloire de notre ministère. »
Ce mot est encore pour nous comme la confirmation de toutes nos demandes. Le fait seul de le prononcer rend plus attentifs ceux qui s’adonnent au saint exercice de la Prière, où il arrive trop souvent, hélas ! que l’esprit est distrait et entraîné par toutes sortes de pensées étrangères.
Enfin, dans cette courte parole nous demandons avec une nouvelle et instante ardeur que tout ce que nous venons de solliciter soit fait, c’est-à-dire accordé.
Ou bien, ou mieux, reconnaissant déjà que nous avons tout obtenu, la présence du secours divin nous pénètre de joie, et nous chantons avec le Prophète : « Voici que Dieu vient à mon aide et que le Seigneur est le défenseur de ma vie. »
Personne en effet n’a le droit de douter que Dieu ne soit touché tout ensemble et du nom de son Fils, et d’une parole qu’Il a si souvent proférée ; puisque ce divin Fils, comme dit Saint Paul , a toujours été exaucé à cause de son respect pour son Père.
Il nous reste à parler du sens et de l’étendue de cette demande. C’est le moyen de bien faire comprendre aux Fidèles que nous ne demandons pas d’être absolument délivrés de tous les maux. Car il y a des choses que l’on regarde habituellement comme des maux, et qui, néanmoins, sont très utiles à ceux qui les endurent. Ainsi cet aiguillon de la chair, que ressentait si vivement Saint Paul, servait, avec le secours de la grâce, à affermir sa vertu dans la faiblesse . Voilà pourquoi les personnes de piété, connaissant le prix et les avantages de ces épreuves. les supportent avec une très grande joie, bien loin de demander à Dieu d’en être délivrées.
Nous nous bornons donc à conjurer par la Prière ces sortes de maux sans profit pour notre âme, mais nullement ceux qui peuvent nous apporter quelques fruits de salut.
Le véritable sens de cette demande est donc qu’après avoir été délivrés du péché et du danger des tentations, nous soyons aussi préservés de tous les maux, tant intérieurs qu’extérieurs, de l’eau, du feu et de la foudre ; que la grêle n’atteigne point nos moissons, et que nous n’ayons à souffrir ni de la disette, ni de la sédition, ni de la guerre.
Nous demandons à Dieu d’éloigner de nous les maladies, la peste, les ravages, les chaînes, la prison, l’exil, les trahisons, les embûches, et en général tous les maux qui épouvantent et désolent le plus la vie humaine.
Enfin nous Lui demandons d’anéantir toutes les causes d’iniquités et de crimes.
Mais nous ne demandons pas seulement d’être préservés de ces choses qui, de l’aveu de tout le monde, sont des maux véritables. nous demandons aussi que ce que l’on regarde généralement comme des biens, à savoir les richesses, les honneurs, la santé, la force, la vie même, ne tournent point à notre malheur, ni à la perte de notre âme.
Nous prions Dieu de ne point être frappés de mort subite, de ne point soulever contre nous sa colère, de ne point encourir les châtiments réservés aux impies, de ne point passer par le feu du purgatoire. nous le supplions en même temps, avec toute la piété possible, de délivrer les âmes qui y sont détenues. Enfin le sens que l’Eglise donne à cette demande, à la Messe et dans ses Litanies, c’est que nous soyons délivrés des maux passés, présents et futurs.
Mais Dieu, dans sa Bonté infinie, nous délivre des maux, de plus d’une manière. Il éloigne les calamités qui nous menacent. C’est ainsi qu’Il sauve le grand Patriarche Jacob des ennemis que le meurtre des Sichimites avait soulevés contre lui ; car nous lisons: « La terreur de Dieu se répandit sur toutes les villes d’alentour, et nul n’osa poursuivre les enfants de Jacob, au moment de leur retraite. » Tous les Bienheureux qui règnent dans le ciel avec Notre-Seigneur Jésus-Christ ont été eux-mêmes délivrés de tous les maux par la Miséricorde de Dieu ; pour nous, tant que nous sommes dans notre pèlerinage, ce même Dieu ne veut pas que nous soyons exempts de toutes les misères. II veut seulement nous préserver de quelques-unes.
Au reste, les consolations qu’il accorde parfois à ceux que l’adversité accable, sont comme une véritable délivrance de tous les maux. C’est ainsi que David se consolait en disant: « Vos consolations, Seigneur, ont rempli mon âme de joie, à proportion même des cruelles douleurs que j’éprouvais. » Dieu délivre encore les hommes du mal lorsqu’Il les retire sains et saufs, du milieu des dangers les plus grands, auxquels ils se trouvaient exposés, comme Il fit pour les trois jeunes gens dans la fournaise, et pour Daniel dans la fosse aux lions. Les lions le respectèrent, comme les flammes avaient respecté les jeunes gens.
Saint Basile le Grand, Saint Jean Chrysostome et Saint Augustin nous disent que le mal dont il est question dans cette demande, serait particulièrement le démon, parce que le démon fut l’auteur des péchés et des crimes des hommes, et que Dieu se sert de lui pour punir les criminels et les impies. Car c’est Dieu qui nous envoie tous les maux que nous souffrons pour nos péchés: « Y aura-t-il dans la ville un mal qui ne vienne du Seigneur ? dit le Prophète Amos. C’est Moi qui suis le Seigneur , est-il dit dans Isaïe, et il n’y en a point d’autre. Je forme la lumière et Je crée les ténèbres, Je fais la paix et Je produis le mal. »
Le démon est encore appelé le mal, parce que sans aucune agression de notre part, il nous fait une guerre sans relâche et nous poursuit d’une haine mortelle. Et, bien qu’il soit incapable de nous nuire, lorsque nous avons en mains les armes de la Foi, et le bouclier de l’innocence, cependant, il ne cesse de nous tenter par les maux extérieurs et de nous tourmenter par tous les moyens possibles. Voilà pourquoi nous supplions Dieu de nous délivrer du mal ; (ou du méchant, ou du malin).
Nous disons du mal et non pas des maux, parce que les maux qui nous viennent du prochain, doivent être imputés au démon. II en est sûrement l’auteur et l’instigateur. Ainsi loin de nous irriter contre nos Frères, nous devons tourner notre colère et notre haine contre Satan lui-même qui a poussé les hommes à commettre l’injustice envers nous. Si donc votre prochain vous a offensé en quelque manière, lorsque vous priez Dieu votre Père, demandez-Lui non seulement de vous délivrer du mal, c’est-à-dire des injustices dont vous avez été victime, mais encore d’arracher votre prochain des mains du démon, qui ne cherche qu’à précipiter les hommes dans le vice.
§ III. — DE LA PATIENCE NECESSAIRE DANS LES MAUX.
Enfin il importe de savoir que si nos Prières et nos vœux ne nous délivrent point des maux que nous souffrons, nous devons alors les supporter avec patience, et aussi avec cette conviction que Dieu désire extrêmement nous les voir endurer de la sorte. Donc pas d’indignation, pas de tristesse, si Dieu ne nous exauce pas ! Ne devons-nous pas tout soumettre à sa sainte Volonté et à son bon plaisir ? ne devons-nous pas regarder comme utiles et salutaires les choses que Dieu approuve et non pas celles qui nous plaisent ?
Que les Pasteurs s’appliquent donc à bien représenter aux Fidèles qu’ils doivent être prêts, tant qu’ils sont sur la terre, à supporter les incommodités et les calamités de tout genre, non seulement sans se plaindre, mais même avec une certaine joie. Tous ceux, est-il dit dans nos Saints Livres, qui veulent vivre avec piété en Jésus-Christ, souffriront persécution. C’est par beaucoup de tribulations que nous devons entrer dans le Royaume de Dieu. Ne fallait-il pas que le Christ souffrît, et qu’il entrât ainsi dans sa Gloire ? Or, il n’est pas juste que le serviteur soit au-dessus du maître ; il est même honteux, dit Saint Bernard, que les membres soient délicats sous un Chef couronné d’épines.
Nous avons à cet égard un bel exemple dans la personne d’Urie. Pressé par David d’aller se reposer dans sa maison, il répondit: « L’Arche de Dieu, Israël et Juda habitent sous des tentes, et moi, j’irais dans ma maison ? »
Si nous savons nous présenter devant Dieu avec les pensées et les dispositions que nous venons de marquer, nous obtiendrons infailliblement, ou d’être entièrement délivrés de tous les maux qui nous assiègent, comme les trois jeunes gens furent préservés du feu dans la fournaise ; ou du moins comme les Macchabées, de supporter l’adversité avec un courage à toute épreuve.
Au milieu des mépris et des tourments, nous imiterons les saints Apôtres qui, accablés de coups de fouets, se réjouissaient vivement , parce qu’ils avaient été trouvés dignes de souffrir des affronts pour Jésus-Christ. Remplis des mêmes sentiments, nous chanterons avec allégresse ce cantique de David: « Les princes m’ont persécuté sans sujet, mais mon cœur n’a craint qu’Il cause de votre parole. Je me réjouis de vos oracles, comme celui qui a trouvé de riches dépouilles. »
§ IV. — CONCLUSION DE L’ORAISON DOMINICALE. AMEN. (AINSI SOIT-IL !)
Saint Jérôme, dans ses commentaires sur Saint Matthieu, nous dit — et il ne se trompe pas — que ce mot Amen est comme le sceau de l’Oraison Dominicale. Aussi, comme nous avons prévenu les Fidèles de la nécessité de se préparer à la Prière, avant de l’entreprendre, nous avons à leur expliquer maintenant quelle est la raison et le sens de cette conclusion ; car il n’est pas plus important de bien commencer la Prière que de la bien finir.
Que les. Fidèles sachent donc que nous retirons des fruits nombreux et excellents de l’Oraison Dominicale. Mais le meilleur et le plus agréable de tous c’est l’assurance que nous obtiendrons ce que nous avons demandé. nous avons suffisamment parlé plus haut de cette consolante vérité, mais nous devons ajouter ici que par cette dernière partie de notre Prière, nous n’obtenons pas seulement que nos demandes soient exaucées, nous recueillons encore des avantages si grands et si remarquables, que la parole peut à peine en donner une idée.
Lorsque les hommes conversent avec Dieu par la Prière, dit Saint Cyprien, la Majesté divine se rapproche, d’une manière incompréhensible, de celui qui prie, bien plus que de tous les autres hommes, et elle l’enrichit des dons les plus précieux. On peut comparer celui qui prie avec piété à un homme qui s’approche du feu. Le feu échauffe celui qui a froid ; il fait suer celui qui a déjà chaud: de même ceux qui s’approchent de Dieu par la Prière en deviennent plus ardents, selon la mesure de leur piété et de leur Foi. Leur cœur s’enflamme pour la Gloire de Dieu ; leur esprit est éclairé d’une lumière admirable ; et en outre ils sont comblés des dons célestes. La Sainte Ecriture nous le dit: « Vous l’avez prévenu des bénédictions de votre douceur. » Moïse, cet illustre personnage, en est un exemple des plus remarquables. Au sortir de ses entretiens intimes avec Dieu, son front et son visage resplendissaient d’une lumière si éclatante que les Israélites ne pouvaient pas le regarder. tous ceux qui prient avec cette piété, avec cette sainte ardeur, participent aux effets admirables de la Bonté et de la Majesté de Dieu. « Dés le matin, dit le Prophète, je me présenterai devant Vous, et je verrai que Vous n’êtes pas un Dieu qui aime l’iniquité. »
Plus nous connaissons ces merveilles, plus aussi nous sommes pénétrés d’amour et de respect pour Dieu, plus nous goûtons combien le Seigneur est doux, et combien sont heureux ceux qui espèrent en lui.
A la clarté de cette lumière incomparable qui nous environne, nous commençons à comprendre le néant que nous sommes, devant l’infinie Grandeur et la Majesté de Dieu. nous faisons ce que demande Saint Augustin: « Seigneur, faites que je Vous connaisse et que je me connaisse moi-même ! » Dès lors nous avons de nous-mêmes et de nos propres forces une juste défiance, et nous nous confions entièrement en la Bonté de Dieu, ne doutant point qu’Il ne nous reçoive avec une Charité toute paternelle et une admirable tendresse, et qu’il ne nous donne en abondance tout ce qui nous est nécessaire pour la vie et pour le salut. Alors nous rendons à Dieu toutes les actions de grâces dont notre cœur et notre bouche sont capables, heureux d’imiter en cela le saint roi David, qui, après avoir commencé sa Prière par ces mots: « Sauvez-moi de tous ceux qui me persécutent, » finit par ceux-ci: « Je rendrai grâces à Dieu selon sa justice, et je chanterai à l’honneur du nom du Seigneur très Haut. »
Presque toutes les Prières des Saints commencent par la crainte et finissent par l’espérance et la joie. Mais les plus remarquables en ce genre sont celles du Prophète David. Après avoir commencé à prier sous l’empire de la crainte et du trouble, en disant : Combien qui s’élèvent contre moi ! combien qui crient à mon âme: point de salut pour toi en Dieu, bientôt il se rassure, et dans la joie qui l’inonde, il ajoute : Je ne craindrai pas les milliers d’ennemis qui m’environnent. Dans un autre Psaume, après avoir déploré sa misère, nous le voyons plein de confiance en Dieu faire éclater une joie extraordinaire dans l’espérance de la béatitude éternelle. Je m’endormirai, dit-il , et je reposerai dans la paix. Et ce cri: Seigneur, ne me reprenez point dans votre colère, ne me châtiez point dans votre fureur, avec quelle terreur, avec quel effroi n’est-il pas à croire qu’il le prononça ! Mais aussi quelle confiance et quelle joie dans les paroles qui suivent: Retirez-vous de moi, vous tous qui commettez l’iniquité, car le Seigneur a exaucé la voix de mes pleurs ! enfin lorsqu’il avait à redouter la colère et la fureur de Saül, avec quelle humilité n’implorait-il pas le secours de Dieu ! Seigneur, disait-il , sauvez-moi par votre nom, et défendez ma cause par votre Puissance. Puis la confiance et la joie revenant, il ajoute dans le même Psaume: Voilà que Dieu est mon aide, et que le Seigneur est le défenseur de ma vie.
Que celui donc qui, le cœur plein de Foi et d’Espérance, se dispose à prier, se présente devant Dieu son Père avec la confiance ferme qu’il obtiendra ce dont il a besoin.
Or ce mot Amen, qui termine l’Oraison Dominicale, contient en germe toutes les pensées et toutes les considérations que nous venons d’exposer.
D’autre part Notre-Seigneur Jésus-Christ s’en sert si souvent dans l’Evangile, qu’il a plu à l’Esprit-Saint de le conserver dans l’Eglise de Dieu.
Voici donc, en quelque sorte, le sens qui y est attaché: Sachez que vos prières sont exaucées. C’est comme la réponse de Dieu renvoyant gracieusement celui qui priait, en lui accordant ce qu’il demandait.
Cette interprétation a pour elle la coutume constante de l’Eglise. Et en effet, dans le saint Sacrifice de la Messe, lorsqu’elle récite l’Oraison Dominicale, l’Eglise n’a pas laissé le mot amen aux assistants qui doivent simplement dire : mais délivrez-nous du mal ; elle l’a réservé pour le Prêtre qui, étant Médiateur entre Dieu et les hommes, répond au peuple que le Seigneur est apaisé.
Cette règle n’est cependant point commune à toutes les Prières, puisque dans les autres, c’est le peuple qui répond: Amen, elle ne s’applique qu’à l’Oraison Dominicale. Et en voici la raison, c’est que dans toutes les autres Prières, ce mot exprime seulement un assentiment ou un désir, tandis qu’ici il signifie que Dieu exauce les demandes de ceux qui prient.
Il faut dire d’ailleurs que les interprètes traduisent diversement ce mot amen. Les Septante lui ont donné le sens de: ainsi soit-il ! D’autres ont dit: vraiment. Aquila le traduit par fidèlement. Mais il importe peu qu’on l’entende de telle ou telle manière, pourvu que l’on reconnaisse que dans la bouche du Prêtre, à la Messe, il exprime bien l’assurance que ce qu’on a demandé est obtenu. Saint Paul autorise ce sens en disant aux Corinthiens : « Toutes promesses de Dieu ont en Jésus-Christ leur vérité ; et c’est par Lui aussi que nous disons ; Amen à Dieu pour la gloire de notre ministère. »
Ce mot est encore pour nous comme la confirmation de toutes nos demandes. Le fait seul de le prononcer rend plus attentifs ceux qui s’adonnent au saint exercice de la Prière, où il arrive trop souvent, hélas ! que l’esprit est distrait et entraîné par toutes sortes de pensées étrangères.
Enfin, dans cette courte parole nous demandons avec une nouvelle et instante ardeur que tout ce que nous venons de solliciter soit fait, c’est-à-dire accordé.
Ou bien, ou mieux, reconnaissant déjà que nous avons tout obtenu, la présence du secours divin nous pénètre de joie, et nous chantons avec le Prophète : « Voici que Dieu vient à mon aide et que le Seigneur est le défenseur de ma vie. »
Personne en effet n’a le droit de douter que Dieu ne soit touché tout ensemble et du nom de son Fils, et d’une parole qu’Il a si souvent proférée ; puisque ce divin Fils, comme dit Saint Paul , a toujours été exaucé à cause de son respect pour son Père.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
ANNEXES
DEFINITION DE L’IMMACULEE CONCEPTION
Bulle « Inefabilis Deus » Pie IX — 8 décembre 1854
...Pour l’honneur de la sainte et indivisible Trinité, pour l’honneur et la gloire de la Vierge Marie Mère de Dieu, pour l’exaltation de la foi catholique et l’accroissement de la religion chrétienne, par l’autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul, et la nôtre, nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine, qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, dans le premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulières du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu, et qu’ainsi elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles. C’est pourquoi, s’il en était, ce qu’à Dieu ne plaise, qui eussent la présomption d’avoir des sentiments contraires à ce que nous venons de définir, qu’ils sachent très clairement qu’ils se condamnent eux-mêmes par leur propre jugement, qu’ils ont fait naufrage dans la foi et se sont séparés de l’unité de l’Église, et que, de plus, par le fait même, ils encourent les peines portées par le droit s’ils osent manifester par parole, par écrit ou par quelque signe extérieur, ce qu’ils pensent intérieurement.
DEFINITION DE L’INFAILLIBILITE PONTIFICALE
Constitution dogmatique « Pastor aeternus » — 1er concile du Vatican — 18 juillet 1870
C’est pourquoi, nous attachant fidèlement à la tradition reçue dès l’origine de la foi chrétienne, pour la gloire de Dieu notre Sauveur, pour l’exaltation de la religion catholique et le salut des peuples chrétiens, avec l’approbation du saint Concile, nous enseignons et définissons comme un dogme révélé de Dieu: le Pontife romain, lorsqu’il parle ex cathedra, c’est-à-dire lorsque, remplissant sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, en vertu de sa suprême autorité apostolique, qu’une doctrine sur la foi ou les mœurs doit être tenue par toute l’Église, jouit, par l’assistance divine à lui promise en la personne de saint Pierre, de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu que fût pourvue son Église, lorsqu’elle définit la doctrine sur la foi et les mœurs. Par conséquent, ces définitions du Pontife romain sont irréformables par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l’Église.
Si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, avait la présomption de contredire notre définition, qu’il soit anathème.
DEFINITION DE L’ASSOMPTION
Constitution apostolique « Munificentissimus Deus » — Pie XII — 1er novembre 1950
...Après avoir très souvent adressé à Dieu nos supplications, invoqué la lumière de l’Esprit de Vérité, pour la gloire du Dieu tout-puissant qui a répandu sur la Vierge Marie les largesses d’une bienveillance toute particulière, pour l’honneur de son Fils, Roi immortel des siècles et vainqueur du péché et de la mort, pour une plus grande gloire de son auguste Mère et pour la joie et l’exultation de toute l’Église, par l’autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul et par notre propre autorité, nous affirmons, nous déclarons et nous définissons comme un dogme divinement révélé que: l’Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours Vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste.
Par conséquent, si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, osait volontairement mettre en doute ce qui a été défini par nous, qu’il sache qu’il a totalement abandonné la foi divine et catholique.
DEFINITION DE L’IMMACULEE CONCEPTION
Bulle « Inefabilis Deus » Pie IX — 8 décembre 1854
...Pour l’honneur de la sainte et indivisible Trinité, pour l’honneur et la gloire de la Vierge Marie Mère de Dieu, pour l’exaltation de la foi catholique et l’accroissement de la religion chrétienne, par l’autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul, et la nôtre, nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine, qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, dans le premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulières du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu, et qu’ainsi elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles. C’est pourquoi, s’il en était, ce qu’à Dieu ne plaise, qui eussent la présomption d’avoir des sentiments contraires à ce que nous venons de définir, qu’ils sachent très clairement qu’ils se condamnent eux-mêmes par leur propre jugement, qu’ils ont fait naufrage dans la foi et se sont séparés de l’unité de l’Église, et que, de plus, par le fait même, ils encourent les peines portées par le droit s’ils osent manifester par parole, par écrit ou par quelque signe extérieur, ce qu’ils pensent intérieurement.
DEFINITION DE L’INFAILLIBILITE PONTIFICALE
Constitution dogmatique « Pastor aeternus » — 1er concile du Vatican — 18 juillet 1870
C’est pourquoi, nous attachant fidèlement à la tradition reçue dès l’origine de la foi chrétienne, pour la gloire de Dieu notre Sauveur, pour l’exaltation de la religion catholique et le salut des peuples chrétiens, avec l’approbation du saint Concile, nous enseignons et définissons comme un dogme révélé de Dieu: le Pontife romain, lorsqu’il parle ex cathedra, c’est-à-dire lorsque, remplissant sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, en vertu de sa suprême autorité apostolique, qu’une doctrine sur la foi ou les mœurs doit être tenue par toute l’Église, jouit, par l’assistance divine à lui promise en la personne de saint Pierre, de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu que fût pourvue son Église, lorsqu’elle définit la doctrine sur la foi et les mœurs. Par conséquent, ces définitions du Pontife romain sont irréformables par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l’Église.
Si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, avait la présomption de contredire notre définition, qu’il soit anathème.
DEFINITION DE L’ASSOMPTION
Constitution apostolique « Munificentissimus Deus » — Pie XII — 1er novembre 1950
...Après avoir très souvent adressé à Dieu nos supplications, invoqué la lumière de l’Esprit de Vérité, pour la gloire du Dieu tout-puissant qui a répandu sur la Vierge Marie les largesses d’une bienveillance toute particulière, pour l’honneur de son Fils, Roi immortel des siècles et vainqueur du péché et de la mort, pour une plus grande gloire de son auguste Mère et pour la joie et l’exultation de toute l’Église, par l’autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul et par notre propre autorité, nous affirmons, nous déclarons et nous définissons comme un dogme divinement révélé que: l’Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours Vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste.
Par conséquent, si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, osait volontairement mettre en doute ce qui a été défini par nous, qu’il sache qu’il a totalement abandonné la foi divine et catholique.
Re: Catéchisme du Concile de Trente
Parmi les trésors de http://jesusmarie.free.fr/ , on trouve ce bon
catéchisme :
http://jesusmarie.free.fr/catechisme_concile_trente.pdf
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Enfant du Père- Combat avec Sainte Marie
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