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♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Bannie10

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♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Lun 21 Juil 2014 - 19:05

Merci François  Laughing cela m'encourage à continuer
Que le Seigneur vous bénisse

Bonne journée à vous aussi

Fraternellement
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mar 22 Juil 2014 - 6:57

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_55


La mort de Lazare



On a ouvert toutes les portes et toutes les fenêtres de la pièce de Lazare pour lui rendre moins difficile la respiration. Autour de lui, absent, dans le coma — un lourd coma qui ressemble à la mort dont il ne diffère que par le mouvement de la respiration — sont les deux sœurs, Maximin, Marcelle et Noémi, attentifs au plus léger mouvement du mourant.

Chaque fois qu'une contraction de douleur déforme la bouche, et qu'il semble qu'elle s'apprête à parler, ou que les yeux se découvrent par un mouvement des paupières, les deux sœurs se penchent pour saisir une parole, un regard... Mais c'est inutile. Ce ne sont que des actes incoordonnés, indépendants de la volonté et de l'intelligence, qui toutes les deux sont désormais inertes, perdues. Des actes qui viennent de la souffrance de la chair, comme vient d'elle la sueur qui rend brillant le visage du mourant et le tremblement qui par intervalles secoue les doigts squelettiques et en contracte les articulations. Les deux sœurs l'appellent aussi, avec dans leurs voix tout leur amour. Mais le nom et l'amour se heurtent aux barrières de l'insensibilité de l'intelligence et, comme réponse à leur appel, le silence de la tombe.

Noémi, toute en pleurs, continue de mettre contre les pieds, certainement gelés, des briques enveloppées dans des bandes de laine. Marcelle tient dans ses mains une coupe dans laquelle trempe un linge fin dont Marthe se sert pour humecter les lèvres desséchées de son frère. Marie, avec un autre linge, essuie la sueur abondante qui ruisselle du visage squelettique et baigne les mains du mourant. Maximin, appuyé à un chiffonnier élevé et sombre, près du lit du mourant, observe debout, par derrière Marie penchée sur son frère.

Rien d'autre. Un silence absolu, comme s'ils étaient dans une maison vide, dans un lieu désert. Les servantes qui apportent les briques chaudes ont les pieds nus et marchent sans faire de bruit sur le dallage. Elles semblent des apparitions.

Marie dit à un moment donné : "Il me semble que la chaleur revient dans les mains. Regarde, Marthe, ses lèvres sont moins pâles."

"Oui. Même la respiration est plus libre. Je le regarde depuis un moment" observe Maximin.

Marthe se penche et l'appelle doucement mais intensément : "Lazare ! Lazare ! Oh ! Regarde, Marie ! Il a eu comme un sourire et un battement des paupières. Il va mieux, Marie ! Il va mieux ! Quelle heure avons-nous ?"

"Nous avons dépassé d'un moment le crépuscule."

"Ah !" et Marthe se redresse en serrant ses mains sur sa poitrine, en levant les yeux dans un geste visible de muette mais confiante prière. Un sourire éclaire son visage.

Les autres la regardent étonnés et Marie lui dit : "Je ne vois pas pourquoi doit te rendre heureuse le fait d'avoir dépassé le crépuscule..." et elle la scrute, soupçonneuse, anxieuse.

Marthe ne répond pas, mais reprend la pose qu'elle avait avant.

Une servante entre avec des briques qu'elle passe à Noémi.

Marie lui commande : "Apporte deux lampes. La lumière baisse et je veux le voir." La servante sort sans bruit et revient de suite avec deux lampes allumées. Elle en met une sur le chiffonnier, sur lequel s'appuie Maximin, et l'autre sur une table encombrée de bandes et de petites amphores, placée de l'autre côté du lit.

"Oh ! Marie ! Marie ! Regarde ! Il est vraiment moins pâle."

"Et il paraît moins épuisé. Il se ranime !" dit Marcelle.

"Donnez-lui encore une goutte de ce vin aromatisé qu'a préparé Sara. Il lui a fait du bien" suggère Maximin.

Marie prend sur le dessus du chiffonnier une petite amphore au col très fin en forme de bec d'oiseau, et avec précaution elle fait descendre une goutte de vin dans les lèvres entrouvertes.

"Va doucement, Marie. Qu'il n'étouffe pas !" conseille Noémi.

"Oh ! il avale ! Il le cherche ! Regarde, Marthe ! Regarde ! Il tire la langue pour chercher..."

Tous se penchent pour regarder et Noémi l'appelle : "Trésor ! Regarde ta nourrice, âme sainte !" et elle s'avance pour le baiser.

"Regarde ! Regarde, Noémi, il boit ta larme ! Elle est tombée près des lèvres et il l'a sentie, il l'a cherchée et avalée."

"Oh ! ma joie ! Si j'avais mon lait d'autrefois, je te le ferais passer goutte à goutte dans la bouche, mon agnelet, même si je devais m'épuiser le cœur et mourir ensuite !" Je comprends que Noémi, nourrice de Marie, a été aussi la nourrice de Lazare.

"Maîtresses, Nicomède est revenu" dit un serviteur en apparaissant sur le seuil.
"Qu'il vienne ! Qu'il vienne ! Il nous aidera à le ranimer."

"Observez ! Observez ! Il ouvre les yeux, il remue les lèvres" dit Maximin,
"Il me serre les doigts avec ses doigts !" crie Marie et elle se penche pour dire : "Lazare, m'entends-tu ? Qui suis-je ?"

Lazare ouvre réellement les yeux et il regarde : un regard vague, voilé, mais c'est toujours un regard. Il remue les lèvres non sans peine et il dit : "Maman !"

"Je suis Marie. Marie ! Ta sœur !"

"Maman !"

"Il ne te reconnaît pas et il appelle sa mère. Les mourants, c'est toujours ainsi" dit Noémi, le visage baigné de larmes.

"Mais il parle, après si longtemps, il parle. Et c'est déjà beaucoup... Ensuite, il ira mieux. Oh ! mon Seigneur, récompense ta servante !" dit Marthe avec encore ce geste de fervente et confiante prière.

"Mais que t'est-il arrivé ? Peut-être as-tu vu le Maître ? T'est-il apparu ? Dis-le-moi, Marthe ! Tire-moi d'angoisse !" dit Marie.

L'entrée de Nicomède empêche la réponse. Tous s'adressent à lui pour lui raconter comment, après son départ, l'état de Lazare s'était aggravé au point d'être mourant, et qu'on l'avait cru déjà mort, et puis comment, avec des soins, on l'avait fait revenir mais pour la respiration seulement. Et comment depuis peu, après qu'une de leurs femmes avait préparé du vin aromatisé, la chaleur lui était revenue et il avait avalé et cherché à boire et avait aussi ouvert les yeux et parlé...

Ils parlent tous ensemble avec leurs espoirs rallumés qui se heurte à la tranquillité quelque peu sceptique du médecin qui les laisse parler sans dire un mot.

Finalement ils ont terminé et le médecin dit : "C'est bien. Laissez-moi voir." Il les écarte pour s'approcher du lit et en ordonnant d'apporter les lampes et de fermer la fenêtre, parce qu'il veut découvrir le malade. Il se penche sur lui, l'appelle, l'interroge, fait passer la lampe devant le visage de Lazare qui maintenant a les yeux ouverts et semble comme étonné de tout.

Ensuite il le découvre, étudie sa respiration, les battements du cœur, la température et la rigidité des membres... Tous sont anxieux dans l'attente de ce qu'il va dire. Nicomède recouvre le malade, le regarde encore, réfléchit, puis il se retourne pour regarder ceux qui sont là et il dit : "Il est indéniable qu'il a repris de la vigueur. Actuellement il va mieux que quand je l'ai vu, mais ne vous faites pas d'illusion. Ce n'est qu'une rémission. J'en suis tellement certain, comme je l'étais qu'il approche de sa fin que, comme vous le voyez, je suis revenu, après m'être dégagé de toute occupation, pour lui rendre la mort moins pénible pour autant qu'il m'est permis de le faire... ou pour voir le miracle si... Avez-vous pourvu ?"

"Oui, oui, Nicomède" interrompt Marthe, et pour empêcher toute autre parole, elle dit : "Mais n'avais-tu pas dit que... d'ici trois jours... Moi..." Elle pleure.

"Je l'ai dit. Je suis un médecin. Je vis au milieu des agonies et des pleurs. Mais l'habitude de voir des douleurs ne m'a pas encore donné un cœur de pierre. Et aujourd'hui... je vous ai préparées... par un terme suffisamment long... et vague... Mais ma science me disait que la solution était plus rapide et mon cœur mentait pour vous tromper par pitié... Allons ! Soyez courageuses... Sortez... On ne sait jamais jusqu'à quel point les mourants entendent..." Il les pousse dehors, toutes en pleurs, en répétant : "Soyez courageuses ! Soyez courageuses !"

Près du mourant il reste Maximin... Le médecin aussi s'est éloigné pour préparer des médicaments, susceptibles de rendre moins angoissée l'agonie, que dit-il : "Je prévois très douloureuse."

"Fais-le vivre jusqu'à demain. Il va faire nuit. Tu vois, ô Nicomède. Qu'est-ce pour ta science de tenir une vie éveillée pour moins d'un jour ? Fais-le vivre !"

"Domina, je fais ce que je puis. Mais quand la mèche est à bout, il n'y a plus rien pour maintenir la flamme !" répond le médecin et il s'en va.

Le deux sœurs s'embrassent et elles pleurent désolées, et celle qui pleure le plus, maintenant, c'est Marie. L'autre a son espérance au cœur...

La voix de Lazare arrive de la pièce. Forte, impérieuse. Elle les fait tressaillir, inattendue qu'elle est dans tant de langueur. Il les appelle : "Marthe ! Marie ! Où êtes-vous ? Je veux me lever, m'habiller ! Dire au Maître que je suis guéri ! Je dois aller trouver le Maître. Un char ! Tout de suite. Et un cheval rapide. Certainement c'est Lui qui m'a guéri..." Il parle rapidement, en marquant les mots, assis sur son lit, brûlé par la fièvre, cherchant à sauter du lit, empêché de le faire par Maximin qui dit aux femmes qui entrent en courant : "Il délire !"

"Non ! Laissez-le. Le miracle ! Le miracle ! Oh ! Je suis heureuse de l'avoir suscité ! Dès que Jésus a su. Dieu des pères, sois béni et loué pour ta puissance et ton Messie..." Marthe, tombée à genoux, est ivre de joie.

Pendant ce temps Lazare continue, toujours plus pris par la fièvre. Marthe ne comprend pas que c'est la cause de tout : "Il est venu tant de fois me voir malade, il est juste que j'aille le trouver pour Lui dire : "Je suis guéri". Je suis guéri ! Je n'ai plus de douleurs ! Je suis fort. Je veux me lever. Aller. Dieu a voulu éprouver ma résignation, on m'appellera le nouveau Job..." Il prend un ton hiératique en faisant de grands gestes : "Le Seigneur s'émut de la pénitence de Job... et Il lui rendit le double de ce qu'il avait eu. Et le Seigneur bénit les dernières années de Job, plus encore que les premières... et il vécut jusqu'à... ' Mais non, je ne suis pas Job ! J'étais dans les flammes et il m'en a retiré, j'étais dans le ventre du monstre et je suis revenu à la lumière. Je suis donc Jonas, et les trois enfants de Daniel..."

Le médecin survient, appelé par quelqu'un. Il l'observe : "C'est le délire. Je m'y attendais. La corruption du sang brûle le cerveau." Il s'efforce de le recoucher et recommande de le tenir, puis il retourne dehors, à ses décoctions.

Lazare se fâche un peu qu'on le tienne et entre-temps se met à pleurer comme un enfant.

"Il délire vraiment" dit Marie en gémissant.

"Non. Personne ne comprend rien. Vous ne savez pas croire. Mais oui ! Vous ne savez pas... À cette heure, le Maître sait que Lazare est mourant. Oui, je l'ai fait, Marie ! Je l'ai fait sans rien te dire..."

"Ah ! malheureuse ! Tu as détruit le miracle !" crie Marie.

"Mais non ! Tu le vois, il a commencé à aller mieux à l'heure où Jonas a rejoint le Maître. Il délire... Certainement... Il est faible, et il a encore le cerveau obnubilé par la mort qui déjà le tenait. Mais ce n'est pas le délire que le médecin croit. Écoute-le ! Est-ce que ce sont des paroles de délire ?"

En effet Lazare dit : "J'ai incliné ma tête au décret de mort et j'ai goûté combien il est amer de mourir. Et voilà que Dieu s'est dit satisfait de ma résignation et me rend à la vie et à mes sœurs. Je pourrai encore servir le Seigneur et me sanctifier avec Marthe et Marie... Avec Marie ! Qu'est-ce Marie ? Marie c'est le don de Jésus au pauvre Lazare. Il me l'avait dit... Combien de temps depuis lors ! "Votre pardon fera plus que tout. Il m'aidera". Il me l'avait promis : "Elle sera ta joie". Et ce jour que j'étais fâché parce qu'elle avait amené sa honte ici, près du Saint, quelles paroles pour l'inviter au retour ! La Sagesse et la Charité s'étaient unies pour toucher son cœur... Et l'autre jour, qu'il me trouva à m'offrir pour elle, pour sa rédemption ?... Je veux vivre, pour jouir d'elle qui est rachetée ! Je veux louer avec elle le Seigneur ! Fleuves de larmes, affronts, honte, amertume... tout m'a pénétré et a tué ma vie par sa faute... Voici le feu, le feu de la fournaise ! Il revient, avec le souvenir... Marie de Théophile et d'Euchérie, ma sœur : la prostituée. Elle pouvait être reine et elle s'est rendue fange, une fange que même le porc piétine. Et ma mère qui meurt. Et ne plus pouvoir aller parmi les gens sans devoir supporter leurs mépris. À cause d'elle ! Où es-tu, malheureuse ? Le pain te manquait, peut-être, pour que tu te vendes comme tu t'es vendue ? Qu'as-tu sucé au sein de ta nourrice ? Ta mère, que t'a-t-elle enseigné ? L'une la luxure ? L'autre le péché ? Va-t'en ! Déshonneur de notre maison !"

Sa voix est un cri. Il semble fou. Marcelle et Noémi se hâtent de fermer hermétiquement les portes et de descendre les lourds rideaux pour atténuer la résonance, alors que le médecin, revenu dans la pièce, s'efforce inutilement de calmer le délire qui devient de plus en plus furieux.

Marie, jetée à terre comme une loque, sanglote sous l'inexorable accusation du mourant qui continue : "Un, deux, dix amants. L'opprobre d'Israël passait de bras en bras... Sa mère mourait. Elle frémissait dans ses amours obscènes. Bête fauve ! Vampire ! Tu as sucé la vie de ta mère. Tu as détruit notre joie. Marthe sacrifiée à cause de toi. On n'épouse pas la sœur d'une courtisane. Moi... Ah ! moi ! Lazare, cavalier, fils de Théophile... Sur moi crachaient les gamins d'Ophel !! "Voilà le complice d'une adultère et d'une immonde" disaient scribes et pharisiens et ils secouaient leurs vêtements pour marquer qu'ils repoussaient le péché dont j'étais souillé à son contact ! "Voici le pécheur ! Celui qui ne sait pas frapper le coupable est coupable lui aussi" criaient les rabbis quand je montais au Temple, et moi je suais sous le feu des pupilles des prêtres... Le feu. Toi ! Tu vomissais le feu que tu avais en toi car tu es un démon, Marie. Tu es dégoûtante. Tu es l'anathème. Ton feu prenait tous, car il était fait de nombreux feux et il y en avait pour les luxurieux qui paraissaient des poissons pris au tramail, quand tu passais... Pourquoi ne t'ai-je pas tuée ? Je brûlerai dans la Géhenne pour t'avoir laissée vivre en ruinant tant de familles, en donnant du scandale à mille...

Qui dit : "Malheur à celui par qui vient le scandale" ? Qui le dit ? Ah ! le Maître ! Je veux le Maître ! Je le veux ! Pour qu'il me pardonne. Je veux Lui dire que je ne pouvais pas la tuer parce je l'aimais... Marie était le soleil de notre maison... Je veux le Maître ! Pourquoi n'est-il pas ici ? Je ne veux pas vivre ! Mais avoir le pardon du scandale que j'ai donné en laissant vivre le scandale. Je suis déjà dans les flammes. C'est le feu de Marie. Il m'a pris. Il prenait tout le monde. Afin de donner de la luxure pour elle, de la haine pour nous, et brûler ma chair. Au loin ces couvertures, au loin tout ! Je suis dans le feu. Il m'a pris chair et esprit. Je suis perdu à cause d'elle. Maître ! Maître ! Ton pardon ! Il ne vient pas. Il ne peut venir dans la maison de Lazare. C'est une fosse à fumier à cause d'elle. Alors... je veux oublier. Tout. Je ne suis plus Lazare. Donnez-moi du vin. Salomon le dit :

"Donnez du vin à ceux qui ont le cœur déchiré, qu'ils boivent et oublient leur misère et qu'ils ne se rappellent plus leur douleur ". Je ne veux plus me rappeler. Ils disent tous :

"Lazare est riche, c'est l'homme le plus riche de la Judée". Ce n'est pas vrai. Tout n'est que paille. Ce n'est pas or. Et les maisons ? Des nuages. Les vignes, les oasis, les jardins, les oliveraies ? Rien. Tromperie. Je suis Job. Je n'ai plus rien. J'avais une perle. Belle ! De valeur infinie. C'était mon orgueil. Elle s'appelait Marie. Je ne l'ai plus. Je suis pauvre. Le plus pauvre de tous. De tous le plus trompé... Même Jésus m'a trompé. Car il m'avait dit qu'il me l'aurait rendue, et au contraire elle... Où est-elle ? La voilà. On dirait une courtisane païenne, la femme d'Israël, fille d'une sainte ! À demi-nue, ivre, folle... Et autour... les yeux fixés sur le corps nu de ma sœur, la meute de ses amants... Et elle rit d'être admirée et convoitée ainsi. Je veux réparer mon crime. Je veux aller à travers Israël pour dire : "N'allez pas chez ma sœur. Sa maison, c'est le chemin de l'enfer, et il descend dans les abîmes de la mort". Et puis je veux aller la trouver et la piétiner, car il est dit : "Toute femme impudique sera piétinée comme une ordure sur le chemin".

Oh ! Tu as le courage de te montrer à moi qui meurs déshonoré, détruit par toi ? À moi qui ai offert ma vie pour le rachat de ton âme, et sans résultat ? Comment je te voulais, dis-tu ? Comment je te voulais pour ne pas mourir ainsi ? Voici comment je te voulais : comme Suzanne, la chaste. Tu dis qu'ils t'ont tentée ?

Et n'avais-tu pas un frère pour te défendre ? Suzanne, d'elle-même, a répondu : "Il vaut mieux pour moi tomber entre vos mains que de pécher en présence du Seigneur ", et Dieu fit briller sa candeur. Moi, je les aurais dites les paroles contre ceux qui te tentaient et je t'aurais défendue. Mais Toi ! Tu t'en es allée. Judith était veuve, et elle vivait seule dans sa pièce écartée, portant le cilice sur ses côtés et jeûnant, et elle était en grande estime auprès de tous parce qu'elle craignait le Seigneur, et d'elle on chante : "Tu es la gloire de Jérusalem, la joie d'Israël, l'honneur de notre peuple parce que tu as agi virilement et que ton cœur a été fort, parce que tu as aimé la chasteté et qu'après ton mariage tu n'as pas connu d'autre homme. À cause de cela, le Seigneur t'a rendue forte et tu seras bénie éternellement « .

Si Marie avait été comme Judith, le Seigneur m'aurait guéri. Mais il ne l'a pas pu à cause d'elle. C'est pour cela que je n'ai pas demandé de guérir. Une peut y avoir de miracle là où elle est.

Mais mourir, souffrir, ce n'est rien. Dix et dix fois plus, une mort et une mort pour qu'elle se sauve. Oh ! Seigneur Très-Haut ! Toutes les morts ! Toute la douleur ! Mais Marie sauvée ! Jouir d'elle une heure, une seule heure ! D'elle redevenue sainte, pure comme dans son enfance ! Une heure de cette joie ! Me glorifier d'elle, la fleur d'or de ma maison, la gentille gazelle aux doux yeux, le rossignol du soir, l'amoureuse colombe... Je veux le Maître pour Lui dire que je veux cela : Marie ! Marie ! Viens ! Marie ! Quelle douleur a ton frère, Marie ! Mais si tu viens, si tu te rachètes, ma douleur devient douce. Cherchez Marie ! C'est la fin ! Je meurs ! Marie ! Faites de la lumière ! De l'air... Je... J'étouffe... Oh ! quelle chose je ressens !..."

Le médecin fait un geste et dit : "C'est la fin. Après le délire, la torpeur et puis la mort. Mais il peut avoir un réveil de l'intelligence. Approchez-vous, toi surtout. Il en aura de la joie" et, après avoir recouché Lazare, épuisé après tant d'agitation, il va trouver Marie qui n'a pas cessé de pleurer par terre en gémissant : "Faites-le taire !" Il la relève et l'amène au lit.

Lazare a fermé les yeux, mais il doit souffrir atrocement. Ce n'est que frémissement et contraction. Le médecin essaie de le secourir avec des potions... Il se passe ainsi un certain temps.

Lazare ouvre les yeux. Il paraît avoir oublié ce qu'il était auparavant, mais il est conscient. Il sourit à ses sœurs et cherche à prendre leurs mains, à répondre à leurs baisers. Il pâlit mortellement. Il gémit : "J'ai froid..." et il claque des dents en cherchant à se couvrir jusqu'à la bouche. Il gémit : "Nicomède, je ne résiste plus à la souffrance. Les loups m'écharnent les jambes et me dévorent le cœur. Quelle douleur ! Et si l'agonie est ainsi, que sera la mort ?

Comment faire ? Oh ! si j'avais le Maître ici ! Pourquoi ne me l'a-t-on pas amené ? Je serais mort heureux sur son sein..." il pleure.

Marthe regarde Marie sévèrement. Marie comprend son coup d'œil et, encore accablée par le délire de son frère, elle se trouve prise de remords. Elle se penche, agenouillée comme elle l'est contre le lit, pour baiser la main de son frère et elle gémit : "C'est moi la coupable. Marthe voulait le faire depuis deux jours déjà. Mais je n'ai pas voulu, car Lui nous avait dit de ne le prévenir qu'après ta mort. Pardonne-moi ! Toute la douleur de la vie, je te l'ai donnée... Et pourtant je t'ai aimé et je t'aime, frère. Après le Maître, c'est toi que j'aime plus que tous, et Dieu voit que je ne mens pas. Dis-moi que tu m'absous du passé, donne-moi la paix..."

"Domina ! rappelle le médecin. Le malade n'a pas besoin d'émotions."

"C'est vrai... Dis-moi que tu me pardonnes de t'avoir refusé Jésus..."

"Marie ! C'est pour toi que Jésus est venu ici... et c'est pour toi qu'il y vient... car tu as su aimer plus que tous... Tu m'as aimé plus que tous... Une vie... de délices ne m'aurait pas... ne m'aurait pas donné la... joie dont tu m'as fait jouir... Je te bénis... Je te dis... que tu as bien fait... d'obéir à Jésus... Je ne savais pas... Je sais... Je dis... c'est bien... Aidez-moi à mourir !...Noémi... tu étais capable de... me faire dormir... autrefois... Marthe... bénie... ma paix... Maximin... avec Jésus. Aussi... pour moi... Ma part... aux pauvres... à Jésus... pour les pauvres... Et pardonnez... à tous... Ah ! quels spasmes !... De l'air !... De la lumière !... Tout tremble... Vous avez comme une lumière autour de vous et elle m'éblouit quand... je vous regarde... Parlez... fort..." Il a mis sa main gauche sur la tête de Marie, et il a abandonné la droite dans les mains de Marthe. Il halète...

On le soulève avec précaution pour ajouter des oreillers, et Nicomède lui fait prendre encore des gouttes de potion. Sa pauvre tête s'enfonce et retombe dans un abandon mortel. Toute sa vie est dans la respiration. Pourtant il ouvre les yeux et regarde Marie qui soutient sa tête, et il lui sourit en disant : "Maman ! Elle est revenue... Maman ! Parle ! Ta voix.. Tu sais... le secret... de Dieu... Ai-je servi... le Seigneur ?..."

Marie, d'une voix rendue blanche par la peine, murmure : "Le Seigneur te dit : Viens avec Moi, serviteur bon et fidèle, car tu as écouté toutes mes paroles et aimé le Verbe que j'ai envoyé".

"Je n'entends pas ! Plus fort !"

Marie répète plus fort...

"C'est vraiment maman !..." dit Lazare satisfait et il abandonne sa tête sur l'épaule de sa sœur...

Il ne parle plus. Seulement des gémissements et des tremblements spasmodiques, seulement la sueur et le râle. Insensible désormais à la Terre, aux affections, il sombre dans le noir toujours plus absolu de la mort. Les paupières descendent sur les yeux devenus vitreux où brille une dernière larme.

"Nicomède ! Il se laisse aller ! Il se refroidit !..." dit Marie.

"Domina, la mort est un soulagement pour lui."

"Garde-le en vie ! Demain Jésus est certainement ici. Il sera parti tout de suite. Peut-être il a pris le cheval du serviteur ou une autre monture" dit Marthe. Et s'adressant à sa sœur : "Oh ! si tu m'avais laissée l'appeler plus tôt !" Puis au médecin : "Fais-le vivre !" lui impose-t-elle convulsée.

Le médecin ouvre les bras. Il essaie des cordiaux, mais Lazare n'avale plus.

Le râle augmente... augmente... Il est déchirant...

"Oh ! on ne peut plus l'entendre !" gémit Noémi.

"Oui. Il a une longue agonie..." dit le médecin.

Mais il n'a pas encore fini de le dire que, avec une convulsion de toute sa personne qui se cambre et puis s'abandonne, Lazare exhale le dernier soupir.

Les sœurs crient... en voyant ce spasme, en voyant cet abandon. Marie appelle son frère, en le baisant. Marthe s'accroche au médecin qui se penche sur le mort et dit : "Il a expiré.

Désormais il est trop tard pour attendre le miracle. Il n'y a plus à attendre. Trop tard !... Je me retire, dominae. Je n'ai plus de raison de rester. Ne tardez pas pour les funérailles car il est déjà décomposé." Il abaisse les paupières sur les yeux du mort et dit encore en le regardant :

"Malheur ! C'était un homme vertueux et intelligent. Il ne devait pas mourir !" Il s'incline vers les deux sœurs, qu'il salue. "Dominae ! Salve !" et il s'en va.

Les pleurs emplissent la pièce. Marie désormais n'a plus de force et elle se renverse sur le corps de son frère en criant ses remords, en demandant son pardon. Marthe pleure dans les bras de Noémi.

Puis Marie s'écrie : "Tu n'as pas eu foi, ni obéissance. Je l'ai tué une première fois; toi, tu le tues maintenant; moi, par mon péché, toi, par ta désobéissance." Elle est comme folle.

Marthe la soulève, l'embrasse, s'excuse. Maximin, Noémi, Marcelle essaient de les ramener toutes les deux à la raison et à la résignation. Ils y parviennent en rappelant Jésus... La douleur devient plus ordonnée et, pendant que la pièce se remplit de serviteurs en larmes et que pénètrent ceux qui sont chargés de l'ensevelissement, on conduit les deux sœurs autre part pour qu'elles pleurent leur douleur.

Maximin qui les conduit dit : "Il a expiré à la fin du second temps de la nuit."

Et Noémi : "Il faudra l'ensevelir dans la journée de demain, avant le coucher du soleil, car le sabbat arrive. Vous avez dit que le Maître veut de grands honneurs..."

"Oui. Maximin, à toi de t'en occuper. Moi je suis sotte" dit Marthe
.
"Je vais envoyer les serviteurs à ceux qui sont loin et à ceux qui sont proches, et donner des ordres" dit Maximin qui se retire.

Les deux sœurs pleurent embrassées. Elles ne se font plus de reproches mutuels. Elles pleurent. Elles essaient de se réconforter...

Les heures passent. Le mort est préparé dans sa pièce. Une longue forme enveloppée dans des bandes sous le suaire.

"Pourquoi déjà recouvert ainsi ?" s'écrie Marthe, qui en fait des reproches.

"Maîtresse... Son nez était une puanteur et quand on l'a remué, il a rejeté du sang corrompu" dit en s'excusant un vieux serviteur.

Les sœurs pleurent plus fort. Lazare est déjà plus loin sous ces bandes... Un autre pas dans l'éloignement de la mort. Elles le veillent en pleurant jusqu'à l'aube, jusqu'au retour du serviteur d'au-delà du Jourdain. Du serviteur qui reste abasourdi mais qui rapporte de la course qu'il a faite pour apporter la réponse que Jésus vient.

"Il a dit qu'il vient ? Il n'a pas fait de reproches ?" demande Marthe.

"Non, maîtresse. Il a dit : "Je viendrai. Dis-leur que je viendrai, et qu'elles aient foi". Et auparavant il avait dit : "Dis-leur de rester tranquilles. Ce n'est pas une maladie mortelle, mais c'est la gloire de Dieu, pour que sa puissance soit glorifiée en son Fils"

"C'est vraiment ce qu'il a dit ? En es-tu sûr ?" demande Marie.

"Maîtresse, tout le long de la route, j'ai répété les paroles !"

"Va, va. Tu es fatigué. Tu as tout bien fait. Mais il est trop tard, désormais !..." soupire Marthe. Et dès qu'elle reste avec sa sœur, elle éclate bruyamment en sanglots.

"Marthe, pourquoi ?..."

"Oh ! en plus de la mort, c'est la désillusion ! Marie ! Marie ! Tu ne réfléchis pas que cette fois le Maître s'est trompé ? Regarde Lazare. Il est bien mort ! Nous avons espéré au-delà de ce qui est croyable, et cela n'a pas servi. Quand je l'ai fait appeler, j'ai certainement mal fait, Lazare était déjà plus mort que vif. Et notre foi n'a pas eu de résultat et de récompense. Et le Maître nous fait dire que ce n'est pas une maladie mortelle ! Le Maître, alors, n'est plus la Vérité ? Il ne l'est plus... Oh ! Tout ! Tout ! Tout est fini !"

Marie se tord les mains. Elle ne sait que dire. La réalité est la réalité... Mais elle ne parle pas. Elle ne dit pas un mot contre son Jésus. Elle pleure. Elle est vraiment à bout.

Marthe a une idée fixe dans le cœur : celui d'avoir trop tardé : "C'est ta faute, reproche-t-elle. Il voulait éprouver ainsi notre foi. Obéir, oui. Mais désobéir aussi à cause de notre foi, et Lui montrer que nous croyons que Lui seul pouvait et devait faire le miracle. Mon pauvre frère ! Et il l'a tant désiré ! Au moins cela : le voir ! Notre pauvre Lazare ! Pauvre ! Pauvre !"

Et les pleurs se changent en un cri lugubre auquel font écho de l'autre côté de la porte les cris des servantes et des serviteurs, selon les coutumes de l'orient...

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-004.htm
TOME : 8/004




♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Marie_10


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Message par Maud Mer 23 Juil 2014 - 6:58

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_56

L'annonce à Jésus

La nuit commence déjà à tomber. Le serviteur, remontant les bosquets du fleuve, éperonne son cheval qui fume de sueur pour lui faire franchir la dénivellation qui existe en ce point entre le fleuve et le chemin du village. Les flancs de la pauvre bête palpitent à cause de la course rapide et longue. La sueur moire sa robe noire, et l'écume du mors éclabousse son poitrail de taches blanches. Il halète en cambrant son cou et en secouant sa tête.

Le voilà sur le sentier. Il a vite fait de rejoindre la maison. Le serviteur saute à terre, attache le cheval à la haie, et appelle.

De derrière la maison se présente la tête de Pierre et, de sa voix un peu rauque, il demande : "Qui appelle ? Le Maître est fatigué. Cela fait des heures qu'il n'est pas tranquille. Il fait presque nuit. Revenez demain."

"Je ne veux rien du Maître, moi. Je suis en bonne santé et je n'ai qu'un mot à dire."
Pierre s'avance en disant : "Et de la part de qui, si on peut le demander ? Si je ne puis reconnaître à coup sur, je ne fais passer personne, et surtout quelqu'un qui pue Jérusalem comme toi." Il s'est avancé lentement, rendu plus soupçonneux par la beauté du cheval maure richement harnaché, que par l'homme. Mais quand ils sont en face l'un de l'autre, il fait un geste étonné; "Toi ? Mais n'es-tu pas un serviteur de Lazare, toi ?"

Le serviteur ne sait que dire. Sa maîtresse lui a dit de ne parler qu'à Jésus, mais l'apôtre semble bien décidé à ne pas le faire passer. Le nom de Lazare, il le sait, est puissant auprès des apôtres. Il se décide à dire : "Oui, je suis Jonas, serviteur de Lazare. Je dois parler au Maître."

"Lazare est-il mal ? Est-ce lui qui t'envoie ?"

"Il est mal, oui. Mais ne me fais pas perdre de temps. Je dois retourner au plus tôt." Et pour décider Pierre, il dit : "Il y a eu les synhédristes à Béthanie..."

"Les synhédristes !!! Passe ! Passe !" et il ouvre le portail en disant : "Détache le cheval. Nous allons lui donner à boire et de l'herbe, si tu veux."

"J'ai de l'avoine, mais un peu d'herbe ne lui fera pas de mal. De l'eau après; tout de suite, cela lui ferait du mal."

Ils entrent dans la pièce où se trouvent les couchettes et attachent la bête dans un coin pour la garder à l'abri de l'air; le serviteur la couvre avec la couverture qui était attachée à la selle, lui donne de l'avoine et de l'herbe que Pierre a prise je ne sais où. Puis ils reviennent dehors et Pierre conduit le serviteur dans la cuisine et lui donne une tasse de lait chaud qu'il prend dans un petit chaudron qui est près du feu allumé, au lieu de l'eau que le serviteur avait demandée. Pendant que le serviteur boit et se réchauffe auprès du feu, Pierre, qui s'abstient héroïquement de poser des questions, dit : "Le lait vaut mieux que l'eau que tu voulais. Et puisque nous en avons ! Tu as tout fait en une étape ?"

"En une étape et je ferai ainsi au retour."

"Tu vas être fatigué. Et le cheval va tenir le coup ?"

"Je l'espère. Et puis, au retour, je ne galoperai pas comme à l'aller."

"Mais il va faire nuit bientôt. La lune commence déjà à se lever... Comment vas-tu faire au fleuve ?"

"J'espère y arriver avant qu'elle se couche, autrement je resterai dans le bois jusqu'à l'aube. Mais j'arriverai avant."

"Et après ? La route est longue du fleuve à Béthanie, et la lune se couche de bonne heure. Elle est à ses premiers jours."

"J'ai une bonne lanterne, je l'allumerai et j'irai doucement. Si doucement que j'aille, je m'approcherai toujours de la maison."

"Veux-tu du pain et du fromage ? Nous en avons et aussi du poisson. C'est moi qui l'ai péché. Parce qu'aujourd'hui je suis resté ici avec Thomas. Mais maintenant Thomas est allé prendre du pain chez une femme qui nous rend service."

"Non, ne te prive de rien. J'ai mangé en route, mais j'avais soif et besoin aussi de quelque chose de chaud. Maintenant, je suis bien. Mais veux-tu aller voir le Maître ? Est-il ici ?"

"Oui, oui. S'il n'y avait pas été, je te l'aurais dit tout de suite. Il est à côté qui se repose, car il vient tant de gens ici... J'ai même peur que la chose fasse du bruit et vienne à alarmer les pharisiens. Prends encore un peu de lait. D'ailleurs tu devras laisser manger le cheval... et le faire reposer. Ses flancs battaient comme une voile mal tendue..."

"Non. Le lait, vous en avez besoin. Vous êtes si nombreux."

"Oui, mais sauf Jésus qui parle tant qu'il en a la poitrine fatiguée, et les plus âgés, nous qui sommes robustes, nous mangeons des choses qui font travailler les dents. Prends. C'est celui des brebis laissées par le vieillard. Quand nous sommes ici, la femme nous l'apporte, mais si nous en voulons davantage, tous nous en donnent. Ils nous aiment bien ici et ils nous aident. Et... dis-moi un peu : ils étaient si nombreux les synhédristes ?"

"Oh ! presque tous et d'autres avec eux : sadducéens, scribes, pharisiens, juifs de grande fortune, et aussi quelques hérodiens..."

"Et qu'étaient-ils venus faire ces gens à Béthanie ? Est-ce que Joseph et Nicodème y étaient ?"

"Non. Ils étaient venus les jours d'avant, et Manaën aussi était venu. Ceux-ci n'étaient pas de ceux qui aiment le Seigneur."

"Eh ! je le crois ! Il y en a tellement peu au Sanhédrin qui l'aiment ! Mais que voulaient-ils exactement ?"

"Saluer Lazare, ont-ils dit en entrant..."

"Hum ! Quel amour étrange ! Ils l'ont toujours écarté pour tant de raisons !... Bien !... Croyons-le aussi... Ils y sont restés longtemps ?"

"Assez. Et ils sont partis fâchés. Moi je ne sers pas à la maison et donc je ne servais pas aux tables, mais ceux qui étaient à l'intérieur pour servir disent qu'ils ont parlé avec les maîtresses et qu'ils ont voulu voir Lazare. C'est Elchias qui est allé voir Lazare et..."

"La bonne peau !..." murmure Pierre entre ses dents.

"Qu'as-tu dit ?"

"Rien, rien ! Continue. Et il a parlé avec Lazare ?"

"Je crois. Il y est allé avec Marie. Mais ensuite, je ne sais pourquoi... Marie s'est agitée et les serviteurs, prêts à accourir des pièces voisines, disent qu'elle les a chassés comme des chiens..."

"Vive elle ! Ce qu'il faut ! Et elles t'ont envoyé le dire ?"

"Ne me fais pas perdre plus de temps, Simon de Jonas."

"Tu as raison, viens."

Il le conduit à une porte, il frappe. Il dit : "Maître, il y a un serviteur de Lazare. Il veut te parler."

"Entre" dit Jésus.

Pierre ouvre la porte, fait entrer le serviteur, ferme et se retire, méritoirement, près du feu pour mortifier sa curiosité.

Jésus est assis sur le bord de sa couchette dans la petite pièce où il y a à peine de la place pour la couchette et la personne qui l'habite. Ce devait être auparavant un abri pour les vivres car il y a encore des crochets aux murs et des planches sur des chevilles. Jésus regarde en souriant le serviteur qui s'est agenouillé, et il le salue : "La paix soit avec toi." Puis il ajoute : "Quelles nouvelles m'apportes-tu ? Lève-toi et parle."

"Mes maîtresses m'envoient te dire d'y aller tout de suite, car Lazare est très malade et le médecin dit qu'il va mourir. Marthe et Marie t'en supplient et elles m'ont envoyé te dire :

"Viens, car Toi seul peux le guérir."

"Dis-leur de rester tranquilles, ce n'est pas une maladie mortelle, mais c'est la gloire de Dieu pour que sa puissance soit glorifiée en son Fils."

"Mais il est très grave, Maître ! Sa chair est gangrenée, et il ne se nourrit plus. J'ai éreinté le cheval pour arriver plus tôt..."

"Peu importe. C'est comme je dis."

"Mais viendras-tu ?"

"Je viendrai. Dis-leur que je viendrai et qu'elles aient foi. Qu'elles aient foi. Une foi absolue. Tu as compris ? Va. Paix à toi et à celles qui t'envoient. Je te répète : "Qu'elles aient foi absolue. Va."

Le serviteur salue et se retire. Pierre court à sa rencontre : "Tu as eu vite fait de le dire. Je pensais à un long discours..." Il le regarde, le regarde... Le désir de savoir transsude par tous les pores de son visage, mais il se retient...

"Je pars. Veux-tu me donner de l'eau pour le cheval ? Après, je partirai."

"Viens. De l'eau !... Nous avons tout un fleuve pour t'en donner, en plus du puits pour nous" et Pierre, muni d'une lampe, le précède et donne l'eau demandée.

Ils font boire le cheval. Le serviteur soulève la couverture, examine les fers, la sous-ventrière, les rênes, les étriers. Il explique : "Il a tant couru ! Mais tout est en bon état. Adieu, Simon Pierre, et prie pour nous."

Il conduit le cheval dehors, il sort sur la route en le tenant par la bride, met un pied dans l'étrier, va monter en selle. Pierre le retient en lui mettant une main sur le bras et en disant :

"La seule chose que je veux savoir : y a-t-il danger pour Lui à rester ici ? Ont-ils fait cette menace ? Voulaient-ils savoir des deux sœurs où nous étions ? Dis-le, au nom de Dieu !"

"Non, Simon, non. On n'en a pas parlé. C'est pour Lazare qu'ils sont venus... Entre nous on soupçonne que c'était pour voir si le Maître était là et si Lazare était lépreux, car Marthe criait très fort qu'il n'est pas lépreux et elle pleurait... Adieu, Simon, paix à toi."

"Et à toi et à tes maîtresses. Que Dieu t'accompagne dans ton retour à la maison..." Il le regarde partir... disparaître bientôt au bout de la rue, car le serviteur préfère prendre la grande route éclairée par la lumière de la lune plutôt que le sentier obscur du bois le long du fleuve. Il reste pensif, puis il ferme la grille et revient à la maison.

Il va trouver Jésus qui est toujours assis sur sa couchette, les mains appuyées sur le bord et pensif. Mais il se secoue en sentant près de Lui Pierre qui le regarde comme pour l'interroger.

Il sourit.

"Tu souris, Maître ?"

"Je te souris, Simon de Jonas. Assieds-toi près de Moi. Les autres sont-ils revenus ?"

"Non, pas même Thomas. Il aura trouvé à parler."

"C'est bien."

"Bien qu'il parle ? Bien que les autres tardent ? Lui ne parle que trop. Lui est toujours gai ! Et les autres ? Je suis toujours inquiet tant qu'ils ne sont pas de retour. J'ai toujours peur, moi."

"Et de quoi, mon Simon ? Il n'arrive rien de mal pour le moment, crois-le. Mets-toi en paix et imite Thomas qui est toujours gai. Toi, au contraire, tu es très triste depuis quelque temps."

"Je défie quiconque t'aime de ne pas l'être ! Je suis vieux désormais, et je réfléchis plus que les jeunes. Car eux aussi t'aiment, mais ils sont jeunes et réfléchissent moins... Mais s'il te plaît que je sois plus gai, je le serai, je m'efforcerai de l'être. Mais pour pouvoir l'être, donne-moi au moins une raison de l'être. Dis-moi la vérité, mon Seigneur, Je te le demande à genoux (et il glisse en fait à genoux). Que t'a dit le serviteur de Lazare ? Qu'ils te cherchent ? Qu'ils veulent te nuire ? Que..."

Jésus met sa main sur la tête de Pierre : "Mais non, Simon ! Rien de cela. Il est venu me dire que l'état de Lazare s'est beaucoup aggravé, et on n'a parlé que de Lazare."

"Vraiment, vraiment ?"

"Vraiment, Simon. Et j'ai répondu qu'elles aient foi."

"Mais à Béthanie y sont allés ceux du Sanhédrin, tu le sais ?"

"Chose naturelle ! La maison de Lazare est une grande maison, et nos usages comportent que l'on donne ces honneurs à un homme puissant qui meurt. Ne t'agite pas, Simon."

"Mais tu crois vraiment qu'ils n'ont pas profité de cette excuse pour..."

"Pour voir si j'étais là. Eh bien, ils ne m'ont pas trouvé. Allons, ne t'effraie pas ainsi, comme si déjà ils m'avaient pris. Reviens ici, pauvre Simon, qui ne veut absolument pas se persuader que rien ne peut m'arriver de mal jusqu'au moment décrété par Dieu, et que alors... rien ne pourra me défendre du Mal..."

Pierre s'accroche à son cou et Lui ferme la bouche en y posant un baiser et en disant : "Tais-toi ! Tais-toi ! Ne me dis pas ces choses ! Je ne veux pas les entendre !"

Jésus réussit à se dégager assez pour pouvoir parler et il murmure : "Tu ne veux pas les entendre et c'est une erreur ! Mais je t'excuse... Écoute, Simon, Puisque tu étais seul ici, toi et Moi seuls nous devons savoir ce qui est arrivé. Tu m'as compris ?"

"Oui, Maître, je ne parlerai avec aucun des compagnons."

"Que de sacrifices, n'est-ce pas, Simon ?"

"Sacrifices ? Lesquels ? Ici on est bien. Nous avons le nécessaire."

"Sacrifices de ne pas questionner, de ne pas parler, de supporter Judas... d'être loin de ton lac... Mais Dieu te donnera une compensation pour tout."

"Oh ! si c'est de cela que tu veux parler !... Au lieu du lac, j'ai le fleuve et... je m'en contente. Pour Judas... j'ai Toi qui es une large compensation... Et pour les autres choses !... Bagatelles !

Et elles me servent à devenir moins rustre et plus semblable à Toi. Comme je suis heureux d'être ici avec Toi ! Dans tes bras ! Le palais de César ne me paraîtrait pas plus beau que cette maison, si je pouvais rester toujours ainsi, dans tes bras."

"Qu'en sais-tu du palais de César ? L'as-tu vu peut-être ?"

"Non, et je ne le verrai jamais. Mais je n'y tiens pas. Pourtant j'imagine qu'il est grand, beau, rempli de belles choses... et d'ordures, comme Rome toute entière, j'imagine. Je n'y resterais pas même si on me couvrait d'or !"

"Où ? Au palais de César, ou à Rome ?"

"Aux deux endroits. Anathème !"

"Mais c'est justement parce qu'ils sont tels qu'il faut les évangéliser."

"Et que veux-tu faire à Rome ?! Ce n'est qu'un lupanar ! Rien à faire, là-bas, à moins que tu y viennes, Toi. Alors !..."

"J'y irai. Rome est la capitale du monde. Rome une fois conquise, c'est le monde qui est conquis."

"Nous allons à Rome ? Tu te proclames roi, là-bas ! Miséricorde et puissance de Dieu ! Cela c'est un miracle !"

Pierre s'est levé et il reste les bras tendus devant Jésus qui sourit et lui répond : "J'y irai dans la personne de mes apôtres. Vous me la conquerrez et je serai avec vous. Mais à côté il y a quelqu'un. Allons, Pierre."

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-005.htm
TOME : 8/005
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus


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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Jeu 24 Juil 2014 - 7:33

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_57


Aux funérailles de Lazare



Vision du lundi 23 décembre 1946

La nouvelle de la mort de Lazare doit avoir produit l'effet d'un bâton que l'on remue à l'intérieur d'une ruche. Jérusalem toute entière en parle. Notables, marchands, menu peuple, pauvres, gens de la ville, des campagnes voisines, étrangers de passage mais pas tout à fait ignorants de l'endroit, étrangers qui s'y trouvent pour la première fois et qui demandent quel est celui dont la mort occasionne un tel remue-ménage, romains, légionnaires, employés du Temple, lévites et prêtres qui se rassemblent et se quittent continuellement en courant çà et là... Groupes de gens qui en des termes et expressions différents parlent du fait. Certains louent, d'autres pleurent, d'autres se sentent plus mendiants qu'à l'ordinaire maintenant que leur bienfaiteur est mort, quelqu'un gémit : "Je n'aurai plus, jamais plus un maître comme lui", certains énumèrent ses mérites et d'autres mettent en lumière sa richesse et sa parenté, les fonctions et les charges de son père, la beauté et la richesse de sa mère et sa naissance "royale". D'autres, malheureusement, rappellent aussi des souvenirs familiaux sur lesquels il serait beau de laisser tomber un voile surtout quand il s'agit d'un mort qui en a souffert...

Les nouvelles les plus disparates sur la cause de la mort, sur l'emplacement du tombeau, sur l'absence du Christ de la maison de son grand ami et protecteur, justement en cette circonstance, font parler les petits groupes. Et il y a deux opinions qui prévalent : l'une c'est que cela est arrivé, ou plutôt a été provoqué par l'attitude hostile des juifs, synhédristes, pharisiens, et gens de même acabit à l'égard du Maître; l'autre c'est que le Maître, se trouvant en face d'une vraie maladie mortelle, s'est dérobé parce que dans ce cas ses procédés frauduleux n'auraient pas réussi. Même sans être astucieux il est facile de comprendre de quelle source vient cette dernière opinion. Elle heurte un grand nombre de gens qui répliquent : "Es-tu pharisien, toi aussi ? Si oui, attention à toi, car avec nous on ne blasphème pas le Saint ! Vipères maudites, engendrées par des hyènes mariées au Léviathan ! Qui vous paie pour blasphémer le Messie ?" Prises de becs, insultes, quelques coups de poing aussi, et des invectives mordantes aux pharisiens couverts de riches manteaux et aux scribes qui passent avec des airs de dieux sans daigner regarder la plèbe qui vocifère pour et contre eux, pour et contre le Maître, résonnent dans les rues. Et des accusations ! Combien !


Tel dit que Jésus est un faux Maître ! C'est certainement un de ceux qui ont été achetés avec les deniers de ces serpents qui viennent de passer.

"Avec leurs deniers ? Avec les nôtres, dois-tu dire ! C'est pour cela qu'ils nous plument ! Mais où est-il que je veux voir si c'est un de ceux qui hier sont venus me parler..."

"Il s'est enfui, mais vive Dieu ! Ici il faut s'unir et agir. Ils sont trop impudents."

Autre conversation : "Je t'ai entendu et je te connais. Je dirai à qui de droit comment tu parles du Tribunal suprême !"

"J'appartiens au Christ et la bave de démon ne me nuit pas. Dis-le même à Anna et Caïphe, si tu veux, et que cela serve à les rendre plus justes."

Et plus loin; "C'est moi, moi que tu traites de parjure et de blasphémateur parce que je suis le Dieu vivant ? C'est toi le parjure et le blasphémateur qui l'offenses et le persécutes. Je te connais, sais-tu ? Je t'ai vu et entendu. Espion ! Vendu ! Saisissez-vous de lui..." et en attendant, il se met à lui appliquer sur la figure de ces gifles qui font rougir le visage osseux et verdâtre d'un juif.

"Cornélius, Siméon, regardez ! Ils me bousculent" dit un autre plus loin en s'adressant à un groupe de synhédristes.

"Supporte cela pour la foi et ne te souille pas les lèvres et les mains la veille d'un sabbat" répond un de ceux qui sont appelés, sans même se détourner pour regarder le malheureux sur lequel un groupe de gens du peuple exerce une justice sommaire...

Les femmes crient pour rappeler leurs maris, en les suppliant de ne pas se compromettre.

Les légionnaires de patrouille font dégager les rues à coups de hampes et menacent de faire des arrestations et de prendre des sanctions.

La mort de Lazare, le fait principal, donne l'occasion de passer à des faits secondaires qui défoulent la longue tension des cœurs...

Les synhédristes, les anciens, les scribes, les sadducéens, les notables juifs, passent indifférents, sournois, comme si toute cette explosion de petites colères, de vengeances personnelles, de nervosité, ne s'enracinaient pas en eux. Plus les heures passent et plus les passions fermentent et plus les cœurs s'enflamment.

"Eux disent, écoutez un peu, que le Christ ne peut guérir les malades. Moi, j'étais lépreux et maintenant je suis en bonne santé. Les connaissez-vous ? Je ne suis pas de Jérusalem,mais jamais je ne les ai vus parmi les disciples du Christ depuis deux ans."



"Eux ? Fais-moi voir celui du milieu ! Ah ! le scélérat ! C'est lui qui à la dernière lune est venu m'offrir de l'argent au nom du Christ, en disant que Lui prend des hommes en solde pour s'emparer de la Palestine. Et maintenant il dit... mais pourquoi l'as-tu laissé échapper ?"

"Vous avez compris, hein ! Quels malandrins ! Et pour un peu je me laissais prendre ! Il avait raison mon beau-père ! Voilà Joseph l'Ancien avec Jean et Josué. Allons leur demander s'il est vrai que le Maître veut rassembler des armées. Ils sont justes et sont au courant." Ils courent en masse vers les trois synhédristes et leur posent la question.

"Rentrez chez vous, hommes. Dans les rues on pèche et l'on se nuit. Ne vous disputez pas. Ne vous alarmez pas. Occupez-vous de vos affaires et de vos familles. N'écoutez pas ceux qui agitent des illusionnés et ne vous laissez pas illusionner. Le Maître est un maître et non un guerrier. Vous le connaissez et il dit ce qu'il pense. Il ne vous aurait pas envoyé d'autres pour vous dire de le suivre comme guerriers, s'il vous avait voulu tels. Ne faites pas de tort à Lui, à vous, et à votre Patrie. Rentrez chez vous, hommes ! Rentrez chez vous ! Ne faites pas de ce qui est déjà un malheur : la mort d'un juste, une suite de malheurs. Retournez chez vous, et priez pour Lazare qui faisait du bien à tout le monde" dit Joseph d'Arimathie qui doit être très aimé et écouté par le peuple qui le connaît comme juste.

Jean aussi (celui qui était jaloux) dit : "Lui est un homme de paix, pas de guerre. N'écoutez pas les faux disciples. Rappelez-vous comme ils étaient différents les autres qui se disaient Messie. Rappelez-vous, confrontez, et votre justice vous dira que ces incitations à la violence ne peuvent venir de Lui ! À vos maisons ! À vos maisons ! Auprès de vos femmes qui pleurent et de vos enfants apeurés. Il est dit : "Malheurs aux violents et à ceux qui favorisent les rixes".

Un groupe de femmes en larmes aborde les trois synhédristes et l'une d'elles dit : "Les scribes ont menacé mon homme. J'ai peur ! Joseph, parle-leur."

"Je le ferai, mais que ton mari sache se taire. Croyez-vous par ces agitations rendre service au Maître et honorer le mort ? Vous vous trompez. Vous nuisez à l'un et à l'autre" répond Joseph et il les laisse pour aller à la rencontre de Nicodème qui arrive par une rue, suivi de ses serviteurs : "Je n'espérais pas te voir, Nicodème. Moi-même, je ne sais comment j'ai pu. Le serviteur de Lazare est venu après le chant du coq me dire le malheur."



"Et à moi, plus tard. Je suis parti tout de suite. Sais-tu si le Maître est à Béthanie ?"

"Non. Il n'y est pas. Mon intendant de Bézéta y était à l'heure de tierce et il m'a dit qu'il n'y est pas."

"Moi, je ne comprends pas comment... Pour tous le miracle et pas pour lui !" s'écrie Jean.

"C'est peut-être qu'à la maison il a donné déjà plus qu'une guérison : il a racheté Marie et leur a rendu paix et honneur..." dit Joseph.

"Paix et honneur ! Des bons pour les bons, car beaucoup... n'ont pas rendu et ne rendent pas honneur même maintenant que Marie... Vous ne savez pas... Il y a trois jours, Elchias y est allé avec beaucoup d'autres... et ils n'ont pas rendu honneur. Et Marie les a chassés. Ils me l'ont dit, furieux, et je les ai laissés dire pour ne pas dévoiler mon cœur..." dit Josué.

"Et maintenant ils vont aux funérailles ?" demande Nicodème.

"Ils ont eu l'avis et se sont réunis au Temple pour discuter. Oh ! les serviteurs ont dû beaucoup courir ce matin à l'aurore !"

"Pourquoi précipite-t-on ainsi les funérailles ? Tout de suite après sexte !..."

"Parce que Lazare était déjà décomposé quand il est mort. Mon intendant m'a dit que, malgré les résines qui brûlent dans les pièces, et les aromates répandus sur le mort, la puanteur du cadavre se sent dès le portique de la maison. Et puis au couchant le sabbat commence. Il n'était pas possible de faire autrement."

"Et tu dis qu'ils se sont réunis au Temple ? Pourquoi ?"

"Voilà... en réalité, la réunion était déjà fixée pour discuter sur Lazare. Ils veulent dire qu'il était lépreux..." dit Josué.

"Cela non. Lui, tout le premier, se serait isolé pour obéir à la Loi" dit Joseph pour le défendre. Et il ajoute : "J'ai parlé avec le médecin. Il a absolument exclu la lèpre. Il était malade d'une consomption putride."

"Et alors de quoi ont-ils discuté puisque Lazare était déjà mort ?" demande Nicodème.

"Sur la question d'aller ou non aux funérailles après que Marie les ait chassés. Les uns le voulaient, les autres non. Mais ceux qui voulaient y aller étaient les plus nombreux et cela pour trois motifs. Voir si le Maître y est, première raison, commune à tous. Voir s'il fait le miracle, deuxième raison. La troisième : le souvenir des paroles récentes du Maître aux scribes, près du Jourdain, non loin de Jéricho " explique encore Josué.



"Le miracle ! Quel miracle s'il est mort ?" demande Jean avec un haussement d'épaules et il termine en disant : "Toujours les mêmes qui cherchent l'impossible !"

"Le Maître a ressuscité d'autres morts" fait remarquer Joseph.

"C'est vrai. Mais s'il avait voulu le garder vivant, il ne l'aurait pas laissé mourir. La raison que tu as donnée avant est juste. Ils ont déjà eu un miracle."

"Oui. Mais Uziel s'est souvenu, et avec lui Sadoc, d'un défi exprimé il y a plusieurs lunes. Le Christ a dit qu'il prouvera qu'il sait recomposer un corps en décomposition. Et Lazare est tel. Et Sadoc le scribe dit encore que, près du Jourdain, le Rabbi lui a dit, de Lui-même, qu'à la nouvelle lune il verrait s'accomplir la moitié du défi. Celui-ci : d'un corps décomposé qui revit et sans plus de tares ni de maladie. Et ils ont gagné, eux. Si cela arrive, il est certain que c'est parce qu'il y a le Maître. Et aussi si cela arrive, il n'y a plus de doutes à son sujet."

"Pourvu que ce ne soit pas un mal..." murmure Joseph.

"Un mal ? Pourquoi ? Les scribes et les pharisiens se persuaderont..."


"Oh ! Jean ! Mais es-tu donc un étranger pour pouvoir dire cela ? Tu ne connais pas tes concitoyens ? Quand donc la vérité les a-t-elle rendus saints ? Cela ne te dit rien que l'on n'a pas apporté chez moi l'invitation à la réunion ?"

"Ni chez moi non plus. Ils doutent de nous et nous laissent souvent en dehors, dit Nicodème. Et il demande : Gamaliel y était-il ?"

"Il y avait son fils. Et il viendra pour remplacer son père qui est souffrant à Gamala de Judée."

"Et que disait Siméon ?"

"Rien, absolument rien. Il a écouté et s'en est allé. Il y a un moment, il est passé avec des disciples de son père, en allant à Béthanie."

Ils sont presque à la porte qui ouvre sur le chemin de Béthanie et Jean s'écrie : "Regarde ! Elle est gardée. Pourquoi donc ? Et ils arrêtent ceux qui sortent."

"Il y a de l'agitation dans la ville..."

"Oh ! Elle n'est pas pourtant des plus fortes..."

Ils arrivent à la porte et sont arrêtés comme tous les autres.

"Pour quelle raison, soldat ? Je suis connu de toute l'Antonia, et vous ne pouvez dire du mal de moi. Je vous respecte et je respecte vos lois" dit Joseph d'Arimathie.

"Ordre du Centurion. Le Chef va entrer dans la ville et nous voulons savoir qui sort par les portes et spécialement par celle-ci qui donne sur la route de Jéricho. Nous te connaissons, mais nous connaissons vos sentiments pour nous. Toi et les tiens passez, et si vous avez de l'influence sur le peuple, dites-leur qu'il est bien pour eux de rester tranquilles. Ponce n'aime pas changer ses habitudes pour des sujets qui lui portent ombrage... et il pourrait être trop sévère. Un conseil loyal pour toi qui es loyal." Ils passent...

"Tu entends ? Je prévois de lourdes journées... Il faudra le conseiller aux autres plutôt qu'au peuple..." dit Joseph.

La route pour Béthanie est remplie de gens qui vont tous dans la même direction, à Béthanie. Tous se rendent aux funérailles. On voit des synhédristes et des pharisiens mêlés à des sadducéens et des scribes, et ceux-ci à des paysans, des serviteurs, des intendants des différentes maisons et des domaines que Lazare possède dans la ville et dans les campagnes, et plus on approche de Béthanie, plus il y a de gens qui débouchent des sentiers et des chemins dans la route principale.

Voici Béthanie. Béthanie en deuil de son plus grand citoyen. Tous les habitants avec leurs meilleurs habits sont déjà en dehors des maisons qui sont fermées comme s'il n'y avait personne à l'intérieur. Mais ils ne sont pas encore dans la maison du mort. La curiosité les retient près de la grille, le long du chemin. Ils observent ceux qui passent parmi les invités et ils échangent les noms et les impressions.

"Voici Nathanaël ben Faba. Oh ! le vieux Mathatias, parent de Jacob ! Le fils d'Anna ! Regarde-le avec Doras, Callascebona et Archélaüs. Oh ! comment ont-ils fait pour venir ceux de Galilée ? Ils y sont tous. Regarde : Éli, Giocana, Ismaël, Urie, Joachim, Élie, Joseph... Le vieux Canania avec Sadoc, Zacharie et Giocana sadducéens. Il y a aussi Siméon de Gamaliel, seul. Le rabbi n'est pas avec lui. Voilà Elchias avec Nahum, Félix, Anna le scribe, Zacharie,Jonathas d'Uriel ! Saül avec Éléazar, Trifon et Joazar. Bons, ces derniers ! Un autre des fils d'Anna, le plus jeune. Il parle avec Simon Camit. Philippe avec Jean l'Antipatrides. Alexandre,Isaac et Jonas de Babaon. Sadoc. Jude, descendant des Assidéens, le dernier, je crois de cette classe. Voici les intendants des divers palais. Je ne vois pas les amis fidèles. Que de gens !".

Vraiment ! Que de gens. Tous importants, une partie avec un visage de circonstance, ou avec sur le visage les marques d'une vraie douleur. Le portail tout grand ouvert engloutit tout le monde, et je vois passer tous ceux qu'à diverses reprises j'ai vus bienveillants ou hostiles autour du Maître. Tous, sauf Gamaliel et le synhédriste Simon. Et j'en vois d'autres encore que je n'ai jamais vus ou que j'aurai vus sans savoir leurs noms dans les discussions autour de Jésus... Il passe des rabbins avec leurs disciples, et des scribes en groupes compacts. Il passe des juifs dont j'entends énumérer les richesses... Le jardin est plein de gens. Ils vont exprimer leurs condoléances aux sœurs — qui selon l'usage, sans doute, sont assises sous le portique et donc en dehors de la maison — et se répandent ensuite dans le jardin en un continuel bariolage de couleurs et en de continuelles inclinaisons.

Marthe et Marie sont bouleversées. Elles se tiennent par la main comme deux fillettes effrayées du vide qui s'est fait dans leur maison, du rien qui emplit leur journée maintenant qu'elles n'ont plus Lazare à soigner. Elles écoutent les paroles des visiteurs, pleurent avec les vrais amis, leurs employés fidèles, s'inclinent devant les synhédristes à l'air glacial, imposants, rigides, venus plutôt pour se faire voir que pour honorer le défunt. Elles répondent, lasses de répéter les mêmes choses des centaines de fois, à ceux qui les interrogent sur les derniers moments de Lazare.

Joseph, Nicodème, les amis les plus sûrs, se mettent à côté d'elles, sobres en paroles, mais manifestant une amitié plus réconfortante que de longs discours.

Elchias revient avec les plus intransigeants avec lesquels il a parlé longuement et il demande : "Ne pourrions-nous pas voir le mort ?"

Marthe, avec tristesse, se passe la main sur le front et demande : "Quand donc cela se fait-il en Israël ? Il est déjà préparé..." et des larmes descendent lentement de ses yeux.

"Ce n'est pas l'usage, c'est vrai, mais nous le désirerions. Les amis les plus fidèles ont bien le droit de voir une dernière fois l'ami."

"Même nous, ses sœurs, nous aurions eu ce droit. Mais il a été nécessaire de l'embaumer tout de suite... Et quand nous sommes revenues dans la chambre de Lazare nous n'avons plus vu que sa forme enveloppée par les bandelettes..."

"Vous deviez donner des ordres clairs. Ne pouviez-vous pas, ne pourriez-vous pas enlever le suaire de son le visage ?"

"Oh ! il est déjà décomposé... Et l'heure des funérailles est arrivée."


Joseph intervient : "Elchias, il me semble que nous... par excès d'amour, nous leur faisons de la peine. Laissons les sœurs en paix..."

Siméon, fils de Gamaliel, s'avance, empêchant la réponse d'Elchias : "Mon père viendra dès qu'il le pourra. Je le représente. Il appréciait Lazare, et moi de même."

Marthe s'incline en répondant; "Que l'honneur du rabbi pour notre frère soit récompensé par Dieu."

Elchias, à cause du fils de Gamaliel, s'écarte sans insister davantage et il discute avec les autres qui lui font observer : "Mais tu ne sens pas la puanteur ? Tu veux douter ? Du reste, nous verrons s'ils murent le tombeau. On ne vit pas sans air."

Un autre groupe de pharisiens s'approche des sœurs. Ce sont presque tous ceux de Galilée. Marthe, après avoir reçu leurs hommages, ne peut s'empêcher de dire son étonnement de leur présence.

"Femme, le Sanhédrin siège en des délibérations d'une extrême importance et c'est pour cela que nous sommes dans la ville" explique Simon de Capharnaüm et il regarde Marie dont il se rappelle certainement la conversion, mais il se borne à la regarder.

Voici que s'avancent Giocana, Doras fils de Doras et Ismaël avec Canania et Sadoc et d'autres que je ne connais pas. Ils parlent, bien avant de parler, par leurs visages de vipères. Mais ils attendent que Joseph s'éloigne avec Nicodème pour parler à trois juifs, pour pouvoir blesser. C'est le vieux Canania qui de sa voix éraillée de vieillard croulant commence l'attaque : "Qu'en dis-tu, Marie ? Votre Maître est le seul absent des nombreux amis de ton frère. Singulière amitié ! Tant d'amour tant que Lazare se portait bien ! Et de l'indifférence quand c'était le moment de l'aimer ! Tous ont des miracles de Lui, mais ici, il n'y a pas de miracle. Qu'en dis-tu, femme, de pareille chose ? Il t'a trompée beaucoup, beaucoup, le beau Rabbi galiléen. Eh ! Eh ! Ne disais-tu pas qu'il t'avait dit d'espérer au-delà de ce que l'on peut espérer ? Tu n'as donc pas espéré, ou bien il ne sert à rien d'espérer en Lui ? Tu espérais dans la Vie, as-tu dit. C'est vrai ! Lui se dit "la Vie" eh ! eh ! Mais là-dedans se trouve ton frère mort, et là-bas est déjà ouverte la bouche du tombeau. Et pas de Rabbi ! Eh ! Eh !"

"Lui sait donner la mort, pas la vie" dit Doras avec un sourire.

Marthe incline son visage dans ses mains et pleure. C’est bien la réalité. Son espérance est bien déçue. Le Rabbi n'est pas là. Il n'est même pas venu les réconforter. Et pourtant il aurait pu être là maintenant. Marthe pleure, elle ne sait plus que pleurer.


Marie aussi pleure. Elle aussi est en face de la réalité. Elle a cru, elle a espéré au-delà de ce qui est croyable... mais rien n'est arrivé et déjà les serviteurs enlèvent la pierre de l'entrée du tombeau car le soleil commence à descendre, et le soleil descend vite en hiver, et c'est vendredi, et tout doit être fait à temps de façon que les hôtes ne doivent pas transgresser les lois du sabbat qui va bientôt commencer. Elle a tant espéré, toujours, trop espéré. Elle a consumé ses puissances dans cette espérance. Et elle est déçue.

Canania insiste : "Tu ne me réponds pas ? Es-tu convaincue à présent que Lui est un imposteur qui vous a exploitées et méprisées ? Pauvres femmes !" et il hoche la tête parmi ses comparses qui l'imitent, en disant eux aussi : "Pauvres femmes !"

Maximin s'approche : "C'est l'heure. Donnez l'ordre. C'est à vous de le faire."

Marthe s'écroule. On la secourt et on l'emporte à bras au milieu des cris des serviteurs qui comprennent que l'heure est venue de la descente dans le tombeau et qui entonnent les lamentations.

Marie se tord convulsivement les mains. Elle supplie : "Encore un peu ! Encore un peu ! Envoyez des serviteurs sur la route vers Ensémès et la fontaine, sur toutes les routes. Des serviteurs à cheval. Qu'ils voient s'il vient..."

"Mais, tu espères encore, ô malheureuse ? Mais que te faut-il pour te persuader qu'il vous a trahies et trompées ? Il vous a haïes et méprisées..."

C'en est trop ! Le visage baigné de larmes, torturée et pourtant fidèle, dans le demi-cercle de tous les hôtes rassemblés pour voir sortir la dépouille, Marie proclame : "Si Jésus de Nazareth a ainsi agi, c'est bien, et c'est un grand amour que le sien pour nous tous de Béthanie. Tout pour la gloire de Dieu et la sienne ! Il a dit que de cela il en viendra de la gloire pour le Seigneur parce que la puissance de son Verbe resplendira complètement. Exécute, Maximin. Le tombeau n'est pas un obstacle au pouvoir de Dieu..."

Elle s'écarte, soutenue par Noémi qui est accourue, et elle fait un signe... La dépouille, dans ses bandelettes, sort de la maison, traverse le jardin entre deux haies de gens, au milieu des cris de deuil. Marie voudrait la suivre, mais elle chancelle. Elle se joint quand déjà tous sont vers le tombeau. Elle arrive juste pour voir disparaître la longue forme immobile dans la nuit du tombeau où rougissent les torches que tiennent haut les serviteurs pour éclairer les marches pour ceux qui descendent avec le mort. En effet le tombeau de Lazare est plutôt enterré, peut-être pour utiliser des couches de roches souterraines.


Marie crie... Elle est déchirée... Elle crie... Et avec le nom de son frère il y a celui de Jésus. Ils semblent lui arracher le cœur. Mais elle ne dit que ces deux noms, et elle les répète jusqu'au moment où la lourde rumeur de la fermeture, remise à l'entrée de la tombe, lui dit que Lazare n'est plus sur la terre même avec son corps. Alors elle cède et perd complètement connaissance. Elle s'abat sur celle qui la soutient et soupire encore, pendant qu'elle s'abîme et s'anéantit dans son évanouissement : "Jésus ! Jésus !" On l'éloigne.

Maximin reste pour congédier les hôtes et les remercier au nom de toute la parenté. Il reste pour s'entendre dire par tous qu'ils reviendront chaque jour pour le deuil...

La foule s'écoule lentement. Les derniers à partir sont Joseph, Nicodème, Eléazar, Jean, Joachim, Josué. Au portail ils trouvent Sadoc avec Uriel qui rient méchamment en disant : "Son défi ! Et nous l'avons craint !"

"Oh ! Il est bien mort. Comme il puait malgré les aromates ! Il n'y a pas de doute, non ! Il n'y avait pas besoin d'enlever le suaire. Je crois qu'il y avait déjà les vers." Ils sont heureux.

Joseph les regarde. Un regard si sévère qu'il leur coupe la parole et les rires. Tout le monde se hâte de repartir pour être dans la ville avant la fin du crépuscule.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-006.htm
Tome : 8 /006



♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Funera10
Funérailles de Lazare
Maud
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Ven 25 Juil 2014 - 7:37

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_58

'Allons trouver notre ami Lazare qui dort'

La lumière, ce n'est déjà plus de la lumière dans le petit jardin de la maison de Salomon. Les arbres, les contours des maisons au-delà de la route, et surtout le bout de la route elle-même, là où le petit chemin disparaît dans les bois qui bordent le fleuve, perdent de plus en plus la netteté de leurs contours pour s'unir dans une seule ligne d'ombres plus ou moins claires, plus ou moins sombres, dans l'ombre qui s'épaissit de plus en plus. Plutôt que des couleurs les choses répandues sur la terre sont désormais des sons. Voix d'enfants dans les maisons, appels des mères, cris des hommes pour faire rentrer les brebis ou l'âne, quelques derniers grincements de poulies aux puits, bruissement des feuilles dans le vent du soir, bruits secs comme de petites branches qui se heurtent entre elles, des broussins répandus dans les bosquets. Là-haut la première palpitation des étoiles, encore indécise parce qu'il reste un semblant de lumière et que les premiers rayons phosphorescents de la lune commencent à se répandre dans le ciel.

"Le reste, vous le direz demain. Pour l'instant cela suffit. Il fait nuit. Et que chacun aille à la maison. La paix à vous. La paix à vous. Oui... Oui... Demain. Eh ? Que dis-tu ? Tu as un scrupule ? La nuit porte conseil, et puis s'il ne passe pas, tu viendras. Il ne manquerait plus que cela ! Les scrupules aussi pour le fatiguer davantage ! Et ceux qui ne rêvent que de profit ! Et les belles-mères qui veulent rendre sages les épouses, et les épouses qui veulent rendre les belles-mères moins acariâtres, et des unes et des autres, toutes les deux mériteraient d'avoir la langue coupée. Et à part cela ? Toi ? Que dis-tu ? Oh ! oui, ce pauvre petit ! Jean, conduis-le au Maître. Il a sa mère malade et elle l'envoie dire à Jésus qu'il prie pour elle.

Pauvre petit ! Il est resté en arrière à cause de sa petite taille, et il vient de loin. Comment va-t-il faire pour retourner à la maison ? Hé ! vous tous ! Au lieu de rester ici pour jouir de Lui, ne pourriez-vous pas mettre en pratique ce que le Maître vous a dit : de vous aider mutuellement et que les plus forts aident les plus faibles ? Allons ! Qui accompagne l'enfant à la maison ? Il pourrait, que Dieu ne le veuille pas, trouver morte sa mère... Qu'au moins il la voie. Vous avez des ânes... Il fait nuit ? Et quoi de plus beau que la nuit ? Moi, j'ai travaillé pendant des lustres à la lueur des étoiles, et je suis sain et robuste. Tu le conduis à la maison ? Dieu te bénisse,Ruben. Voici l'enfant. Le Maître t'a-t-il consolé ? Oui. Alors va et sois heureux. Mais il faudra lui donner à manger. C'est peut-être depuis ce matin qu'il ne mange pas."

"Le Maître lui a donné du lait chaud, du pain et des fruits. Il les a dans sa tunicelle" dit Jean.
"Alors, va avec cet homme. Il va te conduire à la maison avec l'âne."

Finalement les gens sont tous partis, et Pierre peut se reposer avec Jacques, Jude, l'autreJacques et Thomas, qui l'ont aidé à renvoyer chez eux les plus obstinés.

"Fermons. Pourvu qu'il n'y ait pas quelqu'un qui regrette et revienne sur ses pas, comme cesdeux-là. Ouf ! Mais le lendemain du sabbat est bien fatigant !" dit encore Pierre en entrant dans la cuisine et en fermant la porte. "Oh ! maintenant, nous allons être tranquilles." Il regarde Jésus qui est assis près de la table, sur laquelle il appuie son coude et de sa main il soutient sa tête, pensif, absorbé. Il va près de Lui, Lui met la main sur l'épaule et Lui dit : "Tu es fatigué, hein ! Tant de gens ! Ils viennent de tous les endroits malgré la saison."

"Ils semblent avoir peur de nous perdre bientôt" remarque André qui est en train d'éventrer des poissons. Les autres aussi s'emploient à faire du feu et à le préparer pour griller les poissons, ou à remuer des chicorées dans un chaudron qui bout. Leurs ombres se projettent sur les murs sombres, éclairés plutôt par le feu que par la lampe.

Pierre cherche une tasse pour donner du lait à Jésus qui semble très fatigué. Mais il ne trouve pas le lait et en demande aux autres la raison.

"C'est l'enfant qui a bu le dernier lait que nous avions. Le reste a été donné à ce vieux mendiant et à la femme du mari infirme" explique Barthélemy.

"Et le Maître est resté sans rien ! Vous ne deviez pas tout donner."

"C'est Lui qui l'a voulu..."

"Oh ! Lui veut toujours ainsi, mais on ne doit pas le laisser faire. Lui donne ses vêtements, Lui donne son lait, il se donne Lui-même et se consume..." Pierre est mécontent.

"Du calme, Pierre ! Il vaut mieux donner que recevoir" dit Jésus tranquillement en sortant de son abstraction.

"Oui ! Et tu donnes, tu donnes et tu te consumes. Et plus tu te fais voir disposé à toutes les générosités et plus les hommes en profitent." Et, tout en parlant, avec des feuilles rêches qui dégagent une odeur mélangée d'amandes amères et de chrysanthèmes, il frotte la table, la rend bien nette pour y déposer le pain, l'eau, et il met une coupe devant Jésus.

Jésus se verse tout de suite à boire comme s'il avait grand soif. Pierre met une autre coupe de l'autre côté de la table près d'un plat qui contient des olives et des tiges de fenouil sauvage. Il ajoute le plateau de chicorées que Philippe a déjà assaisonnées et, avec ses compagnons, il apporte des tabourets très primitifs pour les ajouter aux quatre sièges qui sont dans la cuisine, qui ne suffisent pas pour treize personnes. André, qui a surveillé la cuisson du poisson grillé sur la braise, met le poisson sur un autre plat et va vers la table avec d'autres pains. Jean enlève la lampe de l'endroit où elle était et la place au milieu de la table.

Jésus se lève alors que tous s'approchent de la table pour le souper et il prie à haute voix pour offrir le pain et puis il bénit la table. Il s'assoit, imité par les autres, et distribue le pain et les poissons, ou plutôt il dépose les poissons sur les tranches épaisses et larges de pain, en partie frais, en partie rassis, que chacun a placé devant soi. Puis les apôtres se servent de la chicorée avec la grande fourchette de bois qui sert à la piquer. Même pour les légumes, le pain sert de plat. Seul Jésus a devant Lui un plat de métal, large et en assez mauvais état, et il s'en sert pour partager le poisson, en donnant tantôt à l'un tantôt à l'autre un excellent morceau. On dirait un père parmi ses enfants, toujours père même si Nathanaël, Simon le Zélote et Philippe semblent un père pour Lui, tandis que Matthieu et Pierre peuvent paraître ses frères aînés.

Ils mangent et parlent des événements du jour. Jean rit de bon cœur à cause de l'indignation de Pierre pour ce berger des monts de Galaad, qui prétendait que Jésus aille là-haut où était son troupeau pour le bénir et lui faire gagner beaucoup d'argent pour faire une dot à sa fille.

"Il n'y a pas de quoi rire. Tant qu'il a dit : "J'ai des brebis malades et si elles meurent, je suis ruiné" j'ai eu pitié de lui. C'est comme si pour nous pêcheurs, la barque devenait vermoulue. On ne peut pêcher ni manger, et tout le monde a le droit de manger. Mais quand il a dit :"Et je les veux saines car je veux devenir riche et étonner le village avec la dot que je ferai à Estheret la maison que je me construirai", alors je suis devenu mauvais.

Je lui ai dit :"Et c'est pour cela que tu as fait une si longue route ? Tu ne penses qu'à la dot et à la richesse et à tes brebis ? Tu n'as pas une âme ?" Il m'a répondu :"Pour elle, j'ai le temps. Pour l'instant je me préoccupe davantage des brebis et des noces car c'est un bon parti pour Esther, et elle commence à vieillir". Alors, voilà, si ce n'était que je me rappelais que Jésus dit que l'on doit être miséricordieux avec tout le monde, il était frais ! Je lui ai parlé vraiment entre tramontane et sirocco..."

"Et il semblait que tu n'allais plus en finir. Tu ne prenais pas le temps de souffler. Les veines de ton cou s'étaient gonflées et tendues comme deux baguettes" dit Jacques de Zébédée.

"Le berger était parti depuis un bon moment et toi, tu continuais de prêcher. Heureusement que tu dis que tu ne sais pas parler aux gens !" ajoute Thomas, et il l'embrasse en disant;

"Pauvre Simon ! Quelle grosse colère tu as prise !"

"Mais n'avais-je pas raison, peut-être ? Qu'est-il le Maître ? Le faiseur de fortunes de tous les sots d'Israël ? Le paranymphe des mariages d'autrui, peut-être ?"

"Ne te fâche pas, Simon. Le poisson va te faire mal si tu le manges avec ce poison" plaisante Matthieu, débonnaire.

"Tu as raison. Je sens en tout la saveur qu'ont les banquets dans les maisons des pharisiens quand je mange mon pain avec crainte et la viande avec colère."

Tout le monde rit. Jésus sourit et se tait.

Ils sont à la fin du repas. Repus de nourriture et contents de la chaleur, ils restent un peu somnolents autour de la table. Ils parlent moins aussi, quelques-uns sommeillent. Thomas s'amuse à dessiner avec son couteau une branche fleurie sur le bois de la table.

Ils sont réveillés par la voix de Jésus qui desserrant les bras qu'il tenait croisés sur le bord de la table et présentant les mains comme fait le prêtre quand il dit : "Dominus vobiscum", dit : "Et pourtant, il faut partir !"

"Où, Maître ? Chez l'homme aux brebis ?" demande Pierre.

"Non, Simon, Chez Lazare. Nous retournons en Judée."

"Maître, rappelle-toi que les juifs te haïssent !" s'écrie Pierre.

"Ils voulaient te lapider, il n'y a pas si longtemps" dit Jacques d'Alphée.

"Mais, Maître, c'est une imprudence !" s'écrie Matthieu.

"Tu ne te soucies pas de nous ?" demande l’Iscariote.

"Oh ! mon Maître et frère, je t'en conjure au nom de ta Mère, et au nom aussi de la Divinité qui est en Toi : ne permets pas que les satans mettent la main sur ta personne pour étouffer ta parole. Tu es seul, trop seul, contre tout un monde qui te hait et qui sur la Terre est puissant" dit le Thaddée.

"Maître, protège ta vie ! Qu'adviendrait-il de nous, de tous, si nous ne t'avions plus ?" Jean, bouleversé, le regarde avec les yeux dilatés d'un enfant effrayé et affligé.

Pierre, après sa première exclamation, s'est tourné pour parler avec animation avec les plus âgés et avec Thomas et Jacques de Zébédée. Ils sont tous de l'avis que Jésus ne doit pas retourner près de Jérusalem, au moins tant que le temps pascal ne rend pas plus sûr son séjour là-bas car, disent-ils, la présence d'un très grand nombre de fidèles du Maître, venus pour les fêtes pascales de tous les points de la Palestine, sera une défense pour le Maître. Personne de ceux qui le haïssent n'osera le toucher quand tout un peuple sera serré affectueusement autour de Lui... Et ils le Lui disent, avec angoisse, le Lui imposant presque... L'amour les fait parler.

"Paix ! Paix ! La journée n'est-elle pas peut-être de douze heures ? Si quelqu'un marche de jour, il ne trébuche pas car il voit la lumière de ce monde; mais s'il marche de nuit, il trébuche, car il n'y voit pas. Je sais ce que je me fais car j'ai la Lumière en Moi. Vous, laissez-vous guider par celui qui voit. Et puis sachez que tant que ce n'est pas l'heure des ténèbres, rien de ténébreux ne pourra arriver. Quand ensuite ce sera cette heure, aucun éloignement ni aucune force, même pas les armées de César, ne pourront me sauver des juifs. Car ce qui est écrit doit arriver et les forces du mal travaillent déjà en secret pour accomplir leur œuvre. Laissez-moi donc faire, et faire du bien tant que je suis libre de le faire.

L'heure viendra où je ne pourrai remuer un doigt ni dire une parole pour opérer le miracle. Le monde sera vide de ma force. Heure redoutable de châtiment pour l'homme. Pas pour Moi. Pour l'homme qui n'aura pas voulu m'aimer. Heure qui se répétera, par la volonté de l'homme qui aura repoussé la Divinité jusqu'à faire de lui-même un sans Dieu, un disciple de Satan et de son fils maudit. Heure qui viendra quand sera proche la fin de ce monde. La non-foi devenue maîtresse souveraine rendra nulle ma puissance de miracle. Ce n'est pas que je puisse la perdre, mais c'est que le miracle ne peut être accordé là où il n'y a pas de foi ni de désir de l'obtenir, là où on ferait du miracle un objet de mépris et un instrument au service du mal, en se servant du bien obtenu pour faire un plus grand mal. Maintenant je puis encore faire le miracle, et le faire pour donner gloire à Dieu. Allons donc chez notre ami Lazare qui dort. Allons l'éveiller de ce sommeil afin qu'il soit frais et dispos pour servir son Maître."

"Mais, s'il dort, c'est bien. Il va finir de guérir. Le sommeil est déjà un remède. Pourquoi l'éveiller ?" Lui fait-on remarquer.

"Lazare est mort. J'ai attendu qu'il soit mort pour aller là-bas, pas à cause de ses sœurs ni de lui, mais à cause de vous pour que vous croyez, pour que votre foi grandisse. Allons chez Lazare."

"Bon. Allons-y ! Nous mourrons comme il est mort et comme tu veux mourir" dit Thomas en fataliste résigné.

"Thomas, Thomas, et vous tous qui intérieurement critiquez et grommelez, sachez que celui qui veut me suivre doit avoir pour sa vie le même souci qu'a l'oiseau pour la nuée qui passe. La laisser passer comme le vent l'entraîne. Le vent, c'est la volonté de Dieu qui peut vous donner ou vous enlever la vie comme il Lui plaît, sans que vous ayez à vous en plaindre,comme l'oiseau ne se plaint pas de la nuée qui passe, mais chante quand même, sûr qu'ensuite reviendra le beau temps. Car la nuée c'est l'incident. Le ciel c'est la réalité. Le ciel reste toujours bleu même si les nuées semblent le rendre gris. Il est et reste bleu au-delà des nuages. Il en est ainsi de la Vie véritable.

Elle est et demeure, même si tombe la vie humaine. Celui qui veut me suivre ne doit pas connaître l'angoisse de la vie ni la peur pour sa vie. Je vous montrerai comment on conquiert le Ciel. Mais comment pourrez-vous m'imiter si vous avez peur de venir en Judée, vous à qui il ne sera rien fait de mal présentement ? Avez-vous peur de vous montrer avec Moi ? Vous êtes libres de m'abandonner. Mais si vous voulez rester, vous devez apprendre à défier le monde avec ses critiques, ses embûches, ses moqueries, ses tourments, pour conquérir mon Royaume. Allons donc tirer de la mort Lazare qui dort depuis deux jours au tombeau, puisqu'il est mort le soir qu'est venu ici le serviteur de Béthanie. Demain, à l'heure de sexte , quand j'aurai congédié ceux qui attendent demain pour avoir de Moi un réconfort et une récompense pour leur foi, nous partirons d'ici et passerons le fleuve.

Nous passerons la nuit dans la maison de Nique puis, à l'aurore, nous partirons pour Béthanie en prenant la route qui passe par Ensémès. Nous serons à Béthanie avant sexte. Il y aura beaucoup de gens et les cœurs seront ébranlés. J'en ai fait la promesse et je la tiendrai..."

"À qui, Seigneur ?" demande Jacques d'Alphée presque craintif.

"À ceux qui me haïssent et à ceux qui m'aiment, aux deux d'une manière absolue. Ne vous rappelez-vous pas la discussion à Cédès avec les scribes ? Ils pouvaient encore me traiter de menteur parce que j'avais ressuscité une fillette qui venait de mourir et un mort d'un jour. Ils ont dit :"Tu n'as pas encore su refaire quelqu'un qui était décomposé". En effet, Dieu seul peut tirer un homme de la fange et de la pourriture refaire un corps intact et vivant. Eh bien, je vais le faire. À la lune de Casleu, sur les rives du Jourdain, j'ai rappelé Moi-même aux scribes ce défi et j'ai dit : "À la nouvelle lune, cela s'accomplira". Cela pour ceux qui me haïssent. Aux sœurs ensuite, qui m'aiment d'une manière absolue, j'ai promis de récompenser leur foi si elles avaient continué d'espérer au-delà de ce qui est croyable. Je les ai beaucoup éprouvées et beaucoup affligées, et Moi seul connais les souffrances de leurs cœurs en ces jours et leur parfait amour. En vérité je vous dis qu'elles méritent une grande récompense car, plus que de ne pas voir leur frère ressuscité, elles sont angoissées que je puisse être méprisé. Je vous paraissais absorbé, las et triste.

J'étais près d'elles par mon esprit, j'entendais leurs gémissements et je comptais leurs larmes. Pauvres sœurs ! Maintenant je brûle de ramener un juste sur la Terre, un frère dans les bras de ses sœurs, un disciple parmi mes disciples. Tu pleures, Simon ? Oui. Toi et Moi, nous sommes les plus grands amis de Lazare, et dans tes pleurs il y a la douleur pour la douleur de Marthe et Marie et l'agonie de l'ami, mais il y a aussi déjà la joie de le savoir bientôt rendu à notre amour. Levons-nous pour préparer les sacs et aller nous reposer pour nous lever à l'aube et mettre tout en ordre ici où...

il n'est pas sûr que nous reviendrons. Il faudra distribuer aux pauvres ce que nous avons et dire aux plus actifs d'empêcher les pèlerins de me chercher tant que je ne serai pas dans un autre lieu sûr. Il faudra encore leur dire de prévenir les disciples qu'ils me cherchent chez Lazare. Tant de choses à faire. Elles seront toutes faites avant que les pèlerins arrivent... Allons, éteignez le feu et allumez les lampes, et que chacun aille faire ce qui lui incombe et puis se reposer. Paix à vous tous." Il se lève, les bénit et se retire dans sa petite pièce...

"Il est mort depuis plusieurs jours !" dit le Zélote.

"Cela c'est un miracle !" s'écrie Thomas.

"Je veux voir ce qu'ils vont trouver ensuite pour douter !" dit André.

"Mais quand le serviteur est-il venu ?" demande Judas Iscariote.

"Le soir d'avant le vendredi" répond Pierre.

"Oui ? Et pourquoi ne l'as-tu pas dit ?" demande encore l'Iscariote.

"Parce que le Maître m'avait dit de me taire" réplique Pierre.

"Donc... quand nous arrivons là-bas... il sera depuis quatre jours au tombeau ?"

"Certainement ! Le soir du vendredi un jour, le soir du sabbat deux jours, ce soir trois jours, demain quatre... Donc quatre jours et demi... Puissance éternelle ! Mais il sera déjà en morceaux !" dit Matthieu.

"Il sera déjà en morceaux... Je veux voir aussi cela et puis..."

"Quoi, Simon Pierre ?" demande Jacques d'Alphée.

"Et puis si Israël ne se convertit pas, Jéovah Lui-même, au milieu des foudres, ne peut le convertir."

Ils s'en vont en parlant ainsi.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-007.htm
TOME : 8 / 007
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus




♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Jasus_39
Jésus va voir Lazare qui dort
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Sam 26 Juil 2014 - 7:20

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_59


La résurrection de Lazare

Vision du jeudi 26 décembre 1946

Jésus vient à Béthanie par Ensémès. Ils doivent avoir fait une marche vraiment fatigante par les sentiers casse-cou des monts Adamin.

Les apôtres, essoufflés, ont du mal à suivre Jésus qui va rapidement, comme si l'amour l'emportait sur ses ailes de feu. Jésus sourit radieux alors qu'il marche en avant de tous, la tête droite sous les rayons tièdes du soleil de midi.

Avant qu'ils arrivent aux premières maisons de Béthanie, ils sont vus par un jeune garçon déchaussé qui va vers la fontaine près du village avec un broc de cuivre vide. Il pousse un cri, met le broc par terre et s'en va en courant, de toute la vitesse de ses petites jambes, vers le village.

"Certainement il va prévenir que tu arrives" observe Jude Thaddée après avoir souri comme tous de la résolution... énergique du jeune garçon qui a même abandonné son broc à la merci du premier passant.

La petite ville, vue ainsi d'auprès de la fontaine, qui est un peu en haut, paraît tranquille, comme déserte. Seule la fumée grise qui s'élève des cheminées indique que dans les maisons les femmes sont occupées à préparer le repas de midi. Quelque grosse voix d'homme parmi les oliviers et les vergers vastes et silencieux avertit que les hommes sont au travail. Malgré cela Jésus préfère prendre un petit chemin qui passe en arrière du village pour pouvoir arriver chez Lazare sans attirer l'attention des habitants.

Ils sont presque à moitié route quand ils entendent derrière eux le jeune garçon de tout à l'heure qui les dépasse en courant et puis s'arrête au milieu de la route pour, pensif, regarder Jésus...

"Paix à toi, petit Marc, tu as eu peur de Moi que tu t'es enfui ?" demande Jésus en le caressant.

"Moi, non, Seigneur, je n'ai pas eu peur. Mais comme pendant plusieurs jours Marthe et Marieont envoyé des serviteurs sur les routes qui viennent ici pour voir si tu venais, maintenant que je t'ai vu, je suis accouru pour dire que tu venais..."

"Tu as bien fait. Les sœurs vont préparer leurs cœurs à me voir."

"Non, Seigneur. Les sœurs ne vont rien se préparer car elles ne savent rien. Ils n'ont pas voulu que je le dise. Ils m'ont pris quand j'ai dit, en entrant dans le jardin : "Il y a le Rabbi", et ils m'ont chassé dehors en disant : "Tu es un menteur ou un sot. Lui désormais ne vient plus car il est certain désormais qu'il ne peut pas faire le miracle". Et comme je disais que c'était bien Toi, ils m'ont donné deux gifles comme je n'en avais encore jamais reçues... Regarde ici mes joues rouges. Elles me brûlent ! Et ils m'ont poussé dehors en disant : "Cela pour te purifier d'avoir regardé un démon". Et je te regardais pour voir si tu étais devenu un démon. Mais je ne le vois pas. Tu es toujours mon Jésus beau comme les anges dont parle maman."


Jésus se penche pour baiser ses petites joues souffletées en disant : "Ainsi va passer la démangeaison. Je suis peiné que tu aies souffert pour Moi..."

"Moi, non, Seigneur, car ces gifles m'ont valu deux baisers de Toi" et il s'attache en en espérant d'autres.

"Dis un peu, Marc, qui t'a chassé ? Ceux de Lazare ?" demande le Thaddée.

"Non. Les juifs. Ils viennent pour le deuil tous les jours. Il y en a tant ! Ils sont dans la maison et dans le jardin. Ils viennent tôt, et s'en vont tard. Ils semblent les maîtres. Ils maltraitent tout le monde. Tu vois qu'il n'y a personne dans les rues ? Les premiers jours, on venait pour voir... mais ensuite... Maintenant il n'y a que nous les enfants qui tournicotons pour... Oh ! mon broc ! Maman qui attend l'eau... Elle va me battre elle aussi !..."

Tous sourient de sa désolation devant la perspective d'autres claques et Jésus lui dit : "Va vite alors..."

"C'est que... je voulais entrer avec Toi et te voir faire le miracle..." et il termine : "...et voir leurs figures... pour me venger des gifles..."

"Cela non. Tu ne dois pas désirer la vengeance. Tu dois être bon et pardonner... Mais ta mère attend l'eau..."

"Moi, j'y vais, Maître. Je sais où habite Marc. J'expliquerai à la femme et je te rejoindrai..." dit Jacques de Zébédée. Et il s'en va en courant.

Ils se remettent en marche lentement et Jésus tient par la main l'enfant ravi...

Les voilà à la grille du jardin. Ils la suivent. De nombreuses montures y sont attachées, surveillées par les serviteurs de chaque propriétaire. Le chuchotement qui vient d'eux attire l'attention de quelques juifs qui se tournent vers le portail ouvert, juste au moment où Jésus pose le pied à la limite du jardin.

"Le Maître !" disent les premiers qui le voient, et ce mot court comme le bruissement du vent d'un groupe à l'autre, se propage, s'en va, comme une vague venue de loin et qui se brise sur la rive, jusque contre les murs de la maison et y pénètre, apporté certainement par de nombreux juifs présents ou par quelques pharisiens, rabbi ou scribe ou sadducéen, répandus çà et là.


Jésus y entre très lentement alors que tous, tout en accourant de tous côtés, s'écartent du sentier où il marche. Et comme personne ne le salue, Lui ne salue personne comme s'il ne connaissait même pas un grand nombre de ceux qui sont rassemblés là pour le regarder la colère et la haine dans les yeux, sauf un petit nombre qui sont secrètement ses disciples ou qui du moins ont le cœur droit et qui, s'ils ne l'aiment pas comme disciples, le respectent comme juste. De ce nombre sont Joseph, Nicodème, Jean, Éléazar, un autre Jean, le scribe vu à la multiplication des pains, et encore un autre Jean, qui rassasia les gens à la descente de la montagne des béatitudes, Gamaliel avec son fils, Josué, Joachim, Manaën, le scribeJoël d'Abia, rencontré au Jourdain dans l'épisode de Sabéa , Joseph Barnabé disciple de Gamaliel, Chouza qui regarde Jésus de loin, un peu intimidé de le revoir après sa méprise, ou peut-être retenu par le respect humain et n'osant pas s'avancer comme ami. Il est certain qu'il n'est salué ni par les amis, ni par ceux qui l'observent sans rancœur, ni par ses ennemis, et Jésus ne salue pas. Il a seulement fait une vague inclination en mettant le pied dans l'allée. Puis il a continué tout droit comme s'il était étranger à la foule nombreuse qui l'entoure. Le jeune garçon marche toujours à son côté, dans ses vêtements de petit paysan, avec ses pieds nus d'enfant pauvre, mais le visage lumineux de quelqu'un qui est en fête, avec ses petits yeux noirs, vifs, bien ouverts pour tout voir... et pour défier tout le monde...

Marthe sort de la maison au milieu d'un groupe de juifs venus pour rendre visite et parmi lesquels se trouvent Elchias et Sadoc. De sa main elle protège ses yeux las de pleurer, gênés par la lumière, pour voir où est Jésus. Elle le voit. Elle se détache de ceux qui l'accompagnent et court vers Jésus à quelques pas du bassin rendu tout brillant par les rayons du soleil. Elle se jette aux pieds de Jésus après s'être inclinée et elle les baise et, en éclatant en sanglots, elle dit : "Paix à Toi, Maître !"

Jésus aussi, dès qu'il l'a vue près de Lui, lui a dit : "Paix à toi !" et il a levé la main pour la bénir, en laissant aller celle de l'enfant que Barthélemy a prise tout en l'attirant un peu en arrière.

Marthe poursuit : "Mais il n'y a plus de paix pour ta servante." Elle lève son visage vers Jésus en restant encore à genoux. Et dans un cri de douleur que l'on entend bien dans le silence qui s'est fait elle s'écrie : "Lazare est mort ! Si tu avais été là il ne serait pas mort. Pourquoi n'es-tu pas venu plus tôt, Maître ?" Elle a un ton involontaire de reproche en posant cette question.



Puis elle revient au ton accablé de quelqu'un qui n'a plus la force de faire des reproches et dont l'unique réconfort est de rappeler les dernières actions et les derniers désirs d'un parent auquel on a cherché à donner ce qu'il désirait et pour qui on n'a pas de remords dans le cœur : "Il t'a tant appelé, Lazare, notre frère !... Maintenant, tu vois ! Je suis désolée et Marie pleure sans pouvoir se donner la paix. Et lui n'est plus ici. Tu sais si nous l'aimions ! Nous espérions tout de Toi !..."

Un murmure de compassion pour la femme et de reproche à l'adresse de Jésus, un assentiment à la pensée sous-entendue : "et tu pouvais nous exaucer car nous le méritions à cause de l'amour que nous avons pour Toi, et Toi, au contraire, tu nous as déçues" court de groupe en groupe parmi des hochements de tête ou des regards moqueurs. Seuls quelques secrets disciples, disséminés dans la foule ont des regards de compassion pour Jésus qui écoute, très pâle et affligé, la femme désolée qui Lui parle. Gamaliel, les bras croisés dans son ample et riche vêtement de laine très fine, orné de nœuds bleus, un peu à part dans le groupe de jeunes où se trouve son fils et Joseph Barnabé, regarde fixement Jésus, sans haine et sans amour.

Marthe, après s'être essuyée le visage, recommence à parler : "Mais même maintenant j'espère car je sais que tout ce que tu demanderas à ton Père, te sera accordé." Une douloureuse, héroïque profession de foi, dite d'une voix que les larmes font trembler, avec un regard qui tremble d'angoisse, avec l'ultime espérance qui lui tremble dans le cœur.

"Ton frère ressuscitera. Lève-toi, Marthe."

Marthe se lève tout en restant courbée en vénération devant Jésus auquel elle répond : "Je le sais, Maître. Il ressuscitera au dernier jour."

"Je suis la Résurrection et la Vie. Quiconque croit en Moi, même s'il est mort, vivra. Et celui qui croit et vit en Moi ne mourra pas éternellement. Crois-tu tout cela ?" Jésus, qui d'abord avait parlé d'une voix plutôt basse uniquement à Marthe, élève la voix pour dire ces phrases où il proclame sa puissance de Dieu, et son timbre parfait résonne comme une trompette d'or dans le vaste jardin. Un frémissement presque d'épouvante secoue l'assistance. Mais ensuite certains raillent en secouant la tête.

Marthe, à laquelle Jésus semble vouloir transfuser une espérance de plus en plus forte en tenant la main appuyée sur son épaule, lève son visage qu'elle gardait penché. Elle le lève vers Jésus, en fixant ses yeux affligés dans les lumineuses pupilles du Christ et serrant ses mains sur sa poitrine, elle répond avec une angoisse différente : "Oui, Seigneur. Je crois cela.


Je crois que tu es le Christ, le Fils du Dieu Vivant, venu dans le monde. Et que tu peux tout ce que tu veux. Je crois. Maintenant, je vais prévenir Marie" et elle s'éloigne rapidement en disparaissant dans la maison.

Jésus reste où il était, ou plutôt il fait quelques pas en avant et s'approche du parterre qui entoure le bassin. Le parterre est tout éclairé de ce côté par la fine poussière du jet d'eau qu'un vent léger pousse de ce côté comme un plumet d'argent, et il paraît se perdre, Jésus, dans la contemplation du frétillement des poissons sous le voile de l'eau limpide, dans leurs jeux qui mettent des virgules d'argent et des reflets d'or dans le cristal des eaux frappées par le soleil.

Les juifs l'observent. Ils se sont involontairement séparés en groupes bien distincts. D'un côté, en face de Jésus, tous ceux qui Lui sont hostiles, habituellement divisés entre eux par esprit sectaire, maintenant d'accord pour s'opposer à Jésus. À côté de Lui, derrière les apôtres, auxquels s'est réuni Jacques de Zébédée, Joseph, Nicodème et les autres d'esprit bienveillant. Plus loin, Gamaliel, toujours à sa place et avec la même attitude, est seul, car son fils et ses disciples se sont séparés de lui pour se répartir entre les deux groupes principaux pour être plus près de Jésus.

Avec son cri habituel : "Rabboni !" Marie sort de la maison en courant, les bras tendus vers Jésus. Elle se jette à ses pieds qu'elle baise en sanglotant. Divers juifs, qui étaient dans la maison avec elle et qui l'ont suivie, unissent à ses pleurs leurs pleurs d'une sincérité douteuse.Maximin aussi, Marcelle, Sara, Noémi ont suivi Marie ainsi que tous ses serviteurs et de fortes lamentations s'élèvent. Je crois que dans la maison il n'est resté personne. Marthe, en voyant pleurer ainsi Marie, redouble elle aussi ses pleurs.

"Paix à toi, Marie. Lève-toi ! Regarde-moi ! Pourquoi ces pleurs semblables à ceux des gens qui n'ont pas d'espérance ?" Jésus se penche pour dire doucement ces paroles, ses yeux dans les yeux de Marie qui, restant à genoux, reposant sur ses talons, tend vers Lui ses mains dans un geste d'invocation et ne peut parler tant elle sanglote : "Ne t'ai-je pas dit d'espérer au-delà de ce qui est croyable pour voir la gloire de Dieu ? Est-ce que par hasard ton Maître est changé pour que tu aies raison d'être ainsi angoissée ?"

Mais Marie ne recueille pas les mots qui veulent déjà la préparer à une joie trop forte après tant d'angoisse, et elle crie, finalement maîtresse de sa voix : "Oh ! Seigneur ! Pourquoi n'es-tu pas venu plus tôt ? Pourquoi t'es-tu tellement éloigné de nous ?


Tu le savais que Lazare était malade ! Si tu avais été ici, il ne serait pas mort, mon frère. Pourquoi n'es-tu pas venu ? Je devais lui montrer encore que je l'aimais. Il devait vivre. Je devais lui montrer que je persévérais dans le bien. Je l'ai tant angoissé, mon frère ! Et maintenant ! Maintenant que je pouvais le rendre heureux, il m'a été enlevé ! Tu pouvais me le laisser, donner à la pauvre Marie la joie de le consoler après lui avoir donné tant de douleur. Oh ! Jésus ! Jésus ! Mon Maître ! Mon Sauveur ! Mon espérance !" et elle s'abat de nouveau, le front sur les pieds de Jésus qui se trouvent de nouveau lavés par les pleurs de Marie, et elle gémit : "Pourquoi as-tu fait cela, ô Seigneur ? ! Même à cause de ceux qui te haïssent et se réjouissent de ce qui arrive... Pourquoi as-tu fait cela, Jésus ? !" Mais il n'y a pas de reproche dans le ton de la voix de Marie comme dans celui de Marthe, il y a seulement l'angoisse de quelqu'une, qui outre sa douleur de sœur, a aussi celle d'une disciple qui sent amoindrie dans le cœur d'un grand nombre l'opinion de son Maître.

Jésus, très penché pour entendre ces paroles qu'elle murmure la face contre terre, se redresse et dit à haute voix : "Marie, ne pleure pas ! Ton Maître aussi souffre de la mort de l'ami fidèle... car il a dû le laisser mourir..."

Oh ! quelles railleries et quels regards de joie livide il y a sur les visages des ennemis du Christ ! Ils le voient vaincu, et s'en réjouissent, alors que les amis deviennent de plus en plus tristes.

Jésus dit encore plus fort : "Mais, je te le dis : ne pleure pas. Lève-toi ! Regarde-moi ! Crois-tu que Moi qui t'ai tant aimée j'ai fait cela sans motif ? Peux-tu croire que je t'ai donné cette douleur inutilement ? Viens. Allons vers Lazare. Où l'avez-vous mis ?"

Jésus, plutôt que Marie et Marthe, qui ne parlent pas prises comme elles le sont par des pleurs plus forts, interroge tous les autres, surtout ceux qui, sortis avec Marie de la maison, semblent les plus troublés. Ce sont peut-être des parents plus âgés, je ne sais pas. Et ceux-ci répondent à Jésus, visiblement affligé : "Viens et vois" et ils se dirigent vers l'endroit où se trouve le tombeau à l'extrémité du verger, là où le sol a des ondulations et des veines de roche calcaire qui affleurent à la surface du sol.

Marthe, à côté de Jésus qui a forcé Marie à se lever et il la conduit, car elle est aveuglée par ses larmes, montre de la main à Jésus où se trouve Lazare et quand ils sont près de l'endroit elle dit aussi : "C'est ici, Maître, que ton ami est enseveli" et elle indique la pierre posée obliquement à l'entrée du tombeau.


Jésus pour s'y rendre, suivi de tout le monde, a dû passer devant Gamaliel. Mais ils ne se sont pas salués. Ensuite Gamaliel s'est uni aux autres en s'arrêtant comme tous les pharisiens les plus rigides à quelques mètres du tombeau, alors que Jésus s'avance tout près avec les sœurs, Maximin et ceux qui sont peut-être des parents. Jésus contemple la lourde pierre qui sert de porte au tombeau et forme un lourd obstacle entre Lui et l'ami éteint, et il pleure. Les larmes des sœurs redoublent et de même celles des intimes et familiers.

"Enlevez cette pierre" crie Jésus tout d'un coup, après avoir essuyé ses larmes.

Tous ont un geste d'étonnement et un murmure court dans le rassemblement qui a grossi de quelques habitants de Béthanie qui sont entrés dans le jardin et se sont mis à la suite des hôtes. Je vois certains pharisiens qui se touchent le front en secouant la tête comme pour dire : "Il est fou !"

Personne n'exécute l'ordre. Même chez les plus fidèles, on éprouve de l'hésitation, de la répugnance à le faire.

Jésus répète plus fort son ordre, effrayant encore davantage les gens pris par deux sentiments opposés et qui, après avoir pensé à fuir, s'approchent tout à coup davantage pour voir, défiant la puanteur toute proche du tombeau que Jésus veut faire ouvrir.

"Maître, ce n'est pas possible" dit Marthe en s'efforçant de retenir ses pleurs pour parler : "Il y a déjà quatre jours qu'il est là dessous. Et tu sais de quel mal il est mort ! Seul notre amour pouvait le soigner... Maintenant la puanteur est certainement plus forte malgré les onguents... Que veux-tu voir ? Sa pourriture ?... On ne peut pas... même à cause de l'impureté de la corruption et..."

"Ne t'ai-je pas dit que si tu crois tu verras la gloire de Dieu ? Enlevez cette pierre, je le veux !"

C'est un cri de volonté divine... Un "oh !" étouffé sort de toutes les poitrines. Les visages deviennent blêmes, certains tremblent comme s'il était passé sur tous un vent glacial de mort.

Marthe fait un signe à Maximin et celui-ci ordonne aux serviteurs de prendre les outils pouvant servir à remuer la lourde pierre.

Les serviteurs s'en vont rapidement pour revenir avec des pics et des leviers robustes. Ils travaillent en faisant entrer la pointe brillante des pics entre la roche et la pierre, et ensuite ils remplacent les pics par des leviers robustes et enfin ils soulèvent avec attention la pierre en la faisant glisser d'un côté et en la traînant ensuite avec précaution contre la paroi rocheuse. Une puanteur infecte sort du sombre trou et fait reculer tout le monde.


Marthe demande tout bas : "Maître, tu veux y descendre ? Si oui, il faut des torches..." mais elle est livide à la pensée qu'il doit le faire.

Jésus ne lui répond pas. Il lève les yeux vers le ciel, met ses bras en croix et prie d'une voix très forte, en scandant les mots : "Père ! Je te remercie de m'avoir exaucé. Je le savais que Tu m'exauces toujours, mais je le dis pour ceux qui sont présents ici, pour le peuple qui m'entoure, pour qu'ils croient en Toi, en Moi, et que Tu m'as envoyé !"

Il reste encore ainsi un moment et il semble ravi en extase tellement il est transfiguré alors que, sans plus émettre aucun son, il dit des paroles secrètes de prière ou d'adoration, je ne sais. Ce que je sais, c'est qu'il a tellement outrepassé l'humain, qu'on ne peut le regarder sans se sentir le cœur trembler dans la poitrine. Il semble devenir lumière en perdant son aspect corporel, se spiritualiser, grandir et même s'élever de terre. Tout en gardant la couleur de ses cheveux, de ses yeux, de sa peau, de ses vêtements, au contraire de ce qui se passa à la transfiguration du Thabor durant laquelle tout devint lumière et éclat éblouissant, il paraît dégager de la lumière et que tout ce qui est de Lui devient lumière. La lumière semble l'entourer d'un halo, en particulier son visage levé vers le ciel, certainement ravi dans la contemplation du Père.

Il reste ainsi quelque temps, puis redevient Lui : l'Homme, mais d'une majesté puissante. Il s'avance jusqu'au seuil du tombeau. Il déplace ses bras — que jusqu'à ce moment il avait gardés ouverts en croix, les paumes tournées vers le ciel — en avant, les paumes vers la terre, et par conséquent les mains se trouvent déjà à l'intérieur du tunnel du tombeau, toutes blanches dans ce tunnel obscur. Il plonge le feu bleu de ses yeux, dont l'éclat miraculeux est aujourd'hui insoutenable, dans cette obscurité muette, et d'une voix puissante, avec un cri plus fort que celui par lequel il commanda sur le lac aux vents de tomber, d'une voix que je ne Lui ai jamais entendue dans aucun miracle, il crie : "Lazare ! Viens dehors !" L'écho répercute sa voix dans la cavité du tombeau et se répand ensuite à travers tout le jardin, se répercute contre les ondulations du terrain de Béthanie, je crois qu'il s'en va jusqu'aux premiers escarpements au-delà des champs et revient de là, répété et amorti, comme un ordre qui ne peut faillir. Il est certain que de tous les côtés, on entend à nouveau : "dehors ! dehors ! dehors !"



Tous éprouvent un frisson plus intense, et si la curiosité les cloue tous à leurs places, les visages pâlissent et les yeux s'écarquillent alors que les bouches s'entrouvrent involontairement avec déjà dans la gorge le cri de stupeur.

Marthe, un peu en arrière et de côté, est comme fascinée en regardant Jésus. Marie tombe à genoux, elle qui ne s'est jamais écartée de son Maître, elle tombe à genoux au bord du tombeau, une main sur sa poitrine pour calmer les palpitations de son cœur, l'autre qui inconsciemment et convulsivement tient un pan du manteau de Jésus, et on se rend compte qu'elle tremble car le manteau a de légères secousses imprimées par la main qui le tient.

Quelque chose de blanc semble émerger du plus profond du souterrain. C'est d'abord une petite ligne convexe, puis elle fait place à une forme ovale, puis à l'ovale se substituent des lignes plus amples, plus longues, de plus en plus longues. Et celui qui était mort, serré dans ses bandes, avance lentement, toujours plus visible, fantomatique, impressionnant.

Jésus recule, recule, insensiblement, mais continuellement à mesure que Lazare avance. La distance, entre les deux, reste donc la même.

Marie est contrainte de lâcher le pan du manteau, mais elle ne bouge pas de l'endroit où elle est. La joie, l'émotion, tout, la cloue à l'endroit où elle était.

Un "oh !" de plus en plus net sort des gorges d'abord fermées par la douleur de l'attente. C'est d'abord un murmure à peine distinct qui se change en voix, et la voix devient un cri puissant.

Lazare est désormais au bord du tombeau et il s'arrête là, raide, muet, semblable à une statue de plâtre à peine ébauchée et donc informe, une longue chose, mince à la tête, mince aux jambes, plus large au tronc, macabre comme la mort elle-même, spectrale, dans la blancheur des bandes contre le fond sombre du tombeau. Au soleil qui l'enveloppe, les bandes paraissent ça et là laisser couler la pourriture.

Jésus crie d'une voix forte : "Débarrassez-le et laissez-le aller. Donnez-lui des vêtements et de la nourriture."

"Maître !..." dit Marthe, et elle voudrait peut-être en dire davantage, mais Jésus la regarde fixement, la subjuguant de son regard étincelant, et il dit : "Ici ! Tout de suite ! Tout de suite, apportez un vêtement. Habillez-le en présence de tout le monde et donnez-lui à manger." Il commande et ne se retourne jamais pour regarder ceux qui sont derrière et autour de Lui.


Son œil regarde seulement Lazare, Marie qui est près du ressuscité sans souci de la répulsion que donnent à tous les bandes souillées, et Marthe qui halète comme si son cœur allait éclater et qui ne sait si elle doit crier sa joie ou pleurer...

Les serviteurs se hâtent d'exécuter les ordres. Noémi s'en va en courant la première et la première revient avec les vêtements qu'elle tient pliés sur son bras. Quelques-uns délient les lacets des bandelettes après avoir retroussé leurs manches et relevé leurs vêtements pour qu'ils ne touchent pas la pourriture qui coule. Marcelle et Sara reviennent avec des amphores de parfums, suivies de serviteurs les uns avec des bassins et des brocs fumants d'eau chaude, les autres avec des plateaux, des bols pleins de lait, du vin, des fruits, des fouaces recouvertes de miel.

Les bandelettes étroites et très longues, de lin, me semble-t-il, avec des lisières des deux côtés, certainement tissées pour cet usage, se déroulent comme des rouleaux de ganse d'une grande bobine et s'entassent sur le sol, alourdies par les aromates et la pourriture. Les serviteurs les écartent en se servant de bâtons. Ils ont commencé par la tête, et là aussi il y a la pourriture qui s'est écoulée du nez, des oreilles, de la bouche. Le suaire placé sur le visage est tout trempé de ces souillures et le visage de Lazare que l'on voit très pâle, squelettique, avec les yeux tenus fermés par des pommades mises dans les orbites, avec les cheveux collés et de même la barbiche du menton, en est tout souillé. Le drap descend lentement, le suaire mis autour du corps, à mesure que les bandelettes descendent, descendent, descendent, libérant le tronc qu'elles avaient comprimé pendant de nombreux jours, et rendant une forme humaine à ce qu'elles avaient d'abord rendu semblable à une grande chrysalide. Les épaules osseuses, les bras squelettiques, les côtes à peine couvertes de peau, le ventre creusé, apparaissent lentement. À mesure que les bandes tombent, les sœurs, Maximin, les serviteurs, s'empressent d'enlever la première couche de crasse et de baume, et s'y appliquent en changeant continuellement l'eau rendue détergente par les aromates qu'on y a mis jusqu'à ce que la peau apparaisse nette.

Lorsqu'on a dégagé le visage de Lazare et qu'il peut regarder, il dirige son regard vers Jésus avant même de regarder ses sœurs. Il oublie tout et s'abstrait de tout ce qui arrive pour regarder, avec un sourire d'amour sur ses lèvres pâles et une larme lumineuse au fond des yeux, son Jésus. Jésus aussi lui sourit et a une lueur de larme dans le coin de l'œil, mais sans parler il dirige le regard de Lazare vers le ciel, Lazare comprend et remue les lèvres dans une prière silencieuse.


Marthe croit qu'il veut dire quelque chose sans avoir encore de voix et elle demande; "Que me dis-tu, mon Lazare ?"

"Rien, Marthe. Je remerciais le Très-Haut." La prononciation est assurée, la voix forte.

Les gens poussent de nouveau un "oh !" étonné.

Désormais ils l'ont dégagé jusqu'aux hanches, libéré et propre, et ils peuvent le revêtir de la tunique courte, une sorte de chemisette qui dépasse l'aine pour retomber sur les cuisses.

On le fait asseoir pour dégager ses jambes et les laver. Quand elles apparaissent, Marthe et Marie poussent un grand cri en montrant les jambes et les bandelettes. Sur les bandelettes qui serraient les jambes, et sur le suaire posé par dessous, les écoulements purulents sont si abondants qu'ils forment des grosses gouttes sur les toiles, mais les jambes visiblement sont tout à fait cicatrisées. Seules les cicatrices rouges-bleuâtres indiquent où elles étaient gangrenées.

Tous les gens crient plus fort leur étonnement. Jésus sourit et aussi Lazare qui regarde un instant ses jambes guéries, puis s'abstrait de nouveau pour regarder Jésus. Il semble ne pouvoir se rassasier de le voir. Les juifs, pharisiens, sadducéens, scribes, rabbis, s'approchent avec précaution pour ne pas souiller leurs vêtements. Ils regardent de tout près Lazare, ils regardent de tout près Jésus. Mais ni Lazare ni Jésus ne s'occupent d'eux : ils se regardent et tout le reste est inexistant.

Voilà que l'on met les sandales à Lazare. Il se lève, agile, sûr de lui. Il prend le vêtement que Marthe lui présente et l'enfile tout seul, lie sa ceinture, ajuste les plis. Le voilà, maigre et pâle, mais semblable à tout le monde. Il se lave encore les mains et les bras jusqu'aux coudes après avoir retroussé ses manches. Et puis avec une nouvelle eau il se lave de nouveau le visage et la tête, jusqu'à ce qu'il se sente tout à fait net. Il essuie ses cheveux et son visage, rend la serviette au serviteur et va tout droit vers Jésus. Il se prosterne, Lui baise les pieds.

Jésus se penche, le relève, le serre contre son cœur en lui disant : "Bien revenu, mon ami. Que la paix soit avec toi et la joie. Vis pour accomplir ton heureuse destinée. Lève ton visage pour que je te donne le baiser de salutation." Il dépose un baiser sur les joues et Lazare Lui rend son baiser.


C'est seulement après avoir vénéré et embrassé le Maître que Lazare parle à ses sœurs et les embrasse, puis il embrasse Maximin et Noémi qui pleurent de joie, et certains autres dont je crois qu'ils lui sont apparentés ou amis très intimes. Puis il embrasse Joseph, Nicodème, Simon le Zélote et quelques autres.

Jésus va personnellement trouver un serviteur qui a sur les bras un plateau avec de la nourriture et il prend une fouace avec du miel, une pomme, une coupe de vin et il offre le tout à Lazare, après les avoir offerts et bénits, pour qu'il se restaure. Et Lazare mange avec l'appétit de quelqu'un qui se porte bien. Tout le monde pousse encore un "oh !" d'étonnement.

Jésus semble ne voir que Lazare, mais en réalité il observe tout et tout le monde. Voyant qu'avec des gestes de colère Sadoc avec Elchias, Canania, Félix, Doras et Cornélius et d'autres sont sur le point de s'éloigner, il dit à haute voix : "Attends un moment, Sadoc. J'ai un mot à te dire, à toi et aux tiens."

Ils s'arrêtent avec une figure de criminels.

Joseph d'Arimathie fait un geste effaré et fait signe au Zélote de retenir Jésus. Mais Lui est déjà en train d'aller vers le groupe haineux, et il dit à haute voix : "Est-ce que cela te suffit, Sadoc, ce que tu as vu ? Tu m'as dit un jour que pour croire tu avais besoin, toi et tes pareils, de voir recomposé, en bonne santé, un homme décomposé. Es-tu rassasié de la putréfaction que tu as vue ? Es-tu capable de reconnaître que Lazare était mort et que maintenant il est vivant et sain comme il ne l'était pas depuis des années ? Je le sais. Vous êtes venus ici pour les tenter, pour mettre en eux plus de douleur et le doute. Vous êtes venus ici pour me chercher, espérant me trouver caché dans la pièce du mourant. Vous êtes venus ici, non par un sentiment d'amour et le désir d'honorer celui qui s'était éteint mais pour vous assurer que Lazare était réellement mort, et vous avez continué de venir, vous réjouissant toujours plus à mesure que le temps passait. Si les choses étaient allées comme vous l'espériez, comme désormais vous croyiez qu'elles iraient, vous auriez eu raison de vous réjouir. L'Ami qui guérit tout le monde, mais ne guérit pas l'ami. Le Maître qui récompense la foi de tout le monde, mais pas celle de ses amis de Béthanie. Le Messie impuissant devant la réalité de la mort. Voilà ce qui vous donnait raison de vous réjouir. Mais voilà : Dieu vous a répondu. Nul prophète n'a jamais pu rassembler ce qui était décomposé, en plus que mort. Dieu l'a fait. Voilà le témoignage vivant de ce que je suis. Il y eut un jour où Dieu prit de la boue, lui donna une forme et y insuffla l'esprit de vie et ce fut l'homme.



J'y étais pour dire : "Que l'on fasse l'homme à notre image et à notre ressemblance"[3, car je suis le Verbe du Père. Aujourd'hui, Moi, le Verbe, j'ai dit à ce qui était encore moins que de la boue : à la corruption : "Vis" et la corruption s'est faite de nouveau chair, une chair intègre, vivante, palpitante. La voici qui vous regarde. Et à la chair j'ai réuni l'esprit qui gisait depuis des jours dans le sein d'Abraham. Je l'ai rappelé par ma volonté car je puis tout, Moi, le Vivant, Moi, le Roi des rois auquel sont soumises toutes les créatures et toutes les choses. Maintenant, que me répondez-vous ?"

Il est devant eux, grand, fulgurant de majesté, vraiment Juge et Dieu. Ils ne répondent pas.

Lui insiste : "Ce n'est pas encore assez pour croire, pour accepter l'inéluctable ?"

"Tu n'as tenu qu'une partie de la promesse. Ce n'est pas le signe de Jonas..." dit brutalement Sadoc.

"Vous aurez aussi celui-là. J'ai promis et je tiendrai ma promesse" dit le Seigneur. "Un autre présent ici, attend un autre signe, et il l'aura[4]. Et comme c'est un juste, il l'acceptera. Vous non. Vous resterez ce que vous êtes."

Il fait un demi-tour sur Lui-même et il voit Simon, le synhédriste, fils d'Eli-Anna. Il le fixe, le fixe. Il laisse de côté ceux de tout à l'heure et, arrivé en face de lui, il lui dit, à voix basse mais nette : "C'est heureux pour toi que Lazare ne se rappelle pas son séjour parmi les morts ! Qu'as-tu fait de ton père, Caïn ?"

Simon s'enfuit en poussant un cri de peur qui se change en un hurlement de malédiction : "Sois maudit, Nazaréen !" à laquelle Jésus répond : "Ta malédiction monte vers le Ciel et du Ciel le Très-Haut te la renvoie. Tu es marqué du signe, ô malheureux !"

Il revient en arrière, parmi les groupes étonnés, presque effrayés. Il rencontre Gamaliel qui se dirige vers la route. Il le regarde et Gamaliel le regarde. Jésus lui dit sans s'arrêter : "Tiens-toi prêt, ô rabbi. Le signe viendra bientôt. Je ne mens jamais."

Le jardin se vide lentement. Les juifs sont abasourdis, mais la plupart giclent de la colère par tous leurs pores. Si leurs regards pouvaient le réduire en cendres, Jésus serait complètement pulvérisé. Ils parlent, discutent entre eux en s'en allant, si bouleversés maintenant par leur défaite qui ne peuvent plus cacher sous une apparence hypocrite d'amitié le but de leur présence à cet endroit. Ils s'en vont sans saluer ni Lazare ni ses sœurs.


Il reste en arrière certains qui ont été conquis au Seigneur par le miracle. Parmi eux se trouve Joseph Barnabé qui se jette à genoux devant Jésus et l'adore. Un autre est le scribeJoël d'Abia qui fait la même chose avant de partir à son tour, et d'autres encore que je ne connais pas mais qui doivent être influents.

Pendant ce temps, Lazare, entouré de ses plus intimes, s'est retiré dans la maison. Joseph, Nicodème et les autres bons saluent Jésus et s'en vont. Partent avec de profondes salutations les juifs qui étaient restés auprès de Marthe et Marie. Les serviteurs ferment la grille. La maison redevient tranquille.

Jésus regarde autour de Lui. Il voit de la fumée et des flammes au fond du jardin, dans la direction du tombeau. Jésus, seul, debout au milieu d'un sentier, dit : "La putréfaction qui va être annulée par le feu... La putréfaction de la mort... Mais celle des cœurs... de ces cœurs, aucun feu ne l'annulera... Pas même le feu de l'Enfer. Elle sera éternelle... Quelle horreur !... Plus que la mort... Plus que la corruption... Et...Mais qui te sauvera, ô Humanité, si tu aimes tant d'être corrompue ! Tu veux être corrompue. Et Moi... Moi j'ai arraché au tombeau un homme par une seule parole... Et avec un flot de paroles... et de douleurs, je ne pourrai arracher au péché l'homme, les hommes, des millions d'hommes." Il s'assoit et avec ses mains se couvre le visage, accablé...

Un serviteur qui passe le voit. Il va à la maison. Peu après Marie sort de la maison. Elle va trouver Jésus, légère comme si elle ne touchait pas le sol. Elle s'approche, Lui dit doucement : "Rabboni, tu es las... Viens, ô mon Seigneur. Tes apôtres fatigués sont allés dans l'autre maison, tous, sauf Simon le Zélote... Tu pleures, Maître ? Pourquoi ?..."

Elle s'agenouille aux pieds de Jésus... l'observe... Jésus la regarde. Il ne répond pas. Il se lève et se dirige vers la maison, suivi de Marie.

Ils entrent dans une salle. Lazare n'y est pas, ni non plus le Zélote, mais il y a Marthe, heureuse, transfigurée par la joie. Elle s'adresse à Jésus pour expliquer : "Lazare est allé au bain pour se purifier encore. Oh ! Maître ! Maître ! Que te dire !" Elle l'adore de toute elle-même. Elle remarque la tristesse de Jésus et elle dit : "Tu es triste, Seigneur ? Tu n'es pas heureux que Lazare..." Il lui vient un soupçon : "Oh ! Tu es réservé avec moi. J'ai péché. C'est vrai."

"Nous avons péché, ma sœur" dit Marie.

"Non, pas toi... Oh ! Maître. Marie n'a pas péché. Marie a su obéir, moi seule ai désobéi. Je t'ai envoyé appeler, parce que... parce que je ne pouvais plus les entendre insinuer que tu n'étais pas le Messie, le Seigneur... et je pouvais plus le voir souffrir... . Lazare te désirait tant. Il t'appelait tant... Pardonne-moi, Jésus."


"Et toi, tu ne parles pas, Marie ?" demande Jésus.

"Maître... moi... Je n'ai souffert alors que comme femme. Je souffrais parce que... Marthe, jure, jure ici, devant le Maître que jamais, jamais tu ne parleras à Lazare de son délire... Mon Maître... je t'ai connu tout à fait, ô Divine Miséricorde, dans les dernières heures de Lazare. Oh ! mon Dieu ! Mais comme tu m'as aimée, Toi, Toi qui m'as pardonnée, Toi, Dieu, Toi, Pur, Toi... si mon frère, qui pourtant m'aime, mais qui est homme, seulement homme, au fond de son cœur ne m'a pas tout pardonné ? ! Non, je m'exprime mal. Il n'a pas oublié mon passé et quand la faiblesse de la mort a émoussé en lui sa bonté que je croyais oublieuse du passé, il a crié sa douleur, son indignation pour moi... Oh !..." Marie pleure...

"Ne pleure pas, Marie. Dieu t'a pardonnée et a oublié. L'âme de Lazare aussi a pardonné et a oublié, a voulu oublier. L'homme n'a pas pu tout oublier, et quand la chair a dominé par son dernier spasme la volonté affaiblie, l'homme a parlé."

"Je n'en éprouve pas d'indignation, Seigneur. Cela m'a servi à t'aimer davantage et à aimer encore plus Lazare. Dès lors moi aussi je t'ai désiré, car j'étais trop angoissée de penser que Lazare était mort sans paix à cause de moi... et ensuite, ensuite, quand je t'ai vu méprisé par les juifs... quand j'ai vu que tu ne venais pas même après la mort, pas même après que je t'avais obéi en espérant au-delà de ce qui est croyable, en espérant jusqu'à ce que le tombeau s'ouvre, alors mon esprit aussi a souffert. Seigneur, si j'avais à expier, et certainement je l'avais, j'ai expié, Seigneur..."

"Pauvre Marie ! Je connais ton cœur. Tu as mérité le miracle et que cela t'affermisse dans ton espérance et ta foi."

"Mon Maître, j'espérerai et je croirai toujours désormais. Je ne douterai plus, jamais plus, Seigneur. Je vivrai de foi. Tu m'as donné la capacité de croire ce qui est incroyable."

"Et toi, Marthe, as-tu appris ? Non, pas encore. Tu es ma Marthe mais tu n'es pas encore ma parfaite adoratrice. Pourquoi agis-tu au lieu de contempler ? C'est plus saint. Tu vois ? Ta force, parce qu'elle était trop tournée vers les choses terrestres, a cédé à la constatation de faits terrestres qui semblent parfois sans remède. En vérité les choses humaines n'ont pas de remède, si Dieu n'intervient pas. La créature, à cause de cela, a besoin de savoir croire et contempler, d'aimer jusqu'au bout des forces de l'homme tout entier, avec sa pensée, son âme, sa chair, son sang, avec toutes les forces de l'homme, je le répète.

Je te veux forte, Marthe. Je te veux parfaite. Tu n'as pas su obéir parce que tu n'as pas su croire et espérer complètement, et tu n'as pas su croire et espérer parce que tu n'as pas su aimer totalement. Mais Moi, je t'en absous. Je te pardonne, Marthe. J'ai ressuscité Lazare aujourd'hui. Maintenant je te donne un cœur plus fort. A lui j'ai rendu la vie. À toi, j'infuse la force d'aimer, croire et espérer parfaitement. Maintenant soyez heureuses et en paix. Pardonnez à ceux qui vous ont offensé ces jours-ci..."

"Seigneur, en cela j'ai péché. Il y a un instant j'ai dit au vieux Canania qui t'avait méprisé les autres jours : "Qui a triomphé ? Toi ou Dieu ? Ton mépris ou ma foi ? Le Christ est le Vivant et il est la Vérité. Moi, je savais que sa gloire aurait resplendi plus grande, et toi, vieillard, refais ton âme si tu ne veux pas connaître la mort".

"Tu as bien parlé. Mais ne discute pas avec les méchants, Marie. Et pardonne. Pardonne si tu veux m'imiter... Voici Lazare. J'entends sa voix."

En effet Lazare rentre, vêtu à neuf et bien rasé, bien peigné et la chevelure parfumée. Avec lui se trouvent Maximin et le Zélote. "Maître !" Lazare s'agenouille encore pour l'adorer.

Jésus lui met la main sur la tête et sourit en disant : "L'épreuve est surmontée, mon ami. Pour toi et pour tes sœurs. Maintenant soyez heureux et forts pour servir le Seigneur. Que te rappelles-tu, ami, du passé ? Je veux parler de tes derniers moments ?"

"Un grand désir de te voir et une grande paix au milieu de l'amour des sœurs."

"Et qu'est-ce qui t'affligeait le plus de quitter en mourant ?"

"Toi, Seigneur, et mes sœurs. Toi parce que je ne pouvais plus te servir, elles parce qu'elles m'ont donné toute joie..."

"Oh ! moi, frère !" soupire Marie.

"Toi, plus que Marthe. Tu m'as donné Jésus et la mesure de ce qu'est Jésus. Et Jésus t'a donnée à moi. Tu es le don de Dieu, Marie."

"Tu le disais aussi en mourant..." dit Marie et elle étudie le visage de son frère.

"Parce que c'est ma constante pensée."

"Mais moi, je t'ai donné tant de douleur..."

"La maladie aussi m'a donné de la douleur. Mais, par elle, j'espère avoir expié les fautes du vieux Lazare et d'être ressuscité, purifié pour être digne de Dieu. Toi et moi : tous deux ressuscités pour servir le Seigneur, et Marthe au milieu de nous, elle qui fut toujours la paix de la maison."



"Tu l'entends, Marie ? Lazare dit des paroles de sagesse et de vérité. Maintenant je me retire et vous laisse à votre joie..."

"Non, Seigneur, reste avec nous. Ici. Reste à Béthanie et dans ma maison. Ce sera beau..."

"Je resterai. Je veux te récompenser de tout ce que tu as souffert. Marthe, ne sois pas triste. Marthe pense m'avoir affligé. Mais ma peine n'est pas autant pour vous que pour ceux qui ne veulent pas se racheter. Eux haïssent de plus en plus. Ils ont le venin dans le cœur... Eh bien... pardonnons."

"Pardonnons, Seigneur" dit Lazare avec son doux sourire... et sur cette parole tout prend fin.

Jésus dit : "On peut mettre ici la dictée du 23-3-44 pour le commentaire de la résurrection de Lazare."

En marge de la résurrection de Lazare et en rapport avec une phrase de Saint Jean.

Jésus dit : "Dans l'Évangile de Jean, comme on le lit désormais depuis des siècles, il est écrit : "Jésus n'était pas encore entré dans le village de Béthanie" ur prévenir toutes objections possibles, je fais remarquer que entre cette phrase et celle de l'Œuvre, que je rencontrai Marthe à quelques pas du bassin dans le jardin de Lazare, il n'y a pas de contradictions de faits mais seulement de traduction et de description.

Béthanie appartenait pour les trois quarts à Lazare, de même que Jérusalem lui appartenait en grande partie. Mais parlons de Béthanie. Comme elle appartenait pour les trois quarts à Lazare, on pouvait dire : Béthanie de Lazare. Par conséquent le texte ne serait pas erroné même si j'avais, rencontré Marthe dans le village ou à la fontaine, comme certaine veulent dire. Mais en réalité je n'étais pas entré dans le village pour éviter qu'accourent les béthanites, tous hostiles aux gens du Sanhédrin. J'étais passé en arrière de Béthanie pour rejoindre la maison de Lazare, qui était à l'extrémité opposée pour qui entrait à Béthanie par Ensémès.

Justement pour cela Jean dit que Jésus n'était pas encore entré dans le village. Et avec autant de justesse le petit Jean dit que je m'étais arrêté près du bassin (fontaine pour les hébreux) déjà dans le jardin de Lazare, mais encore très loin de la maison.

Que l'on considère en outre que. durant le temps du deuil et de l'impureté (ce n'était pas encore le septième jour après la mort), les sœurs ne sortaient pas de la maison. C'est donc dans l'enceinte de leur propriété qu'est arrivée la rencontre.

Noter que le petit Jean parle de la venue des béthanites dans le jardin seulement quand déjà j'ordonne d'enlever la pierre. Auparavant Béthanie ne savait pas que j'étais à Béthanie et c'est seulement quand le bruit s'en est répandu qu'ils sont accourus chez Lazare."

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-008.htm
Tome : 8 / 008


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Lazare ressuscité
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Dim 27 Juil 2014 - 6:56

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_60

Réflexions sur la résurrection de Lazare

Jésus dit:
"J'aurais pu intervenir à temps pour empêcher la mort de Lazare, mais je n'ai pas voulu le faire. Je savais que cette résurrection aurait été une arme à double tranchant car j'aurais converti les juifs dont la pensée était droite et rendu plus haineux ceux dont la pensée n'était pas droite. De ceux-ci, et après ce dernier coup de ma puissance, serait venue ma sentence de mort. Mais j'étais venu pour cela et désormais l'heure était mûre pour que cela s'accomplisse. J'aurais pu aussi accourir tout de suite, mais j'avais besoin de persuader par la résurrection d'une putréfaction déjà avancée les incrédules plus obstinés. Et mes apôtres aussi qui, destinés à porter ma Foi dans le monde, avaient besoin de posséder une foi soutenue par des miracles de première grandeur.

Chez les apôtres il y avait tant d'humanité, je l'ai déjà dit. Ce n'était pas un obstacle insurmontable. C'était au contraire une conséquence logique de leur condition d'hommes appelés à m'appartenir à un âge déjà adulte. On ne change pas une mentalité, une tournure d'esprit du jour au lendemain. Et Moi, dans ma sagesse, je n'ai pas voulu choisir et éduquer des enfants et les faire grandir selon ma pensée pour en faire mes apôtres. J'aurais pu le faire, mais je n'ai pas voulu le faire pour que les âmes ne me reprochent pas d'avoir méprisé ceux qui ne sont pas innocents et qu'elles ne portent à leur décharge et à leur excuse que Moi aussi j'aurais signifié par mon choix que ceux qui sont déjà formés ne peuvent changer.

Non. Tout peut se changer quand on le veut. Et Moi, en effet, avec des pusillanimes, des querelleurs, des usuriers, des sensuels, des incrédules, j'ai fait des martyrs et des saints, des évangélisateurs du monde. Seul celui qui ne voulut pas ne changea pas. J'ai aimé et j'aime les petitesses et les faiblesses — tu en es un exemple — pourvu que se trouve en elles la volonté de m'aimer et de me suivre, et de ces "riens " je fais mes privilégiés, mes amis, mes ministres. Je m'en sers toujours, et c'est un miracle continuel que j'opère, pour amener les autres à croire en Moi, à ne pas tuer les possibilités de miracle. Comme elle est languissante, maintenant, cette possibilité !

Comme une lampe à laquelle l'huile manque, elle agonise et meurt, tuée par le manque ou l'absence de foi dans le Dieu du miracle. Il y a deux formes d'exigence dans la demande du miracle. À l'une Dieu se soumet avec amour. À l'autre, Il tourne le dos avec indignation. La première est celle qui demande, comme j'ai enseigné à demander , sans défiance et sans découragement, et qui ne pense pas que Dieu ne puisse pas l’écouter parce que Dieu est bon, et que celui qui est bon exauce, parce que Dieu est puissant et peut tout. Cela c'est de l'amour et Dieu exauce celui qui aime. L'autre forme, c'est l'exigence des révoltés qui veulent que Dieu soit leur serviteur et se plie à leurs méchancetés et leur donne ce qu'eux ne Lui donnent pas: l'amour et l'obéissance. Cette forme est une offense que Dieu punit par le refus de ses grâces.

Vous vous plaignez que je n'accomplisse plus des miracles collectifs. Comment pourrais-je les accomplir ? Où sont les collectivités qui croient en Moi ? Où sont les vrais croyants ? Combien y a-t-il de vrais croyants dans une collectivité ? Comme des fleurs qui survivent dans un bois brûlé par un incendie, je vois de temps à autre un esprit croyant. Le reste, Satan l'a brûlé par ses doctrines, et il les brûlera de plus en plus.

Je vous prie, pour vous conduire surnaturellement, de garder présente à vos esprits ma réponse à Thomas. On ne peut être mes vrais disciples si on ne sait pas donner à la vie humaine le poids qu'elle mérite en tant que moyen pour conquérir la vraie Vie et non en tant que fin. Celui qui voudra sauver sa vie en ce monde perdra la vie éternelle . Je l'ai dit et je le répète. Que sont les épreuves ? La nuée qui passe. Le Ciel reste et vous attend au-delà de l'épreuve.

Moi, j'ai conquis le Ciel pour vous par mon héroïsme. Vous devez m'imiter. L'héroïsme n'est pas réservé seulement à ceux qui doivent connaître le martyre. La vie chrétienne est un perpétuel héroïsme car c'est une lutte perpétuelle contre le monde, le démon et la chair. Je ne vous force pas à me suivre, je vous laisse libres, mais je ne veux pas d'hypocrites. Ou bien avec Moi et comme Moi, ou bien contre Moi. Bien sûr vous ne pouvez me tromper. Moi, vous ne pouvez pas me tromper. Et Moi, je ne fais pas d'alliances avec l'Ennemi. Si vous le préférez à Moi, vous ne pouvez penser m'avoir en même temps pour ami. Ou lui ou Moi. Choisissez. (Dieu où l’Argent) .

La douleur de Marthe est différente de celle de Marie à cause de l'esprit différent des deux sœurs et de la conduite différente qu'elles ont eue. Heureux ceux qui se conduisent de manière à n'avoir pas le remords d'avoir affligé quelqu'un qui maintenant est mort, et qui ne peut plus se consoler des douleurs qu'on lui a données. Mais encore plus heureux celui qui n'a pas le remords d'avoir affligé son Dieu, Moi, Jésus, et qui ne craint pas de me rencontrer, mais au contraire soupire après ma rencontre comme le rêve anxieux de toute sa vie et enfin atteint.

Je suis pour vous Père, Frère, Ami. Pourquoi donc me blessez-vous si souvent ? Savez-vous combien de temps il vous reste à vivre ? À vivre pour réparer ? Vous ne le savez pas. Et alors, heure par heure, jour après jour, conduisez-vous bien, toujours bien. Vous me rendrez toujours heureux. Et même si la douleur vient à vous, car la douleur c'est la sanctification, c'est la myrrhe qui préserve de la putréfaction de la chair, vous aurez toujours en vous la certitude que je vous aime, et que je vous aime même dans cette douleur, et la paix qui vient de mon amour. Toi, petit Jean, tu le sais si Moi je sais consoler même dans la douleur.

Dans ma prière au Père se trouve répété ce que j'ai dit au début : il était nécessaire de secouer par un miracle de première grandeur l'opacité des juifs et du monde en général. La résurrection d'un homme enseveli depuis quatre jours et descendu au tombeau après une maladie bien connue, longue, chronique, répugnante, n'était pas une chose qui pût laisser indifférent ni non plus incertain. Si je l'avais guéri alors qu'il vivait, ou si je lui avais infusé le souffle sitôt qu'il avait expiré, l'âcreté des ennemis aurait pu créer des doutes sur la réalité du miracle. Mais la puanteur du cadavre, la pourriture des bandelettes, le long séjour au tombeau, ne laissaient pas de doute. Et, miracle dans le miracle, j'ai voulu que Lazare fût dégagé et purifié en présence de tout le monde pour que l'on vît que non seulement la vie, mais l'intégrité des membres était revenue là où auparavant l'ulcération de la chair avait répandu dans le sang les germes de mort. Quand je fais grâce, je donne toujours plus que vous ne demandez.

J'ai pleuré devant la tombe de Lazare et on a donné à ces pleurs tant de noms. Pourtant sachez que les grâces s'obtiennent par la douleur mêlée à une foi assurée dans l'Éternel. J'ai pleuré non pas tant à cause de la perte de l'ami et de la douleur de ses sœurs, que parce que, comme un fond qui se soulève, ont affleuré à cette heure, plus vives que jamais, trois idées qui, comme trois clous, m'avaient toujours enfoncé leur pointe dans le cœur.

La constatation de la ruine que Satan avait apportée à l'homme en l'amenant au Mal. Ruine dont la condamnation humaine était la douleur et la mort. La mort physique, emblème et image vivante de la mort spirituelle, que la faute donne à l'âme en la plongeant, elle reine destinée à vivre dans le royaume de la Lumière, dans les ténèbres infernales.

La persuasion que même ce miracle, mis pour ainsi dire comme le corollaire sublime de trois années d'évangélisation, n'aurait pas convaincu le monde judaïque de la Vérité que je lui avais apportée, et qu'aucun miracle n'aurait fait du monde à venir un converti au Christ. Oh ! douleur d'être près de mourir pour un si petit nombre !

La vision mentale de ma morte prochaine. J'étais Dieu, mais j'étais homme aussi. Et pour être Rédempteur je devais sentir le poids de l'expiation, donc aussi l'horreur de la mort et d'une telle mort. J'étais un homme vivant, en bonne santé qui se disait : "Bientôt, je serai mort, je serai dans un tombeau comme Lazare. Bientôt l'agonie la plus atroce sera ma compagne. Je dois mourir". La bonté de Dieu vous épargne la connaissance de l'avenir, mais à Moi elle n'a pas été épargnée.

Oh ! croyez-le, vous qui vous plaignez de votre sort. Aucun n'a été plus triste que le mien, de Moi qui ai eu la constante prescience de tout ce qui devait m'arriver, jointe à la pauvreté, aux privations, aux aigreurs qui m'ont accompagné de ma naissance à ma mort. Ne vous plaignez donc pas et espérez en Moi.

Je vous donne ma paix."

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-009.htm
TOME : 8/009



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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Lun 28 Juil 2014 - 6:42

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_61

Dans la ville de Jérusalem et au Temple
après la résurrection de Lazare


Si la nouvelle de la mort de Lazare avait remué et agité Jérusalem et une bonne partie de la Judée, la nouvelle de sa résurrection finit de remuer et de pénétrer même là où n'avait pas produit d'agitation la nouvelle de sa mort.

Sans doute les quelques pharisiens et scribes, c'est-à-dire les synhédristes présents à la résurrection, n'en avaient pas parlé au peuple, mais certainement les juifs en ont parlé et la nouvelle s'est répandue comme un éclair, et d'une maison à l'autre, d'une terrasse à l'autre, des voix de femmes se la répètent, alors qu'en bas le petit peuple la propage en se réjouissant grandement pour le triomphe de Jésus et pour Lazare. Les gens remplissent les rues en courant çà et là, croyant toujours arriver les premiers pour donner la nouvelle, mais restent déçus car on la connaît à Ophel comme à Bézéta, dans Sion comme au Sixte . On la connaît dans les synagogues et dans les magasins, au Temple et dans le palais d'Hérode.

On la connaît à l'Antonia et de l'Antonia elle se répand dans les postes de garde aux portes ou vice versa. Elle emplit les palais comme les taudis; "Le Rabbi de Nazareth a ressuscité Lazare de Béthanie qui est mort la veille du vendredi et a été mis au tombeau avant le début du sabbat et est ressuscité à l'heure de sexte d'aujourd'hui."

Les acclamations hébraïques au Christ et au Très-Haut se croisent avec celles variées des romains : "Par Jupiter ! Par Pollux ! Par Libitina !" et cætera.

Les seuls que je ne vois pas dans la foule qui parle dans les rues sont ceux du Sanhédrin. Je n'en vois pas un seul, alors que je vois Chouza et Manaën qui sortent d'un splendide palais et que j'entends Chouza qui dit : "Grand ! Grand ! J'ai envoyé tout de suite la nouvelle à Jeanne. Il est réellement Dieu !" et Manaën lui répond : "Hérode, venu de Jéricho pour présenter ses hommages... au Maître : Ponce Pilate, semble fou dans son palais, alors qu'Hérodiade est furieuse et le pousse à donner des ordres pour arrêter le Christ. Elle tremble de sa puissance, lui de ses remords. Il claque des dents en disant aux plus fidèles de le défendre... des spectres. Il s'est enivré pour se donner du courage et le vin lui tourne dans la tête en lui faisant voir des fantômes. Il crie que le Christ a aussi ressuscité Jean qui lui crie maintenant aux oreilles les malédictions de Dieu. Je me suis enfui de cette Géhenne. Je me suis contenté de lui dire : "Lazare a été ressuscité par Jésus de Nazareth. Garde-toi de le toucher, car il est Dieu". Je le garde dans cette peur pour qu'il ne cède pas à la volonté homicide de sa femme."
"Moi, je devrai y aller au contraire... Je dois y aller. Mais avant j'ai voulu passer chez Éliel etElcana. Ils vivent à part, mais ce sont toujours de grandes voix en Israël !

Et Jeanne est contente que je les honore. Et moi..."

"Une bonne protection pour toi, c'est vrai. Mais jamais telle que l'amour du Maître. C'est l'unique protection qui ait de la valeur..."

Chouza ne réplique rien. Il réfléchit... Je les perds de vue,

De Bézéta arrive en toute hâte Joseph d'Arimathie. On l'arrête. C'est un groupe d'habitants incrédules qui se demandent s'il faut croire la nouvelle et ils l'interrogent.

"C'est vrai ! C'est vrai ! Lazare est ressuscité et il est guéri aussi. Je l'ai vu de mes yeux."

"Mais alors... il est vraiment le Messie !"

"Ses œuvres sont telles. Sa vie est parfaite. C'est le temps. Satan le combat. Que chacun conclue dans son cœur ce qu'est le Nazaréen" dit Joseph prudemment et aussi avec exactitude. Il salue et s'en va.

Ils discutent et finissent par conclure : "Il est vraiment le Messie."

Un légionnaire parle dans un groupe : "Si je le puis, demain je vais à Béthanie. Par Vénus et Mars, mes dieux préférés ! Je pourrai faire le tour de l'Orbe des déserts brûlants aux terres glacées germaniques, mais me trouver là où ressuscite quelqu'un mort depuis des jours, cela ne m'arrivera plus. Je veux voir comme est quelqu'un qui revient de la mort. Il sera noirci par l'eau des fleuves d'outre-tombe..."

"S'il était vertueux, il sera blême après avoir bu l'eau céruléenne des Champs Élysées. Il n'y a pas que Styx là-bas..."

"Il nous dira comment sont les prairies d'asphodèles de l'Hadès... Je viens moi aussi."

"Si Ponce le veut..."

"Oh ! bien sûr qu'il le veut ! Il a expédié tout de suite un courrier à Claudia pour qu'elle vienne. Claudia aime ces choses. Je l'ai entendue plus d'une fois avec les autres et avec ses affranchis grecs discuter de l'âme et de l'immortalité."

"Claudia croit au Nazaréen. Pour elle il est plus grand que tout autre homme."

"Oui. Mais pour Valeria, il est plus qu'un homme, c'est Dieu. Une espèce de Jupiter et d'Apollon pour la puissance et la beauté, disent-elles, et il est plus sage que Minerve. L'avez-vous vu ? Moi, je suis venu ici pour la première fois avec Ponce et je ne sais pas..."

"Je crois que tu es arrivé à temps pour voir beaucoup de choses. Tout à l'heure, Ponce criait d'une voix de Stentor : "Ici, tout doit changer. Ils doivent comprendre que c'est Rome qui commande et qu'eux, tous, sont asservis. Et plus ils sont grands, plus ils sont asservis, parce que plus dangereux". Je crois que c'est à cause de cette tablette qui lui avait été apportée par le serviteur d'Anna..."

"Bien sûr, il ne veut pas les écouter... Et il nous change tous car... il ne veut pas d'amitié entre nous et eux."
"Entre nous et eux ? Ha ! Ha ! Ha ! Avec ceux au gros nez qui sentent mauvais ? Ponce digère mal la trop grande quantité de porc qu'il mange. A moins... qu'il ne s'agisse de l'amitié avec quelque femme qui ne dédaigne pas de baiser des bouches rasées..." dit quelqu'un en riant malicieusement.

"C'est un fait que depuis les troubles des Tabernacles il a demandé et obtenu le changement de toutes les troupes, et qu'il nous faut partir..."

"C'est vrai. On a déjà signalé à Césarée l'arrivée de la galère qui transporte Longin et sa centurie. De nouveaux gradés, de nouvelles troupes... et tout cela à cause de ces crocodiles du Temple. J'étais bien ici."

"Moi, j'étais mieux à Brindisi... Mais je m'habituerai" dit celui qui vient d'arriver en Palestine.

Ils s'éloignent eux aussi.

Des gardes du Temple passent avec des tablettes de cire. Les gens les observent et disent : "Le Sanhédrin se réunit d'urgence. Que veulent-ils faire ?"

Quelqu'un répond : "Montons au Temple et voyons…" Ils se dirigent vers la rue qui va auMoriah.

Le soleil disparaît derrière les maisons de Sion et les monts de l'occident. Le soir tombe et va bientôt débarrasser les rues des curieux. Ceux qui sont montés au Temple en descendent fâchés parce qu'on les a chassés même des portes où ils s'étaient attardés pour voir passer les synhédristes.

L'intérieur du Temple, vide, désert, enveloppé par la lumière de la lune, paraît immense. Les synhédristes se rassemblent lentement dans la salle du Sanhédrin. Ils y sont tous, comme pour la condamnation de Jésus. Pourtant ne s'y trouvent pas ceux qui alors faisaient office de greffiers. Il n'y a que les synhédristes, en partie à leurs places, en partie en groupes près des portes.

Caïphe entre avec sa figure et son corps de crapaud obèse et méchant, et il va à sa place.

Ils commencent de suite à discuter sur les faits survenus et ils se passionnent tellement pour la chose que bientôt la séance devient animée. Ils quittent leurs places, descendent dans l'espace vide en gesticulant et en parlant à haute voix. Quelques-uns conseillent le calme et de bien réfléchir avant de prendre des décisions.

D'autres répliquent : "Mais n'avez-vous pas entendu ceux qui sont venus ici après none ? Si nous perdons les juifs les plus influents, à quoi nous sert alors d'accumuler les accusations ? Plus il vit et moins on nous croira si nous l'accusons."

"Et ce fait, on ne peut le nier. On ne peut dire aux gens nombreux qui étaient là : "Vous avez mal vu. C'est une illusion. Vous étiez ivres". Le mort était mort, putréfié, décomposé. Il avait été déposé dans un tombeau fermé et le tombeau était bien muré.

Le mort était sous les bandelettes et les baumes depuis plusieurs jours. Le mort était lié. Et pourtant il est sorti de sa place, il est venu de lui-même sans marcher jusqu'à l'ouverture. Et une fois libéré, il n'était plus mort en son corps. Il respirait. Il n'y avait plus de corruption, alors qu'auparavant quand il vivait, il était couvert de plaies et, dès sa mort, il était tout décomposé."

"Vous avez entendu les juifs les plus influents, ceux que nous avions poussés là pour les conquérir complètement à notre cause ? Ils sont venus nous dire : "Pour nous, il est le Messie". Presque tous sont venus ! Le peuple ensuite !..."

"Et ces maudits romains pleins de fables ! Qu'en faites-vous ? Pour eux, il est JupiterMaximus. Et s'ils se mettent cette idée en tête ! Ils nous ont fait connaître leurs histoires, et cela a été une malédiction. Anathème sur ceux qui ont voulu l'hellénisme en nous, et pour les flatter nous ont profané par des coutumes qui ne sont pas nôtres ! Mais pourtant cela sert aussi à notre information, et nous savons que le romain a vite fait d'abattre et d'élever par des conjurations et des coups d'état. Or si certains de ces fous s'enthousiasment pour le Nazaréen et le proclament César, et par conséquent divin, qui pourra le toucher ?"

"Mais non ! Qui veux-tu qui fasse cela ? Eux se rient de Lui et de nous. Pour grand que soit ce qu'il accomplit, pour eux il est toujours "un juif", et donc un misérable. La peur te rend stupide, ô fils d'Anna !"

"La peur ? As-tu entendu comment Ponce a répondu à l'invitation de mon père ? Il est bouleversé, te dis-je, il est bouleversé par ce dernier fait et il craint le Nazaréen. Malheureux que nous sommes ! Cet homme est venu pour notre ruine !"

"Si au moins nous n'y étions pas allés et si nous n'avions pas presque commandé aux plus puissants des juifs d'y aller ! Si Lazare était ressuscité sans témoins."

"Eh bien ? Qu'est-ce que cela aurait changé ? Nous ne pouvions sûrement pas le faire disparaître pour faire croire qu'il était toujours mort !"

"Cela non. Mais nous pouvions dire que cela avait été une fausse mort. Des témoins payés pour dire le faux, on en trouve toujours."

"Mais pourquoi tant d'agitation ? Je n'en vois pas la raison ! A-t-il, par hasard, provoqué le Sanhédrin et le Pontificat ? Non. Il s'est borné à accomplir un miracle."

"Il s'est borné ? ! Mais tu es sot ou vendu à Lui, Éléazar ? Il n'a pas provoqué le Sanhédrin et le Pontificat ? Et que veux-tu de plus ? Les gens..."

"Les gens peuvent dire ce qu'ils veulent, mais les choses sont comme le dit Eléazar. Le Nazaréen n'a fait qu'un miracle."

"Voilà l'autre qui le défend ! Tu n'es plus un juste, Nicodème ! Tu n'es plus un juste ! C'est un acte contre nous, contre nous, comprends-tu ? Plus rien ne persuadera la foule. Ah ! malheureux que nous sommes ! Moi, aujourd'hui, j'ai été bafoué par certains juifs. Moi, bafoué ! Moi !"

"Tais-toi, Doras ! Tu n'es qu'un homme, mais c'est l'idée qui est frappée ! Nos lois. Nos prérogatives !"

"Tu parles bien, Simon, et il faut les défendre."

"Mais comment ?"

"En attaquant, en détruisant les siennes !"

"C'est vite dit, Sadoc. Mais comment les détruis-tu si de toi-même tu ne sais pas faire revivre un moucheron ? Ici, il nous faudrait un miracle plus grand que le sien, mais aucun de nous ne peut le faire parce que…" Celui qui parle ne sait pas dire pourquoi.

Joseph d'Arimathie termine la phrase : "Parce que nous sommes des hommes, seulement des hommes."

Ils se jettent sur lui en demandant : "Et Lui, qui est-il alors ?"

L'homme d'Arimathie répond avec assurance : "Il est Dieu. Si j'avais encore des doutes..."

"Mais tu n'en avais pas. Nous le savons, Joseph. Nous le savons. Dis-le donc ouvertement que tu l'aimes !"

"Il n'y a rien de mal que Joseph l'aime. Moi-même je le reconnais pour le plus grand Rabbi d'Israël."

"C'est toi ! Toi, Gamaliel, qui dis cela ?"

"Je le dis. Et je m'honore d'être... détrôné par Lui. Jusqu'à présent j'avais conservé la tradition des grands rabbis, dont le dernier était Hillel, mais après moi je n'aurais pas su qui pouvait recueillir la sagesse des siècles. Maintenant je m'en vais content parce que je sais qu'elle ne mourra pas, mais au contraire deviendra plus grande parce qu'elle sera accrue de la sienne, à laquelle est certainement présent l'Esprit de Dieu."
"Mais que dis-tu, Gamaliel ?"

"La vérité. Ce n'est pas en se ferma nt les yeux que l'on peut ignorer ce que nous sommes. Nous ne sommes plus sages car le principe de la sagesse c'est la crainte de Dieu et nous nous sommes des pécheurs dépourvus de la crainte de Dieu. Si nous avions cette crainte, nous ne piétinerions pas le juste et nous n'aurions pas la sotte avidité des richesses du monde. Dieu donne et Dieu enlève, selon les mérites et les démérites. Et si maintenant Dieu nous enlève ce qu'il nous avait donné, pour le donner à d'autres, qu'il soit béni car saint est le Seigneur, et saintes sont toutes ses actions."

"Mais nous parlions de miracle et nous voulions dire que personne de nous ne peut les faire parce que Satan n'est pas avec nous."

"Non. Parce que Dieu n'est pas avec nous. Moïse sépara les eaux et ouvrit le rocher, Josué arrêta le soleil, Élie ressuscita l'enfant et fit tomber la pluie, mais Dieu était avec eux. Je vous rappelle qu'il y a six choses que Dieu hait et qu'il exècre la septième : les yeux orgueilleux, la langue menteuse, les mains qui répandent le sang innocent, le cœur qui médite des desseins mauvais, les pieds qui courent rapidement vers le mal, le faux témoin qui dit des mensonges et celui qui met la discorde parmi ses frères . Nous faisons toutes ces choses. Je dis "nous", mais c'est vous seuls qui les faites, car moi je m'abstiens de crier "Hosanna" et de crier "Anathème". J'attends."

"Le signe ! Naturellement, tu attends le signe ! Mais quel signe attends-tu d'un pauvre fou, si vraiment nous voulons Lui donner tous les pardons ?"

Gamaliel lève les mains et, les bras en avant, les yeux fermés, la tête légèrement inclinée, hiératique d'autant plus qu'il parle lentement et d'une voix lointaine : "J'ai interrogé anxieusement le Seigneur pour qu'Il m'indiquât la vérité, et Lui a éclairé pour moi les paroles de Jésus fils de Sirac, celles-ci : "Le Créateur de toutes choses m'a parlé et m'a donné ses ordres, et Celui qui m'a crée a reposé dans mon Tabernacle et Il m'a dit : 'Habite en Jacob, que ton héritage soit en Israël, jette tes racines parmi mes élus" ... Et encore Il m'a éclairé celles-ci, et je les ai reconnues : "Venez à Moi, vous tous qui me désirez et rassasiez-vous de mes fruits, car mon esprit est plus doux que le miel et mon héritage plus qu'un rayon de miel. Mon souvenir durera dans les générations des siècles.

Celui qui me mange aura faim de Moi, et celui qui boit de Moi aura soif de Moi, et celui qui m'écoute n'aura pas à rougir, et celui qui travaille pour Moi ne pèche pas, et celui qui me met en lumière aura la vie éternelle" . Et la lumière de Dieu s'accrut en mon esprit alors que mes yeux lisaient ces paroles : "Ce sont toutes ces choses que contient le livre de la Vie, le testament du Très-Haut, la doctrine de la Vérité ... Dieu a promis à David de faire naître de lui le Roi très puissant qui doit rester assis éternellement sur le trône de la gloire. Lui regorge de sagesse comme le Phison et le Tigre au temps des nouveaux fruits, comme l'Euphrate regorge d'intelligence, et il croît comme le Jourdain au temps de la moisson. Il répand la sagesse comme la lumière... Lui, le premier, l'a parfaitement connue"

Voilà les lumières que Dieu m'a données ! Mais, hélas ! que dis-je, que la Sagesse qui est parmi nous est trop grande pour que nous la comprenions et que nous accueillions une pensée plus vaste que la mer et un conseil plus profond que le grand abîme. Et nous l'entendons crier : "Comme un canal d'eaux immenses j'ai jailli du Paradis et j'ai dit : 'J'arroserai mon jardin' et voilà que mon canal devient un fleuve, et le fleuve une mer. Comme l'aurore, je diffuse à tous ma doctrine et je la ferai connaître à ceux qui sont le plus loin. Je pénétrerai dans les parties les plus basses, je jetterai mon regard sur ceux qui dorment, j'éclairerai ceux qui espèrent dans le Seigneur. Et je répandrai encore ma doctrine comme une prophétie et je la laisserai à ceux qui cherchent la sagesse, je ne cesserai pas de l'annoncer jusqu'au siècle saint. Je n'ai pas travaillé pour moi seulement, mais pour tous ceux qui cherchent la vérité" . Voilà ce que m'a fait lire Jéhovah, le Très-Haut" et il abaisse les bras en relevant la tête.

"Mais alors pour toi il est le Messie ? ! Dis-le !"

"Ce n'est pas le Messie."

"Il ne l'est pas ? Mais alors, qu'est-il pour toi ? Un démon, non. Un ange, non. Le Messie, non,.."

"Il est Celui qui est."

"Tu délires ! Il est Dieu ? Il est Dieu pour toi, ce fou ?"

"Il est Celui qui est. Dieu sait ce qu'il est. Nous voyons ses œuvres, Dieu voit aussi ses pensées. Mais il n'est pas le Messie car, pour nous, Messie veut dire Roi. Lui n'est pas, ne sera pas roi. Mais il est saint, et ses œuvres sont celles d'un saint. Et nous, nous ne pouvons pas lever la main sur l'Innocent, sans commettre un péché. Moi, je ne souscrirai pas au péché."

"Mais par ces paroles tu l'as presque appelé l'Attendu !"

"C'est ce que j'ai dit. Tant qu'a duré la lumière du Très-Haut, je l'ai vu tel. Puis... quand m'a abandonné la main du Seigneur, élevé dans sa lumière, je suis redevenu homme, l'homme d'Israël, et les paroles n'ont plus été que des paroles auxquelles l'homme d'Israël, moi, vous, ceux d'avant nous et, que Dieu ne le permette pas, ceux d'après nous, donnent le sens deleur, de notre pensée, pas le sens qu'elles ont dans la Pensée éternelle qui les a dictées à son serviteur."

"Nous parlons, nous divaguons, nous perdons du temps et, pendant ce temps-là, le peuple s'agite" dit Canania de sa voix rauque.

"Bien dit ! Il faut décider et agir, pour se sauver et triompher."

"Vous dites que Pilate n'a pas voulu nous écouter quand nous demandions son aide contre le Nazaréen. Mais si nous lui faisions savoir... Vous avez dit auparavant que si les troupes s'exaltent elles peuvent le proclamer César... Eh ! Eh ! c'est une bonne idée ! Allons exposer au Proconsul ce danger. Nous serons honorés comme de fidèles serviteurs de Rome et... si lui intervient nous serons débarrassés du Rabbi. Allons, allons ! Toi, Éléazar d'Anna, qui es plus que tous son ami, sois notre chef" dit en riant Elchias de sa voix de serpent.

Il y a un peu d'hésitation, mais ensuite un groupe des plus fanatiques sort pour se rendre à l'Antonia. Caïphe reste avec les autres.

"À cette heure ! Ils ne seront pas reçus" objecte quelqu'un.

"Non, au contraire ! C'est la meilleure. Ponce est toujours de bonne humeur quand il a bu et mangé comme boit et mange un païen... "

Je les laisse là à discuter, et pour moi s'éclaire la scène de l'Antonia.

Le parcours est fait vite et sans difficulté tant est limpide la clarté de la lune qui contraste grandement avec la lumière rouge des lampes allumées dans le vestibule du palais prétorien.

Eléazar réussit à se faire annoncer à Pilate, et on les fait passer dans une grande salle vide, absolument vide. Il n'y a qu'un siège massif, avec un dossier bas, couvert d'un drap pourpre qui ressort vivement dans la blancheur absolue de la salle. Ils se tiennent en groupe, un peu craintifs, transis de froid, debout sur le marbre blanc du pavé. Il ne vient personne. Le silence est absolu. Pourtant, par intervalles, une musique lointaine rompt ce silence.

"Pilate est à table, certainement avec des amis. Cette musique vient du triclinium Il y aura des danses en l'honneur des hôtes" dit Eléazar d'Anna.

"Corrompus ! Demain je me purifierai. La luxure transpire de ces murs" dit avec dégoûtElchias.

"Pourquoi es-tu venu, alors ? C'est toi qui l'as proposé" lui réplique Eléazar.

"Pour l'honneur de Dieu et le bien de la Patrie, je sais faire n'importe quel sacrifice. Et c'est un grand sacrifice ! Je m'étais purifié pour m'être approché de Lazare... et maintenant !... Journée terrible, aujourd'hui !..."

Pilate ne vient pas. Le temps passe. Eléazar, habitué à l'endroit, essaie les portes. Elles sont toutes fermées. La crainte s'empare de ceux qui sont présents. Des histoires effrayantes reviennent à l'esprit. Ils regrettent d'être venus. Ils se sentent déjà perdus.

Finalement, du côté qui est opposé à eux, qui sont près de la porte par laquelle ils sont entrés, et par conséquent près de l'unique siège de la pièce, voilà que s'ouvre une porte et qu'entre Pilate avec un vêtement tout blanc comme la salle. Il entre en parlant avec des invités. Il rit. Il se tourne pour commander à un esclave qui soulève un rideau au-delà de la sortie, de jeter des essences dans un brasier et d'apporter des parfums et de l'eau pour les mains, et qu'un esclave vienne avec un miroir et des peignes. Il ne s'occupe pas des hébreux, c'est comme s'ils n'existaient pas. Ceux-ci sont en colère, mais n'osent pas bouger...

Là-bas, pendant ce temps, on apporte des brasiers, on répand des résines sur le feu, on verse de l'eau parfumée sur les mains des romains. Un esclave, par des mouvements adroits, peigne les cheveux selon la mode des riches romains de l'époque. Et les hébreux s'emportent.

Les romains rient entre eux et plaisantent en regardant de temps en temps le groupe qui attend là-bas, au fond, et quelqu'un parle à Pilate qui ne s'est jamais tourné pour regarder; mais Pilate hausse les épaules avec un geste d'ennui et bat des mains pour appeler un esclave auquel il ordonne à haute voix d'apporter des friandises et de faire entrer les danseuses. Les hébreux, scandalisés, frémissent de colère. Pensez à un Elchias obligé de voir des danseuses ! Son visage est un poème de souffrance et de haine.

Les esclaves arrivent avec des friandises dans des coupes précieuses, et derrière les danseuses couronnées de fleurs et à peine couvertes de toiles si légères qu'elles semblent des voiles. Les chairs très blanches transparaissent à travers les vêtements légers, teints de rosé et bleu clair, quand elles passent devant les brasiers allumés et les lampes nombreuses posées au fond. Les romains admirent la grâce des corps et des mouvements et Pilate redemande un pas de danse qui lui a plu particulièrement. Elchias, imité par ses compagnons, se tourne indigné contre le mur pour ne pas voir les danseuses voler comme des papillons dans un balancement d'habits inconvenants.

Une fois finie la courte danse, Pilate les congédie en mettant dans la main de chacune une coupe remplie de friandises où il jette nonchalamment un bracelet. Finalement il daigne se tourner pour regarder les hébreux et il dit à ses amis d'un air ennuyé : "Et maintenant... je devrai passer du rêve à la réalité... de la poésie à... l'hypocrisie... de la grâce aux ordures de la vie. Misère d'être Proconsul !... Salut, amis, et ayez compassion de moi."

Il reste seul et lentement il s'approche des hébreux. Il s'assoit, observe ses mains bien soignées, et découvre sous un ongle quelque chose qui ne va pas. Il s'en occupe et s'en préoccupe en sortant de son vêtement une fine baguette d'or avec laquelle il remédie au grand dommage d'un ongle imparfait...

Puis il fait la grâce de tourner lentement la tête. Il ricane à la vue des juifs encore inclinés servilement, et leur dit : "Vous ! Ici ! Et soyez brefs. Je n'ai pas de temps à perdre à des choses sans importance."

Les hébreux s'approchent dans une attitude toujours servile jusqu'à ce qu'un : "Assez ! Pas trop près !" les cloue au sol. "Parlez ! Et redressez-vous. Il ne convient qu'à des animaux de rester courbés vers le sol" et il rit.

Les hébreux se redressent sous le mépris et se tiennent plastronnant.

"Donc ? Parlez ! Vous avez voulu absolument venir. Maintenant que vous êtes ici, parlez."

"Nous voulions te dire... Pour autant que nous sachions... Nous sommes des serviteurs fidèles de Rome..."

"Ha ! Ha ! Ha ! Des serviteurs fidèles de Rome ! Je le ferai savoir au divin César et il en sera heureux ! Il sera heureux ! Parlez, farceurs ! Et faites vite !"

Les synhédristes trépignent, mais ne réagissent pas. Elchias prend la parole au nom de tous : "Tu dois savoir, ô Ponce, qu'aujourd'hui à Béthanie un homme a été ressuscité..."

"Je le sais. C'est pour me dire cela que vous êtes venus ? Je le savais déjà depuis plusieurs heures. Il a de la chance de savoir déjà ce que c'est que mourir et ce que c'est que l'autre monde ! Et que puis-je y faire si Lazare de Théophile est ressuscité ? Peut-être il m'a apporté un message de l'Hadès ?" Il est ironique.

"Non. Mais sa résurrection est un danger..."

"Pour lui ? Certainement ! Le danger de devoir mourir de nouveau. Opération peu agréable. Eh bien ! Que puis-je y faire ? Suis-je Jupiter, moi ?"

"Un danger, non pour Lazare, mais pour César."

"Pour ?... Domine ! Mais peut-être ai-je bu ! Vous avez dit : pour César ? Et en quoi Lazare peut-il nuire à César ? Vous craignez peut-être que la puanteur de son tombeau puisse corrompre l'air que respire l'Imperator ? Rassurez-vous ! C'est trop loin !"

"Ce n'est pas cela. C'est que Lazare, en ressuscitant, peut faire détrôner l'Imperator."

"Détrôner ? Ha ! Ha ! Ha ! C'est plus grand que le monde ! Mais alors ce n'est pas moi qui suis ivre, mais vous. Peut-être l'épouvante vous a bouleversé l'esprit. Voir ressusciter... Je crois, je crois que cela peut troubler. Allez, allez au lit. Un bon repos. Et un bain chaud, bien chaud, salutaire contre les délires."

"Nous ne délirons pas, Ponce, Nous te disons que si tu n'y mets pas bon ordre, tu passeras de tristes heures. Tu seras certainement puni, si même tu n'es pas tué par l'usurpateur. D'ici peu, le Nazaréen sera proclamé roi, roi du monde, comprends-tu ? Les légionnaires eux-mêmes le feront. Ils sont séduits par le Nazaréen et l'événement d'aujourd'hui les a exaltés. Quel serviteur de Rome es-tu si tu ne te préoccupes pas de sa paix ? Veux-tu donc voir l'Empire bouleversé et divisé à cause de ton inertie ? Veux-tu voir Rome vaincue, et les enseignes abattues, l'Imperator tué, tout détruit..."

"Silence ! C'est moi qui parle, et je vous dis : vous êtes des fous ! Davantage encore : vous êtes des menteurs, vous êtes des malandrins. Vous mériteriez la mort. Sortez d'ici, hideux serviteurs de vos intérêts, de votre haine, de votre bassesse. Vous êtes esclaves, pas moi. Je suis citoyen romain et les citoyens romains ne sont assujettis à personne. Je suis le fonctionnaire impérial et je travaille pour les intérêts de la patrie. Vous... vous êtes les sujets. Vous... vous êtes sous notre domination. Vous... vous êtes les galériens attachés aux bancs, et vous frémissez inutilement. Le fouet du chef est sur vous. Le Nazaréen !... Vous voudriez que je tue le Nazaréen ? Vous voudriez que je l'emprisonne ? Par Jupiter ! Si pour le salut de Rome et du divin Imperator je devais emprisonner les sujets dangereux, ou les tuer ici où je gouverne, c'est le Nazaréen et ses partisans, eux seuls, que je devrais laisser libres et vivants. Allez. Dégagez et ne revenez plus jamais devant moi. Turbulents ! Fauteurs de troubles !

Voleurs et complices de voleurs ! Aucune de vos manigances ne m'est inconnue. Sachez-le, et sachez aussi que des armes toutes neuves et de nouveaux légionnaires ont servi à découvrir vos pièges et vos instruments. Vous criez pour les impôts romains, mais que vous a coûté Melchias de Galaad, et Jonas de Scythopolis, et Philippe de Soco, et Jean de Bétaven, et Joseph de Ramaot, et tous les autres qui vont bientôt être pris ? Et n'allez pas près des grottes de la vallée car il s'y trouve plus de légionnaires que de pierres, et les lois et la galère sont les mêmes pour tous. Pour tous ! Vous comprenez ? Pour tous. Et j'espère vivre assez pour vous voir tous enchaînés, esclaves parmi les esclaves sous le talon de Rome.

Sortez ! Allez et rapportez ma réponse, même toi, Eléazar d'Anna que je ne veux plus voir dans ma maison, car le temps de la clémence est fini, car moi je suis le Proconsul et vous les sujets.Les sujets. C'est moi qui commande, au nom de Rome. Sortez ! Serpents de nuit ! Vampires ! Et le Nazaréen veut vous racheter ? S'il était Dieu, il devrait vous foudroyer ! Et du monde serait disparue la tache la plus dégoûtante. Dehors ! Et n'osez pas faire de conjurations, ou vous connaîtrez le glaive et le fouet."

Il se lève et s'en va en claquant la porte devant les synhédristes interdits qui n'ont pas le temps de se remettre car un détachement en armes les chasse hors de la salle et du palais comme des chiens.

Ils reviennent à la salle du Sanhédrin. Ils racontent. L'agitation est à son comble. La nouvelle de l'arrestation de plusieurs voleurs et des battues dans les grottes pour prendre les autres, trouble fortement tous ceux qui sont restés, car plusieurs, lassés d'attendre, s'en sont allés.

"Et pourtant nous ne pouvons pas le laisser vivre" crient des prêtres.

"Nous ne pouvons pas le laisser faire. Lui agit. Nous nous ne faisons rien, et jour après jour nous perdons du terrain. Si nous le laissons libre encore, il continuera de faire des miracles et tous croiront en Lui. Et les romains finiront par être contre nous, et nous détruire complètement. Ponce parle ainsi, mais si la foule le proclamait roi, oh ! alors Ponce a le devoir de nous punir, tous. Nous ne devons pas le permettre" crie Sadoc.

"C'est bien. Mais comment ? La voie... légale romaine a failli. Ponce est sûr du Nazaréen. Notre voie... légale est rendue impossible. Lui ne pèche pas..." objecte quelqu'un.

"On invente la faute, si elle n'existe pas" insinue Caïphe.

"Mais c'est un péché de faire cela ! Jurer ce qui est faux ! Faire condamner un innocent ! C'est... trop !..., disent la plupart avec horreur. C'est un crime car ce sera la mort pour Lui."

"Eh bien ? Cela vous effraie ? Vous êtes des sots et n'y comprenez rien. Après ce qui est arrivé, Jésus doit mourir. Vous ne réfléchissez pas vous tous qu'il vaut mieux qu'il meure un homme plutôt qu'un grand nombre ? Par conséquent que Lui meure pour sauver son peuple pour que ne périsse pas toute la nation. Du reste... Lui dit qu'il est le Sauveur. Qu'il se sacrifie donc pour sauver tout le monde" dit Caïphe, odieux par sa haine froide et astucieuse.

"Mais Caïphe ! Réfléchis ! Lui..."

"J'ai parlé. L'esprit du Seigneur est sur moi, le Grand Prêtre.

Malheur à qui ne respecte pas le Pontife d'Israël. Les foudres de Dieu sur lui ! C'est assez attendu ! C'est assez discuté ! J'ordonne et décrète que quiconque sait où se trouve le Nazaréen vienne dénoncer l'endroit, et anathème sur qui n'obéira pas à ma parole."

"Mais Anna..." objectent certains.

"Anna m'a dit : "Tout ce que tu feras sera saint". Levons la séance. Vendredi, entre tierce et sexte, tous ici pour délibérer. J'ai dit tous, faites-le savoir aux absents. Et que soient convoqués tous les chefs de familles et de classes, toute l'élite d'Israël. Le Sanhédrin a parlé. Allez."

Il se retire le premier là d'où il était venu, alors que les autres prennent d'autres directions, et ils sortent du Temple en parlant à voix basse pour rentrer chez eux.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-010.htm
TOME : 8 /10
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus


♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Conspi10
Conspiration du Sanhédrin
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mar 29 Juil 2014 - 6:54

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_62

Jésus à Béthanie

Il fait bon rester ainsi, au repos, dans l'amour des amis et près du Maître dans les journées ensoleillées qui annoncent déjà un précoce sourire de printemps, à regarder les champs qui ouvrent leurs sillons à un verdoiement innocent des grains qui poussent, à regarder les prés qui rompent le vert uniforme de l'hiver avec les premières fleurettes multicolores, à regarder les haies qui dans les endroits les plus ensoleillés présentent déjà le sourire des boutons qui s'ouvrent, à regarder les amandiers qui déjà moussent à leur sommet avec les premières fleurs qui éclosent.

Et Jésus en jouit, et de même les apôtres, et aussi les trois amis de Béthanie. Elle semble si loin la malveillance, la douleur, la tristesse, la maladie, la mort, la haine, l'envie, tout ce qui est peine, tourment, préoccupation sur la Terre.

Les apôtres, tous, jubilent et le montrent. Ils disent leur conviction, oh ! si sûre, si triomphante, que désormais Jésus a vaincu tous ses ennemis, que sa mission continuera désormais sans obstacles, qu'il sera reconnu comme Messie même par ceux qui s'obstinaient davantage à le nier. Et ils parlent, un peu exaltés, rajeunis, tant ils sont heureux, en faisant des projets pour l'avenir, en rêvant... en rêvant tellement... et si humainement.

Le plus exalté, à cause de sa mentalité qui le porte aux extrêmes, c'est Judas de Kériot. Il se félicite d'avoir su attendre, et d'avoir su agir, il se félicite de sa longue foi dans le triomphe du Maître, il se félicite d'avoir défié les menaces du Sanhédrin... Il est tellement exalté qu'il finit par dire aussi ce qu'il a toujours tenu caché jusqu'ici, au milieu de l’étonnement et de la stupéfaction de ses compagnons : "Oui, ils voulaient m'acheter, ils voulaient me séduire par des flatteries, et en voyant qu'elles ne servaient pas, par des menaces. Si vous saviez ! Mais moi, je les ai payés de la même monnaie. J'ai feint de l'amour pour eux, comme eux pour moi. Je les ai flattés comme eux me flattaient, et je les ai trahis comme eux voulaient me trahir... Parce que, c'est cela qu'ils voulaient.

Me faire croire que c'était dans une bonne intention qu'ils éprouvaient le Maître pour pouvoir le proclamer solennellement le Saint de Dieu. Mais moi je les connais ! Je les connais. Et dans toutes les choses qu'ils me disaient vouloir faire, je m'y prenais de façon que la sainteté de Jésus se manifestât vraiment avec plus d'éclat que le soleil de midi dans un ciel sans nuages... Jeu dangereux que le mien ! S'ils l'avaient compris ! Mais j'étais prêt à tout, même à mourir, pour servir Dieu dans mon Maître. Et ainsi je savais tout... Hé ! parfois je vous aurai semblé fou, mauvais, sauvage. Si vous aviez su ! Moi seul je connais mes nuits, les précautions que je devais prendre pour faire du bien sans attirer l'attention de personne ! Vous me suspectiez tous quelque peu, je le sais, mais je ne vous garde pas rancune. Ma manière de faire... oui... pouvait faire naître des soupçons, mais mon but était bon et je ne me préoccupais que de cela. Jésus ne sait rien, ou plutôt je crois que Lui aussi me soupçonne.

Mais je saurai me taire sans exiger de Lui sa louange. Et taisez-vous, vous aussi. Un jour, dans les premiers temps que j'étais avec Lui — et toi, Simon le Zélote, et toi, Jean de Zébédée, vous étiez avec moi — Lui me fit un reproche parce que je m'étais vanté d'avoir le sens pratique . Depuis lors, moi... je ne Lui ai jamais fait ressortir cette qualité, mais j'ai continué de l'employer, pour son bien. J'ai agi comme une mère pour son enfant inexpérimenté. Elle enlève les obstacles de son chemin, elle plie pour lui la branche sans épines et lève celle qui peut le blesser, ou bien par des gestes avisés, elle l'amène à faire ce qu'il doit savoir faire et à éviter ce qui est mal, sans même que son fils s'en aperçoive. Ainsi le fils croit être arrivé par lui-même à marcher sans trébucher, à cueillir une belle fleur pour sa mère, à faire ceci ou cela spontanément. J'ai fait la même chose avec le Maître, car la sainteté ne suffit pas dans un monde d'hommes et de satans. Il faut aussi combattre à armes égales, au moins en hommes... et parfois... même un rien de fourberie d'enfer ce n'est pas mal de la ranger parmi les armes. C'est mon idée.

Mais Lui ne veut pas en entendre parler... Il est trop bon... Bon ! Moi je comprends tout et tout le monde et j'excuse tous des mauvaises pensées que vous pouvez avoir eues sur mon compte. Maintenant vous savez. Maintenant aimons-nous en bons compagnons, tout pour son amour et sa gloire" et il montre Jésus qui se promène beaucoup plus loin dans une allée ensoleillée en parlant avec Lazare, qui l'écoute avec un sourire extasié sur le visage.

Les apôtres s'éloignent vers la maison de Simon. Jésus s'approche au contraire avec son ami. Je les écoute. Lazare dit : "Oui. Je l'avais compris qu'il y avait un grand but, et certainement de bonté, de me laisser mourir. Je pensais que c'était pour m'épargner la vue de la persécution qu'ils te font. Et, tu sais si je dis la vérité, j'étais content de mourir pour ne pas la voir. Elle m'aigrit, elle me trouble. Vois-tu, Maître. J'ai pardonné tant de choses à ceux qui sont les chefs de notre peuple. J'ai dû pardonner jusqu'aux derniers jours... Elchias... Mais la mort et la résurrection ont annulé tout ce qui s'y rapportait. Pourquoi me rappeler leurs dernières actions pour m'affliger ? J'ai tout pardonné à Marie. Elle semble en douter. Et même, je ne sais pourquoi, depuis que je suis ressuscité elle a pris à mon égard une attitude si... je ne sais comment la définir.

Elle est d'une douceur et d'une soumission, si étrange dans ma Marie... Même dans les premiers moments où elle revint ici, rachetée par Toi, elle n'était pas ainsi... Et même, peut-être tu sais et tu peux m'en dire quelque chose, car Marie te dit tout... Tu sais si ceux qui sont venus ici lui ont peut-être fait trop de reproches . J'ai toujours cherché à amoindrir le souvenir de sa faute quand je l'ai vue absorbée dans la pensée du passé pour guérir sa souffrance. Elle ne sait pas s'en tranquilliser. Elle semble tellement... au-dessus de ce qui pourrait être de l'avilissement. A certains elle pourrait paraître même peu repentie... Mais moi, je comprends... Je sais. Elle fait tout pour expier. Je crois qu'elle fait de grandes pénitences, de toutes sortes. Je ne m'étonnerais pas que sous ses vêtements elle eût un cilice et que sa chair connût la morsure des fouets... Mais l'amour fraternel que j'ai, et qui veut la soutenir en mettant un voile entre le passé et le présent, les autres ne l'ont pas... Tu sais si, peut-être, elle a été maltraitée par ceux qui ne savent pas pardonner... et elle a tant besoin de pardon ?"

"Je ne sais pas, Lazare. Marie ne m'en a pas parlé. Elle m'a dit seulement d'avoir beaucoup souffert en entendant les pharisiens insinuer que je n'étais pas le Messie parce que je ne te guérissais pas ou que je ne te ressuscitais pas."

"Et... elle ne t'a rien dit de moi ? Tu sais... j'avais si mal... Je me rappelle que ma mère, à ses derniers moments, révéla des choses qui étaient passées inaperçues à Marthe et à moi. Ce fut comme si le fond de son âme et de son passé était revenu à la surface dans les derniers soulèvements du cœur. Moi, je ne voudrais pas... Mon cœur a tant souffert pour Marie... et s'est tant efforcé de ne lui donner jamais l'impression de ce que j'ai souffert à cause d'elle... Je ne voudrais pas l'avoir frappée, maintenant qu'elle est bonne, alors que par amour fraternel d'abord, par amour pour Toi ensuite, je ne l'ai jamais frappée au temps infâme où elle était un opprobre. Que t'a-t-elle dit de moi, Maître ?"

"Sa douleur d'avoir eu trop peu de temps pour te donner son saint amour de sœur et de condisciple. En te perdant, elle a mesuré toute l'étendue des trésors d'affection qu'elle avait piétinés autrefois... et maintenant elle est heureuse de pouvoir te donner tout l'amour qu'elle veut te donner, pour te dire que pour elle tu es le frère, saint, aimé."

"Ah ! voilà ! J'en avais eu l'intuition ! Je m'en réjouis, mais je craignais de l'avoir offensée... Depuis hier, je pense, je pense... j'essaie de me souvenir... mais je n'y arrive pas..."

"Mais pourquoi veux-tu te rappeler ? Tu as devant toi l'avenir. Le passé est resté dans la tombe, ou plutôt il n'y est même pas resté. Il a brûlé en même temps que les bandelettes funèbres, mais si cela doit te donner la paix, je te dis les dernières paroles que tu as eues pour tes sœurs, pour Marie spécialement. Tu as dit que c'est à cause de Marie que je suis venu ici et que j'y viens, parce que Marie sait aimer plus que tous. C'est vrai. Tu lui as dit qu'elle t'a aimé plus que tous ceux qui t'ont aimé. Cela aussi est vrai, car elle t'a aimé en se renouvelant par amour pour Dieu et pour toi. Tu lui as dit précisément que toute une vie de délices ne t'aurait pas donné la joie dont tu as joui grâce à elle. Et tu les as bénies comme un patriarche bénissait ses enfants les plus aimés. Tu as semblablement béni Marthe que tu appelais : ta paix, et Marie que tu appelais : ta joie. Es-tu en paix, maintenant ?"

"Maintenant, oui, Maître. Je suis en paix."

"Et alors, puisque la paix donne la miséricorde, pardonne aussi aux chefs du peuple qui me persécutent. En effet tu voulais dire que tu peux tout pardonner, mais pas le mal qu'ils me font à Moi."

"C'est cela, Maître."

"Non, Lazare. Moi, je leur pardonne. Tu dois leur pardonner si tu veux être semblable à Moi."

"Oh ! Semblable à Toi ! Je ne puis, je suis un simple homme !"

"L'homme est resté là-dessous. L'homme ! Ton esprit... Tu sais ce qui arrive à la mort de l'homme..."

"Non, Seigneur, Je ne me rappelle rien de ce qui m'est arrivé" interrompt vivement Lazare.

Jésus sourit et répond : "Je ne parlais pas de ton savoir personnel, de ton expérience particulière. Je parlais de ce que tout croyant sait ce qu'il arrive quand il meurt."

"Ah ! Le Jugement particulier. Je sais. Je crois. L'âme se présente à Dieu, et Dieu la juge."

"C'est ainsi. Et le jugement de Dieu est juste et inviolable, et il a une valeur infinie. Si l'âme jugée est coupable mortellement, elle devient une âme damnée. Si elle est légèrement coupable, elle est envoyée au Purgatoire. Si elle est juste, elle va dans la paix des Limbes en attendant que j'ouvre la porte des Cieux. J'ai donc rappelé ton esprit après qu'il était déjà jugé par Dieu. Si tu avais été un damné, je n'aurais pas pu te rappeler à la vie car en le faisant j'aurais annulé le jugement de mon Père. Pour les damnés, il n'y a plus de changement. Ils sont jugés pour toujours. Tu étais donc au nombre de ceux qui n'étaient pas damnés. Par conséquent de la classe des bienheureux ou de la classe de ceux qui seront bienheureux après leur purification.

Mais réfléchis, mon ami. Si la volonté sincère de repentir que l'homme peut avoir alors qu'il est encore homme, c'est-à-dire chair et âme, a une valeur de purification; si un rite symbolique de baptême dans l'eau, voulu par esprit de contrition des souillures contractées dans le monde et à cause de la chair, a pour nous hébreux une valeur de purification; quelle valeur aura le repentir plus réel et plus parfait, beaucoup plus parfait, d'une âme libérée de la chair, consciente de ce qu'est Dieu, éclairée sur la gravité de ses erreurs, éclairée sur l'immensité de la joie qui s'est éloignée pendant des heures, pendant des années ou pendant des siècles : la joie de la paix des Limbes, qui bientôt sera la joie de la possession de Dieu que l'on aura rejointe, qui sera la purification double, triple, du repentir parfait, de l'amour parfait, du bain dans l'ardeur des flammes allumées par l'amour de Dieu et par l'amour des esprits dans lequel et par lequel les esprits se dépouillent de toute impureté et d'où ils sortent beaux comme des séraphins, couronnés de ce qui ne couronne même pas les séraphins : leur martyre terrestre et ultra-terrestre contre les vices et grâce à l'amour ? Que sera-ce ? Dis-le donc, mon ami."

"Mais... je ne sais pas... une perfection. Ou plutôt... une nouvelle création."

"Voilà. Tu as dit le mot juste. L'âme en sort comme créée à nouveau. L'âme devient semblable à celle d'un enfant. Elle est neuve. Tout le passé n'existe plus, son passé d'homme. Quand tombera la Faute d'origine, l'âme exempte de toute tache et de toute ombre de taches, serasupercréée et sera digne du Paradis. J'ai rappelé ton âme qui déjà s'était recréée par son attachement au Bien, par l'expiation de la souffrance et de la mort, et grâce au parfait repentir et au parfait amour que tu avais atteints au-delà de la mort. Tu as donc l'âme tout à fait innocente d'un enfant né depuis quelques heures. Et si tu es un enfant nouveau-né, pourquoi veux-tu endosser sur cette enfance spirituelle les vêtements lourds, accablants de l'homme adulte ? Les petits enfants ont des ailes et non des chaînes à leurs esprits joyeux. Eux m'imitent avec facilité parce qu'ils n'ont pas encore pris de personnalité. Ils se font comme je suis, car sur leur âme vierge de toute empreinte peut s'imprimer sans confusion de lignes ma figure et ma doctrine. Ils ont l'âme exempte de souvenirs humains, de ressentiments, de préjugés. Il ne s'y trouve rien.

Et je puis y être, Moi qui suis parfait, absolu comme je suis dans le Ciel. Toi qui es comme re-né, nouvellement né, car dans ta vieille chair la puissance motrice est nouvelle, sans passé, pure, sans traces de ce qui a été, toi qui es revenu pour me servir, rien que pour cela, tu dois être comme je suis, plus que tous. Regarde-moi. Regarde-moi bien. Mire-toi en Moi, et réfléchis-toi en Moi. Deux miroirs qui se regardent pour réfléchir l'un dans l'autre la figure de ce qu'ils aiment. Tu es un homme et tu es un enfant.

Tu es homme pour l'âge, tu es enfant pour la pureté du cœur. Tu as sur les enfants l'avantage de connaître déjà le Bien et le Mal, et d'avoir déjà su choisir le Bien, même avant le baptême dans les flammes de l'amour. Eh bien, Moi, je te dis à toi, homme dont l'esprit est purifié grâce à la purification reçue : "Sois parfait comme l'est notre Père des Cieux et comme je le suis. Sois parfait, c'est-à-dire sois semblable à Moi qui t'ai aimé au point d'aller contre toutes les lois de la vie et de la mort, du ciel et de la terre pour avoir de nouveau sur la Terre un serviteur de Dieu, et pour Moi un véritable ami, et au Ciel un bienheureux, un grand bienheureux". Je le dis à tous : "Soyez parfaits".

Et eux, pour la plupart, n'ont pas le cœur que tu avais, digne du miracle, digne d'être pris comme instrument pour une glorification de Dieu en son Fils bien-aimé. Et eux n'ont pas tes dettes d'amour envers Dieu... Je puis le dire, je puis l'exiger de toi. Et en premier lieu, j'exige que tu n'aies pas de rancœur pour ceux qui m'ont offensé et m'offensent. Pardonne, pardonne, Lazare. Tu as été plongé dans les flammes allumées par l'amour. Tu dois être "amour", pour ne plus jamais connaître autre chose que l'étreinte amoureuse de Dieu."

"Et en agissant ainsi, j'accomplirai la mission pour laquelle tu m'as ressuscité ?"

"En agissant ainsi, tu l'accompliras."

"Cela suffit, Seigneur. Je n'ai pas besoin d'en demander et d'en savoir davantage. Te servir était mon rêve. Si je t'ai servi même dans le rien que peut faire celui qui est malade et mort, et si je pourrai te servir dans tout ce que peut faire quelqu'un qui a recouvré la santé, mon rêve est réalisé et je ne demande rien de plus. Que tu sois béni, Jésus, mon Seigneur et mon Maître ! Et qu'avec Toi soit béni Celui qui t'a envoyé."

"Béni soit toujours le Seigneur Dieu Tout-Puissant."

Ils s'en vont vers la maison, s'arrêtent de temps en temps pour observer le réveil des arbres. Jésus lève un bras et cueille, grand comme il est, une petite touffe de fleurs à un amandier qui se chauffe au soleil contre le mur méridional de la maison.

Marie sort de la maison et, les voyant, s'approche pour entendre ce que dit Jésus : "Tu vois, Lazare ? À ceux-ci aussi le Seigneur a dit : "Sortez". Et ils ont obéi pour servir le Seigneur."

"Quel mystère que la germination ! Il paraît impossible que du tronc dur et de la dure semence puissent sortir des pétales si fragiles et des tiges si tendres et se changer en fruits ou en arbres. Est-ce une erreur, Maître, de dire que la sève ou le germe c'est comme l'âme de la plante ou de la semence ?"

"Ce n'est pas une erreur car c'est la partie vitale. En eux, elle n'est pas éternelle, créée pour chaque espèce le premier jour que les arbres et les blés le furent. Chez l'homme, elle est éternelle, ressemblant à son Créateur, créée chaque fois pour chaque nouvel homme qui est conçu. Mais c'est par elle que la matière vit. C'est pour cela que je dis que c'est seulement par l'âme que l'homme vit. Non seulement vit ici, mais au-delà. Il vit par son âme.

Nous hébreux, nous ne faisons pas de dessins sur les tombeaux comme les font les gentils. Mais si nous les faisions, nous devrions toujours dessiner, non pas le flambeau éteint, la clepsydre vide ou un autre symbole de fin, mais bien la semence jetée dans le sillon qui fleurit en épi. C'est en effet la mort de la chair qui libère l'âme de son écorce et la fait fructifier dans les parterres du Seigneur. La semence. L'étincelle vitale que Dieu a mise dans notre poussière et qui devient épi si nous savons par la volonté et aussi par la douleur rendre fertile la motte qui l'enserre. La semence, le symbole de la vie qui se perpétue... Mais Maximin t'appelle..."

"J'y vais, Maître. Il sera venu des régisseurs. Tout était arrêté ces derniers mois. Maintenant ils s'empressent de me rendre leurs comptes..."

"Que tu approuves d'avance, car tu es un bon maître."

"Et parce qu'eux sont de bons serviteurs."

"Le bon maître fait les bons serviteurs."

"Alors je deviendrai certainement un bon serviteur, car j'ai en Toi un Maître parfait" et il s'en va en souriant, agile, si différent du pauvre Lazare qu'il était depuis des années.
Marie reste avec Jésus.

"Et toi, Marie, deviendras-tu une bonne servante de ton Seigneur ?"

"C'est Toi qui peux le savoir, Rabboni. Moi... moi je sais seulement que j'ai été une grande pécheresse."

Jésus sourit : "Tu as vu Lazare ? Lui aussi était un grand malade et ne te semble-t-il pas que maintenant il soit bien sain ?"

"C'est ainsi, Rabboni. Tu l'as guéri. Ce que tu fais est toujours total. Lazare n'a jamais été aussi fort et joyeux que depuis qu'il est sorti du tombeau."

"Tu l'as dit, Marie. Ce que je fais est toujours total. C'est pour cela aussi que ta rédemptionest totale car c'est Moi qui l'ai accomplie."

"C'est vrai, mon Sauveur aimé, mon Rédempteur, mon Roi, mon Dieu. C'est vrai. Et si tu le veux, je serai, moi aussi, une bonne servante de mon Seigneur. Moi, de mon côté, je le veux, Seigneur. Je ne sais pas si Toi tu le veux."

"Je le veux, Marie. Une bonne servante pour Moi. Aujourd'hui plus qu'hier. Demain plus qu'aujourd'hui. Jusqu'à ce que je te dise : 'Cela suffit, Marie. C'est l'heure de ton repos'."

"C'est dit, Seigneur. Je voudrais que tu m'appelles, alors. Comme tu as appelé mon frère hors du tombeau. Oh ! appelle-moi, Toi, hors de la vie !"

"Non, pas hors de la vie. Je t'appellerai à la Vie, à la vraie Vie. Je t'appellerai hors du tombeau qu'est la chair et la Terre. Je t'appellerai aux noces de ton âme avec ton Seigneur."

"Mes noces ! Tu aimes les vierges, Seigneur..."

"J'aime ceux qui m'aiment, Marie."

"Tu es divinement bon, Rabboni ! C'est pour cela que je ne savais pas me donner de paix en entendant dire que tu étais mauvais parce que tu ne venais pas. C'était comme si tout s'écroulait. Quelle peine de me dire à moi-même : "Non. Non ! Tu ne dois pas accepter cette évidence. Ce qui te paraît évident est un rêve. La réalité, c'est la puissance, la bonté, la divinité de ton Seigneur". Ah ! combien j'ai souffert ! Si grande la douleur pour la mort de Lazare et pour ses paroles... Ne t'en a-t-il rien dit ? Ne se souvient-il pas ? Dis-moi la vérité…"

"Je ne mens jamais, Marie. Il craint d'avoir parlé et d'avoir dit ce qui avait été la douleur de sa vie. Mais je l'ai rassuré, sans mentir, et maintenant il est tranquille."

"Merci, Seigneur. Ces paroles... elles m'ont fait du bien. Oui, comme font du bien les soins d'un médecin qui met à nu les racines d'un mal et les brûle. Elles ont fini de détruire la vieille Marie. J'avais encore une trop haute idée de moi. Maintenant... je mesure le fond de mon abjection et je sais que je dois faire une longue route pour le remonter. Mais je la ferai, si tu m'aides."

"Je t'aiderai, Marie. Même quand je m'en serai allé, je t'aiderai."

"Comment, mon Seigneur ?"

"En accroissant ton amour dans une mesure incalculable. Pour toi, il n'y a pas d'autre voie que celle-là."

"Trop douce pour ce que j'ai à expier ! Tous se sauvent par l'amour. Tous acquièrent ainsi le Ciel. Mais ce qui suffit pour les purs, les justes, n'est pas suffisant pour la grande coupable."

"Il n'y a pas d'autre voie pour toi, Marie. En effet quelle que soit la voie que tu prendras, elle sera toujours amour. Amour si tu rends service en mon nom. Amour si tu évangélises. Amour si tu t'isoles. Amour si tu te martyrises . Amour si tu te fais martyriser. Tu ne sais qu'aimer, Marie. C'est ta nature. Les flammes ne peuvent que brûler, soit qu'elles rampent sur le sol pour brûler des herbes, soit qu'elles montent comme un embrassement de splendeurs autour d'un tronc, d'une maison, ou d'un autel pour s'élancer vers le ciel.

À chacun sa nature. La sagesse des maîtres spirituels consiste à savoir faire fructifier les tendances de l'homme en le dirigeant vers la voie par laquelle il peut le mieux se développer. Même chez les plantes et les animaux cette loi existe et il serait sot de vouloir prétendre qu'un arbre à fruit ne donne que des fleurs ou des fruits différents de ceux que comporte sa nature, ou qu'un animal accomplisse des fonctions qui sont propres à une autre espèce. Pourrais-tu prétendre que cette abeille dont le destin est de faire du miel devienne un oiseau qui chante dans le feuillage des haies ? Ou que ce rameau d'amandier que j'ai dans les mains, avec tout l'amandier duquel je l'ai cueilli, au lieu de produire des amandes laisse suinter de son écorce des résines odoriférantes ? L'abeille travaille, l'oiseau chante, l'amandier donne son fruit, l'arbre résineux donne ses résines aromatiques, et tous remplissent leur office. Il en est ainsi des âmes. Tu as l'office d'aimer."

"Alors, brûle-moi, Seigneur. Je te le demande en grâce."

"Ne te suffit-elle pas la force d'amour que tu possèdes ?"

"C'est trop peu, Seigneur. Elle pouvait servir pour aimer des hommes, pas pour Toi qui es le Seigneur infini."

"Mais justement parce que je suis tel, il serait alors nécessaire d'avoir un amour sans limites..."

"Qui, mon Seigneur. C'est cela que je veux. Que tu mettes en moi un amour sans limites."

"Marie, le Très-Haut, qui sait ce qu'est l'amour, a dit à l'homme : "Tu m'aimeras de toutes tes forces" . Il n'exige pas davantage, car Il sait que c'est déjà un martyre d'aimer avec toutes ses forces…"

"N'importe, mon Seigneur. Donne-moi un amour infini pour t'aimer comme tu dois être aimé, pour t'aimer comme je n'ai aimé personne."

"Tu me demandes une souffrance semblable à un bûcher qui brûle et consume, Marie. Il brûle et se consume lentement... Penses-y."

"Il y a si longtemps que j'y pense, mon Seigneur, mais je n'osais te le demander. Maintenant je sais combien tu m'aimes. Maintenant vraiment je sais à quel point tu m'aimes, et j'ose te le demander. Donne-moi cet amour infini, Seigneur."

Jésus la regarde. Elle est devant Lui, encore amaigrie par les veilles et la souffrance, avec un vêtement modeste et une coiffure simple, comme une fillette sans malice, avec un visage pâle où s'allume le désir, les yeux suppliants et pourtant déjà étincelants d'amour, déjà plus séraphin que femme. C'est vraiment la contemplatrice qui demande le martyre de la contemplation absolue.

Jésus lui dit un seul mot après l'avoir bien regardée, comme pour mesurer sa volonté : "Oui"

"Ah ! mon Seigneur ! Quelle grâce de mourir d'amour pour Toi !" elle tombe à genoux pour baiser les pieds de Jésus.

"Lève-toi, Marie, prends ces fleurs. Ce seront celles de tes noces spirituelles. Sois douce comme le fruit de l'amandier, pure comme sa fleur et lumineuse comme l'huile que l'on extrait de son fruit quand on l'allume, et parfumée comme cette huile quand saturée d'essences on la répand dans les banquets ou sur la tête des rois, parfumée par tes vertus. Alors vraiment tu répandras sur ton Seigneur le baume qui Lui sera infiniment agréable."

Marie prend les fleurs mais ne se lève pas de terre et embaume à l'avance par son amour avec ses baisers et ses larmes répandues sur les pieds de son Maître.

Lazare les rejoint : "Maître, il y a un petit garçon qui te demande. Il était allé chez Simon pour te chercher et n'y a trouvé que Jean qui l'a conduit ici. Mais il ne veut pas parler à d'autres qu'à Toi."

"C'est bien, amène-le-moi. Je vais aller sous la tonnelle des jasmins."

Marie rentre dans la maison avec Lazare. Jésus va sous la tonnelle. Lazare revient en tenant par la main cet enfant que j'ai vu dans la maison de Joseph de Sephoris. Jésus le reconnaît tout de suite et le salue : "Toi, Martial ? La paix soit avec toi. Pourquoi es-tu ici ?"

"On m'envoie te dire une chose..." et il regarde Lazare qui comprend et se dispose à s'éloigner.

"Reste, Lazare. C'est Lazare, mon ami. Tu peux parler devant lui, mon enfant, car je n'ai pas d'ami plus fidèle que lui."

Le garçon se rassure. Il dit : "C'est Joseph l'Ancien qui m'envoie, car maintenant je suis avec lui, pour te dire d'aller tout de suite, tout de suite à Bethphagé, chez Cléonte. Il doit te parler tout de suite, mais vraiment tout de suite. Et il a dit que tu viennes seul, car il doit te parler en grand secret."

"Maître ! Qu'arrive-t-il ?" demande Lazare impressionné.

"Je ne sais pas, Lazare. Il n'y a qu'à y aller. Viens avec Moi."

"Tout de suite, Seigneur. Nous pouvons aller avec l'enfant."

"Non, Seigneur. Je m'en vais seul. Joseph me l'a recommandé. Il a dit : "Si tu sais te débrouiller seul, je t'aimerai comme un père", et moi je veux que Joseph m'aime comme un fils. Je m'en vais de suite en courant. Toi, viens après. Salut, Seigneur. Salut, homme."

"La paix à toi, Martial."

Le petit s'envole comme une hirondelle.

"Allons, Lazare. Apporte-moi mon manteau. Moi, je vais en avant car, comme tu le vois, l'enfant n'arrive pas à ouvrir la grille et certainement il ne veut appeler personne."

Jésus va vivement à la grille, Lazare vivement à la maison. Le premier ouvre les fermetures de fer à l'enfant qui s'en va en vitesse. Le second apporte le manteau à Jésus et à côté de Jésus il marche sur la route vers Bethphagé.

"Que peut bien vouloir Joseph, pour envoyer si secrètement un enfant ?"

"Un enfant échappe à ceux qui peuvent surveiller" répond Jésus.

"Tu crois que... Tu soupçonnes que... Tu te sens en danger, Seigneur ?"

"J'en suis certain, mon ami."

"Comment ? Même maintenant ? Mais tu ne pouvais pas donner une preuve plus grande !..."

"La haine croît sous l'aiguillon de la réalité."

"Oh ! c'est à cause de moi, alors ! Je t'ai nui !... Ma peine est sans pareille !" dit Lazare, vraiment affligé.

"Ce n'est pas à cause de toi. Ne t'afflige pas sans motif. Tu as été le moyen, mais la cause a été la nécessité, tu comprends, la nécessité de donner au monde la preuve de ma nature divine. Si ce n'avait pas été toi, cela aurait été un autre, car je devais prouver au monde que, en Dieu que je suis, je peux tout ce que je veux. Et ramener à la vie quelqu'un qui est mort depuis plusieurs jours et déjà décomposé, ce ne peut être l'œuvre que de Dieu."

"Ah ! Tu veux me consoler. Mais pour moi, ma joie, toute ma joie, est dissipée... Je souffre, Seigneur."

Jésus fait un geste comme pour dire : "Qu'y faire !" et ils se taisent ensuite tous les deux.

Ils marchent vivement. La distance est courte entre Béthanie et Bethphagé et ils ont vite fait d'arriver.

Joseph fait les cent pas sur la route à l'entrée du village. Il a le dos tourné quand Jésus et Lazare débouchent d'un sentier caché par une haie. Lazare l'appelle.

"Oh ! Paix à vous ! Viens, Maître. Je t'ai attendu ici pour te voir tout de suite, mais allons dans l'oliveraie. Je ne veux pas qu'ils nous voient..."

Il les conduit derrière les maisons, dans un bosquet d'oliviers qui, avec leurs frondaisons touffues et ébouriffées qui cachent les pentes, sont un refuge commode pour parler sans être remarqués.

"Maître, je t'ai envoyé l'enfant, qui est éveillé et obéissant et qui m'aime beaucoup, parce queje devais te parler et que je ne devais pas être vu. J'ai suivi le Cédron pour venir ici...

Maître, tu dois t'en aller tout de suite d'ici. Le Sanhédrin a décrété ton arrestation et demain, dans les synagogues, on lira le décret. Quiconque sait où tu te trouves, a le devoir de l'indiquer. Je n'ai pas besoin de te dire, Lazare, que ta maison sera la première perquisitionnée. Je suis sorti à sexte du Temple et je me suis hâté; car pendant qu'ils parlaient, j'avais déjà fait mon plan. Je suis allé à la maison, j'ai pris l'enfant. Je suis sorti à cheval par la Porte d'Hérode comme pour quitter la ville, puis j'ai traversé le Cédron et je l'ai suivi. J'ai laissé l'âne au Gethsémani, j'ai envoyé en vitesse l'enfant qui déjà connaissait la route pour être venu avec moi à Béthanie. Va-t'en tout de suite, Maître, en lieu sûr. Sais-tu où aller ? As-tu où aller ?"

"Mais ne suffit-il pas qu'il s'éloigne d'ici ? De la Judée, tout au plus ?"

"Cela ne suffit pas, Lazare. Ils sont furieux. Il faut qu'il aille où eux ne vont pas..."

"Mais ils vont partout, eux ! Tu ne voudrais pas que le Maître quitte la Palestine !..." dit Lazare agité.

"Mais que dois-je te dire ? ! Le Sanhédrin le veut..."

"C'est à cause de moi, n'est-ce pas ? Dis-le !"

"Hum ! Oui ! À cause de toi... plutôt parce que tous se convertissent à Lui, et eux... ne veulent pas de cela."

"Mais c'est un crime ! C'est un sacrilège... C'est..."

Jésus, pâle, mais calme, lève la main pour imposer le silence et il dit : "Tais-toi, Lazare. Chacun fait son travail. Tout est écrit. Je te remercie, Joseph, et je te certifie que je m'en vais. Va, va, Joseph. Qu'ils ne remarquent pas ton absence... Que Dieu te bénisse. Par Lazare je te ferai savoir où je suis. Va ! Je te bénis toi, Nicodème et tous ceux qui ont le cœur droit." Il l'embrasse et ils se séparent. Jésus revient avec Lazare, par l'oliveraie, à Béthanie, alors que Joseph va vers la ville.

"Que vas-tu faire, Maître ?" demande Lazare angoissé.

"Je ne sais pas. Ces jours-ci les femmes disciples arrivent avec ma Mère. J'aurais voulu les attendre..."

"À cause de cela... moi, je les accueillerais en ton nom, et je pourrais te les conduire. Mais, Toi, en attendant où vas-tu ? Dans la maison de Salomon je ne crois pas... ni chez des disciples connus. Demain !.., Tu dois partir tout de suite !"

"J'aurais un endroit, mais je voudrais attendre ma Mère. Son angoisse commencerait trop tôtsi elle ne me trouvait pas..."

"Où iras-tu, Maître ?"

"À Éphraïm."

"En Samarie ?"

"En Samarie. Les samaritains sont moins samaritains que beaucoup d'autres et ils m'aiment.Éphraïm est à la frontière..."

"Oh ! C'est pour être contre les juifs qu'ils te feront honneur et qu'ils te défendront ! Mais... attends ! Ta Mère ne peut venir que par la route de la Samarie ou par celle du Jourdain. J'irai avec des serviteurs par l'une, et Maximin avec d'autres serviteurs par l'autre, et l'un ou l'autre la trouvera. Nous ne reviendrons qu'avec elles. Tu sais que personne de la maison de Lazare ne peut trahir. Tu vas aller pendant ce temps à Éphraïm, tout de suite. Ah ! il était dit que je ne pourrais jouir de Toi ! Mais je viendrai par les monts d'Adomin. Je suis sain maintenant. Je puis faire ce que je veux. Et même, oui ! Je ferai croire que par la route de la Samarie je vais à Ptolémaïs afin de prendre le bateau pour Antioche. Tout le monde sait que j'y ai des terres... Mes sœurs resteront à Béthanie... Toi... Oui. Maintenant je vais faire préparer deux chars et vous irez à Jéricho avec eux. Puis à l'aube de demain, vous reprendrez le chemin à pied. Oh ! Maître ! Mon Maître ! Sauve-toi ! Sauve-toi !" Après l'excitation du premier moment, Lazare tombe dans la tristesse et il pleure. Jésus soupire, mais ne dit rien. Que devrait-il dire ?...

Les voilà à la maison de Simon. Ils se séparent. Jésus entre dans la maison. Les apôtres, déjà étonnés que le Maître soit parti sans rien dire, se serrent autour de Jésus qui leur dit : "Prenez les vêtements. Faites les sacs. Nous devons partir tout de suite d'ici. Faites vite. Et rejoignez-moi chez Lazare."

"Même les vêtements mouillés ? Ne pouvons-nous pas les reprendre à notre retour ?" demande Thomas.

"Nous ne reviendrons pas. Prenez tout."

Les apôtres s'en vont en se parlant par leurs regards. Jésus va prendre ses affaires dans la maison de Lazare et salue les sœurs consternées...

Les chars sont vite prêts, des chars lourds, couverts, tirés par des chevaux robustes. Jésus prend congé de Lazare, de Maximin, des serviteurs qui sont accourus.

Ils montent sur les chars qui attendent à une sortie postérieure. Les conducteurs fouettent les animaux et le voyage commence par la même route par laquelle Jésus est venu pour ressusciter Lazare quelques jours avant.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-011.htm
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Message par Maud Mer 30 Juil 2014 - 6:59

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_63

En allant à Éphraïm


Au commencement de l'aurore fraîche et limpide les champs qui entourent la maison de Nique sont tout un verdoiement de grains nouveaux de quelques centimètres, d'une couleur délicate comme celle d'une très claire émeraude. Plus près de la maison le verger, encore dépouillé, paraît encore plus sombre et plus massif en face de la délicatesse des jeunes pousses et d'un ciel aérien d'une sérénité paradisiaque. La maison toute blanche sous le premier soleil est couronnée par le vol des colombes.

Nique est déjà levée et elle pourvoit avec sollicitude à ce que les partants aient ce qui peut leur donner des forces pour la route. Elle commence par congédier les deux serviteurs deLazare qu'elle a retenus pour la nuit. Bien restaurés, ils s'en vont en mettant leurs chevaux au trot. Puis elle rentre dans la cuisine où les servantes préparent le lait et les aliments sur de grands feux. D'un grand récipient elle verse de l'huile dans des carafes plus petites, et du vin dans des petites outres de peau. Elle presse une servante qui prépare des formes de pain minces comme des fouaces pour qu'elle les porte de suite au four déjà prêt. Sur de larges tables où sèchent des fromages, à la chaleur de la cuisine, elle choisit les formes les plus belles. Elle prend du miel et le fait couler dans de petits récipients bien fermés. Puis elle fait des paquets avec tous ces aliments et l'un d'eux contient un chevreau entier ou un agneau que la servante sort de la broche sur laquelle il rôtissait. Un autre contient des pommes, rouges comme du corail. Un autre d'olives toutes préparées, un autre encore de raisin sec. Puis un paquet d'orge mondé. Elle est en train de fermer ce dernier dans un petit sac quand Jésus entre dans la cuisine en saluant toutes celles qui s'y trouvent.

"Maître, paix à Toi. Déjà levé ?"

"J'aurais dû l'être plus tôt. Mais mes disciples étaient si fatigués que je les ai laissés dormir un peu plus. Que fais-tu, Nique ?"

"Je prépare... Cela ne sera pas lourd, tu vois ? Douze charges, et j'ai calculé les forces de ceux qui vont les porter."

"Et Moi ?"

"Oh ! Maître ! Tu as déjà ton fardeau..." et dans les yeux de Nique brille une larme.

"Viens dehors, Nique, nous allons parler en paix."

Ils sortent et s'éloignent de la maison.

"Mon cœur pleure, Maître..."

"Je le sais, mais il faut être fort, fort en pensant qu'on ne m'a pas fait souffrir..."

"Oh ! cela jamais ! Mais j'avais cru pouvoir rester près de Toi et c'est pour cela que j'étais venue à Jérusalem. Autrement je serais restée ici, où j'ai ma campagne..."

"Lazare aussi et Marie et Marthe croyaient pouvoir rester avec Moi. Et tu vois !..."

"Je le vois, oui, je le vois. À Jérusalem je n'y vais plus maintenant que tu n'y es pas. Je serai plus près de Toi en restant ici et je pourrai t'aider."

"Tu as déjà tant donné..."

"Ce n'est rien ce que j'ai donné. Je voudrais pouvoir porter ma maison où tu vas. Mais je viendrai, certainement je viendrai voir ce qui te manque. Maintenant c'est juste ce que tu m'as dit de faire. Je vais rester ici jusqu'à ce qu'ils soient persuadés que tu n'y es pas. Mais après..."

"La route est longue et pénible pour une femme et très peu sûre."

"Oh ! Je n'ai pas peur. Je suis trop vieille pour plaire comme femme et je ne porte pas de trésors pour être une proie. Les voleurs sont meilleurs que beaucoup qui se croient saints et qui sont des voleurs qui veulent te dérober la paix et la liberté..."

"Ne les hais pas, Nique."

"Cela est plus pénible pour moi que toute autre chose. Mais j'essaierai de ne pas haïr par amour pour Toi... J'ai pleuré toute la nuit, Seigneur !"

"Je t'entendais aller et venir dans la maison, inlassable comme une abeille. Tu me semblais une mère en peine pour son fils persécuté... Ne pleure pas. Ce sont les coupables qui doivent pleurer. Pas toi. Dieu est bon avec son Messie. Aux heures les plus tristes, Il me fait toujours trouver près de Moi un cœur maternel..."

"Et comment vas-tu faire avec ta Mère ? Tu m'avais dit qu'elle serait bientôt venue..."

"Elle viendra à Éphraïm... Lazare se charge de l'avertir. Voici Simon de Jonas et mes frères..."

"Ils savent ?"

"Rien encore, Nique. Je le leur dirai quand nous serons loin..."

"Et moi, je te dirai quand je viendrai, ce qui se passe ici et à Jérusalem."

Ils s'en vont vers les apôtres qui sortent l'un après l'autre de la maison à la recherche de Jésus.


"Venez, mes frères. Restaurez-vous avant de partir. Tout est prêt."

"Nique à cause de nous n'a pas dormi cette nuit. Remerciez la bonne disciple" dit Jésus en entrant dans la vaste cuisine. Là, sur une table que l'on dirait de réfectoire tant elle est grande, fument des bols remplis de lait et exhalent leur odeur appétissante les fouaces que l'on vient de défourner et sur lesquelles Nique étend généreusement du beurre et du miel, en disant que c'est une nourriture fortifiante pour ceux qui doivent faire une longue route pendant ces heures encore très fraîches.

Le repas est vite fini. Nique pendant ce temps a fait les derniers paquets avec le pain qui sort du four, croustillant et odorant. Chaque apôtre prend sa charge liée, de façon que l'on puisse la porter sans gêne excessive.

C'est l'heure de partir. Jésus salue et bénit. Les apôtres saluent. Mais Nique veut les accompagner encore jusqu'au bout de ses champs, et puis elle revient lentement en arrière, en pleurant dans son voile, alors que Jésus et les siens s'éloignent par un chemin secondaire que Nique Lui a indiqué.

Les campagnes sont encore désertes. Le sentier passe par des champs de grain nouveau et par des vignes dépouillées; il n'y a pas non plus de bergers car ils n'amènent pas les troupeaux dans les terres cultivées. Le soleil réchauffe légèrement l'air matinal. Les premières fleurettes sur les talus brillent comme des gemmes sous le voile de la rosée que le soleil allume. Les oiseaux gazouillent leurs premiers chants d'amour. La belle saison arrive. Tout s'embellit et renaît, tout aime... Et Jésus s'en va vers l'exil qui précède la mort voulue par la haine.

Les apôtres ne parlent pas. Ils sont pensifs. Le départ subit les a désorientés. Ils étaient si sûrs d'être désormais tranquilles ! Ils avancent plus courbés que ne pourrait leur imposer le poids de leurs sacs et des provisions de Nique. Ce qui les courbe, c'est la déception, la constatation de ce qu'est le monde et ce que sont les hommes.

Jésus, au contraire, sans être souriant, n'est pas triste ni accablé. Il marche la tête haute, devant tous, sans plastronner, mais aussi sans peur. Il va comme quelqu'un qui sait bien où il doit aller et ce qu'il doit faire. Il marche courageux, en héros que rien ne trouble ou n'effraie.

Le chemin secondaire aboutit à une grande route, Jésus la prend en se dirigeant toujours vers le nord, et les apôtres le suivent, sans parler. C'est la route qui vient de la Galilée et va vers la Judée par la Décapole et la Samarie, aussi des voyageurs y circulent, surtout des caravanes de marchands.


Le temps passe et le soleil réchauffe de plus en plus, quand Jésus laisse la grand-route pour reprendre un autre petit chemin qui, à travers des champs de blé, se dirige vers les premières collines.

Les apôtres se regardent entre eux. Ils commencent peut-être à comprendre qu'ils ne vont pas vers la Galilée par la route qui suit la vallée du Jourdain, mais qu'ils vont vers la Samarie. Mais ils ne parlent pas encore.

Jésus, arrivé aux premiers bois sur les collines, dit : "Arrêtons-nous et reposons-nous tout en mangeant. Le soleil indique le milieu du jour."

Ils sont près d'un petit torrent qui a peu d'eau car il ne pleut pas depuis quelque temps. Mais ses eaux sont limpides sur le fond pierreux et ses rives sont couvertes de grosses pierres qui peuvent servir de tables et de sièges . Ils s'assoient après que Jésus a béni et offert la nourriture et ils mangent en silence et comme perdus dans leurs pensées.

Jésus les secoue en disant : "Vous ne me demandez pas où nous allons ? La préoccupation du lendemain vous rend muets, ou je ne vous semble plus votre Maître ?"

Les douze lèvent la tête. Ce sont douze visages affligés ou du moins en désarroi qui se tournent vers le visage tranquille de Jésus. Un unique "Oh !" sort des douze bouches. Et l'exclamation de tous est suivie de la réponse de Pierre qui parle au nom de tous : "Maître, tu le sais que tu es toujours pour nous le Maître, mais c'est que depuis hier nous sommes comme quelqu'un qui a reçu un gros coup sur la tête. Tout nous semble être un rêve. Et Toi, nous voyons et nous savons que c'est bien Toi, mais tu nous sembles... déjà comme lointain. Elle nous est restée un peu cette impression du moment où tu as parlé avec ton Père avant d'appeler Lazare et du moment où tu l'as tiré de là, ainsi lié, par le seul moyen de ta volonté, et où tu l'as rendu vivant par la seule force de ta puissance. Tu nous fais presque peur. Je parle pour moi... mais je crois qu'il en est ainsi pour tous... Maintenant ensuite... Nous... Ce départ... si rapide et si mystérieux !"

"Avez-vous une double peur ? Sentez-vous le danger plus menaçant ? N'avez-vous pas, sentez-vous de ne pas avoir la force d'affronter et de surmonter les dernières épreuves ? Dites-le avec la plus grande liberté. Nous sommes encore en Judée. Nous sommes près des routes basses pour la Galilée. Chacun peut s'en aller s'il le veut, et partir à temps pour ne pas être en butte à la haine du Sanhédrin..."


Les apôtres sont remués par ces paroles. Ceux qui étaient presque allongés sur l'herbe attiédie par le soleil s'assoient; les autres qui étaient assis, se lèvent.

Jésus poursuit : "C'est qu'à partir d'aujourd'hui je suis le Persécuté légal. Sachez-le. À cette heure, on va lire dans les cinq cents et plus synagogues de Jérusalem et dans celles des villes qui ont pu recevoir le décret émis hier à sexte, que je suis le grand pécheur et que quiconque sait où je suis a le devoir de me dénoncer au Sanhédrin pour que je sois arrêté..."

Les apôtres crient comme s'ils le voyaient déjà pris. Jean s'attache à son cou en gémissant : "Ah ! je l'ai toujours prévu !" et il sanglote très fort. Certains s'emportent contre le Sanhédrin, d'autres invoquent la justice divine, d'autres pleurent, d'autres restent comme des statues.

"Taisez-vous. Écoutez. Je ne vous ai jamais trompés. Je vous ai toujours dit la vérité. Quand je l'ai pu, je vous ai défendus et protégés. Votre présence près de Moi m'a été agréable comme celle des fils. Je ne vous ai pas caché non plus ma dernière heure... mes dangers... ma passion. Mais c'étaient des choses qui me concernaient exclusivement. Maintenant ce sont vos dangers, votre sécurité, celle de vos familles qu'il faut considérer. Je vous prie de le faire. Avec une liberté absolue. Ne les considérez pas à travers l'amour que vous avez pour Moi, à travers le choix que j'ai fait de vous. Supposez, puisque je vous délie de toute obligation envers Dieu et son Christ, supposez que nous venons de nous rencontrer ici pour la première fois et que vous, après m'avoir écouté, vous mesurez s'il vous convient ou non de suivre l'Inconnu dont les paroles vous ont impressionnés. Imaginez que vous m'entendez et me voyez pour la première fois et que je vous dise : "Faites attention que je suis persécuté et haï, et que celui qui m'aime et me suit est persécuté et haï comme Moi, dans sa personne, dans ses intérêts, dans ses affections. Faites attention que la persécution peut se terminer même par la mort et la confiscation des biens de famille". Réfléchissez, décidez. Et je vous aimerai pareillement, même si vous me dites : "Maître, je ne peux plus venir avec Toi". Vous vous attristez ? Non, vous ne devez pas. Nous sommes de bons amis qui décidons avec la paix et avec l'amour ce qu'il y a à faire, avec une compassion réciproque. Moi, je ne puis vous laisser aller au-devant de l'avenir sans vous faire réfléchir. Je ne vous mésestime pas.

Je vous aime tous, mais je suis le Maître. Il est évident que le Maître connaît ses disciples. Je suis le Pasteur et il est évident que le Pasteur connaît ses agneaux. Je sais que mes disciples, amenés à une épreuve sans y être préparés suffisamment non seulement dans la sagesse qui vient du Maître, et qui est donc bonne et parfaite, mais aussi dans la réflexion qui doit venir d'eux, pourraient faillir ou du moins ne pas triompher comme des athlètes dans un stade. Se mesurer et mesurer est une sage mesure, toujours. Dans les petites choses et dans les grandes. Moi, Pasteur, je dois dire à mes agneaux : "Voilà que maintenant je m'avance dans un pays de loups et de vautours. Avez-vous la force d'aller parmi eux ?" Je pourrais aussi vous dire déjà qui n'aura pas la force de supporter l'épreuve, bien que je puisse vous rassurer et vous assurer qu'aucun de vous ne tombera de la main des bourreaux qui sacrifieront l'Agneau de Dieu. Ma capture est d'une telle valeur qu'elle leur suffira... Pourtant je vous dis : "Réfléchissez". Autrefois, je vous disais : "Ne craignez pas ceux qui tuent" . Je vous disais : "Celui qui, après avoir mis la main à la charrue, se retourne pour considérer le passé et ce qu'il pourrait perdre ou acquérir, n'est pas apte à ma mission ".

Mais c'étaient des règles pour vous donner la mesure de ce que c'était que d'être mes disciples, et des règles pour l'avenir qui viendra quand je ne serai plus le Maître, mais que seront maîtres mes fidèles. Elles vous étaient données pour vous donner une âme forte. Mais même cette force, qu'il est indéniable que vous ayez atteinte par rapport au rien que vous étiez — je parle de votre esprit — est encore trop peu par rapport à la grandeur de l'épreuve. Oh ! ne pensez pas en votre cœur : "Le Maître est scandalisé par nous !" Je ne suis pas scandalisé. Je vous dis même que vous ne devez pas et ne devrez pas vous scandaliser de votre faiblesse. Dans tous les temps à venir, parmi les membres de mon Église, aussi bien agneaux que pasteurs, il y aura des personnes qui seront au-dessous de la grandeur de leur mission. Il y aura des époques où des pasteurs idolâtres et des fidèles idolâtres seront plus des vrais pasteurs et des vrais fidèles. Époques d'éclipse de l'esprit de foi dans le monde, mais une éclipse n'est pas la mort d'un astre. C'est uniquement un obscurcissement momentané plus ou moins partiel de l'astre.

Après, sa beauté réapparaît et semble plus lumineuse. Ainsi en sera-t-il de mon Bercail. Je vous dis : "Réfléchissez". Je vous le dis comme Maître, comme Pasteur et Ami. Je vous laisse discuter entre vous en toute liberté. Je vais là-bas, dans ce bosquet, pour prier. Un par un, vous viendrez me dire votre pensée, et Moi je bénirai votre sincère honnêteté, quelle qu'elle soit. Et je vous aimerai pour ce que déjà jusqu'ici vous m'avez donné. Adieu." Il se lève et s'en va.

Les apôtres sont abasourdis, perplexes, remués. Au début, ils ne savent même plus parler. Puis Pierre le premier dit : "Que m'engloutisse l'enfer, si moi je veux le quitter ! Je suis sûr de moi. Même s'il venait contre moi tous les démons qui sont dans la Géhenne, avec le Léviathan en tête, je ne m'écarterais pas de Lui par peur !"

"Et moi non plus. Dois-je être inférieur à mes filles, moi ?" dit Philippe.

"Moi, je suis sûr qu'ils ne Lui feront rien, dit l'Iscariote avec effronterie. Le Sanhédrin menace, mais il le fait pour se persuader qu'il existe encore. Il le sait tout le premier qu'il n'est rien si Rome n'y consent. Ses condamnations ! C'est Rome qui condamne."

"Mais pour les choses religieuses, il est encore le Sanhédrin" observe André.

"Tu as peut-être peur, mon frère ? Fais attention qu'il n'y a jamais eu de poltrons dans la famille" avertit Pierre en le menaçant, car il se sent en son cœur un esprit très belliqueux.

"Je n'ai pas peur, et j'espère pouvoir le montrer. Mais je dis ma pensée à Judas."

"Tu as raison. Mais l'erreur du Sanhédrin c'est de vouloir se servir de l'arme politique pour ne pas vouloir dire et ne pas vouloir s'entendre dire qu'ils ont levé la main sur le Christ. Je le sais avec certitude. Ils voudraient, ou plutôt ils auraient voulu faire tomber le Christ dans le péché afin d'en faire un objet de mépris pour la foule. Mais le tuer ! Eux ! Eh ! Non ! Ils ont peur ! Une peur qu'on ne peut comparer à une peur humaine, car c'est une peur d'âme. Ils le savent bien,eux, que Lui est le Messie ! Ils le savent. Et ils le savent si bien, qu'ils se rendent compte que pour eux c'est fini, parce qu'arrive le temps nouveau. Et ils veulent l'abattre. Mais l'abattre, eux !? Non. Aussi ils cherchent une raison politique pour que ce soit le Proconsul, pour que ce soit Rome qui l'abatte. Mais le Christ ne nuit pas à Rome, et Rome ne Lui nuira pas. Et le Sanhédrin hurle en vain."

"Alors, tu restes avec Lui ?"

"Mais certainement. Plus que tous !"

"Moi, je n'ai rien à perdre ou à gagner en restant ou en partant. J'ai seulement le devoir de l'aimer. Et je le ferai" dit le Zélote.

"Moi, je le reconnais pour le Messie et par conséquent je le suis" dit Nathanaël.

"Moi aussi. Je le crois tel du moment que Jean le Baptiste me l'a indiqué comme tel" ditJacques de Zébédée.

"Nous sommes ses frères. À la foi nous joignons l'amour du sang, n'est-ce pas, Jacques ?" dit le Thaddée.

"Lui c'est mon soleil depuis des années. Je suis son cours. S'il tombe dans l'abîme creusé par ses ennemis, je le suivrai" répond Jacques d'Alphée.

"Et moi ? Puis-je oublier qu'il m'a racheté ?" demande Matthieu.

"Mon père me maudirait sept et sept fois si je le quittais. Et du reste, ne serait-ce que pourl'amour de Marie, je ne me séparerai jamais de Jésus" dit Thomas.

Jean ne parle pas, il reste tête baissée, accablé. Les autres prennent son attitude pour de la faiblesse et plusieurs l'interrogent.

"Et toi ? Toi seul veux t'en aller ?"

Jean relève son visage, si pur aussi dans son attitude et ses regards, et fixant de ses yeux bleu clair, limpides, ceux qui l'interrogent, il dit : "Je priais pour nous tous. Car nous voulons faire et dire, et nous présumons de nous-mêmes, et nous ne nous apercevons pas en le faisant que nous mettons en doute les paroles du Maître. Si Lui dit que nous ne sommes pas préparés, c'est signe que nous ne le sommes pas. Si après trois ans nous ne sommes pas préparés, nous ne le serons pas dans quelques mois..."

"Que dis-tu ? Dans quelques mois ? Et qu'en sais-tu ? Es-tu prophète, par hasard ?" Et ils l'assaillent, comme pour lui faire des reproches.

"Je ne sais rien."

"Et alors ? Que sais-tu ? Lui te l'a dit, peut-être ? Tu connais toujours ses secrets..." dit Judas de Kériot, envieux.

"Ne me hais pas, mon ami, si je sais comprendre que le temps serein est fini. Quand sera-ce ? Je ne sais pas. Je sais que ce sera. Lui le dit. Combien de fois il l'a dit ! Nous, nous ne voulons pas croire. Mais la haine des autres confirme ses paroles... Et alors je prie, car il n'y a rien d'autre à faire. Prier Dieu qu'il nous rende forts. Tu ne te souviens pas, Judas, qu'il nous a dit d'avoir prié le Père pour avoir la force dans les tentations ? Toute force vient de Dieu. J'imite mon Maître, comme il est juste de le faire..."

"Mais, en somme, tu restes ?" demande Pierre.

"Et où veux-tu que j'aille si je ne reste pas avec Lui qui est ma vie et mon bien ? Mais puisque je suis un pauvre enfant, le plus misérable de tous, je demande tout à Dieu, le Père de Jésus et le nôtre."

"C'est dit. Donc nous restons tous ! Allons le trouver. Sûrement il est triste. Notre fidélité le rendra heureux" dit Pierre.

Jésus est prosterné en prière. Le visage par terre, dans l'herbe, certainement il supplie le Père. Mais il se lève quand il entend le bruit des pas et il regarde ses douze. Il les regarde d'un air sérieux un peu triste.

"Sois content, Maître. Aucun de nous ne t'abandonne" dit Pierre.

"Vous avez décidé trop rapidement et..."

"Les heures ou les siècles ne changeront pas notre pensée" dit Pierre.

"Ni les menaces, notre amour" déclare l'Iscariote.

Jésus cesse de les regarder en bloc et les fixe un par un. Un long regard que tous soutiennent sans peur. Son regard s'attarde particulièrement sur l'Iscariote qui le regarde avec plus d'assurance que tous. Il ouvre les bras en un geste de résignation et il dit :"Allons. Vous, tous, avez marqué votre destin." Il revient où il était avant et prend son sac. Il ordonne :"Prenons la route qui va à Ephraïm, celle qu'ils nous ont indiquée."

"En Samarie ?!!" La stupeur est à son comble.

"En Samarie. À sa frontière, du moins. Jean aussi alla dans ces parages pour vivre jusqu'à l'heure marquée pour sa prédication du Christ. "

"Il ne se sauva pas de cette façon !" objecte Jacques de Zébédée.

"Je ne cherche pas à me sauver, mais à sauver. Et je sauverai jusqu'à l'heure marquée. C'est vers les brebis les plus malheureuses que va le Pasteur persécuté. Pour que elles, les abandonnées, aient leur part de sagesse pour les préparer aux temps nouveaux."

Il va de son pas rapide, après la halte qui a servi à se reposer et à respecter le sabbat, car il veut arriver avant que la nuit rende les sentiers impraticables.

Quand ils arrivent au petit torrent qui vient d'Éphraïm et va vers le Jourdain, Jésus appelle Pierre et Nathanaël et il leur donne une bourse en disant : "Allez en avant, et cherchez Marie de Jacob. Je me rappelle que Malachie m'avait dit qu'elle était la plus pauvre de l'endroit, bien qu'elle ait une grande maison, maintenant qu'elle n'y a plus ses fils et ses filles. Nous resterons chez elle. Donnez-lui une bonne somme pour qu'elle nous loge tout de suite sans faire mille discours. Vous connaissez la maison. Cette grande maison ombragée par quatre grenadiers, qui est presque près du pont sur le torrent."

"Nous la connaissons, Maître. Nous allons faire comme tu dis." Ils s'en vont vivement et Jésus les suit lentement avec les autres.

De la cuvette que le torrent divise en deux moitiés on voit le village qui blanchit aux dernières lueurs du jour et aux premières clartés de la lune. Il n'y a pas âme qui vive quand ils arrivent à la maison déjà toute blanchie par la lune. Seul le torrent se fait entendre dans le silence du soir. Quand on se retourne en arrière et qu'on regarde l'horizon on voit une grande partie du ciel étoilé qui se penche sur une grande étendue de terrains dévalant vers la plaine déserte qui descend au Jourdain. Une paix profonde règne sur la Terre.

Ils frappent à la porte. Pierre ouvre : "Tout est fait, Seigneur. La vieille femme a pleuré en se voyant donner de l'argent. Elle n'avait plus la moindre pièce. Je lui ai dit : "Ne pleure pas, femme. Où est Jésus de Nazareth il n'y a plus de douleur". Elle m'a répondu : "Je le sais. J'ai souffert pendant toute ma vie et maintenant j'étais vraiment aux limites de la souffrance. Mais le Ciel s'est ouvert pour moi sur mon soir et il m'amène l'Étoile de Jacob pour me donner la paix". Maintenant elle est à côté qui prépare les pièces fermées depuis si longtemps. Hum ! c'est bien peu, mais la femme paraît très bonne. La voilà ! Femme ! Le Rabbi est ici !"

Se présente une petite vieille amaigrie, aux doux yeux mélancoliques. Elle s'arrête confuse, à quelques pas de Jésus. Elle est intimidée.

"Paix à toi, femme. Je ne te dérangerai pas beaucoup."

"Moi... je voudrais... je voudrais que tu me marches sur le cœur pour te rendre plus douce l'entrée dans ma pauvre maison. Entre, Seigneur, et que Dieu entre avec Toi." Elle a repris son souffle et de la hardiesse sous la lumière du regard de Jésus.

Ils entrent tous et ferment la porte. La maison est vaste comme une hôtellerie et vide comme un endroit abandonné. Seule la cuisine est gaie, à cause d'un feu qui flambe dans le foyer au milieu de la pièce. Barthélemy, qui était en train d'alimenter le feu, se retourne et dit en souriant : "Réconforte cette femme, Maître. Elle est affligée de ne pas pouvoir t'honorer."

"Ton cœur me suffit, femme. Ne te soucie de rien. Demain nous aviserons. Je suis un pauvre, Moi aussi. Apportez-lui les provisions. Entre pauvres, on partage le pain et le sel, sans honte et avec un amour fraternel. Pour toi, femme, c'est un amour filial, car tu pourrais être ma mère, et je t'honore comme telle..."


La femme verse des larmes silencieuses de vieille femme affligée en essuyant ses yeux à son voile et elle murmure : "J'avais trois garçons et sept filles. Un garçon a été emporté par le torrent et un autre par la fièvre. Le troisième m'a abandonnée. Cinq des filles ont pris le mal du père, et elles sont mortes. La sixième est morte en enfantant et la septième... Ce que la mort n'a pas fait le péché l'a fait. Dans ma vieillesse, je ne suis pas honorée par mes enfants et cela me fait si... Dans le village, ils sont bons... Mais pour la pauvre femme... Toi, tu es bon pour la mère..."

"J'ai une Mère, Moi aussi. Et en toute femme qui est mère, j'honore la mienne. Mais ne pleure pas. Dieu est bon. Aie foi, et les enfants qui te restent pourront revenir vers toi un jour. Les autres sont en paix..."

"Je pense que c'est un châtiment parce qu'ils sont de cet endroit..."

"Aie foi. Dieu est plus juste que les hommes..."

Reviennent les apôtres qui étaient allés dans les pièces avec Pierre. Ils apportent les vivres. Ils réchauffent l'agneau rôti par Nique et l'apportent sur la table. Jésus offre et bénit et il veut que la petite vieille soit avec eux, au lieu de rester dans son coin à manger la chicorée de son souper...

L'exil aux confins de la Judée est commencé...


*

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http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-012.htm
TOME : 8 /12



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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Jeu 31 Juil 2014 - 7:07

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Le premier jour à Éphraïm

Vision du Mercredi 8 janvier 1947

"Maître, paix à Toi" disent Pierre et Jacques de Zébédée qui reviennent à la maison, chargés de brocs remplis d'eau.

"Paix à vous ! D'où venez-vous ?"

"Du torrent. Nous avons pris de l'eau et nous en prendrons encore pour le ménage, puisque nous sommes au repos... Et il n'est pas juste que la petite vieille se fatigue pour nous. Elle est à côté à faire du feu pour chauffer l'eau. Mon frère est allé dans le bosquet prendre du bois. Comme il ne pleut pas depuis quelque temps il brûle comme de la bruyère" explique Jacques de Zébédée.

"Oui. Mais c'est que, bien qu'il fît à peine jour, ils nous ont vu au torrent et dans le bois. Et penser que j'étais allé au torrent pour ne pas aller à la fontaine..." dit Pierre.

"Et pourquoi, Simon de Jonas ?"

"Parce qu'à la fontaine il y a toujours des gens et ils pouvaient nous reconnaître et accourir ici..."

Pendant qu'ils parlent sont entrés dans le long corridor qui sépare en deux la maison, les deux fils d'Alphée, Judas de Kériot et Thomas. Ainsi eux aussi entendent les dernières paroles de Pierre et la réponse de Jésus : "Ce qui ne serait pas arrivé dans les premières heures du jour serait certainement arrivé plus tard, demain tout au plus, puisque nous restons ici..."

"Ici ? Mais... Je croyais que c'était seulement une pause..."

"Ce n'est pas une simple pause. C'est le séjour. Nous ne partirons d'ici que pour revenir à Jérusalem pour la Pâque."

"Oh ! moi, j'avais cru que quand tu parlais de pays de loups et de vautours, tu voulais parler de cette région où tu voulais passer, comme tu l'avais fait déjà d'autres fois, pour aller dans d'autres lieux sans suivre les routes fréquentées par les juifs et les pharisiens..." dit Philippequi est survenu, et d'autres disent : "C'est ce que je croyais moi aussi."

"Vous avez mal compris. Ce n'est pas ici le pays de loups et de vautours, bien que sur les monts les vrais loups aient leurs repaires , mais je ne parle pas des animaux..."

"Oh ! cela, on l'avait compris ! s'écrie Judas de Kériot quelque peu ironique. Pour Toi, qui t'appelles l'Agneau, il est clair que ce sont les hommes qui sont des loups. Nous ne sommes pas complètement sots."

"Non. Vous n'êtes pas sots, si ce n'est pour ce que vous ne voulez pas comprendre, c'est-à-dire pour ma nature et ma mission et la douleur que vous me donnez en ne travaillant pas assidûment à vous préparer à l'avenir. C'est pour votre bien que Moi je parle et vous instruis par mes actes et mes paroles. Mais vous rejetez ce qui trouble votre humanité par l'annonce de douleurs et la requête d'efforts contre votre moi. Écoutez, avant qu'il n'y ait ici des étrangers. Maintenant je vais vous diviser en deux groupes de cinq et vous irez sous la conduite de votre chef de groupe à travers les campagnes voisines, comme dans les premiers temps où je vous envoyais. Rappelez-vous tout ce que je vous ai dit alors et mettez-le en pratique. L'unique exception, c'est que maintenant vous passerez en annonçant la proximité du jour du Seigneur, même aux samaritains, pour qu'ils soient préparés quand il viendra, et que soit plus facile pour vous leur conversion au Dieu Unique. Soyez pleins de charité et de prudence, exempts de préjugés. Vous voyez, et vous verrez davantage, que ce qui nous est refusé dans d'autres lieux nous est permis ici. Par conséquent soyez bons avec ceux qui, innocents, paient pour les fautes de leurs pères.

Pierre sera le chef de Jude d'Alphée, Thomas, Philippe et Matthieu. Jacques d'Alphéesera le chef d'André, Barthélemy, Simon le Zélote et Jacques de Zébédée. Judas de Kériot etJean restent avec Moi. Ce sera ainsi à partir de demain. Aujourd'hui nous nous reposerons en faisant ce qui nous prépare aux jours à venir. Le sabbat, nous le passerons unis. Faites en sorte, par conséquent, d'être ici avant le sabbat, pour repartir ensuite quand il sera passé. Ce sera le jour de l'amour entre nous, après avoir aimé le prochain dans le troupeau sorti du bercail paternel. Que chacun de vous aille à ses occupations."

Il reste seul et se retire dans une pièce au fond du corridor.

Dans toute la maison on entend des pas et des voix, bien que tous soient dans les pièces et qu'on ne voie personne en dehors de la petite vieille, qui traverse plusieurs fois le corridor pour aller à ses occupations, dont l'une d'elles est certainement le pain car elle a les cheveux enfarinés et les mains couvertes de pâte.

Jésus sort après un moment et il monte sur la terrasse de la maison. Il marche là-haut en méditant et en regardant de temps à autre ce qui l'entoure.

Il est rejoint par Pierre et Judas de Kériot qui, vraiment, ne sont pas très gais. C'est peut-être pour Pierre une peine de se séparer de Jésus. Peut-être que pour l'Iscariote, c'est une peine de ne pouvoir le faire et d'aller se mettre en vue dans les villes. Il est certain qu'ils sont très sérieux quand ils montent sur la terrasse.

"Venez ici. Regardez quel beau panorama il y a d'ici." Et il montre l'horizon aux aspects variés. Au nord-ouest des monts élevés, boisés, qui s'allongent comme une épine dorsale du nord au sud. L'un d'eux, en arrière d'Ephraïm, est un véritable géant vert qui dépasse lesautres . Au nord-est et au sud-est une ondulation de collines plus douces. Le village est dans une cuvette verte avec des fonds lointains sans relief entre les deux chaînes l'une plus haute, l'autre plus basse, qui du centre de la région descendent vers la plaine du Jourdain. Par une échancrure entre les monts plus bas, on entrevoit cette plaine verte au-delà de laquelle se trouve le Jourdain bleu. Au cœur du printemps ce doit être un pays magnifique, entièrement vert et fertile. Pour le moment les vignes et les vergers interrompent par leur couleur sombre le vert des champs de blé, où les tiges tendres sortent des sillons et des pâturages nourris par un sol fertile.

Si les terres qui se trouvent au-delà d'Ephraïm sont appelées désert par Jean c'est signe qu'il était bien doux le désert de Judée, du moins dans cette région. C'était plutôt un désert uniquement parce qu'il ne s'y trouvait pas de villages, occupé tout entier par des bois et des pâturages au milieu de gais petits torrents. Il était bien différent des terres qui avoisinent la mer Morte qui à juste titre peuvent déjà être appelées "désert" à cause de leur aridité, de l'absence de végétation, si on excepte les touffes de plantes basses, épineuses, tordues, couvertes de sel, qui poussent entre les rochers et les sables remplis de sel. Mais ce doux désert qui se trouve au-delà d'Ephraïm sur d'assez longs espaces est orné de vignes, d'oliviers et de vergers, et maintenant sourient au soleil les amandiers épars ça et là avec leurs touffes d'un blanc rosé, sur les pentes qui seront bientôt couvertes par les festons des vignes d'où sort une nouvelle frondaison.

"Il me semble presque être dans ma ville" dit Judas.

"Il ressemble aussi à Jutta, avec la différence qu'en cet endroit le torrent est en bas et la ville en haut. Ici, au contraire, il semble que le village est dans une vaste cuve avec le fleuve au milieu. Pays de riches vignobles ! Il doit être très beau et très bon, pour ceux qui le possèdent, d'avoir ces terres" observe Pierre.

"Que sa terre soit bénie par le Seigneur avec les fruits du ciel et les rosées, avec les sources qui jaillissent de l'abîme, avec les fruits que font pousser le soleil et la lune, avec les fruits des cimes de ses vieux monts, avec les fruits des collines éternelles et les moissons abondantes des blés", est-il dit . Et c'est sur ces paroles du Pentateuque qu'eux basent leur orgueilleux entêtement de se croire supérieurs. Ainsi en est-il. Même la parole de Dieu et les dons de Dieu, s'ils tombent sur des cœurs possédés par l'orgueil, deviennent une cause de ruine, non par eux-mêmes, mais à cause de l'orgueil qui altère leur substance bonne" dit Jésus.
"Bien sûr. Et eux, du juste Joseph, n'ont gardé que la fureur du taureau et le cou du rhinocéros. Je n'aime pas rester ici. Pourquoi ne me laisses-tu pas aller avec les autres ?" dit l'Iscariote.

"Tu n'aimes pas rester avec Moi ?" demande Jésus en cessant d'observer le paysage et en se tournant pour observer Judas.

"Avec Toi, si, mais pas avec ceux d'Éphraïm."

"La belle raison ! Et nous, alors, qui irons à travers la Samarie ou la Décapole — en effet nous ne pourrons aller que dans ces régions dans le temps prescrit d'un sabbat au sabbat suivant — irons-nous par hasard parmi des saints ?" dit Pierre en faisant des reproches à Judas qui ne répond pas.

"Que t'importe de qui tu es voisin si tu sais tout aimer à travers Moi ? Aime-moi dans le prochain et tout endroit sera pareil pour toi" dit calmement Jésus.

Judas ne répond pas non plus à Jésus.

"Et penser que moi, je dois aller... Je resterais si volontiers ici, moi ! D'autant plus... pour ce que je sais faire ! Choisis au moins pour chef Philippe ou ton frère, Maître . Moi... quand il s'agit de dire : faisons ceci, allons à cet endroit, je sais encore. Mais si je dois parler !... Je gâterai tout."

"L'obéissance te fera tout bien faire. Ce que tu feras me plaira."

"Alors... si cela te plaît à Toi, cela plaît à moi aussi. Il me suffit de te faire plaisir. Mais voilà ! Je l'avais dit ! Voilà qu'arrive la moitié de la ville... Regarde ! Le chef de la synagogue... les notables... leurs femmes... les enfants et le peuple !..."

"Descendons à leur rencontre" commande Jésus et il se hâte de descendre par l'escalier en jetant un appel aux autres apôtres pour qu'ils sortent avec Lui de la maison.

Les habitants d'Éphraïm s'avancent avec les signes de la plus juste déférence et, après les salutations de règle, quelqu'un, peut-être le chef de la synagogue, parle au nom de tous : "Que béni soit le Très-Haut pour cette journée, et béni son Prophète qui est venu à nous parce qu'il aime tous les hommes au nom du Dieu Très-Haut. Béni sois-tu, Maître et Seigneur, qui t'es souvenu de notre cœur et de nos paroles, et qui es venu te reposer parmi nous. Nous t'ouvrons nos cœurs et nos maisons en demandant ta parole pour notre salut. Béni soit ce jour, car par lui il verra le désert fructifier celui qui sait l'accueillir avec un esprit droit."

"Tu as bien parlé, Malachie. Celui qui sait accueillir avec un esprit droit Celui qui vient au nom de Dieu, verra fructifier son désert et devenir domestiques les arbres robustes mais sauvages qui s'y trouvent Je resterai parmi vous. Et vous viendrez à Moi. En bons amis. Et eux porteront ma parole à ceux qui savent l'accueillir."

"Tu ne nous enseigneras pas, Toi, Maître ?" demande Malachie un peu déçu.

"Je suis venu ici pour me recueillir et prier, pour me préparer aux grandes choses à venir. Vous déplaît-il que j'aie choisi votre pays pour me reposer ?"

"Oh ! non. De te voir prier, ce sera déjà nous rendre sages. Merci de nous avoir choisis pour cela. Nous ne troublerons pas ta prière et nous ne permettrons pas qu'elle soit troublée par tes ennemis. Car déjà on sait ce qui est arrivé et ce qui arrive en Judée . Nous ferons bonne garde. Et nous nous contenterons de l'une de tes paroles quand il te sera facile de la donner. Accepte, en attendant, ces dons de l'hospitalité."

"Je suis Jésus et je ne repousse personne. J'accepte donc ce que vous m'offrez pour vous montrer que je ne vous repousse pas. Mais si vous voulez m'aimer, donnez désormais aux pauvres du village ou aux gens de passage, ce que vous me donneriez, à Moi. Je n'ai besoin que de paix et d'amour."

"Nous le savons. Nous savons tout. Et nous comptons te donner ce dont tu as besoin au point de te faire crier : "La terre qui devait être pour moi l'Égypte, c'est-à-dire la douleur, a été pour Moi, comme pour Joseph de Jacob, une terre de paix et de gloire"

"Si vous m'aimez, en acceptant ma parole, c'est ainsi que je parlerai."

Les habitants remettent leurs dons aux apôtres et se retirent, sauf Malachie et deux autres qui parlent à voix basse à Jésus. Il reste aussi les enfants, pris par la fascination habituelle que Jésus exerce sur les enfants. Ils restent, sourds à la voix de leurs mères qui les appellent, et ils ne s'en vont pas tant que Jésus ne les a pas caressés et bénis.

Alors, gazouillant comme des hirondelles, ils s'envolent, suivis par les trois hommes.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-013.htm
TOME : 8/13
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus


♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Ephraa11
...On aperçoit Ephraïm au loin
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Ven 1 Aoû 2014 - 7:13

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_65

'Si grande est la loi du sabbat, très grand est le précepte de l'amour'


Les dix, fatigués et couverts de poussière, rentrent à la maison. À la femme qui les salue en leur ouvrant la porte, ils demandent tout de suite : "Où est le Maître ?"

"Dans le bois, je crois, à prier comme toujours. Il est sorti de grand matin et il n'est plus revenu."

"Et personne n'est allé le chercher ? Mais que font ces deux ?!" crie Pierre agité.

"Ne t'inquiète pas, homme. Parmi nous il est en sécurité comme dans la maison de sa Mère."

"En sécurité ! En sécurité ! Vous vous rappelez le Baptiste ? Il était en sécurité ?"

"Il ne le fut pas parce qu'il ne sut pas lire dans le cœur de celui qui lui parlait. Mais si le Très-Haut permit cela pour le Baptiste, certainement Il ne le permettra pas pour son Messie. Tu dois le croire plus encore que moi, qui suis femme et samaritaine."

"Marie a raison. Mais où est-il allé exactement ?"

"Je ne le sais pas. Il va tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. Parfois seul, parfois avec des enfants qui l'aiment tant. Il leur apprend à prier en voyant Dieu en toutes choses. Mais aujourd'hui il est seul car il n'est pas venu à sexte. Quand il a les enfants avec Lui, il revient parce que ce sont des oiseaux qui veulent la becquée aux heures régulières..." la petite vieille sourit, en se rappelant peut-être ses dix enfants, et puis elle soupire... parce qu'aussi joies et douleurs se trouvent dans les souvenirs de la vie.

"Et Judas et Jean, où sont-ils ?"

"Judas à la fontaine. Jean à ramasser du bois. Je n'en avais plus car j'ai lavé tous les vêtements pour vous les donner propres à votre départ."

"Que Dieu te récompense, mère. C'est beaucoup de travail à cause de nous..." dit Thomas en mettant une main sur l'épaule maigre et voûtée, comme pour la caresser.

"Oh !... Ce n'est pas de la fatigue, c'est comme si j'avais mes enfants..." dit-elle encore en souriant avec une larme qui brille dans ses yeux enfoncés de vieille femme.

Jean rentre sous une grande charge de bois et il semble que le couloir plutôt sombre s'éclaire à sa venue. J'ai toujours remarqué la clarté qui semble s'allumer là où est Jean. Son sourire si doux, si franc, d'enfant, son œil limpide et riant comme un beau ciel d'avril, sa voix joyeuse quand il salue affectueusement ses compagnons, sont comme un rayon de soleil ou un arc-en-ciel de paix. Tous l'aiment, à l'exception de Judas de Kériot dont je ne sais s'il l'aime ou s'il le hait, mais qui certainement l'envie et souvent se moque de lui, parfois l'offense. Mais, en ce moment, Judas n'est pas là.

Ils l'aident à déposer sa charge et lui demandent où peut être Jésus. Jean aussi est un peu alarmé du retard, mais plus confiant en Dieu que les autres, il dit : "Son Père le préservera du mal. Nous devons croire au Seigneur." Et il ajoute : "Mais venez. Vous êtes las et couverts de poussière. Nous vous avons gardé tout prêts des aliments et de l'eau chaude. Venez, venez..."

Judas de Kériot rentre aussi avec ses brocs qui débordent. "Paix à vous. Le voyage a-t-il été facile ?" demande-t-il, mais il n'y a pas de bonté dans sa voix, il y a un mélange de mépris et de mécontentement.

"Oui, nous avons commencé par la Décapole."

"Par peur d'être lapidés ou de vous contaminer ?" demande ironiquement l'Iscariote.

"Ni l’une ni l'autre chose. Mais par prudence de débutants. Et c'est moi qui l'ai proposé, ce n'est pas pour te faire des reproches, moi qui ai blanchi sur les parchemins" ditBarthélemy.

Judas ne réplique rien. Il s'en va dans la cuisine où ceux qui sont revenus se restaurent avec ce qui a été préparé.

Pierre regarde l'Iscariote qui s'en va et il secoue la tête, mais ne parle pas. Le Thaddée, de son côté, prend Jean par la manche et demande : "Comment a-t-il été ces jours-ci ? Toujours aussi inquiet ? Sois sincère..."

"Toujours sincère, Jude. Mais je t'assure qu'il n'a pas fait souffrir. Le Maître reste presque toujours isolé. Moi, je reste avec la vieille mère qui est si bonne, et j'écoute ceux qui viennent parler au Maître, et ensuite je le Lui dis. Judas, de son côté, va au village. Il s'est fait des amis... Que voulez-vous ! Il est ainsi... Il ne sait pas rester tranquille comme nous le saurions, nous..."

"Pour moi qu'il fasse ce qu'il veut. Il me suffit qu'il ne fasse pas souffrir."

"Non. Pour cela, non. Il s'ennuie certainement. Mais... Voilà le Maître ! J'entends sa voix. Il parle avec quelqu'un..."

Ils courent dehors et voient Jésus qui s'avance, dans le crépuscule qui descend, avec deux enfants sur les bras et un autre attaché à son vêtement, et il les encourage car ils pleurent.

"Dieu te bénisse, Maître ! Mais d'où viens-tu si tard ?"

Jésus, en entrant dans la maison, répond : "Je viens de chez les voleurs et j'ai fait une proie, Moi aussi. J'ai marché après le coucher du soleil, mais mon Père m'en absoudra car j'ai accompli un acte de miséricorde... Prends-les, Jean, et toi, Simon... J'ai les bras rompus... et je suis vraiment fatigué." Il s'assoit sur un tabouret près de la cheminée et sourit, fatigué, mais heureux.

"De chez les voleurs ? Mais où as-tu été ? Qui sont ces enfants ? Mais as-tu mangé ? Où étais-tu ? Il n'est pas prudent d'être dehors ainsi à la tombée de la nuit et si loin !... Nous étions inquiets. Tu n'étais pas dans le bois ?" Ils parlent tous ensemble.

"Je n'étais pas dans le bois. Je suis allé vers Jéricho..."

"Imprudent ! Sur ces chemins, tu peux trouver des gens qui te haïssent !" Lui reproche le Thaddée.

"J'ai suivi le sentier qu'ils nous ont appris. Il y avait des jours que je voulais aller là... Il y a des malheureux à racheter. À Moi ils ne pouvaient rien me faire de mal et je suis arrivé à temps pour ces enfants. Donnez-leur à manger. Je crois qu'ils sont presque à jeun car ils avaient peur des voleurs, et je n'avais pas de nourriture avec Moi. Si au moins j'avais trouvé un berger !... Mais la proximité du sabbat avait déjà rendu déserts les pâturages..."

"Bien sûr ! Il n'y a que nous qui ne respectons pas le sabbat depuis quelque temps..." observe Judas de Kériot toujours blessant.

"Comment parles-tu ? Qu'est-ce que tu insinues" lui demandent-ils.

"Je dis que cela fait deux sabbats que nous travaillons après le coucher du soleil."

"Judas, tu sais pourquoi nous devions marcher le dernier sabbat. Le péché n'appartient pas toujours à celui qui l'accomplit, mais aussi à celui qui force à l'accomplir. Et aujourd'hui... Je le sais. Tu veux me dire qu'aujourd'hui aussi j'ai violé le sabbat. Je te réponds que si grande est la loi du repos sabbatique, très grand est le précepte de l'amour. Je ne suis pas tenu à me justifier à tes yeux, mais je le fais pour t'apprendre la mansuétude, l'humilité, et la grande vérité que devant une nécessité sainte on doit savoir appliquer la loi avec souplesse d'esprit.Notre histoire possède des exemples de cette nécessité . Je suis allé à l'aurore vers lesmonts Adomin car je sais que là il y a des malheureux dont l'âme est rendue lépreuse par le crime. J'espérais les rencontrer, leur parler, revenir avant le coucher du soleil. Je les ai trouvés mais je n'ai pu leur faire le discours prévu, car il y avait autre chose à dire...

Ils avaient trouvé ces trois enfants qui pleuraient sur le seuil d'un pauvre bercail de la plaine. Ils étaient descendus de nuit pour voler des agneaux et aussi pour tuer le berger s'il avait résisté.

La faim est cruelle sur les monts en hiver... Et quand ce sont des cœurs cruels qui en souffrent, elle rend les hommes plus féroces que des loups. Ces enfants étaient donc là avec un pastoureau à peine plus âgé qu'eux et effrayé comme eux. Le père des enfants, je ne sais pour quelle raison, était mort pendant la nuit. Il avait peut-être été mordu par quelque animal, ou son cœur avait faibli... Il était froid sur la paille près des brebis. L'aîné s'en aperçut car il dormait à côté de lui. Ainsi les voleurs, là où ils auraient peut-être tué, trouvèrent un mort et quatre enfants en pleurs.

Ils abandonnèrent le mort et poussèrent en avant les brebis, et le pastoureau et, comme chez les plus farouches il peut y avoir une pitié qui ne meurt pas facilement, ils recueillirent aussi les enfants... Je les ai trouvés en train de discuter sur ce qu'ils devaient faire. Les plus féroces voulaient tuer le pastoureau de dix ans, dangereux témoin de leur vol et de leur refuge. Les moins durs voulaient le renvoyer en le menaçant, tout en retenant le troupeau. Tous, ensuite, voulaient garder les enfants plus petits."

"Pour en faire quoi ? Mais ils n'ont pas de famille ?"

"La mère est morte. C'est pour cela que le père les avait emmenés avec lui aux pâturages d'hiver, et maintenant il remontait en traversant ces montagnes, vers sa maison déserte. Pouvais-je laisser les petits aux voleurs pour qu'ils les rendissent semblables à eux ? Je leur ai parlé... En vérité je vous dis qu'ils m'ont compris plus que beaucoup d'autres. Ils ont si bien compris qu'ils m'ont laissé les enfants et qu'ils accompagneront demain le pastoureau sur la route de Sichem, car dans ces campagnes demeurent les frères de leur mère. En attendant j'ai recueilli les enfants et je les garderai avec nous jusqu'à l'arrivée des parents."

"Et tu t'imagines que les voleurs..." dit l’Iscariote, et il rit...

"Je suis certain qu'ils ne toucheront pas à un cheveu du petit berger. Ce sont des malheureux. Nous ne devons pas juger pourquoi ils le sont, mais nous devons essayer de les sauver. Une bonne action peut être le commencement de leur salut..." Jésus incline la tête, absorbé dans je ne sais quelle pensée.

Les apôtres et la petite vieille parlent et échangent entre eux des sentiments de compassion et s'empressent de réconforter les enfants apeurés...

Jésus lève la tête en entendant pleurer le plus petit, un enfant brun d'environ trois ans, et il dit à Jacques qui s'efforce inutilement de lui faire prendre du lait : "Donne-moi le petit et va prendre mon sac..." et il sourit parce que le petit s'apaise sur ses genoux et boit avidement le lait qu'il repoussait auparavant. Les autres, un peu plus grands, mangent la soupe qu'on a mise devant eux, mais des larmes descendent de leurs yeux.

"Hélas ! Que de misères ! Voilà ! Que nous, nous souffrions, c'est juste, mais des innocents !..." dit Pierre qui ne peut voir souffrir des enfants.

"Tu es un pécheur, Simon. Tu fais des reproches à Dieu" observe l'Iscariote.

"Possible que je sois un pécheur, mais je ne fais pas de reproche à Dieu. Je dis seulement... Maître, pourquoi les enfants doivent-ils souffrir ? Eux n'ont pas de péchés."

"Tous ont des péchés, au moins le péché originel" dit l'Iscariote.

Pierre ne lui répond pas, il attend la réponse de Jésus. Jésus, qui berce l'enfant maintenant repu et somnolent, répond : "Simon, la douleur est la conséquence de la faute."

"Bien. Alors... quand tu auras enlevé la faute, les enfants ne souffriront plus ?"

"Ils souffriront encore. Ne t'en scandalise pas, Simon. Il y aura toujours la douleur et la mort sur la Terre. Même les plus purs souffrent et souffriront, et même ce seront eux qui souffriront pour tous. Les hosties propitiatoires pour le Seigneur."

"Mais, pourquoi ? Je ne comprends pas..."

"Nombreuses sont les choses que l'on ne comprend pas sur la Terre. Sachez croire au moins que ce sont des choses voulues par l'Amour parfait. Et quand la Grâce rendue aux hommes, fera connaître aux plus saints d'entre eux les vérités cachées, on verra alors que ce seront justement les plus saints qui voudront être victimes, car ils auront compris la puissance de la douleur... L'enfant dort. Marie, l'emmènes-tu avec toi ?"

"Certainement, Maître. Pour l'enfant apeuré, court sommeil et beaucoup de pleurs, et pour l'oiseau sans nid est nécessaire l'aile maternelle, dit-on chez nous. Il est grand mon lit maintenant que je suis seule à l'occuper. Je vais y porter les enfants et je veillerai sur eux. Eux aussi vont oublier leur douleur dans le sommeil. Venez que nous les portions au lit."

Elle prend le plus petit des genoux de Jésus et s'en va, suivie de Pierre et Philippe, alors queJacques de Zébédée revient avec le sac de Jésus.

Jésus l'ouvre et fouille à l'intérieur. Il en retire un lourd vêtement, le déplie, en observe la taille. Il n'est pas satisfait. Il cherche le manteau, foncé comme le vêtement, le met de côté et ferme le sac pour le rendre à Jacques.

Pierre revient avec Philippe. La petite vieille est restée avec les trois enfants, et Pierre voit tout de suite les vêtements dépliés mis de côté. Il dit : "Tu veux changer de vêtements, Maître ? Las comme tu l'es, un bain chaud devrait te remettre en forme. Il y a de l'eau et nous allons réchauffer les vêtements, puis nous souperons et irons nous reposer. Cette histoire des pauvres enfants m'a tout à fait remué..."

Jésus sourit, mais ne répond pas à la question. Il dit seulement : "Louons le Seigneur qui m'a fait arriver à temps pour sauver les innocents." Puis, fatigué, il se tait...

La petite vieille rentre avec les vêtements des enfants. "Il faudrait les changer... Ils sont déchirés et couverts de boue... Mais je n'ai plus les vêtements de mes fils pour les changer. Je les laverai demain..."

"Non, Mère. Après le sabbat, tu vas coudre trois petits vêtements dans ceux-ci qui sont à Moi."

"Mais, Seigneur, sais-tu que tu n'as plus maintenant que trois vêtements ? Si tu en enlèves un, avec quoi restes-tu ? Lazare n'est pas ici comme quand tu as donné ton manteau à la lépreuse ! " dit Pierre.

"Laisse faire. Il en reste deux et c'est déjà trop pour le Fils de l'homme. Prends, Marie. Demain, au coucher du soleil, tu commenceras ton travail, et le Persécuté aura la joie de secourir le pauvre dont il comprend les peines."

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-014.htm
TOME : 8 /14


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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Sam 2 Aoû 2014 - 7:13

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_66

Le jour suivant


"Levez-vous et allons le long du torrent. Comme des hébreux hors de leur patrie et dans des endroits où il n'y a pas de synagogues, nous allons célébrer le sabbat entre nous. Venez, mes enfants..." dit Jésus aux apôtres oisifs dans le jardin de la maison, et il tend la main aux trois pauvres enfants qui sont groupés dans un coin.

Ils accourent avec une joie timide sur leurs petits visages précocement pensifs d'enfants qui ont vu des choses plus grandes qu'eux, et les deux plus grands mettent leur petite main dans celles de Jésus. Mais le plus petit veut être pris dans les bras, et Jésus le contente en disant au plus grand : "Tu vas rester à côté de Moi et tu tiendras mon vêtement comme hier. Mais Isaac est trop las et trop petit pour aller tout seul..." L'enfant boit le sourire de Jésus et accepte se contentant de marcher près de Jésus comme un petit homme.

"Donne-moi l'enfant, Maître. Tu dois être encore fatigué d'hier, et Ruben souffre de ne pas te donner la main..." dit Barthélemy, et il va Lui prendre l'enfant qui s'attache au cou de Jésus.

"Il est têtu comme toute sa race !" s'écrie Judas Iscariote.

"Non. Il est effrayé. Tu ne comprends rien aux enfants. Les petits sont ainsi. Quand ils sont affligés ou effrayés, ils cherchent un refuge auprès du premier qui leur a souri et qui les a réconfortés" réplique Barthélemy et, ne pouvant prendre dans ses bras le plus petit, donne la main au plus grand, après avoir caressé ses cheveux et lui avoir souri paternellement.

Ils sortent de la maison où il ne reste que la femme et vont au-delà du village en suivant le torrent. Elles sont belles ses rives couvertes d'herbe nouvelle et constellées des fleurs des prés. L'eau est limpide et babille entre les rochers, et bien qu'elle soit peu abondante, elle fait entendre des notes de harpe et bruit en se brisant contre les cailloux plus gros épars sur le fond sableux, ou en s'insinuant entre les découpures de quelque île minuscule couverte de roseaux.

Des arbres près de la rive les oiseaux s'envolent avec des trilles joyeux ou bien se posent sur une branche en plein soleil et chantent leurs premières chansons printanières, ou descendent gracieux et vifs pour chercher des insectes et des vers dans le sol, ou pour boire près des rives. Deux tourterelles sauvages prennent leur bain dans une anse de la rive et se becquettent en roucoulant, puis s'envolent en emportant dans leurs becs un flocon de laine laissé par quelque brebis sur une branche d'aubépine qui fleurit au sommet.

"Elles font ainsi pour faire leur nid, dit le plus grand des enfants. Elles ont sûrement des tourtereaux..." Il baisse la tête, bas, très bas, et après avoir esquissé un léger sourire aux premières paroles, il pleure sans bruit en essuyant ses yeux avec sa main.

Barthélemy le prend dans ses bras, comprenant la blessure que les deux tourterelles ont faite en s'occupant de leurs nids, et Barthélemy soupire avec sa bonne âme de père de famille. L'enfant pleure sur son épaule et l'autre, le second, voyant ces larmes, se met à pleurer à son tour, imité par le troisième qui appelle son père de sa petite voix d'enfant qui commence à parler.

"Aujourd'hui, ce sera cela notre prière du sabbat ! Tu aurais pu les laisser à la maison ! La femme est plus indiquée que nous dans ces cas et..." observe l'Iscariote.

"Mais si elle ne fait que pleurer elle aussi ! Comme du reste j'ai bonne envie de le faire moi aussi... Car ce sont des choses... qui font pleurer..." lui répond Pierre en prenant dans ses bras le second enfant.

"Oui, ce sont des choses qui font pleurer, c'est vrai. Et Marie de Jacob, pauvre vieille affligée, n'est pas très capable de consoler..." confirme le Zélote.

"Nous aussi, il ne semble pas que l'on y réussisse beaucoup. Le seul qui pouvait les consoler, c'était le Maître, et il ne l'a pas fait."

"Il ne l'a pas fait ? Et que devait-il faire de plus ? Il a persuadé les larrons. Il a fait plusieurs milles avec les enfants dans les bras, il s'est occupé d'avertir leurs parents..."

"Toutes choses secondaires. Lui qui est Celui qui commande même à la mort pouvait, ou plutôt devait, descendre au bercail et ressusciter le berger. Il l'a bien fait pour Lazare qui n'était utile à personne ! Ici, un père, et de plus un veuf, des enfants qui restent seuls... Cette résurrection s'imposait. Je ne te comprends pas, Maître..."

"Et nous, nous ne comprenons pas toi qui es si irrespectueux..."

"Paix, paix ! Judas ne comprend pas. Il n'est pas le seul à ne pas comprendre les raisons de Dieu, et les conséquences du péché. Toi aussi, Simon de Jonas, tu ne comprends pas pourquoi les innocents doivent souffrir. Ne jugez donc pas Judas de Simon qui ne comprend pas pourquoi l'homme n'est pas ressuscité. Si Judas réfléchissait, lui qui me reproche toujours d'aller seul et au loin, il comprendrait que je ne pouvais aller si loin... En effet le bercail était dans la plaine de Jéricho, mais au-delà de la ville, vers le gué. Qu'auriez-vous dit si j'avais été au loin au moins pendant trois jours ?"

"Tu pouvais commander par ton esprit au mort de ressusciter."

"Es-tu plus exigeant que les pharisiens et les scribes qui ont voulu la preuve d'un mort déjà décomposé pour pouvoir dire que je ressuscite réellement les morts ?"

"Mais eux le voulaient parce qu'ils te haïssent. Moi, je le voudrais parce que je t'aime et que je voudrais te voir écraser tous tes ennemis."

"Ton vieux sentiment et ton amour désordonné. Tu n'as pas su déraciner de ton cœur les vieux arbres pour les remplacer par des arbres jeunes; et les vieux, développés par la Lumière, de laquelle tu t'es approché, sont devenus encore plus robustes. Ton erreur est celle de beaucoup de gens, présents et à venir, de ceux qui, malgré les secours de Dieu, ne se transforment pas parce qu'ils ne répondent pas par une volonté héroïque aux secours de Dieu."

"Est-ce que par hasard eux, qui sont comme moi tes disciples, ont détruit les vieux arbres ?"

"Ils les ont au moins beaucoup taillés et beaucoup greffés. Toi, tu ne l'as pas fait. Tu n'as même pas regardé avec attention s'ils méritaient la greffe, la taille, ou s'il fallait les enlever. Tu es un jardinier imprévoyant, Judas."

"Seulement pour mon âme cependant, car pour les jardins je sais m'y prendre."

"Tu sais t'y prendre. Pour toutes les choses de la Terre, tu sais faire. Je voudrais te voir capable de la même façon pour les choses du Ciel."

"Mais ta lumière devrait faire d'elle-même toutes sortes de prodiges en nous ! N'est-elle pas bonne, peut-être ? Si elle fertilise le mal et lui donne de la force, alors elle n'est pas bonne, et c'est sa faute si nous ne devenons pas bons."

"Parle pour toi, ami. Moi je ne trouve pas que le Maître ait rendu plus fortes mes tendances mauvaises" dit Thomas
.
"Et moi non plus."

"Ni moi" disent André et Jacques de Zébédée.

"Et puis pour moi, sa puissance m'a délivré du mal et elle m'a refait à neuf. Pourquoi parles-tu ainsi ? Est-ce que tu réfléchis à ce que tu dis ?" demande Matthieu.

Pierre est sur le point de parler, mais il préfère s'en aller, et il se met à marcher vivement avec l'enfant à son cou en imitant le balancement d'une barque pour le faire rire et, en passant, il prend par un bras le Thaddée et lui crie : "Allons là-bas dans cette île ! Elle est remplie de fleurs comme une corbeille. Venez, Nathanaël, Philippe, Simon, Jean... Un bon saut et on y est. Le torrent ainsi divisé n'est plus que deux ruisseaux de chaque côté de l'île..." Et il saute le premier en posant le pied sur un affleurement de sable large de quelques mètres, couvert d'herbe comme une prairie, couvert des premières fleurs qui y forment un tapis, au milieu duquel se trouve un seul peuplier grand et élancé dont la cime ondule à une brise légère.

Ceux qu'il a appelés le rejoignent lentement, suivis ensuite par ceux qui étaient plus près de Jésus qui reste en arrière pour parler avec l'Iscariote.

"Mais il n'a pas encore fini celui-là ?" demande Pierre à son frère.

"Le Maître est en train de travailler son cœur" répond André.

"Eh ! il est plus facile de faire pousser des figues sur cet arbre que de faire naître la justice dans le cœur de Judas."

"Et dans son intelligence" renchérit Matthieu.

"Il est sot parce qu'il veut l'être, et en ce qu'il veut" dit le Thaddée.

"Il souffre parce qu'il n'a pas été choisi pour évangéliser. Moi, je le sais" explique Jean.

"Mais pour moi... Si lui veut aller à ma place... Je n'y tiens pas vraiment à y aller !" s'exclame Pierre.

"Personne de nous n'y tient, mais lui, si. D'autre part mon Frère ne veut pas l'envoyer. Ce matin, je Lui en ai parlé car j'avais compris l'humeur de Judas et d'où elle venait. Mais Jésus m'a dit : "C'est justement parce qu'il a le cœur si malade que je le garde près de Moi. Ce sont ceux qui souffrent et sont faibles qui ont besoin d'un médecin et de quelqu'un qui les soutienne".

"Oui !... C'est bien !... Venez, mes enfants. Maintenant nous prenons ces beaux roseaux et nous en faisons des barquettes. Voyez comme elles sont belles ! Et à l'intérieur, en guise de pêcheurs, nous mettons ces fleurettes. Regardez si elles ne ressemblent pas à des têtes, avec un couvre-chef blanc et rouge... Ici nous faisons le port, et ici, voilà les maisonnettes des pêcheurs... Maintenant nous attachons les barques avec ces herbes fines, et vous les faites aller sur l'eau, ainsi... et puis vous les tirez sur la rive après la pêche... Vous pouvez aussi faire le tour de l'île... attention aux écueils, eh !..." Pierre est admirable de patience. Il a travaillé avec son couteau des morceaux de roseaux, en les taillant d'un nœud à l'autre et en les découvrant d'un côté pour transformer les roseaux en barquettes, il a mis pour servir de pêcheurs des pâquerettes encore en boutons, il a creusé dans le sable un port lilliputien et fait des maisonnettes avec le sable humide et, atteint son but d'amuser les enfants, il s'assoit satisfait en murmurant : "Pauvres enfants !..."

Jésus met le pied sur l'île justement quand les deux enfants commencent leur jeu et il les caresse en déposant à terre le plus petit qui s'associe au jeu de ses frères.

"Je suis à vous. Et maintenant parlons de Dieu, car parler de Dieu et parler à Dieu c'est se préparer à la mission. Et après avoir prié, c'est-à-dire parlé à Dieu, nous parlerons de Dieu qui est présent dans toutes les choses afin d'instruire pour les choses bonnes. Allons, levez-vous et prions" et il entonne des psaumes en hébreu auxquels s'associent les apôtres.

Les enfants, qui s'étaient éloignés avec leurs barquettes, suspendent le gazouillis de leurs voix et leurs jeux et s'approchent en entendant chanter ces hommes. Ils écoutent avec attention, les yeux fixés sur Jésus qui pour eux est tout, et puis, avec l'esprit d'imitation des enfants, ils prennent la même posture que ceux qui prient et essaient de suivre le chant en fredonnant l'air, car ils ne connaissent pas les paroles des psaumes. Jésus abaisse sur eux ses yeux et il les regarde avec un sourire qui encourage le chant des petites voix innocentes. Se sentant approuvés, ils reprennent courage...

Le chant des psaumes prend fin. Jésus s'assoit sur l'herbe et commence à parler : "Quand les rois d'Israël, celui de Joram et celui de Juda, se réunirent pour combattre le roi de Moab et s'adressèrent pour demander conseil au prophète Élisée, celui-ci répondit à l'envoyé du roi :

"Si je n'avais pas de respect pour Josaphat, roi de Juda, je ne t'aurais même pas regardé. Mais maintenant, amenez-moi un joueur de lyre".

Et pendant que le harpiste jouait, Dieu parla à son prophète pour commander de faire creuser plusieurs fossés dans le torrent à sec, afin qu'il s'emplisse d'eau pour les hommes et les bêtes. Et à l'heure du sacrifice du matin, le torrent, sans qu'il y eût du vent ou de la pluie, s'emplit comme le Seigneur l'avait dit. Quelles sont selon vous les leçons de cet épisode ? Parlez !"

Les apôtres se consultent entre eux. Les uns disent : "Dieu ne parle pas quand le cœur est troublé. Élisée veut calmer son indignation, venue de se voir en face le roi d'Israël, pour pouvoir entendre Dieu." D'autres disent de leur côté : "C'est une leçon de justice. Élisée, pour ne pas punir le roi de Juda innocent, sauve même le coupable." D'autres encore : "C'est une leçon d'obéissance et de foi. Ils creusèrent les fossés pour obéir à un commandement stupide en apparence, et avec foi ils attendirent l'eau, bien que le ciel fût serein et sans vent."

"Vous avez bien répondu, mais pas tout à fait. Quand le cœur est troublé, Dieu ne parle pas. C'est vrai. Mais il n'est pas besoin de harpe pour calmer le cœur. Il suffit d'avoir la charitéqui est la harpe spirituelle qui donne les notes du Paradis. Quand une âme vit dans la charité, elle a le cœur calme et elle entend la voix de Dieu et la comprend."

"Alors Élisée n'avait pas la charité puisqu'il était troublé."

"Élisée est du temps de la Justice. Il faut savoir transporter au temps de la Charité les épisodes anciens et les voir non pas à la lumière des foudres, mais à celle des astres. Vous appartenez au temps nouveau. Pourquoi donc si souvent êtes-vous plus irascibles et plus troublés que ceux des temps anciens ? Dépouillez-vous du passé. Je le répète, même s'il ne plaît pas à Judas de l'entendre répéter. Déracinez, taillez, greffez, plantez de nouveaux arbres. Renouvelez-vous, creusez les fossés de l'humilité, de l'obéissance, de la foi. Ces rois surent le faire et ils étaient, deux contre un, pas de Juda et ils n'entendirent pas Dieu, mais le prophète de Dieu leur répéter les volontés du Très-Haut.

Ils seraient morts de soif par suite du manque d'eau s'ils n'avaient pas su obéir. Ils obéirent et l'eau remplit les fossés qu'ils avaient creusés et non seulement ils échappèrent à la soif, mais ils vainquirent les ennemis. Je suis l'Eau de la Vie. Creusez des fossés dans vos cœurs pour pouvoir Me recevoir. Et maintenant, écoutez, je ne fais pas de longs discours. Je vous donne des pensées pour que vous les méditiez. Vous serez toujours comme ces enfants, et même moins qu'eux car eux sont innocents et que vous ne l'êtes pas, et donc elle est plus trouble en vous la lumière spirituelle si vous ne vous habituez pas à méditer. Vous écoutez toujours et ne retenez jamais, car votre intelligence est en sommeil au lieu d'être active. Écoutez donc. Quand la Sunamite perdit son fils, elle voulut aller trouver le prophète bien que son mari lui dit que ce n'était pas le premier du mois et que ce n'était pas le sabbat. Mais elle savait qu'elle devait y aller car certaines choses ne souffrent pas de retard. Et parce qu'elle sut comprendre spirituellement les choses, elle eut son fils ressuscité . Que dites-vous de ce fait ?"

"Que c'est un reproche pour moi à propos du sabbat" dit l'Iscariote.

"Tu vois donc, ô Judas, que quand tu veux, tu sais comprendre ? Ouvre donc ton esprit à la justice."

"Oui... mais tu n'as pas violé le sabbat pour ressusciter l'homme."

"J'ai fait davantage. J'ai empêché la ruine, la mort de ces enfants, la vraie mort, et j'ai rappelé aux voleurs que..."

"Oh ! attends pour te consoler d'avoir fait quelque chose ! Moi, je ne crois pas qu'ils t'aient obéi..."

"Si le Maître le dit..."

"Élisée lui-même dans le récit de la Sunamite dit : "Le Seigneur l'a tenu secret". On ne sait pas donc toujours tout des prophètes" réplique l'Iscariote.

"Notre Frère est plus qu'un prophète" observe le Thaddée.

"Je le sais. C'est le Fils de Dieu. Mais c'est aussi l'Homme. Comme tel il peut être sujet à ne pas savoir des choses secondaires comme celle d'une conversion et d'un retour... Maître, sais-tu vraiment toujours, toujours tout ? Je me le demande souvent..." insiste l'Iscariote avec un désir tenace.

"Et dans quel esprit ? Pour te donner la paix, pour te donner un conseil, pour te donner du tourment ?" demande Jésus.

"Mais... Je ne saurais. Je me le demande et..."

"Et tu sembles troublé même en te le demandant" dit Thomas.

"Moi ? Certainement la perplexité trouble toujours..."

"Que de subtilités ! Moi, je ne me pose pas tant de questions. Je crois sans tant chercher à connaître et je ne suis pas du tout angoissé ni troublé. Mais laissons parler le Maître. Elle ne me plaît pas à moi cette leçon. Dis-nous une belle parabole, Maître. Elle plaira aussi aux enfants" dit Pierre.

"J'ai encore une chose à demander. Celle-ci : que signifie pour vous la farine qui enlève l'amertume à la soupe des fils des prophètes ? "

C'est un profond silence qui répond à la question.

"Et quoi ? Vous ne savez pas répondre ?"

"Peut-être la farine absorbe l'amertume..." dit Matthieu, peu sûr de lui.

"Tout aurait été amer, même la farine."

"Par un miracle du prophète qui ne voulait pas mortifier le serviteur" suggère Philippe.

"Aussi. Mais pas pour cela seulement."

"Le Seigneur voulut faire briller la puissance du prophète, même sur les choses matérielles" dit le Zélote.

"Oui, mais ce n'est pas encore la juste signification. Les vies des prophètes anticipent ce qui sera dans la plénitude des temps : dans mon temps. Ils font voir mon jour terrestre sous des symboles et des figures. Donc..."

Silence. Ils se regardent. Puis Jean baisse la tête, son visage s'enflamme et il sourit.

"Pourquoi ne dis-tu pas ce que tu penses, Jean ? lui demande Jésus. Ce n'est pas manquer à l'amour que de parler, puisque tu ne le fais pas pour mortifier quelqu'un."

"Je pense que cela veut dire ceci. Au temps de la faim de la Vérité et de la disette de la Sagesse, celui où tu es venu, tous les arbres sont retournés à l'état sauvage et ont donné des fruits amers, immangeables, comme empoisonnés pour les fils des hommes, qui de cette façon les cueillent en vain et les préparent en vain pour s'en nourrir. Mais la Bonté de l'Eternel t'envoie Toi, farine de grain de choix, et Toi, par ta perfection, tu enlèves le poison de toute nourriture en leur rendant leur bonté première, et en rendant bons de nouveau les arbres des Écritures, que les siècles ont dénaturés, et les palais des hommes que la concupiscence a corrompus. Dans ce cas, Celui qui commande d'apporter la farine et la verse dans la soupe amère c'est ton Père et Toi tu es la farine qui se sacrifie afin de se faire nourriture pour les hommes. Et après que tu auras été consommé, il n'y aura plus rien d'amer dans le monde, car tu auras rétabli l'amitié avec Dieu. Je puis m'être trompé."

"Non, tu ne t'es pas trompé. C'est le symbole."

"Oh ! et comment as-tu fait pour y penser ?" demande Pierre étonné.

C'est Jésus qui lui répond : "Je te le dis avec tes paroles mêmes de tout à l'heure : un beau saut, et l'on est sur l'île paisible de la spiritualité. Mais il faut avoir le courage de faire le saut, en abandonnant la rive, le monde. Sauter sans se demander s'il y a quelqu'un qui peut rire de la gaucherie de notre saut ou se moquer de notre simplisme de préférer au monde un îlot solitaire. Sauter sans avoir peur de se blesser, ou de se mouiller, ou d'être déçu. Quitter tout pour se réfugier en Dieu. S'établir sur l'île séparée du monde, et en sortir uniquement pour distribuer, à ceux qui sont restés sur la rive, les fleurs et les eaux pures recueillies dans l'île de l'esprit, où il y a un arbre unique : celui de la Sagesse. En restant près de lui, loin des bruits fracassants du monde, on en saisit toutes les paroles et on devient maître en sachant être disciple. Cela aussi est un symbole. Mais maintenant nous allons raconter une belle parabole pour les enfants. Venez ici, tout près."

Les trois enfants vont si près qu'ils s'assoient bonnement sur ses jambes, Jésus les entoure de ses bras et il commence à raconter : "Un jour le Seigneur Dieu dit : "Je vais faire l'homme, et l'homme vivra dans le Paradis Terrestre où se trouve le grand fleuve qui ensuite se divise en quatre qui sont le Phison, le Géhon, l'Euphrate et le Tigre, qui parcourent la Terre. Et l'homme sera heureux car il possédera toutes les beautés et tout ce qui est bon dans la Création, et mon amour pour la joie de son esprit" . Et c'est ce qu'il fit. C'était comme si l'homme se trouvait sur une grande île, mais encore plus fleurie que celle-ci et avec des arbres de toutes espèces et avec tous les animaux. Et tout au-dessus était l'amour de Dieu qui servait de soleil à l'âme, et la voix de Dieu était dans les vents, plus mélodieuse qu'un chant d'oiseau.

Mais voilà que dans cette belle île fleurie, au milieu de toutes les bêtes et de toutes les plantes, entra en rampant un serpent différent de ceux qui avaient été créés par Dieu et qui étaient bons, sans dents venimeuses, sans férocité dans les replis de leur corps flexible. Même ce serpent s'était vêtu d'une peau aux couleurs de gemmes comme celle des autres. Il s'était même fait plus beau que ceux-ci, au point de paraître un grand collier de roi qui avançait en glissant au milieu des arbres splendides du Jardin. Il alla s'enrouler autour d'un arbre qui s'élevait au milieu du Jardin, un bel arbre solitaire, beaucoup plus grand que celui-ci, et couvert de feuilles et de fruits merveilleux. Et le serpent paraissait un bijou autour du bel arbre, et il brillait au soleil, et tous les animaux le regardaient, car personne ne se souvenait de l'avoir vu créer, ni de l'avoir vu avant ce moment. Mais personne ne s'en approchait.

Tous, au contraire, s'éloignaient de l'arbre maintenant qu'il avait le serpent autour de son tronc.

Seuls l'homme et la femme s'en approchèrent, la femme avant l'homme parce qu'elle était charmée par cette chose luisante qui brillait au soleil et remuait sa tête, semblable à une fleur à moitié éclose. Elle écouta ce que disait le serpent et désobéit au Seigneur et fit désobéir Adam. Ce fut seulement après avoir désobéi qu'ils virent le serpent pour ce qu'il était et qu'ils comprirent leur péché, car désormais ils avaient perdu l'innocence du cœur. Et ils se cachèrent pour échapper à Dieu qui les cherchait, et ensuite ils mentirent à Dieu qui les interrogeait.

Alors Dieu mit des anges à la limite du Jardin et en chassa les hommes. Ce fut comme si les hommes étaient jetés de la rive tranquille de l'Eden dans les fleuves remplis d'eau comme quand arrivent les crues du printemps. Mais Dieu laissa pourtant dans le cœur de ceux qui étaient chassés le souvenir de leur destinée éternelle, c'est-à-dire du passage au beau Jardin, où ils entendaient la voix aimante de Dieu, au Paradis où ils auraient joui complètement de Dieu. Et avec ce souvenir, Il leur laissa le saint aiguillon de remonter vers le lieu perdu, par une vie de justice.

Mais, mes enfants, vous avez expérimenté tout à l'heure que tant que la barque descend en suivant le courant, sa marche est facile alors que, quand elle le remonte, elle a du mal à rester en surface, à ne pas être bousculée par l'eau, à ne pas faire naufrage au milieu des herbes et du sable ou des pierres du cours d'eau. Si Simon Pierre n'avait pas attaché vos barquettes avec les joncs de la rive, vous les auriez perdues toutes, comme il est arrivé à Isaac parce qu'il a lâché le jonc.

La même chose arrive aux hommes jetés sur les courants de la Terre, Ils doivent rester toujours entre les mains de Dieu, en Lui confiant leur volonté qui est comme le jonc, aux mains du bon Père qui est dans les Cieux et qui est le Père de tous et spécialement des innocents, et ils doivent avoir l'œil vigilant pour éviter les herbes et les joncs, les pierres, les tourbillons et la boue, qui pourraient retenir, briser, ou engloutir la barque de leur âme en arrachant le fil de la volonté qui les tient unis à Dieu. Car le Serpent, qui n'est plus dans le Jardin, est maintenant sur la Terre, et cherche justement à faire naufrager les âmes, cherche à les empêcher de remonter par l’Euphrate, le Tigre, le Géhon et le Phison au Grand Fleuve qui court dans le Paradis éternel et alimente les arbres de la Vie et du Salut, qui portent les fruits perpétuels dont jouiront tous ceux qui ont su remonter le courant pour se réunir à Dieu et ses anges sans avoir jamais plus à souffrir de rien."

"Maman disait cela aussi" dit le plus grand des enfants.

"Oui, elle le disait" gazouille le plus petit.

"Tu ne peux pas le savoir. Moi si, parce que je suis grand. Mais si tu dis des choses qui ne sont pas vraies, tu n'entreras pas dans le Paradis."

"Cependant le père disait qu'il n'y avait rien de vrai" objecte le cadet.

"Parce que lui ne croyait pas au Seigneur de maman."

"Il n'était pas samaritain, ton père ?" demande Jacques d'Alphée.

"Non, il était d'un autre endroit. Mais maman était samaritaine et nous sommes samaritains car elle nous voulait comme elle. Et elle nous parlait du Paradis et du Jardin, mais pas si bien que Toi. Moi, j'avais peur du serpent et de la mort car maman disait que le serpent c'était le diable et parce que le père disait que la mort finit tout. À cause de cela, j'étais si malheureux d'être seul et je disais aussi qu'il est inutile d'être bon désormais, car, quand il y avait le père et la mère, on les faisait heureux par notre bonté, mais maintenant il n'y avait plus personne à qui faire plaisir par notre bonté. Maintenant, au contraire, je sais... et je serai bon. Je n'enlèverai jamais mon fil des mains de Dieu de peur d'être emporté par les eaux de la Terre."

"Mais maman, elle est allée en haut ou en bas ?" demande perplexe le second enfant.

"Que veux-tu dire, mon enfant ?" demande Matthieu.

"Je dis : où est-elle ? Est-elle allée au fleuve du Paradis éternel ?"

"Espérons-le, mon enfant. Si elle était bonne..."

"C'était une samaritaine..." dit avec mépris l'Iscariote.

"Et alors, il n'y a pas de Paradis pour nous, parce que nous sommes samaritains ? Alors, nous n'aurons pas Dieu, nous ? Lui l'a appelé "Le Père de tous". À moi, orphelin, il me plaisait dépenser que j'ai encore un Père... Mais s'il n'y en a pas pour nous..." et attristé, il baisse la tête.

"Dieu est le Père de tous, mon enfant. Est-ce que, par hasard, je t'ai moins aimé parce que tu es samaritain ? Je t'ai disputé aux larrons, et je te disputerai au démon, de la même façon que je lui disputerais le petit fils du Grand Prêtre du Temple de Jérusalem, si lui ne considérait pas comme un opprobre que le Sauveur sauve son enfant . Et même je te dispute encore plus, parce que tu es seul et malheureux. Il n'y a pas de différence pour Moi entre l'esprit d'un juif et celui d'un samaritain. Et d'ici peu, il n'y aura plus de séparation entre la Samarie et la Judée, car le Messie aura un peuple unique qui portera son nom et dans lequel seront tous ceux qui l'aimeront."

"Moi, je t'aime, Seigneur. Mais me portes-tu auprès de ma mère ?" dit le plus grand des trois enfants.

"Tu ne sais pas où elle est. Il a dit cet homme qu'il y a seulement lieu d'espérer..." dit le cadet.

"Moi je ne le sais pas, mais le Seigneur le sait. Il a su où nous étions et nous au contraire nous ne savions même pas où nous étions."

"Avec des larrons... Ils voulaient nous tuer..." La terreur revient sur le petit visage du cadet.

"Les larrons étaient comme des démons, mais Lui nous a sauvés parce que nos anges l'ont appelé."

"La maman aussi, les anges l'ont sauvée. Moi je le sais car je la rêve toujours."

"Tu es un menteur, Isaac. Tu ne peux la rêver. Tu ne t'en souviens pas."

Le petit pleure en disant : "Non. Non. Moi je la rêve. Je la rêve moi..."

"Ne traite pas ton frère de menteur, Ruben. Son âme peut bien voir sa mère car le bon Père des Cieux peut permettre à l'orphelin de la rêver et de la connaître partiellement, comme Il nous permet de le connaître Lui-même. Car de cette connaissance limitée, vient une bonne volonté de le connaître parfaitement, chose que l'on obtient en étant toujours très bons. Et maintenant, allons. Le sabbat s'est sanctifié car nous avons parlé de Dieu." Il se lève et entonne d'autres psaumes.

Des gens d'Ephraïm s'approchent en entendant le chœur, et ils attendent avec respect la fin du psaume pour saluer, et ils disent à Jésus : "Tu as préféré venir ici, plutôt qu'avec nous ? Tu ne nous aimes donc pas ?"

"Personne de vous ne m'avait invité. Je suis donc venu ici avec mes apôtres et les enfants."
"C'est vrai. Mais nous croyions que ton disciple t'avait dit notre désir."

Jésus regarde Jean et Judas. Et Judas répond : "J'ai oublié de le dire hier, et aujourd'hui, avec ces enfants, je n'y ai plus pensé."

Jésus, pendant ce temps, quitte la petite île et passe le bras d'eau minuscule pour aller près de ceux d'Ephraïm. Les apôtres le suivent alors que les enfants s'attardent à délier les deux barquettes de roseau qui restent, et à Pierre qui les questionne, ils expliquent : "Nous voulons les garder pour nous rappeler la leçon."

"Et moi ? Je l'ai perdue ! Et je ne me souviendrai pas, et je n'irai pas au Paradis" dit en pleurant le plus petit.

"Attends ! Ne pleure pas. Je te fais tout de suite une barquette. Bien sûr. Toi aussi tu dois te rappeler la leçon. Eh ! il faudrait que tous nous en fassions une avec son jonc attaché à la proue, pour nous rappeler. Ce serait plus utile pour nous, hommes, que pour vous, enfants ! Hélas !" et Pierre taille et fait la barquette avec son jonc, il prend dans ses bras, en une seule brassée, les trois enfants et il saute le ruisseau pour aller près de Jésus.

"Ce sont eux ?" demande Malachie d'Ephraïm.

"Ce sont eux."

"Et ils sont de Sichem ?"

"C'est ce que disait le pastoureau : que ses parents étaient des campagnes."

"Pauvres enfants ! Mais si les parents ne venaient pas, que ferais-tu ?"

"Je les garderais avec Moi. Mais ils viendront."

"Ces larrons... Ne viendront-ils pas eux aussi ?"

"Ils ne viendront pas, mais n'ayez pas de crainte pour eux. Même s'ils venaient... C'est Moi qui les volerais et non pas eux qui vous voleraient. Je leur ai déjà enlevé leurs quatre proies et j'espère avoir arraché un peu de leur âme au péché, au moins pour l'un d'eux. "

"Nous t'aiderons pour ces enfants. Tu nous le permettras cela."

"Oui. Et ce n'est pas parce qu'ils sont de votre région, mais parce que ce sont des innocents et l'amour pour les innocents est le chemin qui conduit rapidement à Dieu."

"Mais Toi seul ne fais pas de distinction entre innocents et innocents. Un juif n'aurait pas recueilli ces petits samaritains, ni non plus un galiléen. Nous ne sommes pas aimés. Et le manque d'amour pour nous ils l'ont aussi pour ceux qui ne savent même pas encore ce que c'est que d'être samaritain et juif. Et cela est cruel."

"Oui. Mais il n'en sera plus ainsi quand on suivra ma Loi. Tu le vois, Malachie ? Ils sont dans les bras de Simon Pierre, de mon frère, et de Simon le Zélote. Aucun d'eux n'est samaritain, ni père. Et pourtant tu ne serres pas tes enfants contre ton cœur avec autant d'amour que le font mes disciples pour les orphelins de Samarie. Voilà quelle est l'idée messianique :réunir tout le monde dans l'amour. C'est la vérité de l'idée messianique. Un seul peuple sur la Terre sous le sceptre du Messie. Un seul peuple dans le Ciel sous le regard d'un seul Dieu,"

Ils s'éloignent... en parlant, vers la maison de Marie de Jacob

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-015.htm
TOME : 8/15



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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Dim 3 Aoû 2014 - 7:04

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_67

La nuit du même jour


Jésus est seul dans une petite pièce. Assis sur sa couchette, il réfléchit ou prie. Un lumignon à huile sur une étagère éclaire la pièce de sa petite flamme jaunâtre palpitante. Il doit faire nuit car il n'y a aucun bruit dans la maison ni sur le chemin. Seul le bruissement du torrent paraît plus fort au dehors de la maison, dans le silence de la nuit.

Jésus lève la tête pour regarder la porte. Il écoute. Il se lève et va ouvrir. Il voit Pierre au dehors. "Toi ? Viens. Que veux-tu, Simon ? Encore debout, toi qui dois faire tant de route ? " Il l'a pris par la main et attiré à l'intérieur, en refermant la porte sans faire de bruit. Il le fait asseoir près de Lui, sur le bord du lit.

"Je voulais te dire, Maître... oui, je voulais te dire que, tu as vu aujourd'hui aussi ce que je vaux. Je ne suis capable que d'amuser de pauvres enfants, de consoler une petite vieille, de rétablir la paix entre deux bergers qui sont en désaccord pour une agnelle qui a perdu son lait. Je suis un pauvre homme. Si pauvre que je ne comprends même pas ce que tu m'expliques. Mais c'est une autre chose. Maintenant, je voulais te dire que, justement pour cela, tu me gardes ici. Moi, je ne tiens pas à aller quand tu n'es pas avec nous. Et je ne sais pas faire... Contente-moi, Seigneur." Pierre parle avec chaleur mais en tenant les yeux fixés sur les briques grossières et ébréchées du pavé.

"Regarde-moi, Simon" commande Jésus. Et comme Pierre obéit, Jésus le fixe intensément en lui demandant : "Et c'est tout ? Tout ce qui explique que tu veilles ? Tout ce qui explique pourquoi tu me demandes de te garder ici ? Sois sincère, Simon. Ce n'est pas murmurer que de dire à ton Maître toute ta pensée. Il faut savoir distinguer entre parole oiseuse et parole utile. C'est une parole oiseuse, et c'est généralement dans l'oisiveté que fleurit le péché,quand on parle des manquements d'autrui à quelqu'un qui n'y peut rien. Alors c'est simplement un manque de charité, même si les choses dites sont vraies. Comme c'est un manque de charité de faire des reproches plus ou moins acerbes sans joindre au reproche le conseil. Et je parle des reproches qui sont justes. Les autres sont injustes et sont des péchés contre le prochain.

Mais quand on voit son prochain pécher et qu'on en souffre, parce qu'en péchant il offense Dieu et fait du tort à son âme, quand on se rend compte que par soi-même on n'est pas capable d'apprécier la portée du péché d'autrui, et qu'on ne se sent pas assez sage pour dire une parole qui puisse convertir, et qu'alors on s'adresse à un juste, à un sage, et qu'on lui confie son ennui, alors on ne fait pas de péché parce que les confidences ont pour but de mettre fin à un scandale et de sauver une âme. C'est comme quelqu'un qui aurait un parent malade d'une maladie répugnante. C'est certain qu'il cherchera à la tenir cachée au peuple, mais en secret il ira dire au médecin : "D'après moi, mon parent a telle ou telle maladie, mais je ne puis le conseiller ni le soigner.

Viens toi-même, ou dis-moi ce que je dois faire". Manque-t-il peut-être d'amour envers son parent ? Non. Au contraire ! Il en manquerait s'il feignait de ne pas s'apercevoir de la maladie et la laissait se développer jusqu'à la mort, par un sentiment mal compris de prudence et d'amour. Un jour, et il ne se passera pas des années, toi, ainsi que tes compagnons, vous devrez écouter les confidences des cœurs, non pas comme vous les écoutez maintenant en tant qu'hommes, mais comme Prêtres, c'est-à-dire Médecins, Maîtres et Pasteurs des âmes, comme Moi, je suis Médecin, Maître et Pasteur. Vous devrez écouter, décider et conseiller. Votre jugement vaudra comme si Dieu même l'avait prononcé..."

Pierre se détache de Jésus qui le tenait serré contre lui et il dit en se levant : "Cela n'est pas possible, Seigneur. Ne nous l'impose jamais. Comment veux-tu que nous jugions comme Dieu si nous ne savons même pas juger comme hommes ?"

"Alors vous le saurez, car l'Esprit de Dieu planera sur vous et vous pénétrera de ses lumières. Vous saurez juger en considérant les sept conditions des faits que l'on viendra vous proposer pour être conseillé ou pardonné. Écoute bien et essaie de te rappeler. En son temps l'Esprit de Dieu te rappellera mes paroles. Mais toi, cherche de ton côté à te rappeler avec ton intelligence, parce que Dieu te l'a donnée pour que tu la mettes en œuvre sans paresse ni présomption spirituelle qui portent à attendre et à prétendre tout de Dieu. Quand tu seras Maître, Médecin et Pasteur à ma place et dans mon rôle, et quand un fidèle viendra pleurer à tes pieds les troubles qui lui viennent de ses actes ou de ceux d'autrui, tu dois toujours avoir présents à ton esprit l'ensemble de ces sept questions.

Qui : Qui a péché ?

Quoi : Quelle est la matière du péché ?

Où : En quel lieu ?

Comment : En quelles circonstances ?

Avec quoi ou avec qui : L'instrument ou la créature qui a été la matière du péché ?

Pourquoi; Quelles sont les impulsions qui ont créé l'ambiance favorable au péché ?

Quand : Dans quelles conditions ou avec quelles réactions, et si c'est accidentellement ou par suite d'habitudes malsaines ?

En effet, tu vois, Simon, la même faute peut avoir des nuances et des degrés infinis selon toutes les circonstances qui l'ont créée et les individus qui l'ont accomplie. Par exemple...Considérons deux péchés qui sont des plus répandus, celui de la concupiscence charnelle et celui de la concupiscence des richesses.

Une créature a fait un péché de luxure, ou croît avoir fait un péché de luxure. Car parfois l'homme confond le péché et la tentation, ou bien porte le même jugement sur des excitations créées artificiellement par un appétit malsain, et les pensées qui s'élèvent par la réaction d'une souffrance maladive, ou aussi parce que parfois la chair et le sang ont des appels imprévus qui résonnent dans l'âme avant qu'elle ait le temps de se mettre en garde pour les étouffer. On vient te dire : "J'ai péché par luxure". Un prêtre imparfait dirait : "Anathème sur toi". Mais toi, mon Pierre, tu ne dois pas parler ainsi. Car tu es le Pierre de Jésus, tu es le successeur de la Miséricorde. Et alors, avant de condamner, tu dois examiner et toucher doucement et prudemment le cœur qui pleure devant toi pour connaître tous les aspects de la faute réelle ou supposée ou du scrupule.

J'ai dit : doucement et prudemment. Te rappeler qu'en plus que d'être Maître et Pasteur, tu es Médecin. Le médecin n'envenime pas les plaies. Prompt à couper s'il y a de la gangrène, il sait pourtant découvrir et soigner d'une main légère s'il y a seulement une blessure avec déchirure de parties vivantes qu'il faut rassembler et non pas arracher. Et te rappeler qu'en plus que d'être Médecin et Pasteur, tu es Maître. Un maître règle ses paroles suivant l'âge de ses disciples. Il serait scandaleux ce pédagogue qui à de jeunes enfants révélerait les lois animales que les innocents ignorent en leur donnant ainsi des connaissances et des malices prématurées. Quand aussi on s'occupe des âmes, c'est avec prudence qu'il faut les interroger. Se respecter et respecter les autres.

Cela te sera facile si, en toute âme, tu vois un fils. Le père est naturellement maître, médecin et guide de ses enfants. Aussi quelle que soit la créature qui est devant toi, troublée par une faute ou par la crainte d'avoir fauté, aime-la d'un amour de père, et tu sauras juger sans blesser et sans scandaliser. Me suis-tu ?"

"Oui, Maître, je comprends très bien. Je devrai être prudent et patient, persuader de découvrir les blessures, mais regarder par moi-même, sans attirer l'attention d'autrui sur elles, et seulement quand je verrai qu'il y a réellement une blessure dire : "Tu vois ? Tu t'es fait du mal pour ceci ou cela". Mais si je vois que la créature a seulement peur de s'être blessée, parce qu'elle a vu des fantômes, alors... souffler sur les nuées sans donner, par un zèle inutile, des lumières qui pourraient éclairer des vraies sources de fautes. Est-ce que je dis bien ?"

"Très bien. Donc, si quelqu'un te dit : "J'ai fait un péché de luxure", tu considères qui tu as en face de toi. Il est vrai que le péché peut se produire à tout âge. Mais on le rencontre plus facilement chez un adulte que chez un enfant, et différentes seront par conséquent les questions à poser et les réponses à faire suivant qu'il s'agit d'un adulte ou d'un enfant. Vient à la suite de la première enquête, la seconde sur la matière du péché, et puis la troisième sur l'endroit du péché, la quatrième sur les circonstances du péché, et la cinquième sur les complices possibles du péché, la sixième sur le pourquoi du péché, et la septième sur le moment et le nombre du péché.

Tu verras que généralement alors que pour un adulte, et un adulte vivant dans le monde, à chaque question tu verras correspondre une circonstance qui implique la réalité de la faute, pour ceux qui sont enfants par l'âge ou l'esprit, à de nombreuses questions tu devras te répondre : "Ici il y a de la fumée, pas de faute réelle". Et même tu verras parfais au lieu de fange il y a un lys qui tremble d'avoir été éclaboussé par la boue et qui confond la goutte de rosée descendue dans son calice avec l'éclaboussure de la boue. Âmes si désireuses du Ciel, qu'elles craignent comme une tache jusqu'à l'ombre d'une nuée qui les met pour un moment dans l'obscurité en s'interposant entre eux et le soleil mais passe ensuite sans laisser de traces sur leur candide corolle. Âmes tellement innocentes et désireuses de le rester, que Satan effraie par des imaginations ou en excitant les aiguillons de la chair ou la chair elle-même, en profitant de réelles maladies de la chair. Ces âmes doivent être consolées et soutenues, car ce ne sont pas des pécheresses mais des martyres. Rappelle-le-toi toujours.

Et souviens-toi toujours de juger même ceux qui pèchent par avidité pour les richesses ou autres biens d'autrui de la même manière. En effet si c'est une faute maudite d'être avide et sans pitié en volant le pauvre, et contre la justice en faisant tort aux citoyens, aux serviteurs ou aux peuples, moins grave, beaucoup moins grave est la faute de celui à qui on a refusé du pain et qui en dérobe au prochain pour passer sa faim, et celle de ses enfants. Rappelle-toi, aussi bien pour le luxurieux que pour le voleur, il faut de la mesure quand on juge le nombre des fautes, les circonstances et leur gravité et aussi de la mesure pour apprécier le degré de connaissance du pécheur pour le péché commis, au moment où il le commettait.

En effet, celui qui agit en pleine connaissance pèche davantage que celui qui agit par ignorance, et celui qui agit en consentant librement pèche davantage que celui qui est poussé au péché. En vérité je te dis que parfois il y aura des actes qui auront l'apparence du péché et qui seront un martyre et auront la récompense donnée pour un martyre souffert. Et rappelle-toi surtout, dans tous les cas, avant de condamner, que toi aussi tu as été un homme et que ton Maître, que personne n'a jamais pu trouver en état de péché, n'a jamais condamné personne qui se fût repenti d'avoir péché.

Pardonne septante fois sept, et même septante fois septante, les péchés de tes frères et de tes enfants Parce que fermer les portes du Salut à un malade, seulement parce qu'il est retombé dans sa maladie, c'est vouloir le faire mourir. As-tu compris ?"

"J'ai compris. Cela je l'ai vraiment compris..."

"Et alors, dis-moi maintenant tout ce que tu penses."

"Eh ! oui ! Je te le dis parce que je vois que vraiment tu connais tout et je comprends que ce n'est pas murmurer que de te dire d'envoyer Judas à ma place, car il souffre de ne pas aller. Je te le dis non pour te dire qu'il est envieux et me scandaliser à son propos, mais pour lui donner la paix et... te donner la paix, car cela doit être bien pénible pour Toi d'avoir toujours si près ce vent d'orage..."

"Judas s'est encore plaint ?"

"Eh ! oui ! Il a dit que chacune de tes paroles est pour lui une blessure. Même ce que tu as dit pour les enfants. Il dit qu'en vérité c'est pour lui que tu as dit qu'Ève alla à l'arbre parce qu'il lui plaisait cette chose brillante comme une couronne de roi. Moi, vraiment, je n'avais trouvé aucun rapport. Mais je suis ignorant. Barthélemy et le Zélote, au contraire, ont dit que vraiment Judas a été ''touché au plus vif", car il est ensorcelé par tout ce qui brille et séduit la vanité. Et ils pourraient avoir raison car ils sont sages. Sois bon avec tes pauvres apôtres, Maître ! Fais plaisir à Judas, et à moi avec lui. De toutes façons ! Tu le vois ? Je sais seulement amuser les enfants... et être un enfant dans tes bras" il se serre contre son Jésus qu'il aime vraiment de toutes ses forces.

"Non. Je ne puis te faire plaisir. N'insiste pas. Toi, justement parce que tu es ce que tu es, tu vas à la mission. Lui, justement parce qu'il est comme il est, reste ici. Mon frère aussi m'en avait parlé, et malgré mon amour pour lui, je lui ai répondu "non". Même si ma Mère m'en priait je ne céderais pas. Ce n'est pas une punition, mais un remède. Et Judas doit le prendre. Si cela ne sert pas à son esprit cela servira au mien, car je ne pourrai pas me reprocher d'avoir omis quelque chose pour le sanctifier." Jésus est sévère et impérieux en parlant ainsi.
Pierre laisse retomber ses bras et baisse la tête en soupirant.

"Ne t'afflige pas, Simon. Nous aurons une éternité pour être unis et nous aimer. Mais tu avais autre chose à me dire..."

"Il est tard, Maître. Tu dois dormir."

"Toi, plus que Moi, Simon. Toi qui à l'aube dois te mettre en route."

"Oh ! Pour moi ! Être ici avec Toi me repose davantage que d'être au lit."

"Parle donc. Tu sais que Moi, je dors peu..."

"Voilà ! Je suis une tête dure, je le sais et je le dis sans honte. Et si c'était pour moi, il ne m'importerait pas beaucoup de savoir, car je pense que la plus grande sagesse c'est de t'aimer et de te suivre et de te servir avec tout mon cœur. Mais tu m'envoies ici et là, et les gens m'interrogent et je dois leur répondre. Je pense que ce que je te demande à Toi, d'autres peuvent me le demander, car les hommes ont les mêmes pensées. Tu disais hier que toujours les innocents et les saints souffriront, et même que ce seront eux qui souffriront pour tous.

Cela est dur pour mon intelligence, et aussi que tu dis qu'eux-mêmes le désireront. Et je pense que comme cela est dur pour moi, cela peut l'être pour les autres. S'ils me questionnent, que dois-je répondre ? Dans ce premier voyage, une mère m'a dit : "Ce n'était pas juste que ma fillette meure avec tant de souffrances, car elle était bonne et innocente". Et moi, ne sachant que dire, je lui ai dit les paroles de Job : "Le Seigneur a donné, le Seigneur a enlevé. Que soit béni le nom du Seigneur" . Mais je n'étais pas convaincu moi non plus, et je ne l'ai pas convaincue. Je voudrais une autre fois savoir que dire..."

"C'est juste. Écoute. Cela paraît une injustice et c'est une grande justice que les meilleurs souffrent pour tous. Mais, dis-moi un peu, Simon, qu'est-ce que la Terre, toute la Terre ?"

"La Terre ? Un espace grand, très grand, fait de poussière et d'eau, de roches, de plantes, d'animaux et de créatures humaines."

"Et puis ?"

"Et puis, c'est tout... à moins que tu ne veuilles que je dise qu'elle est pour l'homme un lieu de châtiment et d'exil."

"La Terre est un autel, Simon, un autel immense. Elle devait être un autel de louange perpétuelle à son Créateur. Mais la Terre est remplie de péchés. Elle doit donc être un autel de perpétuelle expiation, de sacrifice, sur lequel brûlent les hosties. La Terre devrait, comme les autres mondes répandus dans la Création, chanter les psaumes à Dieu qui l'a faite. Regarde !" Jésus ouvre les volets de bois, et par la fenêtre grande ouverte entre la fraîcheur de la nuit, la rumeur du torrent, les rayons de la lune et on voit le ciel criblé d'étoiles. "Regarde ces astres ! Ils chantent de leurs voix, qui est lumière et mouvement dans les espaces infinis du firmament, les louanges de Dieu. Depuis des millénaires dure leur chant qui s'élève des champs bleus du ciel jusqu'au Ciel de Dieu. Nous pouvons considérer les astres et les planètes, les étoiles et les comètes comme des créatures sidérales, qui comme des prêtres sidéraux, des lévites, des vierges et des fidèles, doivent chanter dans un temple sans limites les louanges du Créateur.

Écoute, Simon. Tu entends le bruissement de la brise dans les feuillages, et la rumeur des eaux dans la nuit. La Terre aussi chante, comme le ciel, avec les vents, avec les eaux, avec la voix des oiseaux et des animaux. Mais si pour le firmament c'est assez de la lumineuse louange des astres qui la peuplent, ce n'est pas assez du chant des vents, des eaux et des animaux, pour le Temple qu'est la Terre. Car sur elle, il n'y a pas seulement les vents, les eaux et les animaux qui chantent inconsciemment les louanges de Dieu, mais elle a aussi l'homme : la créature parfaite, au-dessus de tout ce qui est vivant, dans le temps et dans le monde, douée de matière comme les animaux, les minéraux et les plantes, et d'esprit comme les anges du Ciel, et destinée comme eux, si elle est fidèle dans l'épreuve, à connaître et à posséder Dieu, avec la grâce d'abord, avec le Paradis ensuite. L'homme, synthèse qui embrasse tous les états, a une mission que les autres créatures n'ont pas et qui pour lui devrait être, en plus d'un devoir, une joie : aimer Dieu. Donner intelligemment et volontairement un culte d'amour à Dieu. Payer Dieu de l'amour qu'Il a donné à l'homme en lui donnant la vie et en lui donnant le Ciel après la vie.

Donner un culte intelligent. Considère, Simon. Quel bien Dieu retire-t-Il de la création ? Quel profit ? Aucun. La Création n'accroît pas Dieu, elle ne le sanctifie pas, elle ne l'enrichit pas. Lui est infini. Il aurait été tel même si la Création n'avait pas existé. Mais Dieu-Amour voulait avoir de l'amour, et Il a créé pour avoir de l'amour. C'est uniquement de l'amour que Dieu peut tirer de la Création, et cet amour, qui est intelligent et libre uniquement chez les anges et les hommes, est la gloire de Dieu, la joie des anges, la religion pour les hommes. Le jour où le grand autel de la Terre ne ferait plus entendre des louanges et des supplications d'amour, la Terre cesserait d'exister. Car une fois l'amour éteint, serait éteinte la réparation, et la colère de Dieu anéantirait l'enfer terrestre que serait devenu la Terre. Donc la Terre pour exister doit aimer. Et de plus : la Terre doit être le Temple qui aime et prie avec l'intelligence des hommes. Mais dans le Temple, dans tout temple, quelles victimes offre-t-on ? Les victimes pures, sans tache ni tare. Elles seules sont agréables au Seigneur. Elles et les prémices, car au Père de la famille il faut donner les choses les meilleurs et à Dieu, Père de la famille humaine, il faut donner les prémices de toutes choses et les choses choisies.

Mais j'ai dit que la Terre a un double devoir de sacrifice : celui de la louange et celui de l'expiation. En effet l'Humanité qui la couvre a péché chez les premiers hommes et ne cesse de pécher, en ajoutant au péché de manque d'amour pour Dieu, les mille autres de ses attachements aux voix du monde, de la chair et de Satan. Coupable, coupable Humanité qui ayant la ressemblance avec Dieu, ayant en propre l'intelligence et des secours divins, est pécheresse toujours, et toujours plus. Les astres obéissent, les plantes obéissent, les éléments obéissent, les animaux obéissent et, comme ils savent, louent le Seigneur. Les hommes n'obéissent pas et ne louent pas suffisamment le Seigneur. Voici alors la nécessitéd'âmes hosties qui aiment et expient pour tous. Ce sont les enfants qui, innocents et ignorants, paient l'amer châtiment de la douleur pour ceux qui ne savent que pécher; ce sont les saints qui volontairement se sacrifient pour tous.

D'ici peu — un an ou un siècle, c'est toujours "peu" par rapport à l'éternité — on ne célébrera plus d'autres holocaustes sur l'autel du grand Temple de la Terre que celui des hommes-victimes, consumées avec le sacrifice perpétuel : hosties avec l'Hostie parfaite. Ne te bouleverse pas, Simon. Je ne dis pas que j'établirai un culte semblable à celui de Moloch, de Baal et d'Astarté. Ce sont les hommes eux-mêmes qui nous immoleront. Tu comprends ? Nous immoleront. Et nous irons joyeusement à la mort, afin d'expier et d'aimer pour tous. Et puis viendront les temps où les hommes n'immoleront plus les hommes. Mais toujours il y aura des victimes pures que l'amour consumera avec la Grande Victime dans le Sacrifice perpétuel. Je dis l'amour de Dieu et l'amour pour Dieu. En vérité elles seront les hosties du temps et du Temple à venir. Non pas les agneaux et les boucs, les veaux et les colombes, mais le sacrifice du cœur est ce qui plaît à Dieu. David en a eu l'intuition. Et dans le temps nouveau, temps de l'esprit et de l'amour, seul ce sacrifice sera agréable.

Considère, Simon, que si un Dieu a dû s'incarner pour apaiser la Justice divine pour le grand Péché, pour les nombreux péchés des hommes, dans le temps de la vérité seuls les sacrifices des esprits des hommes peuvent apaiser le Seigneur. Tu penses : "Mais pourquoi Lui, le Très-Haut, a-t-Il donné l'ordre d'immoler les petits des animaux et les fruits des plantes" ? Moi, je te le dis : c'est parce qu'avant ma venue, l'homme était un holocauste souillé, et parce qu'on ne connaissait pas l'Amour. Maintenant il sera connu. Et l'homme, qui connaîtra l'Amour parce que je rendrai la Grâce par laquelle l'homme connaît l'Amour, sortira de la léthargie, se souviendra, comprendra, vivra, remplacera les boucs et les agneaux, devenant hostie d'amour et d'expiation, pour imiter son Maître et Rédempteur. La douleur, jusqu'à présent châtiment, se changera en amour parfait, et bienheureux seront ceux qui l'embrasseront par amour parfait."

"Mais les enfants..."

"Tu veux dire ceux qui ne savent pas encore s'offrir... Et sais-tu quand Dieu parle en eux ? Le langage de Dieu est un langage spirituel. L'âme le comprend et l'âme n'a pas d'âge. Et même je te dis que l'âme enfantine, parce que sans malice, est pour la capacité de comprendre Dieu, plus adulte que celle d'un vieillard pécheur. Je te dis, Simon, que tu vivras assez pour voir de nombreux petits enseigner aux adultes, et aussi à toi-même, la sagesse de l'amour

héroïque. Mais en ces petits qui meurent de mort naturelle, c'est Dieu qui opère directement, pour les raisons d'un amour si élevé que je ne puis te l'expliquer, en les faisant entrer dans les sagesses qui sont écrites dans les livres de la Vie et qui ne seront lus que dans le Ciel par les bienheureux. Lus, ai-je dit, mais en vérité, il suffira de regarder Dieu pour connaître non seulement Dieu, mais aussi son infinie sagesse... Nous avons fait venir le coucher de la lune, Simon... L'aube va arriver et tu n'as pas dormi..."

"N'importe, Maître. J'ai perdu quelques heures de sommeil, et j'ai acquis tant de sagesse, et je suis resté avec Toi. Mais si tu le permets maintenant je m'en vais, non pour dormir, mais pour revenir sur tes paroles."

Il est déjà sur la porte et il va sortir quand il s'arrête pensif et dit ensuite : "Encore une chose, Maître. Est-il juste que je dise à quelqu'un qui souffre que la douleur n'est pas un châtiment mais une... grâce, quelque chose comme... comme notre appel, beau même s'il est pénible, beau même s'il peut paraître, à celui qui ne sait pas, une chose rebutante et triste ?"

"Tu peux le dire, Simon. C'est la vérité. La douleur n'est pas un châtiment quand on sait l'accueillir et en user avec justice. La douleur est comme un sacerdoce, Simon. Un sacerdoce ouvert à tous. Un sacerdoce qui donne un grand pouvoir sur le cœur de Dieu. Et un grand mérite. Né avec le péché, il sait apaiser la Justice.

En effet Dieu sait faire servir au Bien même ce que la Haine a créé pour donner la douleur. Moi, je n'ai pas voulu d'autre moyen pour annuler la Faute, car il n'y a pas de moyen plus grand que celui-là."

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-016.htm
TOME: 8 /16
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus



♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Hostie10
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Lun 4 Aoû 2014 - 7:05

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_68

Au cours d'un sabbat à Éphraïm


Ce doit être un autre sabbat car les apôtres sont de nouveau réunis dans la maison de Marie de Jacob.

Les enfants sont encore parmi eux, à côté de Jésus, près du foyer. C'est justement cela qui fait dire à Judas Iscariote : "En attendant une semaine est passée, et les parents ne sont pas venus" et il rit en hochant la tête.

Jésus ne lui répond pas. Il caresse le cadet. Judas interroge Pierre et Jacques d'Alphée : "Et vous dites que vous avez fait les deux routes qui conduisent à Sichem ?"

"Oui. Mais cela a été inutile, à bien réfléchir. Certainement les larrons ne passent pas par les routes fréquentées, maintenant surtout que les détachements romains ne cessent de les parcourir" répond Jacques d'Alphée.

"Et alors, pourquoi les avez-vous suivies ?" insiste l'Iscariote.

"Ainsi !... Aller ici ou là, pour nous c'est pareil. Et alors nous avons suivi celles-là."

"Et personne n'a su rien vous dire ?"

"Nous n'avons rien demandé."

"Et comment voulez-vous alors vous rendre compte s'ils étaient passés ou non ? Elles portent peut-être des enseignes ou laissent leurs traces les personnes qui suivent une route ? Je ne crois pas. Alors nous aurions déjà été trouvés au moins par des amis. Au contraire, il n'est venu personne ici depuis que nous y sommes" et il a un rire sarcastique.

"Nous ne savons pas le motif pour lequel personne n'est venu ici" dit patiemment Jacques d'Alphée. "Le Maître le sait. Nous, nous ne le savons pas. Les personnes, ne laissant pas de traces de leur passage, ceux qui comme nous se retirent dans un lieu ignoré des gens, ne peuvent venir, si on ne leur dit pas le lieu du refuge. Maintenant nous ne savons pas si notre Frère en a parlé aux amis."

"Oh ! tu voudrais croire et faire croire que Lui ne l'a pas dit au moins à Lazare et à Nique ?"
Jésus ne parle pas. Il prend un enfant par la main et il sort...

"Je ne veux rien croire, mais même s'il en est comme tu veux le dire, tu ne peux encore juger, et aucun de nous ne peut le faire, les raisons de l'absence des amis..."

"Elles sont faciles à comprendre ces raisons ! Personne ne veut avoir des ennuis avec le Sanhédrin, et d'autant moins ne veulent en avoir ceux qui sont riches et puissants. C'est tout ! Il n'y a que nous pour savoir nous exposer aux dangers."

"Sois juste, Judas ! Le Maître n'a forcé aucun de nous à rester avec Lui. Pourquoi es-tu resté si tu as peur du Sanhédrin ?" lui fait observer Jacques d'Alphée.

"Et tu peux t'en aller de même quand tu veux. Tu n'es pas enchaîné..." interrompt l'autre Jacques, fils de Zébédée.

"Pour cela, non ! Vraiment pas ! On est ici et on y reste. Tous. Qui le voulait devait s'en aller avant. Maintenant non. Moi je m'y oppose si le Maître ne s'y oppose pas" dit lentement mais avec fermeté Pierre en donnant un coup de poing sur la table.

"Et pourquoi ? Qui es-tu pour commander au lieu du Maître ?" lui demande l'Iscariote avec violence.

"Un homme qui raisonne non pas en Dieu comme lui le fait, mais en homme."

"Tu me soupçonnes ? Tu me prends pour un traître ?" dit Judas agité.

"Tu l'as dit. Non pas que je te considère comme volontairement tel mais tu es si... insouciant, Judas, si changeant ! Et tu as trop d'amis. Et elle te plaît trop, la grandeur, en tout. Toi, oh ! tu ne saurais pas te taire ! Ou pour répliquer à quelque perfide, ou pour montrer que tu es l'apôtre, tu parlerais. C'est pourquoi tu es ici et tu y restes, ainsi tu ne nuis pas et tu ne te crées pas de remords."

"Dieu ne contraint pas la liberté de l'homme, et toi, tu veux le faire ?"

"Je veux le faire. Mais dis-moi, enfin : te pleut-il sur la tête ? Le pain te manque-t-il ? L'air est-il mauvais ? Le peuple t'offense-t-il ? Rien de cela. La maison est solide, même si elle n'est pas riche, l'air est bon, la nourriture ne t'a jamais manqué, la population t'honore. Alors pourquoi es-tu ici si inquiet, comme si tu étais en prison ?"

"Il y a deux peuples que mon âme ne peut souffrir et le troisième que je hais n'est même pas un peuple : ceux du mont Seïr, les philistins et le sot peuple qui habite Sichem [2]". Je te réponds par les paroles du sage, et j'ai raison de penser ainsi. Regarde si ces peuples nous aiment !"

"Hum ! En vérité, il ne me semble pas que les autres, le tien et le mien soient bien meilleurs. Nous avons reçu des pierres en Judée et en Galilée, en Judée plus encore qu'en Galilée, et dans le Temple de Judée plus qu'en tout autre lieu. Je ne trouve pas que l'on nous ait maltraités ni sur les terres des philistins, ni ici, ni ailleurs..."

"Où ailleurs ? Nous ne sommes pas allés ailleurs, heureusement. Et même, s'il s'était agi d'aller ailleurs, je ne serais pas venu et je n'y viendrai pas à l'avenir. Je ne veux pas me contaminer davantage."

"Te contaminer ? Ce n'est pas cela qui t'impressionne, Judas de Simon. Tu ne veux pas t'aliéner ceux du Temple. C'est cela qui t'afflige" dit paisiblement Simon le Zélote, resté dans la cuisine avec Pierre, Jacques d'Alphée et Philippe. Les autres s'en sont allés l'un après l'autre avec les deux enfants pour rejoindre le Maître. Fuite méritoire car elle est faite pour ne pas manquer à la charité.

"Non. Pas pour cela. Mais parce qu'il ne me plaît pas de perdre mon temps et de donner la sagesse à des sots. Regarde ! À quoi cela a-t-il servi de prendre avec nous Hermastée ? Il s'en est allé et n'est plus revenu. Joseph dit qu'il s'est séparé de lui en disant qu'il serait revenu pour la Fête des Tentes. L'as-tu vu peut-être ? Un renégat..."

"Moi, je ne sais pas pourquoi il n'est pas revenu et je ne juge pas. Mais pourtant je te demande : est-il par hasard le seul qui ait abandonné le Maître et même lui est devenu hostile

? N'y a-t-il pas des renégats parmi nous juifs, et parmi les galiléens ? Peux-tu le soutenir ?"

"Non, c'est vrai. Mais moi, enfin, je suis mal à l'aise ici. Si on savait que nous sommes ici ! Si on savait que nous traitons avec les samaritains jusqu'à entrer dans leurs synagogues le sabbat ! Lui veut le faire... Malheur si on le savait ! L'accusation serait justifiée..."

"Et le Maître condamné, veux-tu dire. Mais il l'est déjà. Il l'est déjà avant qu'on le sache. Il a été condamné, même, après avoir ressuscité un juif en Judée. Il est haï et accusé d'être samaritain et ami des publicains et des prostituées. Il l'est depuis... toujours. Et toi, plus que tous, tu sais s'il ne l'est pas !"

"Que veux-tu dire, Nathanaël ? Que veux-tu dire ? Que moi j'y suis pour quelque chose ? Que puis-je savoir de plus que vous ?" Il est très agité.

"Mais, mon garçon, tu me fais l'effet d'un rat entouré d'ennemis ! Mais tu n'es pas un rat et nous ne sommes pas armés de bâtons pour te capturer et te tuer. Pourquoi tant d'angoisse ? Si ta conscience est en paix, pourquoi t'agites-tu pour d'innocentes paroles ? Que dit Barthélemy pour que tu t'agites ainsi ? N'est-il pas vrai, peut-être, que personne plus que nous, ses apôtres, qui dormons près de Lui et vivons avec Lui, nous pouvons savoir et témoigner que Lui n'aime pas le samaritain, le publicain, le pécheur, la courtisane, mais leurs âmes et qu'il se préoccupe d'elles seules — et seul le Très-Haut peut savoir quel effort le Très Pur doit faire pour approcher ce que nous hommes et pécheurs nous appelons "ordure" — alors qu'il va avec les samaritains, les publicains et les courtisanes ? Tu ne comprends pas et ne connais pas encore Jésus, mon garçon ! Toi, moins que les samaritains eux-mêmes, les philistins, les phéniciens et autant d'autres que tu veux" dit Pierre, et ses dernières paroles sont empreintes de tristesse.

Judas ne parle plus et les autres aussi se taisent.

La petite vieille rentre pour dire :"Ils sont dans la rue les gens de la ville. Ils disent que c'est l'heure de la prière du sabbat et que le Maître a promis de parler..."

"Je vais le dire, femme. Et toi, dis à ceux d'Éphraïm que nous allons venir" lui répond Pierre, et il sort dans le jardin pour prévenir Jésus.

"Toi, que fais-tu ? Tu viens ! Si tu ne veux pas venir, éloigne-toi, sors avant que Lui soit affligé par ton refus" dit le Zélote à Judas.

"Je viens avec vous. Ici on ne peut pas parler ! Il semble que je sois le plus grand pécheur. Toutes mes paroles sont mal comprises."

Jésus, qui rentre dans la cuisine, empêche toute autre parole.

Ils sortent dans la rue en se joignant à ceux d'Éphraïm et ils entrent avec eux dans la ville ne s'arrêtant que quand ils sont devant la synagogue. Malachie est sur la porte, il salue et invite à entrer.

Je ne relève pas de différence entre le lieu de prière des samaritains et ceux que j'ai vus dans d'autres régions. Toujours les mêmes lampes, les mêmes pupitres et les mêmes étagères avec les rouleaux dessus, la place du chef ou de celui qui enseigne à sa place, sinon qu'ici il y a beaucoup moins de rouleaux que dans les autres synagogues.

"Nous avons déjà fait nos prières en t'attendant. Si tu veux parler... Quel rouleau demandes-tu, Maître ?"

"Je n'en ai besoin d'aucun. En outre, tu n'aurais pas ce que je veux expliquer [5]" répond Jésus, et puis il se tourne vers les gens et commence son discours :

"Quand les hébreux furent renvoyés dans leur patrie par Cyrus, roi des perses, afin de reconstruire le Temple de Salomon détruit cinq décennies auparavant, l'autel fut rétabli sur ses bases, et sur lui brûla l'holocauste journalier, soir et matin, et l'holocauste spécial des premiers de chaque mois et celui des solennités consacrées au Seigneur ou les holocaustes des offrandes individuelles . Ensuite, après que l'on eût rétabli ce qui était indispensable et imposé pour le culte, ils mirent la main la seconde année du retour à ce que l'on pourrait appeler le cadre du culte, son extérieur. La chose n'était pas coupable parce qu'elle était toujours faite pour honorer l'Éternel, mais elle n'était pas indispensable. Car le culte que l'on rend à Dieu c'est l'amour pour Dieu et l'amour se manifeste et se consume dans le cœur, non pas par les pierres taillées, les bois précieux, l'or et les parfums. Tout cela est de l'extérieur propre à satisfaire l'orgueil d'une nation ou d'une ville plus qu'à honorer le Seigneur.
Dieu veut un Temple de l'esprit.

Il ne se contente pas d'un Temple de murs et de marbres mais vide d'esprits remplis d'amour. En vérité je vous dis que le temple d'un cœur pur et plein d'amour est le seul que Dieu aime et dans lequel Il fait sa demeure avec ses lumières, et que ce sont de sottes estimations celles qui répartissent les régions et les villes d'après la beauté particulière de leurs lieux de prière. Pourquoi rivaliser en fait de richesses et d'ornements dans les maisons où on invoque Dieu ? Est-ce que par hasard le fini peut satisfaire l'Infini, fût-il même dix fois plus beau que le Temple de Salomon et que les palais royaux réunis ? Dieu, l'Infini qui ne peut être contenu et honoré par aucun espace ni aucune magnificence matérielle, trouve l'unique lieu digne de l'honorer comme il convient et comme il est possible, et même veut l'être, renfermé dans le cœur de l'homme car l'esprit du juste est un temple sur lequel plane, parmi les parfums de l'amour, l'Esprit de Dieu, et bientôt il sera un temple où l'Esprit fera une réelle demeure, Un et Trin comme dans le Ciel.

Et il est écrit que, dès que les maçons eurent jeté les fondements du Temple, les prêtres vinrent avec leurs ornements et les trompettes et les lévites avec les cymbales, suivant les ordonnances de David. Et ils chantèrent "qu'il faut louer Dieu parce qu'Il est bon et que sa miséricorde est éternelle". Et le peuple exultait. Mais beaucoup de prêtres, de chefs, de lévites et d'anciens versèrent un déluge de larmes en pensant au Temple qui existait auparavant. Et ainsi on ne pouvait distinguer les voix plaintives de celles qui jubilaient tant elles étaient mêlées . Et on lit encore qu'il y eut des peuples voisins qui molestèrent ceux qui construisaient le Temple. Ces derniers voulaient se venger d'avoir été repoussés par les constructeurs quand ils s'étaient offerts de construire avec eux, car eux aussi cherchaient le Dieu d'Israël, le Dieu Unique et Vrai, et ces difficultés interrompirent les travaux tant qu'il ne plut pas à Dieu de les faire poursuivre . Cela se lit dans le livre d'Esdras.

Combien de leçons et quelles leçons donne le passage que j'ai dit ?

Il y a d'abord celle déjà dite sur la nécessité que le culte vienne du cœur et non exprimé par les pierres et les bois ou encore par de vêtements et des cymbales et des chants dont l'esprit est banni. La leçon aussi que l'absence d'amour réciproque est toujours cause de retard et de trouble, même s'il s'agit d'un but qui est bon en lui-même. Dieu n'est pas là où n'est pas la charité. Inutile de chercher Dieu si on ne se met pas d'abord dans les conditions de pouvoir le trouver. Dieu se trouve dans la charité. Celui ou ceux qui s'établissent dans la charité trouvent Dieu, même sans devoir faire de pénibles recherches. Et celui qui a Dieu avec lui a la réussite de toutes ses entreprises.

Dans le psaume, sorti du cœur d'un sage après la méditation sur les pénibles événements qui accompagnèrent la reconstruction du Temple et des murs, il est dit :" Si le Seigneur ne construit pas la maison, c'est en vain que se fatiguent autour d'elle les constructeurs. Si le Seigneur ne veille pas sur la ville et ne la protège pas, c'est en vain que veillent sur elle ses défenseurs" .

Or, comment Dieu peut-Il être à édifier la maison s'Il sait que ceux qui l'habiteront ne l'ont pas dans leurs cœurs n'ayant pas d'amour pour leurs voisins ? Et comment protégera-t-Il les villes et donnera-t-Il la force à leurs défenseurs, s'Il ne peut être en elles si ces villes ne le possèdent pas à cause de la haine qu'ils ont pour leurs voisins ? Est-ce que cela a servi, ô peuples, d'être séparés par des barrières de haine ? Est-ce que cela vous a rendus plus grands ? Plus riches ? Plus heureux ? Jamais n'est utile la haine ou la rancœur, jamais n'est fort celui qui est seul, jamais n'est aimé celui qui n'aime pas. Et cela ne sert à rien, comme dit le psaume, de se lever avant le jour pour devenir grands, riches et heureux. Que chacun prenne son repos pour se réconforter des douleurs de la vie, parce que le sommeil est un don de Dieu, comme l'est la lumière et toute autre chose dont jouit l'homme; que chacun prenne son repos mais que dans son repos et dans ses veilles il ait pour compagne la charité, et ses travaux prospéreront et prospéreront sa famille et ses intérêts, et surtout prospérera son esprit et il conquerra la couronne royale des fils du Très-Haut et des héritiers de son Royaume.
Il est dit que pendant les hosannas du peuple, certains pleuraient à chaudes larmes parce qu'ils pensaient au passé et le regrettaient. Mais il n'était pas possible de distinguer les voix différentes dans le tumulte des cris.

Fils de Samarie ! Et vous, mes apôtres, fils de la Judée et de la Galilée ! Aujourd'hui aussi il y a des hosannas et des pleurs pendant que le Temple de Dieu s'élève sur ses fondements éternels. Maintenant aussi il en est qui s'opposent aux travaux et qui cherchent Dieu là où Il n'est pas. Maintenant aussi il en est qui veulent édifier selon l'ordre de Cyrus et non selon l'ordre de Dieu, c'est-à-dire selon l'ordre du monde et non selon les voix de l'esprit. Et maintenant aussi il en est qui versent des larmes sottes et humaines sur un passé inférieur, sur un passé qui ne fut pas bon et sage, et fut tel qu'il provoqua l'indignation de Dieu. Maintenant aussi nous avons toutes ces choses comme si nous étions dans le brouillard des temps reculés et non dans la lumière du temps de la Lumière.

Ouvrez votre cœur à la Lumière, remplissez-vous de Lumière, pour y voir clair, vous au moins à qui je parle Moi qui suis Lumière. C'est le temps nouveau, le temps où tout se reconstruit. Mais malheur à ceux qui ne voudront pas y entrer et s'opposeront à ceux qui édifient le Temple de la foi nouvelle dont je suis la pierre angulaire et auquel aussi je me donnerai Moi-même tout entier pour faire le mortier qui joindra les pierres afin que l'édifice se dresse sain et fort, admirable dans le cours des siècles, aussi vaste que la Terre que couvrira toute de sa lumière. Je dis lumière et non pas ombre, car mon Temple sera formé par des esprits et non par des matières opaques. Pierre pour ce Temple, Moi avec mon Esprit Éternel, et pierres tous ceux qui suivront ma parole et la foi nouvelle, pierres incorporelles, pierres enflammées, pierre saintes. Et la lumière se propagera sur la Terre, la lumière du nouveau Temple, et la couvrira de sagesse et de sainteté. Et au dehors ne resteront que ceux qui, avec leurs larmes impures, pleureront et regretteront le passé parce qu'il était pour eux une source de profits et d'honneurs tout humains.

Ouvrez-vous au temps et au Temple nouveau, Ô hommes de Samarie ! En lui, tout est nouveau, et les antiques séparations et les frontières matérielles, de pensée et d'esprit n'existent plus. Chantez, puisque l'exil hors de la cité de Dieu va finir. Êtes-vous heureux par hasard d'être comme des exilés, comme des lépreux pour les autres d'Israël ? Êtes-vous heureux de vous sentir comme expulsés du sein de Dieu ? Car cela, vous le sentez, vos âmes le sentent, vos pauvres âmes resserrés dans vos corps, sur lesquelles vous faites dominer votre pensée entêtée qui ne veut pas dire aux autres hommes : "Nous avons erré, mais maintenant comme des brebis dispersées nous revenons au Bercail". Vous ne voulez pas le dire aux autres hommes et cela est déjà mal, mais au moins dites-le à Dieu. Même si vous étouffez le cri de votre âme, Dieu entend le gémissement de votre âme qui est malheureuse d'être exilée de la maison du Père universel et très saint.

Écoutez les paroles du psaume graduel vous êtes bien des pèlerins qui depuis des siècles allez vers la haute Cité, vers la vraie Jérusalem, vers la Jérusalem céleste. C'est de là, du Ciel, que vos âmes sont descendues, pour animer une chair, c'est là qu'elles désirent retourner. Pourquoi voulez-vous sacrifier vos âmes, leur faire perdre l'héritage du Royaume ? Quelle faute ont-elles d'être descendues dans des chairs conçues en Samarie ? Elles viennent d'un Unique Père. Elles ont le même Créateur qu'ont les âmes de Judée et de Galilée, de la Phénicie ou de la Décapole. Dieu est la fin de tout esprit. Tout esprit tend vers ce Dieu, même si des idolâtries de toutes espèces ou des hérésies funestes, des schismes, des manques de foi, la tiennent dans une ignorance du Dieu vrai qui serait absolue si l'âme n'avait en elle, ineffaçable, un souvenir embryonnaire de la Vérité et une aspiration vers elle. Oh ! faites grandir ce souvenir et cette aspiration. Ouvrez les portes à votre âme. Que la Lumière y entre ! Qu'y entre la Vie ! Qu'y entre la Vérité ! Que soit ouvert le Chemin ! Que tout entre en flots lumineux et vitaux, comme les rayons du soleil et les flots et les vents des équinoxes, pour que de son embryon l'arbre s'élance vers les hauteurs, toujours plus près de son Seigneur.
Sortez de l'exil ! Chantez avec Moi : "Quand le Seigneur fait revenir de la captivité, l'âme semble rêver de joie. Notre bouche se remplit de sourires et notre langue de jubilation. Maintenant on dira : 'Le Seigneur a fait de grandes choses pour nous' "Oui, le Seigneur a fait de grandes choses pour vous et vous serez inondés de joie
.
Oh ! mon Père ! Je te prie pour eux comme pour tous. Fais revenir, ô Seigneur, ces prisonniers, ceux-ci qui, à tes yeux et aux miens, sont pris dans les chaînes d'une entêtée erreur. Ramène-les, ô Père, comme un torrent qui se jette dans un grand fleuve, dans la grande mer de ta miséricorde et de ta paix. Mes serviteurs et Moi, c'est dans les larmes que nous semons en eux ta vérité. Père, fais qu'au temps de la grande moisson, nous puissions, nous tous tes serviteurs en enseignant ta Vérité, moissonner joyeusement dans ces sillons, qui maintenant semblent seulement parsemés de plantes épineuses et empoisonnées, le grain de choix de tes greniers. Père ! Père ! À cause de nos fatigues, de nos larmes, de nos douleurs, de nos sueurs, de nos morts, qui ont été et seront les compagnons des semeurs, fais que nous puissions venir à Toi en portant, comme des gerbes, les prémices de ce peuple, les âmes qui de nouveau seront nées à la Justice et à la Vérité pour ta gloire. Amen."

Le silence, qui était vraiment impressionnant tant il était absolu dans une si grande foule qui remplissait la synagogue et la place devant elle, fait place à un chuchotement discret puis à un murmure qui grandit jusqu'à devenir une rumeur, s'épanouit enfin en hosannas. Les gens gesticulent, commentent et acclament...

Comme c'est différent ici de la conclusion des discours du Temple ! Malachie dit au nom de tous : "Toi seul peux dire ainsi la vérité, sans offenser ni mortifier ! Tu es vraiment le Saint de Dieu ! Prie pour notre paix. Nous sommes endurcis par des siècles de... croyances et des siècles d'affronts, et nous devons rompre cette dure écorce qui nous enveloppe. Aie pour nous de la compassion."

"Davantage encore : de l'amour. Ayez la bonne volonté et l'écorce se fendra d'elle-même. Que la Lumière vienne à vous."

Il se fraye un chemin et il sort suivi de ses apôtres.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-017.htm
TOME : 8/17



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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mar 5 Aoû 2014 - 7:01

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_69


Les parents des enfants et les gens de Sichem


Jésus est seul dans la petite île au milieu du torrent. Sur la rive, au-delà du torrent, jouent les trois enfants et ils chuchotent à voix basse comme s'ils ne voulaient pas troubler la méditation de Jésus. Parfois le plus petit pousse un petit cri de joie en découvrant un petit caillou de belle couleur ou une fleur nouvelle; les autres le font taire en lui disant : "Tais-toi ! Jésus prie..." et le chuchotement reprend pendant que les petites mains brunes construisent avec le sable des petits blocs et des cônes qui, dans leur imagination enfantine, devraient être des maisons et des montagnes.

Là-haut le soleil resplendit gonflant toujours plus les bourgeons sur les arbres et ouvrant les boutons dans les prés. Le feuillage vert-gris du peuplier tremble et les oiseaux à son sommet se chamaillent en des rivalités d'amour qui se terminent tantôt par un chant, tantôt par un cri de douleur.

Jésus prie. Assis sur l'herbe, séparé par une touffe de joncs du sentier de la rive, il est absorbé dans son oraison mentale. Parfois il lève les yeux pour observer les petits qui jouent sur l'herbe, puis il les baisse de nouveau pour se plonger dans ses pensées.

Un bruit de pas parmi les arbres de la rive et l'arrivée subite de Jean sur la petite île mettent en fuite les oiseaux qui s'envolent de la cime du peuplier, mettant fin à leur carrousel avec des cris effrayés.

Jean ne voit pas tout de suite Jésus qui est caché par des joncs et, un peu interdit, il crie : "Où es-tu, Maître ?"

Jésus se lève alors que les trois enfants crient de la rive opposée : "Il est là-bas ! Derrière les hautes herbes."
Mais Jean a déjà vu Jésus et il va vers Lui en disant : "Maître, ils sont venus les parents, les parents des enfants et avec beaucoup de gens de Sichem. Ils sont allés chez Malachie, et Malachie les a conduits à la maison. Je suis venu te chercher."

"Et Judas, où est-il ?"

"Je ne sais pas, Maître. Il est sorti tout de suite après que tu es venu ici et il n'est plus revenu. Il doit être en ville. Veux-tu que je le cherche ?"

"Non, il ne faut pas. Reste ici avec les enfants. Je veux d'abord parler aux parents."
"Comme tu veux, Maître."

Jésus s'en va et Jean rejoint les enfants et se met à les aider dans leur grande entreprise d'établir un pont sur un fleuve imaginaire fait de longues feuilles de roseau disposées sur le sol pour représenter l'eau...

Jésus entre dans la maison de Marie de Jacob qui est sur la porte à l'attendre et qui Lui dit : "Ils sont montés sur la terrasse. Je les y ai conduits en leur offrant de se reposer, mais voici Judas qui accourt du village. Je vais l'attendre et puis préparer de quoi se restaurer pour les pèlerins qui sont très fatigués."

Jésus aussi attend Judas dans l'entrée qui est un peu sombre par rapport à la lumière extérieure. Judas ne voit pas tout de suite Jésus et d'un air hautain il dit à la femme en entrant :

"Où sont les gens de Sichem ? Déjà partis peut-être ? Et le Maître ? Personne ne l'appelle ? Jean..." Il voit Jésus et change de ton pour dire : "Maître ! Je suis accouru quand j'ai su, par pur hasard... Tu étais déjà à la maison ?"

"Il y avait Jean, et il m'a cherché."

"Moi... j'y aurais été aussi. Mais à la fontaine des gens m'avaient invité à leur expliquer certaines choses..."

Jésus ne répond rien. Il n'ouvre bouche que pour saluer ceux qui l'attendent, assis en partie sur les murets de la terrasse, en partie dans la pièce qui s'ouvre sur elle, et qui en le voyant se lèvent pour Lui faire honneur.

Jésus, après les avoir salués collectivement, les salue chacun par son nom, à l'étonnement joyeux de ceux-ci qui Lui disent : "Tu te souviens encore de nos noms ?" Ce doit être des habitants de Sichem.

Et Jésus répond : "De vos noms, de vos visages, et de vos âmes. Vous avez accompagné les parents des enfants ? Ce sont eux ?"

"Ce sont eux. Ils sont venus les prendre et nous nous sommes joints à eux pour te remercier de ta pitié pour ces petits enfants d'une femme de Samarie. Il n'y a que Toi pour faire ces choses !...

Tu es toujours le Saint qui ne fait que des œuvres saintes. Nous aussi, nous nous souvenons toujours de Toi. Et maintenant, sachant que tu étais ici, nous sommes venus pour te voir et pour te dire que nous te sommes reconnaissants d'avoir choisi de te réfugier chez nous et de nous avoir aimés dans les fils de notre sang. Mais maintenant écoute les parents."

Jésus, suivi de Judas, se dirige vers eux et les salue de nouveau pour les inviter à parler.
"Nous, nous ne savons pas si tu le sais, nous sommes les frères de la mère des enfants, et nous étions très fâchés avec elle, parce que sottement et contre nos conseils, elle avait voulu ce mariage malheureux. Notre père fut faible pour l'unique fille de sa nombreuse descendance, au point que nous aussi nous fûmes en colère contre lui et que pendant plusieurs années nous ne nous sommes pas parlés ni vus. Puis, sachant que la main de Dieu s'appesantissait sur la femme, et que c'était la misère dans sa maison, car une union impure n'a pas la défense de la bénédiction divine, nous avons repris dans notre maison notre vieux père pour qu'il n'eût pas d'autre douleur que la misère dans laquelle languissait la femme. Et puis elle est morte, et nous l'avons su. Tu étais passé depuis peu et nous parlions de Toi entre nous...

Et nous, en surmontant notre indignation, nous avons offert à l'homme par l'intermédiaire de lui et lui (deux de Sichem) de reprendre les enfants. Ils étaient par moitié de notre sang. Il répondit qu'il préférait les voir morts de malemort que vivants de notre pain. Nous n'avons pas eu les enfants ni le corps de notre sœur, même pas lui, pour qu'il eût une sépulture selon nos rites ! Et alors nous lui avons juré la haine ainsi qu'à sa descendance. Et la haine l'a frappé comme une malédiction au point qu'après avoir été libre il devint serviteur et de serviteur... un cadavre, mort comme un chacal dans une tanière puante. Nous ne l'aurions jamais su car depuis longtemps tout était mort entre nous. Et nous avons eu grand peur, cela seulement, quand il y a maintenant huit nuits, nous avons vu paraître dans notre aire les larrons. Et puis, sachant pourquoi ils avaient paru, l'indignation, plutôt que la douleur, nous mordit comme du venin et nous nous sommes hâtés de congédier ces voleurs en leur offrant une bonne récompense pour avoir leur amitié, et nous avons été étonnés en les entendant dire qu'ils s'étaient déjà payés et qu'ils ne voulaient rien d'autre."

Judas rompt à l'improviste le silence attentif que tous gardent par un éclat de rire ironique et il crie : "Leur conversion ! Totale ! En vérité !"

Jésus le regarde avec sévérité, les autres avec étonnement, et celui qui parle continue : "Et que pouvais-je attendre de plus d'eux ? N'était-ce pas déjà beaucoup d'être venus amener le pastoureau en défiant les dangers sans prendre de récompense ? À une vie malheureuse il faut une manière de faire malheureuse. Certainement il ne fut pas important le butin fait sur ce sot, mort comme un vagabond ! Pas important ! Et à peine suffisant pour eux qui devaient suspendre leurs vols pendant dix jours au moins. Et leur honnêteté nous a tellement étonnés, tellement que nous leur avons demandé quelle voix leur avait parlé pour leur inculquer cette pitié, et nous avons appris ainsi que c'était un rabbi qui leur avait parlé... Un rabbi ! Ce ne pouvait être que Toi ! En effet aucun autre rabbi d'Israël ne pourrait faire ce que tu as fait. Et une fois qu'ils furent partis, nous avons interrogé de plus près le jeune pastoureau effrayé et nous avons su plus exactement les choses.

Tout d'abord nous savions seulement que le mari de notre sœur était mort et que les enfants étaient à Éphraïm chez un juste, et puis que ce juste, qui était un rabbi, leur avait parlé, et tout de suite nous avons pensé que c'était Toi. Et entrés à Sichem à l'aurore nous en avons parlé avec eux car nous n'avions pas encore décidé si nous accueillerions les enfants. Mais eux nous ont dit : "Et quoi ? Voudriez-vous que ce soit en vain que le Rabbi de Nazareth ait aimé les enfants ? Parce que c'est certainement Lui, n'en doutez pas. Allons tous le trouver plutôt, car sa bienveillance est grande envers les fils de Samarie". Et, une fois réglées nos affaires, nous sommes venus. Où sont les enfants ?"

"Près du torrent. Judas, va leur dire qu'ils viennent."
Judas s'en va.

"Maître, c'est une dure rencontre pour nous. Ils nous rappellent toutes nos peines, et nous demandons encore si nous allons les accueillir. Ce sont les enfants du plus violent ennemi que nous ayons eu au monde..."

"Ce sont des fils de Dieu. Ce sont des innocents. La mort annule le passé et l'expiation obtient le pardon, même de Dieu. Voudriez-vous être plus sévères que Dieu ? Et plus cruels que les larrons ? Et plus obstinés qu'eux ? Les larrons voulaient tuer le pastoureau et garder les enfants. Lui par prudence, eux par humaine pitié envers des enfants sans défense. Le Rabbi a parlé, et eux n'ont pas tué, et ils ont même accepté de vous amener le petit berger. Devrai-je connaître la défaite avec des cœurs droits, ayant vaincu le crime ?..."

"C'est que... Nous sommes quatre frères et il y a déjà trente-sept enfants dans la maison..."

"Et là où trente-sept passereaux trouvent leur nourriture, parce que le Père des Cieux leur fait trouver le grain, est-ce que quarante ne le trouveront pas ? Est-ce que par hasard la puissance du Père ne pourra pas procurer la nourriture à trois autres, ou plutôt quatre, de ses fils ? Est-ce que cette divine Providence est limitée ? Est-ce que l'Infini aura peur de féconder davantage vos semences, vos arbres et vos brebis, pour qu'il y ait suffisamment de pain, d'huile, de vin, de laine et de viande pour vos enfants et les quatre autres pauvres petits restés seuls ?"

"Ils sont trois, Maître !"

"Ils sont quatre. Le pastoureau est orphelin lui aussi. Pourriez-vous, si Dieu vous apparaissait ici, soutenir que votre pain est tellement mesuré que vous ne pouvez nourrir un orphelin ? La pitié pour l'orphelin est commandée par le Pentateuque..."

"Nous ne le pourrions pas, Seigneur. C'est vrai. Nous ne serons pas inférieurs aux voleurs. Nous donnerons le pain, le vêtement et le logement même au petit berger, et par amour pour Toi."

"Par amour. Par amour total : pour Dieu, pour son Messie, pour votre sœur, pour votre prochain. Voilà l'hommage et le pardon qu'il faut donner à votre sang ! Non pas un froid tombeau pour sa poussière. Le pardon c'est la paix. Paix pour l'esprit de l'homme qui a péché. Mais ce ne serait qu'un pardon mensonger, tout extérieur, sans aucune paix pour l'esprit de la morte, votre sœur et mère de ces petits si, à la juste expiation de Dieu s'unissait, pour la tourmenter, de savoir que ses enfants paient, innocents qu'ils sont, pour son péché. La miséricorde de Dieu est infinie, mais unissez-y la vôtre pour donner la paix à la morte."

"Oh ! Nous le ferons ! Nous le ferons ! À personne ne se serait soumis notre cœur, mais à Toi, ô Rabbi, qui es passé un jour parmi nous pour semer une semence qui n'est pas morte et qui ne mourra pas."

"Amen ! Voilà les enfants..." Jésus les montre sur le bord du torrent qui se dirigent vers la maison, et il les appelle..

Ils laissent la main des apôtres et accourent en criant : "Jésus ! Jésus !" Ils entrent, montent l'escalier, arrivent sur la terrasse et s'arrêtent intimidés devant tant d'étrangers qui les regardent.

"Viens Ruben, et toi Élisée, et toi Isaac. Eux sont les frères de votre mère, et ils sont venus vous prendre pour vous joindre à leurs enfants. Voyez comme est bon le Seigneur ? C'est vraiment comme cette colombe de Marie de Jacob que nous avons vue avant-hier donner la becquée à un petit qui n'était pas le sien, mais celui de son frère mort. Lui vous recueille et vous donne à eux pour qu'ils aient soin de vous et que vous ne soyez plus orphelins. Allons ! Saluez vos parents."

"Le Seigneur soit avec vous, seigneurs" dit timidement le plus grand en regardant par terre, et les deux plus petits lui font écho.

"Celui-ci ressemble beaucoup à la mère, et aussi cet autre, mais celui-là (le plus grand) c'est tout à fait le père" observe un parent.

"Mon ami, je ne crois pas que tu sois assez injuste pour faire une différence d'amour à cause d'une ressemblance de visage" dit Jésus.

"Oh ! non. Cela non. J'observais... et je réfléchissais... Je ne voudrais pas qu'il ait aussi le cœur du père."

"C'est un enfant encore tendre. Ses simples paroles trahissent pour sa mère un amour bien plus vif que tout autre amour."

"Il les tenait pourtant mieux que nous ne croyions. Ils sont bien vêtus et bien chaussés. Il avait peut-être fait fortune..."

"Mes frères et moi nous avons des vêtements neufs car Jésus nous a habillés. Nous n'avions ni chaussures ni manteaux, nous étions tout à fait comme le berger" dit le second qui est moins timide que le premier.

"Nous te dédommagerons de tout, Maître" répond un parent et il ajoute : "Joachim de Sichemavait les offrandes de la ville, mais nous y joindrons encore de l'argent..."

*Non, je ne veux pas d'argent. Je veux une promesse. Une promesse d'amour pour eux que j'ai arrachés aux larrons. Les offrandes... Malachie, prends-les pour les pauvres que tu connais et fais-en une part à Marie de Jacob, car sa maison est bien misérable."

"Comme tu le veux. S'ils sont bons nous les aimerons."

"Nous le serons, Seigneur. Nous savons qu'il faut l'être pour retrouver notre mère et remonter le fleuve, jusqu'au sein d'Abraham et ne pas enlever des mains de Dieu le filin de notre barque pour ne pas être emportés par le courant du démon" dit Ruben tout d'un trait.
"Mais que dit l'enfant ?"

"C'est une parabole qu'il a entendue de Moi. Je l'ai dite pour consoler leurs cœurs et donner à leurs esprits une ligne de conduite. Les enfants l'ont retenue et ils l'appliquent à toutes leurs actions. Familiarisez-vous avec eux pendant que je parle à ceux de Sichem..."

"Maître, encore un mot. Ce qui nous a étonnés chez les larrons, c'est qu'ils nous ont prié de dire au Rabbi, qui avait avec Lui les enfants, de leur pardonner d'avoir mis autant de temps pour venir, en considérant que toutes les routes ne leur étaient pas ouvertes et que la présence d'un enfant avec eux empêchait de longues marches à travers les gorges sauvages."

"Tu entends, Judas ?" dit Jésus à l'Iscariote qui ne réplique pas.

Et puis Jésus s'isole avec ceux de Sichem, qui Lui arrachent la promesse d'une visite, si brève qu'elle soit, avant la grande chaleur de l'été. Et pendant ce temps ils racontent à Jésus des choses de la ville et comment ceux qui ont eu leurs âmes ou leurs corps guéris se souviennent de Lui.

Pendant ce temps Judas et Jean s'efforcent de familiariser les enfants avec leurs parents...

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-018.htm
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mer 6 Aoû 2014 - 7:19

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_70

La leçon secrète

Jésus est en train de marcher sur une route solitaire. Il a devant Lui les parents des enfants et à ses côtés les gens de Sichem. Ils sont dans une région déserte, pas de ville en vue. Les enfants ont été mis en selle sur des ânes, et un parent tient la bride tout en surveillant l'enfant. Les autres ânes qui n'ont pas de cavaliers, car ceux de Sichem ont préféré marcher à pied pour rester près de Jésus, précèdent le groupe des hommes, marchant en bande et brayant de temps à autre par la joie de revenir à leurs écuries sans être chargés, par une splendide journée, entre des talus bordés d'herbe nouvelle où de temps en temps ils plongent leurs museaux pour en goûter une bouchée, et puis en un pas amusant caracolent pour rejoindre leurs compagnons montés. Ce qui fait rire les enfants.

Jésus parle avec les sichémites ou écoute leurs conversations. Il est visible que les samaritains sont fiers d'avoir avec eux le Maître et rêvent plus qu'il ne convient. Au point de dire à Jésus, en montrant les hautes montagnes qui sont à la gauche des voyageurs qui vont vers le nord : "Tu vois ? Ils ont une mauvaise renommée l'Ebal et le Garizim , mais pour Toi, au moins, ils sont meilleurs que Sion de beaucoup et ils le seraient totalement si tu le voulais, en les choisissant pour y demeurer. Sion est toujours un repaire de jébuséens, et ceux de maintenant sont pour Toi encore plus hostiles que les anciens pour David. Lui, en usant de violence prit la citadelle; mais Toi qui n'uses pas de violence, tu n'y régneras pas. Jamais. Reste parmi nous, Seigneur, et nous t'honorerons."

Jésus répond : "Dites-moi : m'auriez-vous aimé si j'avais voulu vous conquérir par la violence ?"
"Vraiment... non. Nous t'aimons justement parce que tu es tout amour."

"C'est pour cela donc, à cause de l'amour, que je règne en vos cœurs ?"

"Oui, Maître. Mais c'est parce que nous avons accueilli ton amour. Eux, ceux de Jérusalem, ne t'aiment pas."

"C'est vrai. Ils ne m'aiment pas. Mais vous, qui êtes tous d'habiles commerçants, dites-moi : quand vous voulez vendre, acheter, faire des bénéfices, perdez-vous peut-être courage parce qu'en certains endroits on ne vous aime pas, ou bien faites-vous, malgré cela, vos affaires en vous préoccupant uniquement de faire de bons achats et de bonnes ventes sans vous demander si de l'argent que vous gagnez est absent l'amour de vos acheteurs ou de vos vendeurs ?"

"C'est seulement de l'affaire que nous nous préoccupons. Peu nous importe s'il y manque l'amour de ceux qui traitent avec nous. Finie l'affaire, fini le contact. Le profit reste... Le reste n'a pas de valeur."

"Eh bien, Moi aussi, Moi qui suis venu servir les intérêts de mon Père, je ne dois pas me préoccuper de cela. Que ensuite, là où je les sers, je trouve amour ou mépris ou dureté, je ne m'en préoccupe pas. Dans une ville de commerce, ce n'est pas avec tous que l'on fait des profits et que l'on fait des achats et des ventes. Mais même si on traite avec un seul et si on fait un bon gain, on dit que le voyage n'a pas été inutile et on y retourne et y retourne encore.

Car ce que l'on n'obtient qu'avec un seul la première fois, on l'obtient avec trois la seconde, avec sept la quatrième, avec des dizaines les autres fois. N'est-ce pas ainsi ? Moi aussi, pour les conquêtes du Ciel, je fais comme vous pour vos marchés. J'insiste, je persévère, je trouve suffisant le peu, en nombre, le grand, car une seule âme sauvée c'est une grande chose, le grand gain pour ma fatigue. Chaque fois que j'y vais et que je surmonte tout ce qui peut être réaction de l'Homme, quand il s'agit de conquérir, comme Roi de l'esprit, même un seul sujet, non, je ne dis pas qu'ont été inutiles ma démarche, ma souffrance, mes fatigues, mais j'appelle saints, aimables et désirables les mépris, les injures, les accusations. Je ne serais pas un bon conquérant si je m'arrêtais devant les obstacles des forteresses de granit."

"Mais il te faudrait des siècles pour les vaincre. Toi... tu es un homme. Tu ne vivras pas des siècles. Pourquoi perdre ton temps là où on ne veut pas de Toi ?"

"Je vivrai beaucoup moins. Et même bientôt je ne serai plus parmi vous, je ne verrai plus les aubes et les couchers de soleil comme les pierres milliaires des jours qui commencent et des jours qui s'achèvent, mais je les contemplerai uniquement comme des beautés de la Création et je louerai pour eux le Créateur qui les a faits et qui est mon Père; je ne verrai plus fleurir les arbres et mûrir les récoltes, et je n'aurai pas besoin des fruits de la terre pour me conserver en vie, car revenu dans mon Royaume, je me nourrirai d'amour. Et pourtant j'abattrai les nombreuses forteresses fermées que sont les cœurs des hommes.

Observez cette pierre là, au-dessous de la source, au flanc de la montagne. La source est bien faible, elle ne court pas, mais donne l'eau goutte à goutte, une goutte qui tombe depuis des siècles sur cette pierre en saillie sur le flanc de la montagne, et la pierre est bien dure. Ce n'est pas du calcaire friable ni de l'albâtre mou, c'est du basalte très dur . Et pourtant regardez comment au centre de la masse convexe, et malgré cette forme, il s'est formé un minuscule miroir d'eau, pas plus large que le calice d'un nénuphar, mais suffisant pour refléter le ciel bleu et désaltérer les oiseaux. Cette concavité dans la masse convexe, est-ce par hasard l'homme qui l'a faite pour mettre une gemme d'azur dans la pierre sombre et une coupe d'eau fraîche pour les oiseaux ? Non, l'homme ne s'en est pas occupé.

Au cours des nombreux siècles que les hommes passent devant ce rocher que depuis des siècles une goutte creuse par un travail incessant et régulier, nous sommes peut-être les premiers à l'observer, ce basalte noir avec au milieu ce liquide couleur de turquoise. Nous en admirons la beauté et nous louons l'Éternel de l'avoir voulu pour charmer nos yeux et rafraîchir les oiseaux qui font leurs nids près d'ici. Mais dites-moi : est-ce par hasard la première goutte, qui a coulé en dessous de cette corniche basaltique qui surmonte le rocher et qui est tombée de sa hauteur sur la roche, qui a creusé la coupe qui reflète le ciel, le soleil, les nuages et les étoiles ?

Non. Des millions et des millions de gouttes, l'une après l'autre, l'une après l'autre se sont succédées, jaillissant comme une larme de là-haut, tombant avec un scintillement pour frapper le rocher et y mourir avec une note d'harpe, et ont creusé d'une profondeur inappréciable tant elle était nulle, la matière dure. Et ainsi pendant des siècles, avec le mouvement régulier du sable dans un sablier, pour marquer le temps : tant de gouttes à l'heure, tant au cours d'une veille, tant entre l'aube et le couchant, et la nuit et l'aurore, tant par jour, tant d'un sabbat à un sabbat, tant d'une nouvelle lune à une nouvelle lune, tant d'un mois de Nisan à un mois de Nisan, et d'un siècle à un siècle. Le rocher résistait, la goutte persistait. L'homme qui est orgueilleux et donc impatient et peu partisan de l'effort, aurait jeté la masse et la gouge après les premiers coups en disant : "C'est une chose qu'on ne peut creuser". La goutte a creusé.

C'était ce qu'elle devait faire, ce pourquoi elle a été créée. Et elle a coulé, une goutte après l'autre, pendant des siècles, pour arriver à creuser le rocher. Et elle ne s'est pas arrêtée ensuite en disant : "Maintenant c'est le ciel qui pensera à nourrir la coupe que j'ai creusée, avec les rosées et les pluies, les gelées et les neiges". Mais elle a continué de tomber et c'est elle seule qui emplit la coupe minuscule pendant les chaleurs de l'été, pendant les rigueurs de l'hiver, alors que les pluies violentes ou légères plissent le miroir, mais ne peuvent ni l'embellir ni l'élargir ni l'approfondir parce qu'il est déjà comble, utile, beau. La source sait que ses filles, les gouttes, s'en vont mourir là dans le petit bassin, mais elle ne les retient pas. Elle les pousse, au contraire, vers leur sacrifice, et pour qu'elles ne restent pas seules en tombant ainsi dans la tristesse, elle leur envoie de nouvelles sœurs pour que celle qui meurt ne soit pas seule et se voit perpétuée en d'autres.

Moi aussi, en frappant des centaines et des milliers de fois les dures forteresses des cœurs durs et en me perpétuant dans mes successeurs que j'enverrai jusqu'à la fin des siècles, j'ouvrirai en eux des passages et ma Loi entrera comme un soleil partout où il y a des créatures. Que si ensuite elles ne veulent pas de la Lumière et ferment les passages qu'un inépuisable effort a ouverts, mes successeurs et Moi, nous n'en serons pas coupables aux yeux de notre Père. Si cette source s'était ouvert un autre chemin, en voyant la dureté du rocher, et s'était égouttée plus loin où il y a un terrain herbeux, vous, dites-moi, si nous aurions eu cette gemme brillante et les oiseaux ce limpide réconfort ?"

"On ne l'aurait même pas vue, Maître."

"Tout au plus... un peu d'herbe plus touffue même en été aurait indiqué l'endroit où la source s'égouttait."

"Ou... moins d'herbe qu'ailleurs, les racines pourrissant par suite d'une humidité continuelle."

"Et de la boue. Rien de plus. Des gouttes inutiles."

"Vous l'avez dit : un égouttement inutile ou du moins oiseux. Moi aussi, si je devais m'attacher uniquement aux endroits où les cœurs sont disposés à m'accueillir par justice ou par sympathie, je ferais un travail imparfait. En effet je travaillerais, cela oui, mais sans fatigue, et même en donnant à mon moi une grande satisfaction, en un compromis agréable entre le devoir et le plaisir. Ce n'est pas accablant de travailler là où l'amour vous entoure et où l'amour rend dociles les âmes à travailler. Mais s'il n'y a pas de fatigue, il n'y a pas de mérite, et il n'y a pas beaucoup de profit, parce que l'on fait peu de conquêtes et que l'on se borne à ceux qui sont déjà dans la justice. Je ne serais pas Moi si je ne cherchais pas à racheter d'abord à la Vérité, puis à la Grâce tous les hommes."

"Et tu crois y réussir ? Que pourras-tu faire de plus que tu n'as déjà fait pour amener tes adversaires à ta parole ? Quoi ? Si même la résurrection de l'homme de Béthanie n'a pas suffi pour faire dire aux juifs que tu es le Messie de Dieu ?"

"J'ai encore quelque chose à faire de plus grand, de beaucoup plus grand que ce que j'ai déjà fait."

"Quand, Seigneur ?"

"Quand la lune de Nisan sera pleine. Faites attention alors."

"Y aura-t-il un signe dans le ciel ? On dit que quand tu es né, le ciel se fit entendre par des lumières, des chants et des étoiles extraordinaires."

"C'est vrai. Pour dire que la Lumière était venue dans le monde. Alors, en Nisan, le ciel et la terre auront des signes, et cela semblera la fin du monde, à cause des ténèbres et des secousses et du rugissement de la foudre dans le firmament et des tremblements dans les entrailles ouvertes de la Terre. Mais ce ne sera pas la fin. Ce sera le commencement, au contraire. D'abord, à ma venue, le Ciel enfanta pour les hommes le Sauveur, et comme c'était une action de Dieu, la paix accompagnait l'événement. Au nisan, ce sera la Terre qui par sa propre volonté enfantera pour elle le Rédempteur, et comme ce sera une action des hommes, elle ne sera pas accompagnée de la paix.

Mais il y aura une convulsion horrible. Et dans l'horreur de l'heure du siècle et de l'enfer, la Terre déchirera son sein sous les flèches enflammées de la colère divine, et elle criera sa volonté, trop ivre pour en comprendre la portée, trop possédée par Satan pour l'empêcher. Comme une folle qui enfante, elle croira détruire le fruit considéré comme maudit, et elle ne comprendra pas qu'au contraire elle relèvera ainsi en des lieux où jamais plus la douleur et les embûches ne le rejoindront. L'arbre, le nouvel arbre, à partir de ce moment étendra ses branches sur toute la Terre, à travers tous les siècles, et Celui qui vous parle, avec amour ou avec haine, sera reconnu pour le vrai Fils de Dieu et le Messie du Seigneur. Et malheur à ceux qui le reconnaîtront sans vouloir l'avouer, et sans se convertir à Moi."

"Où cela arrivera-t-il, Seigneur ?"

"À Jérusalem. Elle est bien la cité du Seigneur."

"Alors nous n'y serons pas car au Nisan la Pâque nous retient ici. Nous sommes fidèles à notreTemple."

"Il vaudrait mieux que vous soyez fidèles au Temple vivant qui n'est ni sur le Moriah ni sur le Garizim, mais qui, étant divin, est universel. Mais Moi je sais attendre votre heure, celle où vous aimerez Dieu et son Messie en esprit et en vérité.'

"Nous croyons que tu es le Christ. C'est pour cela que nous t'aimons."

"Aimer, c'est laisser le passé pour entrer dans mon présent. Vous ne m'aimez pas encore parfaitement."

Les samaritains se regardent par en dessous, silencieusement. Puis l'un d'eux dit : "Pour Toi, pour venir à Toi, nous le ferions. Mais nous ne pourrions pas, même si nous le voulions, entrer là où sont les juifs. Tu le sais. Eux ne veulent pas de nous..."

"Et vous ne voulez pas d'eux. Mais soyez en paix. D'ici peu il n'y aura plus deux régions, deux Temples, deux pensées opposées. Mais un unique peuple, un unique Temple, une unique foi pour tous ceux qui veulent la Vérité. Mais maintenant je vous quitte. Les enfants sont désormais consolés et distraits, et long est pour Moi le chemin de retour à Éphraïm pour arriver avant la nuit. Ne vous agitez pas. Cela pourrait attirer l'attention des petits et il ne faut pas qu'ils remarquent mon départ. Continuez. Moi je m'arrête ici. Que le Seigneur vous guide sur les sentiers de la Terre et sur les sentiers de sa Voie. Allez."

Jésus s'approche de la montagne et les laisse s'éloigner. La dernière chose que l'on remarque de la caravane qui retourne à Sichem, c'est le joyeux éclat de rire d'un enfant qui se propage dans le silence du chemin montagneux.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-019.htm
Tome : 8 / 19
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus



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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Jeu 7 Aoû 2014 - 7:01

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_72

Ce qui arrive dans la Décapole et la Judée

La nouvelle que Jésus est à Éphraïm, peut-être parce que les habitants eux-mêmes s'en sont vantés ou pour d'autres motifs que j'ignore, doit s'être répandue car désormais nombreux sont ceux qui viennent chercher Jésus, des malades pour la plupart, des affligés et aussi des gens désireux de le voir. Je m'en rends compte car j'entends l'Iscariote dire à un groupe de pèlerins venus de la Décapole : "Le Maître n'est pas là. Mais il y a Jean et moi, et c'est la même chose. Dites donc ce que voulez et nous le ferons."

"Mais vous ne pourrez jamais enseigner ce que le Maître enseigne" objecte quelqu'un.
"Nous sommes d'autres Lui, homme. Souviens-t'en toujours. Mais si tu tiens à entendre le Maître reviens avant le sabbat et retourne chez toi après. Le Maître est maintenant un vrai maître. Il ne parle plus sur tous les chemins, ni dans les bois, ni sur les rochers comme un vagabond, et à toute heure comme un esclave. Il parle ici au sabbat comme il Lui convient. Et il fait bien ! Pour ce que cela Lui a servi de s'épuiser de fatigue et d'amour !"

"Mais ce n'est pas notre faute si les juifs..."

"Tous ! Tous ! Aussi bien juifs que non juifs ! Vous avez été et serez tous pareils. Lui est tout à vous. Vous rien pour Lui. Lui donne. Vous, vous ne donnez pas, même pas l'aumône que l'on donne au mendiant."

"Mais nous l'avons l'offrande pour Lui. La voilà, si tu ne nous crois pas."

Jean, qui s'est toujours tu mais souffre visiblement, tout en regardant avec des yeux qui supplient et réprimandent, ou mieux qui sollicitent, ne peut plus se taire. Alors que Judas allonge déjà la main pour prendre l'offrande, il met une main sur le bras de son compagnon pour le retenir et il lui dit : "Non, Judas. Cela, non. Tu sais l'ordre du Maître" et il se tourne vers ceux qui sont venus pour dire : "Judas s'est mal expliqué et vous avez mal compris. Ce n'est pas cela que voulait dire mon compagnon. C'est seulement une offrande de foi sincère, d'amour fidèle que nous, moi, mes compagnons, vous, tous nous devons donner pour tout ce que le Maître nous donne.

Quand nous marchions à travers la Palestine, il acceptait vos offrandes parce qu'elles nous étaient nécessaires dans nos déplacements et parce qu'il se trouvait de nombreux mendiants sur notre route, et que se faisaient connaître à nous des misères cachées. Maintenant, ici, nous n'avons besoin de rien — en soit louée la Providence — et nous ne rencontrons pas de mendiants. Reprenez, reprenez votre offrande et donnez-la, au nom de Jésus, à des malheureux. Ce sont les désirs de notre Seigneur et Maître, et ses ordres à ceux d'entre nous qui s'en vont évangéliser à travers les villes. Si ensuite vous avez des malades avec vous ou si quelqu'un a un vrai besoin de parler au Maître, dites-le. Et j'irai le chercher à l'endroit où il s'isole pour prier, car son esprit a un grand besoin de se recueillir dans le Seigneur."

Judas bougonne quelque chose entre ses dents, mais ne contredit pas ouvertement. Il s'assoit près du foyer allumé comme pour se désintéresser de la chose.

"Vraiment... nous n'avons pas un grand besoin. Mais nous avons su qu'il était ici, et nous avons traversé le fleuve pour venir le voir. Mais si nous avons mal fait..."

"Non, frères. Ce n'est pas mal de l'aimer et de le chercher, même si cela est difficile et fatigant. Et votre bonne volonté aura sa récompense. Je vais annoncer au Seigneur votre venue, et certainement Lui viendra. Mais si vraiment il ne venait pas, je vous apporterai sa bénédiction." Et Jean sort dans le jardin pour aller à la recherche du Maître.

"Laisse ! J'y vais, moi" dit Judas impérieusement et il se lève pour courir dehors.

Jean le regarde aller et n'objecte rien. Il rentre dans la cuisine où sont entassés les pèlerins. Mais immédiatement il leur propose :

"Voulons-nous aller à la rencontre du Maître ?"

"Mais si Lui ne voulait pas..."

"Oh ! ne donnez pas d'importance à un malentendu, je vous en prie. Vous connaissez certainement les raisons pour lesquelles nous sommes ici. Ce sont les autres qui obligent le Maître à ces mesures de prudence, ce n'est pas la volonté de son cœur. Lui a toujours les mêmes sentiments pour vous tous."

"Nous le savons. Les premiers jours, après la lecture du décret, ce fut toute une recherche au-delà du Jourdain et dans les endroits où ils pouvaient penser qu'il se trouvait : à Bethabara, comme à Béthanie, à Pella et à Ramoth-Galaad et aussi ailleurs. Et nous savons qu'il en a été ainsi pour la Judée et la Galilée. Les maisons de ses amis ont été très surveillées car... si ses amis et ses disciples sont nombreux, nombreux aussi sont ceux qui ne le sont pas et qui croient servir le Très-Haut en persécutant le Maître. Puis les recherches ont subitement cessé et le bruit s'est répandu qu'il était ici."

"Mais vous, de qui l'avez-vous su ?"

"De ses disciples."

"Mes compagnons ? Où ?"

"Non. Aucun d'eux. D'autres. Nouveaux, car nous ne les avons jamais vus avec le Maître ni avec des anciens disciples. Et même nous avons été étonnés que Lui ait envoyé des inconnus pour dire où il était, mais ensuite aussi nous avons pensé qu'il l'avait fait parce que les nouveaux n'étaient pas connus par les juifs comme disciples."

"Je ne sais pas ce que vous dira le Maître, Mais je vous dis que dorénavant vous ne devez ajouter foi qu'à des disciples connus. Soyez prudents. Tous ceux de cette nation savent ce qui est arrivé au Baptiste..."

"Tu penses que..."

"Si Jean, haï par une seule femme, fut pris et mis à mort, qu'en sera-t-il de Jésus également haï par le Palais royal et le Temple, et par les pharisiens, et les scribes, les prêtres et les hérodiens ? Soyez donc vigilants pour ne pas avoir de remords... Mais le voilà qui vient. Allons à sa rencontre."

C'est une nuit profonde et sans lune, mais éclairée par les étoiles. Je ne pourrais dire l'heure ne voyant pas la position de la lune ni à quelle phase elle en est. Je vois uniquement que c'est une nuit sereine, Éphraïm toute entière est disparue dans le voile noir de la nuit. Le torrent lui-même est une voix, pas autre chose. Son écume et son scintillement disparaissent totalement sous la voûte verte des arbres des rives qui interdisent même cette lumière, qui n'en est pas une, qui vient des étoiles.

Un oiseau de nuit se lamente quelque part. Puis il se tait à cause d'un bruissement de feuillage et un bruit de roseaux rompus qui se rapproche de la maison en suivant le torrent et en venant du côté de la montagne. Puis une forme élancée et robuste émerge de la rive sur le sentier qui monte vers la maison. Elle s'arrête un moment comme pour s'orienter. Elle rase le mur en tâtant avec les mains. Elle trouve la porte, l'effleure et la dépasse, tourne, toujours en tâtonnant au coin de la maison, jusqu'à rejoindre l'entrée du jardin. Le visiteur nocturne l'essaie, l'ouvre, la pousse, entre. Il rase les murs qui donnent sur le jardin. Il reste perplexe devant la porte de la cuisine.

Puis il poursuit jusqu'à l'escalier extérieur, le monte à tâtons et s'assoit sur la dernière marche, ombre noire dans l'ombre. Mais là-bas, vers l'orient, la couleur du ciel nocturne : un voile noir dont on remarque seulement qu'il est tel à cause des étoiles qui le piquent, commence à changer de couleur, c'est-à-dire à prendre une couleur que l'œil arrive à percevoir comme telle : un gris d'ardoise qui paraît un brouillard épais et fumeux et qui est seulement une première clarté de l'aube qui s'avance. Et c'est lentement le miracle journalier, toujours nouveau, de la lumière qui revient.

Le visiteur qui s'était accroupi par terre, tout recouvert par un manteau foncé, remue, étend les bras, lève la tête, rejette son manteau un peu en arrière. C'est Manaën. Vêtu comme un homme quelconque, d'un lourd vêtement marron et d'un manteau assorti. Une étoffe rude de travailleur ou de pèlerin, toute unie, sans boucles ni ceinture. Un cordon de laine retient son habit à la taille. Il se lève, déploie sa stature. Il regarde le ciel où la lumière qui avance permet de voir ce qui l'entoure. En bas, une porte s'ouvre en grinçant. Manaën se penche sans faire de bruit pour voir qui sort de la maison. C'est Jésus qui avec précaution referme la porte et se dirige vers l'escalier. Manaën rentre un peu et s'éclaircît la gorge pour attirer l'attention de Jésus qui lève la tête et s'arrête au milieu de l'escalier.

"C'est moi, Maître. C'est Manaën. Viens vite car je dois te parler. Je t'ai attendu..." chuchote-t-il et il se penche pour le saluer.

Jésus monte les dernières marches : "Paix à toi. Quand es-tu venu ? Comment ? Pourquoi ?" demande-t-il.

"Je crois qu'à peine était passé le chant du coq, quand j'ai mis pied ici. Mais j'étais dans les buissons, là-bas au fond, depuis hier à la seconde veille."

"Toute la nuit dehors !"

"Il n'y avait pas moyen de faire autrement. Je devais te parler, à Toi seul. Je devais connaître le chemin pour venir, la maison et n'être pas vu. Aussi je suis venu de jour et je me suis caché là-haut. J'ai vu s'apaiser la vie dans la ville. J'ai vu Judas et Jean rentrer à la maison, et même Jean est passé presque à côté de moi avec sa charge de bois, mais il ne m'a pas vu, car j'étais bien caché dans le fourré. J'ai vu, tant qu'il a fait assez clair pour y voir, une petite vieillequi entrait et sortait, et le feu qui brillait dans la cuisine, et je t'ai vu descendre de là-haut quand le crépuscule était déjà terminé, et la porte se fermer.

Alors je suis venu à la lumière de la lune nouvelle et j'ai reconnu le chemin. Je suis même entré dans le jardin. La porte est plus inutile que s'il n'y en avait pas. J'ai entendu vos voix, mais je devais parler à Toi seul. Je suis reparti pour revenir à la troisième veille et être ici. Je sais que tu te lèves habituellement avant le jour pour prier, et j'ai espéré qu'aujourd'hui aussi tu le ferais. Je loue le Très-Haut qu'il en soit ainsi."

"Mais quel motif de devoir me voir avec tant de difficultés ?"

"Maître, Joseph et Nicodème veulent te parler et ils ont pensé le faire de manière à esquiver toute surveillance. Ils ont essayé d'autres fois, mais Belzébuth doit aider beaucoup tes ennemis. Ils devaient toujours renoncer à venir car leur maison n'était pas laissée sans surveillance, et de même celle de Nique. Et même la femme devait venir avant moi. C'est une femme courageuse et elle s'était mise en route seule par l'Adomin. Mais elle fut suivie et arrêtée près de la "Montée du sang", et elle, pour ne pas trahir ta demeure et pour justifier les vivres qu'elle avait sur sa monture, dit; "Je monte chez un de mes frères qui est dans une grotte sur les monts. Si vous voulez venir, vous qui enseignez Dieu, vous ferez une œuvre sainte car il est malade et il a besoin de Dieu". Et avec cette audace, elle les persuada de s'en aller. Mais elle n'osa plus venir ici et elle alla réellement trouver quelqu'un qu'elle dit être dans une grotte et que tu lui as confié."

"C'est vrai. Mais comment Nique a-t-elle pu le faire savoir aux autres ?"

"En allant à Béthanie. Lazare n'y est pas, mais les sœurs y sont. Il y a Marie. Et Marie est-elle une femme à s'effrayer de quelque chose ? Elle s'est habillée comme peut-être ne le fit pas Judith pour aller trouver le roi, et elle est allée au Temple, publiquement avec Sara etNoémi, et puis à son palais de Sion. Et de là elle a envoyé Noémi chez Joseph avec ce qu'il fallait dire.

Et pendant... qu'astucieusement les juifs allaient chez elle ou envoyaient des gens pour... lui rendre honneur, la petite vieille Noémi, en habits négligés, allait à Bézèta chez l'Ancien . Nous nous sommes mis d'accord pour m'envoyer moi, le nomade que personne ne soupçonne quand on le voit chevaucher à toute allure de l'une à l'autre des résidences d'Hérode, ici pour te dire que la nuit entre le vendredi et le sabbat Joseph et Nicodème, venant l'un d'Arimathie l'autre de Rama avant le coucher du soleil, se rencontreraient à Goféna et qu'ils t'attendraient là. Je connais l'endroit et la route, et je viendrai ici le soir pour te conduire. À moi, tu peux te fier, mais ne te fie qu'à moi, Maître. Joseph recommande que personne ne connaisse notre rencontre. Pour le bien de tous."

"Même le tien, Manaën ?"

"Seigneur... moi, je suis moi. Mais je n'ai pas à sauvegarder des biens et des intérêts de famille comme Joseph."

"Et cela confirme mes dires que les richesses matérielles sont toujours un fardeau... Mais dis bien à Joseph que personne ne connaîtra notre rencontre."
"Alors je puis aller, Maître. Le soleil est levé et tes disciples pourraient se lever."

"Va et que Dieu soit avec toi. Et même je t'accompagne pour te faire voir l'endroit où nous nous trouverons la nuit du sabbat..."

Ils descendent sans bruit et sortent du jardin pour descendre tout de suite sur les rives du torrent.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-020.htm
Tome :8 /20


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Message par Maud Ven 8 Aoû 2014 - 7:24

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_73


Ce qui arrive en Judée et en particulier à Jérusalem


C'est un chemin bien difficile que celui pris par Manaën pour conduire Jésus à l'endroit où on l'attend. Un chemin de montagne, étroit, couvert de pierres, dans le maquis et les bois. La lumière très claire de la lune à son premier quartier arrive difficilement à traverser l'enchevêtrement des branches et parfois disparaît tout à fait et Manaën y supplée avec des torches qu'il a préparées et emportées avec lui en bandoulière comme des armes sous son manteau. Lui devant, suivi de Jésus, ils avancent en silence dans le grand silence de la nuit. Deux ou trois fois un animal sauvage, en courant à travers les bois, imite un bruit de pas qui fait arrêter Manaën aux aguets. Mais à part cela, rien ne vient troubler la marche déjà si fatigante.

"Voici, Maître, là se trouve Goféna. Maintenant nous tournons, je compterai trois cent pas et je serai aux grottes où ils nous attendent depuis le coucher du soleil. Le chemin t'a paru long ? Et pourtant nous sommes allés par des raccourcis qui, je crois, respectent la distance légale."
Jésus fait un geste comme pour dire : "On ne pouvait faire autrement."

Manaën ne parle plus, attentif à compter les pas. Maintenant ils sont dans un couloir rocheux et nu, ressemblant à une caverne qui monte entre les parois de la montagne qui se touchent presque. On dirait une fracture produite par quelque cataclysme, tant elle est étrange : un énorme coup de couteau dans la masse de la montagne qui l'aurait coupée sur un bon tiers à partir du sommet. Au-dessus, là-haut, au-delà des parois perpendiculaires, au-delà de l'agitation bruyante des arbres qui ont poussé sur les bords de l'énorme entaille, resplendissent les étoiles, mais la lumière de la lune ne descend pas ici, dans ce gouffre. La lumière fumeuse de la torche réveille des oiseaux de proie qui crient en agitant leurs ailes sur les bords de leurs nids au milieu des crevasses.

Manaën dit : "Voilà !" et à l'intérieur d'une fente de la paroi rocheuse, il jette un cri qui ressemble à la plainte d'un gros hibou.

Venant du fond, une lueur rougeâtre s'avance par un autre corridor rocheux, qui pourtant est fermé en haut. Joseph survient : "Le Maître ?" demande-t-il car il ne voit pas Jésus qui est un peu en arrière.

"Je suis ici, Joseph. Paix à toi."

"À Toi, la paix. Viens ! Venez. Nous avons fait du feu pour voir les serpents et les scorpions et pour mettre en fuite le froid. Je vous précède."

Il se retourne, et par les détours du sentier dans les entrailles de la montagne, il les conduit vers un endroit éclairé par des flammes. Là, près du feu, se trouve Nicodème qui jette des branches de genévrier sur le feu.

"Paix à toi aussi, Nicodème. Me voici parmi vous. Parlez."

"Maître, personne ne s'est aperçu de ta venue ?"

"Et qui donc, Nicodème ?"

"Mais tes disciples ne sont pas avec Toi ?"

"Avec Moi se trouvent Jean et Judas de Simon. Les autres évangélisent depuis le lendemain du sabbat jusqu'au crépuscule du vendredi. Mais j'ai quitté la maison avant sexte en disant que l'on ne m'attende pas avant l'aube du lendemain du sabbat. Et désormais ils sont habitués à mes absences de plusieurs heures pour que cela donne des soupçons à quelqu'un. Soyez donc tranquilles. Nous avons tout le temps de parler sans aucune crainte d'être surpris. Ici... le lieu est commode."

"Oui. Une tanière de serpents et de vautours... et de larrons à la belle saison, quand ces montagnes sont remplies de troupeaux. Mais maintenant les larrons préfèrent d'autres lieux où ils tombent plus rapidement sur les bercails et les caravanes. Nous regrettons de t'avoir amené jusqu'ici, mais de cet endroit nous pourrons repartir par des chemins différents sans attirer l'attention de personne. Car, Maître, là où il soupçonne de l'amour pour Toi, le Sanhédrin fixe son attention."

"Voilà, sur ce point je suis en désaccord avec Joseph. Il me semble à moi que maintenant c'est nous qui voyons des ombres où il n'y en a pas. Il me semble encore que depuis quelques jours la chose s'est beaucoup apaisée..." dit Nicodème.

"Tu te trompes, mon ami. C'est moi qui te le dis. La chose s'est apaisée en ce qu'ils ne s'efforcent plus de rechercher le Maître, car ils savent désormais où il se trouve. Aussi c'est Lui et non pas nous qu'ils surveillent. À cause de cela, j'ai recommandé de ne dire à personne que nous nous serions rencontrés, pour qu'il n'y ait quelqu'un prêt... à n'importe quelle choses dit Joseph.

"Je ne crois pas que ceux d'Éphraïm..." objecte Manaën.

"Pas ceux d'Éphraïm ni personne de Samarie. Seulement pour agir différemment de ce que nous faisons de l'autre côté..."

"Non, Joseph, ce n'est pas pour cela. C'est parce qu'eux n'ont pas dans le cœur ce serpent méchant que vous avez. Eux ne craignent pas d'être dépouillés d'aucune prérogative. Ils n'ont pas à défendre des intérêts de secte ou de caste. Ils n'ont rien, hormis un besoin instinctif de se sentir pardonnés et aimés par Celui qu'ont offensé leurs ancêtres et qu'eux continuent à offenser en restant en dehors de la Religion parfaite. En dehors, parce qu'eux étant orgueilleux et vous de même, on ne sait pas des deux côtés renoncer à la rancune qui sépare et se tendre la main au nom de l'Unique Père. Et même, s'il y avait chez eux tant de bonne volonté, vous la briseriez, car vous, vous ne savez pas pardonner. Vous ne savez pas dire, en foulant aux pieds toute sottise : "Le passé est mort, car s'est levé le Prince du Siècle à venir qui nous rassemble tous sous son Signe". En fait, je suis venu et je rassemble. Mais vous ! Oh ! pour vous est toujours anathème même ce que j'ai pensé qu'il méritait d'être rassemblé !"

"Tu es sévère pour nous, Maître."

"Je suis juste. Pouvez-vous peut-être dire que vous ne m'avez pas reproché en votre cœur certaines de mes actions ? Pouvez-vous dire que vous approuvez ma miséricorde qui est la même pour les juifs et les galiléens que pour les samaritains et les gentils, et même encore plus grande pour eux et pour les grands pécheurs, justement parce qu'ils en ont davantage besoin ? Pouvez-vous dire que vous n'attendriez pas de Moi des actes d'une violente majesté pour manifester mon origine surnaturelle et surtout, faites bien attention, ma mission de Messie, d'après l'idée que vous avez du Messie ?

Dites vraiment la vérité : à part la joie de votre cœur pour la résurrection de l'ami, n'auriez-vous pas préféré à celle-là que j'arrive à Béthanie beau et cruel comme nos anciens avec les amorrhéens et les basanites et comme Josué avec ceux de Aï et de Jéricho, ou mieux encore en faisant crouler avec ma voix les pierres et les murs sur mes ennemis, comme les trompettes de Josué le firent pour les murs de Jéricho, ou en attirant du ciel sur mes ennemis de grosses pierres comme il arriva dans la descente de Béteronencore au temps de Josué ou, comme dans des temps plus récents, en appelant des cavaliers célestes s'élançant dans l'air couverts d'or, armés de lances comme des cohortes, et un défilé de cavaliers en escadrons rangés et des attaques de part et d'autre et, une agitation de boucliers et d'armées coiffées de heaumes avec leur épée dégainée et lançant des flèches pour terroriser mes ennemis ?

Oui, vous auriez préféré cela parce que, bien que vous m'aimiez beaucoup, votre amour est encore impur et nourrit pour cela, en désirant ce qui n'est pas saint, votre pensée d'Israélites, votre vieille pensée, celle qui est chez Gamaliel comme chez le dernier d'Israël, celle qui est chez le Grand Prêtre, chez le Tétrarque, chez le paysan, chez le berger, chez le nomade, chez l'homme de la Diaspora : la pensée fixe du Messie conquérant. Le cauchemar de ceux qui craignent qu'il ne les réduise à rien. L'espoir de ceux qui aiment la Patrie avec la violence d'un amour humain. Le rêve de ceux qui sont opprimés sous d'autres puissances dans d'autres terres. Ce n'est pas votre faute. La pensée pure, telle que Dieu l'a donnée sur ce que je suis, est allée en se couvrant au cours des siècles de scories inutiles. Et peu savent, par la souffrance, ramener à sa pureté initiale l'idée messianique.

Maintenant, ensuite, comme sont proches les temps où sera donné le signe qu'attend Gamaliel, et avec lui tout Israël, maintenant, ensuite, que viennent les temps de ma parfaite manifestation, Satan travaille à rendre plus imparfait votre amour et à altérer davantage votre pensée. Son heure vient. Je vous le dis. Et en cette heure de ténèbres même ceux qui actuellement sont voyants, ou ont seulement la vue basse, seront complètement aveugles. Peu, bien peu, dans l'Homme abattu reconnaîtront le Messie. Peu le reconnaîtront pour le vrai Messie, justement parce qu'il sera abattu comme l'ont vu les prophètes. Moi, je voudrais, pour le bien de mes amis, que pendant qu'il fait encore jour ils sachent me voir et me connaître, pour pouvoir me reconnaître et me voir même quand je serai défiguré et dans les ténèbres de l'heure du monde... Mais dites-moi maintenant ce que vous vouliez me dire. L'heure avance rapidement et l'aube va venir. Je parle pour vous car Moi, je ne crains pas de rencontres dangereuses."
"Voilà : nous voulions donc te dire que quelqu'un doit avoir dit où tu es et que ce quelqu'un n'est certainement ni Nicodème, ni Manaën, ni Lazare, ni ses sœurs, ni Nique, ni moi. Avec qui d'autres as-tu parlé du lieu choisi pour ton refuge ?"

"Avec personne, Joseph."

"Tu en es sûr ?"

"Sûr."

"Et tu as donné des ordres à tes disciples pour qu'ils n'en parlent pas ?"
"Avant le départ je ne leur ai pas parlé de l'endroit. Arrivé à Éphraïm je leur ai donné l'ordre d'aller évangéliser et d'opérer à ma place. Et je suis sûr de leur obéissance."

"Et... Tu es seul à Éphraïm ?"

"Non. Je suis avec Jean et Judas de Simon. Je l'ai déjà dit. Lui, Judas, car je lis sa pensée ne peut m'avoir nui par son irréflexion, car il ne s'est jamais éloigné de la ville, et en cette période il n'y passe pas de pèlerins d'autres lieux."

"Alors... c'est sûrement Belzébuth qui a parlé car, au Sanhédrin, on sait que tu es ici."

"Eh bien ? Comment réagissent-ils à ma conduite ?"

"De manières diverses, Maître. Très différentes les unes des autres. Certains disent que c'est logique : puisqu'ils t'ont mis au ban des lieux saints, il ne te restait qu'à te réfugier en Samarie. D'autres disent au contraire que cela te fait connaître pour ce que tu es : un samaritain d'esprit plus encore que de race, et que cela suffit pour te condamner. Tous, ensuite, se réjouissent d'avoir pu t'imposer le silence et de pouvoir t'indiquer aux foules comme ami des samaritains. Ils disent : "Nous avons déjà gagné la bataille. Le reste ne sera qu'un jeu d'enfants". Mais, nous t'en prions, fais que cela ne soit pas vrai."

"Ce ne sera pas vrai. Laissez-les parler. Ceux qui m'aiment ne se troubleront pas à cause des apparences. Laissez tomber le vent tout à fait. C'est un vent de terre. Puis viendra le vent du Ciel, et il s'ouvrira le voile pour qu'apparaisse la gloire de Dieu. Avez-vous autre chose à me dire ?"

"Non, pour ce qui te concerne. Veille, sois prudent, ne sors pas d'où tu es. Et de te dire encore que nous te ferons savoir..."

"Non. Pas besoin. Restez où vous êtes. Je vais avoir bientôt avec Moi les femmes disciples et, cela oui, dites à Élise et à Nique de rejoindre les autres, si elles le veulent. Dites-le aussi aux deux sœurs. Comme le lieu où je me trouve est désormais connu, ceux qui ne craignent pas le Sanhédrin peuvent désormais venir pour notre réconfort mutuel."

"Les deux sœurs ne peuvent venir jusqu'au retour de Lazare. Il est parti en grande pompe et Jérusalem toute entière a su qu'il allait à ses propriétés lointaines et on ne sait pas quand il reviendra. Mais son serviteur est déjà revenu de Nazareth et il a dit, cela aussi nous devions le dire, que ta Mère sera ici avec les autres avant la fin de cette lune. Elle se porte bien et de même Marie d'Alphée. Le serviteur les a vues, mais elles tardent un peu car Jeanne veut venir avec elles, et elle ne le peut qu'à la fin de cette lune. Et puis, voilà, si tu nous le permets, nous voudrions venir en ton aide... en amis fidèles même si imparfaits, comme tu le dis."

"Non. Les disciples qui vont évangéliser apportent la veille de chaque sabbat ce qu'il faut pour eux et pour nous qui restons à Éphraïm. Il ne faut pas autre chose. L'ouvrier vit de son salaire. Cela est juste. Le reste serait du superflu. Donnez-le à quelques malheureux. C'est ce que j'ai imposé aussi à ceux d'Éphraïm et à mes apôtres eux-mêmes. J'exige qu'à leur retour ils n'aient pas la moindre piécette en réserve et que toute obole soit donnée en route en ne prenant pour nous que ce qu'il faut pour notre nourriture très frugale de la semaine."

"Mais pourquoi, Maître ?"

"Pour leur enseigner le détachement des richesses et la nécessité pour l'esprit de dominer les préoccupations du lendemain. C'est pour cela et pour mes autres bonnes raisons de Maître que je vous prie de ne pas insister."

"Comme tu veux. Mais nous regrettons de ne pouvoir te servir."

"L'heure viendra où vous le ferez... N'est-ce pas une première clarté de l'aube ?" dit-il en se tournant vers l'orient, c'est-à-dire du côté opposé à celui par lequel il est venu, et en montrant une lueur timide qui apparaît par une ouverture sur des fonds lointains.

"Oui. Nous devons nous quitter. Moi, je retourne à Goféna où j'ai laissé ma monture et Nicomède, par cet autre côté, descendra vers Bérot et de là à Rama, une fois le sabbat fini."

"Et toi, Manaën ?"

"Oh ! moi, j'irai ouvertement par les grandes routes vers Jéricho, où se trouve maintenant Hérode. J'ai mon cheval dans une maison de pauvres gens qui pour une obole n'ont honte de rien, pas même d'un samaritain qu'ils croient que je suis. Mais pour le moment je reste avec toi. Dans mon sac, j'ai des vivres pour deux."

"Alors saluons-nous. À Pâque nous nous retrouverons."

"Non ! Tu ne voudras pas t'exposer à ce danger ! disent Joseph et Nicodème. Ne le fais pas, Maître !"

"En vérité, vous êtes de mauvais amis car vous me conseillez le péché et la lâcheté. Pourriez-vous ensuite m'aimer en réfléchissant à ma conduite ? Dites-le. Soyez sincères. Où devrais-je aller adorer le Seigneur à la Pâque des Azymes ? Peut-être sur le mont Garizim ? Ne devrais-je pas paraître devant le Seigneur dans son Temple de Jérusalem comme le doit tout homme d'Israël dans les trois grandes fêtes annuelles ? Ne vous souvenez-vous pas que déjà on m'accuse de violer le sabbat bien que — Manaën est ici pour en témoigner — bien que même aujourd'hui, pour me plier à votre désir, j'ai pris mon départ le soir à un endroit pouvant concilier votre désir avec la loi sabbatique ?"

"Nous aussi nous nous sommes arrêtés à Goféna pour cette raison... et nous ferons un sacrifice pour expier une transgression involontaire pour un motif qui s'imposait. Mais Toi, Maître !... Ils te verront tout de suite..."

"Même s'ils ne me voyaient pas, je ferai en sorte qu'ils me voient."
"Tu veux te ruiner ! C'est comme si tu te tuais..."

"Non. Votre esprit est tout enveloppé de ténèbres. Ce n'est pas comme si je voulais metuer, mais c'est uniquement obéir à la voix de mon Père qui me dit : "Va. C'est l'heure". J'ai toujours essayé de concilier la Loi avec la nécessité, même le jour où j'ai dû m'enfuir de Béthanie et me réfugier à Éphraïm parce que ce n'était pas encore l'heure qu'on me prenne. L'Agneau du Salut ne peut être immolé que pour la Pâque des Azymes. Voudriez-vous que si j'ai agi ainsi pour la Loi, je n'agisse pas de même pour obéir à mon Père ? Allez, allez ! Ne vous affligez pas ainsi. Et pourquoi suis-je venu sinon pour être proclamé roi de toutes les nations ? Car cela veut dire "Messie", n'est-ce pas ? Oui, cela. Et cela veut dire aussi"Rédempteur". Seulement que le vrai sens de ces deux mots ne correspond pas à ce que vous vous figurez. Mais Moi je vous bénis en implorant qu'un rayon céleste descende sur vous avec ma bénédiction, car je vous aime et vous m'aimez.

Car je voudrais que votre justice soit toute lumineuse. En effet vous n'êtes pas mauvais mais vous êtes vous aussi le "Vieil Israël",et vous n'avez pas la volonté héroïque de vous dépouiller du passé et vous rendre nouveaux.

Adieu, Joseph. Sois juste. Juste comme celui qui fut mon tuteur pendant tant d'années et qui fut capable de se renouveler complètement pour servir le Seigneur son Dieu. S'il était ici parmi nous, oh ! comme il vous enseignerait à savoir servir Dieu parfaitement, à être justes, justes, justes. Mais il est bien qu'il soit déjà dans le sein d'Abraham !... Pour ne pas voir l'injustice d'Israël. Saint serviteur de Dieu !... Nouvel Abraham lui, le cœur transpercé, mais avec une volonté parfaite, il ne m'aurait pas conseillé la lâcheté, mais m'aurait dit la parole dont il avait l'habitude de se servir quand quelque chose de pénible pesait sur nous : "Élevons notre esprit. Nous rencontrerons le regard de Dieu et nous oublierons que ce sont les hommes qui nous donnent la douleur, et faisons tout ce qui est pénible comme si c'était le Très-Haut qui nous le présentait. De cette façon nous sanctifierons même les plus petites choses, et Dieu nous aimera". Oh ! c'est ainsi qu'il aurait parlé aussi en m'encourageant à subir les plus grandes douleurs... Il nous aurait réconfortés... Oh ! ma Mère !..."

Jésus laisse Joseph qu'il tenait embrassé et il baisse la tête en silence, en contemplant certainement son prochain martyre et celui de sa pauvre Mère... Puis il lève la tête et embrasse Nicodème en disant : "La première fois que tu es venu à Moi comme disciple secret, je t'ai dit que pour entrer dans le Royaume de Dieu et pour avoir le Royaume de Dieu en vous, il est nécessaire que votre esprit renaisse et que vous aimiez la Lumière plus que lemonde ne l'aime. Aujourd'hui, et c'est peut-être la dernière fois que nous nous rencontrons en secret, je te répète les mêmes paroles. Renais en ton esprit, Nicodème, pour pouvoir aimer la lumière que je suis et pour que j'habite en toi comme Roi et Sauveur. Allez, et que Dieu soit avec vous."

Les deux synhédristes s'en vont par le côté opposé à celui par lequel est venu Jésus. Quand le bruit de leurs pas s'est éloigné, Manaën, qui s'était mis à l'entrée de la grotte pour les voir s'éloigner, revient en arrière pour dire d'un air très expressif : "Et pour une fois ceux qui violeront la distance sabbatique ce seront eux ! Et ils n'auront pas de paix tant qu'ils n'auront pas réglé leur dette avec l'Éternel par le sacrifice d'un animal ! Ne vaudrait-il pas mieux pour eux de sacrifier leur tranquillité en se disant ouvertement "tiens". Ne serait-ce pas plus agréable au Très-Haut ?"

"Ce le serait certainement, mais ne les juge pas. Ce sont des pâtes qui lèvent lentement mais, le moment venu, quand tant qui se croient meilleurs qu'eux, crouleront, eux se dresseront contre tout un monde."

"Le dis-tu pour moi, Seigneur ? Enlève-moi plutôt la vie, mais fais que je ne te renie pas."
"Tu ne renieras pas. Mais en toi il y a déjà des éléments différents des leurs pour t'aider à être fidèle."

"Oui. Je suis... l'hérodien, ou plutôt j'étais l'hérodien. En effet, comme je me suis détaché du Conseil, je me suis détaché du parti quand je l'ai vu lâche et injuste comme les autres envers Toi. Être hérodien !... Pour les autres castes, c'est être un peu moins que païen. Je ne dis pas que nous soyons des saints. C'est vrai. Pour une fin impure nous avons commis l'impureté. Je parle comme si j'étais encore l'hérodien d'autrefois, avant que je sois à Toi. Nous sommes donc doublement impurs, selon le jugement humain, parce que nous nous sommes alliés aux romains et parce que nous l'avons fait dans un but intéressé. Mais dis-moi, Maître, Toi qui dis toujours la vérité et qui ne t'en abstiens pas par crainte de perdre un ami. Entre nous, qui sommes alliés avec Rome pour... avoir encore d'éphémères triomphes personnels, et les pharisiens, les chefs des prêtres, les scribes, les sadducéens qui s'allient à Satan pour t'abattre, quels sont les plus impurs ?

Moi, tu le vois, maintenant que j'ai vu que le parti des hérodiens se range contre Toi, je les ai quittés. Je ne le dis pas pour que tu m'en loues, mais pour te dire ma pensée. Et eux, je parle des pharisiens et des prêtres, des scribes et des sadducéens, croient tirer profit de cette alliance imprévue des hérodiens avec eux ! Les malheureux ! Ils ne savent pas que les hérodiens le font pour avoir plus de mérite et par conséquent plus de protection de la part des romains, et après... une fois éclaircie et terminée la cause et le motif qui les unit présentement, pour abattre ceux qu'ils prennent maintenant comme alliés.

C'est ainsi que l'on joue des deux côtés. Tout se base sur le mensonge et cela me répugne tellement que je me suis rendu indépendant de tout. Toi... Tu es un grand fantôme qui les effraie. Tous ! Et tu es aussi un prétexte pour le louche jeu des intérêts des divers partis. Le motif religieux ? L'indignation sacrée pour "le blasphémateur", comme ils t'appellent ? Tout cela n'est que mensonge ! L'unique motif est, non pas la défense de la Religion, ni le zèle sacré pour le Très-Haut, maïs leurs intérêts, cupides, insatiables. Ils me dégoûtent comme des choses immondes. Et je voudrais... Oui, je voudrais plus audacieux le peu de gens qui ne sont pas immondes. Ah ! cela me pèse désormais d'avoir une double vie ! Je voudrais te suivre Toi seul. Mais je te sers ainsi plus que si je te suivais. Cela me pèse... Mais tu dis que ce sera bientôt... Comment... Mais tu seras réellement immolé parce que tu es l'Agneau ? N'est-ce pas un langage figuré ? La vie d'Israël est un tissu de symboles et de figures..."

"Et tu voudrais qu'il en fût ainsi pour Moi... Mais pour Moi, ce n'est pas une figure."

"Pas une figure ? En es-tu sûr ? Je pourrais... En grand nombre, nous pourrions répéter les gestes antiques et te faire oindre comme Messie et te défendre. Il suffirait d'un mot, et au nombre de milliers et de dizaines de milliers se lèveraient les défenseurs du vrai Pontife, saint et sage. Je ne parle plus d'un roi terrestre, puisque je sais maintenant que ton Royaume est tout spirituel. Mais puisque humainement parlant nous ne serons jamais plus forts et libres, qu'il y ait au moins ta sainteté pour soutenir et guérir Israël corrompu. Personne, et Toi tu le sais, n'aime le sacerdoce actuel et ceux qui le soutiennent. Veux-tu, Seigneur ? Commande et j'agirai."

"Ta pensée, Manaën, a déjà fait beaucoup de chemin. Mais tu es encore aussi loin du but que la Terre l'est du soleil. Je serai Prêtre, et pour l'éternité, Pontife immortel dans un organisme que je vivifierai jusqu'à la fin des siècles. Mais je ne serai pas oint avec l'huile d'allégresse, ni proclamé et défendu par la violence d'actes voulus par une poignée de fidèles pour jeter la Patrie dans le schisme le plus féroce et la rendre plus esclave qu'elle ne l'a jamais été. Et tu crois qu'une main d'homme puisse oindre le Christ ? En vérité, je te dis que non. La véritable Autorité qui me oindra Pontife et Messie c'est celle de Celui qui m'a envoyé. Personne, qui ne serait pas Dieu, ne pourrait oindre Dieu comme Roi des rois et Seigneur des seigneurs, pour l'éternité."

"Alors, rien !? Rien à faire !? Oh ! quelle douleur pour moi !"

"Tout. M'aimer. Tout revient à cela. Aimer non pas la créature qui a pour nom Jésus, mais ce qu'est Jésus. M'aimer avec l'humanité et avec l'esprit, comme Moi je vous aime avec l'Esprit et l'Humanité, pour être avec Moi au-delà de l'Humanité. Regarde cette belle aurore. La lumière paisible des étoiles n'arrivait pas ici à l'intérieur, mais celle triomphante du soleil, si. Ainsi en adviendra-t-il dans les cœurs de ceux qui arriveront à m'aimer avec justice. Viens dehors. Dans le silence de la montagne dont les voix rauques des intérêts humains n'altèrent pas la pureté. Regarde là-haut ces aigles comment, en leur larges vols, s'éloignent pour chercher leur proie . La voyons-nous cette proie ? Non, Mais eux, si. Car l'œil de l'aigle est plus puissant que le nôtre et des hauteurs où il se déplace il voit un large horizon et sait choisir. Moi aussi, je vois ce que vous autres ne voyez pas, et des hauteurs où plane mon esprit je sais choisir mes douces proies, non pas pour les dévorer comme font les vautours et les aigles, mais pour les emporter avec Moi. Nous serons si heureux là-haut, dans le Royaume de mon Père, nous qui nous aimons !.."

Jésus tout en parlant est sorti pour s'asseoir au soleil sur le seuil de la grotte. Il a Manaën à côté de Lui et l'attire sans parler à Lui, en souriant à je ne sais quelle vision...


*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-021.htm
TOME : 8/ 21
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus




♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Jerusa10
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Sam 9 Aoû 2014 - 6:42

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_74


Le saphorim Samuel, ex-disciple de Jonathas Ben Uzielet puis disciple de Jésus


Jésus est seul et encore dans la caverne. Un feu brille pour donner de la lumière et de la chaleur, et il se produit une forte odeur de résine et de fagot dans l'antre, au milieu des crépitements et des étincelles. Jésus s'est retiré dans le fond, dans une crevasse où on a jeté des branches sèches et il y reste en méditation. La flamme ondoie de temps à autre, baisse ou se ravive successivement par suite des coups de vent qui courent à travers les bois et pénètrent en mugissant à l'intérieur de la caverne qui résonne comme un buccin. Ce n'est pas un vent continu. Il tombe, puis se relève comme les flots de la mer en temps de grande marée. Quand il souffle fort, la cendre et les feuilles sèches sont poussées vers l'étroit corridor rocheux d'où Jésus est venu dans la grotte plus grande, et la flamme penche jusqu'à lécher le sol de ce côté, puis une fois tombé le coup de vent, elle se redresse encore frétillante et recommence ensuite à flamber toute droite.

Jésus ne s'en occupe pas. Il médite. Puis, au bruit du vent, s'unit celui de la pluie qui, d'abord rare, puis serrée, frappe les feuillages des fourrés. Un véritable ouragan a vite fait de changer les sentiers en petits torrents bruyants. Et maintenant c'est le bruit de l'eau qui domine car le vent tombe peu à peu. La lumière très relative d'un crépuscule orageux, et celle du feu qui, faute d'aliment, rougit mais ne flambe plus, éclaire à peine la caverne, et dans les coins c'est déjà l'obscurité complète. Jésus avec ses vêtements sombres n'est plus visible. Son visage est penché sur ses genoux qu'il tient relevés et c'est à peine, quand il le relève, si on voit une blancheur se détacher sur la paroi obscure.

Un bruit de pas et des mots haletants comme de quelqu'un qui est las et épuisé hors de la grotte sur le sentier, et puis une ombre obscure d'où l'eau dégoutte de tous côtés se profile dans le vide de l'entrée. L'homme, car c'est un homme à la barbe touffue et noire, pousse un "oh !" de soulagement et il jette à terre son couvre-chef détrempé par l'eau, secoue son manteau et monologue : "Hum ! Tu as beau le secouer, Samuel ! Il semble tombé dans la cuve d'un foulon ! Et les sandales ? Des barques ! Des barques au fond du fleuve ! Je suis trempé jusqu'à la peau ! Regarde ici ces ruisseaux qui tombent des cheveux ! On dirait une gouttière rompue qui laisse passer l'eau par mille trous. On commence bien ! A-t-il peut-être de son côté Belzébuth qui le défende ? Hum ! La mise est belle... mais..." Il s'assied sur une pierre près du feu. Il n'y a plus de flammes mais des tisons rouges qui forment des dessins étranges, dernière trace de vie du bois consumé. Il essaie de le raviver en soufflant dessus. Il enlève ses sandales et cherche à essuyer ses pieds boueux avec un pan du manteau moins trempé que le reste.

Mais c'est avec de l'eau qu'il s'essuie. Le mal qu'il se donne ne sert qu'à enlever la boue de ses pieds pour la mettre sur le manteau. Il continue de monologuer : "Maudits soient-ils, et lui, et tous ! Et j'ai perdu aussi ma bourse. Certainement ! C'est encore bien si je n'ai pas perdu la vie... "C'est le chemin le plus sûr" ont-ils dit. Oui ! Mais eux ne le suivent pas ! Si je ne voyais pas cette flamme ! Qui a pu l'allumer ? Quelque malheureux comme moi. Où sera-t-il maintenant ? Là, il y a un trou... Peut-être une autre grotte... N'y aurait-il pas des larrons, eh ? Mais... quel sot je suis ! Que pourraient-ils me prendre si je n'ai pas la moindre piécette ? Mais peu importe. Ce feu est plus qu'un trésor. Si je pouvais avoir quelques branches pour le raviver ! Je me déshabillerais, je sécherais mes vêtements. Ohé, dis-je ! Je n'ai que ce vêtement jusqu'à mon retour !..."

"Si tu veux des branches, ami, il y en a ici" dit Jésus sans quitter sa place.

L'homme, qui tournait le dos à Jésus, sursaute en entendant cette voix inattendue et il bondit sur ses pieds en se retournant. Il paraît effrayé. "Qui es-tu ?" demande-t-il en écarquillant les yeux pour essayer de voir.

"Un voyageur comme toi. C'est Moi qui ai allumé le feu et je suis content qu'il t'ait servi pour te diriger." Jésus s'avance avec une brassée de bois et la jette près du feu en ordonnant :

"Ravive la flamme avant que la cendre couvre tout. Je n'ai pas d'amadou ni de briquet car celui qui me l'a prêté s'en est allé après le coucher du soleil." Jésus parle amicalement, mais il ne s'avance pas pour que le feu l'éclaire. Au contraire, il retourne dans son coin en restant plus que jamais enveloppé dans son manteau.

L'homme, pendant ce temps, se penche pour souffler fort sur des feuilles qu'il a jetées sur le feu et reste ainsi, occupé, jusqu'à ce que la flamme jaillisse. Il rit en jetant des branches de plus en plus grosses qui refont la flamme. Jésus est retourné s'asseoir à sa place et il l'observe.

"Maintenant je devrais me déshabiller pour faire sécher mes vêtements. Je préfère rester nu qu'ainsi trempé. Mais je n'y arrive pas. Une côte s'est éboulée et je me suis trouvé sous un éboulis de terre et d'eau. Ah ! Maintenant je suis frais ! Regarde ! J'ai déchiré mon vêtement. Voyage maudit ! Si encore j'avais transgressé le sabbat ! Mais non, je me suis arrêté jusqu'au coucher du soleil. Après... Et maintenant comment vais-je faire ? Pour me sauver, j'ai laissé aller ma bourse et maintenant elle sera dans la vallée, ou accrochée dans quelque buisson qui sait où..."

"Voici mon vêtement. Il est sec et chaud. À Moi, le manteau me suffit. Prends-le. Je suis sain, ne crains pas."

"Et bon. Un bon ami. Comment te remercier ?"

"En m'aimant comme un frère."

"En t'aimant comme un frère ! Mais tu ne sais pas qui je suis, et si j'étais mauvais, voudrais-tu de mon amour ?"

"Je le voudrais pour te rendre bon."

L'homme, qui est jeune, à peu près de l'âge de Jésus, baisse la tête et réfléchit. Il a le vêtement de Jésus dans les mains, mais il ne le voit pas. Il réfléchit et machinalement il se le passe sur la peau nue car il s'est déshabillé même de ses sous-vêtements.

Jésus, qui était revenu dans son coin, lui demande : "Quand as-tu mangé ?"

"À sexte. J'aurais dû manger en arrivant dans le village, dans la vallée. Mais je me suis égaré et j'ai perdu ma bourse et mon argent."

"Voici. J'ai encore ici des restes de nourriture. Ils devaient me servir pour demain, mais prends-les. À Moi, le jeûne ne me pèse pas."

"Mais... si tu dois marcher, tu auras besoin de forces..."

"Oh ! je ne vais pas loin : à Éphraïm seulement..."

"À Éphraïm ?! Tu es samaritain ?"

"Cela t'indispose ? Je ne suis pas samaritain."

"En effet... tu as l'accent de Galilée. Qui es-tu ? Pourquoi ne découvres-tu pas ton visage ? Tu dois te cacher parce que tu es coupable ? Je ne te dénoncerai pas."

"Je suis un voyageur. Je te l'ai dit déjà. Mon Nom ne te dirait rien, ou te dirait trop. Et du reste ? Qu'est le nom ? Quand je t'offre un vêtement pour tes membres glacés, du pain pour ta faim, et surtout ma pitié pour ton cœur. As-tu peut-être besoin de savoir mon Nom pour te sentir refait par les vêtements secs, la nourriture et l'affection ? Mais si tu veux me donner un nom, appelle-moi "Pitié". Je n'ai rien de honteux qui m'oblige à me cacher. Mais ce n'est pas pour cela que tu laisserais de me dénoncer. Car tu as en ton cœur un dessein qui n'est pas bon, et une mauvaise pensée donne pour fruit de mauvaises actions."

L'homme sursaute et va près de Jésus. Mais de Jésus il ne voit que les yeux et même ceux-ci sont voilés par les paupières qui sont baissées.

"Mange, mange, mon ami. Il n'y a rien d'autre à faire."

L'homme revient près du feu et il mange lentement sans parler. Il est pensif. Jésus est tout pelotonné dans son coin. L'homme se restaure peu à peu. La chaleur du feu, le pain et la viande rôtie que Jésus lui a donné, le mettent en train. Il se lève, s'étire, tend le cordon, qui lui servait de ceinture, d'un éclat de roche à un piton rouillé fixé là à l'intérieur qui sait par qui et depuis quand, et il étend dessus son vêtement, son manteau, son couvre-chef pour les faire sécher. Il secoue ses sandales et les présente à la flamme qu'il alimente généreusement.

Jésus semble sommeiller. L'homme s'assoit à son tour et réfléchit, puis il se tourne pour regarder l'Inconnu. Il demande : "Tu dors ?"

Jésus répond : "Non. Je réfléchis et je prie."

"Pour qui ?"

"Pour tous les malheureux, de toutes sortes. Et il y en a tant !"

"Tu es un pénitent ?"

"Je suis un pénitent. La Terre a grand besoin de pénitence pour donner aux faibles qui l'habitent la force de repousser Satan."

"Tu as bien dit. Tu parles comme un rabbi. Moi, je m'y connais car je suis saphorim . Je suis avec le rabbi Jonathas ben Uziel, son plus cher disciple. Et maintenant, si le Très-Haut m'assiste, je lui deviendrai encore plus cher. Mon nom sera exalté par tout Israël."
Jésus ne réplique rien.

L'autre, après un moment, se lève et vient s'asseoir près de Jésus. Il dit, en lissant ses cheveux avec la main car ils sont presque secs et en remettant sa barbe en forme : "Écoute. Tu as dit que tu vas à Ephraïm. Mais y vas-tu par hasard ou y résides-tu ?"

"J'habite à Éphraïm."

"Mais tu n'es pas samaritain, as-tu dit !"

"Je le répète : je ne suis pas samaritain."

"Et qui peut habiter là sinon... Écoute : on dit que c'est à Éphraïm que s'est réfugié le Rabbi de Nazareth, le proscrit, le maudit. Est-ce vrai ?"

"C'est vrai. Jésus, le Christ du Seigneur, est là."

"Ce n'est pas le Christ du Seigneur ! C'est un menteur ! C'est un blasphémateur ! C'est un démon ! C'est la cause de tous nos malheurs. Et il ne se dresse pas pour l'abattre quelqu'un qui venge tout un peuple !" s'écrie-t-il avec une haine fanatique.

"Il t'a peut-être fait du mal pour que tu en parles avec de tels accents de haine ?"

"À moi, non. C'est à peine si je l'ai vu une fois pour les Tabernacles, et dans un tel tumulte que j'aurais du mal à le reconnaître . Car, si je suis disciple du grand rabbi Jonathas benUziel, c'est depuis peu que je suis définitivement au Temple, Tout d'abord... je ne le pouvais pas pour plusieurs raisons, et c'est seulement quand le rabbi était à sa maison que j'étais à ses pieds pour boire justice et doctrine. Mais Toi... Tu m'as demandé si je le hais et j'ai senti un reproche caché dans tes paroles. Tu es peut-être un partisan du Nazaréen ?"

"Non, je ne le suis pas. Mais quiconque est juste condamne la haine"

"La haine est sainte quand elle se tourne contre un ennemi de Dieu et de la Patrie. C'est ce qu'est le Rabbi nazaréen, et il est saint de le combattre, de le haïr."

"Combattre l'homme ou l'idée qu'il représente et la doctrine qu'il proclame ?"

"Tout ! Tout ! On ne peut combattre une chose si on épargne l'autre. C'est dans l'homme que se trouve sa doctrine et son idée. Ou on abat tout, ou cela ne sert à rien. Quand on embrasse une idée, on embrasse l'homme qui la représente et en même temps sa doctrine. Je le sais car je l'éprouve avec mon maître. Ses idées sont les miennes, ses désirs une loi pour moi."

"En effet un bon disciple agit ainsi. Pourtant il faut savoir se rendre compte si le maître est bon, et ne suivre qu'un bon maître. En effet il n'est pas permis de perdre sa propre âme pour l'amour d'un homme."

"Jonathas ben Uziel est bon."

"Non. Il ne l'est pas."

"Que dis-tu ? Et c'est à moi que tu le dis ? Alors que nous sommes seuls ici et que je pourrais te tuer pour venger mon maître ? Je suis fort, tu sais ?"

"Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur de la violence. Et je n'ai pas peur tout en sachant que si tu me frappes, je ne réagirai pas."

"Ah ! j'ai compris ! Tu es un disciple du Rabbi, un "apôtre". C'est ainsi qu'il appelle ses disciples les plus fidèles, et tu vas le rejoindre. Peut-être que celui qui était avec toi était un de tes pareils. Et tu attends quelqu'un comme toi."

"J'attends quelqu'un. Oui."

"Le Rabbi peut-être ?"

"Il n'est pas besoin que je l'attende. Il n'a pas besoin de ma parole pour être guéri de son mal. Il n'a pas l'âme malade, ni non plus le corps. J'attends une pauvre âme empoisonnée, délirante, pour la guérir."

"Tu es un apôtre ! On sait en effet que Lui les envoie pour évangéliser, car il a peur d'y aller Lui-même depuis qu'il a été condamné par le Sanhédrin. C'est pour cela que tu as sa doctrine ! Ne pas réagir contre celui qui offense, c'est l'un de ses enseignements."

"C'est l'un de ses enseignements car Lui, il enseigne l'amour, le pardon, la justice, la douceur. Il aime les ennemis comme les amis, parce qu'il voit tout en Dieu."

"Oh ! s'il me rencontrait, si, comme je l'espère, je le rencontrerai, je ne crois pas qu'il m'aimera. Ce serait un sot ! Mais je ne puis parler avec toi, son apôtre. Et je regrette d'avoir dit ce que j'ai dit. Tu le Lui rapporteras."

"Il n'en est pas besoin. Mais en vérité, je te dis que Lui t'aimera, et même qu'il t'aime, bien que tu ailles à Éphraïm pour l'entraîner dans un piège et le livrer au Sanhédrin qui a promis une grande récompense à celui qui le fera."

"Tu es... prophète ou bien tu as l'esprit python ? Il t'a communiqué sa puissance ? Tu es donc un maudit, toi aussi ? Et moi j'ai accepté ton pain, ton vêtement, tu as été pour moi un ami ! Il est dit : "Tu ne lèveras pas la main contre celui qui t'a fait du bien" . Tu l'as fait ! Pourquoi, si tu savais que moi... Peut-être pour m'empêcher d'agir ? Mais si je t'épargne Toi, parce que tu m'as donné le pain et le sel, le feu et le vêtement, et que je manquerais à la justice en te faisant tort, je n'épargnerai pas ton Rabbi, car Lui, je ne le connais pas et il ne m'a pas fait du bien, mais du mal."

"Oh ! malheureux ! Tu ne te rends pas compte que tu délires ? Comment quelqu'un que tu ne connais pas peut-il t'avoir fait du mal ? Comment peux-tu respecter le sabbat, si tu ne respectes pas le précepte de ne pas tuer ?..."

"Moi je ne tue pas."

"Matériellement, non. Mais il n'y a pas de différence entre celui qui tue et celui qui remet la victime aux mains du tueur. Tu respectes la parole d'un homme qui dit de ne pas nuire à celui qui t'a fait du bien, et ensuite tu ne respectes pas celle de Dieu et, au moyen d'un piège, pour une poignée d'argent, pour un peu d'honneur, honneur pourri d'avoir su livrer un innocent, tu te prépares à un crime !..."

"Je ne le fais pas seulement pour l'argent et pour l'honneur, mais pour faire une chose agréable à Jéhovah et salutaire pour la Patrie. Je répète le geste de Jahel et de Judith." Il est plus fanatique que jamais.

"Sisara et Holopherne étaient des ennemis de notre Patrie. Ils étaient des envahisseurs, ils étaient cruels. Mais qu'est le Rabbi de Nazareth ? Qu'est-ce qu'il envahit ? Qu'est-ce qu'il usurpe ? Il est pauvre et ne veut pas de richesses. Il est humble et ne veut pas d'honneurs. Il est bon, avec tous. Ce sont des milliers qui ont reçu ses bienfaits. Pourquoi le haïssez-vous ? Toi, pourquoi le hais-tu ? Il ne t'est pas permis de nuire à ton prochain. Tu sers le Sanhédrin, mais sera-ce le Sanhédrin qui te jugera dans l'autre vie, ou sera-ce Dieu ? Et comment te jugera-t-il ? Je ne dis pas : comment te jugera-t-il parce que tu auras tué le Christ; mais je te dis : comment te jugera-t-il parce que tu auras tué un innocent. Tu ne crois pas que le Rabbi de Nazareth soit le Christ et à cause de ton idée qu'il ne l'est pas, ce crime ne te sera pas imputé. Dieu est juste et Il ne compte pas comme faute un acte accompli sans une complète circonspection. Il ne te jugera donc pas pour avoir tué le Christ puisque pour toi Jésus de Nazareth n'est pas le Christ. Mais Il t'accusera d'avoir tué un innocent, car tu sais qu'il est innocent. Ils t'ont empoisonné, rendu ivre par leurs paroles de haine, mais tu ne l'es pas au point de ne pas comprendre qu'il est innocent. Ses œuvres parlent en sa faveur. Votre peur, plutôt celle des maîtres que la vôtre à vous disciples, craint et voit des choses qui n'existent pas.

La peur de ceux qui craignent d'être supplantés par Lui. Ne craignez pas. Lui vous ouvre les bras pour vous dire : "Frères" ! Il n'envoie pas contre vous des troupes. Il ne vous maudit pas. Il voudrait seulement vous sauver. Vous, les grands, et disciples des grands, comme il veut sauver le dernier d'Israël. Vous, plus que le plus petit d'Israël, plus que l'enfant qui ne sait pas encore ce que c'est que haine et amour, car vous en avez besoin plus que les ignorants et les enfants parce que vous savez, et vous péchez en sachant. Ta conscience d'homme, si tu la dépouilles des idées qu'on y a mises, si tu la purifies des poisons qui la font délirer, peut-elle te dire que Lui est coupable ? Dis-le ! Sois sincère. L'as-tu vu peut-être un jour manquer à la Loi, ou conseiller de manquer à la Loi ? L'as-tu vu bagarreur, avide, luxurieux, calomniateur, dur de cœur ? Parle ! L'as-tu vu peut-être irrespectueux envers le Sanhédrin ? Lui est comme un proscrit, pour obéir au verdict du Sanhédrin. Il pourrait lancer un appel et toute la Palestine le suivrait pour marcher contre le petit nombre de ceux qui le haïssent. Et Lui, au contraire, conseille à ses disciples la paix et le pardon. Il pourrait — comme il rend la vie aux morts, la vue aux aveugles, le mouvement aux paralytiques, l'ouïe aux sourds, la délivrance aux possédés, car ni le Ciel ni l'Enfer ne sont insensibles à ses volontés — il pourrait vous foudroyer de ses foudres divines et se débarrasser ainsi de ses ennemis.

Et Lui, au contraire, prie pour vous et guérit vos parents, vous guérit le cœur, vous donne le pain, le vêtement, le feu. Car je suis Jésus de Nazareth, le Christ, Celui que tu cherches pour avoir la somme promise à celui qui le livre au Sanhédrin et les honneurs du libérateur d'Israël. Je suis Jésus de Nazareth, le Christ. Me voici. Prends-moi donc. Comme Maître et comme Fils de Dieu, je te libère de l'obligation et du péché de lever ou d'avoir levé la main sur celui qui t'a fait du bien."

Jésus s'est levé en dégageant la tête de son manteau, et il tend les mains comme pour qu'on le prenne et qu'on le lie. Mais grand comme il est — et il paraît encore plus élancé étant resté avec son seul sous-vêtement court et presque étriqué, avec son manteau foncé qui pend de ses épaules, bien droit, les yeux fixés sur le visage de son persécuteur, dans le reflet mobile des flammes qui allument des points lumineux sur ses cheveux flottants et font briller ses larges pupilles dans le cercle bleu saphir des iris — si majestueux, franc, sans peur, il impose plus de respect que s'il était entouré d'une armée chargée de le défendre.

L'homme est comme fasciné... paralysé par l'étonnement. C'est seulement après un moment qu'il arrive à murmurer : "Toi ! Toi ! Toi !" Il semble qu'il ne sait pas dire autre chose.

Jésus insiste : "Prends-moi donc ! Enlève ce cordon inutile, tendu pour soutenir un vêtement sale et déchiré, et lie mes mains. Je te suivrai comme un agneau suit le boucher et je ne te haïrai pas parce que tu me conduis à la mort. Je te l'ai dit. C'est la fin qui justifie l'action et en change la nature. Pour toi, je suis la ruine d'Israël et tu crois sauver Israël en me tuant. Pour toi je suis coupable de tous les crimes et tu sers donc la justice en supprimant un malfaiteur. Tu n'es donc pas plus coupable que le bourreau qui exécute un ordre qu'il a reçu. Veux-tu m'immoler ici, sur place ? Ici, à mes pieds, se trouve le couteau avec lequel j'ai découpé la nourriture. Prends-le. La lame, qui a servi à l'amour pour mon prochain, peut se changer en couteau de sacrificateur.

Ma chair n'est pas plus dure que la viande de l'agneau rôti que mon ami m'avait laissée pour ma faim et que j'ai donnée pour te nourrir, toi, mon ennemi. Mais tu crains les patrouilles romaines. Elles arrêtent ceux qui tuent un innocent et ne nous laissent pas rendre la justice car nous sommes les sujets et eux les maîtres. Aussi tu n'oses pas me tuer et puis t'en aller vers ceux qui t'envoient avec sur les épaules l'Agneau égorgé comme une marchandise qui sert à gagner de l'argent. Eh bien, laisse ici mon cadavre, et va avertir tes maîtres, parce que tu n'es pas un disciple, mais un esclave, tellement tu as renoncé à cette souveraine liberté de pensée et de volonté que Dieu Lui-même laisse aux homme.

Et tu sers, tu sers servilement, tes maîtres. Jusqu'au crime tu les sers. Mais tu n'es pas coupable. Tu es "empoisonné". Tu es l'âme empoisonnée que j'attendais. Allons donc ! La nuit et l'endroit favorisent le crime. Je dis mal : la rédemption d'Israël ! Oh ! pauvre enfant ! Tu dis sans le savoir des paroles prophétiques ! Ma mort sera vraiment la rédemption, et non seulement d'Israël, mais de toute l'Humanité. Et Moi je suis venu pour être immolé. Je brûle de l'être pour être le Sauveur. De tous. Toi, saphorim du docte Jonathas ben Uziel, tu connais certainement Isaïe. Voici : l'Homme des douleurs est devant toi . Et si je ne semble pas tel, si je ne semble pas celui que vit aussi David, avec les os à nu et déboîtés, si je ne suis pas comme le lépreux vu par Isaïe, c'est parce que vous ne voyez pas mon cœur. Je ne suis qu'une plaie. Le manque d'amour, la haine, la dureté, votre injustice m'ont blessé et meurtri de toutes parts. Et ne tenais-je pas caché mon visage alors que tu me méprisais à cause de ce que je suis réellement : le Verbe de Dieu, le Christ ? Mais je suis l'homme habitué à la souffrance ! Et ne me jugez-vous pas comme quelqu'un qui est frappé par Dieu ? Et est-ce que je ne me sacrifie pas parce que je veux me sacrifier, pour vous guérir par mon sacrifice ?

Allons ! Frappe ! Regarde : je n'ai pas peur et tu ne dois pas avoir peur. Moi, parce que je suis l'Innocent et que je ne crains pas le jugement de Dieu, Moi parce qu'en présentant mon cou à ton couteau, je fais en sorte que s'accomplisse la volonté de Dieu, en anticipant de quelque temps mon heure pour votre bien. Même quand je suis né, j'ai anticipé l'heure par amour pour vous, pour vous donner la paix avant le temps. Mais vous, de cette angoisse d'amour que j'éprouve, vous en faites une arme de négation... Ne crains pas ! Je n'appelle pas sur toi le châtiment de Caïn, ni les foudres de Dieu. Je prie pour toi. Je t'aime. Rien de plus. Je suis trop grand pour ta main d'homme ? Voilà, c'est vrai ! En effet l'homme ne pourrait frapper Dieu si Dieu ne se mettait pas volontairement entre les mains de l'homme. Eh bien, je m'agenouille devant toi. Le Fils de l'homme est devant toi, à tes pieds. Frappe donc !"

Jésus s'agenouille effectivement, et présente le couteau qu'il tient par la lame à son persécuteur qui recule en murmurant : "Non ! Non !"

"Allons ! Un moment de courage... et tu seras plus célèbre que Jahel et Judith ! Regarde, Je prie pour toi. Isaïe le dit : "... et il pria pour les pécheurs". Tu ne viens pas encore ? Pourquoi t'éloignes-tu ? Ah ! peut-être tu crains de ne pas voir comment meurt un Dieu. Voilà, je viens ici, près du feu. Le feu ne manque jamais dans les sacrifices, il en fait partie. Voilà. Maintenant, tu me vois bien." Il s'est agenouillé près du feu.

"Mais, ne me regarde pas ! Ne me regarde pas ! Oh ! où dois-je fuir pour ne pas voir ton regard ?" dit l'homme.

"Qui ? Qui veux-tu ne pas voir ?"

"Toi... et mon crime. Vraiment mon péché est devant moi ! Où, où fuir ?" L'homme est terrorisé...

"Sur mon cœur, fils ! Ici, dans mes bras cessent les cauchemars et les peurs. Ici, c'est la paix. Viens ! Viens ! Rends-moi heureux !" Jésus s'est levé et il tend les bras. Le feu est entre eux deux. Jésus rayonne dans le reflet des flammes.

L'homme tombe à genoux en se couvrant le visage et en criant : "Pitié de moi, ô Dieu ! Pitié de moi ! Efface mon péché ! Je voulais frapper ton Christ ! Pitié ! Ah ! il ne peut y avoir de pitié pour un tel crime ! Je suis damné !" Il pleure, le visage contre terre, violemment secoué par des sanglots, et il gémit : "Pitié" et il lance des imprécations : "Maudits !"...

Jésus tourne autour de la flamme et va vers lui, il se penche, lui touche la tête, et lui dit : "Ne maudis pas ceux qui t'ont dévoyé. Ils t'ont obtenu le plus grand bien : celui que je te parle. Ainsi. Et que je te tienne ainsi dans mes bras."

Il l'a pris par les épaules et soulevé et, s'assoyant par terre, il l'a pris sur son cœur, et l'homme s'abandonne sur ses genoux en un pleur moins frénétique, mais si purificateur ! Jésus caresse sa tête brune et le laisse se calmer.

L'homme lève enfin la tête, et avec son visage tout changé il gémit : "Ton pardon !"

Jésus se penche et dépose un baiser sur son front. L'homme jette ses bras autour de son cou et la tête penchée sur l'épaule de Jésus, il pleure et raconte, il voudrait raconter comment ils l'avaient suggestionné pour le pousser au crime. Mais Jésus le lui défend en disant : "Tais-toi !

Tais-toi ! Je n'ignore rien. Quand tu es entré je t'ai reconnu, et pour ce que tu étais et pour ce que tu voulais faire. J'aurais pu m'éloigner de là et m'enfuir. Je suis resté pour te sauver. Tu l'es. Le passé est mort. Ne le rappelle pas."

"Mais... tu te fies ainsi ? Et si je péchais de nouveau ?"

"Non. Tu ne pécheras pas de nouveau. Je le sais. Tu es guéri."

"Oui, je le suis. Mais eux sont si rusés. Ne me renvoie pas à eux."

"Et où veux-tu aller, et qu'eux n'y soient pas ?"

"Avec Toi, à Éphraïm. Si tu vois mon cœur, tu verras que ce n'est pas un piège que je te tends, mais seulement une prière pour que tu me protèges."

"Je le sais. Viens, mais je t'avertis que là se trouve Judas de Kériot, vendu au Sanhédrin et traître du Christ."

"Divine Miséricorde ! Cela aussi, tu le sais ? !" Sa stupeur est à son comble.

"Je sais tout. Lui croit que je ne sais pas, mais je sais tout. Et je sais aussi que tu es si bien converti que tu ne parleras pas à Judas, ni à aucun autre de ceci. Mais pense à cela : si Judas est capable de trahir son Maître, que ne saura-t-il pas faire pour te nuire ?"

L'homme réfléchit longuement, puis il dit : "Peu importe ! Si tu ne me chasses pas je reste avec Toi, au moins pour quelque temps. Jusqu'à Pâque, jusqu'à ce que tu te réunisses à tes disciples. Je m'unirai à eux. Oh ! s'il est vrai que tu m'as pardonné, ne me chasse pas !"

"Je ne te chasse pas. Maintenant, allons sur ces feuilles pour attendre le matin et à l'aube nous irons à Éphraïm. Nous dirons que le hasard nous a réunis et que tu es venu parmi nous. C'est la vérité."

"Oui, c'est la vérité. À l'aube mes vêtements seront secs et je te rendrai les tiens..."

"Non. Laisse ici ces vêtements. Un symbole. L'homme qui se dépouille de son passé et revêt une nouvelle tenue. La mère de Samuel l'ancien a chanté dans sa joie : "Le Seigneur fait mourir et fait vivre, Il conduit au séjour des morts et en fait revenir". Tu es mort et revenu à la vie. Tu viens du séjour des morts vers la vraie Vie. Laisse les vêtements qui ont subi le contact du tombeau rempli de pourriture. Et vis ! Vis pour ta vraie gloire : servir Dieu avec justice, le posséder pour l'éternité."

Ils s'assoient dans le creux où se sont accumulées les feuilles et le silence vient vite car l'homme, fatigué, s'est endormi, la tête appuyée sur l'épaule de Jésus qui prie encore.

... Et c'est une belle matinée de printemps quand ils arrivent, par le sentier du torrent - qui va redevenir limpide après l'averse et dont le courant plus fourni chante plus fort et brille au soleil entre ses rives que la pluie rend toujours luisantes - devant la maison de Marie de Jacob.


Pierre qui est sur le seuil pousse un cri et court à leur rencontre. Il se précipite pour embrasser Jésus qui est tout enveloppé dans son manteau et il dit : "Oh ! mon Maître béni ! Quel triste sabbat tu m'as fait passer ! Je ne me décidais pas à partir sans t'avoir vu. J'aurais été tout perdu toute la semaine si j'étais parti avec l'incertitude au cœur et sans ton adieu !"


*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-022.htm
TOME : 8/22




♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Samuel10
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Dim 10 Aoû 2014 - 7:13

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_75


Ce qui arrive en Galilée et en particulier à Nazareth



"Et moi, je vous dis que vous êtes tous idiots de croire certaines choses. Idiots et ignorants plus que des eunuques qui ne connaissent même pas les règles de l'instinct, mutilés comme ils le sont. Des hommes parcourent les villes en disant anathème de la part du Maître et d'autres portent des ordres qui ne peuvent pas, non, par le vrai Dieu, qui ne peuvent pas venir de Lui ! Vous ne le connaissez pas, moi, je le connais. Et je ne puis croire qu'il ait ainsi changé ! Et qu'ils aillent de tous côtés ! Vous dites que ce sont ses disciples ? Et qui les a jamais vus avec Lui ? Vous dites que des rabbis et des pharisiens ont dit ses péchés ? Et qui les a vus ses péchés ? L'avez-vous jamais entendu parler de choses obscènes ? L'avez-vous jamais vu en état de péché ? Et alors ? Et pouvez-vous penser que s'il était pécheur Dieu Lui ferait faire des œuvres aussi grandes ? Idiots, je vous dis, idiots, retardés, ignorants comme des rustres qui voient pour la première fois un histrion sur un marché et croient vrai ce qu'il représente. Voilà ce que vous êtes. Regardez si ceux qui sont sages et ont l'intelligence ouverte se laissent séduire par les paroles des faux disciples qui sont les vrais ennemis de l'Innocent, de notre Jésus que vous n'êtes pas dignes d'avoir pour fils !

Regardez si Jeanne de Chouza, je dis bien, la femme de l'intendant d'Hérode, la princesse Jeanne, s'éloigne de Marie ! Regardez si... Est-ce que je fais bien de le dire ? Mais oui ! Je fais bien car je ne parle pas pour parler, mais pour vous persuader tous. Avez-vous vu la dernière lune ce char si beau venu dans le village et qui est allé s'arrêter devant la maison de Marie ? Vous savez ? Celui qui avait une capote belle comme une maison. Eh bien, savez-vous qui était à l'intérieur et en est descendu pour se prosterner devant Marie ? Lazare deThéophile, Lazare de Béthanie, comprenez-vous ? Le fils du premier magistrat de Syrie, le noble Théophile, époux d'Euchérie, de la tribu de Juda et de la famille de David ! Le grand ami de Jésus, l'homme le plus riche et le plus instruit d'Israël, aussi bien pour notre histoire que pour celle du monde entier, l'ami des romains, le bienfaiteur de tous les pauvres.


Et enfin,celui qui est ressuscité après quatre jours qu'il était au tombeau. A-t-il par hasard abandonné Jésus pour croire au Sanhédrin ? Vous dites que c'est parce qu'il l'a ressuscité ? Non. C'est parce qu'il sait qui est le Christ qu'est Jésus. Et savez-vous ce qu'il est venu dire à Marie ? De se tenir prête pour que lui l'accompagne en Judée. Comprenez-vous ? Lui, Lazare, comme s'il était le serviteur de Marie ! Moi, je le sais, car j'étais là quand il est entré et l'a saluée en se prosternant par terre sur les pauvres briques de sa petite pièce, lui, vêtu comme Salomon, habitué aux tapis, là, par terre, pour baiser le bord du vêtement de notre Femme et la saluer : "Je te salue, ô Marie, Mère de mon Seigneur. Moi, ton serviteur, le dernier des serviteurs de ton Fils, je viens te parler de Lui et me mettre à ta disposition". Comprenez-vous ? Moi... j'étais tellement ému... que quand il m'a salué moi aussi en m'appelant : "frère dans le Seigneur", je n'ai plus su dire un mot. Mais Lazare a compris, car lui est intelligent. Et il a dormi dans le lit de Joseph en envoyant en avant ses serviteurs pour qu'ils l'attendent àSephoris, car il allait dans ses terres d'Antioche. Et il a dit aux femmes de se tenir prêtes car à la fin de cette lune il passera les prendre pour leur éviter la fatigue du voyage. Et Jeanne se joindra à la caravane avec son char pour conduire les disciples de Capharnaüm et deBethsaïda. Et tout cela ne vous dit rien ?"

Finalement le bon Alphée de Sara reprend son souffle dans le groupe qui est au milieu de la place. Puis Aser et Ismaël, et aussi les deux cousins de Jésus : Simon et Joseph — plus ouvertement Simon et Joseph plus réticent — l'aident en approuvant ce qu'il a dit.
Joseph dit : "Ce n'est pas un bâtard, Jésus. S'il a besoin de faire connaître quelque chose il a ici des parents tout disposés à s'en charger. Et il a des disciples fidèles et puissants, comme Lazare. Lazare n'a pas parlé de ce que disent les autres."

"Et il nous a aussi. Auparavant nous étions des âniers et des ânes comme nos ânes. Mais maintenant nous sommes ses disciples, et pour dire : "Faites ceci ou cela", nous aussi en sommes capables" dit Ismaël.

"Mais la condamnation suspendue ici à la porte de la synagogue, c'est un envoyé du Sanhédrin qui l'a apportée et elle porte le timbre du Temple" objectent certains.

"C'est vrai. Et quoi ? Nous qui sommes connus dans tout Israël pour savoir comprendre ce qu'est vraiment le Sanhédrin et qui pour ce motif sommes considérés comme des gens de rien, croirions-nous qu'en cela seulement le Temple est sage ? Ne connaissons-nous donc plus les scribes et les pharisiens et les chefs des prêtres ?" réplique Alphée.

"C'est vrai. Alphée a raison. J'ai décidé de descendre à Jérusalem pour savoir auprès de vraisamis ce qu'il en est, et j'y irai dès demain" dit Joseph d'Alphée.

"Et tu restes là-bas ?"

"Non. Je reviens pour y descendre ensuite pour la Pâque. Je ne puis rester loin de la maison. C'est une fatigue que je m'impose, mais c'est pour moi un devoir d'y aller. Je suis le chef de famille et c'est sur moi que repose la responsabilité de la présence de Jésus en Judée. J'ai insisté pour qu'il y aille... L'homme peut se tromper dans ses jugements. Je croyais que ce serait un bien pour Lui. Au contraire... Que Dieu me pardonne ! Mais je dois au moins suivre de près les conséquences de mon conseil pour soulager mon Frère" dit Joseph d'Alphée avec son parler lent et hautain.

"Autrefois tu ne parlais pas ainsi. Mais toi aussi tu es séduit par l'amitié des grands. Tes yeux sont remplis de fumée" dit un nazaréen.

"Ce n'est pas l'amitié des grands qui me séduit, ô Éliachim, mais j'y suis poussé par la conduite de mon Frère. Si je me suis trompé et que maintenant je me ravise, je montre que je suis un homme juste, car l'erreur est de l'homme mais l'entêtement est de la bête."

"Et tu dis que Lazare va vraiment venir ? Oh ! nous voulons le voir ! Comment est quelqu'un qui revient de la mort ? Il doit être perdu dans les rêves, comme épouvanté. Que dit-il de son séjour chez les morts ?" demandent plusieurs à Alphée de Sara.

"Il est comme vous et moi : allègre, vif, tranquille. Il ne parle pas de l'autre monde. C'est comme s'il l'ignorait. Mais il se rappelle son agonie."

"Pourquoi ne nous as-tu pas prévenu qu'il était dans le village ?"

"Naturellement ! Pour que vous envahissiez la maison ! Je me suis retiré, moi aussi. Il faut un peu de finesse, eh !?"

"Mais quand il va revenir, ne pourra-t-on pas le voir ? Avertis-nous. Tu seras certainement comme toujours le gardien de la maison de Marie."

"Certainement ! J'ai le privilège d'être près d'elle, mais moi, je n'avertis personne. Agissez par vous-mêmes. Le char se voit et Nazareth n'est pas Antioche, ni non plus Jérusalem, pour que passe inaperçue une masse pareille. Montez la garde et... employez-vous-y. Mais cela est une chose sans importance. Agissez plutôt de manière que sa ville ne passe pour idiote en croyant aux paroles des ennemis de notre Jésus. Ne croyez pas, ne croyez pas ! Ni à qui l'appelle un Satan, ni à ceux qui vous poussent à la révolte en son nom. Vous en auriez du remords un jour. Que si ensuite le reste de la Galilée tombe dans le piège, et croit ce qui n'est pas vrai, tant pis pour elle. Adieu. Je m'en vais car la nuit tombe..." Et il s'en va content d'avoir défendu Jésus.

Les autres restent à discuter. Mais bien qu'ils soient divisés en deux camps, et le plus nombreux est malheureusement celui des crédules, finit par prévaloir l'idée proposée par quelques amis de Jésus d'attendre pour s'agiter et d'accueillir les calomnies et les invites à l'insurrection que le fassent les autres villes galiléennes qui "pour le moment, plus rusées que Nazareth, rient au nez des faux envoyés" dit Aser le disciple

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-023.htm
TOME : 8/ 23





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Nazareth sur la carte
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Message par Maud Lun 11 Aoû 2014 - 6:59

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_76


Ce qui arrive en Samarie et parmi les romaines


La place principale de Sichem. En elle met une note printanière la frondaison nouvelle des arbres qui, en double rangée le long du carré que forment les murs des maisons, la contournent en formant une sorte de galerie. Le soleil joue avec les feuilles tendres des platanes en formant sur le terrain des broderies de lumières et d'ombres. Le bassin, au milieu de la place, est une plaque d'argent sous le soleil.

Des gens parlent ça et là en groupes et discutent de leurs affaires. Quelques-uns, apparemment des étrangers, car tout le monde se demande qui ils sont, entrent dans la place, observent, et accostent le premier groupe qu'ils trouvent. Ils saluent, on les salue, avec étonnement. Mais quand ils disent : "Nous sommes des disciples du Maître de Nazareth", toute défiance tombe et il y a qui va prévenir les autres groupes, alors que ceux qui sont restés disent : "Est-ce Lui qui vous envoie ?"

"C'est Lui. Une mission très secrète. Le Rabbi est en grand danger. Personne ne l'aime plus en Israël et Lui, qui est si bon, dit que vous au moins Lui restiez fidèles."

"Mais c'est ce que nous voulons ! Que devons-nous faire ? Que veut-il de nous ?"

"Oh ! Lui ne veut que l'amour, car il se fie, trop, à la protection de Dieu. Et avec ce que l'on dit de Lui en Israël ! Mais vous ne savez pas qu'on l'accuse de satanisme et d'insurrection. Savez-vous ce que cela veut dire ? Représailles des romains, sur tous. Nous, déjà si malheureux, encore plus frappés ! Et condamnation de la part des saints de notre Temple. Certainement que les romains... même pour votre bien, vous devriez vous agiter, le persuader de se défendre, le défendre et le mettre quasi, sans quasi, dans l'impossibilité qu'on le prenne et de nuire ainsi, sans en avoir la volonté. Persuadez-le de se retirer sur le Garizim. Là où il est, il est encore trop exposé, et il n'apaise pas la colère du Sanhédrin et les soupçons des romains. Le Garizim a bien le droit d'asile ! Inutile de le dire à Lui. Si nous le disions, il nous dirait que nous sommes anathèmes, car nous Lui conseillerions la lâcheté. Mais il n'en est pas ainsi. C'est de l'amour. C'est de la prudence.

Nous ne pouvons pas Lui parler. Mais vous ! Il vous aime. Il a déjà préféré votre région aux autres. Organisez-vous donc pour l'accueillir, car au moins vous saurez avec précision s'il vous aime ou non. S'il devait refuser votre secours, ce serait signe qu'il ne vous aime pas et par conséquent il serait bien qu'il s'en aille ailleurs. C'est que, croyez-le, c'est avec douleur que nous le disons car nous l'aimons : sa présence est un danger pour qui Lui donne l'hospitalité. Mais, voilà, vous êtes meilleurs que tous et vous ne vous souciez pas des dangers. Pourtant il est juste que si vous risquez les représailles des romains, vous le fassiez par échange d'amour. Nous vous conseillons pour le bien de tous."

"Vous parlez bien. Nous ferons ce que vous dites. Nous irons le trouver..."

"Oh ! faites attention ! Qu'il ne s'aperçoive pas que nous vous l'avons suggéré !"

"Ne craignez pas ! Ne craignez pas ! Nous saurons faire. Bien sûr ! Nous ferons voir que les samaritains, que l'on méprise, valent cent, mille juifs et galiléens pour défendre le Christ. Venez. Entrez dans nos maisons, vous, les envoyés du Seigneur. Ce sera comme si Lui entrait ! Il y a si longtemps que la Samarie attend d'être aimée par les serviteurs de Dieu !"

Ils s'éloignent, en encadrant comme en triomphe, ces gens pour lesquels je ne crois pas me tromper en les appelant émissaires du Sanhédrin et ils disent : "Nous voyons qu'il nous aime, car c'est en quelques jours le second groupe de disciples qu'il nous envoie, et nous avons bien fait de traiter les premiers avec amour. C'est bien d'être aussi bons avec Lui à cause des petits enfants de cette femme morte qui était des nôtres ! Lui nous connaît désormais..."
Et ils s'éloignent, heureux.

Éphraïm toute entière s'est déversée dans les rues pour voir le fait insolite d'un défilé de chars romains qui la traversent. Il y a des chars nombreux et des litières couvertes, escortées par des esclaves, précédées et suivies par des légionnaires. Les gens se font des signes entendus et chuchotent. Le défilé, arrivé à la route qui bifurque pour Béthel et Rama, se sépare en deux parties, Restent arrêtés un char et une litière avec une escorte de soldats, et le reste poursuit sa route. Le rideau de la litière s'écarte un instant et une main de femme blanche et ornée de pierres précieuses fait signe de s'approcher au chef des esclaves. L'homme obéit sans parler. Il écoute. Il aborde un groupe de femmes curieuses et demande : "Où est le Rabbi de Nazareth ?"

"Dans cette maison. Mais à cette heure, habituellement, il est près du torrent. Il y a une petite île, là-bas, du côté des saules, là où se trouve le peuplier. Il reste là pour prier des journées entières." L'homme revient et fait son rapport. La litière se remet en route. Le char reste où il est. Les soldats suivent la litière jusqu'au bord du torrent et ils barrent le chemin. La litière s'en va seule le long du cours d'eau jusqu'à la hauteur de la petite île qui, au cours de la saison, est devenue très boisée : c'est un fourré impénétrable de verdure, surmonté par le fût et la chevelure argentée du peuplier. Un ordre, et la litière passe le petit cours d'eau, où entrent les porteurs avec leurs vêtements courts. Claudia Procula en descend avec une affranchie, et Claudia fait signe à un esclave noir qui escorte la litière de la suivre. Les autres reviennent sur la rive.

Claudia, suivie des deux, pénètre dans la toute petite île en se dirigeant vers le peuplier qui domine au centre. Les hautes herbes étouffent le bruit des pas. Elle arrive ainsi là où se trouve Jésus tout absorbé, assis au pied de l'arbre. Elle l'appelle en s'avançant seule alors que d'un geste impérieux elle cloue sur place là où elles sont restées ses deux personnes de confiance.

Jésus lève la tête, et se lève tout de suite en voyant la femme. Il la salue tout en restant pourtant debout contre le tronc du peuplier. Il ne manifeste ni étonnement, ni ennui ou indignation de l'intrusion.

Claudia, après avoir salué, expose tout de suite le sujet : "Maître, il est venu chez moi, ou plutôt chez Ponce, certaines gens... Je ne fais pas de longs discours. Mais puisque je t'admire, je te dis, comme je l'aurais dit à Socrate s'il avait vécu de nos jours, ou à quelque homme vertueux injustement persécuté : "Moi, je n'ai pas beaucoup de pouvoir, mais je ferai ce que je puis". Et pour l'instant je vais écrire où il m'est possible pour qu'on te protège et pour qu'aussi on te rende... puissant. Il y a sur des trônes ou dans de hautes situations tant de gens qui ne les méritent pas..."

"Domina, je ne t'ai pas demandé d'honneurs ni de protections. Que le vrai Dieu te récompense pour ta pensée. Mais donne tes honneurs et ta protection à ceux qui la désirent vivement. Moi je n'y aspire pas."

"Ah ! voilà ! C'est ce que je voulais ! Alors, tu es vraiment le Juste que je pressentais ! Et les autres, tes indignes calomniateurs ! Ils sont venus nous trouver et..."

"Inutile que tu parles, ô domina. Je sais."

"Sais-tu aussi ce que l'on dit : qu'à cause de tes péchés tu as perdu tout pouvoir et que c'est pour cela que tu vis ici, rejeté ?"

"Cela aussi, je le sais. Et je sais que cette dernière chose, tu l'as crue plus facilement que la première, car ta mentalité païenne est capable de discerner la puissance humaine ou la bassesse humaine d'un homme, mais tu ne peux encore comprendre ce que c'est que le pouvoir de l'esprit. Tu es... désillusionnée de tes dieux qui dans vos religions se manifestent en de continuelles oppositions et avec un pouvoir si fragile, sujet à de faciles interdictions à cause des désaccords entre eux. Et tu crois qu'il en est ainsi même du Dieu vrai. Mais il n'en est pas ainsi. Tel j'étais quand tu m'as vu la première fois guérir un lépreux et tel je suis maintenant. Et tel je serai quand je semblerai tout à fait détruit. Celui-ci, c'est ton esclave muet, n'est-ce pas ?"

"Oui, Maître."

"Fais-le avancer."

Claudia pousse un cri, et l'homme s'avance et se prosterne contre le sol entre Jésus et sa maîtresse. Son pauvre cœur de sauvage ne sait qui honorer davantage. Il a peur de se faire punir en vénérant le Christ plus que sa maîtresse, mais malgré cela, en jetant d'abord un regard suppliant vers Claudia, il répète le geste qu'il a fait à Césarée : il prend le pied nu de Jésus dans ses deux grosses mains noires et, se jetant le visage contre le sol, il met le pied sur sa tête.

"Domina, écoute. Selon toi, est-il plus facile de conquérir seul un royaume ou de faire renaître une partie du corps qui n'existe plus ?"

"Un royaume, Maître. La fortune aide les audacieux, mais personne, sauf Toi, ne peut faire renaître un mort et rendre des yeux à un aveugle."

"Et pourquoi ?" . .


"Parce que... Parce que Dieu peut tout faire."

"Alors, pour toi, je suis Dieu ?"

"Oui... ou, du moins, Dieu est avec Toi."

"Est-ce que Dieu peut être avec quelqu'un qui est mauvais ? Je parle du vrai Dieu, non de vos idoles qui sont des délires de celui qui cherche ce dont il sent l'existence sans savoir ce que c'est, et se crée des fantômes pour assouvir son âme."

"Non... dirais-je. Non. Je ne dirais pas. Nos prêtres eux-mêmes perdent leur pouvoir quand ils tombent dans une faute."

"Quel pouvoir ?"

"Mais... celui de lire dans les signes du ciel et dans les réponses des victimes, dans le vol, dans le chant des oiseaux. Tu sais... Les augures, les haruspices..."

"Je sais. Je sais. Eh bien ? Regarde. Et toi lève la tête et ouvre la bouche, ô homme, qu'un cruel pouvoir humain a privé d'un don de Dieu. Et par la volonté du Dieu vrai, unique, Créateur des corps parfaits, aie ce que l'homme t'a enlevé."

Il a mis son doigt blanc dans la bouche ouverte du muet.

L'affranchie curieuse ne sait pas rester là où elle est, et elle s'avance pour regarder. Claudia est toute penchée pour observer.

Jésus enlève son doigt en criant : "Parle, et sers-toi de la partie qui est née de nouveau pour louer le Dieu vrai."

Et à l'improviste, comme une sonnerie de trompette, d'un instrument jusqu'alors muet, répond un cri, guttural, mais net : "Jésus !" et le noir tombe par terre en pleurant de joie et il lèche, il lèche vraiment les pieds nus de Jésus, comme pourrait le faire un chien reconnaissant.
"Ai-je perdu mon pouvoir, domina ? À ceux qui l'insinuent, donne cette réponse. Et toi, lève-toi et sois bon en pensant combien je t'ai aimé. Je t'ai eu dans mon cœur depuis les jours de Césarée. Et avec toi tous tes pareils, regardés comme une marchandise, regardés comme inférieurs à des brutes alors qu'à cause de votre conception vous êtes des hommes et égaux à César, peut-être meilleurs par la volonté de votre cœur... Tu peux te retirer, domina, il n'y a rien d'autre à dire."

"Si. Il y a autre chose. Il y a que j'avais douté... Il y a que moi, avec douleur, je croyais presque à ce que l'on disait de Toi. Et pas seulement moi. Pardonne-nous toutes, moins Valeria, qui a toujours gardé sa conviction et même s'y ancre de plus en plus. Et accepte mon cadeau : l'homme. il ne pourrait plus me servir maintenant qu'il a la parole, et aussi mon argent."

"Non. Ni l'un, ni l'autre."

"Tu ne me pardonnes pas, alors !"

"Je pardonne même à ceux de mon peuple, doublement coupables de ne pas me reconnaître pour ce que je suis. Et ne devrais-je pas vous pardonner à vous, vides comme vous l'êtes de toute connaissance divine ? Voilà : j'ai dit que je n'acceptais pas l'argent et l'homme.

Maintenant je prends l'un et l'autre et avec l'un j'affranchis l'autre. Je te rends ton argent parce que j'achète l'homme et je l'achète pour le rendre à la liberté, pour qu'il aille dans son pays pour dire qu'il est sur la Terre Celui qui aime tous les hommes, qu'il les aime d'autant plus qu'il les voit plus malheureux. Prends ta bourse."

"Non, Maître, elle t'appartient. L'homme est libre aussi. Il est à moi, je te l'ai donné. Tu le libères. Pas besoin d'argent pour cela."

"Et alors... Tu as un nom ?" demande-t-il à l'homme.

"Nous l'appelions Calliste, par dérision. Mais quand il fut pris..."

"Peu importe. Garde ce nom et rends-le vrai en devenant très beau dans ton esprit. Va ! Sois heureux puisque Dieu t'a sauvé."

Aller ! Le noir ne se lasse pas de le baiser et de dire : "Jésus ! Jésus !" et il se met encore le pied de Jésus sur la tête en disant : "Toi, mon seul Maître."

"Moi, ton vrai Père. Domina, tu te chargeras de lui pour qu'il retourne dans son pays. Sers-toi de l'argent pour cela et que le surplus lui soit donné. Adieu, domina, et n'accueille plus jamais les voix des ténèbres. Sois juste et sache me connaître. Adieu, Calliste. Adieu, femme."

Et Jésus met fin à l'entretien et passe en sautant au-delà du torrent, du côté opposé à celui où est arrêtée la litière, et il s'enfonce dans les buissons, les saules et les roseaux.

Claudia rappelle les porteurs et pensive remonte dans la litière. Mais si elle garde le silence, l'affranchie et l'esclave affranchi parlent pour dix, et les légionnaires eux-mêmes perdent leur allure de statues devant le prodige d'une langue qui est née de nouveau. Claudia est trop pensive pour commander le silence. À moitié allongée dans la litière, le coude appuyé sur les oreillers, la tête appuyée sur sa main, elle n'entend rien. Elle est absorbée. Elle ne s'aperçoit même pas que l'affranchie n'est pas avec elle, mais parle comme une pie avec les porteurs alors que Calliste parle avec les légionnaires qui, s'ils gardent leurs rangs, ne gardent plus le silence. L'émotion est trop grande pour qu'ils le fassent !

En refaisant le chemin, ils se trouvent à la bifurcation pour Béthel et Rama. La litière quitte Éphraïm pour se joindre au reste du défilé.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-024.htm
TOME : 8/24
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus




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Message par Maud Mar 12 Aoû 2014 - 7:07

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Jésus et l'homme de Jabnia



Il s'est passé plusieurs jours. Je dis cela car je vois que les grains, qui dans les dernières visions mesuraient à peine un empan, après les dernières pluies et le beau soleil qui leur a succédé, ont beaucoup grandi et se préparent à former des épis. Un vent léger fait onduler les tiges encore tendres des blés. La brise joue avec les frondaisons nouvelles des arbres fruitiers les plus précoces qui, à peine les fleurs sont-elles tombées ou alors que des pétales voltigent et tombent, ont déjà ouvert leurs petites feuilles d'émeraude clair, tendres, brillantes, belles comme tout ce qui est vierge et nouveau. Plus tardives, les vignes sont encore nues et noueuses, mais sur les sarments enchevêtrés, d'un tronc à l'autre, les bourgeons ont déjà rompu la sombre enveloppe qui les enserrait et, encore clos, ils font voir déjà le duvet gris argent, nid des futurs pampres et des vrilles nouvelles. Les festons ligneux et serpentins des vignobles semblent s'assouplir et prendre une grâce nouvelle.

Le soleil, déjà chaud, commence son travail de coloris et de distillation des arômes végétaux, et pendant qu'il peint de teintes plus vives ce qu'hier était encore pâle, il échauffe, et ainsi dégage des sillons, des prés en fleurs, des champs de céréales, des jardins et des vergers, des bosquets, des murs, du linge étendu à sécher, les nuances diverses des odeurs, pour en faire une unique symphonie olfactive qui durera tout l'été pour s'éteindre dans une violente odeur de moût dans les cuves où les raisins pressés se changent en vin . Tout un concert de chants d'oiseaux dans les feuillages, des moutons et des béliers qui brament doucement dans les troupeaux. Des chants d'hommes sur les pentes, les rires des enfants et les sourires des femmes. C'est le printemps. La nature aime, et l'homme jouit de l'amour de la nature qui demain le rendra plus riche, et il jouit de ses amours qui s'allument plus vifs dans ce réveil serein. Plus aimée lui paraît son épouse, plus protecteur paraît l'homme à sa compagne et plus chers à tous les deux les enfants qui, maintenant sourire et travail, seront demain dans la vieillesse, sourire encore et protection pour les vieux qui déclinent.

Jésus passe à travers les champs qui montent et descendent en suivant les dénivellations de la montagne. Il est seul. Vêtu de lin, car il a donné à Samuel son dernier vêtement de laine, mais avec un léger manteau d'un bleu plutôt vif, jeté sur une seule épaule puis mollement enroulé sur le corps et qu'il retient avec son bras sur la poitrine. Le pan jeté sur le bras ondule légèrement sous le vent très doux qui parcourt la terre et sur sa tête ondule sa chevelure qui brille au soleil. Il passe, et là où il y a des enfants, il se penche pour caresser les petites têtes innocentes et écouter leurs petites confidences, pour admirer ce qu'ils accourent pour Lui montrer comme si c'était un trésor.

Une fillette qui trébuche encore en courant, tant elle est petite, et s'empêtre dans une robe trop longue pour elle qu'elle a héritée, peut-être d'un petit frère un peu plus âgé, s'amène. C'est tout un sourire qui éclaire ses yeux et découvre les petites incisives entre ses lèvres rosés. Elle tient un bouquet de marguerites, un gros bouquet dans ses deux mains, autant que peuvent en tenir des menottes si tendres et si petites, et elle lève son trophée en disant : "Tiens ! C'est pour Toi. Pour maman, ce sera après. Un baiser, ici !" et elle frappe avec ses menottes, désormais libérées du bouquet que Jésus a pris avec des paroles d'admiration et de remerciements, la petite bouche. Elle se tient, la tête renversée, se tendant sur ses pieds déchaussés jusqu'à en perdre presque l'équilibre, dans la vaine tentative d'allonger sa minuscule personne jusqu'au visage de Jésus. Il rit en la prenant dans ses bras et va avec elle, accroupie là-haut, comme un oiseau sur un grand arbre, vers un groupe de femmes qui lavent des toiles neuves dans les eaux limpides d'un ruisseau afin de les étendre ensuite pour qu'elles blanchissent au soleil.

Les femmes penchées sur l'eau se redressent pour saluer, et l'une d'elles dit en souriant : "Tamar t'a dérangé... Mais elle est là depuis l'aurore à cueillir des fleurs avec la secrète espérance de te voir passer. Elle ne m'en a pas donné une seule, car elle voulait d'abord te les donner."

"Elles me sont plus chères que les trésors des rois, car elles sont innocentes comme les petits et données par une petite, innocente comme les fleurs." Il donne un baiser à la fillette en la déposant par terre et la salue : "Que vienne à toi la grâce du Seigneur." Il salue les femmes et continue son chemin en saluant les agriculteurs ou les bergers qui le saluent depuis les champs ou les prés.

Il semble se diriger vers en bas, du côté qui mène vers Jéricho, mais ensuite il revient en arrière pour prendre un autre sentier qui monte de nouveau vers les montagnes au nord d'Éphraïm. Ici le sol, bien exposé et à l'abri des vents du nord, a des moissons plus belles. Le sentier entre les deux champs a d'un côté des arbres à fruits à des distances presque régulières et les bourgeons des prochains fruits sont déjà comme autant de perles le long des branches.

Une route qui descend du nord vers le midi coupe le sentier. Ce doit être une route assez importante car, au croisement, elle a une de ces pierres miliaires dont les romains se servent avec une inscription sur la face septentrionale : "Neapoli" [3] et sous ce nom — gravé en grand avec les caractères lapidaires des latins, forts comme eux-mêmes — et en caractères beaucoup plus petits à peine marqués dans le granit : "Sichem"; sur la face occidentale : "Silo-Jérusalem"; et sur le côté tourné vers le midi : "Jéricho". Du côté du levant, il n'y a pas de nom.

Mais on pourrait dire que s'il n'y a pas de nom de ville, il y a un nom de malheur humain. En effet, par terre, entre la pierre miliaire et le fossé qui côtoie la route, comme pour toutes les routes entretenues par les romains, creusé pour l'écoulement des eaux dans les temps de pluies, il y a un homme tout recroquevillé, un paquet de chiffons et d'os, peut-être mort.
Jésus se penche sur lui quand il le découvre au milieu des herbes du bord de la route que les ondées de printemps ont rendues luxuriantes. Il le touche et l'appelle : "Homme, qu'as-tu ?"
Un gémissement Lui répond. Mais le tas de chiffons remue, se tourne, et un visage squelettique, qui pourrait être celui d'un mort, apparaît. Deux yeux fatigués, souffrants et languissants, regardent avec étonnement Celui qui est penché sur sa misère. Il cherche à s'asseoir en s'appuyant au sol avec ses mains squelettiques, mais il est si faible que sans l'aide de Jésus il ne le pourrait pas.

Jésus l'aide en appuyant son dos contre la pierre miliaire et il lui demande : "Qu'as-tu ? Es-tu malade ?"

"Oui." Un "oui" très faible.

"Mais comment as-tu pu te mettre en voyage, tout seul, dans cet état ? N'as-tu personne ?"
L'homme fait signe que si, mais il est trop faible pour répondre.

Jésus regarde autour de Lui. Il n'y a personne dans les champs, c'est un endroit vraiment désert. Au nord, presque au sommet d'une colline, une poignée de maisons; à l'ouest, dans la verdure de la pente qui en gravissant d'autres mamelons se change de champs en prairies et bosquets, il y a des pâtres au milieu d'un troupeau de chèvres agitées. Jésus abaisse de nouveau les yeux sur l'homme. Il lui demande : "Si je t'aidais, te sens-tu capable d'aller à ce village ?"

L'homme secoue la tête et deux larmes coulent sur ses joues si flétries qu'elles en paraissent rugueuses comme s'il était âgé, alors que sa barbe noire montre qu'il est jeune encore. Il rassemble ses forces pour dire : "Ils m'ont chassé... Peur de la lèpre... Je ne suis pas... Et je meurs... de faim." Il meurt de faiblesse. Il se met un doigt dans la bouche et il en sort une bouillie verdâtre : "Regarde... J'ai mastiqué du grain... mais il est encore en herbe."
"Je vais trouver ce berger. Je vais t'apporter du lait tiède. J'aurai vite fait." Et en courant presque, il se dirige là où se trouve le troupeau, à environ deux cents mètres au-dessus de la route.

Il rejoint le berger, lui parle, lui indique où se trouve l'homme. Le berger se tourne pour regarder, indécis, se demandant s'il doit écouter la demande de Jésus. Puis il se décide. Il détache de sa ceinture l'écuelle de bois qu'il porte comme tous les bergers, et il trait une chèvre pour donner une tasse pleine à Jésus, qui descend avec précaution la pente, suivi d'un enfant qui était avec le berger.

Le voici de nouveau près de l'affamé. Il se met à genoux près de lui, lui passe un bras derrière les épaules pour le soutenir et approche le bol, où le lait écume encore, de ses lèvres. Il lui fait boire de petites gorgées, puis il pose le bol sur le sol en disant : "Pour l'instant, c'est assez.Tout en une fois cela te ferait du mal. Laisse ton estomac se ranimer en absorbant le lait que je t'ai donné."

L'homme ne proteste pas. Il ferme les yeux et se tait, observé par l'enfant tout étonné.
Après un moment, Jésus lui offre de nouveau le bol pour qu'il boive plus longuement, et il fait ainsi avec des pauses de plus en plus courtes, jusqu'à ce que le lait soit fini. Il rend le bol à l'enfant et le congédie.

L'homme se ranime lentement. Il cherche avec des mouvements encore incertains à se rendre présentable. Il a un sourire de reconnaissance en regardant Jésus qui s'est assis sur l'herbe près de lui. Il s'excuse : "Je te fais perdre du temps."

"Ne t'afflige pas ! Ce n'est jamais du temps perdu le temps que l'on emploie à aimer ses frères. Quand tu iras mieux, nous parlerons."

"Je vais mieux. La chaleur revient dans mes membres, et la vue... J'ai cru que j'allais mourir ici... Mes pauvres enfants ! J'avais perdu tout espoir... Et jusqu'à présent, j'en avais eu tant !... Si tu n'étais pas venu, Toi, je serais mort... ainsi... sur une route ..."

"Cela aurait été très triste, c'est vrai. Mais le Très-Haut a regardé son fils et l'a secouru. Repose-toi un peu."

L'homme obéit pendant un moment, puis il rouvre les yeux et dit : "Je me sens revivre. Oh ! si je pouvais aller à Éphraïm !"

"Pourquoi ? As-tu là quelqu'un qui t'attend ? Es-tu de là ?"

"Non. Je suis des campagnes de Jabnia, près de la Grande Mer, mais je suis allé en Galilée, le long du rivage, jusqu'à Césarée. Je suis allé ensuite à Nazareth car je suis malade ici (il se frappe l'estomac) d'un mal que personne n'a su guérir et qui m'empêche de travailler la terre. Et je suis veuf avec cinq enfants... Quelqu'un de nos régions, car je suis originaire de Gaza, né d'un père philistin et d'une mère syro-phénicienne. Un des nôtres, qui suivait le Rabbi de Galilée, est venu avec un autre parmi nous, pour nous parler de ce Rabbi. Moi aussi je l'ai entendu et quand je me suis senti si malade, j'ai dit : "Je suis syrien et philistin, une ordure pour Israël. Mais Hermastée disait que le Rabbi de Galilée est bon autant que puissant, et moi, je le crois et je vais le trouver". Et à peine venu un meilleur temps, j'ai laissé les enfants à la mère de ma femme, j'ai rassemblé le peu de ressources que j'avais, car la maladie en avait absorbé beaucoup, et je suis venu pour chercher le Rabbi. Mais l'argent s'épuise vite en voyage, surtout quand on ne peut pas manger de tout... et séjourner dans les auberges quand les douleurs m'empêchaient de marcher.

À Sephoris j'ai vendu mon âne car je n'avais plus d'argent pour moi et pour donner au Rabbi ce qui Lui est dû. Je pensais qu'une fois guéri, j'aurais pu manger de tout en route et revenir bientôt à la maison et là, par le travail dans mes champs et d'autres, refaire ma situation... Mais le Rabbi n'est pas à Nazareth, ni à Capharnaüm. Sa Mère me l'a dit. Elle m'a dit : "Il est en Judée. Cherche-le chez Joseph deSephoris à Bézéta ou au Gethsémani. Ils sauront te dire où il est". Je suis revenu en arrière à pied. Le mal grandissait et l'argent diminuait. À Jérusalem, où l'on m'avait envoyé, j'ai trouvé des hommes mais pas le Rabbi. Ils m'ont dit : "Oh ! ils l'ont chassé depuis longtemps. Il est maudit par le Sanhédrin. Il s'est enfui, nous ne savons où". Moi... je me suis senti mourir... comme aujourd'hui. Et même plus qu'aujourd'hui. Je suis allé demander à des centaines de gens à travers la ville et dans les campagnes. Personne ne savait. Certains pleuraient avec moi. Plusieurs m'ont frappé.

Puis un jour que je m'étais mis à mendier en dehors des murs du Temple, j'ai entendu deux pharisiens qui disaient : "Maintenant que l'on sait que Jésus de Nazareth est à Éphraïm..." Je n'ai pas perdu de temps et, faible comme j'étais, je suis venu jusqu'ici en mendiant mon pain, de plus en plus déchiré et de plus en plus malade. Et n'étant pas au courant, je me suis trompé de route... Aujourd'hui je viens d'ici, de ce village. Il y avait deux jours que je ne mangeais que du fenouil sauvage et que je mâchais de la chicorée et du grain en herbe. Ils m'ont cru lépreux à cause de ma pâleur et m'ont chassé à coups de pierres. Je ne demandais que du pain et que l'on m'indique la route pour Éphraïm... Je suis tombé ici... Mais je voudrais aller à Éphraïm. Je suis si près du but ! Peut-il se faire que je ne l'atteigne pas ? Je crois au Rabbi. Je ne suis pas Israélite, mais Hermastée ne l'était pas non plus, et Lui l'aimait pareillement. Est-il possible que le Dieu d'Israël appesantisse sa main sur moi pour se venger des fautes de ceux qui m'ont engendré ?"

"Le Dieu vrai est le Père des hommes, juste, mais bon. Il récompense celui qui a la foi et ne fait pas payer aux innocents des fautes qui ne sont pas les leurs. Mais pourquoi as-tu dit que quand tu as entendu dire que la demeure du Rabbi était inconnue, tu t'es senti mourir plus qu'aujourd'hui ?"

"C'est parce que j'ai dit : "Je l'ai perdu avant de l'avoir trouvé"."

"Ah ! à cause de ta santé !"

"Non. Pas pour cela seulement. Mais parce que Hermastée disait de Lui certaines choses, et il me semblait que si je l'avais connu, je n'aurais plus été une ordure."

"Tu crois donc que Lui est le Messie ?"

"Je le crois. Je ne sais pas bien ce que c'est que le Messie, mais je crois que le Rabbi de Nazareth est le Fils de Dieu."

Jésus a un sourire tout lumineux quand il demande : "Et es-tu certain que s'il l'est, il va t'exaucer toi, incirconcis ?"

"J'en suis certain car Hermastée le disait. Il disait : "Lui est le Sauveur de tous. Pour Lui, il n'est pas question d'hébreux ou d'idolâtres, mais seulement de créatures à sauver, car le Seigneur Dieu i'a envoyé pour cela". Plusieurs riaient. Moi, j'ai cru. Si je peux Lui dire : "Jésus, aie pitié de moi" il m'exaucera. Oh ! si tu es d'Éphraïm, conduis-moi à Lui. Peut-être es-tu un de ses disciples..."

Jésus sourit toujours plus et lui conseille : "Essaie de me demander à Moi, que je te guérisse..."

"Tu es bon, homme. Près de toi, il y a tant de paix. Oui, tu es bon comme... comme le Rabbi Lui-même, et certainement Lui t'aura donné le pouvoir du miracle car pour être bon comme tu l'es, tu ne peux être que l'un de ses disciples. Je les ai tous trouvés bons ceux qui se sont donnés pour tels. Mais qu'il ne soit pas offensant pour Toi, si je te dis que tu pourras même guérir les corps, mais pas les âmes. Et je voudrais que celle-là aussi fût guérie, comme c'est arrivé à Hermastée. Devenir un juste... Et cela, le Rabbi seul peut le faire. Je suis pécheur en plus que d'être malade. Je ne veux pas voir mon corps guéri pour le voir mourir un jour, et l'âme avec lui. Je veux vivre. Hermastée disait que le Rabbi est la Vie de l'âme et que l'âme qui croit en Lui vit pour toujours dans le Royaume de Dieu. Conduis-moi au Rabbi. Sois bon ! Pourquoi souris-tu ? Peut-être penses-tu que je suis audacieux de vouloir la guérison sans pouvoir donner une obole ? Mais une fois guéri je pourrai encore cultiver la terre. J'ai de très beaux fruits. Que le Rabbi vienne à la saison des fruits et je le paierai en Lui donnant l'hospitalité aussi longtemps qu'il voudra."

"Qui t'a dit que le Rabbi veut de l'argent ? Hermastée ?"

"Non. Au contraire, lui disait que le Rabbi a pitié des pauvres et qu'il les secourt les premiers. Mais c'est ce qu'on fait avec tous les médecins et ... et avec tous, en somme."

"Mais pas avec Lui, je te l'assure. Et je te dis que si tu sais pousser ta foi jusqu'à demander ici le miracle, et à le croire possible, tu l'auras."

"Tu dis la vérité ?... En es-tu certain ? Bien sûr, si tu es un de ses disciples, tu ne peux mentir ni te tromper. Et bien que je regrette de ne pas voir le Rabbi... je veux t'obéir... Peut-être Lui, persécuté comme il l'est... ne veut pas qu'on le voie... il ne se fie plus à personne. Il a raison, mais ce ne sera pas nous qui serons sa ruine. Ce seront les vrais hébreux... Pourtant, voilà. Je dis ici (il se met à genoux avec beaucoup de peine) : 'Jésus, Fils de Dieu, aie pitié de moi !' "

"Et qu'il te soit fait comme ta foi le mérite" dit Jésus en faisant son geste de commandement sur les maladies.

L'homme a une sorte d'éblouissement, c'est-à-dire une lumière imprévue. Il comprend — je ne sais si c'est par ouverture de son intelligence ou par une sensation physique, ou par les deux choses en même temps — il comprend qui est Celui qu'il a devant lui et il pousse un cri si aigu que le pâtre, descendu vers la route, peut-être pour voir, hâte sa marche.

L'homme est par terre, le visage dans l'herbe, et le pâtre dit en le montrant avec sa houlette : "Il est mort ? Il faut autre chose que du lait quand quelqu'un est fini !" et il hoche la tête.

L'homme entend et il se dresse debout, fort, en bonne santé. Il crie : "Mort ? Je suis guéri ! Je suis ressuscité. C'est Lui qui l'a fait. Je ne souffre plus de la faim, ni des douleurs de la maladie.

Je suis comme au jour de mes noces ! Oh ! Jésus béni ! Et comment ne t'ai-je pas reconnu plus tôt ?! Ta pitié aurait dû me dire ton nom ! La paix que je sentais près de Toi ! J'ai été sot. Pardonne à ton pauvre serviteur !" et il se jette de nouveau par terre en adorant.

Le pâtre abandonne ses chèvres et s'en va en courant et en sautant vers le petit village.

Jésus s'assoit près de l'homme guéri et lui dit : "Tu m'as parlé d'Hermastée comme d'un mort.

Tu connais donc sa fin. Je ne veux qu'une chose de toi : que tu viennes avec Moi à Éphraïm et que tu racontes sa fin à quelqu'un qui est avec Moi. Puis je t'enverrai à Jéricho chez une femme disciple pour qu'elle t'aide pour le voyage de retour."

"J'irai si tu le veux, mais maintenant que je suis sain je n'ai plus peur de mourir en route. Même l'herbe peut me nourrir et je n'ai pas honte de tendre la main car ce n'est pas d'une manière crapuleuse mais pour une juste fin que j'ai dépensé mon avoir."

"Je le veux. Tu lui diras que tu m'as vu et que je l'attends ici, que désormais elle peut venir et que personne ne l'importunera. Sauras-tu dire cela ?"

"Je le saurai. Ah ! pourquoi te haïssent-ils. Toi, si bon ?"

"Parce que beaucoup d'entre eux ont en eux un esprit qui les y pousse. Allons."
Jésus se met en route pour Éphraïm, et l'homme le suit avec assurance. Seule sa grande maigreur rappelle sa maladie et ses privations passées.

Pendant ce temps du petit village descendent beaucoup de personnes qui crient et gesticulent. Elles appellent Jésus, Lui disent de s'arrêter. Jésus ne les écoute pas, mais au contraire il marche plus vite, et eux le suivent...

Le voilà de nouveau dans le voisinage d'Éphraïm. Les cultivateurs qui se préparent à rentrer dans leurs maisons, car le soleil va se coucher, le saluent en regardant l'homme qui est avec Jésus.

D'un sentier débouche Judas de Kériot. Il sursaute, surpris, en Voyant le Maître. Mais Jésus ne manifeste aucune surprise. Seulement il s'adresse à l'homme et lui dit : "C'est un de mes disciples. Parle-lui d'Hermastée."

"Eh ! c'est vite dit. Il était infatigable pour annoncer le Christ, même après qu'il voulut se séparer de son compagnon pour rester chez nous. Il disait que nous avions plus que tous besoin de te connaître, ô Rabbi, et qu'il voulait te faire connaître à sa patrie, et qu'il serait retourné à Toi quand il aurait proclamé ton Nom dans tous les plus petits villages. Il vivait comme un pénitent. Si par pitié une personne lui donnait un pain, il la bénissait en ton nom. Si on lui jetait des pierres, il se retirait en bénissant aussi, et il se nourrissait de fruits sauvages et de mollusques marins qu'il arrachait des rochers ou tirait du sable. Plusieurs le traitaient de "fou", mais personne au fond ne le haïssait. Tout au plus on le chassait comme s'il était de mauvais augure.

Un jour on l'a trouvé mort sur le chemin, justement près de mon village, sur la route qui entre en Judée, presque à la frontière. On n'a jamais su de quoi il est mort, mais on dit tout bas qu'il a été tué par quelqu'un qui ne voulait pas que l'on prêche le Messie. Il avait une blessure profonde à la tête. On dit qu'il a été renversé par un cheval, mais je n'y crois pas. Il souriait, étendu dans la poussière. Oui, il paraissait sourire aux dernières étoiles de la plus sereine nuit d'elul et au premier soleil du matin. Il fut trouvé par des jardiniers qui allaient, au point du jour, à la ville avec leurs légumes, et ils me l'ont dit quand ils sont passés pour prendre mes concombres. J'ai couru voir : il était dans une grande paix."

"Tu as entendu ?" demande Jésus à Judas.

"J'ai entendu. Mais ne lui avais-tu pas dit qu'il t'aurait servi et qu'il aurait eu une longue vie ?"

"Ce n'est pas exactement cela que j'ai dit. Le temps qui s'est passé offusque ta pensée. Mais ne m'a-t-il pas peut-être servi en évangélisant en pays de mission et n'a-t-il pas eu une longue vie ? Quelle plus longue vie que cette conquête de celui qui meurt au service de Dieu ? Longue et glorieuse."

Judas a ce petit rire étrange qui me choque tellement et il ne réplique rien.

Pendant ce temps ceux du petit village se sont joints à plusieurs d'Éphraïm et parlent avec eux en montrant Jésus.

Jésus commande à Judas : "Accompagne l'homme à la maison et finis de le restaurer. Il partira après le sabbat qui commence déjà."

Judas obéit et Jésus reste seul et il marche lentement en se penchant pour observer les tiges des blés qui commencent à former des épis.

Des hommes d'Éphraïm Lui demandent : "Il est beau ce blé, n'est-ce pas ?"

"Beau, mais pas différent de celui des autres régions."

"Certainement, Maître. C'est toujours du blé ! Et il doit forcément être pareil."

"Vous le dites ? Alors le blé est meilleur que les hommes. En effet, pourvu qu'il soit semé comme il faut, il donne le même fruit ici qu'en Judée ou en Galilée, ou, disons, dans les plaines le long de la Grande Mer. Les hommes au contraire ne donnent pas le même fruit. Et la terre aussi est meilleure que les hommes. Parce que, quand on lui confie une semence, elle est bonne pour elle, sans faire de différence que la semence vienne de la Samarie ou de la Galilée."

"C'est vrai. Mais pourquoi dis-tu que la terre et le blé sont meilleurs que les hommes ?"

"Pourquoi ?... Tout à l'heure, un homme a demandé un pain, par pitié, aux portes d'un village. Et on l'a chassé, les gens, le croyant de quelque endroit de Judée. Chassé à coups de pierres et au cri de "lépreux" qu'on lui attribuait à cause de sa maigreur, mais qui était dit à cause de sa provenance. Et cet homme a failli mourir de faim sur la route. Donc les gens de ce village, ces gens-là qui vous ont envoyé pour m'interroger et qui voudraient venir à la maison où je réside pour voir le miraculé, sont plus mauvais que le blé et la terre parce qu'ils n'ont pas su, bien que je les travaille depuis longtemps, donner le même fruit qu'a donné cet homme qui n'est ni juif, ni samaritain, qui ne m'avait jamais vu ni entendu, mais qui a accueilli les paroles d'un de mes disciples et a cru en Moi sans me connaître. Et parce qu'ils sont plus mauvais que ces terres, puisqu'ils ont repoussé l'homme parce qu'il était d'une autre semence.

Maintenant ils voudraient venir pour satisfaire leur faim de curiosité, eux qui n'ont pas su satisfaire la faim de quelqu'un qui n'en pouvait plus. Dites à ces gens que le Maître ne satisfera pas cette curiosité inutile. Et apprenez tous la grande loi de l'amour, sans laquelle vous ne pourriez jamais me suivre. Ce n'est pas l'amour pour Moi, ce n'est pas cela seulement qui sauvera vos âmes, mais l'amour de ma doctrine. Et ma doctrine enseigne l'amour fraternel sans distinction de race, ni de fortune. Qu'ils s'en aillent donc ces gens au cœur dur qui ont affligé mon cœur, et qu'ils se repentent s'ils veulent que je les aime. Car, rappelez-vous-le tous, si je suis bon je suis juste aussi, si je ne fais pas de différence et si je vous aime autant que les autres de Galilée et de Judée, cela ne doit pas vous rendre sottement orgueilleux d'être des préférés, et la permission de faire le mal en ne craignant pas mes reproches. Je donne des louanges ou je fais des reproches, selon que la justice le veut, à mes parents et à mes apôtres comme à toute autre créature, et dans mes reproches il y a de l'amour. Car je le fais parce que je veux la justice dans les cœurs pour pouvoir récompenser un jour celui qui l'a pratiquée. Allez-le-leur rapporter et que la leçon donne ses fruits en tous."

Jésus s'enveloppe dans son manteau et se dirige rapidement vers Éphraïm en laissant ses interlocuteurs qui s'en vont, plutôt penauds, répéter les paroles du Maître aux gens du petit village qui n'ont pas eu pitié.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-025.htm
TOME : 8/25


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Maud
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mer 13 Aoû 2014 - 6:39

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_79


Jésus, Samuel, Judas et Jean


C'est encore Jésus, qui seul et absorbé, va lentement dans l'épaisseur du bois qui est à l'ouest d'Éphraïm. Du torrent monte le bruissement de l'eau et des arbres descendent des chants d'oiseaux. La lumière du soleil printanier et vif répand sa douceur sous l'enchevêtrement des branches, et la marche est silencieuse sur le tapis d'herbes toutes luxuriantes. Les rayons du soleil dessinent un tapis mobile de disques ou de rayures dorées sur le vert de l'herbe, et quelque fleur encore couverte de rosée, frappée en plein par un disque de lumière alors que tout autour c'est l'ombre, resplendit comme si ses pétales étaient des pierres précieuses.
Jésus monte vers un escarpement qui s'avance comme un balcon au-dessus du vide. Un balcon sur lequel se dresse un chêne colossal et d'où pendent des branches flexibles de mûres sauvages ou d'églantier, de lierre et de chèvrefeuilles qui, ne trouvant pas de place ni d'appui sur l'endroit où ils ont poussé, trop resserré pour leur exubérante vitalité, se renversent dans le vide comme une chevelure ébouriffée et dénouée, et se tendent dans l'espoir de pouvoir s'accrocher à quelque chose.

Voilà Jésus à la hauteur de l'escarpement. Il se dirige vers la pointe la plus avancée, en écartant l'enchevêtrement des buissons. Une bande d'oiseaux s'enfuient dans un frôlement d'ailes avec des cris effrayés. Jésus s'arrête pour observer l'homme qui l'a précédé là-haut. Il est à plat ventre sur l'herbe, presque au bord de l'escarpement, les coudes appuyés au sol, le visage sur les mains, il regarde dans le vide, vers Jérusalem. C'est Samuel, l'ancien élève deJonathas ben Uziel. Il est pensif. Il soupire. Il hoche la tête...

Jésus secoue des branches pour attirer son attention, et comme sa tentative est vaine, il ramasse dans l'herbe une pierre et la fait rouler en bas du sentier. Le bruit de la pierre, qui rebondit sur la pente, secoue le jeune homme qui se tourne surpris en disant : "Qui est ici ?"

"Moi, Samuel. Tu m'as précédé dans un de mes endroits préférés de prière" dit Jésus en se montrant de derrière le tronc puissant du chêne placé à la limite du sentier, et il le fait comme s'il venait d'arriver là.

"Oh ! Maître ! J'en suis désolé... Mais je vais te laisser tout de suite la place libre" dit-il en se levant à la hâte et en ramassant son manteau qu'il avait enlevé pour le mettre sous lui.

"Non. Pourquoi ? Il y a de la place pour deux. L'endroit est si beau ainsi isolé, solitaire, suspendu au-dessus du vide, avec tant de lumière et l'horizon par devant ! Pourquoi veux-tu le quitter ?"

"Mais... pour te laisser prier..."

"Et ne pouvons-nous pas le faire ensemble, ou même méditer, en parlant entre nous, en élevant notre esprit en Dieu et en oubliant les hommes et leurs défauts, en pensant à Dieu notre Père et le bon Père de tous ceux qui le cherchent et l'aiment avec bonne volonté ?"
Samuel fait un geste de surprise quand Jésus dit : "et oublier les hommes et leurs défauts..." mais il ne réplique pas, et retourne s'asseoir.

Jésus s'assoit à côté de lui sur l'herbe et lui dit : "Assois-toi ici et restons ensemble. Regarde comme l'horizon est limpide aujourd'hui. Si nous avions des yeux d'aigles, nous pourrions voir blanchir les villages qui sont sur les sommets des monts qui entourent comme une couronne Jérusalem. Et, peut-être, nous verrions un point resplendissant dans l'air comme une pierre précieuse qui ferait battre notre cœur; les coupoles d'or de la Maison de Dieu... Regarde : là se trouve Béthel. On voit blanchir ses maisons, et là-bas, au-delà de Béthel, se trouve Bérot.

Quelle fourberie subtile celle des anciens habitants de l'endroit et des lieux voisins ! Mais il en est résulté du bien, bien que la tromperie ne soit jamais une arme bonne. Il en est résulté du bien car elle les a mis au service du vrai Dieu. Il convient toujours de perdre les honneurs humains pour acquérir le voisinage du divin, même si les honneurs humains étaient nombreux et de valeur, et le voisinage du divin humble et inconnu. N'est-ce pas ?"

"Oui, Maître, tu parles bien. C'est ce qui est arrivé pour moi."

"Mais tu es triste alors que le changement devrait te rendre heureux. Tu es triste, tu souffres, tu t'isoles, tu regardes vers les lieux que tu as quittés. Tu sembles un oiseau prisonnier qui, serré contre les barreaux de sa prison, regarde avec tant de regret le lieu qu'il a aimé. Je ne te dis pas de ne pas le faire. Tu es libre. Tu peux t'en aller et..."

"Seigneur, Judas t'a peut-être parlé mal de moi pour que tu me parles ainsi ?"

"Non. Judas ne m'a pas parlé. Ce n'est pas à Moi qu'il a parlé. Mais à toi, oui. Et c'est pour cela que tu es triste et c'est pour cela que tu t'isoles découragé."

"Seigneur, si tu sais ces choses sans que personne ne te les ait dites, tu sauras aussi alors que ce n'est pas par désir de te quitter, par repentir de m'être converti, par nostalgie du passé... ni non plus par peur des hommes, de cette peur de leurs châtiments que l'on voudrait m'insinuer, que je suis triste. Je regardais là-bas, c'est vrai. Je regardais vers Jérusalem, mais pas par un désir d'y retourner, je dis d'y retourner comme j'étais auparavant. Parce que, d'y retourner comme Israélite qui aime à entrer dans la Maison de Dieu et à adorer le Très-Haut, j'en ai certainement le désir, comme nous tous, et je ne crois pas que tu puisses me le reprocher."

"Moi, tout le premier, dans ma double Nature, je désire cet autel, et je voudrais le voir entouré de sainteté comme il convient. Comme Fils de Dieu, tout ce qui est pour Lui honneur a pour Moi une voix pleine de douceur, et comme Fils de l'homme, comme Israélite, et par conséquent Fils de la Loi, je vois le Temple et l'autel comme le lieu le plus sacré d'Israël, celui où notre humanité peut s'approcher du Divin et se parfumer dans l'atmosphère qui entoure le trône de Dieu. Je ne supprime pas la Loi, Samuel. Elle m'est sacrée parce que donnée par mon Père. Je la perfectionne et j'y mets des parties nouvelles. Comme Fils de Dieu, je puis le faire. C'est pour cela que le Père m'a envoyé. Je viens fonder le Temple spirituel de mon Église, et contre ce Temple ni hommes ni démons ne prévaudront .

Mais les tables de la Loi y auront une place d'honneur, car elles sont éternelles, parfaites, intouchables. Le "ne pas faire tel ou tel péché" contenu dans ces tables, qui contiennent dans leurs brièveté lapidaire tout ce qu'il faut pour être juste aux yeux de Dieu, n'est pas supprimé par ma parole. Au contraire, je vous dis Moi aussi ces dix commandements. Seulement je vous dis de les observer avec perfection, c'est-à-dire pas par peur de la colère de Dieu contre ses transgresseurs, mais par amour pour votre Dieu qui est Père. Je viens mettre votre main de fils dans celle de votre Père. Combien il y a de siècles que ces mains sont séparées ! Le châtiment séparait et la Faute séparait. Une fois venu le Rédempteur, voilà que le péché va être annulé. Les barrières tombent, vous êtes de nouveau les fils de Dieu."

"C'est vrai. Tu es bon et tu réconfortes, toujours. Et tu sais. Je ne te dirai donc pas mon angoisse. Mais je te demande : pourquoi les hommes sont-ils si pervers, et si fous et si sots ? Comment, quels procédés ont-ils pour pouvoir si diaboliquement suggérer le mal ? Et nous, comment sommes-nous aveugles au point de ne pas voir la réalité et de croire à leurs mensonges ? Et comment pouvons-nous devenir de tels démons ? Et le rester quand on est près de Toi ? Je regardais là-bas, et je pensais... Oui, je pensais aux nombreux ruisseaux de poison qui sortent de là pour troubler les fils d'Israël. Je me demandais comment la sagesse des rabbis peut s'allier à tant de perversité qui altère les choses pour induire en erreur. Je pensais, surtout cela, parce que..." Samuel, qui avait parlé avec fougue, s'arrête et baisse la tête.

Jésus termine la phrase : "... parce que Judas, mon apôtre, est ce qu'il est, et donne de la douleur à Moi, et à ceux qui m'entourent ou viennent à Moi, comme tu es venu. Je le sais. Judas essaie de t'éloigner d'ici et t'adresse des insinuations et des railleries..."

"Et pas à moi seul. Oui. Il m'a empoisonné ma joie d'être dans la justice. Il me l'empoisonne avec tant d'art que je pense être ici comme un traître pour Toi et pour moi. Pour moi, parce que j'ai l'illusion d'être meilleur alors que je serai cause de ta ruine. En effet je ne me connais pas encore... et je pourrais, en rencontrant ceux du Temple, renoncer à ma résolution et être... Oh ! si je l'avais fait alors, j'aurais eu l'excuse de ne pas te connaître pour ce que tu es, car de Toi, je savais ce qu'on me disait, pour faire de moi un maudit.

Mais si je le faisais maintenant ! Quelle sera la malédiction de celui qui trahira le Fils de Dieu ! J'étais ici... pensif, oui. Je me demandais où fuir pour me sauver de moi-même et d'eux. Je pensais fuir en quelque lieu lointain pour me joindre à ceux de la Diaspora... Au loin, au loin, pour empêcher le démon de me faire pécher... Il a raison, ton apôtre, de se méfier de moi. Lui me connaît, car il nous connaît tous, en connaissant les chefs... Et il a raison de douter de moi. Quand il dit : "Mais tu ne sais pas que Lui nous le dit, à nous, que nous serons faibles ? Réfléchis : nous qui sommes les apôtres et qui sommes avec Lui depuis si longtemps. Et toi, empoisonné comme tu l'es par le vieil Israël, qui viens juste d'arriver et d'arriver dans des moments qui nous font trembler, tu crois avoir la force de te garder juste ?" il a raison de le dire." L'homme, découragé, baisse la tête.

"Que de tristesses savent se donner les fils de l'homme ! En vérité Satan sait se servir de cette tendance pour les terroriser tout à fait et les séparer de la Joie qui vient à leur rencontre pour les sauver. Car la tristesse de l'esprit, la peur du lendemain, les préoccupations sont toujours des armes que l'homme met dans la main de son adversaire. Celui-ci l'effraie avec les fantômes mêmes que l'homme se crée et il y a d'autres hommes qui, en vérité, s'allient à Satan pour l'aider à effrayer leurs frères.

Mais, mon fils, n'y a-t-il donc pas un Père dans le Ciel ? Un Père qui pourvoit pour ce brin d'herbe dans cette fissure dans la roche — cette fissure remplie de terreau, disposée de façon que l'humidité des rosées en courant sur la pierre lisse se rassemble dans ce petit sillon, pour que le brin d'herbe puisse vivre et fleurir avec cette petite fleurette qui n'est pas moins admirable de beauté que le grand soleil qui resplendit là-haut : l'un et l'autre œuvre parfaite du Créateur — un Père qui, s'il a soin de ce brin d'herbe né sur une roche, ne pourrait pas avoir soin d'un de ses fils qui veut fermement le servir ? Oh ! en vérité Dieu ne déçoit pas les "bons" désirs de l'homme, car c'est Lui-même qui les allume dans vos cœurs.

C'est Lui, prévoyant et sage, qui crée les circonstances pour favoriser le désir de ses fils et non seulement cela, mais pour redresser et perfectionner un désir de l'honorer qui chemine par des voies imparfaites, et l'amener à un désir de l'honorer en suivant des voies justes. Tu étais parmi ceux-ci. Tu croyais, tu voulais, tu étais convaincu d'honorer Dieu en me persécutant. Le Père a vu que dans ton cœur il n'y avait pas de haine pour Dieu, mais une aspiration à rendre gloire à Dieu en enlevant du monde Celui qu'ils t'avaient dit être l'ennemi de Dieu et le corrupteur des âmes. Et alors Il a créé les circonstances pour exaucer ton désir de rendre gloire à ton Seigneur. Et voilà que tu es parmi nous. Et peux-tu penser que Dieu t'abandonne maintenant qu'il t'a amené ici ? C'estseulement si tu l'abandonnes que la force du mal pourra te dominer."

"Moi, je ne le veux pas. Ma volonté est sincère !" proclame l'homme.

"Et alors de quoi te préoccupes-tu ? De la parole d'un homme ? Laisse-le dire. Il pense avec sa pensée. Une pensée d'homme est toujours imparfaite. Mais je vais y pourvoir."

"Je ne veux pas que tu lui fasses des reproches. Il me suffit que tu m'assures que je ne pécherai pas."

"Je te l'assure. Il ne t'arrivera rien parce que tu ne veux pas que cela t'arrive. Car tu vois, mon fils, il ne te servirait pas d'aller dans la Diaspora et même aux extrémités de la Terre pour préserver ton âme de la haine envers le Christ et du châtiment pour cette haine. Beaucoup en Israël ne se souilleront pas matériellement du Crime, mais ils ne seront pas moins coupables que ceux qui me condamneront et exécuteront la sentence. Avec toi, je puis parler de ces choses, car tu sais déjà que tout est disposé dans ce but. Tu sais le nom et la pensée de ceux qui sont les plus acharnés contre Moi. Tu l'as dit : "Judas nous connaît tous car il connaît tous les Chefs".

Mais si lui vous connaît, même vous, inférieurs, car vous êtes comme de petites étoiles en face des planètes plus grandes, vous savez tout autant ce que l'on travaille et comment on travaille et qui travaille, et quels complots on fait, et quels moyens on étudie... Je puis donc parler avec toi. Je ne le pourrais pas avec les autres... Ce que je sais souffrir et compatir, les autres ne le savent pas..."

"Maître, mais comment peux-tu, le sachant, être ainsi... Qui monte par le sentier ?" Samuel se lève pour voir. Il s'écrie : "Judas !"

"Oui, c'est moi. On m'a dit que le Maître est passé par ici, et au contraire, c'est toi que je trouve. Je retourne alors sur mes pas pour te laisser à tes pensées" et il rit de son petit rire qui est plus lugubre que la plainte d'une chouette, tant il manque de sincérité.

"J'y suis Moi aussi. On me demande au village ?" dit Jésus en apparaissant derrière Samuel.

"Oh ! Toi ! Alors tu étais en bonne compagnie, Samuel ! Et Toi aussi, Maître..."

"Oui, elle est toujours bonne la compagnie de quelqu'un qui embrasse la justice. Tu me cherchais pour rester avec Moi, alors. Viens. Il y a de la place pour toi, comme pour Jean s'il était avec toi."

"Il est en bas, occupé avec d'autres pèlerins."

"Alors il faudra que j'aille, s'il y a des pèlerins."

"Non, ils restent toute la journée de demain. Jean est en train de les installer dans nos lits pour leur séjour. Il est heureux de le faire. D'ailleurs tout le rend heureux. Vous vous ressemblez vraiment, et je ne sais pas comment vous faites pour être heureux toujours et pour toutes les choses les plus... affligeantes."

"C'est cette question que j'allais poser quand tu es arrivé !" s'écrie Samuel.

"Ah ! oui ! Toi aussi, alors, tu ne te sens pas heureux, et tu t'étonnes que d'autres dans des conditions encore plus... difficiles que les nôtres, puissent l'être."


"Je ne suis pas malheureux, je ne parle pas pour moi, mais je me demande de quelle source vient la sérénité du Maître, qui n'ignore pas son avenir, et qui pourtant ne se trouble de rien."
"Mais d'une source céleste ! C'est naturel ! Lui est Dieu ! Tu en doutes peut-être ? Un Dieu peut-Il souffrir ? Il est au-dessus de la douleur. L'amour du Père est pour Lui comme... comme un vin enivrant. Et un vin enivrant est pour Lui la conviction que ses actions... sont le salut du monde. Et puis... Lui peut-il avoir les réactions physiques que nous, humbles hommes, avons ? Cela est contraire au bon sens. Si Adam innocent ne connaissait de douleurs d'aucune espèce, et ne les aurait jamais connues s'il était resté innocent, Jésus le... Super-innocent, la créature... je ne sais comment la nommer : incréée puisqu'elle est Dieu, ou créée puisqu'elle a des parents... oh ! que de "pourquoi" insolubles pour ceux de l'avenir, mon Maître ! Si Adam fut exempt de la douleur à cause de son innocence, peut-on peut-être s'imaginer que Jésus ait à souffrir ?"

Jésus reste la tête inclinée. Il s'est assis de nouveau sur l'herbe. Ses cheveux voilent son visage. Je ne vois donc pas son expression.

Samuel, debout, en face de Judas lui aussi debout, réplique :
"Mais s'il doit être le Rédempteur, il doit réellement souffrir. Tu ne te rappelles pas David et Isaïe ?"

"Je me les rappelle ! Je me les rappelle ! Mais eux, tout en voyant la figure du Rédempteur, ne voyaient pas le secours immatériel que le Rédempteur aurait eu pour être... disons : torturé, sans ressentir de douleur."

"Et quel secours ? Une créature pourra aimer la douleur, ou la subir avec résignation, selon sa perfection de justice. Mais elle la sentira toujours. Autrement... si elle ne la sentait pas... ce ne serait pas de la douleur."

"Jésus est Fils de Dieu."

"Mais ce n'est pas un fantôme ! C'est une vraie Chair ! La chair souffre si elle est torturée. C'est un homme véritable ! La pensée de l'homme souffre s'il est offensé et si on fait de lui un objet de mépris."

"Son union avec Dieu élimine en Lui ces choses de l'homme."

Jésus lève la tête et parle : "En vérité je te dis, ô Judas, que je souffre et souffrirai comme tout homme, et plus que tout homme. Mais je puis être heureux malgré cela, de la sainte et spirituelle félicité de ceux qui ont obtenu la libération des tristesses de la Terre parce qu'ils ont embrassé la volonté de Dieu comme leur unique épouse. Je le puis parce que j'ai dépassé le concept humain de la félicité, l'inquiétude de la félicité, telle que les hommes se la représentent. Je ne poursuis pas ce qui, selon l'homme, constitue la félicité; mais je mets ma joie justement en ce qui est à l'opposé de ce que l'homme poursuit comme tel. Les choses que l'homme fuit et méprise, parce qu'il les considère comme un fardeau et une douleur, représentent pour Moi la chose la plus douce. Je ne regarde pas l'heure. Je regarde les conséquences que l'heure peut créer dans l'éternité.

Mon épisode cesse, mais son fruit dure. Ma douleur a une fin, mais les valeurs de cette douleur n'ont pas de fin. Et qu'en ferais-je d'une heure de ce que l'on appelle "être heureux" sur la Terre, une heure atteinte après une poursuite de plusieurs années, de plusieurs lustres, quand ensuite cette heure ne pourrait venir avec Moi dans l'Éternité en tant que joie, quand j'aurais dû en jouir pour Moi seul, sans en faire part à ceux que j'aime ?"

"Mais si tu triomphais, à nous qui te suivons, nous reviendrait une partie de ta félicité !" s'écrie Judas.

"Vous ? Et qu'êtes vous en comparaison des multitudes passées, présentes, à venir, auxquelles ma douleur donnera la joie ? Je vois bien au-delà de la félicité terrestre. Je plonge mon regard au-delà dans le surnaturel. Je vois ma douleur se changer en joie éternelle pour une multitude de créatures. Et j'embrasse la douleur comme la plus grande force pour atteindre la félicité parfaite, qui est celle d'aimer le prochain jusqu'à souffrir pour lui donner la joie. Jusqu'à mourir pour lui."

"Je ne comprends pas cette félicité" proclame Judas.

"Tu n'es pas encore sage, autrement tu la comprendrais."

"Et Jean l'est ? Il est plus ignorant que moi !"

"Humainement, oui. Mais il possède la science de l'amour."

"C'est bien. Mais je ne crois pas que l'amour empêche les bâtons d'être des bâtons et les pierres d'être des pierres et de faire souffrir les chairs qu'ils frappent. Tu dis toujours que t'est chère la douleur, parce qu'elle est pour Toi amour. Mais quand réellement tu seras pris et torturé, si toutefois cela est possible, je ne sais pas si tu auras encore cette pensée. Pense à cela pendant que tu peux fuir la douleur. Elle sera terrible, tu sais ? Si les hommes peuvent te prendre... oh ! ils n'auront pas d'égards pour Toi !"

Jésus le regarde. Il est très pâle. Ses yeux bien ouverts semblent voir, au-delà du visage de Judas, toutes les tortures qui l'attendent, et pourtant dans leur tristesse ils restent pleins de douceur et surtout sereins : deux yeux limpides d'un innocent en paix. Il répond : "Je le sais. Je sais même ce que tu ne sais pas. Mais j'espère dans la miséricorde de Dieu. Lui, qui est miséricordieux pour les pécheurs, usera de miséricorde envers Moi aussi. Je ne Lui demande pas de ne pas souffrir, mais de savoir souffrir. Et maintenant allons. Samuel, précède-nous un peu et avertis Jean que nous serons bientôt au village." Samuel s'incline et s'en va vite.

Jésus commence à descendre. Le sentier est si étroit qu'ils doivent avancer l'un derrière l'autre, mais cela n'empêche pas Judas de parler : "Tu te fies trop à cet homme, Maître. Je t'ai dit ce qu'il est : c'est le plus exalté et le plus exaltable des disciples de Jonathas. De toutes façons, maintenant, c'est trop tard. Tu t'es mis entre ses mains. C'est un espion près de Toi. Et Toi, qui plus d'une fois et les autres plus que Toi, avez pensé que moi je l'étais ! Moi, je ne suis pas un espion."

Jésus s'arrête et se retourne. La douleur et la majesté se fondent dans son visage et dans son regard qui fixe l'apôtre. Il dit : "Non. Pas un espion. Tu es un démon. Tu as dérobé au Serpent sa prérogative de séduire et de tromper pour détacher de Dieu. Ton comportement n'est ni pierre ni bâton, mais il me blesse plus qu'un coup de pierre ou de bâton. Oh ! dans mon atroce souffrance, il n'y aura pas de chose plus grande que ton comportement pour faire souffrir le martyre au Martyr." Jésus se couvre le visage de ses mains, comme pour se cacher l'horreur, et puis se met à descendre en vitesse par le sentier.

Judas crie derrière Lui : "Maître ! Maître ! Pourquoi m'affliges-tu ? Cet homme faux t'a certainement fait des calomnies... Écoute-moi, Maître !"

Jésus ne l'écoute pas. Il court, il vole dans la descente. Il passe sans s'arrêter près des bûcherons ou des bergers qui le saluent. Il passe, salue, mais ne s'arrête pas. Judas se résigne à se taire...

Ils sont presque en bas quand ils croisent Jean qui, avec son visage limpide, qu'éclairé son paisible sourire, est en train de monter vers eux. Il tient par la main un enfant qui babille en suçant un rayon de miel.

"Maître, me voici ! Ce sont des gens de Césarée de Philippe. Ils ont su que tu es ici, et ils sont venus. Mais comme c'est étrange ! Personne n'a parlé, et tout le monde sait où tu es !

Maintenant ils se reposent. Ils sont très fatigués. Je suis allé me faire donner par Dina du lait et du miel, car il y a un malade. Je l'ai mis dans mon lit. Je n'ai pas peur. Et le petit Anna a voulu venir avec moi. Ne le touche pas, Maître, il est plein de miel" et le bon Jean rit, lui qui a sur ses vêtements de nombreuses gouttes de miel et des marques de doigts. Il rit en cherchant à retenir en arrière le petit qui voudrait aller offrir à Jésus son rayon de miel à moitié sucé et qui crie : "Viens. Il y en a des quantités pour Toi !"

"Oui. On est en train d'enlever les rayons chez Dina. Je le savais. Ses abeilles ont essaimé depuis peu" explique Jean.

Ils se remettent en route pour arriver à la première maison où retentit encore le tam-tam dont se servent les apiculteurs, je ne sais pas exactement pour quelle raison. Des grappes d'abeilles — elles semblent de grosses pignes d'un drôle de raisin — pendent à certaines branches, et des hommes les recueillent pour les porter aux nouvelles ruches. Plus loin sortent des ruches déjà installées et y rentrent des abeilles qui bourdonnent inlassablement.

Des hommes saluent et une femme accourt avec de très beaux rayons qu'elle offre à Jésus.

"Pourquoi t'en prives-tu ? Tu en as déjà donné à Jean..."

"Oh ! mes abeilles ont donné une récolte abondante. Cela ne me gêne pas d'en offrir. Pourtant bénis les nouveaux essaims. Regarde : ils sont en train de recueillir le dernier. Cette année nous avons eu deux fois plus de ruches."

Jésus va vers les minuscules cités des abeilles et les bénit une par une, en levant la main au milieu du bourdonnement des ouvrières qui n'arrêtent pas leur travail.

"Elles sont toutes en fête et aussi toutes agitées. Demeure nouvelle..." dit un homme.
"Et de nouvelles noces. On dirait vraiment des femmes qui préparent la fête nuptiale" dit un autre.

"Oui, mais les femmes bavardent plus qu'elles ne travaillent. Celles-ci, au contraire, travaillent en silence, et elles travaillent même les jours de festin de noces. Elles ne cessent de travailler pour faire leur royaume et y entrer leurs richesses" répond un troisième.

"Travailler toujours pour la vertu, c'est permis, c'est même un devoir. Travailler sans arrêt pour le gain, non. Ne peuvent le faire que ceux qui ne savent pas qu'il y a un Dieu qu'il faut honorer en son jour. Travailler en silence, c'est un mérite que tout le monde devrait apprendre des abeilles, car c'est dans le silence que se font saintement les choses saintes. Vous, soyez comme vos abeilles dans la justice : inlassables et silencieux. Dieu voit.

Dieu récompense. Paix à vous" dit Jésus. Et resté seul avec ses apôtres, il dit : "Et c'estspécialement aux ouvriers de Dieu que je propose comme modèles les abeilles. Elles déposent dans le secret de la. ruche le miel formé en leur intérieur par un travail infatigable sur des corolles saines. Leur fatigue ne paraît même pas telle, tant elles travaillent avec bonne volonté, en volant, points d'or, de fleur en fleur, et puis elles entrent chargées de sucs pour élaborer leur miel dans l'intimité des cellules. Il faudrait savoir les imiter. Choisir les enseignements, les doctrines, les amitiés saines, capables de donner des sucs d'une vertu véritable, et puis savoir s'isoler pour élaborer, à partir de ce que l'on a récolté avec entrain, lavertu, la justice, qui est comme le miel tiré de nombreux éléments sains, sans oublier la bonne volonté sans laquelle les sucs pris ça et là ne servent à rien. Savoir méditer humblement, à l'intérieur du cœur, sur ce que nous avons vu de bon et entendu, de bon, sans envie si près des abeilles ouvrières il y a les reines, c'est-à-dire quelqu'un de plus juste que ne l'est celui qui médite. Toutes les abeilles sont nécessaires dans la ruche, aussi bien les ouvrières que les reines. Malheur si toutes étaient des reines; malheur si toutes étaient des ouvrières.

Elles mourraient aussi bien les unes que les autres. Car les reines n'auraient pas de nourriture pour procréer s'il n'y avait pas d'ouvrières, et les ouvrières cesseraient d'exister si les reines ne procréaient pas. Et ne pas envier les reines. Elles ont elles aussi leur fatigue et leur pénitence. Elles ne voient le soleil qu'une seule fois, dans l'unique vol nuptial. Avant et après, il y a seulement et toujours la clôture entre les parois ambrées de la ruche. Chacun a son devoir, et chaque devoir est un choix, et tout choix est une charge en plus d'un honneur. Et les ouvrières ne perdent pas leur temps à des vols sans profit, ou à des vols dangereux sur des fleurs malades et vénéneuses. Elles ne tentent pas l'aventure, elles ne désobéissent pas à leur mission, elles ne se révoltent pas contre la fin pour laquelle elles ont été créées. Oh ! admirables petits êtres ! Que d'enseignements pour les hommes !..."

Jésus se tait, perdu dans sa méditation. Judas se souvient tout à coup qu'il doit aller je ne sais où, et s'en va en courant. Il reste Jésus et Jean. Jean regarde Jésus sans se faire remarquer. Un regard attentif, affectueusement angoissé. Jésus lève la tête et se tourne un peu pour rencontrer le regard du Préféré qui l'étudie. Son visage s'éclaire alors qu'il l'attire à Lui.

Jean, ainsi embrassé, demande tout en marchant : "Judas t'a donné d'autre douleur, n'est-ce pas ? Et il doit avoir troublé aussi Samuel."

"Pourquoi ? T'en a-t-il parlé ?"

"Non. Mais j'ai compris. Il a dit seulement : "Généralement, en vivant près de quelqu'un qui est vraiment bon, on devient bon. Mais Judas ne l'est pas bien qu'il vive avec le Maître depuis trois ans. Il est profondément corrompu et la bonté du Christ ne pénètre pas en lui, tant il est rempli de perversité". Je n'ai su que dire... car c'est vrai... Mais pourquoi est-il ainsi Judas ? Est-il possible qu'il ne change jamais ? Et pourtant... nous avons tous les mêmes leçons... et quand il est venu parmi nous, il n'était pas pire que nous..."

"Mon Jean ! Mon doux enfant !" Jésus dépose un baiser sur son front découvert et si pur, et lui murmure dans les cheveux qui se soulèvent blonds et légers : "Il y a des créatures qui semblent vivre pour détruire le bien qui est en elles. Tu es pêcheur et tu sais comment fait la voile quand le tourbillon la presse. Elle s'abaisse tellement vers l'eau qu'elle renverserait la barque et deviendrait dangereuse pour elle, de sorte que parfois il faut la descendre et se passer d'aile pour aller vers le nid.

Car la voile, prise par le tourbillon, n'est plus une aile mais du lest qui l'amène au fond, à la mort, au lieu de l'amener au salut. Mais si le souffle féroce du tourbillon s'apaise, ne serait-ce que de courts instants, voilà que la voile redevient tout de suite une aile et court rapidement vers le port pour conduire au salut. Il en est ainsi de beaucoup d'âmes. Il suffit que le tourbillon des passions s'apaise pour que l'âme abaissée, et pour ainsi dire submergée par...par ce qui n'est pas bon, recommence à avoir des aspirations vers le Bien."

*Oui, Maître. Mais avec cela... dis-moi... est-ce que Judas arrivera jamais à ton port ?"

"Oh ! ne me fais pas regarder l'avenir de l'un de mes plus chers ! J'ai devant Moi l'avenir de millions d'âmes pour lesquelles sera inutile ma douleur !... J'ai devant Moi toutes les souillures du monde... La nausée me bouleverse. La nausée de tout ce bouillonnement de choses immondes qui comme un fleuve couvre la Terre et la couvrira, avec des aspects divers, mais toujours horribles pour la Perfection, jusqu'à la fin des siècles. Ne me fais pas regarder !

Laisse-moi me désaltérer et me réconforter à une source qui ignore la corruption, et que j'oublie la pourriture vermineuse d'un trop grand nombre, en te regardant toi seul, ma paix !" et il dépose un baiser encore, les yeux dans les yeux, et en plongeant son regard dans les yeux limpides de l'apôtre vierge et affectueux...

Ils entrent dans la maison. Dans la cuisine se trouve Samuel qui casse du bois pour épargner à la petite vieille la fatigue d'allumer le feu.

Jésus s'adresse à la femme; "Les pèlerins dorment-ils ?"

"Je crois que oui. Je n'entends aucun bruit. Maintenant je porte de l'eau aux montures. Elles sont sous le hangar."

"Je vais le faire, mère. Va plutôt chez Rachel. Elle m'a promis du fromage frais. Dis-lui que je la paierai le sabbat" dit Jean, en prenant les deux baquets pleins d'eau.

Restent seuls Jésus et Samuel. Jésus va près de l'homme qui, penché sur le feu, souffle pour allumer la flamme, et il lui met la main sur l'épaule en disant : "Judas nous a interrompu là-haut... Je veux te dire que je t'enverrai avec les apôtres le lendemain du sabbat. Peut-être le préfères-tu..."

"Merci, Maître. Je regrette de perdre ton voisinage, mais chez tes apôtres je te retrouve encore, et je préfère, oui, rester loin de Judas. Je n'osais pas te le demander..."

"C'est bien. C'est décidé. Et aie pitié, pour lui, comme Moi. Et n'en parle pas à Pierre ni à personne..."

"Je sais me taire, Maître."

"Après viendront les disciples. Il y a Hermas et Étienne, et Isaac, deux sages et un juste, et tant d'autres. Tu te trouveras bien, parmi de vrais frères."

"Oui, Maître. Tu comprends et tu secours. Tu es vraiment le bon Maître" et il se penche pour baiser la main de Jésus.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-026.htm
TOME : 8/26
https://lepeupledelapaix.forumactif.com/t18376-oeuvre-de-maria-valtorta-presentation-des-disciples-de-jesus




♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Jysus_12
Maud
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Jeu 14 Aoû 2014 - 7:58

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_80


Arrivée de la Mère et des disciples à Éphraïm


Dans la maison de Marie de Jacob ils sont déjà levés, bien que ce soit juste le point du jour. Je dirais que c'est un jour de sabbat car je vois que sont aussi présents les apôtres qui habituellement sont en mission. On fait de grands préparatifs de feu et d'eau chaude, et on aide Marie à tamiser la farine et à pétrir pour faire du pain. La petite vieille est très agitée, d'une agitation de fillette, et tout en travaillant activement, elle demande à l'un ou l'autre : "Est-ce vraiment pour aujourd'hui ? Et les autres pièces sont-elles prêtes ? Êtes-vous sûrs qu'elles ne sont pas plus de sept ?"

Lui répond pour tous Pierre qui est en train de dépouiller un agneau pour le préparer à la cuisson : "Elles devaient être ici avant le sabbat, mais peut-être les femmes n'étaient pas encore prêtes et ont ainsi pris du retard. Mais aujourd'hui elles vont certainement venir. Ah ! j'en suis heureux ! Le Maître est sorti ? Peut-être est-il allé à leur rencontre..."

"Oui, il est sorti avec Jean et Samuel pour aller vers la route de la Samarie centrale" répondBarthélemy qui sort avec un broc rempli d'eau bouillante.

"Alors on peut être certains qu'elles arrivent. Lui sait toujours tout" professe André.

"Je voudrais savoir pourquoi tu ris ainsi ? Qu'est-ce qu'il y a de risible dans ce que dit mon frère ?" demande Pierre qui a remarqué le petit rire de Judas inoccupé dans son coin.

"Ce n'est pas ton frère qui me fait rire. Vous êtes tous heureux et je puis l'être moi-aussi, et rire même sans raison."

Pierre le regarde en montrant ce qu'il en pense, mais retourne s'occuper de son travail.

"Voilà ! J'ai réussi à trouver une branche fleurie. Ce n'est pas, comme je le voulais, d'un amandier. Mais elle, quand l'amandier est défleuri, prend d'autres branches, et elle se contentera de la mienne" dit le Thaddée qui rentre, dégouttant de rosée comme s'il avait été dans les bois et avec une brassée de branches fleuries. Un miracle de blancheur humide de rosée qui paraît éclairer et embellir la cuisine.

"Oh ! Elles sont belles ! Où les as-tu trouvées ?"

"Chez Noémi. Je savais que son verger est tardif à cause de la tramontane qui le retarde, et je suis monté là-haut."

"C'est pour cela que tu ressembles aussi à un arbre du bois. Les gouttes de rosées brillent dans tes cheveux et ont trempé tes vêtements."

"Le sentier était humide comme s'il avait plu. Ce sont déjà les rosées abondantes des plus beaux mois." Le Thaddée s'en va avec ses fleurs et après un moment appelle son frère pour qu'il l'aide à disposer les fleurs.

"Je viens, moi. Je m'y connais. Femme, n'as-tu pas quelque amphore au col élancé, si possible en terre rouge ?" dit Thomas.

"J'ai ce que tu cherches et aussi d'autres vases... Ceux qui servaient les jours de fêtes... pour les noces de mes enfants ou autre grand motif. Si tu attends que je mette ces fouaces au four, un instant, je viens t'ouvrir le coffre où sont les choses les plus belles... Ah ! il y en a peu désormais, après tant de malheurs ! Mais j'en ai gardé quelques-unes pour... me rappeler... et souffrir, car si ce sont aussi des souvenirs joyeux maintenant ils font pleurer car ils rappellent ce qui est fini."

"Alors il aurait mieux valu que personne ne les demande. Je ne voudrais pas que ce soit comme à Nobé. Tant de préparatifs pour rien..." dit l'Iscariote.

"Si je te dis qu'un groupe de disciples nous ont avertis ? ! Veux-tu qu'ils aient rêvé ? Ils ont parlé avec Lazare. Il les a envoyés en avant exprès. Ils venaient ici pour prévenir qu'avant le sabbat la Mère aurait été ici avec le char de Lazare, et Lazare et les femmes disciples..."

"En attendant, elles ne sont pas venues..."

"Vous qui avez vu cet homme, dites : ne fait-il pas peur ?" demande la petite vieille en s'essuyant les mains à son tablier après avoir confié ses fouaces à Jacques de Zébédée et à André pour qu'ils les portent au four.

"Peur ? Pourquoi ?"

"Eh ! un homme qui revient de chez les morts !" Elle est toute émue.

"Sois tranquille, mère. Il est en tout comme nous" dit Jacques d'Alphée pour la réconforter.

"Fais plutôt attention à ne pas bavarder avec les autres femmes, que l'on n'ait pas tout Éphraïm ici dedans pour nous ennuyer" dit impérieusement l'Iscariote.

"Je n'ai jamais dit de paroles imprudentes depuis que vous êtes ici, ni à ceux de la ville ni aux pèlerins. J'ai préféré passer pour une sotte plutôt que me montrer savante et déranger le Maître et Lui faire du mal. Et je saurai me taire aujourd'hui aussi. Viens, Thomas..." et elle sort pour aller prendre ses trésors cachés.

"La femme est effrayée de penser qu'elle va voir un ressuscité" dit l'Iscariote avec son rire ironique.

"Ce n'est pas la seule. Les disciples m'ont dit qu'à Nazareth ils étaient tout agités et de même à Cana et à Tibériade. Quelqu'un qui revient de la mort, après quatre jours de tombeau, ne se trouve pas aussi facilement que les marguerites au printemps. Nous aussi nous étions bien pâles quand il est sorti du tombeau ! Mais ne pourrais-tu pas travailler au lieu de rester là à faire des commentaires ? Tout le monde travaille, et il y a encore tant à faire... Aujourd'hui qu'on peut le faire, va au marché, et achète ce qu'il faut. Ce que nous avons pris n'est pas suffisant maintenant qu'elles viennent, et nous n'avions pas le temps de retourner à la ville pour faire des achats. Nous aurions été bloqués là où nous étions par le coucher du soleil."

Judas appelle Matthieu qui rentre dans la cuisine bien rangée, et ils sortent ensemble.

Rentre aussi dans la cuisine le Zélote, tout à fait en tenue, et il dit : "Ce Thomas ! C'est vraiment un artiste. Avec un rien il a orné la pièce comme pour un repas de noces. Allez voir."

Tout le monde, excepté Pierre qui est en train de finir son travail, court pour voir. Pierre dit : "J'ai hâte qu'elles soient ici. Peut-être il y aura aussi Margziam. Dans un mois, c'est Pâque, Certainement il sera déjà parti de Capharnaüm ou de Bethsaïda."

"Je suis content que Marie vienne, à cause du Maître. Elle le réconfortera plus que tout le monde, et il en a besoin" lui répond le Zélote.

"Tellement. Mais as-tu remarqué comme Jean aussi est triste ? Je l'ai questionné, mais inutilement. Avec sa douceur, il est plus ferme que nous tous, et s'il ne veut rien dire, rien ne le fait parler. Mais je suis sûr que lui sait quelque chose. On dirait l'ombre du Maître, il le suit toujours. Il le regarde toujours. Et quand il ne se sent pas observé - car alors - il répond à ton regard par un sourire qui rendrait doux même un tigre - quand il ne se sent pas observé, dis-je, son visage devient triste, triste. Essaie de le questionner, toi. Il t'aime et il te sait plus prudent que moi..."

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"Oh ! cela, non. Tu es devenu pour tous un exemple de prudence. On ne reconnaît plus en toi le vieux Simon. Tu es vraiment la pierre qui par sa robustesse et sa carrure compacte nous soutient tous."

"Mais, va donc ! Ne le dis pas ! Je suis un pauvre homme. Certainement... à rester tant d'années avec Lui, on devient un peu comme Lui. Un peu... très peu, mais déjà très différents de ce qu'on était d'abord. Tous, nous le sommes... non, pas tous, malheureusement. Judas est toujours pareil. Ici comme à "La Belle Eau"... [1]

"Et Dieu veuille qu'il soit toujours pareil".

"Quoi ? Que veux-tu dire ?"

"Rien et tout, Simon de Jonas. Si le Maître m'entendait, il me dirait : "Ne juge pas". Mais cela n'est pas juger, c'est craindre. Je crains que Judas soit pire qu'à "La Belle Eau".

"Certainement qu'il l'est, même s'il est encore comme il était alors. Il l'est car il devrait être changé, avoir grandi en justice, et au contraire il est toujours pareil. Il a donc sur le cœur le péché de paresse spirituelle qu'alors il n'avait pas. Parce que les premiers temps... fou, oui, mais plein de bonne volonté... Dis : que te donne à penser que le Maître ait décidé d'envoyerSamuel avec nous et de rassembler tous les disciples, autant qu'on peut en rassembler àJéricho, pour la néoménie de nisan ? [2] Il avait d'abord dit que l'homme resterait ici... et aussi il avait défendu de dire où il était, Lui. Je soupçonne quelque chose..."

"Non. Je vois les choses claires et logiques. Désormais, on ne sait pas par qui et comment, la nouvelle que le Maître est ici est connue dans toute la Palestine. Tu vois que sont venus ici des pèlerins et des disciples de Cédés à Engaddi, de Joppé à Bozra [3]. Et il est par conséquent inutile de garder plus longtemps le secret. En outre la Pâque approche et il est certain que le Maître veut avoir les disciples avec Lui, pour son retour à Jérusalem. LeSanhédrin dit, tu l'as entendu, que Lui est un vaincu et qu'il a perdu tous ses disciples. Et il lui répond en entrant dans la Cité à leur tête..."

"J'ai peur, Simon ! Une grande peur... Tu as entendu, hein ! Tous, même les hérodiens, sont unis contre Lui..."

"Eh ! oui ! Que Dieu nous aide !..."

"Et Samuel, pourquoi l'envoie-t-il avec nous ?"

"Pour le préparer certainement à sa mission. Je ne vois pas de motif de s'agiter... On frappe ! Certainement ce sont les femmes disciples !..."

Pierre se débarrasse de son tablier plein de sang et il suit, en courant, le Zélote qui s'est précipité à la porte de la maison. Débouchent par différentes portes les autres qui sont dans la maison et tous crient : "Les voici ! Les voici !"

Mais une fois la porte ouverte, ils restent si visiblement déçus devant Élise et Nique, que les deux disciples demandent : "Mais il est arrivé peut-être quelque chose ?"

"Non ! Non ! Mais nous croyions que... c'était la Mère et les femmes disciples de Galilée..." dit Pierre.

"Ah ! et vous êtes restés mal ! Mais nous sommes très heureuses au contraire de vous voir et de savoir que Marie ne va pas tarder d'arriver" dit Élise.

"Mal, non... Déçus, voilà ! Mais venez ! Entrez ! La paix soit à nos bonnes sœurs" le Thaddéeles salue au nom de tous.

"Et à vous. Le Maître n'est pas là ?"

"Il est allé avec Jean à la rencontre de Marie. On sait qu'elle vient par la route de Sichem, sur le char de Lazare" explique le Zélote.

Elles entrent dans la maison, pendant qu'André s'occupe de l'ânon d'Élise. Nique est venue à pied. Elles parlent de ce qui arrive à Jérusalem, demandent des nouvelles des amis et des disciples... d'Annalia, de Marie et Marthe, du vieux Jean de Nobé, de Joseph, de Nicodème, de tant d'autres. L'absence de Judas Iscariote permet de parler en paix et ouvertement.

Élise, femme âgée, expérimentée, qui au temps de Nobé a été en contact avec l'Iscariote et le connaît désormais très bien et même "ne l'aime que pour l'amour de Dieu" comme elle dit ouvertement, s'informe même s'il est à la maison, séparé des autres par quelque caprice, et c'est seulement quand elle sait qu'il est dehors pour faire les achats, qu'elle parle de ce qu'elle sait : "qu'à Jérusalem, tout semble calme, que l'on n'interroge même plus les disciples connus, que l'on dit tout bas que cela s'est produit parce que Pilate a fait la grosse voix avec ceux du Sanhédrin, pour leur rappeler que c'est lui seulement qui est chargé de rendre la justice en Palestine et qu'ils la finissent."

"Pourtant, on dit aussi, observe Nique — et c'est précisément Manaën qui le dit et d'autres avec lui, et surtout une femme, car c'est Valeria qui le dit — que Pilate qui est vraiment si las de ces soulèvements qui tiennent le Pays agité et peuvent lui donner des ennuis, est impressionné aussi par l'insistance avec laquelle les juifs lui insinuent que Jésus vise à se proclamer roi [4], que s'il n'y avait pas les rapports concordants et favorables des centurions et surtout l'influence de sa femme, il finirait par punir le Christ, peut-être par l'exil, pour ne plus avoir d'ennuis."

"Et il ne manquerait plus que cela ! Et il est capable de le faire ! Très capable ! C'est pour les romains la peine la plus légère, et la plus employée après la flagellation. Mais pensez-y ! Jésus seul, je ne sais où, et nous dispersés ça et là..." dit le Zélote.

"Oui ! Dispersés ! C'est toi qui le dis. Moi ils ne me dispersent pas. Je le suis..." dit Pierre.

"Oh ! Simon ! Peux-tu avoir l'illusion qu'ils te laisseraient le faire ? Ils t'attachent comme un galérien et t'emmènent où il leur plaît, sur les galères ou dans une de leurs prisons, et toi, ton Maître tu ne peux plus le suivre" lui dit Barthélemy. Pierre s'emmêle les cheveux, perplexe, découragé.

"Nous le dirons à Lazare. Lazare ira ouvertement chez Pilate. Certainement Pilate le verra volontiers, car les gentils aiment voir les êtres extraordinaires..." dit le Zélote.

"Il y aura déjà été avant de partir, et Pilate ne désirera plus le voir !" dit Pierre, abattu.

"Alors il y ira comme fils de Théophile, ou bien il accompagnera sa sœur Marie chez les dames. Elles étaient amies quand... oui, en somme, quand Marie était pécheresse..."

"Savez-vous que Valeria, après que son mari a divorcé, s'est faite prosélyte ? Elle l'a fait pour de vrai. Elle mène une vie de juste qui est un exemple pour beaucoup de nous. Elle a affranchi ses esclaves et les instruit tous dans le vrai Dieu. Elle avait pris une maison dans Sion. Mais maintenant que Claudia est venue, elle est retournée chez elle..."

"Alors !..."

"Non, dit Nique. Elle m'a dit, à moi : "Quand Jeanne vient, je vais avec elle. Mais maintenant je veux persuader Claudia"... Il semble que Claudia n'arrive pas à dépasser les limites de sa croyance dans le Christ. Pour elle c'est un sage. Rien de plus... Il semble même qu'avant de venir en ville, elle a été quelque peu troublée par les bruits qu'on a fait courir et qu'elle a dit, sceptique : "C'est un homme comme nos philosophes, et pas des meilleurs, car sa parole ne correspond pas à sa vie", et qu'elle a eu des... des... en somme elle s'est permis des choses qu'elle avait abandonnées, auparavant."

"Il fallait s'y attendre ! Des âmes païennes ! Hum ! Il peut y en avoir une bonne... Mais les autres !... Ordure ! Ordure !" dit sentencieusement Barthélemy.

"Et Joseph ?" demande le Thaddée.

"Lequel ? Celui de Sephoris ? Il a une peur ! Ah ! Il y a eu votre frère Joseph. Venu et parti tout de suite, en repassant pourtant par Béthanie, pour dire aux sœurs qu'elles empêchent à tout prix le Maître d'aller dans la ville et d'y rester. J'étais là et j'ai entendu. C'est ainsi que j'ai su aussi que Joseph de Sephoris a eu beaucoup d'ennuis, et maintenant il a très peur. Votre frère l'a chargé de se tenir au courant de ce qu'on complote au Temple. Celui de Sephoris peut le savoir par l'intermédiaire de ce parent qui est marié, je ne sais si c'est avec la sœur ou la fille de la sœur de sa femme, et qui est employé au Temple" dit Élise.

"Que de peurs ! Maintenant, quand on va aller à Jérusalem, je vais envoyer mon frère chezAnna. Je pourrais y aller, moi aussi, car je connais bien ce vieux renard. Mais Jean sait mieux s'y prendre. Et Anna l'aimait bien autrefois, quand on écoutait les paroles de ce vieux loup, en croyant que c'était un agneau ! J'enverrai Jean. Lui saura supporter même des insultes, sans réagir. Moi... s'il me disait anathème du Maître, ou même seulement que je suis anathème parce que je le suis, je lui sauterais au cou, je le saisirais et le serrerais ce vieil enflé comme si c'était un filet qui doit perdre son eau. Je lui ferais rendre l'âme sournoise qu'il a dedans ! Même s'il était entouré de tous les soldats du Temple et des prêtres !"

"Oh ! si le Maître t'entendait parler ainsi !" dit André scandalisé.

"C'est bien parce qu'il n'est pas là que je le dis !"

"Tu as raison ! Tu n'es pas seul à le vouloir. Je le veux moi aussi" dit Pierre.

"Et moi aussi, et pas pour Anna seulement" dit le Thaddée.

"Oh ! pour cela, moi j'en... servirais plusieurs. J'ai une longue liste... Ces trois carcasses de Capharnaüm — j'exclus le pharisien Simon car il me paraît passablement bon — ces deux loups d'Esdrelon , et ce vieux paquet d'os de Canania, et puis... un massacre, je vous dis, un massacre à Jérusalem, et en tête de tous Elchias. Je n'en peux plus de voir tous ces serpents aux aguets !" Pierre est furieux.

Le Thaddée, calme en le disant mais encore plus impressionnant dans son calme glacial que s'il était furieux comme Pierre, dit : "Et moi, je t'aiderais. Mais... je commencerais peut-être par enlever les serpents qui sont tout près."

"Qui ? Samuel ?"

"Non, non ! Samuel n'est pas le seul près de nous. Il y en a tant qui montrent un visage et ont une âme différente du visage qu'ils montrent ! Je ne les perds pas de vue, jamais. Je veux être sûr avant d'agir. Mais quand je le serai ! Le sang de David est chaud, et il est chaud celui de Galilée. Je les ai en moi, tous les deux, par la lignée paternelle et maternelle."

"Oh ! Il suffit que tu me le dises, eh ! Je t'aide..." dit Pierre.

"Non. La vengeance du sang regarde les parents, c'est moi qu'elle regarde."

"Mes enfants ! Mes enfants ! Ne parlez pas ainsi ! Ce n'est pas ce qu'enseigne le Maître ! Vous semblez des lionceaux furieux au lieu d'être les agneaux de l'Agneau ! Déposez tant d'esprit de vengeance. Les temps de David sont passés depuis longtemps ! La loi du sang et du talion sont supprimées par le Christ. Il conserve les dix immuables commandements, mais les autres dures lois mosaïques, il les abroge. De Moïse restent les commandements de pitié, d'humanité et de justice résumés et perfectionnés par notre Jésus, dans son plus grand commandement : "Aimer Dieu avec tout soi-même, aimer le prochain comme nous-mêmes, pardonner à ceux qui nous offensent, donner de l'amour à qui nous hait". Oh ! pardonnez-moi, si moi, femme, j'ai osé enseigner à mes frères, et qui sont plus âgés que moi ! Mais je suis une vieille mère, et une mère peut toujours parler. Croyez-moi, mes enfants ! Si vous-mêmes appelez Satan en vous avec la haine pour les ennemis, avec le désir de vengeance, il entrera en vous pour vous corrompre. Ce n'est pas une force, Satan. Croyez-le. La force, c'est Dieu. Satan est faiblesse, il est fardeau, il est torpeur. Vous ne saunez plus remuer un doigt, non contre les ennemis, mais pas même pour donner une caresse à notre Jésus affligé, si vous vous êtes enchaînés par la haine et la vengeance. Oui, mes enfants, tous mes enfants ! Même vous qui avez mon âge, et davantage peut-être. Tous enfants pour une femme qui vous aime, pour une mère qui a retrouvé la joie d'être mère en vous aimant tous comme des fils. Ne m'angoissez pas de nouveau pour avoir perdu de nouveau des fils chers, et pour toujours; car si vous mourez dans la haine ou dans le crime, vous êtes morts pour l'éternité et nous ne pourrons plus nous réunir là-haut, dans la joie, autour de notre commun amour : Jésus. Promettez ici, tout de suite, à moi qui vous en supplie, à une pauvre femme, à une pauvre mère, de ne plus avoir jamais ces pensées. Oh ! c'est jusqu'à votre visage qui est défiguré. Vous me semblez des inconnus, vous n'êtes plus les mêmes ! Comme vous enlaidit la rancœur ! Vous étiez si doux ! Mais qu'arrive-t-il donc ? Écoutez-moi ! Marie vous dirait les mêmes paroles, avec plus de puissance, car c'est Marie; mais il vaut mieux qu'elle ne connaisse pas toute la douleur... Oh ! pauvre Mère ! Mais qu'arrive-t-il ? Dois-je donc vraiment croire que déjà se lève l'heure des ténèbres, l'heure qui engloutira tout le monde, l'heure où Satan sera le roi en tous, sauf chez le Saint, et dévoiera même les saints, même vous, en vous rendant lâches, parjures, cruels comme il l'est ? Oh ! jusqu'à présent, j'ai toujours espéré ! J'ai toujours dit : "Les hommes ne prévaudront pas contre le Christ". Mais maintenant ! Maintenant je crains et je tremble pour la première fois ! Sur ce ciel serein d'adar je vois s'allonger et envahir la grande Ténèbre dont le nom est Lucifer, je la vois vous plonger tous dans la nuit et faire pleuvoir des poisons qui vous rendent malades. Oh ! j'ai peur !" Élise, qui déjà depuis un moment pleurait silencieusement, s'abandonne, la tête sur la table prés de laquelle elle est assise et elle sanglote douloureusement.

Les apôtres se regardent entre eux. Puis, affligés, s'efforcent de la réconforter. Mais elle ne veut pas de leur réconfort et le leur dit : "Une chose, une seule chose a pour moi de la valeur : votre promesse. Pour votre bien ! Pour que Jésus n'ait pas dans ses douleurs la plus grande : celle de vous voir damnés, vous, ses bien-aimés."

"Mais oui, Élise. Si tu le veux ! Ne pleure pas, femme ! Nous te le promettons. Écoute. Nous ne lèverons pas un doigt sur personne. Nous ne regarderons même pas pour ne pas voir. Ne pleure pas ! Ne pleure pas ! Nous pardonnerons à ceux qui nous offensent. Nous aimerons ceux qui nous haïssent ! Allons ! Ne pleure pas."

Élise lève son visage ridé où brillent des larmes, et elle dit : "Rappelez-vous. Vous me l'avez promis ! Répétez votre promesse !"

"Nous te le promettons, femme."

"Mes chers fils ! Maintenant vous me plaisez ! Je vous retrouve bons. Maintenant que mon angoisse est calmée, et que vous êtes redevenus purs, après cet amer levain, préparons-nous à recevoir Marie. Qu'est-ce qu'il faut faire ?" dit-elle en finissant de sécher ses yeux.

"Vraiment... On l'avait fait, comme des hommes. Mais Marie de Jacob nous a aidés. C'est une samaritaine, mais elle est très bonne. Tu vas la voir. Elle est au four à surveiller le pain. Elle est seule. Ses enfants : morts ou oublieux, ses richesses évanouies, et pourtant elle n'a pas de rancune..."

"Ah ! vous voyez ! Vous voyez qu'il y en a qui savent pardonner, même chez les païens, les samaritains ? Et ce doit être terrible, sachez-le, de devoir pardonner à un fils !... Plutôt mort que pécheur ! Ah ! Êtes-vous sûrs que Judas n'est pas là ?"

"S'il n'est pas devenu un oiseau, il ne peut être ici, car les fenêtres sont ouvertes, mais les portes sont fermées, sauf celle-là."

"Alors... Elle a été à Jérusalem, Marie de Simon, avec son parent. Elle est venue pour offrir des sacrifices au Temple, et puis elle est venue chez nous. Elle semble une martyre. Comme elle est affligée ! Elle m'a demandé, elle a demandé à toutes, si nous ne savions rien de son fils. S'il était avec le Maître, s'il y avait toujours été."

"Qu'a-t-elle cette femme ?" demande André, étonné.

"Elle a son fils. Ne te semble-t-il pas que cela suffise ?" demande le Thaddée.

"Je l'ai réconfortée. Elle a voulu revenir au Temple avec nous. Nous y sommes allées toutes unies pour prier... Puis elle est repartie, toujours angoissée. Je lui ai dit : "Si tu restes avec nous, d'ici peu nous allons trouver le Maître. Ton fils est près de Lui". Elle savait déjà que Jésus est ici. Cela s'est su jusqu'aux confins de la Palestine. Elle m'a dit : "Non, non ! Le Maître m'a dit de ne pas être à Jérusalem au printemps. J'obéis, mais j'ai voulu, avant l'époque de son retour, monter au Temple. J'ai tant besoin de Dieu". Et elle a dit une étrange parole... Elle a dit : "Je suis innocente, mais j'ai l'enfer en moi, et j'y suis tellement torturée"... Nous l'avons longuement interrogée, mais elle n'a pas voulu en dire davantage. Ni ses tortures, ni la raison de l'interdiction de Jésus. Elle nous a recommandé de ne rien dire ni à Jésus ni à Judas."

"Pauvre femme ! Elle ne sera donc pas ici à Pâque ?" demande Thomas.

"Elle n'y sera pas."

"Si Jésus le lui a imposé, c'est qu'il a ses raisons... Vous avez entendu, hein ! On sait vraiment partout que Jésus est ici !" dit Pierre.

"Oui. Et celui qui le disait, appelait au rassemblement en son nom pour se soulever "contre les tyrans", disaient certains. Et d'autres que Lui est ici parce qu'il sait qu'il est démasqué..."

"Toujours les mêmes raisons ! Ils doivent avoir dépensé tout l'or du Temple pour envoyer partout leurs émissaires" observe André.

Des coups à la porte.

"Les voici !" disent-ils, et ils courent ouvrir.

Au contraire, c'est Judas avec ses achats. Matthieu le suit. Judas voit Élise et Nique, et il les salue en demandant : "Êtes-vous seules ?"

"Seules. Marie n'est pas encore venue."

"Elle ne vient pas des régions du midi, Marie, et donc elle ne peut être avec vous. Je demandais s'il n'y avait pas Anastasica."

"Non. Elle est restée à Béthsour." [7]

"Pourquoi ? Elle aussi est disciple. Ne sais-tu pas que c'est d'ici que l'on ira pour la Pâque à Jérusalem ? Elle devrait être ici. Si les femmes disciples ne sont pas parfaites et aussi les fidèles, qui le sera ? Qui escortera le Maître, pour détruire la légende que tous l'ont abandonné ?"

"Oh ! pour cela ! Ce ne sera pas une pauvre femme qui comblera les vides ! Les roses sont bien parmi les épines et dans les jardins clos. Je lui sers de mère et je le lui ai imposé."

"Alors, pour la Pâque, elle n'y sera pas ?"

"Elle n'y sera pas."

"Et de deux !" s'écrie Pierre.

"Que dis-tu ? Qui : les deux ?" demande Judas toujours soupçonneux.

"Rien, rien ! Un calcul. On peut compter tant de choses, n'est-ce pas ? Même les... mouches par exemple, qui se posent sur mon agneau dépouillé."

Rentre Marie de Jacob, suivie de Samuel et de Jean qui portent les pains défournés. Élise salue la femme et de même Nique. Et Élise a une douce parole pour mettre tout de suite la femme à son aise : "Tu es entre sœurs, dans la douleur, Marie. Je suis seule car j'ai perdu mon époux et mes fils, et elle est veuve. Nous nous aimerons donc car seul comprend celui qui a pleuré."

Mais pendant ce temps Pierre dit à Jean : "Comment donc es-tu ici ? Et le Maître ?"

"Sur le char, avec sa Mère."

"Et tu ne le disais pas ?"

"Tu ne m'en as pas donné le temps. Elles y sont toutes, mais vous verrez comme est changée Marie de Nazareth ! Elle semble vieillie de plusieurs lustres. Lazare disait qu'elle avait été très angoissée quand on lui a dit que Jésus était réfugié ici."

"Pourquoi le lui a-t-il dit, cet imbécile ? Avant de mourir, il était intelligent. Mais peut-être que dans le tombeau son cerveau s'est écrabouillé et ne s'est pas reconstruit. On ne reste pas mort impunément !..." dit Judas de Kériot, ironique et méprisant.

"Rien de cela. Pour parler, attends de savoir. Lazare de Béthanie l'a dit à Marie quand déjà ils étaient en route car elle s'étonnait de voir Lazare prendre cette route" dit sévèrement Samuel.

"Oui. À son premier passage à Nazareth, il dit seulement : "Je te conduirai chez ton Fils d'ici un mois". Et il ne lui a même pas dit : "Nous allons à Éphraïm" au moment de partir, mais..." dit Jean.

"Tout le monde le sait que Jésus est ici. Elle seule ne le savait pas ?" demande toujours impoliment Judas en interrompant son compagnon.

"Marie le savait. Elle l'avait entendu dire, mais comme un fleuve de toutes sortes de mensonges coulait en charriant de la boue à travers la Palestine, elle n'accueillait comme vraie aucune nouvelle. Elle se consumait en silence, dans la prière. Mais une fois qu'ils furent en voyage, Lazare ayant pris le chemin qui longe le fleuve pour désorienter les nazaréens et tous ceux de Cana, Sephoris, Bethléem de Galilée..."

"Ah ! il y a aussi Noémi avec Myrta et Aurea ?" demande Thomas.

"Non, elles en ont eu l'interdiction de la part de Jésus. C'est Isaac qui a apporté cet ordre quand il est revenu en Galilée."

"Alors... ces femmes aussi ne seront pas avec nous comme l'an passé."

"Elles ne seront pas avec nous."

"Et trois !"

"Ni non plus nos femmes et nos filles. Le Maître le leur a dit avant de quitter la Galilée, ou plutôt il l'a répété. Car ma fille Marianne m'a dit que Jésus l'avait dit dès la dernière Pâque."

"Mais... très bien ! Il y a au moins Jeanne ? Salomé ? Marie d'Alphée ?"

"Oui, et Suzanne."

"Et certainement Margziam... Mais qu'est-ce que ce bruit ?"

"Les chars ! Les chars ! Et tous les nazaréens qui ne se sont pas donnés pour battus et ont suivi Lazare... et ceux de Cana..." répond Jean qui s'éloigne en courant avec les autres.

Par la porte ouverte un spectacle tumultueux se présente à la vue. En plus de Marie assise près de son Fils, et des femmes disciples, de Lazare, de Jeanne qui est sur son char avecMarie et Mathias, Esther et d'autres serviteurs et le fidèle Jonathas, il y a une foule de gens : visages connus, visages inconnus. De Nazareth, de Cana, de Tibériade, de Naïm, d'Endor. Et des samaritains de tous les villages, touchés pendant le voyage et d'autres villages voisins. Et ils se précipitent en avant des chars obstruant le passage de ceux qui veulent sortir et de ceux qui veulent entrer.

"Mais que veulent ces gens ? Pourquoi sont-ils venus ? Comment ont-ils su ?"

"Eh ! ceux de Nazareth étaient aux aguets. Une fois Lazare venu le soir pour repartir au matin, pendant la nuit, ils ont couru dans les villes voisines, et de même ceux de Cana, car Lazare était passé pour prendre Suzanne et se rencontrer avec Jeanne, et ils l'ont suivi et précédé pour voir Jésus et pour voir Lazare. Et ceux de la Samarie ont su aussi et les ont rejoints. Et les voilà tous !..." explique Jean.

"Dis ! Toi qui avais peur que le Maître n'ait pas d'escorte, celle-là te parait-elle suffisante ?" ditPhilippe à l'Iscariote.

"Ils sont venus pour Lazare..."

"Etant donné qu'ils l'ont possédé, ils auraient pu s'en aller. Mais, au contraire, ils sont restés jusqu'ici. C'est signe qu'il y en a encore qui viennent pour le Maître."

"Bien. Ne faisons pas de discours inutiles. Cherchons plutôt à les dégager pour les faire entrer. Allons, mes garçons ! Pour nous remettre à l'exercice ! Il y a si longtemps que nous n'avions pas joué des coudes pour frayer la route au Maître !" et Pierre se met le premier à ouvrir un passage à travers la foule qui crie des hosannas, curieuse, dévouée, bavarde selon les cas. Cela fait, avec l'aide des autres et de disciples nombreux qui, disséminés dans la foule, cherchent à se joindre aux apôtres, il maintient vide un espace pour que les femmes puissent se réfugier dans la maison et de même Jésus et Lazare, et puis il ferme la porte en se retirant le dernier. Il la ferme avec des verrous et des barres, et il envoie les autres pour fermer du côté du jardin. "Oh ! finalement ! La paix soit avec toi, Marie bénie ! Finalement je te revois ! Maintenant tout est beau, puisque tu es avec nous !" dit Pierre qui la salue en se courbant jusqu'à terre pour la saluer. C'est une Marie au visage triste, pâle et fatigué, un visage déjà de l'Affligée.

"Oui, tout maintenant est moins douloureux car je suis près de Lui."

"Je t'avais assuré que je ne te disais que la vérité !" dit Lazare.

"Tu as raison... Mais le soleil s'est obscurci pour moi et toute paix a disparu quand j'ai su que mon Fils était ici... J'ai compris... Oh !" D'autres larmes coulent sur ses joues pâles.

"Ne pleure pas, Maman ! Ne pleure pas ! J'étais ici parmi ces braves gens, près d'une autre Marie qui est une mère..." Jésus la conduit vers une pièce qui ouvre sur le jardin tranquille. Tous les suivent.

Lazare s'excuse : "J'ai bien été obligé de lui dire, car elle connaissait la route et ne comprenait pas pourquoi je prenais ce détour. Elle le croyait avec moi à Béthanie... Et même à Sichem un homme cria : "Nous aussi à Éphraïm, chez le Maître". Aucune excuse ne me fut plus possible... J'espérais aussi prendre les devants en partant de nuit par des chemins insolites. Mais oui ! Ils étaient de garde partout et pendant qu'un groupe me suivait, un autre allait dans les environs pour prévenir."

Marie de Jacob apporte du lait, du miel, du beurre et du pain frais et les offre à Marie pour commencer. Elle regarde Lazare par en dessous, un peu curieuse, un peu craintive, et sa main a une secousse quand en donnant le lait à Lazare, elle effleure sa main, et sa bouche ne peut retenir un "oh !" quand elle le voit manger sa fouace comme tous les autres.

Lazare en rit tout le premier en disant, affable, distingué et plein d'assurance comme tous les hommes de grande naissance : "Oui, femme, je mange tout comme toi et j'aime ton pain et ton lait. Et certainement ton lit me plaira car je sens la lassitude comme je sens la faim." Il se tourne vers tout le monde pour dire : "II y en a beaucoup qui me touchent sans prétexte pour sentir si je suis en chair et en os, si j'ai de la chaleur et si je respire. C'est un léger ennui et une fois ma mission finie, je me retirerai à Béthanie. Près de Toi, Maître, je créerais trop de distractions, J'ai brillé, j'ai témoigné de ta puissance jusqu'en Syrie. Maintenant je m'éclipse. Toi seul dois resplendir dans le ciel du miracle, dans le ciel de Dieu, et en présence des hommes."

Marie, pendant ce temps, dit à la petite vieille : "Tu as été bonne pour mon Fils. Lui m'a dit combien. Permets-moi de t'embrasser pour te dire que je te suis reconnaissante. Je n'ai rien pour t'en récompenser, excepté mon amour. Je suis pauvre, moi aussi... et je puis même dire que je n'ai plus de Fils car Lui appartient à Dieu et à sa mission... Et qu'ainsi il en soit toujours, car saint et juste est tout ce que Dieu veut."

Marie est douce, mais comme elle est brisée déjà... Tous les apôtres la regardent avec pitié au point d'oublier les gens qui manifestent dehors et de demander des nouvelles de leurs parents qui habitent au loin.

Mais Jésus dit : "Je monte sur la terrasse pour congédier les gens et les bénir" et alors Pierre se réveille et il dit : "Mais où est Margziam ? J'ai vu tous les disciples et pas lui."

"Margziam n'est pas ici" répond Salomé, la mère de Jacques et Jean.

"Margziam n'est pas ici ? Pourquoi ? Est-il malade ?"

"Non. Il va bien, et ta femme aussi va bien. Mais Margziam n'est pas ici. Porphyrée ne l'a pas laissé venir."

"Sotte femme ! Dans un mois, c'est Pâque, et lui doit bien venir pour la Pâque ! Elle pouvait le faire venir dès maintenant, donner cette joie au fils et aussi à moi. Mais elle est plus lente à comprendre qu'une brebis et..."

"Jean et Simon de Jonas, et toi Lazare avec Simon le Zélote, venez avec Moi. Vous tous, restez ici où vous êtes, jusqu'à ce que j'aie congédié les gens pour en séparer d'eux les disciples" commande Jésus et il sort avec les quatre, .en fermant la porte.

Il traverse le couloir, la cuisine, sort dans le jardin, suivi de Pierre qui bougonne et des autres. Mais avant de mettre pied sur la terrasse, il s'arrête dans l'escalier, se tourne pour poser une main sur l'épaule de Pierre qui lève son visage mécontent. "Écoute-moi bien, Simon Pierre, et cesse d'accuser Porphyrée et de lui faire des reproches. Elle est innocente. Elle obéit à un ordre de Moi. C'est Moi qui lui ai commandé, avant les Tabernacles, de ne pas faire venir Margziam en Judée..." [8]

"Mais la Pâque, Seigneur ?"

"Je suis le Seigneur, tu le dis. Et comme Seigneur, je puis commander n'importe quelle chose, car tout ordre de Moi est juste. Par conséquent, ne te laisse pas troubler par des scrupules. Te souviens-tu de ce qui est dit dans les Nombres ? "Si quelqu'un de votre nation est immonde à cause d'un mort, ou se trouve en voyage au loin, qu'il fasse la Pâque du Seigneur le quatorzième jour du second mois, vers le soir".

"Mais Margziam n'est pas immonde, j'espère du moins que Porphyrée ne songe pas à mourir justement maintenant, et il n'est pas en voyage..." objecte Pierre.

"Peu importe. Je le veux ainsi. Il y a des choses qui rendent plus immonde qu'un mort. Margziam... Je ne veux pas qu'il se contamine. Laisse-moi faire, Pierre. Je sais. Sois capable d'obéir, comme l'est ton épouse et Margziam lui-même. Nous ferons avec lui la seconde Pâque, au quatorzième jour du second mois. Et nous serons si heureux alors. Je te le promets."

Pierre fait un geste comme pour dire : "Résignons-nous" mais il n'objecte rien.

Le Zélote observe : "II vaut mieux que tu ne continues pas ton compte de ceux qui ne seront pas à Pâque dans la ville !"

"Je n'ai plus envie de compter. Tout cela me fait quelque chose... Un froid... Les autres peuvent-ils savoir ?"

"Non. Je vous ai pris exprès à part."

"Alors... j'ai aussi quelque chose à dire en particulier à Lazare."

"Dis-la. Si je puis je te répondrai" dit Lazare.

"Oh ! même si tu ne me réponds pas, peu m'importe. Il me suffit que tu ailles trouver Pilate — l'idée est de ton ami Simon — et que toi, ainsi en parlant de choses et d'autres, tu lui fasses dire ce qu'il pense faire pour Jésus, en bien ou en mal... Tu sais... adroitement... Car on dit tant de choses !..."

"Je le ferai, dès mon arrivée à Jérusalem. Je passerai par Béthel et Rama plutôt que parJéricho pour aller à Béthanie, et je séjournerai dans mon palais de Sion, et j'irai chez Pilate. Sois tranquille, Pierre, car je serai adroit et sincère."

"Et tu perdras du temps pour rien, ami. Car Pilate — tu le connais comme homme, Moi je le connais comme Dieu — n'est qu'un roseau qui plie du côté opposé à l'ouragan, en essayant de le fuir. Il ne manque jamais de sincérité, car il est toujours convaincu qu'il veut faire et qu'il fait ce qu'il dit à ce moment-là. Mais le moment d'après, par l'effet d'un cri de l'ouragan qui vient d'un autre côté, il oublie — oh ! ce n'est pas qu'il manque à ses promesses et à ses volontés — il oublie, cela seulement, tout ce qu'il voulait auparavant. Il l'oublie parce que le cri d'une volonté plus forte que la sienne lui fait oublier, lui enlève, comme en les soufflant, toutes les pensées qu'un autre cri y avait mises et lui met à l'intérieur les nouvelles. Et puis, au-dessus de toutes les tempêtes aux mille voix, depuis celle de son épouse qui le menace de se séparer s'il ne fait pas ce qu'elle veut, et une fois séparé d'elle adieu toute sa force, toute protection auprès du "divin" César, comme ils disent, tout en étant convaincus que ce César est plus abject qu'eux... Mais eux savent voir l'Idée dans l'homme, et même l'Idée annule l'homme qui la représente, et de l'Idée on ne peut dire qu'elle est immonde : tout citoyen aime, et c'est juste qu'il aime la Patrie, qu'il veuille son triomphe... César, c'est la Patrie... et voilà... que même un misérable est... un grand, grâce à ce qu'il représente... Mais je ne voulais pas parler de César, mais de Pilate ! Je disais, donc, qu'au-dessus de toutes les voix, depuis celle de son épouse jusqu'à celle des foules, il y a la voix, oh ! quelle voix ! de son moi. Du petit moi du petit homme, du moi avide de l'homme avide, du moi orgueilleux de l'homme orgueilleux; cette petitesse, cette avidité, cet orgueil veulent régner pour être grands, veulent régner pour avoir beaucoup d'argent, veulent régner pour pouvoir dominer un tas de sujets que courbe l'obéissance. La haine couve par dessous, mais il ne la voit pas le petit César appelé Pilate, notre petit César... Lui ne voit que les échines courbées qui font semblant d'obéir et de trembler devant lui, ou qui le font réellement. Et à cause de cette voix tempétueuse du moi, lui est disposé à tout. Je dis : à tout, pourvu qu'il continue à être Ponce Pilate, le Proconsul, le serviteur de César, le Dominateur de l'une des si nombreuses régions de l'empire. Et à cause de tout cela, même si maintenant il est mon défenseur, demain il sera mon juge, et inexorable. Toujours indécise est la pensée de l'homme. Souverainement indécise ensuite quand cet homme s'appelle Ponce Pilate. Mais toi, Lazare, tu peux contenter Pierre... Si cela doit le consoler..."



"Consoler non, mais... me tenir plus calme, oui..."

"Et alors contente notre bon Pierre, et va trouver Pilate."

"J'irai, Maître. Mais tu as peint le Proconsul comme aucun historien ou philosophe n'aurait pu le faire. C'est parfait !"

"Je pourrais également peindre tout homme avec son image et son caractère. Mais allons trouver ces gens qui font beaucoup de bruit".

Il monte les dernières marches et se présente. Il lève les bras et dit d'une voix forte : "Hommes de Galilée et de Samarie, mes disciples et ceux qui me suivent. Votre amour, le désir de m'honorer et d'honorer ma Mère et notre ami, en escortant leur char, me dit quelle est votre pensée. Je ne puis que vous bénir pour cette pensée qui est la vôtre. Pourtant, retournez à vos maisons, à vos affaires. Vous de Galilée, allez et dites à ceux qui sont restés que Jésus de Nazareth les bénit. Hommes de Galilée, nous nous verrons pour la Pâque à Jérusalem, où j'entrerai le lendemain du sabbat avant la Pâque. Hommes de Samarie, allez vous aussi et sachez ne pas borner votre amour pour Moi à me suivre et me chercher sur les routes de la Terre, mais sur celles de l'esprit. Allez et que la Lumière brille en vous. Disciples du Maître, séparez-vous des fidèles tout en restant à Éphraïm pour recevoir mes instructions. Allez. Obéissez."

"Il a raison ! Nous le dérangeons. Il veut rester avec sa Mère !" crient les disciples et les nazaréens.

"Nous allons partir, mais auparavant, nous voulons sa promesse : de venir à Sichem avant Pâque. À Sichem ! À Sichem !"

"J'y viendrai. Allez. Je viendrai avant de monter pour la Pâque à Jérusalem."

"N'y va pas ! N'y va pas ! Reste avec nous ! Avec nous ! Nous te défendrons ! Nous te ferons Roi et Pontife ! Eux te haïssent ! Nous, nous t'aimons ! À bas les juifs ! Vive Jésus !"

"Silence ! Ne faites pas ce vacarme ! Ma Mère souffre de ces cris qui peuvent me nuire plus qu'une voix qui me maudirait. Ce n'est pas encore mon heure. Allez. Je passerai par Sichem, mais enlevez de votre cœur la pensée que je puisse, par une basse lâcheté humaine et par une révolte sacrilège contre la volonté de mon Père, ne pas accomplir mon devoir d'israélite, en adorant le vrai Dieu dans l'unique Temple où l'on puisse l'adorer, et de Messie, en prenant la couronne ailleurs qu'à Jérusalem, où je serai oint Roi universel selon la parole et la vérité vue par les grands prophètes."

"À bas ! Il n'y a pas d'autre prophète après Moïse ! Tu es un rêveur."

"Et vous aussi. Êtes-vous libres peut-être ? Non. Comment s'appelle Sichem ? Quel est son nouveau nom? Et comme pour elle, pour beaucoup d'autres villes de Samarie, Judée, Galilée. Car le mangonneau romain nous met tous au même niveau. S'appelle-t-elle peut-être Sichem ? Non. Elle s'appelle Neapolis , comme Betsean s'appelle Scythopolis et beaucoup d'autres villes qui, par la volonté des romains ou celle de leurs vassaux flatteurs, ont pris le nom imposé par la domination ou la flatterie. Et vous, chacun en particulier, vous voudriez être plus qu'une ville, plus que nos maîtres, plus que Dieu ? Non. Rien ne peut changer ce qui a été fixé pour le salut de tous. Moi, je suis la voie droite. Suivez-moi, si vous voulez entrer avec Moi dans le Royaume éternel."

Il est sur le point de se retirer, mais les samaritains font tant de vacarme que les galiléens réagissent, et en même temps accourent hors de la maison dans le jardin et puis sur l'escalier et sur la terrasse ceux qui étaient dans la maison. Apparaît le premier, le visage pâle et triste, angoissé de Marie derrière Jésus et sa Mère l'embrasse et le serre comme si elle voulait le défendre des injures qui montent d'en bas : "Tu nous as trahis ! Tu t'es réfugié chez nous pour nous faire croire que tu nous aimais, alors qu'ensuite tu nous méprises ! Méprisés, nous le serons encore davantage par ta faute !" et cætera.

S'approchent aussi de Jésus les femmes disciples, les apôtres et en dernier, apeurée, Marie de Jacob. Les cris d'en bas expliquent l'origine du tumulte, origines lointaines mais certaines : "Pourquoi nous as-tu envoyé tes disciples pour nous dire que tu es persécuté ?"

"Je n'ai envoyé personne. Voici là-bas ceux de Sichem. Qu'ils s'avancent. Que leur ai-je dit un jour sur la montagne ?"

"C'est vrai. Il nous a dit qu'il ne peut être qu'adorateur dans le Temple tant que le temps nouveau ne sera pas venu pour tous. Maître, nous ne sommes pas coupables, crois-le. Mais eux ont été trompés par de faux envoyés."

"Je le sais. Mais maintenant partez. Je viendrai quand même à Sichem. Je n'ai peur de personne. Mais maintenant allez pour ne pas vous nuire à vous-mêmes et à ceux de votre sang. Voyez-vous là-bas qu'en descendant la route, brillent au soleil les cuirasses des légionnaires ? Certainement ils vous ont suivis à distance en voyant une telle escorte. Ils sont restés dans le bois à attendre. Vos cris maintenant les attirent ici. Partez pour votre bien."

Effectivement, au loin, sur la grande route que l'on voit monter vers les montagnes, celle sur laquelle Jésus trouva l'affamé, on voit briller des clartés mouvantes qui avancent. Les gens se dispersent lentement. Il reste ceux d'Éphraïm, les galiléens, les disciples.

"Allez vous aussi, vous d'Éphraïm, à vos maisons et partez vous de Galilée. Obéissez à celui qui vous aime !"

Eux aussi s'en vont. Il ne reste que les disciples que Jésus ordonne de faire entrer dans la maison et dans le jardin. Pierre avec les autres descend pour ouvrir.

Judas de Kériot ne descend pas. Il rit ! Il rit en disant "Maintenant tu vas voir les "bons samaritains" comme ils vont te haïr ! Pour construire le Royaume, tu disperses les pierres, et les pierres dispersées d'une construction deviennent des armes pour frapper. Tu les as méprisés ! Et eux ne l'oublieront pas."

"Qu'ils me haïssent. Ce n'est pas par peur de leur haine que j'éviterai de faire mon devoir. Viens, Mère. Allons dire aux disciples ce qu'ils doivent faire avant que je ne les congédie" et entre Marie et Lazare, il descend l'escalier pour entrer dans la maison où s'entassent les disciples venus à Éphraïm. Il leur donne l'ordre de se répandre partout pour prévenir tous leurs compagnons d'être à Jéricho pour la néoménie de nisan et d'attendre jusqu'à son arrivée, et de dire aux habitants des endroits par où ils passeront que Lui quittera Éphraïm et de le chercher à Jérusalem pour la Pâque.

Puis il les répartit en groupes de trois et confie à Isaac, Hermas et Étienne, le nouveau disciple Samuel qu'Étienne salue ainsi : "La joie de te voir dans la lumière tempère mon angoisse de voir que tout devient pierre pour le Maître" et Hermas, de son côté, salue ainsi : "Tu as quitté un homme pour un Dieu. Et Dieu maintenant est vraiment avec toi." Isaac, humble et réservé, dit seulement : "La paix soit avec toi, frère."

Une fois offerts le pain et le lait que ceux d'Éphraïm pensent offrir, dans une bonne pensée, les disciples aussi partent et c'est enfin la paix... Mais pendant que l'on prépare l'agneau, Jésus est encore occupé. Il va trouver Lazare et lui dit : "Viens avec Moi le long du torrent."

Lazare obéit avec sa promptitude habituelle.

Ils s'éloignent de la maison d'environ deux cent mètres. Lazare se tait attendant que Jésus parle. Et Jésus parle : "Voilà ce que je voulais te dire. Ma Mère est très abattue : tu le vois. Envoie ici tes sœurs. Moi, en réalité, je vais pousser vers Sichem avec tous les apôtres et les femmes disciples. Mais je les enverrai ensuite en avant, à Béthanie, pendant que je m'arrêterai quelque temps à Jéricho. Je puis encore oser garder avec Moi des femmes ici en Samarie, mais pas ailleurs..."

"Maître ! Tu crains vraiment...Oh ! s'il en est ainsi, pourquoi m'as-tu ressuscité ?"

"Pour avoir un ami."

"Oh !!! Si c'est pour cela, alors, me voici. Toute douleur n'est rien pour moi, si je puis te réconforter par mon amitié."

"Je le sais. Et pour cela, je me sers de toi et je me servirai de toi comme du plus parfait ami."

"Dois-je réellement aller trouver Pilate ?"

"Oui, si tu veux. Mais pour Pierre, pas pour Moi."

"Maître, je te ferai savoir... Quand quittes-tu cet endroit ?"

"D'ici huit jours. J'aurai à peine le temps d'aller où je veux et me trouver ensuite chez toi avant Pâque. Pour me retremper à Béthanie, l'oasis de paix, avant de me plonger dans le tumulte de Jérusalem."

"Tu sais, Maître, que le Sanhédrin est bien décidé à créer les accusations, étant donné qu'il n'y en a pas, pour t'obliger à fuir pour toujours ? Je le sais par le synhédriste Jean, que j'ai rencontré par hasard à Ptolémaïs, heureux du nouveau fils qui va naître bientôt. Il m'a dit : "Je suis affligé de cette décision du Sanhédrin. Car j'aurais voulu que le Maître fût présent à la circoncision du bébé que j'espère être un garçon. Il doit naître dans les premiers jours de tamouz . Mais le Maître sera-t-il encore parmi nous pour ce temps ? Et je voudrais... Que le petit Emmanuel, et ce nom te dit ce que je pense, l'eût pour le bénir à son entrée dans le monde. Car mon fils, bienheureux sera-t-il, n'aura pas à lutter pour croire, comme nous le devons. Il grandira dans le temps messianique, et il lui sera facile d'en accepter l'idée". Jean est arrivé à croire que tu es le Promis."

"Et ce seul, au milieu de tant d'autres, me dédommage de ce que les autres ne font pas. Lazare, saluons-nous ici, dans la paix. Et merci pour tout, mon ami. Tu es un ami véritable. Avec dix qui te ressembleraient, il serait encore doux de vivre au milieu de tant de haine..."

"Maintenant tu as ta Mère, mon Seigneur. Elle vaut dix et cent Lazare. Mais rappelle-toi bien que quelle que soit la chose dont tu peux avoir besoin, s'il m'est possible, je te la procurerai. Commande-moi et je serai ton serviteur, en tout. Je ne serai pas sage, ni saint comme les autres qui t'aiment, mais un autre plus fidèle que moi, en mettant Jean à part, tu n'en pourras pas trouver. Je ne crois pas être orgueilleux en le disant. Et maintenant que nous avons parlé de Toi, je vais te parler de Sintica. Je l'ai vue. Elle est active et sage comme seule une grecque, qui a pu venir à ta suite, peut l'être. Elle souffre d'être au loin, mais elle dit qu'elle est heureuse de préparer ton chemin. Elle espère te voir avant de mourir."

"Elle me verra certainement. Je ne déçois jamais les espérances des justes."

"Elle a une petite école très fréquentée par des fillettes de toutes provenances. Mais le soir, elle prend avec elle quelque pauvre fillette de sang mêlé et n'appartenant donc à aucune religion, et elle les instruit sur Toi. Je lui ai dit : "Pourquoi ne te fais-tu pas prosélyte ? Cela t'aiderait beaucoup". Elle m'a répondu : "Parce que je ne veux pas me consacrer à ceux d'Israël, mais aux autels vides qui attendent un Dieu. Je les prépare à recevoir mon Seigneur. Puis, une fois son Règne établi, j'irai dans ma Patrie, et sous le ciel de l'Hellade, je consumerai ma vie à préparer les cœurs aux maîtres. C'est mon rêve. Mais si je meurs auparavant de maladie ou par la persécution, je m'en irai également heureuse, car ce sera signe que j'ai accompli mon travail et qu'il appelle à Lui sa servante qui l'a aimé dès la première rencontre".

"C'est vrai. Sintica m'a réellement aimé dès la première rencontre."

"Je voulais lui taire à quel point tu es tourmenté. Mais Antioche résonne comme une coquille de tous les bruits du vaste empire de Rome, et donc aussi de ce qui arrive ici. Et Sintica n'ignore pas tes peines, et elle en souffre encore plus d'être au loin. Elle voulait me donner de l'argent. Je l'ai refusé en lui disant de s'en servir pour les fillettes. Mais j'ai pris un couvre-chef qu'elle a tissé avec de la soie de deux grandeurs. C'est ta Mère qui l'a. Sintica a voulu dessiner avec le fil ton histoire et la sienne et celle de Jean d'Endor. Et sais-tu comment ? En tissant tout autour du carré une bordure représentant un agneau qui défend, contre une bande de hyènes, deux colombes. L'une d'elles a les ailes brisées et l'autre a rompu la chaîne qui la tenait attachée. Et l'histoire se poursuit en alternant, jusqu'au vol vers les hauteurs de la colombe aux ailes brisées, et la prison volontaire de l'autre aux pieds de 'agneau. On dirait une de ces histoires que les sculpteurs grecs font avec le marbre sur les festons des temples et sur les stèles de leurs morts, ou encore que les peintres peignent sur les vases. Elle voulait te l'envoyer par un de mes serviteurs. Moi, je l'ai pris."

"Je le porterai parce qu'il vient d'une bonne disciple. Allons vers la maison. Quand comptes-tu partir ?"

"Demain à l'aurore, pour faire reposer les chevaux. Puis je ne m'arrêterai pas jusqu'à Jérusalem et j'irai trouver Pilate. Si je puis lui parler, je t'enverrai ses réponses par Marie."

Ils rentrent lentement dans la maison en parlant de choses de peu d'importance.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-027.htm
TOME : 8 /27


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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Ven 15 Aoû 2014 - 7:52

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_81


Judas de Kériot est un voleur

Jésus se trouve avec les femmes disciples et les deux apôtres sur une des premières ondulations des montagnes en arrière d'Éphraïm. Jeanne n'a pas avec elle les enfants ni Esther. Je pense qu'ils ont déjà été envoyés à Jérusalem, avec Jonathas. Il y a seulement en plus de la Mère de Jésus, Marie de Cléophas, Marie Salomé, Jeanne, Élise, Nique et Suzanne. Les deux sœurs de Lazare ne sont pas encore là.

Élise et Nique sont en train de plier des vêtements qui ont certainement été lavés à une ruisseau qui brille tout en bas ou apportés ici du torrent sur le plateau ensoleillé et Nique, après en avoir regardé un, le porte à Marie de Cléophas en disant : "À celui-là aussi ton fils a décousu l'ourlet."

Marie d'Alphée prend le vêtement et le met près des autres qu'elle a près d'elle sur l'herbe.

Toutes les disciples sont occupées à coudre, à réparer les déchirures qui se sont produites pendant les nombreux mois où les apôtres étaient seuls.

Élise, qui s'approche avec d'autres vêtements secs, dit : "On voit bien que depuis trois mois vous n'avez pas eu avec vous une femme au courant ! Il n'y a pas un vêtement en ordre, sauf celui du Maître qui en compensation n'en a que deux. Celui qu'il porte et celui lavé aujourd'hui."

"Il les a donnés tous. Il semblait pris par la frénésie de ne plus rien avoir. Il a des vêtements de lin depuis déjà plusieurs jours" dit Judas.

"Heureusement que ta Mère a pensé à en apporter des neufs. Celui qui est teint en pourpre est vraiment très beau. Il te fallait cela, Jésus, bien que tu sois si bien ainsi vêtu de lin. Tu ressembles vraiment à un lys !" dit Marie d'Alphée.

"Un lys très grand, Marie !" satirise Judas.

"Mais pur comme certainement tu ne l'es pas, ni non plus comme l'est Jean. Toi aussi, tu es vêtu de lin mais, crois-le, tu ne sembles pas un lys !" réplique franchement Marie d'Alphée.

"Moi, je suis brun de cheveux et de teint. Pour cela je suis différent."

"Non. Ce n'est pas dû à cela. C'est que toi, la candeur, tu l'as sur toi, et Lui l'a à l'intérieur. Elle transpire de son regard, de son sourire, de sa parole. C'est cela. Ah ! comme on est bien ici avec mon Jésus." Et la bonne Marie pose l'une de ses mains flétries de vieille femme et de travailleuse sur le genou de Jésus qui caresse cette main honnête.

Marie Salomé, qui est en train de regarder un vêtement, s'écrie : "Ceci est pire qu'une déchirure ! Oh ! mon fils ! Qui a bouché le trou de cette façon ?" et scandalisée, elle montre à ses compagnes une sorte de... nombril tout froncé de sorte qu'il fait un anneau qui ressort sur l'étoffe et que tiennent ensemble certains points capables d'horrifier une femme. L'étrange réparation est l'épicentre d'une série de plis en éventail qui s'élargissent sur l'épaule du vêtement. Tout le monde rit, à commencer par Jean, l'auteur de la reprise, qui explique : "Je ne pouvais rester avec la déchirure et alors... je l'ai bouchée !"

"Je le vois, pauvre de moi ! Je le vois ! Mais ne pouvais-tu pas le faire coudre par Marie de Jacob ?"

"Elle est presque aveugle, la pauvre femme ! Et puis... le malheur c'est que ce n'était pas une déchirure ! C'était un vrai trou. Le vêtement est resté attaché au fagot que je portais sur l'épaule et, en enlevant le fagot de sur mon épaule, le morceau de vêtement est venu avec. Alors j'ai réparé ainsi !"

"Tu l'as abîmé ainsi, mon fils. Il me faudrait... " Elle examine le vêtement, mais secoue la tête et dit :"J'espérais pouvoir enlever l'ourlet, mais il n'y en a plus..."

"C'est moi qui l'ai enlevé à Nobé, car le pli était coupé. Mais j'ai donné à ton fils la partie que j'avais enlevée..." explique Élise.

"Oui, mais je m'en suis servi pour faire une corde à mon sac..."

"Pauvre fils ! Comme il est nécessaire que nous soyons près d'eux !" dit Marie très Sainte qui répare le vêtement de je ne sais qui.

"Et pourtant, ici il faut de l'étoffe. Regardez. Les points ont fini de déchirer tout autour, et d'un mal déjà grand en est venu un irréparable; à moins que... l'on puisse trouver quelque chose qui remplace l'étoffe manquante. Alors... cela se verra encore... mais ce sera passable."

"Tu m'as donné l'idée pour une parabole..." dit Jésus, et en même temps Judas dit : "Je crois avoir au fond de mon sac un morceau d'étoffe de cette couleur. C'est le reste d'un vêtement qui était trop déteint pour que je le porte, je l'ai donné à un petit homme qui était tellement plus petit que moi, que nous avons dû en couper presque deux palmes. Si tu attends, je vais le chercher. Mais auparavant je voudrais entendre la parabole."

"Que Dieu te bénisse. Écoute aussi. Pendant ce temps, je remets les cordons du vêtement de Jacques. Ils sont tout élimés."

"Parle, Maître. Ensuite je ferai plaisir à Marie Salomé."

"Je parle. Je compare l'âme à une étoffe. Quand elle est infusée, elle est nouvelle, sans déchirure. Elle a seulement la tache originelle, mais elle n'a pas de blessures dans sa constitution, ni d'autres taches, ni de consomption. Puis, avec le temps, et à cause des vices qu'elle accueille, elle s'use jusqu'à se couper, elle se tache par ses imprudences, elle se déchire par ses désordres. Maintenant, quand elle est déchirée, il ne faut pas la ravauder maladroitement, ce qui serait la cause de déchirures plus nombreuses, mais il faut de patientes et de longues et parfaites reprises pour faire disparaître le plus possible la ruine qui s'est produite. Et si l'étoffe est trop déchirée, et même si elle est déchirée au point d'avoir perdu un morceau, on ne doit pas orgueilleusement prétendre supprimer la ruine par soi-même, mais aller trouver Celui que l'on sait pouvoir rendre l'âme de nouveau intègre parce qu'il Lui est permis de tout faire et parce que Lui peut tout faire. Je parle de Dieu, mon Père, et du Sauveur que je suis. Mais l'orgueil de l'homme est tel que, plus grande est la ruine de son âme, et plus il cherche à la rapiécer par des remèdes incomplets qui créent une infirmité de plus en plus grande. Vous pourrez m'objecter qu'une déchirure se verra toujours.

Marie Salomé l'a dit aussi. Oui, on verra toujours les blessures qu'une âme a subies, mais l'âme livre sa bataille et il s'ensuit donc qu'elle soit blessée, si nombreux sont les ennemis qui l'entourent. Mais personne ne peut dire, en voyant un homme couvert de cicatrices, qui sont les signes d'autant de nombreuses blessures reçues en combattant pour obtenir la victoire, personne ne peut dire : "Cet homme est immonde". On dira au contraire : "Celui-ci est un héros. Voilà les marques empourprées de sa valeur". Et on ne verra jamais un soldat éviter de se faire soigner par honte d'une glorieuse blessure, mais au contraire il ira trouver le médecin et lui dira avec un saint orgueil : "Voilà, j'ai combattu et j'ai vaincu. Je ne me suis pas épargné, tu le vois. Maintenant remets-moi en état, pour que je sois prêt pour d'autres batailles et d'autres victoires". Au contraire, celui qui a des plaies de maladies immondes, produites en lui par des vices indignes, celui-là a honte de ses plaies devant ses parents et ses amis, et même devant les médecins, et parfois il est si absolument stupide qu'il les tient cachées jusqu'à ce que leur puanteur les révèle. Mais alors, il est trop tard pour réparer. Les humbles sont toujours sincères et même ce sont des valeureux qui n'ont pas à avoir honte des blessures reçues dans la lutte. Les orgueilleux sont toujours menteurs et lâches.

À cause de leur orgueil, ils arrivent à la mort, faute de vouloir aller vers Celui qui peut les guérir et Lui dire : "Père, j'ai péché. Mais si tu veux, tu peux me guérir". Nombreuses sont les âmes qui, à cause de l'orgueil de ne pas avoir à confesser une faute initiale, arrivent à la mort. Et alors, pour elles aussi, c'est trop tard. Elles ne réfléchissent pas que la miséricorde divine est plus puissante et plus vaste que toute gangrène, si puissante et si étendue qu'elle soit, et qu'elle peut tout guérir. Mais elles, les âmes des orgueilleux, quand elles s'aperçoivent qu'elles ont méprisé tout moyen de salut, tombent dans le désespoir, puisqu'elles sont sans Dieu, et en disant : "Il est trop tard", elles se donnent la dernière mort, celle de la damnation. Et maintenant, Judas, va prendre ton étoffe..."

"J'y vais, mais elle ne m'a pas plu cette parabole. Je ne l'ai pas comprise."

"Mais elle est si limpide ! Je l'ai comprise, moi, qui suis une pauvre femme !" dit Marie Salomé.

"Et moi, pas. Autrefois tu en disais de plus belles. Maintenant... les abeilles... l'étoffe... les villes qui changent de nom... les âmes qui sont des barques... Des choses si pauvres et si confuses, qu'elles ne me plaisent plus et que je ne comprends pas... Mais maintenant, je vais prendre l'étoffe, car pratiquement je dis qu'elle est nécessaire, mais que ce sera toujours un vêtement abîmé" et Judas se lève et s'éloigne.

Marie a toujours plus incliné la tête sur son travail pendant que Judas parlait. Jeanne, au contraire, l'a levée en fixant l'imprudent d'un air indigné. Élise aussi l'a levée, mais ensuite elle a imité Marie, et de même Nique. Suzanne a écarquillé ses grands yeux, stupéfaite, et elle a regardé Jésus au lieu de l'apôtre, comme si elle se demandait pourquoi il ne réagissait pas. Aucune n'a parlé ni fait de gestes. Mais Marie Salomé et Marie d'Alphée, plus populaires, se sont regardées en hochant la tête et, Judas à peine parti, Marie Salomé dit : "C'est lui qui a la tête mal en point !

"Oui, et c'est pour cela qu'il ne comprend rien, et je ne sais même pas si tu pourras la lui remettre en place. Si mon fils était ainsi, je la lui romprais complètement. Oui, comme je la lui ai faite pour qu'elle fût une tête de juste, ainsi je lui la romprais. Il vaut mieux avoir le visage balafré que le cœur !" dit Marie d'Alphée.

"Sois indulgente, Marie. Tu ne peux comparer tes enfants qui ont grandi dans une famille honnête, dans une ville comme Nazareth, avec cet homme" dit Jésus.

"Sa mère est bonne. Son père n'était pas mauvais, je l'ai entendu dire" réplique Marie d'Alphée.

"Oui, mais son cœur ne manquait pas d'orgueil. C'est pour cela qu'il a éloigné le fils de sa mère trop tôt, et qu'il a contribué, lui aussi, à développer l'hérédité morale, qu'il avait donnée à son fils, en l'envoyant à Jérusalem. Il est douloureux de le dire, mais certainement le Temple n'est pas un endroit où l'orgueil héréditaire soit susceptible de diminuer…" dit Jésus

"Aucune place de Jérusalem, qui soit une place d'honneur, n'est indiquée pour diminuer l'orgueil et tout autre défaut, dit Jeanne en soupirant. Et elle ajoute : Ni non plus toute autre place d'honneur que ce soit à Jéricho ou à Césarée de Philippe, à Tibériade comme à l'autre Césarée..." et elle coud rapidement en penchant son visage sur son travail plus qu'il n'est nécessaire.

"Marie de Lazare a de l'autorité, mais elle n'a pas d'orgueil" observe Nique.

"Maintenant. Mais avant elle était très fière, à l'opposé de ses parents qui ne furent jamais ainsi" répond Jeanne.

"Quand vont-elles venir ?" demande Marie Salomé.

"Bientôt, si nous devons partir d'ici trois jours."

"Travaillons rapidement, alors. Nous avons à peine le temps de tout finir" dit Marie d'Alphée pour les faire presser.

"On a tardé de venir à cause de Lazare. Mais ce fut bien, car beaucoup de fatigue a été épargnée à Marie" dit Suzanne.

"Mais te sens-tu capable de faire tant de chemin ? Tu es si pâle et si lasse, Marie !" demande Marie d'Alphée en mettant sa main sur les genoux de Marie et en la regardant avec peine.

"Je ne suis pas malade, Marie, et certainement je puis marcher."

"Malade non, mais si affligée, Mère. Je donnerais dix et dix ans de ma vie, j'embrasserais toutes les douleur pour te revoir comme je t'ai vue la première fois" dit Jean qui la regarde avec pitié.

"Mais ton amour est déjà un remède, Jean. Je sens mon cœur se calmer en voyant comme vous aimez mon Fils. Car il n'y a pas d'autre cause de ma souffrance, pas d'autre que de voir qu'il n'est pas aimé. Ici, près de Lui, et parmi vous, si fidèles, je refleuris déjà. Mais certainement... ces derniers mois... seule à Nazareth... après l'avoir vu partir déjà si tourmenté, déjà si persécuté... et entendant toutes ces rumeurs... Oh ! Quelle douleur ! Mais, près de Lui, je vois, je dis : "Au moins mon Jésus a sa Maman qui le console, qui Lui dit des paroles qui couvrent d'autres paroles" et je vois aussi que tout amour n'est pas mort en Israël. Et j'ai la paix, un peu de paix. Pas beaucoup... car..." Marie n'en dit pas davantage. Elle baisse son visage qu'elle avait levé pour parler à Jean, et on ne voit plus que le haut de son front que fait rougir une émotion muette... et puis deux larmes brillent sur le vêtement sombre qu'elle reprise.

Jésus soupire et se lève de sa place pour aller s'asseoir à ses pieds devant elle. Là, il abandonne sa tête sur les genoux de Marie, il baise la main qui tient l'étoffe et reste ainsi ensuite, comme un enfant qui se repose. Marie enlève l'aiguille de l'étoffe pour ne pas blesser son Fils, puis elle met sa main droite sur la tête de Jésus penchée sur ses genoux et elle lève son visage en regardant le ciel. Elle prie certainement bien que ses lèvres ne remuent pas; toute son attitude dit qu'elle prie. Puis elle se penche pour baiser son Fils sur les cheveux, près des tempes découvertes.

Les autres ne parlent pas jusqu'au moment où Marie Salomé dit : "Mais comme il tarde Judas ! Le soleil va se coucher ! Et je n'y verrai pas bien !"

"Peut-être quelqu'un l'a arrêté, répond Jean et il demande à sa mère : Veux-tu que j'aille lui dire de se hâter ?"

"Tu ferais bien. Car s'il ne trouve pas l'étoffe pareille, je vais raccourcir les manches, d'autant plus que l'été arrive, et pour l'automne je te préparerai un autre vêtement car celui-là ne peut plus aller, et avec le morceau enlevé, je t'arrangerai ici. Pour aller à la pêche il sera encore bon, car certainement, après la Pentecôte, vous reviendrez en Galilée."

"Alors, j'y vais, dit Jean, et toujours aimable, il demande aux autres femmes : Avez-vous des vêtements déjà prêts, que je puisse emporter dans nos maisons ? Si oui, donnez-les-moi, vous serez moins chargées pour revenir."

Les femmes rassemblent ce qu'elles ont déjà réparé et le donnent à Jean qui se tourne pour s'en aller, mais il s'arrête tout à coup en voyant arriver en courant Marie de Jacob.

La bonne petite vieille marche péniblement et s'empresse autant que le lui le permettent ses nombreuses années et elle crie à Jean : "Le Maître est-il ici ?"

"Oui, mère. Que veux-tu ?"

La femme répond en continuant de courir : "Ada est mal... Et son mari voudrait la consoler en appelant Jésus... Mais depuis que ces samaritains ont été... si mauvais, il n'ose pas... Je lui ai dit : "Tu ne le connais pas encore. Moi j'y vais et... il ne... me dira pas non". La petite vieille est toute essoufflée par la course et la montée.

"Ne cours pas davantage. Je viens avec toi, ou plutôt je te précède. Suis-nous tranquillement. Tu es vieille, mère, pour courir ainsi" lui dit Jésus, Et puis à sa Mère et aux femmes disciples : "Je reste au village. Paix à vous."

Il prend Jean par un bras et descend rapidement avec lui. La petite vieille qui a repris son souffle les suivrait après avoir répondu aux femmes qui l'interrogent : "Hum ! Seul le Rabbi peut la sauver. Autrement elle va mourir comme Rachel. Elle se refroidit et perd ses forces et se débat déjà dans les convulsions de la douleur".

Mais les femmes la retiennent en lui disant : "Mais vous n'avez pas essayé des briques chaudes sous les reins ?"

"Non ! Il vaut mieux l'envelopper dans de la laine imbibée de vin aromatisé, le plus chaud possible."

"À moi, pour Jacques, me firent du bien les onctions d'huile et puis les briques chaudes."
"Faites-la boire beaucoup."

"Si elle pouvait se tenir debout et faire quelques pas, et que pendant ce temps on lui frictionne les reins fortement."

Les femmes-mères, c'est-à-dire toutes sauf Nique et Suzanne, et Marie qui ne souffrit pas les peines de toute femme en mettant son Fils au jour, préconisent une chose ou l'autre.

"Tout ! On a tout essayé. Mais ses reins sont trop fatigués. C'est son onzième enfant ! Mais maintenant j'y vais. J'ai repris mon souffle. Priez pour cette mère ! Que le Très-Haut la garde vivante jusqu'à ce que le Rabbi arrive à elle." Et elle s'en va en trottinant, la pauvre vieille seule et bonne.

Jésus, pendant ce temps, descend rapidement vers la ville que le soleil réchauffe. Il entre dans la ville par l'endroit opposé à celui où se trouve leur maison, c'est-à-dire par le nord-ouest d'Éphraïm alors que la maison de Marie de Jacob est au sud-est. Il marche rapidement, sans s'arrêter à parler avec ceux qui voudraient le retenir. Il les salue et s'éloigne.

Un homme remarque : "Il est fâché contre nous. Ceux des autres villages ont mal agi. Il a raison."

"Non. Il va chez Janoé. Sa femme meurt à son onzième enfantement."

"Pauvres enfants ! Et le Rabbi y va ? Trois fois bon. Offensé, il comble de bienfaits."

"Mais Janoé ne l'a pas offensé ! Aucun de nous ne l'a offensé !"

"Mais ce sont toujours des hommes de Samarie."

"Le Rabbi est juste, et il sait distinguer. Allons voir le miracle."

"Nous ne pourrons pas entrer. C'est une femme et qui doit enfanter."

"Mais nous entendrons pleurer l'enfant et ce sera une voix de miracle."

Ils s'en vont en courant pour rejoindre Jésus. D'autres aussi viennent avec eux pour voir.

Jésus arrive à la maison désolée par l'imminent malheur. Les dix enfants — la plus grande est une fillette en larmes contre laquelle se serrent ses petits frères en pleurs — restent dans un coin de l'entrée, près de la porte grande ouverte. Des commères qui vont et viennent, des murmures, des bruits de pieds déchaussés qui courent sur le pavage de briques.

Une femme voit Jésus et pousse un cri : "Janoé ! Espère ! Il est venu !" et elle s'en va en courant avec un broc fumant.

Un homme accourt, se prosterne. Il ne fait qu'un geste et il dit : "Je crois. Pitié, pour eux" et il montre ses enfants.

"Lève-toi et prends courage. Le Très-Haut aide celui qui a foi, et Il a pitié de ses enfants affligés."

Oh ! viens, Maître ! Viens. Elle est déjà noire. Elle est étranglée par les convulsions. Elle ne respire quasi plus. Viens !" L'homme qui a déjà perdu la tète, la perd complètement en entendant une commère qui l'appelle : "Janoé, accours ! Ada se meurt !" il pousse, il tire Jésus pour le faire aller vite, vite, vite, vers la pièce de la mourante, sourd aux paroles de Jésus qui dit : "Va, et aie foi !"

De la foi, il en a, le pauvre homme, mais ce qui lui manque c'est de pouvoir comprendre le sens de ces paroles, le sens secret qui lui donne déjà la certitude du miracle. Et Jésus, poussé et tiré, monte l'escalier pour entrer dans la pièce où se trouve la femme. Mais Jésus s'arrête sur le palier de l'escalier, à environ trois mètres de la porte ouverte qui laisse voir un visage exsangue, livide même, déjà étiré dans le masque de l'agonie. Les commères ne tentent plus rien. Elles ont recouvert la femme jusqu'au menton et elles regardent. Elles sont pétrifiées dans l'attente du trépas.

Jésus étend ses bras et il crie : "Je veux !" et il se retourne pour partir.

Le mari, les commères, les curieux, qui se sont rassemblés, restent déçus parce que, peut-être, ils espéraient que Jésus ferait quelque chose de plus extraordinaire, la naissance immédiate de l'enfant. Mais Jésus, en se frayant un passage, les regarde en face en passant devant eux et leur dit : "Ne doutez pas. Encore un peu de foi. Un moment. La femme doit payer l'amer tribut de l'enfantement, mais elle va bien." Et il descend l'escalier, les laissant interdits. Au moment de sortir dans la rue, il dit en passant aux dix enfant apeurés : "Ne craignez pas ! La mère est sauvée" et, en le disant, il caresse de la main les petits visages craintifs. À ce moment un grand cri retentit dans la maison et arrive jusque dans la rue où arrive aussi Marie de Jacob qui crie : "Miséricorde !" en croyant que ce cri annonce la mort.

"Ne crains pas, Marie ! Et va vite ! Tu vas voir naître le petit. Les forces sont revenues avec les douleurs, mais bientôt ce sera la joie."

Il s'en va avec Jean. Personne ne le suit car tout le monde veut voir si le miracle s'accomplit, et même d'autres accourent vers la maison, car la nouvelle s'est répandue que le Rabbi est allé sauver Ada. Et ainsi Jésus, en se faufilant par une ruelle, peut arriver sans encombre à une maison où il entre en appelant : "Judas ! Judas !" Personne ne répond.

"Il est allé là-haut, Maître. Nous pouvons nous aussi aller à la maison. Je dépose ici les vêtements de Judas, de Simon et de ton frère Jacques, et puis je mettrai les autres de Simon Pierre, d'André, de Thomas et de Philippe dans la maison d'Anne."

C'est ce qu'ils font et je comprends que pour faire place aux femmes disciples, les apôtres s'en sont allés dans d'autres maisons, sinon tous, au moins une partie d'entre eux.

Désormais débarrassés des vêtements, il s'en vont en parlant entre eux, vers la maison de Marie de Jacob et y entrent par la petite porte du jardin qui est seulement poussée. La maison est silencieuse et vide. Jean voit posée à terre une amphore pleine d'eau et, pensant peut-être que la petite vieille l'a déposée là avant qu'on ne l'appelle pour assister la femme, il la prend et se dirige vers une pièce fermée. Jésus s'attarde dans le couloir pour enlever son manteau et le plier avec son soin habituel avant de le déposer sur le coffre de l'entrée. Jean ouvre la porte et pousse un "ah !" presque terrifié. Il laisse tomber le broc et couvre ses yeux de ses mains, en se courbant, comme pour se faire petit, pour disparaître, pour ne pas voir. De la pièce arrive un bruit de pièces de monnaie qui se répandent sur le sol en résonnant.

Jésus est déjà à la porte. Il m'a fallu plus de temps pour décrire qu'à Lui pour arriver. Il écarte vivement Jean qui gémit : "Va-t'en ! Va-t'en !" Il ouvre la porte entrouverte. Il entre. C'est la pièce où, depuis que les femmes sont là, ils prennent leurs repas. Il s'y trouve deux coffres anciens ferrés et devant l'un d'eux, juste en face de la porte, se trouve Judas, livide, ses yeux étincellent de colère et en même temps d'effroi, avec une bourse dans les mains... Le coffre fort est ouvert... et à terre sont répandues des pièces et d'autres tombent par terre en glissant hors d'une bourse qui est sur le bord du coffre, ouverte, et à moitié couchée. Tout témoigne d'une manière qui ne peut laisser aucun doute de ce qui se passe. Judas est entré dans la maison, il a ouvert le coffre et il a volé. Il était en train de voler.

Personne ne parle. Personne ne bouge. Mais c'est pire que si tous criaient et se lançaient les uns contre les autres. Trois statues : Judas, le démon; Jésus, le Juge; Jean, le terrorisé par la révélation de la bassesse de son compagnon.

La main de Judas qui tient sa bourse est agitée par un tremblement et les pièces qui s'y trouvent laissent entendre un bruit étouffé.

Jean est tout tremblant et, bien qu'il soit resté les mains serrées sur sa bouche, ses dents claquent alors que ses yeux effrayés regardent Jésus plus que Judas.

Jésus ne frémit pas. Il est debout et glacial, tout à fait glacial tellement il est rigide.

Finalement il fait un pas, un geste et prononce un mot. Un pas vers Judas, un geste pour faire signe à Jean de se retirer et un mot : "Va !"

Mais Jean a peur et gémit : "Non ! Non ! Ne me renvoie pas. Laisse-moi ici. Je ne dirai rien... mais laisse-moi ici, avec Toi."

"Va-t-en ! Ne crains pas ! Ferme toutes les portes... et s'il vient quelqu'un... n'importe qui... même ma Mère... ne les laisse pas venir ici. Va ! Obéis !"

"Seigneur !..." Il semble que ce soit Jean le coupable, tant il est suppliant et abattu.

"Va, te dis-je. Il n'arrivera rien. Va !" et Jésus adoucit son commandement en mettant sa main sur la tête du Préféré avec un geste caressant, et je vois que cette main maintenant tremble. Jean la sent trembler, il la prend et la baise avec un sanglot qui dit tant de choses. Il sort. Jésus ferme la porte avec un verrou. Il se retourne pour regarder Judas, qui doit être bien anéanti puisqu'il n'ose pas lui, si audacieux, un mot ou un geste.

Jésus va tout droit devant lui, en tournant autour de la table qui occupe le milieu de la pièce. Je ne sais dire s'il va rapidement ou lentement. Je suis trop effrayée par son visage pour mesurer le temps. Je vois ses yeux et j'ai peur comme Jean. Judas lui-même a peur, il s'arrête entre le coffre et une fenêtre grande ouverte par laquelle la lumière rouge du couchant se déverse toute sur Jésus.

Quels yeux a Jésus ! Il ne dit pas un mot. Mais quand il voit que de la ceinture du vêtement de Judas dépasse une sorte de crochet, il a une réaction effrayante. Il lève le bras avec le poing fermé, comme pour frapper le voleur, et sa bouche commence le mot : "Maudit !" Mais il se domine. Il arrête le bras qui allait tomber et coupe le mot aux trois premières lettres. Et faisant pour se maîtriser un effort qui le fait trembler tout entier, il se borne à desserrer son poing fermé, à abaisser son bras levé à la hauteur de la bourse que Judas a dans les mains, et à l'arracher pour la jeter contre le sol, en disant d'une voix étouffée alors qu'il foule aux pieds la bourse et les pièces, et les disperse avec une fureur contenue mais terrible : "Au loin ! Ordure de Satan ! Or maudit ! Crachat d'enfer ! Venin de serpent ! Au loin !"

Judas, qui a poussé un cri étouffé quand il a vu Jésus près de le maudire, ne réagit plus. Mais de l'autre côté de la porte fermée, un autre cri résonne quand Jésus lance la bourse contre le sol, et ce cri de Jean exaspère le voleur et lui rend son audace démoniaque. Il en devient furieux. Il se jette presque contre Jésus en criant : "Tu m'as fait espionner pour me déshonorer, espionner par un garçon imbécile qui ne sait même pas se taire, qui me fera honte en face de tous ! Mais c'est cela que tu voulais. Et du reste... Oui ! Moi, je le veux aussi. Je veux cela ! T'amener à me chasser ! T'amener à me maudire ! À me maudire ! À me maudire ! J'ai tout essayé pour me faire chasser." Il est enroué par la colère et brutal comme un démon. Il halète comme s'il avait quelque chose qui l'étrangle.

Jésus lui répète à voix basse mais terrible : "Voleur ! Voleur ! Voleur !" et il termine en disant : "Aujourd'hui voleur, demain assassin. Comme Barabbas. Pire que lui." Il lui souffle cette parole au visage car maintenant ils sont très proches.

Judas reprend haleine et répond : "Oui, voleur, et par ta faute. Tout le mal que je fais, c'est par ta faute et tu ne te lasses jamais de me ruiner. Tu sauves tout le monde. Tu donnes de l'amour et des honneurs à tous. Tu accueilles les pécheurs, les prostituées ne te dégoûtent pas, tu traites en amis les voleurs et les usuriers et les ruffians de Zachée, tu accueilles comme si c'était le Messie l'espion du Temple, ô sot que tu es ! Et tu nous donnes pour chefun ignorant, pour trésorier un gabeleur, et pour ton confident tu prends un imbécile. Et à moi tu mesures la moindre piécette, tu ne me laisses pas d'argent, tu me tiens près de Toi comme un galérien est tenu près de sa place au banc de rameur. Tu ne veux même pas que nous, je dis nous, mais c'est moi, moi seul, qui ne dois pas accepter d'obole des pèlerins. C'est pour que je ne touche pas l'argent que tu as ordonné de ne prendre l'argent de personne. Parce que tu me hais. Eh bien : moi aussi je te hais ! Tu n'as pas su me frapper et me maudire tout à l'heure. Ta malédiction m'aurait réduit en cendres. Pourquoi ne l'as-tu pas donnée ? Je l'aurais préférée plutôt que de te voir si incapable, si faible, un homme fini, un homme vaincu..."

"Tais-toi !"

"Non ! As-tu peur que Jean entende ? As-tu peur que lui finalement comprenne qui tu es, et qu'il t'abandonne ? Ah ! Tu l'as cette peur, Toi qui fais le héros ! Oui, tu as peur ! Et tu as peur de moi. Tu as peur ! C'est pour cela que tu n'as pas su me maudire. C'est pour cela que tu feins l'amour, alors que tu me hais ! Pour me flatter ! Pour me tenir tranquille ! Tu sais que je suis une force ! Tu le sais que je suis la force. La force qui te hait et qui te vaincra ! Je t'ai promis que je te suivrais jusqu'à la mort, en t'offrant tout, et je t'ai tout offert, et je resterai près de Toi, jusqu'à ton heure et jusqu'à mon heure. Roi magnifique qui ne sait pas maudire et chasser ! Roi des nuages ! Roi idole ! Roi imbécile ! Menteur ! Traître à ton propre destin. Tu m'as toujours méprisé, dès notre première rencontre. Tu n'as pas su me comprendre. Tu te croyais sage. Tu es un idiot. Je t'enseignais le bon chemin. Mais Toi... Oh ! Tu es le pur ! Tu es la créature qui est homme mais qui est Dieu, et tu méprises les conseils de l'Intelligent. Tu t'es trompé dès le premier moment, et tu te trompes. Tu... Tu es... Ah !"


Le flot de paroles cesse brusquement et après c'est un silence lugubre après tant de cris et une lugubre immobilité après tant de gestes. Pendant que j'écrivais sans pouvoir dire ce qui se passait, Judas courbé, semblable, oui, semblable à un chien féroce qui guette sa proie et s'en approche, prêt à s'élancer dessus, s'est approché de plus en plus de Jésus, avec un visage dont la vue est insoutenable, les mains crispées, les coudes serrés contre le corps, comme si réellement il allait l'attaquer. Jésus ne montre pas la moindre peur et tourne même le dos à l'autre, qui pourrait l'assaillir et Lui sauter au cou, sans pourtant le faire. Jésus se retourne pour ouvrir la porte et regarder dans le couloir si Jean vraiment s'en est allé. Le couloir est vide et presque obscur, car Jean a fermé la porte qui donne sur le jardin après être sorti de là. Alors Jésus referme la porte et la verrouille et s'adosse contre elle, en attendant, sans un geste ni une parole, que tombe la furie de Judas.

Je ne suis pas compétente, mais je crois ne pas me tromper en disant que par la bouche de Judas, c'est Satan lui-même qui parlait, que c'est un moment de possession évidente de Satan dans l'apôtre perverti, déjà au seuil du Crime, déjà damné par sa propre volonté. La manière même dont s'arrête le flot de paroles, laissant l'apôtre comme abasourdi, me rappelle d'autres scènes de possessions, vues pendant les trois années de la vie publique de Jésus.

Jésus, adossé à la porte, tout blanc contre le bois sombre, ne fait pas le moindre geste. Seulement ses yeux jettent sur l'apôtre un regard puissant de douleur et de ferveur. Si on pouvait dire que les yeux prient, je dirais que les yeux de Jésus prient pendant qu'il regarde le malheureux; en effet ce n'est pas seulement la maîtrise qui sort de ces yeux si affligés, mais c'est aussi la ferveur d'une prière. Puis, vers la fin de l'altercation de Judas, Jésus ouvre ses bras qui étaient serrés contre son corps, mais il ne les ouvre pas pour toucher Judas, ni pour faire un geste vers lui, ou pour les lever vers le ciel. Il les ouvre horizontalement, en prenant la pose du Crucifié, là contre le bois sombre et le mur rougeâtre. C'est alors que dans la bouche de Judas se ralentissent les dernières paroles et que sort le "Ah" qui interrompt son discours.

Jésus reste comme il est, les bras ouverts, et regarde toujours l'apôtre de ce regard douloureux et priant. Judas, comme quelqu'un qui sort du délire, se passe la main sur le front, sur son visage en sueur... réfléchit et, se souvenant de tout, s'écroule par terre et je ne sais s'il pleure ou non. Certainement il s'affale par terre comme si les forces lui manquaient.

*
Suite dessous ....

Maud
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Ven 15 Aoû 2014 - 8:04

Mon texte dépassant la longueur autorisée , j'ai du le scinder en deux parties

Suite ...


*


Jésus abaisse son regard et ses bras et, à voix basse mais distincte, lui dit : "Eh bien ? Est-ce que je te hais ? Je pourrais te frapper du pied, t'écraser en te traitant de "ver", je pourrais te maudire, comme je t'ai délivré de la force qui te fait délirer. Tu l'as prise pour de la faiblesse mon impossibilité de te maudire. Oh ! ce n'est pas de la faiblesse ! C'est que je suis le Sauveur. Et le Sauveur ne peut maudire. Il peut sauver. Il veut sauver... Tu as dit : "Je suis la force. La force qui te hait et qui te vaincra". Moi aussi je suis la Force et même : je suis l'unique Force. Mais ma force n'est pas de la haine, c'est de l'amour. Et l'amour ne hait pas et ne maudit pas, jamais. La Force pourrait triompher aussi dans duels comme celui-ci entre toi et Moi, entre Satan qui est en toi et Moi, et t'enlever ton maître, pour toujours, comme je viens de le faire en devenant le signe qui sauve, le Tau que Lucifer ne peut voir. Il pourrait aussi remporter la victoire dans ces duels, comme il vaincra dans le combat prochain contre Israël incrédule et assassin, contre le monde et contre Satan vaincu par la Rédemption. Il pourrait même vaincre dans ces duels, comme il vaincra dans cette ultime bataille, lointaine pour celui qui compte les siècles, proche pour qui mesure le temps en le comparant à l'éternité.

Mais à quoi servirait-il de violer les règles parfaites de mon Père ? Serait-ce justice ? Serait-ce mérite ? Non. Il n'y aurait ni justice ni mérite. Pas de justice à l'égard des autres hommes coupables, auxquels ne serait pas enlevée la liberté de l'être, qui pourraient au dernier jour me demander le pourquoi de leur condamnation et me reprocher ma partialité à l'égard de toi seul. Ils seront des dizaines et des centaines de mille, septante fois des dizaines et des centaines de mille, ceux qui feront les mêmes péchés que toi et se livreront au démon par leur propre volonté, et qui offenseront Dieu, tortureront leurs pères et mères, et seront des assassins, des voleurs, des menteurs, des adultères, des luxurieux, des sacrilèges, et enfin des déicides, en tuant matériellement le Christ un jour prochain, en le tuant spirituellement dans leurs cœurs dans les temps futurs.

Et tous pourraient me dire, quand je viendrai séparer les agneaux des boucs, pour bénir les premiers et pour maudire, alors oui, pour maudire les seconds, pour maudire car alors il n'y aura plus de rédemption, mais gloire ou condamnation, pour les maudire de nouveau après les avoir déjà maudits en particulier à leur mort et à leur jugement particulier.

En effet l'homme, tu le sais pour me l'avoir entendu dire des centaines et des milliers de fois, l'homme peut se sauver tant que dure sa vie, jusqu'à son dernier soupir. Il suffit d'un instant, d'un millième de minute, pour que tout soit dit entre l'âme et Dieu, pour qu'elle demande pardon et obtienne l'absolution... Tous, disais-je, pourraient me dire, tous ces damJésus abaisse son regard et ses bras et, à voix basse mais distincte, lui dit : "Eh bien ? Est-ce que je te hais ? Je pourrais te frapper du pied, t'écraser en te traitant de "ver", je pourrais te maudire, comme je t'ai délivré de la force qui te fait délirer. Tu l'as prise pour de la faiblesse mon impossibilité de te maudire. Oh ! ce n'est pas de la faiblesse ! C'est que je suis le Sauveur. Et le Sauveur ne peut maudire. Il peut sauver. Il veut sauver... Tu as dit : "Je suis la force. La force qui te hait et qui te vaincra". Moi aussi je suis la Force et même : je suis l'unique Force. Mais ma force n'est pas de la haine, c'est de l'amour. Et l'amour ne hait pas et ne maudit pas, jamais. La Force pourrait triompher aussi dans les nés : "Pourquoi ne nous as-tu pas attachés au Bien, comme tu as fait pour Judas ?" Et ils auraient raison. Car tout homme naît avec les mêmes choses naturelles et surnaturelles; un corps, une âme. Et alors que le corps, étant engendré par des hommes, peut être plus ou moins robuste, plus ou moins sain à sa naissance, l'âme, créée par Dieu, est pareille pour tous, douée des mêmes propriétés, des mêmes dons de Dieu. Entre l'âme de Jean, je parle du Baptiste, et la tienne, il n'y avait pas de différence quand elles furent infusées dans la chair. Et pourtant je te dis que même si la Grâce ne l'avait pas présanctifié, pour que le Héraut du Christ fût sans tache, comme il conviendrait que le fussent tous ceux qui m'annoncent, du moins pour ce qui regarde les péchés actuels, son âme aurait été, serait devenue bien différente de la tienne, ou plutôt la tienne serait devenue différente de la sienne.

En effet il aurait conservé son âme dans la fraîcheur de l'innocence, il l'aurait même ornée toujours plus de justice en secondant la volonté de Dieu qui désire que vous soyez justes, en développant les dons gratuits reçus avec une perfection toujours plus héroïque. Toi, au contraire... Tu as dévasté ton âme et dispersé les dons que Dieu lui avait faits. Qu'as-tu fait de ton libre arbitre ? De ton intelligence ? As-tu conservé à ton esprit la liberté qu'il possédait ? As-tu employé l'intelligence de ton esprit avec intelligence ? Non. Tu ne veux pas m'obéir à Moi, je ne dis pas à Moi-Homme, mais même pas à Moi-Dieu, tu as obéi à Satan. Tu t'es servi de l'intelligence de ta pensée et de la liberté de ton esprit pour comprendre les Ténèbres. Volontairement.

Tu as été placé devant le Bien et le Mal. Tu as choisi le Mal. Et même, tu n'as été placé que devant le Bien, Moi. L'Éternel ton Créateur, qui a suivi l'évolution de ton âme, qui même connaissait cette évolution, car l'Éternelle Pensée n'ignore rien de ce qui se fait depuis que le temps existe, t'a placé devant le Bien, seulement devant le Bien, car Il sait que tu es faible plus qu'une algue de fossé.

Tu m'as crié que je te hais. Or, puisque je suis Un avec le Père et avec l'Amour, Un ici comme au Ciel — si en Moi existent les deux natures, et le Christ, par la nature humaine et tant que sa victoire ne l'aura pas libéré des limites humaines, est à Éphraïm et ne peut être autre part en cet instant; comme Dieu : Verbe de Dieu, je suis au Ciel comme sur la Terre, ma Divinité étant toujours omniprésente et toute puissante — or, puisque je suis Un avec le Père et l'Esprit-Saint, l'accusation que tu as faite contre Moi, c'est contre le Dieu Un et Trin que tu l'as faite. Contre ce Dieu-Père qui t'a créé par amour, contre ce Dieu-Fils qui s'est incarné pour te sauver par amour, contre ce Dieu-Esprit qui t'a parlé tant de fois pour te donner de bons désirs, par amour. Contre ce Dieu Un et Trin, qui t'a tant aimé, qui t'a amené sur mon chemin, en te rendant aveugle au monde pour te donner le temps de me voir, sourd au monde pour te donner la possibilité de m'entendre. Et toi !... Et toi !... Après m'avoir vu et entendu, après être venu librement au Bien, te rendant compte par ton intelligence que c'était l'unique chemin de la vraie gloire, tu as repoussé le Bien et tu t'es donné librement au Mal. Mais si tu l'as voulu par ton libre arbitre, si tu as toujours plus rudement repoussé ma main qui s'offrait à toi pour te tirer hors du gouffre, si tu t'es toujours plus éloigné du port pour t'enfoncer dans la mer furieuse des passions, du Mal, peux-tu me dire, à Moi, à Celui de qui je procède, à Celui qui m'a formé comme Homme pour essayer de te sauver, peux-tu dire que nous t'avons haï ?

Tu m'as reproché de vouloir ton mal... Même l'enfant malade reproche au médecin et à sa mère les remèdes amers qu'ils lui font boire et les choses agréables qu'ils lui refusent pour son bien. Satan t'a rendu tellement aveugle et fou, que tu ne comprends plus la vraie nature des précautions que j'ai prises en ta faveur et que tu puisses arriver à appeler malveillance, désir de te ruiner, ce qui était un soin prévoyant de ton Maître, de ton Sauveur, de ton Ami pour te guérir ? Je t'ai gardé près de Moi... Je t'ai enlevé l'argent des mains. Je t'ai empêché de toucher ce métal maudit qui te rend fou... Mais tu ne sais pas, mais tu ne te rends pas compte que c'est comme un de ces breuvages magiques qui éveillent une soif inextinguible, qui produisent dans le sang une ardeur, une fureur qui mène à la mort ? Toi, je lis ta pensée, tu me reproches : "Et alors, pourquoi pendant si longtemps m'as-tu laissé être celui qui était chargé de l'argent ?" Pourquoi ? Parce que si je t'avais empêché plus tôt de toucher l'argent, tu te serais vendu plus tôt et tu aurais volé plus tôt. Tu t'es vendu quand même, parce que tu pouvais voler peu de choses... Mais Moi, je devais essayer de l'empêcher sans violenter ta liberté. L'or est ta ruine. À cause de l'or tu es devenu luxurieux et traître..."

"Voilà ! Tu as cru aux paroles de Samuel ! Je ne suis pas..."

Jésus, dont la parole s'était animée de plus en plus, mais sans jamais prendre un ton violent ou annonciateur de châtiment, pousse un cri imprévu de domination, je dirais de fureur. Il darde son regard sur le visage que Judas a levé pour dire cette parole et il lui impose un "Tais-toi !" qui semble l'éclat de la foudre.

Judas retombe sur ses talons et n'ouvre plus la bouche.

Un silence pendant lequel avec un effort visible Jésus redonne à son humanité une attitude tranquille, une maîtrise si puissante qu'elle témoigne à elle seule du divin qui est en Lui. Il recommence à parler de sa voix habituelle, chaude, douce même quand elle est sévère, persuasive, conquérante... Il n'y a que les démons qui puissent résister à cette voix.

"Je n'ai pas besoin que Samuel ou n'importe qui parle pour connaître tes actions. Mais, ô malheureux ! Sais-tu devant qui tu te trouves ? C'est vrai ! Tu dis que tu ne comprends plus mes paraboles. Tu ne comprends plus mes paroles. Pauvre malheureux ! Tu ne te comprends même plus toi-même. Tu ne comprends même plus le bien et le mal. Satan à qui tu t'es donné de multiples façons, Satan que tu as suivi dans toutes les tentations qu'il te présentait, t'a rendu imbécile. Mais pourtant, autrefois, tu me comprenais ! Tu croyais que je suis Celui que je suis ! Et ce souvenir n'est pas éteint en toi. Et tu peux croire que le Fils de Dieu, que Dieu a besoin des paroles d'un homme pour connaître la pensée et les actions d'un autre homme ? Tu n'es pas encore perverti au point de ne pas croire que je suis Dieu, et c'est en cela que réside ta faute la plus grande. Car, que tu me crois tel, le prouve la peur que tu as de ma colère. Tu sens que tu ne luttes pas contre un homme, mais contre Dieu-même, et tu trembles. Tu trembles parce que, Caïn, tu ne peux voir Dieu et te le représenter autrement que comme Celui qui se venge Lui-même et qui venge les innocents. Tu as peur qu'il arrive pour toi comme à Coré, Datan et Abiron et à leurs partisans .

Et pourtant, sachant qui je suis, tu luttes contre Moi. Je devrais te dire : "Maudit !" Mais je ne serais plus le Sauveur... Tu voudrais que Moi, je te chasse. Tu fais tout, dis-tu, pour y arriver. Cette raison ne justifie pas tes actions, car tu n'as pas besoin de pécher pour te séparer de Moi. Tu peux le faire, te dis-je. Je te le dis depuis Nobé, quand tu es revenu vers Moi dans une pure matinée, souillé par le mensonge et l'impureté, comme si tu étais sorti de l'enfer pour tomber dans la fange des porcs, ou sur la litière de guenons libidineuses . J'ai dû faire effort sur Moi-même pour ne pas te repousser avec le bout de la sandale comme un chiffon dégoûtant et pour arrêter la nausée qui me bouleversait non seulement l'esprit, mais aussi les entrailles. Je te l'ai toujours dit, même avant de te recevoir, même avant de venir ici. Alors, c'est vraiment pour toi, pour toi seul, que j'ai fait ce discours. Mais tu as toujours voulu rester. Pour ta ruine. Toi ! Ma plus grande douleur ! Mais voilà que tu penses et que tu dis, ô hérétique, chef de file de beaucoup qui viendront, que je suis au-dessus de la douleur.

Non. Je ne suis au-dessus que du péché, que de l'ignorance : au-dessus du péché puisque je suis Dieu, au-dessus de l'ignorance car il ne peut y avoir d'ignorance dans une âme qui n'est pas blessée par la Faute d'Origine. Mais je te parle comme Homme, comme l'Homme, comme l'Adam Rédempteur venu pour réparer la Faute d'Adam pécheur, et pour montrer ce qu'aurait été l'homme s'il était resté dans l'état où il fut créé : innocent. Parmi les dons de Dieu à cet Adam n'y avait-il pas peut-être une intelligence intacte et une science très grande, puisque l'union avec Dieu versait les lumières du Père tout Puissant dans son fils béni ? Moi, nouvel Adam, je suis au-dessus du péché par ma propre volonté... Un jour, dans un temps lointain, tu t'es étonné que j'ai été tenté, et tu m'as demandé si je n'avais jamais cédé. Tu t'en souviens ? Et je t'ai répondu... Oui, comme je pouvais te répondre... Car toi, dès ce moment, tu étais ainsi... un homme tellement déchu, qu'il était inutile de te mettre sous les yeux les perles très précieuses des vertus du Christ.

Tu n'en aurais pas compris la valeur et... tu les aurais prises pour... des cailloux, tant leur grandeur était exceptionnelle. Dans le désert aussi, je t'ai répondu en te répétant les paroles, le sens des paroles que je t'avais dites en allant vers le Gethsémani. Si cela avait été Jean ou même Simon le Zélote à me répéter cette question, j'aurais répondu d'une autre manière, car Jean est un pur et il ne l'aurait pas faite avec la malice avec laquelle tu la faisais, plein de malice comme tu l'étais... et parce que Simon est un vieux sage et, sans ignorer la vie comme Jean, il est arrivé à une sagesse qui sait contempler tout événement sans en être troublé dans son moi. Mais eux ne m'ont pas demandé si je n'avais jamais cédé aux tentations, à la tentation la plus commune, à cette tentation. Car dans la pureté intacte du premier, il n'y a pas de souvenirs de luxure, et dans l'esprit méditatif du second, il y aune si grande lumière pour voir resplendir la pureté en Moi

Tu as demandé... et je t'ai répondu, comme je pouvais. Avec cette prudence qui ne doit jamais se séparer de la sincérité, l'une et l'autre saintes aux yeux de Dieu. Cette prudence qui est comme le triple voile tendu entre le Saint et le peuple, tendu pour cacher le secret du Roi. Cette prudence qui règle les paroles selon le sujet qui les entend, selon sa capacité intellective de comprendre, sa pureté spirituelle et sa justice. Car certaines vérités, dites à des gens souillés, deviennent pour eux objet de risée, non de vénération... Je ne sais si tu te souviens de toutes ces paroles. Moi je m'en souviens, et je te les répète ici, en cette heure où toi et Moi sommes tous les deux sur le bord de l'Abîme. Parce que... Mais il n'est pas besoin de dire cela. Je l'ai dit dans le désert en réponse au "pourquoi" que ma première explication n'avait pas apaisé : "Le Maître ne s'est jamais senti supérieur à l'homme pour être le 'Messie'.

Au contraire, sachant qu'il était l'Homme, il a voulu l'être en tout sauf pour le péché. Pour être maître, il faut avoir été élève. Moi, je savais tout comme Dieu. Mon intelligence divine pouvait me faire comprendre même les luttes de l'homme, par puissance intellective et intellectuellement. Mais un jour quelqu'un de mes pauvres amis aurait pu me dire : 'Tu ne sais pas ce que cela veut dire d'être homme et d'avoir les sens et les passions'. Le reproche aurait été juste. Je suis venu ici pour me préparer non seulement à la mission, mais aussi à la tentation, à la tentation satanique, car l'homme n'aurait pas pu avoir de pouvoir sur Moi. Satan est venu à la fin de mon union solitaire avec Dieu, et j'ai senti que j'étais l'Homme avec unevraie chair sujette aux faiblesses de la chair : la faim, la lassitude, la soif, le froid. J'ai senti la matière avec ses exigences, le moral avec ses passions. Et si par ma volonté, j'ai dompté dès leur naissance toutes les passions qui ne sont pas bonnes, j'ai laissé croître les saintes passions". Te souviens-tu de ces paroles ?

Et j'ai dit encore, la première fois, à toi, à toi seul : "La vie est un don saint et alors elle doit être aimée saintement. La vie est un moyen qui sert à la fin, qui est l'éternité". J'ai dit : "Donnons alors à la vie ce qui lui sert pour durer et pour servir l'esprit dans sa conquête : continence de la chair dans ses appétits, continence de l'esprit dans ses désirs, continence du cœur dans toutes les passions qui appartiennent à l'humain, et élan sans limites vers les passions du Ciel : amour pour Dieu et le prochain, volonté de servir Dieu et le prochain, obéissance à la voix de Dieu, héroïsme dans le bien et dans la vertu". Et tu m'as dit, alors, que Moi je le pouvais parce que j'étais saint, mais que toi tu ne le pouvais pas, parce que tu étais un homme jeune, plein de vitalité .Comme si la jeunesse et la vigueur étaient une excuse pour le vice, comme s'il n'y avait que les vieux ou les malades, par suite de l'âge ou de la faiblesse, impuissants pour ce que tu pensais, brûlé comme tu l'es par la luxure, qui fussent soustraits aux tentations des sens ! J'aurais pu te répliquer tant de choses, alors. Mais tu n'étais pas en état de les comprendre. Tu ne l'es même pas maintenant, mais au moins maintenant tu ne peux sourire de ton sourire incrédule si Moi je te dis que l'homme sain peut être chaste, s'il n'accueille pas de lui-même les séductions du démon et des sens. La chasteté est une affection spirituelle, c'est un mouvement qui se répercute sur la chair et l'envahit toute entière, l'élève, la parfume, la préserve.

Celui qui est saturé de chasteté n'a pas de place pour les autres mouvements qui ne sont pas bons. La corruption n'entre pas en lui. Il n'y a pas de place pour elle. Et puis, la corruption n'entre pas du dehors. Ce n'est pas un mouvement de pénétration de l'extérieur dans l'intérieur. Mais c'est un mouvement qui de l'intérieur, du cœur, de la pensée, sort pour pénétrer et envahir l'enveloppe : la chair. C'est pour cela que j'ai dit que c'est du cœur que sort la corruption sous toutes ses formes . Tout adultère, toute luxure, tout péché sensuel, il n'en est pas dont l'origine soit à l'extérieur, mais il vient de l'activité de la pensée qui, corrompue, revêt d'un aspect excitant tout ce qu'elle voit. Tous les hommes ont des yeux pour voir. Et comment arrive-t-il alors qu'une femme qui laisse indifférents dix hommes qui la regardent comme une créature semblable à eux, qui la voient même comme une belle œuvre de la Création, mais sans pour cela sentir se soulever en eux des attraits et des imaginations obscènes, trouble-t-elle le onzième homme et l'amène-t-elle à des désirs indignes ? C'est que ce onzième a corrompu son cœur et sa pensée et où dix voient une sœur, lui voit une femelle.

Pourtant, sans te dire cela alors, je t'ai dit que je suis venu justement pour les hommes, non pour les anges. Je suis venu pour rendre aux hommes leur royauté de fils de Dieu, en leur enseignant à vivre en dieux. Dieu est exempt de luxure, ô Judas. Mais j'ai voulu vous montrer que l'homme aussi peut être exempt de luxure. Mais j'ai voulu vous montrer que l'on peut vivre comme je l'enseigne. Pour vous le montrer, j'ai dû prendre une vraie chair pour pouvoir souffrir les tentations de l'homme et dire à l'homme, après l'avoir instruit : "Faites comme Moi". Et tu m'as demandé si j'avais péché, étant tenté. T'en souviens-tu ? Je t'ai répondu, puisque tu ne pouvais comprendre que j'eusse été tenté sans être tombé, car il te semblait que la tentation ne convenait pas pour le Verbe et qu'il était impossible que l'Homme ne pèche pas, je t'ai répondu que tous peuvent être tentés, mais que ne sont pécheurs que ceux qui veulent l'être. Ton étonnement fut grand, tu ne croyais pas, au point que tu as insisté : "Tu n'as jamais péché ?" Alors tu pouvais être incrédule. Nous nous connaissions depuis peu. La Palestine est pleine de rabbis dont la doctrine qu'ils enseignent est l'antithèse de la vie qu'ils mènent. Mais maintenant tu sais que je n'ai pas péché, que je ne pèche pas. Tu le sais que la tentation, même la plus violente, tournée vers l'homme sain, viril, vivant parmi les hommes, entouré par eux et par Satan, ne me trouble pas jusqu'au péché. Mais au contraire, toute tentation, bien que de la repousser en augmentait la virulence, car le démon la rendait toujours plus violente pour me vaincre, était une plus grande victoire. Et ce n'est pas seulement pour la luxure, tourbillon qui a tourné autour de Moi sans pouvoir ébranler ni érafler ma volonté.

Il n'y a pas de péché là où on ne consent pas à la tentation, Judas. C'est déjà un péché là où, même sans consommer l'acte, on accueille la tentation et où on s'y arrête. Ce sera un péché véniel, mais c'est déjà se diriger vers le péché mortel qu'il prépare en vous, car accueillir la tentation et vous y arrêter par la pensée, suivre mentalement les phases d'un péché, c'est vous affaiblir vous-mêmes. Satan le sait, et c'est pour cela qu'il essaie des coups répétés, espérant toujours que l'un d'eux pénètre et travaille à l'intérieur... Après... il serait facile que celui qui est tenté se change en coupable. Toi, alors, tu n'as pas compris. Tu ne pouvais comprendre. Maintenant, tu le peux. Maintenant, tu mérites moins qu'alors de comprendre, et pourtant je te répète ces paroles que j'ai dites à toi, pour toi, parce que toi, et non pas Moi, es quelqu'un pour qui la tentation repoussée ne s'apaise pas... Elle ne s'apaise pas parce que tu ne la repousses pas totalement. Tu n'accomplis pas l'acte, mais tu en couves la pensée. Aujourd'hui ainsi, et demain... Demain tu tomberas dans le vrai péché. C'est pour cela que je t'ai enseigné, alors, de demander l'aide du Père contre la tentation, je t'ai enseigné à demander au Père de ne pas t'induire en tentation. Moi, le Fils de Dieu, Moi, déjà victorieux de Satan, j'ai demandé de l'aide au Père parce que je suis humble. Toi, non. Tu n'as pas demandé au Père le salut, la préservation. Tu es orgueilleux, et c'est pour cela que tu t'enfonces... Te souviens-tu de tout cela ? Et peux-tu maintenant comprendre ce que c'est pour Moi, vrai Homme, avec toutes les réactions de l'homme, et vrai Dieu, avec toutes les réactions de Dieu, ce que c'est pour Moi de te voir ainsi : luxurieux, menteur, voleur, traître, homicide ?

Sais-tu quel effort je m'impose pour te supporter près de Moi ? Sais-tu quelle peine pour me maîtriser, comme maintenant, pour accomplir jusqu'au bout ma mission sur toi ? Tout autre homme t'aurait saisi à la gorge, en te voyant voleur, occupé à crocheter et à prendre l'argent, en te sachant traître, et plus que traître... Moi, je t'ai parlé. Avec pitié, encore. Regarde. Ce n'est pas l'été et par la fenêtre entre la brise fraîche du soir. Et pourtant je sue comme si j'avais fatigué dans le plus rude travail. Mais ne te rends-tu pas compte de ce que tu me coûtes ? De ce que tu es ? Tu veux que je te chasse ? Non, jamais. Quand quelqu'un se noie, est un assassin celui qui le laisse aller. Tu es entre deux forces qui t'attirent. Satan et Moi. Mais si je te laisse, tu n'auras que lui seul. Et comment te sauveras-tu ? Et pourtant tu me quitteras... Tu m'as déjà quitté par ton esprit... Eh bien : je garde auprès de Moi, malgré cela, la chrysalide de Judas, ton corps dénué de la volonté de m'aimer, ton corps inerte au Bien. Je la garde tant que tu n'exiges pas aussi ce rien qu'est ta dépouille afin de la réunir à ton esprit pour pécher avec tout toi-même... Judas !... Tu ne me parles pas, ô Judas ! ? Tu n'as pas un mot pour ton Maître ? Tu n'a pas une prière à me faire ?

Je n'exige pas que tu me dises : "Pardon !" Je t'ai pardonné trop de fois sans résultat. Je sais que cette parole n'est qu'un son sur tes lèvres. Ce n'est pas un mouvement de l'esprit contrit. Je voudrais un mouvement de ton cœur. Es-tu mort au point de n'avoir plus un désir ? Parle ! As-tu peur de Moi ? Oh ! si tu me craignais ! Cela au moins ! Mais tu ne me crains pas. Si tu me craignais, je te dirais les paroles que je t'ai dites en ce jour lointain où nous parlions de tentations et de péchés : "Moi je te dis que même après le Crime des crimes, si celui qui en est coupable courait aux pieds de Dieu, avec un vrai repentir, et si en pleurant il le suppliait de le lui pardonner en s'offrant pour expier avec confiance, sans désespoir, Dieu le lui pardonnerait, et par l'expiation le coupable sauverait encore son esprit". Judas ! Si tu ne me crains pas, Moi, je t'aime encore. À mon amour infini, n'as-tu rien à demander à cette heure ?"

"Non. Ou du moins une seule chose : que tu imposes à Jean de ne pas parler. Comment veux-tu que je puisse réparer si je suis l'opprobre parmi vous ?" Il le dit avec hauteur.

Et Jésus lui répond : "Et c'est ainsi que tu le dis ? Jean ne parlera pas. Mais toi au moins, c'est Moi qui te le demande, agis de façon que rien ne transparaisse de ta ruine. Ramasse ces pièces et remets-les dans la bourse de Jeanne... Je m'arrangerai pour fermer le coffre... avec le fer dont tu t'es servi pour l'ouvrir..."

Et pendant que de mauvaise grâce Judas ramasse les pièces qui ont roulé de tous côtés, Jésus s'appuie comme s'il était las au coffre ouvert. La lumière baisse dans la pièce, mais pas assez pour ne pas laisser voir que Jésus pleure sans bruit, en regardant l'apôtre penché pour ratisser les pièces dispersées.

Judas a fini. Il va au coffre, il prend la grosse et lourde bourse de Jeanne et y met les pièces, la ferme, et dit : "Voilà !" Il s'écarte.

Jésus allonge la main pour prendre le crochet rudimentaire fabriqué par Judas et, d'une main qui tremble, il fait agir le déclic et ferme le coffre fort. Puis, appuyant le fer contre son genou, il le plie en V, puis avec le pied il finit de le déformer pour le rendre inutilisable et il le ramasse pour le cacher dans son sein. Pendant qu'il le fait, des larmes tombent sur son vêtement de lin.

Judas a finalement un mouvement de regret. Il se couvre le visage de ses mains et il éclate en sanglots en disant : *Maudit que je suis ! Je suis l'opprobre de la Terre !"

"Tu es le malheureux éternel ! Et penser que si tu voulais, tu pourrais encore être heureux !"

"Jure-moi, jure-moi que personne ne saura rien... et moi, je te jure que je me rachèterai" crie Judas.

"Ne dis pas : "et moi, je me rachèterai". Tu ne peux pas. Moi seul puis te racheter. Celui qui auparavant parlait par tes lèvres ne peut être vaincu que par Moi. Dis-moi la parole de l'humilité : "Seigneur, sauve-moi !" et je te délivrerai de celui qui te domine. Ne comprends-tu pas que je l'attends cette parole, plus que le baiser de ma Mère ?"

Judas pleure, pleure, mais il ne dit pas cette parole.

"Va ! Sors d'ici, monte sur la terrasse. Va où tu veux, mais ne fais pas de scène bruyante. Va ! Va ! Personne ne te découvrira car je veillerai. À partir de demain, tu garderas l'argent. Tout est inutile désormais."

Judas sort sans répliquer. Jésus, resté seul, s'abandonne sur un siège près de la table et la tête appuyée sur ses bras croisés sur la table, il verse des pleurs angoissés.

Quelques minutes après Jean entre doucement et il reste un moment sur le seuil. Il est pâle comme un mort. Puis il court vers Jésus et l'embrasse en suppliant : "Ne pleure pas, Maître ! Ne pleure pas ! Je t'aime aussi pour ce malheureux..." Il le relève, l'embrasse, boit les pleurs de son Dieu et pleure à son tour. Jésus l'embrasse, et les deux têtes blondes, l'une près de l'autre, échangent larmes et baisers.

Mais Jésus se domine bientôt et il dit : "Jean, par amour pour Moi, oublie tout cela. Je le veux."

"Oui, mon Seigneur. J'essaierai de le faire. Mais Toi, ne souffre plus... Ah ! Quelle douleur ! Et il m'a fait pécher, mon Seigneur. J'ai menti. J'ai dû mentir car les femmes disciples sont revenues. Non, d'abord ceux de la femme. Ils te demandaient pour te bénir. Un garçon est né sans inconvénients. J'ai dit que tu étais retourné sur la montagne... Puis les femmes sont venues et j'ai recommencé de mentir en disant que tu étais parti et que peut-être tu étais à la maison où est né le garçon... Je n'ai rien trouvé d'autre à dire. J'étais tellement abasourdi ! Ta Mère a vu que j'avais pleuré et elle m'a demandé : "Qu'as-tu, Jean ?" Elle était agitée... Elle paraissait savoir. J'ai menti pour la troisième fois en disant : "Je me suis ému pour cette femme..." À quoi peut conduire le voisinage d'un pécheur ! Au mensonge... Absous-moi, ô mon Jésus."

"Sois en paix. Efface tout souvenir de cette heure. Rien. Rien n'est arrivé... Un rêve..."

"Mais ta douleur ! Oh ! comme tu es changé, Maître ! Dis-moi ceci, ceci seulement : Judas s'est-il au moins repenti ?"

"Et qui peut comprendre Judas, mon fils ?"

"Aucun de nous. Mais Toi, si."

Jésus ne répond que par de nouvelles larmes silencieuses sur son visage fatigué.

"Ah ! Il ne s'est pas repenti !..." Jean est terrifié.

"Où est-il maintenant ? L'as-tu vu ?"

"Oui. Il s'est montré à la terrasse, a regardé s'il y avait quelqu'un, et n'ayant vu que moi, qui étais assis angoissé sous le figuier, il est descendu en courant et il est sorti par le portillon du jardin. Et alors, moi, je suis venu..."

"Tu as bien fait. Remettons en place ici les sièges dérangés et prends l'amphore, qu'il n'y ait pas de traces..."

"Il a lutté avec Toi."

"Non, Jean. Non."

"Tu es trop troublé, Maître, pour rester ici. Ta Mère comprendrait... et elle en aurait du chagrin."

"C'est vrai. Sortons... Tu donneras la clef à la voisine. Je te précède sur les rives du torrent, vers le mont..."

Jésus sort et Jean reste pour remettre tout en ordre. Puis il sort à son tour. Il donne la clef à une femme qui a sa maison à côté et il s'enfuit en courant parmi les buissons de la rive pour qu'on ne le voie pas.

À une centaine de mètres de la maison, Jésus est assis sur un rocher. Il se tourne au bruit des pas de l'apôtre. Son visage blanchit dans la lumière du soir. Jean s'est assis par terre tout près de Lui, et il pose sa tête sur ses genoux, en levant son visage pour le regarder. Il voit qu'il y a encore des larmes sur les joues de Jésus.

"Oh ! ne souffre plus ! Ne souffre plus, Maître ! Je ne puis te voir souffrir !"

"Et puis-je ne pas souffrir de cela ? Ma plus grande douleur ! Souviens-toi de cela, Jean : ce sera éternellement ma plus grande douleur !Tu ne peux encore tout comprendre... Ma plus grande douleur..." Jésus est accablé, Jean le tient serré, en l'embrassant à la taille, angoissé de ne pouvoir le consoler.

Jésus lève la tête, ouvre ses yeux qu'il gardait clos pour retenir ses larmes, et il dit : "Rappelle-toi que nous sommes trois à savoir : le coupable, toi et Moi. Et que personne d'autre ne doit savoir."

"Personne ne le saura de ma bouche. Mais comment a-t-il pu ? Tant qu'il prenait de l'argent à la bourse commune... Mais à cela !... J'ai cru être fou quand je l'ai vu... Horreur !"

"Je t'ai dit d'oublier..."

"Je m'efforce, Maître. Mais c'est trop horrible..."


"C'est horrible, oui. Oh ! Jean, Jean !" Et Jésus, embrassant le Préféré, penche sa tête sur son épaule et il pleure toute sa douleur. Les ombres, qui descendent rapidement dans ce bosquet, font disparaître dans leurs ténèbres les deux qui se tiennent embrassés.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-028.htm
TOME : 8/28


♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Judas_14

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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Sam 16 Aoû 2014 - 7:09

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_82


Le voyage en Samarie avant la Pâque d'Éphraïm à Silo

"Permets-nous de te suivre, Maître. Nous ne te donnerons pas d'ennuis" disent suppliants beaucoup d'habitants d'Éphraïm rassemblés devant la maison de Marie de Jacob qui pleure toutes ses larmes, appuyée au chambranle de la porte grande ouverte.

Jésus est au milieu de ses douze apôtres. Plus loin, en groupe autour de sa Mère, se trouventJeanne, Nique, Suzanne, Élise, Marthe et Marie, Salomé et Marie d'Alphée. Tous, aussi bien les hommes que les femmes, sont en tenue de voyage, avec les vêtements ceints et un peu retroussés à la taille pour laisser les pieds plus libres, avec des sandales neuves bien attachées, non seulement à la cheville, mais aussi au bas de la jambe, avec des lanières de cuir entrelacées, comme on fait quand on doit suivre des routes plutôt malaisées. Les hommes se sont chargés aussi des sacs des femmes.

Les gens supplient pour obtenir de Jésus la permission de le suivre alors que les petits crient, le visage redressé et les bras levés : "Un baiser ! Prends-moi dans tes bras ! Reviens, Jésus ! Reviens vite pour nous dire tant de belles paraboles ! Je te garderai les roses de mon jardin ! Je ne mangerai pas de fruits afin de les garder pour Toi ! Reviens, Jésus ! Ma brebis va avoir un petit et je veux t'offrir l'agneau, tu te feras avec sa laine un vêtement comme le mien... Si tu reviens bientôt, je te donnerai les fouaces que maman fait avec les premiers blés..." Ils piaillent comme autant d'oiseaux autour de leur grand Ami et tirent ses vêtements, se pendent à sa ceinture pour essayer de grimper dans ses bras, affectueusement tyranniques, si bien qu'ils empêchent Jésus de répondre aux adultes car il y a toujours une nouvelle petite figure à baiser.

"Mais allez-vous-en ! Cela suffit ! Laissez le Maître tranquille ! Femmes, reprenez vos enfants !" crient les apôtres qui ont hâte de commencer la route dans ces premières heures du jour. Et ils allongent aussi quelques bonnes calottes aux enfants les plus envahissants.

"Non. Laissez-les. C'est pour Moi une douceur plus fraîche que celle de l'aurore. Laissez-les faire, et laissez-moi faire. Laissez-moi me réconforter dans cet amour, pur de calculs et de troubles" dit Jésus, en défendant ses tout petits amis sur lesquels, quand il ouvre les bras comme il le fait, tombe l'ample manteau de Jésus et il les accueille à l'abri de ses ailes bleues. Les petits se serrent dans cette tiédeur et cette pénombre d'azur, silencieux et heureux comme des poussins sous les ailes maternelles.

Jésus peut finalement parler aux adultes : "Venez donc, si vous croyez pouvoir le faire."

"Et qui nous en empêche, Maître ? Nous sommes dans notre région !"

"Les grains, les vignes, les vergers exigent tout votre travail, et les brebis sont en période de tonte et d'accouplement, et celles déjà accouplées à une autre époque vont avoir des petits, et c'est le temps des foins..."



"Peu importe, Maître. Pour la tonte et la monte des brebis les vieux suffisent, les enfants et les femmes pour leur mise bas, et de même pour les foins. Les vergers et les champs peuvent attendre ! Si le grain durcit déjà dans l'épi, il faut encore du temps avant de le faucher, et désormais les vignes, les oliviers et les vergers n'ont qu'à gonfler au soleil les fruits de leurs nombreuses noces. Nous ne pouvons rien pour eux jusqu'au temps de la cueillette, c'est comme pour la mère de famille qui ne peut rien faire pour le pain tant que le levain n'a pas fait lever la pâte. Le soleil est le levain des fruits. C'est lui qui agit maintenant, comme auparavant le vent a agi pour le mariage des fleurs le long des branches. Et puis !... S'il se perdait quelque grappillon ou quelque fruit, ou si les liserons et l'ivraie étouffaient quelque épi, ce serait toujours une petite perte en comparaison de celle de ta parole !" dit un vieillard que j'ai toujours vu très honoré dans le village.

"Tu as bien parlé. Alors, partons. Marie de Jacob, je te remercie et te bénis, car tu as été pour Moi une bonne mère. Ne pleure pas ! On ne doit pas pleurer quand on a fait des œuvres bonnes."

"Ah ! je te perds et je ne te verrai plus !"

"Nous nous verrons certainement encore."

"Tu reviens ici, Seigneur ?" demande la femme avec un sourire au milieu de ses larmes. "Quand ?"

"Ici je n'y reviendrai pas, comme maintenant... "

"Et alors, où nous verrons-nous donc, si moi, pauvre vieille, je ne puis venir par les chemins du monde pour te chercher ?"

"Au Ciel, Marie. Dans la Maison de notre Père, où il y a de la place pour les juifs comme pour les samaritains, où il y a une place pour ceux qui m'aimeront en esprit et en vérité. Tu le fais déjà puisque tu me crois le Fils du vrai Dieu..."

"Oh ! si je le crois ! Mais pour nous il n'y a pas d'espoir, car Toi seul, tu nous aimes sans différence."

"Quand je m'en serai allé, eux (il montre les apôtres) viendront à ma place. Et en souvenir de Moi, ils ne demanderont pas quel est celui qui demande à entrer dans le troupeau du véritable et unique Pasteur."

"Je suis vieille, Seigneur. Je ne vivrai pas assez pour voir cela. Tu es jeune et fort, et pendant longtemps elle t'aura ta Mère, et ils te posséderont ceux qui t'aiment et qui sont de ton peuple... Pourquoi pleures-tu, ô Mère du Béni ?" demande-t-elle, étonnée de voir tomber des larmes des yeux de la Vierge Mère.

"Je n'ai rien que ma douleur... Adieu, Marie. Que Dieu te bénisse à cause de tout ce que tu as fait pour mon Fils. Et souviens-toi que si ta douleur est grande, il n'y a pas de douleur plus grande que la mienne, et il n'y en aura pas sur la Terre. Jamais ! Souviens-toi de la douloureuse Marie de Nazareth... Adieu !" Et Marie s'en détache en pleurant après avoir embrassé la petite vieille à l'entrée de la maison pour se mettre en route parmi les femmes et avec Jean à son côté.

Jean qui lui dit, un peu courbé selon son habitude et le visage levé pour regarder Celle à laquelle il parle : "Ne pleure pas ainsi, Marie. Si beaucoup le haïssent, beaucoup l'aiment ton Jésus. Soulage ton esprit, ô Mère, en regardant ceux qui maintenant et au cours des siècles aimeront ton Fils avec tout eux-mêmes" et il termine doucement, presque en murmurant pour Marie seule, qu'il guide et soutient en la tenant près du coude, pour qu'elle ne bute pas dans les pierres du petit chemin, aveuglée comme elle l'est par les larmes : "Ce ne seront pas toutes les mères qui pourront voir leur enfant aimé... Il s'en trouvera certaines qui crieront angoissées : "Pourquoi l'ai-je conçu ?"

Jésus les rejoint, car Marie et Jean sont restés seuls, un peu en arrière des femmes disciples.Jacques d'Alphée est avec Jésus. Les autres sont en arrière, en groupe, pensifs et tristes comme le sont les femmes qui sont tout en avant. En dernier, en tas, beaucoup d'hommes d'Éphraïm qui bavardent entre eux.

"Les adieux sont toujours tristes, Maman. Surtout quand on ne sait pas que quelque chose qui finit est le commencement d'une chose plus parfaite. C'est la triste conséquence du péché, et cela restera même au-delà du pardon. Mais les hommes la supporteront avec plus de courage car ils auront Dieu pour ami."

"Tu as raison, Jésus. Mais il y a une douleur que Dieu laisse goûter tout en étant l'Ami le plus paternel qui puisse exister. Pour moi, Il est tel. Oh ! Dieu est bon ! Tellement bon. Je ne voudrais pas que Jacques et Jean ni aucun autre fussent scandalisés par mes pleurs. Dieu est bon, Il a toujours été bon avec la pauvre Marie. Je me le suis dit chaque jour depuis que je sais penser. Et maintenant... maintenant je le dis à chaque heure, à chaque instant. Je le dis toujours plus à mesure que la douleur m'accable... Dieu est bon. Il t'a donné à moi : Fils affectueux et saint et capable, même seulement comme enfant, de compenser toute douleur de femme... Il t'a donné à moi, pauvre jeune fille élevée au rang de Mère de son Verbe incarné... Et cette joie de pouvoir t'appeler "Fils", ô mon Seigneur adoré, est si grande que les larmes ne devraient pas tomber de mes cils pour n'importe quel martyre, si j'étais parfaite comme tu l'enseignes.

Mais je suis une pauvre femme, mon Fils ! Et tu es mon Enfant... Et... quelle est la mère qui puisse ne pas pleurer quand elle sait que son enfant est haï, et elle le sait ?... Mon Fils, secours ta servante... Certainement il y avait encore en moi de l'orgueil quand je pensais être forte... Mais alors... le temps était encore éloigné... Maintenant il est ici... Je le sens... Secours-moi, Jésus, mon Dieu ! Certainement si Dieu me laisse souffrir ainsi, il y a un but de bonté pour moi. Car s'il le voulait, Il pourrait me faire souffrir seulement de ce qui arrive... Lui t'a pourtant formé ainsi dans mon sein !... Comme... Il n'est pas de comparaison pour dire comment tu as été fait... Mais Il veut que je souffre... et qu'il en soit béni... toujours. Mais Toi, Jésus, aide-moi. Aidez-moi tous... tous... car c'est une mer tellement amère, celle où je me désaltère..."


"Disons la prière, nous quatre. Nous qui t'aimons de tout notre cœur, Maman. Ici, ton Fils, et Jean et Jacques qui t'aiment comme si tu étais leur mère... "Notre Père qui es aux Cieux..." et Jésus, conduisant le petit chœur des trois voix qui le suivent en sourdine, dit toute entière l'oraison dominicale en appuyant beaucoup sur certaines phrases telles quel "que ta volonté soit faite"... "ne nous induis pas en tentation." Puis il dit : "Voilà, le Père nous aidera pour faire sa volonté, même si elle est telle que notre faiblesse d'humains pense ne pouvoir l'accomplir, et Il ne nous induira pas dans la tentation de penser qu'il est moins bon, car pendant que nous boirons le calice très amer, Il nous donnera son ange pour essuyer par un réconfort céleste nos lèvres abreuvées d'amertume." Jésus tient par la main sa Mère qui a lutté courageusement avec ses larmes pour les refouler au fond de son cœur. À leurs côtés, près de Marie : Jean; près de Jésus : Jacques d'Alphée; les deux apôtres les regardent émus.

Les femmes disciples se sont retournées parfois en entendant Marie pleurer et les quatre qui priaient, mais elles se sont abstenues de les rejoindre. En arrière, les apôtres se sont demandés : "Mais pourquoi pleure-t-elle ainsi Marie ?" J'ai dit les apôtres, mais je veux dire tous sauf Judas de Kériot qui avance un peu isolé et très préoccupé, presque sombre, si bien que Thomas le remarque et dit aux autres : "Mais qu'a Judas pour être ainsi ? On dirait quelqu'un qui va à la mort !"

"Il a peut-être peur de retourner en Judée" lui répond Matthieu.

"Moi... Que t'a dit le Maître pour l'argent ?" demande le Zélote.

"Rien de spécial. Il m'a dit : "Maintenant nous revenons à la première situation. Judas le trésorier et vous distributeurs des aumônes. Pour les dépenses, les disciples veulent y subvenir". Cela ne m'a pas semblé vrai ! J'en ai tant manié de l'argent que je l'ai pris en haine."

"Et elles s'occupent bien de nous les femmes disciples. Ces sandales si bien faites. On ne dirait même pas que l'on marche en montagne. Qui sait combien elles coûtent !" dit Pierre en regardant son pied chaussé de ces sandales neuves qui protègent le talon et la pointe des pieds et soutiennent la cheville avec les fines lanières de cuir.

"C'est Marthe qui y a pensé. On voit sa main riche et prévoyante. Les autres fois on les liait aussi de cette façon, mais ces ficelles étaient un supplice. On ne perdait pas la semelle, mais on perdait la peau de la jambe..." dit André.

"Et on se blessait les doigts et les talons... Voilà pourquoi celui qui nous suit les portait toujours ainsi !" dit Pierre en montrant Judas de Kériot.

La route monte, monte vers la cime du mont. Quand on regarde en arrière on voit Éphraïm toute blanche dans le soleil, et elle paraît déjà en contrebas par rapport à ceux qui avancent...

Puis les apôtres se fondent avec les femmes disciples pour les aider à franchir le sentier très rapide à cet endroit, et même Barthélemy, resté en arrière, dit à ceux d'Éphraïm : "Vous nous avez montré un sentier malaisé, amis."

"Oui. Mais une fois passé ce bois, il y a une route commode qui en peu de temps mène à Silo. Vous pourrez alors vous y reposer plusieurs heures au lieu d'arriver à la nuit par un autre chemin" répond quelqu'un.

"Tu as raison. Plus le chemin est fatigant et plus vite il mène au but."

"Ton Maître le sait, aussi il ne s'épargne pas. Ah ! nous ne pourrons oublier !... Surtout qu'il nous a comblés de bienfaits en ces derniers jours, après avoir entendu certains de notre région qui l'ont insulté si injustement. Lui seul est bon et aussi il comble de bienfaits même ceux qui le haïssent."

"Vous ne l'avez pas haï."

"Nous, non. Mais il y en a tant d'autres aussi que nous ne haïssons pas et pourtant nous sommes haïs sans raison."

"Agissez vous aussi comme Lui agit, sans peur, et vous verrez que..."

"Et vous, pourquoi ne le faites-vous pas, alors ? C'est la même chose. Nous d'ici, vous de là, au milieu une montagne : celle élevée par une commune erreur. En haut, notre commun Dieu. Mais pourquoi alors ni vous, ni nous, ne montons-nous pas la pente pour nous trouver là-haut, aux pieds de Dieu, et proches les uns des autres ?"

Barthélemy comprend le reproche qui est juste, car lui, dans sa vertu indéniable, a la hantise bien forte d'être Israélite et il est inexorable pour tout ce qui n'est pas Israël. Il détourne la conversation sans répondre directement. Il dit : "Pas besoin de monter. Dieu est descendu parmi nous. Il suffit de le suivre."

"Le suivre, oui. Nous voudrions bien, mais si nous entrions en Judée avec Lui, ne Lui ferions-nous pas du mal sans doute ? Tu le sais toi aussi de quoi on l'accuse et de quoi on nous accuse : d'être des samaritains, ce qui revient à dire : des démons."

Barthélemy soupire et puis il les laisse en plan en disant : "On me fait signe d'aller..." et il allonge le pas.

Ceux d'Éphraïm le regardent aller et l'un d'eux murmure : "Ah ! Il n'est pas comme Lui ! Ce que nous perdons en le perdant !" et il fait un geste de découragement.

"Tu sais, Élie, que Lui hier soir a porté une grosse somme au chef de la synagogue pour qu'il la passe à Marie de Jacob pour qu'elle ne souffre plus de la faim ?"

"Moi, non. Et pourquoi ne l'a-t-il pas donnée à elle ?"

"Pour que la petite vieille ne le remercie pas. Elle ne le sait pas encore. Moi, je le sais parce qu'il me l'a dit pour demander conseil s'il ne serait pas bien de lui acheter la propriété de Jean que son frère veut vendre, ou de lui donner l'argent peu à peu. J'ai conseillé d'acheter la propriété. Elle lui donnera du grain, de l'huile et du vin suffisamment pour vivre sans avoir faim. Tandis que l'argent... Ce..."

"Mais alors, c'est vraiment une grosse somme ?!" dit un troisième.

"Oui. Le chef de notre synagogue a eu beaucoup, même pour les autres pauvres de la ville et des campagnes. Pour que "eux aussi puissent faire fête à la Pâque des Azymes, pour saluer le temps nouveau" a dit le Maître."

"Il a dû dire : "l'an nouveau"."

"Non. Il a dit : "le temps nouveau". Si bien que le chef de la synagogue ne se servira pas de cet argent avant la Fête des Azymes."

"Oh ! qu'aura-t-il voulu dire ?" demandent plusieurs.

"Que voudra-t-il dire ? Je ne sais pas. Personne ne le sait, pas même Jean, son aimé, ni Simon de Jonas qui est le chef des disciples. Je le leur ai demandé, et le premier a blêmi, le second est resté absorbé comme quelqu'un qui cherche à deviner."

"Et Judas de Kériot ? C'est quelqu'un d'important parmi eux, peut-être plus que les deux autres. Lui sait tout, dit-il, il saura cela aussi. Allons l'interroger. Il lui plaît de dire ce qu'il sait."

Ils se mettent à rejoindre Judas qui est encore isolé comme au début, seul désormais sur le sentier, car les autres ont pris un détour et il semble qu'ils aient été engloutis dans la verdure épaisse de la pente.

"Judas, écoute-nous. Le Maître dit qu'il veut une grande fête pour la Pâque des Azymes, pour saluer le temps nouveau. Que voudra-t-il dire ?"

"Moi, je ne sais pas. Suis-je peut-être dans la pensée du Maître, moi ? Demandez-le à Lui qui vous aime tant" et il hâte le pas, les laissant déçus.

"Lui aussi n'est pas le Maître. Il n'y a personne qui ait sa pitié..." disent-ils en secouant la tête.

"Eh bien, est-ce que nous suivons eux ? C'est Lui que nous suivons ! Et nous faisons bien de faire ainsi. Allons. Qui sait si de ses lèvres, avant qu'il aille en Judée, on ne pourra pas savoir ce que cela veut dire."

Et ils hâtent le pas pour rejoindre les autres, qui se sont assis pour se reposer sous un bois de rouvres centenaires, et ont sous leurs yeux un des plus beaux panoramas de la Palestine.

*
SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-029.htm
TOME : 8/29


♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Jysus_15
Jésus et Ses Apôtres
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Visage de J?sus Re: ♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥

Message par Maud Mar 19 Aoû 2014 - 7:18

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_83


À Silo. Les mal conseillés


Jésus parle au milieu d'une place couverte d'arbres. Le soleil, qui commence à peine son coucher, l'illumine d'une lumière jaune verte qui filtre à travers les feuilles nouvelles des platanes géants. On dirait que sur la vaste place soit étendu un voile fin et précieux qui filtre, sans l'arrêter, la lumière solaire.

Jésus dit : "Écoutez. Autrefois un grand roi envoya dans une partie de son royaume, dont il voulait éprouver la justice, son fils bien-aimé en lui disant : "Va, parcours tous les endroits, fais du bien en mon nom, renseigne-les sur moi, fais-moi connaître et fais-moi aimer. Je te donne tout pouvoir et tout ce que tu feras sera bien fait".

Le fils du roi, après avoir reçu la bénédiction paternelle, se rendit où le Père l'avait envoyé et avec quelques-uns de ses écuyers et amis, il se mit à parcourir inlassablement cette partie du royaume de son père. Or cette région, par une suite d'événements malheureux, s'était moralement divisée en parties opposées l'une à l'autre. Chacune pour son propre compte poussait de grands cris et envoyait au roi des suppliques pressantes pour dire chacune qu'elle était la meilleure, la plus fidèle, et que les voisines étaient perfides et méritaient un châtiment. Aussi le fils du roi se trouva en face de citadins, dont les humeurs variaient selon la ville à laquelle ils appartenaient, et qui se ressemblaient en deux choses : la première c'était pour chacun de se croire meilleur que les autres, et la seconde de vouloir ruiner la ville voisine et ennemie, en la faisant tomber dans l'estime du roi. Juste et sage comme il l'était, le fils du roi tenta alors d'instruire, avec beaucoup de miséricorde, à la justice, chaque partie de cette région pour la rendre amie et chérie par son père. Et, comme il était bon, il y parvenait bien que lentement car, comme il arrive toujours, seuls suivaient ses conseils ceux de chacune des diverses parties de la région qui avaient le cœur droit. Au contraire, il est juste de le dire, c'était là où avec mépris on disait qu'il y avait moins de sagesse et de bonne volonté qu'il trouvait plus de désir de l'écouter et de devenir sage dans la vérité. Alors ceux des provinces voisines dirent : "Si nous n'essayons pas d'obtenir les faveurs du roi, elles iront toutes à ceux que nous méprisons. Allons troubler ceux que nous haïssons et allons-y en faisant semblant d'être convertis nous aussi et disposés à déposer les haines pour faire honneur au fils du roi".

Et ils y allèrent. Ils se répandirent en qualité d'amis dans les villes de la province rivale, conseillant, avec une fausse bonté, les choses qu'il fallait faire pour honorer toujours plus et toujours mieux le fils du roi, et par conséquent le roi son père. Car l'honneur rendu au fils envoyé par le père est toujours aussi un honneur rendu à celui qui l'a envoyé. Mais ces gens n'honoraient pas le fils du roi, au contraire ils le haïssaient fortement au point de vouloir le rendre odieux aux sujets et au roi lui-même. Ils furent tellement rusés dans leur fausse bonhomie, ils surent si bien présenter leurs conseils comme excellents, que beaucoup de la région voisine accueillirent comme bon ce qui était mauvais, et quittèrent la voie juste qu'ils suivaient pour en prendre une qui était injuste, et le fils du roi constata que chez beaucoup sa mission échouait.

Maintenant vous, dites-moi : qui fut le plus grand pécheur aux yeux de Dieu ? Quel est le péché des conseillers et celui de ceux qui acceptèrent leurs conseils ? Et je vous demande encore : avec qui ce bon roi aura été le plus sévère ? … Vous ne savez pas me répondre ? Je vais vous le dire.

> Le plus grand pécheur, aux yeux du roi, fut celui qui poussa au mal son propre prochain, par haine pour lui qu'il voulait rejeter dans les ténèbres d'une ignorance encore plus profonde, par haine envers le fils du roi qu'il voulait arracher à sa mission en le faisant paraître incapable aux yeux du roi et des sujets, par haine envers le roi lui-même car, si l'amour donné au fils est de l'amour donné au père, pareillement la haine donnée au fils est de la haine donnée au père.

Donc le péché de ceux qui donnaient de mauvais conseils, avec pleine intelligence de conseiller le mal, était un péché de haine en plus que de mensonge, de haine préméditée, et le péché de ceux qui acceptèrent le conseil en le croyant bon, était uniquement un péché de sottise. Mais vous savez bien qu'est responsable de ses actions celui qui est intelligent, alors que celui qui, à cause de la maladie ou d'autre chose, est sot, n'est pas responsable personnellement, mais ce sont ses parents qui sont responsables pour lui. C'est pour cela qu'un enfant, qui n'est pas arrivé à sa majorité, est tenu pour irresponsable, et c'est le père qui répond des actions du fils. Pour cette raison le roi, qui était bon, fut sévère avec les mauvais conseillers intelligents, et bienveillant envers ceux qu'ils avaient trompés, auxquels il adressa seulement un reproche, celui d'avoir cru à tel ou tel sujet avant d'interroger directement le fils du roi et de savoir de lui les choses qu'il fallait vraiment faire. Car c'est seulement le fils du père qui connaît réellement la volonté de son père.

Telle est la parabole, ô peuple de Silo. De Silo à qui plusieurs fois au cours des siècles furent donnés par Dieu, par les hommes ou par Satan, des conseils de différentes natures. Les uns fleurirent en bien quand on les suivit comme de bons conseils, ou quand on les repoussa après les avoir reconnus comme de mauvais conseils. Les autres fleurirent en mal quand ils ne furent pas accueillis quand ils étaient saints ou accueillis quand ils étaient mauvais .

En effet l'homme a cette magnifique liberté de volonté, et il peut vouloir librement le bien ou le mal, et il a l'autre magnifique don de l'intelligence capable de discerner le bien et le mal, et donc ce n'est pas tant le conseil lui-même que la manière dont on l'accueille qui peut donner la récompense ou le châtiment. Si personne ne peut empêcher les mauvais de tenter leur prochain pour le ruiner, rien ne peut interdire aux bons de repousser la tentation et de rester fidèles au bien.

Le même conseil peut nuire à dix et servir à dix autres. Car si celui qui le suit se nuit, celui qui ne le suit pas est utile à son âme. Que personne donc ne dise : "Ils nous ont dit de faire". Mais que chacun dise sincèrement : "J'ai voulu faire". Vous aurez alors au moins le pardon que l'on donne à ceux qui sont sincères. Et si vous n'êtes pas fixés sur la bonté du conseil que vous recevez, méditez avant de l'accepter et de le mettre en pratique. Méditez en invoquant le Très-Haut qui ne refuse jamais ses lumières aux esprits de bonne volonté. Et si votre conscience, éclairée par Dieu, voit ne serait-ce qu'un seul point, petit, imperceptible, mais tel qu'il ne peut exister dans une œuvre de justice, dites alors : "Je ne ferai pas cela, car c'est une justice impure".

Oh ! en vérité je vous dis que celui qui fera bon usage de son intelligence et de son libre arbitre et qui invoquera le Seigneur pour voir la vérité des choses, ne sera pas ruiné par la tentation, car le Père des Cieux l'aidera à faire le bien en dépit de toutes les embûches du monde et de Satan.

Rappelez-vous Anne d'Elcana et rappelez-vous les fils d'Éli. L'ange lumineux de la première avait conseillé à Anne de faire vœu au Seigneur s'il la rendait féconde Le prêtre Éliconseilla à ses fils de rentrer dans la justice et de ne pas continuer de pécher contre le Seigneur Et pourtant, bien que pour la lourdeur de l'homme, il soit plus facile de comprendre la voix d'un autre homme, plutôt que le langage spirituel et insensible (aux sens physiques) de l'ange du Seigneur parlant à l'esprit, Anne d'Elcana accueillit le conseil parce qu'elle était bonne et se tenait droite en présence du Seigneur, et elle enfanta un prophète, alors que les fils d'Éli, parce qu'ils étaient mauvais et éloignés de Dieu, n'accueillirent pas le conseil de leur père et, punis par Dieu, moururent de mort violente.

Les conseils ont deux valeurs : celle de la source dont ils proviennent, et elle est déjà grande car elle peut avoir des conséquences incalculables, et celle du cœur auquel ils sont donnés. La valeur que leur donne le cœur auquel ils sont proposés est une valeur non seulement incalculable, mais immuable. Car si le cœur est bon et suit le bon conseil, il donne au conseil une valeur d'œuvre juste, et s'il ne le fait pas, il enlève la seconde partie de la valeur à celui-ci qui reste un conseil mais pas une œuvre, c'est-à-dire un mérite seulement pour celui qui le donne. Et si le conseil est mauvais et n'est pas accueilli par un cœur bon, tenté en vain avec des flatteries et des terreurs pour le mettre en pratique, il acquiert une valeur de victoire sur le Mal et de martyre par fidélité au Bien, et prépare ainsi un grand trésor dans le Royaume des Cieux.

Quand par conséquent votre cœur est tenté par d'autres, méditez, en vous mettant sous la lumière de Dieu si ce peut être une parole bonne et si, avec l'aide de Dieu qui permet les tentations mais ne veut pas votre ruine, vous voyez que ce n'est pas une chose bonne, sachez vous dire à vous-mêmes et à celui qui vous tente : "Non. Je reste fidèle à mon Seigneur et que cette fidélité m'absolve de mes péchés passés et me réadmette non pas au dehors, près des portes du Royaume, mais à l'intérieur de ses frontières, parce que c'est aussi pour moi que le Très-Haut a envoyé son Fils pour me conduire au salut éternel".

Allez. Si quelqu'un a besoin de Moi, vous savez où je suis au repos pour la nuit. Que le Seigneur vous éclaire."

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-030.htm
TOME : 8 /30



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Anne d' Elcana rendue féconde
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Message par Maud Mer 20 Aoû 2014 - 7:08

♥ Découverte quotidienne de l'Oeuvre de Maria Valtorta ♥ - Page 29 Maria_84

À Lébona. Les mal conseillés.
Encore sur la valeur des conseils



Ils vont entrer dans Lébona. La ville ne me paraît ni très importante ni belle, mais en compensation elle est très fréquentée car déjà sont en mouvement les caravanes qui descendent pour la Pâque à Jérusalem venant de la Galilée et de l'Iturée, de la Gaulanitide, de la Trachonitide, de l'Auranitide et de la Décapole. Je dirais que Lébona est sur une route caravanière ou plutôt que c'est un nœud de routes caravanières qui viennent de ces régions, de la Méditerranée aux monts à l'est de la Palestine, et aussi du nord, pour se réunir en cet endroit sur la grand-route qui mène à Jérusalem. Cette préférence des gens vient probablement du fait que cette route est surveillée de très près par les romains, et par conséquent les gens se sentent plus à l'abri du danger de mauvaises rencontres avec les larrons. C'est ce que je pense, mais peut-être cette préférence vient d'autres causes, de souvenirs historiques ou sacrés. Je ne sais pas.

Les caravanes, étant donnée l'heure favorable — je jugerais d'après le soleil qu'il est aux environs de huit heures du matin — sont en train de se mettre en mouvement dans un grand vacarme de voix, de cris, de braiments, de sonnailles, de roues. Femmes qui appellent leurs enfants, hommes qui excitent les animaux, vendeurs qui offrent leurs marchandises, négociations entre les vendeurs samaritains et ceux... moins hébreux, c'est-à-dire ceux de la Décapole et des autres régions, peu intransigeants parce qu'elles sont mêlées davantage à l'élément païen, refus dédaigneux et presque injurieux quand un malheureux vendeur de Samarie s'approche pour offrir ses produits à quelque champion du judaïsme. Il semble qu'ils ont approché le diable en personne tant ils crient à l'anathème... en suscitant des réactions très vives de la part des samaritains offensés. Et il s'ensuivrait quelque bagarre s'il n'y avait pas les soldats romains pour faire bonne garde.

Jésus avance au milieu de cette confusion. Autour de Lui, les apôtres, en arrière les femmes disciples et derrière celles-ci le groupe de ceux d'Éphraïm augmenté d'un grand nombre de ceux de Silo.

Un murmure précède le Maître. Il se propage depuis ceux qui le voient à ceux qui sont plus loin et ne le voient pas encore. Un murmure plus fort le suit, et plusieurs suspendent leur départ pour voir ce qui arrive.

Ils se demandent : "Comment ? Il s'éloigne de la Judée de plus en plus ? Quoi ? Il prêche maintenant en Samarie ?"

Une voix chantante de Galilée : "Les saints l'ont repoussé et Lui s'adresse à ceux qui ne sont pas saints pour les sanctifier, à la honte des juifs."

Une réponse plus acre que du venin acide : "Il a retrouvé son nid et ceux qui écoutent sa parole de démon."

Une autre voix : "Taisez-vous, assassins du Juste ! Cette persécution vous marquera pour les siècles du nom le plus odieux. Vous êtes corrompus trois fois plus que nous de la Décapole."

Une autre voix de vieux, tranchante : "Tellement juste qu'il fuit le Temple pour la Fête des Fêtes. Hé ! Hé ! Hé !".

Quelqu'un d'Éphraïm, rouge de colère : "Ce n'est pas vrai. Tu mens, vieux serpent ! Il va maintenant à sa Pâque."

Un scribe barbu, méprisant : "Par la route du Garizim."

"Non, du Moriah. Il vient nous bénir car Lui sait aimer, puis il monte vers votre haine, maudits !"

"Tais-toi, samaritain !"

"C'est à toi de te taire, démon !"

"Qui se soulève aura les galères : c'est l'ordre de Ponce Pilate. Souvenez-vous et dispersez-vous" impose un officier romain en faisant manœuvrer ceux qui dépendent de lui pour séparer ceux qui sont déjà en train d'en venir aux mains dans une de ces si nombreuses disputes régionales et religieuses, toujours près de s'élever dans la Palestine du temps du Christ.

Les gens se dispersent, mais personne ne s'en va plus. On ramène les ânes aux écuries, ou bien on les détourne vers l'endroit où est allé Jésus. Femmes et enfants descendent de selle et suivent leurs maris ou leurs pères, ou bien restent en groupes qui bavardent, si l'humeur maritale ou paternelle en donne l'ordre "pour qu'elles n'entendent pas parler le démon." Mais les hommes, amis, ennemis ou simplement curieux, courent vers l'endroit où est allé Jésus. Et, en courant, ils ont des mauvais regards, ou se réconfortent de cette joie inespérée, ou posent des questions suivant que ce sont des amis avec des ennemis, ou des amis entre eux, ou des curieux.

Jésus s'est arrêté sur une place, près de l'inévitable fontaine ombragée par un arbre et il se place contre le mur humide de la fontaine. Ici elle est recouverte d'un petit portique ouvert seulement d'un côté; c'est plutôt un puits qu'une fontaine. Il ressemble au puits de En Rogel.

Il est en train de parler avec une femme qui Lui présente son petit garçon qu'elle a dans ses bras. Je vois que Jésus consent et qu'il met sa main sur la tête de l'enfant. Et tout de suite après, je vois que la mère lève son enfant et crie : "Malachie, Malachie, où es-tu ? Notre garçon n'est plus difforme" et la femme crie son hosanna auquel s'unit celui de la foule pendant qu'un homme se fraie un passage et va se courber devant le Seigneur.

Les gens commentent. Les femmes, mères pour la plupart, se félicitent avec la femme qui a eu cette faveur. Ceux qui sont les plus éloignés allongent le cou et demandent : "Mais qu'est-il arrivé ?" après avoir crié hosanna pour s'unir à ceux qui savent ce qui est arrivé.

"Un enfant bossu, bossu au point de tenir difficilement sur ses jambes. Il était long ainsi, exactement ainsi, tellement il était courbé. Il paraissait trois ans et en avait sept. Maintenant, regardez-le ! Il est grand comme tous, droit comme un palmier, agile. Voyez-le comme il grimpe au muret de la fontaine pour qu'on le voie et pour voir lui-même. Et comme il rit joyeusement !"

Un galiléen se tourne vers quelqu'un qui a de larges nœuds à sa ceinture — je ne crois pas me tromper en l'appelant rabbi — et il lui demande : "Hé ! Qu'en dis-tu ? C'est une œuvre du démon, cela aussi ? En vérité si le démon agit ainsi, en enlevant tant de malheurs pour rendre les hommes heureux et faire louer Dieu, il faudra dire que c'est le meilleur serviteur de Dieu !"

"Blasphémateur, tais-toi !"

"Je ne blasphème pas, rabbi. Je commente ce que je vois. Pourquoi votre sainteté ne nous apporte-t-elle que fardeaux et malheurs et nous met-elle sur les lèvres des reproches et des pensées de défiance envers le Très-Haut, alors que les œuvres du Rabbi de Nazareth nous donnent la paix et la certitude que Dieu est bon ?"

Le rabbi ne répond pas, il s'éloigne et s'en va bavarder avec d'autres de ses amis. L'un d'eux se détache et se fraie un passage pour aller en face de Jésus, qu'il interpelle ainsi, sans le saluer d'abord : "Que comptes-tu faire ?"

"Parler à ceux qui demandent ma parole" répond Jésus en le regardant dans les yeux, sans mépris, mais aussi sans peur.

"Cela ne t'est pas permis. Le Sanhédrin ne le veut pas."

"C'est la volonté du Très-Haut, dont le Sanhédrin devrait être le serviteur."

"Tu es condamné, tu le sais. Tais-toi, ou..."

"Mon nom est Parole. Et la Parole parle."

"Aux samaritains... Si tu étais vraiment ce que tu dis que tu es, tu ne donnerais pas ta parole aux samaritains."

"Je l'ai donnée et je la donnerai aux galiléens, comme aux juifs et comme aux samaritains, car il n'y a pas de différence aux yeux de Jésus."

"Essaie donc de la donner en Judée, si tu l'oses !..."

"En vérité, je la donnerai. Attendez-moi. N'es-tu pas Éléazar ben Parta ? Oui ? Alors il est certain que tu verras Gamaliel avant Moi. Dis-lui en mon nom qu'à lui aussi je donnerai, après vingt et un ans, la réponse qu'il attend. As-tu compris ? Rappelle-toi bien : à lui aussi, je donnerai après vingt et un ans, la réponse qu'il attend [1]. Adieu."

"Où ? Où veux-tu parler ? Où veux-tu répondre au grand Gamaliel ? Il a certainement quittéGamala de Judée pour entrer à Jérusalem. Mais s'il était encore à Gamala, tu ne pourrais pas lui parler."

"Où ? Et où se rassemblent les scribes et les rabbis d'Israël ?"

"Dans le Temple ? Toi, dans le Temple ? Et tu oserais ? Mais tu ne sais pas..."

"Que vous me haïssez ? Je le sais. Il me suffit de n'être pas haï par mon Père. D'ici peu le Temple frémira à cause de ma parole." Et sans plus s'occuper de son interlocuteur il ouvre les bras pour imposer le silence aux gens qui s'agitent en deux courants opposés et manifestent contre les perturbateurs.

Il se fait un silence subit, et Jésus parle dans ce silence : "À Silo j'ai parlé des mauvais conseillers et de ce qui peut réellement faire, d'un conseil, un bien ou un mal. À vous qui n'êtes plus seulement de Lébona, mais de tous les endroits de la Palestine, je propose maintenant cette parabole. Nous l'appellerons : "La parabole des mal conseillés".

Écoutez. Il y avait une fois une famille très nombreuse, au point d'être une tribu. Les nombreux enfants s'étaient mariés en formant autour de la première famille beaucoup d'autres familles avec de nombreux enfants. Ces derniers à leur tour, en se mariant, avaient formé d'autres familles. De sorte que le vieux père s'était, pour ainsi dire, trouvé à la tête d'un petit royaume dont il était le roi. Comme il arrive toujours dans les familles, parmi les nombreux enfants et les enfants des enfants, il y en avait de différents caractères : des bons et justes, des orgueilleux et injustes. Ceux qui étaient contents de leur sort et ceux qui étaient envieux, leur part leur semblant plus petite que celle d'un frère ou d'un parent. Et il y avait, près du plus mauvais, le meilleur de tous. Et il était naturel que ce dernier fût le plus tendrement aimé du père de toute la grande famille. Et, comme il arrive toujours, le mauvais et ceux qui lui ressemblaient davantage, haïssaient le bon parce qu'il était le plus aimé, ne réfléchissant pas qu'eux aussi auraient pu être aimés s'ils avaient été bons comme lui. Et celui qui était bon et auquel le père confiait ses pensées pour qu'il les dît à tous, était suivi par d'autres qui étaient bons. De cette façon la grande famille s'était divisée en trois parties : celle des bons et celle des mauvais, et entre l'une et l'autre la troisième partie faite des indécis, qui se sentaient attirés vers le bon fils, mais craignaient le fils mauvais et ceux de son parti.

Cette troisième partie louvoyait entre l'une et l'autre des deux premières et ne savait pas se décider avec fermeté pour l'une ou l'autre. Alors le vieux père, en voyant cette indécision, dit à son fils bien-aimé : "Jusqu'à présent tu as dépensé ta parole spécialement pour ceux qui l'aiment et pour ceux qui ne l'aiment pas, parce que les premiers te la demandent pour m'aimer toujours plus avec justice, et parce que les autres sont des sots qu'il faut rappeler à la justice. Mais tu vois que ces sots non seulement ne l'accueillent pas en restant ce qu'ils étaient, mais qu'à leur première injustice envers toi, qui leur portes mon désir, ils joignent celle de corrompre par de mauvais conseils ceux qui ne savent pas vouloir fortement prendre le meilleur chemin. Va donc les trouver, et parle-leur de ce que je suis, et de ce que tu es, et de ce qu'ils doivent faire pour être avec moi et avec toi".

Le fils, toujours obéissant, alla comme le voulait le père, et chaque jour il conquérait quelque cœur. Et le père vit ainsi clairement quels étaient ses vrais fils rebelles, et il les regardait avec sévérité, sans cependant leur faire des reproches parce qu'il était père, et qu'il voulait les attirer à lui par la patience, l'amour et l'exemple des bons.

Mais les mauvais dirent quand ils se virent seuls : "Ainsi il apparaît trop clairement que nous sommes les rebelles. Auparavant ils nous confondaient parmi ceux qui n'étaient ni bons ni mauvais. Maintenant, vous les voyez, ils vont tous derrière le fils aimé. Il faut agir, détruire son œuvre. Allons, en feignant de nous être ravisés, parmi ceux qui sont à peine convertis, et aussi près des plus simples des meilleurs; et répandons le bruit que le fils aimé feint de servir le père, mais qu'en réalité il se fait des partisans pour ensuite se révolter contre lui; ou bien disons que le père a l'intention d'éliminer son fils et ses partisans, parce qu'ils triomphent trop et offusquent sa gloire de père-roi et que par conséquent, pour défendre le fils aimé et trahi, il faut le retenir parmi nous, loin de la maison paternelle où l'attend la trahison".

Et ils allèrent, si finement rusés en suggérant et répandant leurs avis et leurs conseils, que beaucoup tombèrent dans le piège, spécialement ceux qui étaient convertis depuis peu, auxquels les mauvais conseillers donnaient ce mauvais conseil : "Voyez combien il vous a aimés ? Il a préféré venir parmi vous plutôt que de rester près de son père ou du moins près de ses bons frères. Il a tant fait qu'en présence du monde il vous a relevé de votre abjection d'êtres qui ne savaient pas ce qu'ils voulaient et dont tout le monde, à cause de cela, se moquait. À cause de cette prédilection à votre égard, vous avez le devoir de le défendre, et même de le retenir, de force si vos paroles de persuasion ne suffisent pas pour le maintenir dans votre camp. Ou bien soulevez-vous pour le proclamer votre chef et roi et marchez contre le père inique et ses fils iniques comme lui". Certains hésitaient en faisant remarquer : "Mais lui veut, a voulu que nous allions avec lui pour honorer le père, et il nous a obtenu bénédiction et pardon". À ces derniers ils disaient; "Ne croyez pas ! Il ne vous a pas dit toute la vérité et le père ne vous a pas montré toute la vérité. Il a agi ainsi parce qu'il sent que le père va le trahir et qu'il a voulu éprouver vos cœurs pour savoir où trouver protection et refuge. Mais peut-être... il est si bon ! Peut-être ensuite il se repentira d'avoir douté de son père et il voudra revenir à lui. Ne le lui permettez pas".

Et beaucoup promirent : "Nous ne le permettrons pas" et ils s'enflammèrent en faisant des projets susceptibles de retenir le fils aimé. Ils ne s'aperçurent pas que pendant que les mauvais conseillers disaient : "Nous vous aiderons pour sauver le béni", leurs yeux étaient pleins de lueurs mensongères et cruelles, et qu'ils se faisaient des clins d'œil en se frottant les mains et en murmurant : "Ils tombent dans le piège ! Nous allons triompher !" chaque fois que quelqu'un adhérait à leurs paroles sournoises. Puis les mauvais conseillers s'en allèrent. Ils s'en allèrent en répandant dans d'autres endroits le bruit que bientôt on aurait vu la trahison du fils aimé, sorti des terres de son père pour créer un royaume, opposé au père, avec ceux qui haïssaient le père ou du moins ne lui donnaient pas un amour assuré. Et ceux qui avaient été suggestionnés par de mauvais conseils complotaient pendant ce temps comment faire pour amener le fils aimé au péché de rébellion qui aurait scandalisé le monde.

Les plus sages seulement d'entre eux, ceux chez lesquels étaient pénétrée plus profondément la parole du juste et y avait mis des racines parce qu'elle était tombée dans un terrain avide de l'accueillir, dirent, après avoir réfléchi : "Non. Il n'est pas bien de le faire. C'est un acte de malveillance envers le père, envers le fils et même envers nous. Nous connaissons la justice et la sagesse de l'un et de l'autre. Nous la connaissons même si malheureusement nous ne l'avons pas toujours suivie. Et nous ne devons pas penser que les conseils de ceux qui ont toujours été ouvertement contre le père et la justice, et aussi contre le fils aimé par le père, puissent être plus justes que ceux que nous a donnés le fils béni". Et ils ne les suivirent pas. Au contraire, avec amour et avec douleur, ils laissèrent aller le fils là où il devait, en se bornant à l'accompagner avec des signes d'amour jusqu'aux limites de leurs champs et à lui promettre dans leur adieu : "Tu vas, nous, nous restons. Mais tes paroles sont en nous et dorénavant nous ferons ce que veut le père. Pars tranquille. Tu nous a enlevés pour toujours de l'état où tu nous a trouvés. Maintenant, mis sur la bonne voie, nous saurons y progresser jusqu'à rejoindre la maison paternelle de manière à être bénis par le père".

Au contraire certains donnèrent leur adhésion aux mauvais conseillers et ils péchèrent en tentant le fils aimé et en le ridiculisant comme sot parce qu'il était obstiné dans l'accomplissement de son devoir.

Maintenant je vous demande : "Pourquoi le même conseil a-t-il opéré de manières diverses ?" … Vous ne répondez pas ? Je vais vous le dire comme je l'ai dit à Silo. Parce que les conseils acquièrent de la valeur ou deviennent nuls, selon qu'ils sont ou ne sont pas accueillis. C'est inutilement que quelqu'un est tenté par de mauvais conseils. S'il ne veut pas pécher, il ne péchera pas. Et il ne sera pas puni pour avoir dû entendre les insinuations des mauvais. Il ne sera pas puni car Dieu est juste et Il ne punit pas des fautes qui n'ont pas été faites. Il ne sera puni que si, après avoir dû écouter le Mal qui le tente, il le met en pratique sans user de son intelligence pour méditer la nature du conseil et son origine. Il n'aura pas d'excuse pour dire : "Je le croyais bon". Est bon ce qui est agréable à Dieu. Est-ce que peut-être Dieu peut approuver ou avoir pour agréable une désobéissance ou une chose qui conduit à la désobéissance ? Est-ce que Dieu peut bénir une chose qui s'oppose à sa Loi, c'est-à-dire à sa Parole ? En vérité je vous dis que non. Et encore en vérité je vous dis qu'il faut savoir mourir plutôt que de transgresser la Loi divine. À Sichem je parlerai encore pour vous rendre justes en ce qui est de savoir vouloir ou ne pas vouloir pratiquer un conseil qui vous est donné. Allez."

Les gens s'en vont en commentant.

"Tu as entendu ? Lui sait ce qu'ils nous ont dit ! Et il nous a rappelé à la justice de la volonté" dit un samaritain.

"Oui. Et tu as vu comment se sont troublés les juifs et les scribes qui étaient présents ?"

"Oui. Ils n'ont pas même attendu la fin pour s'en aller."

"Mauvaises vipères ! Pourtant... Lui dit ce qu'il veut faire. Il a tort. Il pourrait se procurer des ennuis. Ceux de l'Ebal et du Garizim se sont bien exaltés !..."

"Moi... je ne me suis jamais fait d'illusions. Le Rabbi, c'est le Rabbi. Et c'est tout dire. Le Rabbi peut-il pécher en ne montant pas au Temple de Jérusalem ?"

"Il trouvera la mort. Tu verras !... Et ce sera fini !..."

"Pour qui ? Pour Lui ? Pour nous ? Ou... pour les juifs ?"

"Pour Lui. S'il meurt !"

"Homme, tu es sot. Moi je suis d'Éphraïm. Je le connais bien. J'ai vécu près de Lui deux lunes entières, davantage encore. Il parlait toujours avec nous. Ce sera une douleur... mais ce ne sera pas une fin, ni pour Lui, ni pour nous. Il ne peut mourir, finir, le Saint des saints. Cela ne peut finir ainsi pour nous. Moi... je suis un ignorant, mais je sens que le royaume viendra quand les juifs le croiront fini... Et c'est eux qui seront finis..."

"Tu penses que les disciples vengeront le Maître ? Une révolte ? Un massacre ? Et les romains ?..."

"Oh ! il n'est pas besoin de disciples, de vengeances humaines, de massacres. Ce sera le Très-Haut qui les vaincra. Il nous a bien punis, nous, pendant des siècles pour bien moins ! Veux-tu qu'il ne les punisse pas eux, pour leur péché de tourmenter son Christ ?"

"Les voir vaincus ! Ah !"

"Ton cœur n'est pas comme le Maître le voudrait. Lui prie pour ses ennemis..."

"Moi... je le suis demain. Je veux entendre ce qu'il va dire à Sichem."

"Moi, également."

"Et moi aussi..."

Beaucoup de gens de Lébona ont la même pensée et, fraternisant avec ceux d'Éphraïm et de Silo, ils vont se préparer pour le départ du lendemain.

*

SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2008/08-031.htm
TOME : 8 /31


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