La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
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Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1073. Le. Sauveur témoigna à sa très-sainte Mère que sa prière lui était agréable, il lui dit qu'il voulait l'exaucer en tout point, et lui dit de le suivre. Aussitôt notre Rédempteur et l'auguste Marie, transportés par la vertu divine d'une manière invisible, entrèrent dans la prison, où l'illustre Précurseur était chargé de chaînes et tout couvert de plaies; car Hérodiade, qui voulait s'en défaire, avait prescrit à six de ses domestiques de le flageller sans miséricorde; et pour plaire à leur impudique maîtresse, ils exécutèrent ponctuellement ses ordres impies à trois différentes reprises. Cette femme cruelle espérait par ces mauvais traitements ôter la vie à Baptiste avant qu'arrivât la fête en laquelle Hérode commanda cette injuste exécution. Le démon excita ces barbares satellites à le maltraiter saris pitié, à vomir contre sa personne et contre la doctrine qu'il prêchait toute sorte d'outrages et de blasphèmes ; c'étaient d'ailleurs des gens pervers, dignes serviteurs d'une misérable adultère. La prison du Précurseur fut remplie de lumière, et sanctifiée par la présence de Jésus-Christ, de sa très-sainte Mère et d'une grande multitude d'anges, pendant que les palais d'Hérode servaient de retraite à
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d'impurs démons, et de demeure à des ministres beaucoup plus criminels que tous ceux qu'ils avaient fait jeter dans les prisons.
1076. Le saint Précurseur vit le Rédempteur du mande et sa très-sainte Mère environnés d'une grande splendeur, et accompagnés d'anges innombrables; les chaînes dont il était chargé se brisèrent à l'instant, et ses plaies se trouvèrent entièrement guéries; et ressentant une joie ineffable, il se prosterna avec une profonde humilité et une merveilleuse dévotion aux pieds du Verbe incarné et de l'auguste Marie, et leur demanda leur bénédiction; ils eurent ensuite avec lui plusieurs divins entretiens; je ne m'arrête point à les écrire, mais je dirai seulement ce qui m'a le plus touchée dans ma tiédeur. Le Seigneur dit à Baptiste avec une douceur incomparable : « Jean, mon serviteur bien-aimé, comment donc devancez-vous votre Maître? comment êtes-vous le premier lié, flagellé et affligé, offrez-vous votre vie et souffrez-vous la mort pour la gloire de mon Père, avant que moi-même j'aie souffert? Vos désirs vont bien vite, puisque vous jouissez sitôt du prix des souffrances et des afflictions que j'ai destinées pour mon humanité; mais c'est que mon Père éternel récompense le zèle avec lequel vous avez rempli l'office de mon Précurseur. Que vos ardents souhaits soient accomplis, tendez le cou au glaive, car je l'ordonne de la sorte, afin que vous ayez avec ma bénédiction le bonheur de souffrir et de mourir pour mon nom. J'offre à mon Père votre précieuse
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mort en attendant que bientôt l'heure de la mienne arrive. »
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d'impurs démons, et de demeure à des ministres beaucoup plus criminels que tous ceux qu'ils avaient fait jeter dans les prisons.
1076. Le saint Précurseur vit le Rédempteur du mande et sa très-sainte Mère environnés d'une grande splendeur, et accompagnés d'anges innombrables; les chaînes dont il était chargé se brisèrent à l'instant, et ses plaies se trouvèrent entièrement guéries; et ressentant une joie ineffable, il se prosterna avec une profonde humilité et une merveilleuse dévotion aux pieds du Verbe incarné et de l'auguste Marie, et leur demanda leur bénédiction; ils eurent ensuite avec lui plusieurs divins entretiens; je ne m'arrête point à les écrire, mais je dirai seulement ce qui m'a le plus touchée dans ma tiédeur. Le Seigneur dit à Baptiste avec une douceur incomparable : « Jean, mon serviteur bien-aimé, comment donc devancez-vous votre Maître? comment êtes-vous le premier lié, flagellé et affligé, offrez-vous votre vie et souffrez-vous la mort pour la gloire de mon Père, avant que moi-même j'aie souffert? Vos désirs vont bien vite, puisque vous jouissez sitôt du prix des souffrances et des afflictions que j'ai destinées pour mon humanité; mais c'est que mon Père éternel récompense le zèle avec lequel vous avez rempli l'office de mon Précurseur. Que vos ardents souhaits soient accomplis, tendez le cou au glaive, car je l'ordonne de la sorte, afin que vous ayez avec ma bénédiction le bonheur de souffrir et de mourir pour mon nom. J'offre à mon Père votre précieuse
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mort en attendant que bientôt l'heure de la mienne arrive. »
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1075. Baptiste eut le coeur pénétré de la vertu et de la douceur de ces paroles, inondé des délices de l'amour divin, et il resta quelque temps sans pouvoir parler. Mais, fortifié par la grâce céleste, il se trouva en état de répondre à son Seigneur, et de le remercier de ce bienfait ineffable, un des plus grands qu’il eût reçus de sa main libérale, et il dit avec beaucoup de larmes et de soupirs qui partaient du plus intime de son âme: « Je n'étais pas digne, mon divin Seigneur, de souffrir des peines et des tribulations qui méritassent d'être consolées par une faveur celle que celle de jouir de votre adorable présence, et de la présence de votre sainte Mère, mon auguste Reine, et je suis toujours indigne de ce nouveau bienfait. Permettez néanmoins, Seigneur, que je meure avant vous, afin que je puisse par là glorifier davantage votre infinie miséricorde, et faire mieux connaître votre saint nom; agréez en même temps le désir que je vous offre de subir pour ce saint nom une mort plus pénible à la suite de plue
longs tourments. Qu'Hérode, que les méchants, que l'enfer même triomphent de ma vie; car je la leur abandonne avec beaucoup de joie pour vous, a mon divin Maître. Acceptez-la, mon Dieu, comme un sacrifice agréable. Et vous, Mère de mon Sauveur, jetez les yeux de votre très-douce miséricorde sur votre serviteur, et conservez -moi en votre grâce comme Mère de notre Bien éternel. J'ai
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pendant toute ma vie méprisé la vanité , aimé la croix que mon Rédempteur doit sanctifier, et souhaité de semer dans les larmes (1); mais je n'ai jamais pu mériter cette joie, qui me rend mes souffrances si douces, ma prison si agréable, et la mort même plus désirable et plus chère que la vie. »
1076. Pendant que Baptiste s'exprimait en ces termes, trois serviteurs d'Hérode entrèrent dans la prison suivis d'un bourreau, car la haine implacable de cette femme aussi cruelle qu'impudique avait pris avec célérité toutes ses mesures. Se soumettant aux ordres impies d'Hérode, le très-saint Précurseur tendit le cou; et le bourreau lui trancha aussitôt la tète. Au moment même où le coup fut porté, le souverain Prêtre Jésus-Christ, qui assistait au sacrifice, reçut entre ses bras le corps du plus grand d'entre les enfants des hommes, -et la très-pure Mère en reçut la tête entre ses mains, offrant tous deux au Père éternel la nouvelle hostie sur l'autel sacré de leurs mains divines. Cela put avoir lieu, non-seulement parce que Jésus et Marie se trouvaient dans la prison d'une manière invisible pour les témoins du crime, mais aussi à cause d'une dispute qui s'élevait entre les serviteurs d'Hérode, pour savoir qui d'entre eux porterait à l'infâme danseuse et à sa mère impie la tête du saint Précurseur. Ils perdirent tellement leur présence d'esprit dans cette contestation , que l'un des trois prit la tête des mains de la Reine du ciel sans
(1) Ps. CXXV, 5.
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remarquer où il la trouvait, et les autres le suivirent pour la présenter dans un bassin à la fille d'Hérodiade. Notre Rédempteur fit accompagner dans let limbes l'âme de Baptiste par une grande multitude d'anges, et non arrivée causa aux saints patriarches une joie extraordinaire. Quant au Roi et à la Reine de l'univers, ils retournèrent à l'endroit où ils étaient avant de visiter saint Jean. La sainte Église compte beaucoup d'auteurs qui ont écrit sur la sainteté et sur les excellences de ce grand Précurseur, mais il y a encore beaucoup de choses à en dire, et j'en ai appris quelques-unes. Toutefois je ne les rapporterai pas, pour ne pas m'écarter de mon sujet, et pour ne pas trop allonger cette divine histoire. Je me borne à dire que le bienheureux Précurseur reçut dans tout le cours de sa vie de très-grandes faveurs de notre Seigneur Jésus-Christ et de sa très-sainte Mère; soit en sa naissance, soit dans le désert, soit durant sa prédication, soit à l'heure de sa mort; de sorte que la divine Droite n'en a accordé de semblables à aucune nation.
longs tourments. Qu'Hérode, que les méchants, que l'enfer même triomphent de ma vie; car je la leur abandonne avec beaucoup de joie pour vous, a mon divin Maître. Acceptez-la, mon Dieu, comme un sacrifice agréable. Et vous, Mère de mon Sauveur, jetez les yeux de votre très-douce miséricorde sur votre serviteur, et conservez -moi en votre grâce comme Mère de notre Bien éternel. J'ai
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pendant toute ma vie méprisé la vanité , aimé la croix que mon Rédempteur doit sanctifier, et souhaité de semer dans les larmes (1); mais je n'ai jamais pu mériter cette joie, qui me rend mes souffrances si douces, ma prison si agréable, et la mort même plus désirable et plus chère que la vie. »
1076. Pendant que Baptiste s'exprimait en ces termes, trois serviteurs d'Hérode entrèrent dans la prison suivis d'un bourreau, car la haine implacable de cette femme aussi cruelle qu'impudique avait pris avec célérité toutes ses mesures. Se soumettant aux ordres impies d'Hérode, le très-saint Précurseur tendit le cou; et le bourreau lui trancha aussitôt la tète. Au moment même où le coup fut porté, le souverain Prêtre Jésus-Christ, qui assistait au sacrifice, reçut entre ses bras le corps du plus grand d'entre les enfants des hommes, -et la très-pure Mère en reçut la tête entre ses mains, offrant tous deux au Père éternel la nouvelle hostie sur l'autel sacré de leurs mains divines. Cela put avoir lieu, non-seulement parce que Jésus et Marie se trouvaient dans la prison d'une manière invisible pour les témoins du crime, mais aussi à cause d'une dispute qui s'élevait entre les serviteurs d'Hérode, pour savoir qui d'entre eux porterait à l'infâme danseuse et à sa mère impie la tête du saint Précurseur. Ils perdirent tellement leur présence d'esprit dans cette contestation , que l'un des trois prit la tête des mains de la Reine du ciel sans
(1) Ps. CXXV, 5.
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remarquer où il la trouvait, et les autres le suivirent pour la présenter dans un bassin à la fille d'Hérodiade. Notre Rédempteur fit accompagner dans let limbes l'âme de Baptiste par une grande multitude d'anges, et non arrivée causa aux saints patriarches une joie extraordinaire. Quant au Roi et à la Reine de l'univers, ils retournèrent à l'endroit où ils étaient avant de visiter saint Jean. La sainte Église compte beaucoup d'auteurs qui ont écrit sur la sainteté et sur les excellences de ce grand Précurseur, mais il y a encore beaucoup de choses à en dire, et j'en ai appris quelques-unes. Toutefois je ne les rapporterai pas, pour ne pas m'écarter de mon sujet, et pour ne pas trop allonger cette divine histoire. Je me borne à dire que le bienheureux Précurseur reçut dans tout le cours de sa vie de très-grandes faveurs de notre Seigneur Jésus-Christ et de sa très-sainte Mère; soit en sa naissance, soit dans le désert, soit durant sa prédication, soit à l'heure de sa mort; de sorte que la divine Droite n'en a accordé de semblables à aucune nation.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
Instruction que notre auguste Maîtresse m'a donnée.
1077. Ma fille, vous avez passé fort rapidement sur les mystères de ce chapitre, mais le peu que vous en avez dit renferme de grands enseignements pour
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vous et pour tous les enfants de la lumière, ainsi que vous l’avez compris. Gravez ces enseignements dans votre coeur, et considérez sérieusement le contraste que présentent la sainteté et la pureté de Baptiste pauvre, affligé, persécuté, enchaîné, et le caractère odieux du roi Hérode, puissant, riche, adulé, entouré de serviteurs plongés dans les délices de la volupté. Ils étaient tous deux d'une même nature', mais leurs qualités étaient bien différentes; car l'un faisait un bon usage de son libre arbitre et des choses visibles, et l'autre en usait très-mal. Les austérités, la pauvreté, l'humilité, le mépris, les afflictions et le zèle de la gloire du Seigneur firent obtenir à notre serviteur Jean la consolation de mourir entre les bras de mon très-saint Fils et entre les miens : bienfait singulier, au-dessus de toute appréciation humaine. Le faste, la vanité, l'orgueil, la tyrannie et la luxure conduisirent au contraire Hérode à une mort malheureuse que lui fit subir un agent du Très-Haut, et le précipitèrent dans les peines éternelles. Vous devez être persuadée que c'est ce qui arrive maintenant; et ce qui arrivera toujours dans le monde, quoique les hommes n'aient l'air ni de le penser ni de le craindre. Ainsi les uns aiment, et les autres redoutent la vanité et la puissance de la gloire du monde , sans en considérer le terme, et sans songer qu'elles sont plus fugitives que l'ombre et plus corruptibles que l'herbe.
1078. Les hommes ne considèrent pas non plus la On principale, et ne sondent point la profondeur de l'abîme dans lequel les entraînent les vices, même
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pendant leur vie présente; car quoique le démon ne puisse leur ôter leur liberté ni avoir aucune juridiction immédiate sur leur volonté; néanmoins, comme ils la lui livrent si souvent par des péchés énormes, il acquiert un si grand pouvoir sur elle, qu'il s'en sert comme d'un instrument dont il a la disposition pour leur faire commettre toutes les iniquités qu'il leur suggère. Les hommes ont sous les yeux mille exemples aussi lamentables les uns que les autres, et pourtant ils ne parviennent point à connaître le danger formidable qu'ils courent, et ne se demandent point où leurs péchés peuvent les faire aboutir, par un juste jugement du Seigneur, comme le criminel Hérode, et comme la complice de son adultère. Pour amener les âmes sur le bord du précipice, Lucifer conduit les mortels par les sentiers de la vanité, de l'orgueil, de la gloire du monde, de la volupté; et il leur représente qu'il n'y a rien de plus grand et de plus désirable. De sorte que les enfants de perdition renoncent dans leur ignorance à la raison pour suivre leurs inclinations dépravées, et s'abandonner aux plaisirs charnels, esclaves volontaires de leur mortel ennemi. Ma fille, le chemin de l'humilité, de l'humiliation, des afflictions, voilà celui que nous avons montré, mon très-saint Fils et moi. C'est là le grand chemin de la vie, nous y avons marché les premiers , et nous nous sommes eu même temps constitués les maîtres et les protecteurs des affligés. El lorsqu'ils nous appellent dans leurs besoins, nous les assistons d'une manière merveilleuse, et par les faveurs les plus
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insignes. Les partisans du monde qui recherchent des vaines jouissances et qui fuient le chemin de la croix, se privent de cette protection et de ces bienfaits. Vous avez été appelée dans ce chemin, et vous y êtes attirée par la douceur de mon amour et de ma doctrine. Suivez-moi donc, et faites tous vos efforts pour m'imiter; sachez que vous avez trouvé le trésor caché et la perle précieuse (1) pour lesquels vous devez renoncer à tout ce qui est terrestre et à votre propre volonté, en tant qu'elle pourrait être contraire à celle du Très-Haut.
1077. Ma fille, vous avez passé fort rapidement sur les mystères de ce chapitre, mais le peu que vous en avez dit renferme de grands enseignements pour
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vous et pour tous les enfants de la lumière, ainsi que vous l’avez compris. Gravez ces enseignements dans votre coeur, et considérez sérieusement le contraste que présentent la sainteté et la pureté de Baptiste pauvre, affligé, persécuté, enchaîné, et le caractère odieux du roi Hérode, puissant, riche, adulé, entouré de serviteurs plongés dans les délices de la volupté. Ils étaient tous deux d'une même nature', mais leurs qualités étaient bien différentes; car l'un faisait un bon usage de son libre arbitre et des choses visibles, et l'autre en usait très-mal. Les austérités, la pauvreté, l'humilité, le mépris, les afflictions et le zèle de la gloire du Seigneur firent obtenir à notre serviteur Jean la consolation de mourir entre les bras de mon très-saint Fils et entre les miens : bienfait singulier, au-dessus de toute appréciation humaine. Le faste, la vanité, l'orgueil, la tyrannie et la luxure conduisirent au contraire Hérode à une mort malheureuse que lui fit subir un agent du Très-Haut, et le précipitèrent dans les peines éternelles. Vous devez être persuadée que c'est ce qui arrive maintenant; et ce qui arrivera toujours dans le monde, quoique les hommes n'aient l'air ni de le penser ni de le craindre. Ainsi les uns aiment, et les autres redoutent la vanité et la puissance de la gloire du monde , sans en considérer le terme, et sans songer qu'elles sont plus fugitives que l'ombre et plus corruptibles que l'herbe.
1078. Les hommes ne considèrent pas non plus la On principale, et ne sondent point la profondeur de l'abîme dans lequel les entraînent les vices, même
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pendant leur vie présente; car quoique le démon ne puisse leur ôter leur liberté ni avoir aucune juridiction immédiate sur leur volonté; néanmoins, comme ils la lui livrent si souvent par des péchés énormes, il acquiert un si grand pouvoir sur elle, qu'il s'en sert comme d'un instrument dont il a la disposition pour leur faire commettre toutes les iniquités qu'il leur suggère. Les hommes ont sous les yeux mille exemples aussi lamentables les uns que les autres, et pourtant ils ne parviennent point à connaître le danger formidable qu'ils courent, et ne se demandent point où leurs péchés peuvent les faire aboutir, par un juste jugement du Seigneur, comme le criminel Hérode, et comme la complice de son adultère. Pour amener les âmes sur le bord du précipice, Lucifer conduit les mortels par les sentiers de la vanité, de l'orgueil, de la gloire du monde, de la volupté; et il leur représente qu'il n'y a rien de plus grand et de plus désirable. De sorte que les enfants de perdition renoncent dans leur ignorance à la raison pour suivre leurs inclinations dépravées, et s'abandonner aux plaisirs charnels, esclaves volontaires de leur mortel ennemi. Ma fille, le chemin de l'humilité, de l'humiliation, des afflictions, voilà celui que nous avons montré, mon très-saint Fils et moi. C'est là le grand chemin de la vie, nous y avons marché les premiers , et nous nous sommes eu même temps constitués les maîtres et les protecteurs des affligés. El lorsqu'ils nous appellent dans leurs besoins, nous les assistons d'une manière merveilleuse, et par les faveurs les plus
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insignes. Les partisans du monde qui recherchent des vaines jouissances et qui fuient le chemin de la croix, se privent de cette protection et de ces bienfaits. Vous avez été appelée dans ce chemin, et vous y êtes attirée par la douceur de mon amour et de ma doctrine. Suivez-moi donc, et faites tous vos efforts pour m'imiter; sachez que vous avez trouvé le trésor caché et la perle précieuse (1) pour lesquels vous devez renoncer à tout ce qui est terrestre et à votre propre volonté, en tant qu'elle pourrait être contraire à celle du Très-Haut.
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CHAPITRE V. Les faveurs que les apôtres reçurent de notre Rédempteur Jésus-Christ, à cause de la dévotion qu'ils avaient à sa très-sainte Mère. — Judas se perdit pour ne l'avoir pas eue.
1079. La conduite de la très-prudente Marie à l'égard du sacré collège des apôtres et des disciples de notre Seigneur Jésus-Christ , était le miracle des miracles, et la merveille des merveilles de la toute-puissance divine. Elle y déployait une sagesse vraiment inexprimable; mais si j'entreprenais de rapporter
(1) Matth., XIII, 44.
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seulement ce que j'en ai pu comprendre, il faudrait que de ce seul article je fisse un gros volume. J'en dirai quelque chose dans ce chapitre et dans toute la suite de cette histoire quand l'occasion s'en présentera; tout ce que j'en pourrai écrire sera fort au-dessous du sujet; toutefois ce peu sera suffisant pour notre instruction. Le Seigneur inspirait à tous ses disciples, en même temps qu'il les recevait dans son école, les sentiments d'une dévotion singulière et d'un profond respect pour sa très-sainte Mère, tels qu'ils convenaient à des personnes appelées à avoir avec elle des rapports si fréquents et si familiers. Mais bien que les célestes rayons de la divine lumière tombassent sur tous, elle n'était pas égale pour tous, parce que le Seigneur distribuait ses dons selon les qualités de ses ministres, et selon les offices auxquels il les destinait. Les doux et admirables entretiens de leur grande Reine et Maîtresse ne firent ensuite qu’accroître leur vénération et leur respectueux amour; car elle parlait à tous, elle les aimait, les consolait, les instruisait et les secourait dans tous leurs besoins; de sorte qu'ils ne sortaient jamais de sa présence et de sa conversation sans éprouver une joie et une consolation intérieure telles, qu'elles surpassaient même leurs désirs. Mais le fruit plus ou moins salutaire de ces faveurs répondait à la disposition du coeur de ceux qui recevaient cette semence céleste.
1080. Ils ne la quittaient jamais que ravis d'admiration, et concevaient de très-hautes idées de la prudence, de la sagesse, de le pureté de cette grande
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Dame et de sa majestueuse dignité, jointe à une douceur si tranquille et si humble, qu'aucun disciple ne trouvait de termes pour les dépeindre. Le Très-Haut lui-même le disposait ainsi, parée que, comme je l'ai dit au chapitre XXVIII du livre V, le temps de dévoiler au monde cette Arche mystique du nouveau Testament n'était pas encore venu. Et semblables à celui qui, désirant vivement parler sans néanmoins pouvoir découvrir ses pensées, les concentrerait de plus en plus avant dans son coeur, les apôtres, réduits à garder le silence, puisaient dans les faveurs qu'ils obtenaient un plus puissant motif d'aimer et de révérer la très-pure Marie, et de louer intérieurement Celui qui l'avait élevée à un si haut duré de perfection. Comme notre auguste Princesse connaissait, par la science incomparable dont elle était dépositaire, le naturel de chacun, sa grâce, son état et le ministère auquel il était destiné, elle réglait sur cette connaissance les prières qu'elle adressait au Seigneur pour eux, et les instructions, les paroles et les faveurs qui leur étaient convenables, selon leur vocation. Cette manière d'agir, si agréable au Seigneur de la part d'une simple créature, fut pour les saints anges un nouveau sujet d'admiration; et le Tout-Puissant faisait, par sa providence secrète, que les mimes apôtres répondaient de leur côté aux bienfaits qu'ils recevaient par sa très-sainte Mère. Tout cela composait une divine harmonie qui ne frappait que les esprits célestes.
1079. La conduite de la très-prudente Marie à l'égard du sacré collège des apôtres et des disciples de notre Seigneur Jésus-Christ , était le miracle des miracles, et la merveille des merveilles de la toute-puissance divine. Elle y déployait une sagesse vraiment inexprimable; mais si j'entreprenais de rapporter
(1) Matth., XIII, 44.
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seulement ce que j'en ai pu comprendre, il faudrait que de ce seul article je fisse un gros volume. J'en dirai quelque chose dans ce chapitre et dans toute la suite de cette histoire quand l'occasion s'en présentera; tout ce que j'en pourrai écrire sera fort au-dessous du sujet; toutefois ce peu sera suffisant pour notre instruction. Le Seigneur inspirait à tous ses disciples, en même temps qu'il les recevait dans son école, les sentiments d'une dévotion singulière et d'un profond respect pour sa très-sainte Mère, tels qu'ils convenaient à des personnes appelées à avoir avec elle des rapports si fréquents et si familiers. Mais bien que les célestes rayons de la divine lumière tombassent sur tous, elle n'était pas égale pour tous, parce que le Seigneur distribuait ses dons selon les qualités de ses ministres, et selon les offices auxquels il les destinait. Les doux et admirables entretiens de leur grande Reine et Maîtresse ne firent ensuite qu’accroître leur vénération et leur respectueux amour; car elle parlait à tous, elle les aimait, les consolait, les instruisait et les secourait dans tous leurs besoins; de sorte qu'ils ne sortaient jamais de sa présence et de sa conversation sans éprouver une joie et une consolation intérieure telles, qu'elles surpassaient même leurs désirs. Mais le fruit plus ou moins salutaire de ces faveurs répondait à la disposition du coeur de ceux qui recevaient cette semence céleste.
1080. Ils ne la quittaient jamais que ravis d'admiration, et concevaient de très-hautes idées de la prudence, de la sagesse, de le pureté de cette grande
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Dame et de sa majestueuse dignité, jointe à une douceur si tranquille et si humble, qu'aucun disciple ne trouvait de termes pour les dépeindre. Le Très-Haut lui-même le disposait ainsi, parée que, comme je l'ai dit au chapitre XXVIII du livre V, le temps de dévoiler au monde cette Arche mystique du nouveau Testament n'était pas encore venu. Et semblables à celui qui, désirant vivement parler sans néanmoins pouvoir découvrir ses pensées, les concentrerait de plus en plus avant dans son coeur, les apôtres, réduits à garder le silence, puisaient dans les faveurs qu'ils obtenaient un plus puissant motif d'aimer et de révérer la très-pure Marie, et de louer intérieurement Celui qui l'avait élevée à un si haut duré de perfection. Comme notre auguste Princesse connaissait, par la science incomparable dont elle était dépositaire, le naturel de chacun, sa grâce, son état et le ministère auquel il était destiné, elle réglait sur cette connaissance les prières qu'elle adressait au Seigneur pour eux, et les instructions, les paroles et les faveurs qui leur étaient convenables, selon leur vocation. Cette manière d'agir, si agréable au Seigneur de la part d'une simple créature, fut pour les saints anges un nouveau sujet d'admiration; et le Tout-Puissant faisait, par sa providence secrète, que les mimes apôtres répondaient de leur côté aux bienfaits qu'ils recevaient par sa très-sainte Mère. Tout cela composait une divine harmonie qui ne frappait que les esprits célestes.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1081. Saint Pierre et saint Jean furent distingués
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en ces faveurs et en ces mystères; le premier, parce qu'il devait être le vicaire de Jésus-Christ et le chef de l'Église militante; et c'est à cause de cette dignité à laquelle le Seigneur le destinait que la bienheureuse Vierge aimait et révérait singulièrement saint Pierre; le second, parce qu'il devait tenir la place du même Seigneur en recevant la qualité de fils de cette illustre Reine, et en lui faisant compagnie sur la terre. Ces deux apôtres, sous la garde desquels devaient être partagées l'Église mystique, l'auguste Marie, et l'Église militante des fidèles, furent particulièrement favorisés de cette grande Reine de l'univers. Mais, comme saint Jean était choisi pour la servir' et pour avoir l'Honneur d'être spécialement son fils adoptif, il, reçut des dons particuliers en rapport avec les services qu'il lui devait rendre, et commença dès lors à se distinguer par son zèle. Et, quoique tous les apôtres portassent cette dévotion à un degré si haut qu'il dépasse notre intelligence, l’évangéliste saint Jean pénétra néanmoins plus avant dans les mystères cachés de cette, Cité mystique du Seigneur; c'est là qu'il fut éclairé d'une si vive lumière de la Divinité, qu'à cet égard il surpassa tous les apôtres, comme le témoigne son Évangile; car toutes ces connaissances lui furent accordées par le moyen de la Reine du ciel, et il obtint, par l'amour filial qu'il lui avait voué, le privilège d'être appelé entre tous les apôtres le bien-aimé de Jésus (1); c'est pour cette même raison qu'il reçut
(1) Joan., XXI, 20.
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aussi de grands bienfaits de notre auguste Dame, car il fut par excellence le disciple bien-aimé de Jésus et de Marie.
1082. Le saint évangéliste avait, outre la vertu de chasteté virginale, entre autres vertus qui ne plaisaient pas moins à la Maîtresse de la perfection, cette simplicité de colombe qui règne dans ses écrits, et une mansuétude sereine qui le rendaient extrêmement affable et pacifique; aussi la divine Mère appelait-elle tous ceux qui étaient doux et humbles de cœur les portraits de son très-saint Fils. C'est à cause de ces qualités qui distinguaient saint Jean que la bienheureuse Vierge lui portait une plus tendre affection, comme lui-même fut mieux disposé à concevoir pour elle l'amour le plus respectueux et le dévouement le plus sincère. De. sorte qu'il commença dès sa première vocation, comme je l'ai dit ailleurs, à se signaler entre tous par sa dévotion à la très-pure Marie, et à lui obéir avec une humilité incomparable. Il s'attachait à elle avec plus d'assiduité que les autres, et autant que possible ne s'éloignait point de sa présence; il l'assistait même dans quelques occupations manuelles auxquelles se livrait la Reine de l'univers, et il eut quelquefois le bonheur de se charger d'humbles travaux, à propos desquels il entrait dans de saintes émulations avec les anges de cette même Reine; mais c'était elle qui triomphait toujours en cette sublime vertu d'humilité, sans que ni les hommes ni les anges aient pu jamais l'égaler en la moindre action. Le disciple bien-aimé était aussi fort ponctuel à informer
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sa divine Maîtresse de toutes les merveilles que le Sauveur avait opérées lorsqu'elle était absente, et du nombre des nouveaux disciples qui avaient reçu sa doctrine. Il s'étudiait toujours à connaître ce qui pourrait lui être le plus agréable, et faisait toutes ses actions en conséquence.
1083. Saint Jean se distinguait aussi par le ton respectueux avec lequel il parlait à l'auguste Marie; il l'appelait toujours Madame lorsqu'elle était présente, et en son absence il la désignait sous le nom de Mère de notre maître Jésus-Christ. Et après l'ascension du même Seigneur, il fut le premier qui l'appela Mère de Dieu et du Rédempteur du monde, et en sa présence il lui disait Mère ou Madame. Il lui donnait aussi d'autres titres, tels que ceux de Réparatrice du péché, de Maîtresse des nations. Il fut encore le premier qui l'appela Marie de Jésus, et après lui les premiers fidèles se servirent souvent de ce nom; et le saint évangéliste le lui donna, parce qu'il sut qu'elle l'entendait répéter avec une complaisance infinie. Quant à moi, je désire exprimer toute mon allégresse et toute ma gratitude au Seigneur de ce qu'il a daigné m'appeler sous ce même nom, malgré mon indignité, à la lumière de la sainte Église et de la foi, et à la religion que je professe. Les autres apôtres et les disciples connaissaient la faveur dont saint Jean jouissait auprès de la bienheureuse Vierge, et ils le sollicitaient maintes fois d'être leur intercesseur pour certaines choses qui ils voulaient demander ou proposer à la puissante Reine; et le saint apôtre lui offrait ses
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prières avec sa charité ordinaire, sachant mieux que personne combien cette bonne mère était compatissante et miséricordieuse. Je dirai d'autres choses sur ce sujet dans la suite de cette histoire, surtout dans la troisième partie; et il est sûr, que l'on pourrait faire un long ouvrage à ne rapporter que les bienfaits dont ce saint évangéliste fut comblé par la Reine de l'univers.
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en ces faveurs et en ces mystères; le premier, parce qu'il devait être le vicaire de Jésus-Christ et le chef de l'Église militante; et c'est à cause de cette dignité à laquelle le Seigneur le destinait que la bienheureuse Vierge aimait et révérait singulièrement saint Pierre; le second, parce qu'il devait tenir la place du même Seigneur en recevant la qualité de fils de cette illustre Reine, et en lui faisant compagnie sur la terre. Ces deux apôtres, sous la garde desquels devaient être partagées l'Église mystique, l'auguste Marie, et l'Église militante des fidèles, furent particulièrement favorisés de cette grande Reine de l'univers. Mais, comme saint Jean était choisi pour la servir' et pour avoir l'Honneur d'être spécialement son fils adoptif, il, reçut des dons particuliers en rapport avec les services qu'il lui devait rendre, et commença dès lors à se distinguer par son zèle. Et, quoique tous les apôtres portassent cette dévotion à un degré si haut qu'il dépasse notre intelligence, l’évangéliste saint Jean pénétra néanmoins plus avant dans les mystères cachés de cette, Cité mystique du Seigneur; c'est là qu'il fut éclairé d'une si vive lumière de la Divinité, qu'à cet égard il surpassa tous les apôtres, comme le témoigne son Évangile; car toutes ces connaissances lui furent accordées par le moyen de la Reine du ciel, et il obtint, par l'amour filial qu'il lui avait voué, le privilège d'être appelé entre tous les apôtres le bien-aimé de Jésus (1); c'est pour cette même raison qu'il reçut
(1) Joan., XXI, 20.
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aussi de grands bienfaits de notre auguste Dame, car il fut par excellence le disciple bien-aimé de Jésus et de Marie.
1082. Le saint évangéliste avait, outre la vertu de chasteté virginale, entre autres vertus qui ne plaisaient pas moins à la Maîtresse de la perfection, cette simplicité de colombe qui règne dans ses écrits, et une mansuétude sereine qui le rendaient extrêmement affable et pacifique; aussi la divine Mère appelait-elle tous ceux qui étaient doux et humbles de cœur les portraits de son très-saint Fils. C'est à cause de ces qualités qui distinguaient saint Jean que la bienheureuse Vierge lui portait une plus tendre affection, comme lui-même fut mieux disposé à concevoir pour elle l'amour le plus respectueux et le dévouement le plus sincère. De. sorte qu'il commença dès sa première vocation, comme je l'ai dit ailleurs, à se signaler entre tous par sa dévotion à la très-pure Marie, et à lui obéir avec une humilité incomparable. Il s'attachait à elle avec plus d'assiduité que les autres, et autant que possible ne s'éloignait point de sa présence; il l'assistait même dans quelques occupations manuelles auxquelles se livrait la Reine de l'univers, et il eut quelquefois le bonheur de se charger d'humbles travaux, à propos desquels il entrait dans de saintes émulations avec les anges de cette même Reine; mais c'était elle qui triomphait toujours en cette sublime vertu d'humilité, sans que ni les hommes ni les anges aient pu jamais l'égaler en la moindre action. Le disciple bien-aimé était aussi fort ponctuel à informer
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sa divine Maîtresse de toutes les merveilles que le Sauveur avait opérées lorsqu'elle était absente, et du nombre des nouveaux disciples qui avaient reçu sa doctrine. Il s'étudiait toujours à connaître ce qui pourrait lui être le plus agréable, et faisait toutes ses actions en conséquence.
1083. Saint Jean se distinguait aussi par le ton respectueux avec lequel il parlait à l'auguste Marie; il l'appelait toujours Madame lorsqu'elle était présente, et en son absence il la désignait sous le nom de Mère de notre maître Jésus-Christ. Et après l'ascension du même Seigneur, il fut le premier qui l'appela Mère de Dieu et du Rédempteur du monde, et en sa présence il lui disait Mère ou Madame. Il lui donnait aussi d'autres titres, tels que ceux de Réparatrice du péché, de Maîtresse des nations. Il fut encore le premier qui l'appela Marie de Jésus, et après lui les premiers fidèles se servirent souvent de ce nom; et le saint évangéliste le lui donna, parce qu'il sut qu'elle l'entendait répéter avec une complaisance infinie. Quant à moi, je désire exprimer toute mon allégresse et toute ma gratitude au Seigneur de ce qu'il a daigné m'appeler sous ce même nom, malgré mon indignité, à la lumière de la sainte Église et de la foi, et à la religion que je professe. Les autres apôtres et les disciples connaissaient la faveur dont saint Jean jouissait auprès de la bienheureuse Vierge, et ils le sollicitaient maintes fois d'être leur intercesseur pour certaines choses qui ils voulaient demander ou proposer à la puissante Reine; et le saint apôtre lui offrait ses
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prières avec sa charité ordinaire, sachant mieux que personne combien cette bonne mère était compatissante et miséricordieuse. Je dirai d'autres choses sur ce sujet dans la suite de cette histoire, surtout dans la troisième partie; et il est sûr, que l'on pourrait faire un long ouvrage à ne rapporter que les bienfaits dont ce saint évangéliste fut comblé par la Reine de l'univers.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1084. Après les deux apôtres saint Pierre et saint Jean, l'apôtre saint Jacques, frère du second, fut particulièrement aimé de l'auguste Vierge, et il en obtint des faveurs admirables; j'en raconterai quelques-unes dans la troisième partie. Saint André fut aussi du nombre de ceux qui étaient des plus chers à notre grande Reine, parce qu'elle savait que cet apôtre aurait une dévotion particulière pour la passion et, pour la croix de son divin Maître, et qu'il y mourrait à son exemple. Je ne m'arrête point à énumérer les bienfaits que les autres apôtres en reçurent : je dirai seulement qu'elle les aimait et les vénérait avec la plus juste mesure, .avec autant de charité que d'humilité , les uns pour une vertu, les autres pour une autre, et tous pour son très-saint Fils. La Madeleine vint sur le même rang après sa conversion; car notre divine Princesse la regardait avec une tendre affection à cause de l'amour qu'elle portait à son adorable Fils, et parce qu'elle comprenait que le coeur`de cette illustre pénitente était propre à faire éclater les plus glorieuses merveilles de la droite du Tout-Puissant. La bienheureuse Marie la traitait avec beaucoup de
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familiarité entre les autres femmes, et lui découvrait de très-hauts mystères qui augmentaient dé plus en plus son amour envers son divin Maître et envers son auguste Mère. La sainte communiqua à notre Reine les désirs qu'elle avait de se retirer dans quelque solitude pour y servir le Seigneur dans une pénitence et dans une contemplation continuelle; et notre trèsdouce Maîtresse lui donna de sublimes instructions dont elle se servit ensuite dans le désert; et quand elle y alla, ce fut avec son agrément et sa bénédiction : la Mère du Sauveur la visita une fois elle-même dans le désert et lui envoya très-souvent des anges pour la fortifier et la consoler dans cette affreuse solitude. Les autres femmes qui suivaient le Maître de la vie reçurent aussi de très-grandes faveurs de sa très-sainte Mère; comme tous les disciples, elles obtinrent des bienfaits incomparables, qui inspirèrent, aux uns et aux autres la dévotion la plus fervente et la plus tendre pour la Mère de la grâce; car les uns et, les autres puisèrent cette grâce avec abondance en elle et par elle, comme en Celle en qui Dieu l'avait mise en, dépôt pour tout le genre humain. Je ne m'étends pas davantage sur cette matière, qui exigerait de très-longs développements; ils ne sont d'ailleurs pas nécessaires, puisqu'on peut s'instruire à cet égard dans. la sainte Église.
1085. Je dirai seulement quelque chose de ce que j'ai appris sur le perfide apôtre Judas, parce que cette histoire demande ici quelques détails peu connus. Ce que je rapporterai servira de leçon aux pécheurs,
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d'exemple aux obstinés, et d'avis à ceux qui sont peu dévots à la très-pure Marie, s'il se trouve un homme qui ne le soit pas assez envers une créature si sainte et si aimable, que Dieu a aimée d'un amour infini; les anges, de toutes leurs forces spirituelles; les apôtres et les saints, du fond de leur âme, et que toutes les créatures doivent aimer avec une pieuse jalousie, sans pouvoir jamais lui donner les affections qui lui sont dues. Ce malheureux apôtre commença, par son indévotion envers cette très-sainte Dame, à s'éloigner du vrai chemin qui conduit à l'amour de Dieu et à la possession de ses dons. Les choses qui m'en ont été découvertes, afin que je les écrivisse avec le reste, sont conformes à celles que je vais dire.
1086. Judas vint à l'école de notre adorable Maître Jésus-Christ, attiré extérieurement par la force de sa doctrine, et intérieurement par celle du Saint-Esprit, qui y poussait les autres. Prévenu de ce divin secours, il pria le Sauveur de l'admettre au nombre de ses disciples, et le Seigneur le reçut avec des entrailles de père miséricordieux, qui ne rejette aucun de ceux qui le cherchent avec sincérité. Judas obtint dans le principe d'autres faveurs spéciales de la divine droite, au moyen desquelles il surpassa quelques-uns des autres disciples, et fut appelé au nombre des douze apôtres; car le Seigneur l'aimait selon le bon état présent dans lequel il se trouvait, et les couvres saintes qu'il faisait comme les autres disciples. La Mère de la grâce le regarda aussi alors avec miséricorde; quoiqu'elle prévit déjà par sa science infuse la trahison
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qu'il commettrait à la fin de son apostolat, elle ne lui refusa pas son intercession ni sa charité maternelle; elle fit au contraire tous les efforts possibles pour justifier la cause de son très-saint Fils vis-à-vis de ce malheureux apôtre, afin qu'il ne pût alléguer, quand il voudrait se disculper de sa méchanceté, aucune espèce d'excuse valable, même aux yeux des hommes. Et comme elle savait que le caractère de Judas ne se laisserait point vaincre par la rigueur, mais qu'il s'endurcirait plutôt dans son obstination, cette très-prudente Dame veillait à ce qu'il ne manquât jamais soit du nécessaire, soit de l'utile; elle le prévenait par des témoignages particuliers d'amitié, l'accueillait et l'entretenait avec une douce bonté, et le distinguait parmi les autres. De sorte que, si parfois une certaine rivalité s'élevait entre les disciples pour savoir lequel d'entre eux avait le plus part à la bienveillance de notre grande Reine (comme il leur arriva aussi à l'égard de Jésus-Christ, ainsi qu'il est marqué dans l'Évangile), Judas n'eut jamais sujet d'avoir cette jalousie dans le commencement; car cette auguste Dame le favorisa toujours d'une manière singulière, et lui-même se montra plus d'une fois reconnaissant de ses bienfaits.
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familiarité entre les autres femmes, et lui découvrait de très-hauts mystères qui augmentaient dé plus en plus son amour envers son divin Maître et envers son auguste Mère. La sainte communiqua à notre Reine les désirs qu'elle avait de se retirer dans quelque solitude pour y servir le Seigneur dans une pénitence et dans une contemplation continuelle; et notre trèsdouce Maîtresse lui donna de sublimes instructions dont elle se servit ensuite dans le désert; et quand elle y alla, ce fut avec son agrément et sa bénédiction : la Mère du Sauveur la visita une fois elle-même dans le désert et lui envoya très-souvent des anges pour la fortifier et la consoler dans cette affreuse solitude. Les autres femmes qui suivaient le Maître de la vie reçurent aussi de très-grandes faveurs de sa très-sainte Mère; comme tous les disciples, elles obtinrent des bienfaits incomparables, qui inspirèrent, aux uns et aux autres la dévotion la plus fervente et la plus tendre pour la Mère de la grâce; car les uns et, les autres puisèrent cette grâce avec abondance en elle et par elle, comme en Celle en qui Dieu l'avait mise en, dépôt pour tout le genre humain. Je ne m'étends pas davantage sur cette matière, qui exigerait de très-longs développements; ils ne sont d'ailleurs pas nécessaires, puisqu'on peut s'instruire à cet égard dans. la sainte Église.
1085. Je dirai seulement quelque chose de ce que j'ai appris sur le perfide apôtre Judas, parce que cette histoire demande ici quelques détails peu connus. Ce que je rapporterai servira de leçon aux pécheurs,
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d'exemple aux obstinés, et d'avis à ceux qui sont peu dévots à la très-pure Marie, s'il se trouve un homme qui ne le soit pas assez envers une créature si sainte et si aimable, que Dieu a aimée d'un amour infini; les anges, de toutes leurs forces spirituelles; les apôtres et les saints, du fond de leur âme, et que toutes les créatures doivent aimer avec une pieuse jalousie, sans pouvoir jamais lui donner les affections qui lui sont dues. Ce malheureux apôtre commença, par son indévotion envers cette très-sainte Dame, à s'éloigner du vrai chemin qui conduit à l'amour de Dieu et à la possession de ses dons. Les choses qui m'en ont été découvertes, afin que je les écrivisse avec le reste, sont conformes à celles que je vais dire.
1086. Judas vint à l'école de notre adorable Maître Jésus-Christ, attiré extérieurement par la force de sa doctrine, et intérieurement par celle du Saint-Esprit, qui y poussait les autres. Prévenu de ce divin secours, il pria le Sauveur de l'admettre au nombre de ses disciples, et le Seigneur le reçut avec des entrailles de père miséricordieux, qui ne rejette aucun de ceux qui le cherchent avec sincérité. Judas obtint dans le principe d'autres faveurs spéciales de la divine droite, au moyen desquelles il surpassa quelques-uns des autres disciples, et fut appelé au nombre des douze apôtres; car le Seigneur l'aimait selon le bon état présent dans lequel il se trouvait, et les couvres saintes qu'il faisait comme les autres disciples. La Mère de la grâce le regarda aussi alors avec miséricorde; quoiqu'elle prévit déjà par sa science infuse la trahison
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qu'il commettrait à la fin de son apostolat, elle ne lui refusa pas son intercession ni sa charité maternelle; elle fit au contraire tous les efforts possibles pour justifier la cause de son très-saint Fils vis-à-vis de ce malheureux apôtre, afin qu'il ne pût alléguer, quand il voudrait se disculper de sa méchanceté, aucune espèce d'excuse valable, même aux yeux des hommes. Et comme elle savait que le caractère de Judas ne se laisserait point vaincre par la rigueur, mais qu'il s'endurcirait plutôt dans son obstination, cette très-prudente Dame veillait à ce qu'il ne manquât jamais soit du nécessaire, soit de l'utile; elle le prévenait par des témoignages particuliers d'amitié, l'accueillait et l'entretenait avec une douce bonté, et le distinguait parmi les autres. De sorte que, si parfois une certaine rivalité s'élevait entre les disciples pour savoir lequel d'entre eux avait le plus part à la bienveillance de notre grande Reine (comme il leur arriva aussi à l'égard de Jésus-Christ, ainsi qu'il est marqué dans l'Évangile), Judas n'eut jamais sujet d'avoir cette jalousie dans le commencement; car cette auguste Dame le favorisa toujours d'une manière singulière, et lui-même se montra plus d'une fois reconnaissant de ses bienfaits.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1087. Mais, comme Judas n'était pas fort aidé de ses inclinations naturelles, et que l'on remarquait chez les disciples et les apôtres certains défauts habituels à des hommes qui n'étaient pas absolument affermis
(1) Luc., XXII, 24.
408
en la perfection ni encore confirmés dans la grâce, cet imprudent disciple commença à se considérer avec quelque complaisance et à se troubler des fautes de ses frères, auxquelles il s'arrêtait plus qu'aux siennes propres (1). Dès qu'il se fut une fois livré sans défiance à cette funeste illusion, sans chercher à en prévenir les suites, la poutre grossit d'autant plus dans ses propres yeux, qu'il examinait avec une présomption plus indiscrète les moindres fétus de paille dans ceux de son prochain; il murmurait des plus petites fautes de ses frères, et prétendait les corriger avec plus d'orgueil que de zèle, pendant qu'il en commettait lui–même de beaucoup plus grandes. Se trouvant parmi les autres apôtres, il représenta saint Jean comme voulant faire l'intrigant auprès de leur divin Maître et de sa bienheureuse Mère, ne comptant pour rien tant de faveurs qu'il recevait de l'un et de l'autre. Néanmoins les désordres de Judas n'étaient jusque-là que des péchés véniels qui ne lui firent point perdre la grâce justifiante. Mais ils étaient aggravés par de très-mauvaises circonstances, et d'ailleurs très-volontaires, car il donna une entrée tout à fait libre au premier, qui fut une vaine complaisance; celui-ci appela incontinent le, second, qui fut une espèce d'envie, et de là s'ensuivit le troisième, qui fut de blâmer intérieurement ses frères, et de juger avec peu de charité leurs actions. Ces péchés ouvrirent la porte à d'autres plus grands, car il laissa aussitôt s'attiédir dans son coeur
(1) Luc., VI, 41.
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la ferveur de la dévotion , puis se refroidir la charité envers Dieu et envers son prochain; alors le jour commença à baisser et la lumière intérieure s'éteignit en lui, de sorte qu'il regardait déjà les apôtres et même l'auguste Marie avec une espèce de répugnance, s'ennuyant dans leur conversation, et trouvant à redire à leurs actions les plus saintes.
1088. Notre très-prudente Dame connaissait le dérèglement intérieur de Judas, et tachait d'y apporter tout le remède possible pour l'empêcher de tomber dans la mort du,péché; elle l'avertissait avec la douceur la plus touchante, comme un fils bien-aimé, du danger auquel il s'exposait, et employait les raisons les plus fortes pour calmer son esprit. Et quoiqu'elle réussît parfois à calmer l'orage qui commençait à gronder dans le coeur de l'inquiet apôtre, il ne se maintenait pas longtemps dans cette tranquillité; et il était bientôt tourmenté par de nouveaux troubles. Puis, donnant un plus facile accès au démon, il en vint jusqu'à s'irriter contre la plus indulgente des mères, et jusqu'à vouloir cacher, ou nier, ou excuser ses propres fautes, comme s'il eût pu tromper ses divins maîtres par son hypocrisie, ou leur dérober le secret de son coeur. Il perdit alors le respect intérieur qu'il avait pour la Mère de miséricorde, méprisant ses plus charitables avis, et lui reprochant la douceur même de ses leçons et de ses paroles. Par cette audacieuse ingratitude, il perdit la grâce, et encourut tonte l'indignation du Seigneur, qui, pour le punir de ses irrévérences sacrilèges, le laissa dans la, main de son
410
conseil (1) : car en rejetant lui-même la grâce et l'intercession de la bienheureuse Vierge, il ferma les portes de la miséricorde et de son salut. Cette aversion qu'il conçut pour la plus tendre mère, le porta bientôt à haïr son adorable Maître, à blâmer et critiquer sa doctrine, à trouver trop fatigante la vie, et trop ennuyeux les entretiens des apôtres.
1089. Le Seigneur ne l'abandonna pourtant pas dès lors ; il lui envoyait toujours des secours intérieurs ; et quoiqu'ils fussent moins extraordinaires que ceux qu'il recevait auparavant, ils ne laissaient pas d'être suffisants s'il eût voulu y coopérer. Notre très-charitable Dame y joignait ses douces exhortations et le pressait de se convertir, de s'humilier et de solliciter son pardon de son divin Maître : elle le lui promit de la part du Seigneur lui-même, et s'offrit de prier pour lui et de faire pénitence pour ses péchés, parce qu'elle demandait seulement qu'il s'en repentit et qu'il s'en corrigeât. La Mère de la grâce lui proposa toutes ces choses, pour le tirer du précipice qu’il glissait, sachant très-bien que le plus grand mal n'est pas de tomber, mais de ne point se relever et de persévérer dans le péché. Le superbe disciple ne pouvait point repousser les témoignages que sa conscience lui rendait de son mauvais état; mais commençant à s'endurcir, il craignit la confusion qui aurait pu lui acquérir de la gloire, et tomba dans celle qui aggrava son péché. Il rejeta par cet orgueil les salutaires
(1) Eccles., XV, 14.
411
conseils de la Mère du Sauveur, et, comme pour lui cacher sa malice, il protesta faussement qu'il aimait toujours son adorable Maître, et ses frères, et qu'à cet égard il n'avait pas besoin de s'améliorer.
(1) Luc., XXII, 24.
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en la perfection ni encore confirmés dans la grâce, cet imprudent disciple commença à se considérer avec quelque complaisance et à se troubler des fautes de ses frères, auxquelles il s'arrêtait plus qu'aux siennes propres (1). Dès qu'il se fut une fois livré sans défiance à cette funeste illusion, sans chercher à en prévenir les suites, la poutre grossit d'autant plus dans ses propres yeux, qu'il examinait avec une présomption plus indiscrète les moindres fétus de paille dans ceux de son prochain; il murmurait des plus petites fautes de ses frères, et prétendait les corriger avec plus d'orgueil que de zèle, pendant qu'il en commettait lui–même de beaucoup plus grandes. Se trouvant parmi les autres apôtres, il représenta saint Jean comme voulant faire l'intrigant auprès de leur divin Maître et de sa bienheureuse Mère, ne comptant pour rien tant de faveurs qu'il recevait de l'un et de l'autre. Néanmoins les désordres de Judas n'étaient jusque-là que des péchés véniels qui ne lui firent point perdre la grâce justifiante. Mais ils étaient aggravés par de très-mauvaises circonstances, et d'ailleurs très-volontaires, car il donna une entrée tout à fait libre au premier, qui fut une vaine complaisance; celui-ci appela incontinent le, second, qui fut une espèce d'envie, et de là s'ensuivit le troisième, qui fut de blâmer intérieurement ses frères, et de juger avec peu de charité leurs actions. Ces péchés ouvrirent la porte à d'autres plus grands, car il laissa aussitôt s'attiédir dans son coeur
(1) Luc., VI, 41.
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la ferveur de la dévotion , puis se refroidir la charité envers Dieu et envers son prochain; alors le jour commença à baisser et la lumière intérieure s'éteignit en lui, de sorte qu'il regardait déjà les apôtres et même l'auguste Marie avec une espèce de répugnance, s'ennuyant dans leur conversation, et trouvant à redire à leurs actions les plus saintes.
1088. Notre très-prudente Dame connaissait le dérèglement intérieur de Judas, et tachait d'y apporter tout le remède possible pour l'empêcher de tomber dans la mort du,péché; elle l'avertissait avec la douceur la plus touchante, comme un fils bien-aimé, du danger auquel il s'exposait, et employait les raisons les plus fortes pour calmer son esprit. Et quoiqu'elle réussît parfois à calmer l'orage qui commençait à gronder dans le coeur de l'inquiet apôtre, il ne se maintenait pas longtemps dans cette tranquillité; et il était bientôt tourmenté par de nouveaux troubles. Puis, donnant un plus facile accès au démon, il en vint jusqu'à s'irriter contre la plus indulgente des mères, et jusqu'à vouloir cacher, ou nier, ou excuser ses propres fautes, comme s'il eût pu tromper ses divins maîtres par son hypocrisie, ou leur dérober le secret de son coeur. Il perdit alors le respect intérieur qu'il avait pour la Mère de miséricorde, méprisant ses plus charitables avis, et lui reprochant la douceur même de ses leçons et de ses paroles. Par cette audacieuse ingratitude, il perdit la grâce, et encourut tonte l'indignation du Seigneur, qui, pour le punir de ses irrévérences sacrilèges, le laissa dans la, main de son
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conseil (1) : car en rejetant lui-même la grâce et l'intercession de la bienheureuse Vierge, il ferma les portes de la miséricorde et de son salut. Cette aversion qu'il conçut pour la plus tendre mère, le porta bientôt à haïr son adorable Maître, à blâmer et critiquer sa doctrine, à trouver trop fatigante la vie, et trop ennuyeux les entretiens des apôtres.
1089. Le Seigneur ne l'abandonna pourtant pas dès lors ; il lui envoyait toujours des secours intérieurs ; et quoiqu'ils fussent moins extraordinaires que ceux qu'il recevait auparavant, ils ne laissaient pas d'être suffisants s'il eût voulu y coopérer. Notre très-charitable Dame y joignait ses douces exhortations et le pressait de se convertir, de s'humilier et de solliciter son pardon de son divin Maître : elle le lui promit de la part du Seigneur lui-même, et s'offrit de prier pour lui et de faire pénitence pour ses péchés, parce qu'elle demandait seulement qu'il s'en repentit et qu'il s'en corrigeât. La Mère de la grâce lui proposa toutes ces choses, pour le tirer du précipice qu’il glissait, sachant très-bien que le plus grand mal n'est pas de tomber, mais de ne point se relever et de persévérer dans le péché. Le superbe disciple ne pouvait point repousser les témoignages que sa conscience lui rendait de son mauvais état; mais commençant à s'endurcir, il craignit la confusion qui aurait pu lui acquérir de la gloire, et tomba dans celle qui aggrava son péché. Il rejeta par cet orgueil les salutaires
(1) Eccles., XV, 14.
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conseils de la Mère du Sauveur, et, comme pour lui cacher sa malice, il protesta faussement qu'il aimait toujours son adorable Maître, et ses frères, et qu'à cet égard il n'avait pas besoin de s'améliorer.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1090. Notre Seigneur Jésus-Christ et sa très-sainte Mère nous ont laissé un exemple admirable de charité et de patience dans la conduite qu'ils tinrent envers Judas après. sa chute dans le péché: car ils le souffrirent en leur compagnie avec une indulgence telle, qu'ils ne lui témoignèrent jamais le moindre changement, et continuèrent à le traiter avec la même bonté que les autres. C'est pour cela que le désordre intérieur de Judas resta si caché aux apôtres. Toutefois on découvrait dans sa conversation ordinaire et dans son attitude des signes non équivoques de ses mauvaises dispositions, parce qu'il ne nous est pas facile, ni presque possible, de violenter toujours nos inclinations assez pour les dissimuler. dans les choses que nous faisons avec peu de réflexion, nous agissons nécessairement selon notre naturel, et alors nous le trahissons, du moins près de ceux qui nous fréquentent le plus. C'est ce qui arrivait à Judas. Mais comme les apôtres connaissaient l'affabilité et l'affection avec lesquelles notre Rédempteur et sa très-sainte Mère le traitaient, sans pouvoir remarquer aucun changement dans leur conduite, les soupçons qu'ils avaient formés se dissipaient, et ils ne s'arrêtaient point aux apparences qui leur faisaient craindre la chute. C'est pour cette même raison qu'ils furent tous surpris quand le Seigneur leur annonça en la dernière Cène légale
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qu'un d'entre eux le trahirait; et que chacun lui dit : Est-ce moi, Seigneur (1) ? Quant à saint Jean, comme il eut quelque connaissance des infidélités de Judas, à cause de la grande familiarité qu'il avait avec le Sauveur et la bienheureuse Vierge, et qu'en conséquence il mettait plus de réserve dans ses rapports avec le traître, le Seigneur lui-même lui découvrit ses sentiments, mais seulement par l'indication de certaines marques, ainsi que le rapporte l'Évangile (2). Car jusqu'alors l'adorable Sauveur n'avait jamais manifesté ce qui se passait en Judas. Cette patience est plus admirable en notre auguste Reine, parce qu'elle était mère , une simple créature, et qu'elle regardait comme fort proche la trahison que le perfide disciple méditait contre son très-saint Fils, qu'elle aimait comme mère et non comme servante.
1091. O ignorance ! ô folie des mortels ! combien différente est notre conduite, lorsque nous recevons quelque légère injure, nous qui en avons mérité de si grandes ! Avec quelle impatience nous supportons les faiblesses de notre prochain , voulant cependant qu'on supporte les nôtres ! Quelle peine n'avons-nous pas quand nous faut pardonner une offense, quoique nous priions tous les jours le Seigneur de pardonner les nôtres (3) ! Comme nous sommes prompts à divulguer sans pitié les fautes de nos frères, et prompts à nous fâcher lorsqu'on parle de nos défauts ! Nous ne
(1) Matth., XXVI, 41 ; Marc., XIV, 18. — (2) Luc., XXII, 21 ; Joan., XIII, 18, 26. — (3) Matth., VI, 12.
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voulons mesurer personne avec la même mesure dont nous serions bien aises que l'on nous mesurât, et nous ne prétendons pas que l'on nous juge aussi rigoureusement que nous jugeons notre prochain (1). Tout cela n'est que perversité, que ténèbres suscitées par le souffle du dragon infernal, qui veut s'opposer à la suréminente vertu de charité, et troubler l'ordre de la justice divine et de la raison humaine : car Dieu est charité, et celui qui l'exerce parfaitement demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui (2). Lucifer n'est que rage et que vengeance, et ceux qui l’imitent demeurent en Lucifer, qui les pousse dans tous les vices qui s'opposent au bien des autres. J'avoue que la beauté de la charité m'a toujours ravie, et que j'ai un très-grand désir de l'avoir pour amie ; mais aussi je vois dans le clair miroir de la merveilleuse charité que Jésus et Marie ont déployée envers l'ingrat apôtre, que je ne suis jamais arrivée au commencement de la plus excellente des vertus.
1092. Mais de peur que le Seigneur ne me reproche mon silence, j'ajouterai une autre cause de la chute de Judas. Le nombre des apôtres et des disciples s'étant accru, le divin Sauveur résolut de confier à quelqu'un d'entre eux le soin de recevoir des aumônes, de les distribuer en qualité de syndic ou économe pour les nécessités communes, et de payer les tributs impériaux ; Jésus leur proposa ces l'onctions sans choisir personne. Judas les envia aussitôt, tandis que tous
(1) Matth., VII, 1 et 2. — (2) I Joan., IV, 16.
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les autres les redoutaient et désiraient les décliner. Et pour obtenir l'office qu'il convoitait, il ne rougit pas de prier saint Jean d'en parler à notre auguste Reine, afin qui elle le demandât pour lui à son très- saint. Fils. Saint Jean s'acquitta de cette commission Mais comme la très-prudente Mère savait que la prétention de Judas n'était ni juste ni convenable, et qu'elle partait d'un coeur ambitieux et avide des biens de la terre, elle ne voulut point transmettre sa demande à notre divin Maître. Judas fit de nouvelles tentatives par l’intermédiaire de saint Pierre et de quelques autres apôtres, mais toujours en vain; parce que le Très-Haut voulait empêcher par un effet de sa bonté qu'il n'entrât dans cet emploi, ou justifier sa cause après le lui avoir donné. Judas, dont le coeur était déjà tyrannisé par l'avarice, loin de se ralentir pour toutes ces difficultés, redoubla ses funestes empressements, à l’instigation de Satan, qui lui inspirait des pensées d'ambition indignes même de toute personne se trouvant dans un état ordinaire. Que s'il eût été pour les autres honteux et criminel d'y consentir, ce devait l'être beaucoup plus pour Judas, qui était formé à l'école de la plus grande perfection, et éclairé du Soleil de justice, notre Seigneur Jésus-Christ, et de la Lune sans tache, l'auguste Marie. Au jour de l’abondance et de la grâce, tandis que ce divin Soleil l'éclairait, il ne pouvait ignorer qu'il ne frit coupable en obéissant à de pareilles suggestions; et non plus dans la nuit de la tentation, puisqu'alors notre charitable Dame, que nous avons figurée par la lune, influait
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sur lui ce qu'il fallait pour le garantir des morsures du serpent. Mais comme il fuyait la lumière et qu'il cherchait les ténèbres, il courait au précipice, et surmontant ses répugnances et sa honte, colorant même sa cupidité d'un vernis de vertu, il ne craignit pas de demander lui-même à la bienheureuse Vierge l'office auquel il aspirait. Il l'aborda, et lui dit que la demande que Pierre et Jean lui avaient faite de sa part procédait du désir qu'il avait de la mieux servir, et de veiller à ce que rien ne manquât à son Fils parce que les autres, ajouta-t-il, ne s'en acquittaient pas comme il fallait; ainsi il la suppliait d'obtenir de son Maître cet emploi pour lui.
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qu'un d'entre eux le trahirait; et que chacun lui dit : Est-ce moi, Seigneur (1) ? Quant à saint Jean, comme il eut quelque connaissance des infidélités de Judas, à cause de la grande familiarité qu'il avait avec le Sauveur et la bienheureuse Vierge, et qu'en conséquence il mettait plus de réserve dans ses rapports avec le traître, le Seigneur lui-même lui découvrit ses sentiments, mais seulement par l'indication de certaines marques, ainsi que le rapporte l'Évangile (2). Car jusqu'alors l'adorable Sauveur n'avait jamais manifesté ce qui se passait en Judas. Cette patience est plus admirable en notre auguste Reine, parce qu'elle était mère , une simple créature, et qu'elle regardait comme fort proche la trahison que le perfide disciple méditait contre son très-saint Fils, qu'elle aimait comme mère et non comme servante.
1091. O ignorance ! ô folie des mortels ! combien différente est notre conduite, lorsque nous recevons quelque légère injure, nous qui en avons mérité de si grandes ! Avec quelle impatience nous supportons les faiblesses de notre prochain , voulant cependant qu'on supporte les nôtres ! Quelle peine n'avons-nous pas quand nous faut pardonner une offense, quoique nous priions tous les jours le Seigneur de pardonner les nôtres (3) ! Comme nous sommes prompts à divulguer sans pitié les fautes de nos frères, et prompts à nous fâcher lorsqu'on parle de nos défauts ! Nous ne
(1) Matth., XXVI, 41 ; Marc., XIV, 18. — (2) Luc., XXII, 21 ; Joan., XIII, 18, 26. — (3) Matth., VI, 12.
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voulons mesurer personne avec la même mesure dont nous serions bien aises que l'on nous mesurât, et nous ne prétendons pas que l'on nous juge aussi rigoureusement que nous jugeons notre prochain (1). Tout cela n'est que perversité, que ténèbres suscitées par le souffle du dragon infernal, qui veut s'opposer à la suréminente vertu de charité, et troubler l'ordre de la justice divine et de la raison humaine : car Dieu est charité, et celui qui l'exerce parfaitement demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui (2). Lucifer n'est que rage et que vengeance, et ceux qui l’imitent demeurent en Lucifer, qui les pousse dans tous les vices qui s'opposent au bien des autres. J'avoue que la beauté de la charité m'a toujours ravie, et que j'ai un très-grand désir de l'avoir pour amie ; mais aussi je vois dans le clair miroir de la merveilleuse charité que Jésus et Marie ont déployée envers l'ingrat apôtre, que je ne suis jamais arrivée au commencement de la plus excellente des vertus.
1092. Mais de peur que le Seigneur ne me reproche mon silence, j'ajouterai une autre cause de la chute de Judas. Le nombre des apôtres et des disciples s'étant accru, le divin Sauveur résolut de confier à quelqu'un d'entre eux le soin de recevoir des aumônes, de les distribuer en qualité de syndic ou économe pour les nécessités communes, et de payer les tributs impériaux ; Jésus leur proposa ces l'onctions sans choisir personne. Judas les envia aussitôt, tandis que tous
(1) Matth., VII, 1 et 2. — (2) I Joan., IV, 16.
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les autres les redoutaient et désiraient les décliner. Et pour obtenir l'office qu'il convoitait, il ne rougit pas de prier saint Jean d'en parler à notre auguste Reine, afin qui elle le demandât pour lui à son très- saint. Fils. Saint Jean s'acquitta de cette commission Mais comme la très-prudente Mère savait que la prétention de Judas n'était ni juste ni convenable, et qu'elle partait d'un coeur ambitieux et avide des biens de la terre, elle ne voulut point transmettre sa demande à notre divin Maître. Judas fit de nouvelles tentatives par l’intermédiaire de saint Pierre et de quelques autres apôtres, mais toujours en vain; parce que le Très-Haut voulait empêcher par un effet de sa bonté qu'il n'entrât dans cet emploi, ou justifier sa cause après le lui avoir donné. Judas, dont le coeur était déjà tyrannisé par l'avarice, loin de se ralentir pour toutes ces difficultés, redoubla ses funestes empressements, à l’instigation de Satan, qui lui inspirait des pensées d'ambition indignes même de toute personne se trouvant dans un état ordinaire. Que s'il eût été pour les autres honteux et criminel d'y consentir, ce devait l'être beaucoup plus pour Judas, qui était formé à l'école de la plus grande perfection, et éclairé du Soleil de justice, notre Seigneur Jésus-Christ, et de la Lune sans tache, l'auguste Marie. Au jour de l’abondance et de la grâce, tandis que ce divin Soleil l'éclairait, il ne pouvait ignorer qu'il ne frit coupable en obéissant à de pareilles suggestions; et non plus dans la nuit de la tentation, puisqu'alors notre charitable Dame, que nous avons figurée par la lune, influait
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sur lui ce qu'il fallait pour le garantir des morsures du serpent. Mais comme il fuyait la lumière et qu'il cherchait les ténèbres, il courait au précipice, et surmontant ses répugnances et sa honte, colorant même sa cupidité d'un vernis de vertu, il ne craignit pas de demander lui-même à la bienheureuse Vierge l'office auquel il aspirait. Il l'aborda, et lui dit que la demande que Pierre et Jean lui avaient faite de sa part procédait du désir qu'il avait de la mieux servir, et de veiller à ce que rien ne manquât à son Fils parce que les autres, ajouta-t-il, ne s'en acquittaient pas comme il fallait; ainsi il la suppliait d'obtenir de son Maître cet emploi pour lui.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1093. La grande Reine de l'univers lui répondit avec beaucoup de mansuétude: « Pesez bien, mon très-cher, ce que vous demandez; examinez si l'intention avec laquelle vous le désirez est droite, et ce réfléchissez s'il vous est avantageux de souhaiter ce que tous vos frères craignent, et ce qu'ils n'accepteront point, s'ils n'y sont obligés par un commandement exprès de leur Maître. Il vous aime plus que vous ne vous aimez vous-même; et il sait ce qui vous est convenable : abandonnez-vous à sa très-sainte. volonté; changez de dessein, trichez d'acquérir l'humilité et l'amour de la pauvreté. Sortez de l'abîme où vous êtes tombé , et soyez convaincu que mon Fils usera envers vous de sou amoureuse miséricorde, et que je vous assisterai de ma protection. » Qui n'aurait pas été touché de ces douces et persuasives paroles, sorties de la bouche de
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la plus aimable et plus, divine créature? Mais ce coeur de bronze ne fléchit point, il ne fit au contraire que se roidir et s'irriter intérieurement, comme s'il avait été blessé par notre compatissante Dame, qui,lui offrait le remède de sa maladie 'mortelle; car un violent accès d'ambition et d'avarice dans l'appétit concupiscible excite aussitôt l'appétit,, irascible contre ceux qui s'y opposent, et quiconque en est pris regarde comme des injures les conseils les plus
salutaires. Notre très-prudente et très-douce Princesse ne s'expliqua pas davantage là-dessus, et cessa dès lors de parler à Judas à cause de son obstination..
1094. Judas quitta l'auguste Vierge toujours agité par les mêmes pensées sordides, et abjurant tout sentiment de pudeur et même de foi, il résolut de s'adresser lui-même à notre Seigneur Jésus-Christ. Or s'étant couvert de l'habit de brebis, comme un solliciteur adroit, il se présenta à sa divine Majesté, et lui dit: « Maître, je souhaite d'accomplir votre volonté, et de vous. servir sous le titre d’économe et de dépositaire des aumônes que nous recevons; j'en ferai part aux pauvres conformément à votre doctrine qui nous enseigne de faire à notre prochain ce que nous voudrions qu'il nous fit ; je les distribuerai à propos et selon votre intention, et mieux que l'on n’a fait jusqu'à présent. » Voilà ce que cet hypocrite dit à son Dieu et à son Maître, commettant à la fois plusieurs péchés énormes. Car, outre qu'il mentait en cachant des dispositions contraires à celles qu'il montrait, ambitieux de l'honneur qu'il ne méritait
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point, il feignait d'être ce qu'il n'était pas, ne voulant, ni paraître ce qu'il était, ni être ce qu'il désirait paraître. Il murmura aussi contre ses frères, et s'étendit sur ses propres louanges; c'est le sentier battu des ambitieux. Mais ce qu'il y a de plus remarquable, c'est qu'il perdit la foi infuse qu'il avait, prétendant tromper son divin Maître par son hypocrisie. En effet, s'il eût cru alors fermement que Jésus-Christ était véritablement Dieu et homme, il ne se serait pas imaginé de le pouvoir tromper, puisque comme Dieu il scrutait les choses les plus secrètes de son coeur (1), et qu'il pénétrait jusqu'au fond de son âme, non-seulement comme Dieu par sa science infinie, mais encore comme homme par sa science infuse et béatifique; ainsi, si Judas en eût été bien convaincu, il aurait compris que le Sauveur pouvait connaître sa pensée, comme il la connaissait réellement, et il n'aurait pas poursuivi son inique dessein. Mais il ne crut rien de tout cela, et il ajouta l'hérésie à ses autres péchés.
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la plus aimable et plus, divine créature? Mais ce coeur de bronze ne fléchit point, il ne fit au contraire que se roidir et s'irriter intérieurement, comme s'il avait été blessé par notre compatissante Dame, qui,lui offrait le remède de sa maladie 'mortelle; car un violent accès d'ambition et d'avarice dans l'appétit concupiscible excite aussitôt l'appétit,, irascible contre ceux qui s'y opposent, et quiconque en est pris regarde comme des injures les conseils les plus
salutaires. Notre très-prudente et très-douce Princesse ne s'expliqua pas davantage là-dessus, et cessa dès lors de parler à Judas à cause de son obstination..
1094. Judas quitta l'auguste Vierge toujours agité par les mêmes pensées sordides, et abjurant tout sentiment de pudeur et même de foi, il résolut de s'adresser lui-même à notre Seigneur Jésus-Christ. Or s'étant couvert de l'habit de brebis, comme un solliciteur adroit, il se présenta à sa divine Majesté, et lui dit: « Maître, je souhaite d'accomplir votre volonté, et de vous. servir sous le titre d’économe et de dépositaire des aumônes que nous recevons; j'en ferai part aux pauvres conformément à votre doctrine qui nous enseigne de faire à notre prochain ce que nous voudrions qu'il nous fit ; je les distribuerai à propos et selon votre intention, et mieux que l'on n’a fait jusqu'à présent. » Voilà ce que cet hypocrite dit à son Dieu et à son Maître, commettant à la fois plusieurs péchés énormes. Car, outre qu'il mentait en cachant des dispositions contraires à celles qu'il montrait, ambitieux de l'honneur qu'il ne méritait
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point, il feignait d'être ce qu'il n'était pas, ne voulant, ni paraître ce qu'il était, ni être ce qu'il désirait paraître. Il murmura aussi contre ses frères, et s'étendit sur ses propres louanges; c'est le sentier battu des ambitieux. Mais ce qu'il y a de plus remarquable, c'est qu'il perdit la foi infuse qu'il avait, prétendant tromper son divin Maître par son hypocrisie. En effet, s'il eût cru alors fermement que Jésus-Christ était véritablement Dieu et homme, il ne se serait pas imaginé de le pouvoir tromper, puisque comme Dieu il scrutait les choses les plus secrètes de son coeur (1), et qu'il pénétrait jusqu'au fond de son âme, non-seulement comme Dieu par sa science infinie, mais encore comme homme par sa science infuse et béatifique; ainsi, si Judas en eût été bien convaincu, il aurait compris que le Sauveur pouvait connaître sa pensée, comme il la connaissait réellement, et il n'aurait pas poursuivi son inique dessein. Mais il ne crut rien de tout cela, et il ajouta l'hérésie à ses autres péchés.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1095. Il arriva à ce disciple infidèle ce que l'apôtre a dit quelque temps après : Ceux, dit-il, qui veulent devenir riches, tombent dans la tentation et dans le piège. de Satan, et en beaucoup de désirs vains et nuisibles, qui précipitent les hommes dans la perte et dans la damnation; car le désir des richesses est la radine de tous les maux, et plusieurs de ceux qui en ont été emportés se sont égarés du chemin de la foi, et se
(1) Sap., I, 6.
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sont engagés eux-mêmes dans de grandes afflictions (1). C'est le malheur que s'attira ce perfide apôtre par son avarice, qui fut d'autant plus honteuse et d'autant plus répréhensible, qu'il avait un plus grand sujet d'être touché de l'exemple admirable de notre Seigneur Jésus-Christ, de sa très-sainte Mère et du sacré collège des apôtres, dont la, communauté ne recueillait que quelques aumônes fort modiques. Mais le mauvais disciple se flatta qu'elles augmenteraient tant par les miracles de son Maître, que par le grand nombre des personnes qui le suivaient, et qu'alors il pourrait mettre la main sur des sommes plus considérables. Et comme les choses n'arrivaient pas selon ses désirs, il se fâchait contre ces mêmes personnes c'est ainsi qu'il témoigna son mécontentement lorsque la Madeleine répandit un parfum de grand prix sur le Sauveur, et son avarice le portant à faire l'estimation de cette précieuse essence, il dit qu'elle valait plus de trois cents deniers, qui pouvaient être distribués aux pauvres (2). Le chagrin qu'il avait d'en avoir été privé lui faisait tenir ce langage, car il, ne se mettait pas fort en peine des pauvres (3). Au contraire, il se plaignait vivement de ce que la Mère de miséricorde fît tant d'aumônes, et même de ce que le Seigneur n'en reçût pas davantage, comme aussi de ce que les apôtres et les disciples ne lui en procurassent pas, de sorte que, toujours chagrin contre tous, il semblait qu'il en eût été offensé. Quelques
(1) I Tim., VI, 9. — (1) Matth., XXVI, 6; Marc., XIV, 6; Joan, XII, 3. — (3) Ibid., 6.
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mois avant la mort du Sauveur, il commença à quitter souvent les apôtres et à s'éloigner du Seigneur, parce que leur compagnie le vexait, et il ne les allait trouver que pour ramasser les aumônes. Alors le démon le poussa à abandonner entièrement son Maître, et à le livrer aux Juifs comme il fit.
1096. Mais revenons à la réponse qu'il reçut du Maître de la vie, lorsqu'il lui demanda la charge d'économe, afin qu'on y découvre combien les jugements du Très-Haut sont terribles et impénétrables. Le Sauveur du monde, voyant que le cupide apôtre ne travaillait qu'à sa perdition finale, voulait le soustraire au danger que renfermait sa demande. Et afin qu'il ne trouvât dans son malheur aucune excuse, sa Majesté lui dit: « Savez-vous, ô Judas! ce que vous demandez? Ne soyez pas si cruel envers vous-même, que de chercher les armes et de solliciter le poison dont vous pourriez vous servir pour vous donner la mort. » Judas répartit: « Moi, Seigneur, je ne désire que de vous servir, et que de m'employer à ce qui sera le plus utile à vos disciples, et je le ferai bien mieux dans cet office que dans tout autre, comme je vous le promets. » Par cette opiniâtreté de Judas à chercher et aimer le péril, Dieu justifia sa cause en permettant qu'il s’y engageât et qu'il y pérît malheureusement; car cet ambitieux résista à la grâce et s’endurcit de plus en plus. Lorsque le Seigneur lui mettait devant les yeux l'eau et le leu, la vie et la mort, il étendit la main et choisit lui-même sa perte (1);
(1) Eccles., XV,17.
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et ainsi fut justifiée la justice et glorifiée la miséricorde du Très-Haut, qui l'avait si souvent pressé de lui ouvrir la porte de son coeur, d'où l'ingrat le chassa pour y faire entrer le démon. Je donnerai dans la suite de cette histoire, sur la malheureuse conduite de Judas, quelques autres détails utiles à l'expérience des mortels, pour ne pas allonger ce chapitre, et parce qu'ils se rattachent à d'autres événements. Quel est celui d'entre les hommes si sujets à pécher, qui né sera saisi d'une vive frayeur, en voyant un de ses semblables, élevé dans l'école de notre Seigneur Jésus-Christ et de sa très-sainte Mère, nourri de leur doctrine, témoin de leurs miracles, opérant les mêmes merveilles que les autres apôtres, passer en si peu de temps de l'apostolat au rôle de démon, et d'innocente brebis qu'il était, devenir un loup ravissant? Judas commença par des péchés véniels, et de ceux-ci il passa aux crimes les plus horribles. Il se livra au démon, qui déjà soupçonnait que notre Seigneur Jésus-Christ était Dieu, et qui déchargea la rage qu'il avait contre le Maître, sur ce malheureux disciple séparé du petit troupeau. Mais si Lucifer n'a fait que redoubler de fureur depuis qu'il a forcément reconnu que Jésus-Christ était véritablement Dieu et le Rédempteur du monde, que peut espérer une âme qui se livre maintenant à un ennemi si cruel, si implacable et si acharné à notre perte?
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(1) Sap., I, 6.
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sont engagés eux-mêmes dans de grandes afflictions (1). C'est le malheur que s'attira ce perfide apôtre par son avarice, qui fut d'autant plus honteuse et d'autant plus répréhensible, qu'il avait un plus grand sujet d'être touché de l'exemple admirable de notre Seigneur Jésus-Christ, de sa très-sainte Mère et du sacré collège des apôtres, dont la, communauté ne recueillait que quelques aumônes fort modiques. Mais le mauvais disciple se flatta qu'elles augmenteraient tant par les miracles de son Maître, que par le grand nombre des personnes qui le suivaient, et qu'alors il pourrait mettre la main sur des sommes plus considérables. Et comme les choses n'arrivaient pas selon ses désirs, il se fâchait contre ces mêmes personnes c'est ainsi qu'il témoigna son mécontentement lorsque la Madeleine répandit un parfum de grand prix sur le Sauveur, et son avarice le portant à faire l'estimation de cette précieuse essence, il dit qu'elle valait plus de trois cents deniers, qui pouvaient être distribués aux pauvres (2). Le chagrin qu'il avait d'en avoir été privé lui faisait tenir ce langage, car il, ne se mettait pas fort en peine des pauvres (3). Au contraire, il se plaignait vivement de ce que la Mère de miséricorde fît tant d'aumônes, et même de ce que le Seigneur n'en reçût pas davantage, comme aussi de ce que les apôtres et les disciples ne lui en procurassent pas, de sorte que, toujours chagrin contre tous, il semblait qu'il en eût été offensé. Quelques
(1) I Tim., VI, 9. — (1) Matth., XXVI, 6; Marc., XIV, 6; Joan, XII, 3. — (3) Ibid., 6.
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mois avant la mort du Sauveur, il commença à quitter souvent les apôtres et à s'éloigner du Seigneur, parce que leur compagnie le vexait, et il ne les allait trouver que pour ramasser les aumônes. Alors le démon le poussa à abandonner entièrement son Maître, et à le livrer aux Juifs comme il fit.
1096. Mais revenons à la réponse qu'il reçut du Maître de la vie, lorsqu'il lui demanda la charge d'économe, afin qu'on y découvre combien les jugements du Très-Haut sont terribles et impénétrables. Le Sauveur du monde, voyant que le cupide apôtre ne travaillait qu'à sa perdition finale, voulait le soustraire au danger que renfermait sa demande. Et afin qu'il ne trouvât dans son malheur aucune excuse, sa Majesté lui dit: « Savez-vous, ô Judas! ce que vous demandez? Ne soyez pas si cruel envers vous-même, que de chercher les armes et de solliciter le poison dont vous pourriez vous servir pour vous donner la mort. » Judas répartit: « Moi, Seigneur, je ne désire que de vous servir, et que de m'employer à ce qui sera le plus utile à vos disciples, et je le ferai bien mieux dans cet office que dans tout autre, comme je vous le promets. » Par cette opiniâtreté de Judas à chercher et aimer le péril, Dieu justifia sa cause en permettant qu'il s’y engageât et qu'il y pérît malheureusement; car cet ambitieux résista à la grâce et s’endurcit de plus en plus. Lorsque le Seigneur lui mettait devant les yeux l'eau et le leu, la vie et la mort, il étendit la main et choisit lui-même sa perte (1);
(1) Eccles., XV,17.
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et ainsi fut justifiée la justice et glorifiée la miséricorde du Très-Haut, qui l'avait si souvent pressé de lui ouvrir la porte de son coeur, d'où l'ingrat le chassa pour y faire entrer le démon. Je donnerai dans la suite de cette histoire, sur la malheureuse conduite de Judas, quelques autres détails utiles à l'expérience des mortels, pour ne pas allonger ce chapitre, et parce qu'ils se rattachent à d'autres événements. Quel est celui d'entre les hommes si sujets à pécher, qui né sera saisi d'une vive frayeur, en voyant un de ses semblables, élevé dans l'école de notre Seigneur Jésus-Christ et de sa très-sainte Mère, nourri de leur doctrine, témoin de leurs miracles, opérant les mêmes merveilles que les autres apôtres, passer en si peu de temps de l'apostolat au rôle de démon, et d'innocente brebis qu'il était, devenir un loup ravissant? Judas commença par des péchés véniels, et de ceux-ci il passa aux crimes les plus horribles. Il se livra au démon, qui déjà soupçonnait que notre Seigneur Jésus-Christ était Dieu, et qui déchargea la rage qu'il avait contre le Maître, sur ce malheureux disciple séparé du petit troupeau. Mais si Lucifer n'a fait que redoubler de fureur depuis qu'il a forcément reconnu que Jésus-Christ était véritablement Dieu et le Rédempteur du monde, que peut espérer une âme qui se livre maintenant à un ennemi si cruel, si implacable et si acharné à notre perte?
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Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
Instruction que la Reine du ciel m’a donnée.
1097. Ma fille, tout ce que vous avez écrit dans ce chapitre est un avis des plus importants pour tous ceux qui vivent en la chair mortelle , et dans le danger de perdre le bien éternel ; car le moyen efficace d'arriver au salit et d'augmenter les degrés de la récompense, se réduit à craindre avec discrétion les jugements du Très-Haut (1), et à s'attirer mon intercession et ma clémence. Je veux que vous sachiez aussi qu'un des divins secrets que mon très-saint Fils découvrit dans la nuit de la Cène à Jean, son bien-aimé et le mien, fut de lui faire connaître qu'il s'était acquis cet amour par celui qu'il me portait, et que Judas était tombé dans le péché pour avoir méprisé la compassion que je lui témoignais. Alors l'évangéliste connut quelques-uns des grands mystères que le Tout-Puissant me communiqua et opéra en moi; il eut aussi connaissance de ce que je devais souffrir en la passion ; et le Seigneur lui ordonna de prendre un soin particulier de moi. La pureté d'une que je demande de vous doit être plus qu'angélique, et si vous vous disposez à l'acquérir, vous participerez aux faveurs que nous fîmes à Jean, et vous serez ma très-chère fille et l'épouse bien-aimée de mon Fils et mon Seigneur. L'exemple que vous offre cet évangéliste,
(1) Ps. CXVIII, 120.
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et la perte de Judas vous exciteront sans cesse à solliciter mes bonnes grâces et à correspondre par la plus vive reconnaissance à l'amour que je vous témoigne sans que vous l'ayez mérité.
1098. Je veux aussi que vous pénétriez un autre secret qui est fort ignoré du monde , c'est que l'un des péchés que le Seigneur a le plus en horreur, est le peu d’estime que l'on accorde aux justes et aux amis de l'Église, et surtout à moi, qui ai été choisie pour être sa Mère et la protectrice universelle de tous. Et si les injures que l'on fait à des ennemis sont si odieuses su Seigneur (1) et aux saints qui se trouvent dans le ciel, comment souffrira-t-il qu'on en fasse à ses plus chers amis, sur lesquels il tient ouverts les yeux de son amour (2)? Cet avis est beaucoup plus important que vous ne sauriez le concevoir pendant la vie mortelle, et c'est une des marques de réprobation que de mépriser les justes. Évitez ce danger, ne jugez personne (3), et moins encore ceux qui vous reprennent et vous enseignent. Ne vous laissez point incliner vers les choses terrestres, et gardez-vous surtout d'aspirer aux charges qui séduisent l'âme, quand elle ne regarde que ce qu'elles ont de sensible et d'humain, qui troublent le jugement et obscurcissent la raison. Ne désirez point les honneurs, ne portez pas envie à ceux qui les reçoivent, et ne demandez au Seigneur que son saint amour; car la créature est pleine des plus mauvaises inclinations, et si elle ne
(1) Matth., XVII, 35. — (2) Ps. XXXIII, 16. — (3) Matth., VII, 1.
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les réprime, elle recherche trop souvent ce qui doit être le sujet de sa damnation. Et quelquefois le Seigneur le lui accorde par ses secrets jugements, pour punir son ambition et plusieurs autres péchés qu'elle a commis, ainsi qu'il arriva à Judas. Les hommes reçoivent en ces biens temporels qu'ils souhaitent avec tant d'ardeur, la récompense de quelque bonne oeuvre qu'ils ont pu faire. Vous comprendrez par là combien est grande l'illusion de beaucoup de partisans du monde qui se croient fort heureux quand tout leur réussit au gré de leurs désirs terrestres. Et cependant c'est le plus grand de tous leurs malheurs, parce qu'ils perdent la récompense éternelle qu'obtiennent les justes qui ont méprisé le monde, et qui y ont été éprouvés par toute sorte d'adversités, le Seigneur refusant quelquefois à ceux-ci les choses temporelles qu'ils souhaitent, pour les soustraire à un péril caché. Afin que vous n'y tombiez pas, je vous avertis et vous recommande de ne jamais convoiter aucune chose périssable. Détournez votre volonté de tout ce qui est passager, maintenez-la libre et mattresse; affranchissez-la de la servitude des passions; et ne demandez que ce qui sera conforme à la volonté du Très-Haut; car sa Majesté prend un soin particulier de ceux qui s'abandonnent à sa divine Providence (1).
(1) Matth., VI, 30.
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1097. Ma fille, tout ce que vous avez écrit dans ce chapitre est un avis des plus importants pour tous ceux qui vivent en la chair mortelle , et dans le danger de perdre le bien éternel ; car le moyen efficace d'arriver au salit et d'augmenter les degrés de la récompense, se réduit à craindre avec discrétion les jugements du Très-Haut (1), et à s'attirer mon intercession et ma clémence. Je veux que vous sachiez aussi qu'un des divins secrets que mon très-saint Fils découvrit dans la nuit de la Cène à Jean, son bien-aimé et le mien, fut de lui faire connaître qu'il s'était acquis cet amour par celui qu'il me portait, et que Judas était tombé dans le péché pour avoir méprisé la compassion que je lui témoignais. Alors l'évangéliste connut quelques-uns des grands mystères que le Tout-Puissant me communiqua et opéra en moi; il eut aussi connaissance de ce que je devais souffrir en la passion ; et le Seigneur lui ordonna de prendre un soin particulier de moi. La pureté d'une que je demande de vous doit être plus qu'angélique, et si vous vous disposez à l'acquérir, vous participerez aux faveurs que nous fîmes à Jean, et vous serez ma très-chère fille et l'épouse bien-aimée de mon Fils et mon Seigneur. L'exemple que vous offre cet évangéliste,
(1) Ps. CXVIII, 120.
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et la perte de Judas vous exciteront sans cesse à solliciter mes bonnes grâces et à correspondre par la plus vive reconnaissance à l'amour que je vous témoigne sans que vous l'ayez mérité.
1098. Je veux aussi que vous pénétriez un autre secret qui est fort ignoré du monde , c'est que l'un des péchés que le Seigneur a le plus en horreur, est le peu d’estime que l'on accorde aux justes et aux amis de l'Église, et surtout à moi, qui ai été choisie pour être sa Mère et la protectrice universelle de tous. Et si les injures que l'on fait à des ennemis sont si odieuses su Seigneur (1) et aux saints qui se trouvent dans le ciel, comment souffrira-t-il qu'on en fasse à ses plus chers amis, sur lesquels il tient ouverts les yeux de son amour (2)? Cet avis est beaucoup plus important que vous ne sauriez le concevoir pendant la vie mortelle, et c'est une des marques de réprobation que de mépriser les justes. Évitez ce danger, ne jugez personne (3), et moins encore ceux qui vous reprennent et vous enseignent. Ne vous laissez point incliner vers les choses terrestres, et gardez-vous surtout d'aspirer aux charges qui séduisent l'âme, quand elle ne regarde que ce qu'elles ont de sensible et d'humain, qui troublent le jugement et obscurcissent la raison. Ne désirez point les honneurs, ne portez pas envie à ceux qui les reçoivent, et ne demandez au Seigneur que son saint amour; car la créature est pleine des plus mauvaises inclinations, et si elle ne
(1) Matth., XVII, 35. — (2) Ps. XXXIII, 16. — (3) Matth., VII, 1.
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les réprime, elle recherche trop souvent ce qui doit être le sujet de sa damnation. Et quelquefois le Seigneur le lui accorde par ses secrets jugements, pour punir son ambition et plusieurs autres péchés qu'elle a commis, ainsi qu'il arriva à Judas. Les hommes reçoivent en ces biens temporels qu'ils souhaitent avec tant d'ardeur, la récompense de quelque bonne oeuvre qu'ils ont pu faire. Vous comprendrez par là combien est grande l'illusion de beaucoup de partisans du monde qui se croient fort heureux quand tout leur réussit au gré de leurs désirs terrestres. Et cependant c'est le plus grand de tous leurs malheurs, parce qu'ils perdent la récompense éternelle qu'obtiennent les justes qui ont méprisé le monde, et qui y ont été éprouvés par toute sorte d'adversités, le Seigneur refusant quelquefois à ceux-ci les choses temporelles qu'ils souhaitent, pour les soustraire à un péril caché. Afin que vous n'y tombiez pas, je vous avertis et vous recommande de ne jamais convoiter aucune chose périssable. Détournez votre volonté de tout ce qui est passager, maintenez-la libre et mattresse; affranchissez-la de la servitude des passions; et ne demandez que ce qui sera conforme à la volonté du Très-Haut; car sa Majesté prend un soin particulier de ceux qui s'abandonnent à sa divine Providence (1).
(1) Matth., VI, 30.
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Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
CHAPITRE VI. Notre Seigneur Jésus-Christ se transfigure sur le Thabor devant sa très-sainte Mère. — Il se dirige avec elle de la Galilée vers Jérusalem, pour se rapprocher du lieu de la passion. — Ce qui arriva à Béthanie lorsque la Madeleine répandit des parfums sur le Sauveur.
1099. Il y avait déjà plus de deux ans et demi que notre Rédempteur Jésus-Christ prêchait et faisait dei miracles en public; de sorte que le temps marqué par la Sagesse éternelle s'approchait auquel il devait re-tourner à son Père par le moyen de sa passion et de sa mort, après avoir en mourant satisfait à la divine justice et racheté le genre humain. Et comme toutes ses oeuvres tendaient à notre salut et à notre instruction, et qu'elles étaient pleines de sagesse divine, cet adorable Sauveur résolut de préparer quelques-uns de ses apôtres au scandale qu'ils recevraient par sa mort (1), en leur manifestant la gloire de son corps passible, qu'ils devaient voir bientôt flagellé et crucifié ; car il voulait qu'ils le vissent transfiguré par la gloire avant qu'il fût défiguré par les bourreaux. Le
(1) Matth., XXVI, 31.
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Seigneur avait fait cette promesse devant tous peu de temps auparavant, quoiqu'elle ne fût pas pour tous, mais pour quelques-uns seulement, comme le rapporte l'Évangéliste saint Matthieu (1). Il choisit pour cela le Thabor, haute montagne de la Galilée, à deux lieues de Nazareth , du côté de l'orient ; et étant arrivé au sommet de cette montagne avec les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean son frère, il se transfigura devant eux, comme le racontent les trois Évangélistes saint Matthieu, saint Marc et saint Luc (2), qui ajoutent qu'outre les trois apôtres s'y trouvèrent les deux prophètes Moïse et Élie, s'entretenant avec Jésus de sa passion. Pendant la transfiguration il vint une voix du ciel de la part du Père éternel, qui dit : Celui-ci est mon Fils bien-ainsi, en qui je me plais uniquement ; écoules-le.
1099. Il y avait déjà plus de deux ans et demi que notre Rédempteur Jésus-Christ prêchait et faisait dei miracles en public; de sorte que le temps marqué par la Sagesse éternelle s'approchait auquel il devait re-tourner à son Père par le moyen de sa passion et de sa mort, après avoir en mourant satisfait à la divine justice et racheté le genre humain. Et comme toutes ses oeuvres tendaient à notre salut et à notre instruction, et qu'elles étaient pleines de sagesse divine, cet adorable Sauveur résolut de préparer quelques-uns de ses apôtres au scandale qu'ils recevraient par sa mort (1), en leur manifestant la gloire de son corps passible, qu'ils devaient voir bientôt flagellé et crucifié ; car il voulait qu'ils le vissent transfiguré par la gloire avant qu'il fût défiguré par les bourreaux. Le
(1) Matth., XXVI, 31.
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Seigneur avait fait cette promesse devant tous peu de temps auparavant, quoiqu'elle ne fût pas pour tous, mais pour quelques-uns seulement, comme le rapporte l'Évangéliste saint Matthieu (1). Il choisit pour cela le Thabor, haute montagne de la Galilée, à deux lieues de Nazareth , du côté de l'orient ; et étant arrivé au sommet de cette montagne avec les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean son frère, il se transfigura devant eux, comme le racontent les trois Évangélistes saint Matthieu, saint Marc et saint Luc (2), qui ajoutent qu'outre les trois apôtres s'y trouvèrent les deux prophètes Moïse et Élie, s'entretenant avec Jésus de sa passion. Pendant la transfiguration il vint une voix du ciel de la part du Père éternel, qui dit : Celui-ci est mon Fils bien-ainsi, en qui je me plais uniquement ; écoules-le.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1100. Les Évangélistes ne disent point que la très-pure Marie assistât à la transfiguration, mais ils ne le nient pas non plus ; et s'ils ne se sont pas expliqués là-dessus, c'est parce que cela ne regardait pas leur sujet, et qu'il n'était pas convenable de rapporter dans les Évangiles le miracle caché qui eut lieu. La lumière que j'ai reçue pour écrire cette histoire me découvre qu'au même moment où quelques anges allèrent prendre Moïse et Élie où ils étaient, la bien-heureuse Vierge fut transportée par le ministère de ses saints anges sur la montagne du Thabor, afin
(1) Matth., XVI, 38. — (2) Matth., XVII, 1; Marc., IX ; Luc., IX, 28.
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quelle y vit son très-saint Fils transfiguré, comme effectivement elle le vit, bien qu'elle n'eût pas besoin comme les apôtres d'être affermie dans la foi, quelle avait toujours constante et inébranlable. Mais notre Rédempteur Jésus-Christ eut plusieurs fins en cette merveille de la transfiguration ; et il avait d'autres raisons particulières pour ne pas célébrer un si grand mystère sans que sa très-sainte Mère y fût présente. Car ce qui était une grâce à l'égard des apôtres, était comme dû à notre grande Reine, en sa qualité de coadjutrice dans les oeuvres de la rédemption, à laquelle elle devait concourir jusqu'au pied de la croix; il fallait aussi qu'elle fût fortifiée par cette faveur contre les douleurs que son âme très-sainte devait souffrir : et destinée à être bientôt la Maîtresse de la sainte Église, il était convenable qu'elle fût témoin de ce mystère, et que son adorable Fils ne lui cachât point ce qu'il pouvait si facilement lui découvrir; puisqu'il lui manifestait toutes les opérations de son âme divine. L'amour du Seigneur pour sa bienheureuse Mère était tel, qu'il ne lui permettait pas de lui refuser cette faveur, dans le temps qu'il ne lui en refusait aucune de celles qui pouvaient lui prouver la tendresse de son affection; celle-ci appartenait d'ailleurs à notre auguste Princesse, à raison de son excellence et de sa dignité. C'est pour ces raisons, et pour plusieurs autres qu'il n'est pas nécessaire d'énumérer ici, qu'il m'a été déclaré que la bienheureuse Marie assista à la transfiguration de son très-saint Fils notre Rédempteur.
427
1101. Elle ne vit pas seulement l'humanité de notre Seigneur Jésus-Christ transfigurée et glorieuse, mais de plus elle vit clairement la Divinité pendant tout le temps que ce mystère dura ; car elle ne devait pas recevoir cette faveur de la manière dont les apôtres la reçurent, mais avec plus d'abondance et de plénitude. Et en la vision même de la gloire du corps, qui fut commune à tous, il y eut une grande différence entre notre auguste Reine et les apôtres, non-seulement parce qu'ils succombèrent de sommeil lorsque le Sauveur se retira su commencement pour prier, comme le rapporte saint Luc (1), mais aussi parce qu'ayant ouï cette voix du ciel, ils furent saisis de frayeur, et tombèrent le visage contre terre, demeurant en cet état jusqu'à ce que le Seigneur leur eût dit de se lever et de ne point craindre, comme le raconte saint Matthieu (2); quant à la divine Mère, elle resta toujours immobile, parce que, outre quelle était accoutumée à d'aussi grands bienfaits, elle se trouvait alors comblée de nouveaux dons de lumière et de force pour voir la Divinité; ainsi elle pouvait regarder fixement la gloire du corps transfiguré sans ressentir la crainte et la faiblesse qu’éprouvèrent les apôtres en la partie sensitive. La bienheureuse Marie avait vu autrefois le corps de son adorable Fils transfiguré, comme je l'ai dit ailleurs; mais dans cette occasion elle le vit avec des circonstances particulières, avec une plus vive admiration, et avec des
(1) Luc., IX, 32. — (2) Matth., XVII, 16.
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lumières et des faveurs plus extraordinaires; les effets que cette vision produisit en son âme très-pure furent aussi spéciaux ; car elle en sortit toute renouvelée, toute enflammée d'amour, et toute divinisée. Tant qu'elle vécut dans sa chair mortelle, elle conserva l'image de cette vision, qui s'appliquait à l'humanité glorieuse de notre Seigneur Jésus-Christ. Et quoique ce souvenir lui apportât une grande consolation en l'absence de son Fils, lorsque la même image ne lui était point représentée au milieu d'autres bienfaits, que nous rapporterons dans la troisième partie, il ne laissa pas que de lui rendre plus sensibles les affronts de la passion de Celui qu'elle avait contemplé dans les splendeurs de la gloire, dont il lui retraçait le tableau.
(1) Matth., XVI, 38. — (2) Matth., XVII, 1; Marc., IX ; Luc., IX, 28.
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quelle y vit son très-saint Fils transfiguré, comme effectivement elle le vit, bien qu'elle n'eût pas besoin comme les apôtres d'être affermie dans la foi, quelle avait toujours constante et inébranlable. Mais notre Rédempteur Jésus-Christ eut plusieurs fins en cette merveille de la transfiguration ; et il avait d'autres raisons particulières pour ne pas célébrer un si grand mystère sans que sa très-sainte Mère y fût présente. Car ce qui était une grâce à l'égard des apôtres, était comme dû à notre grande Reine, en sa qualité de coadjutrice dans les oeuvres de la rédemption, à laquelle elle devait concourir jusqu'au pied de la croix; il fallait aussi qu'elle fût fortifiée par cette faveur contre les douleurs que son âme très-sainte devait souffrir : et destinée à être bientôt la Maîtresse de la sainte Église, il était convenable qu'elle fût témoin de ce mystère, et que son adorable Fils ne lui cachât point ce qu'il pouvait si facilement lui découvrir; puisqu'il lui manifestait toutes les opérations de son âme divine. L'amour du Seigneur pour sa bienheureuse Mère était tel, qu'il ne lui permettait pas de lui refuser cette faveur, dans le temps qu'il ne lui en refusait aucune de celles qui pouvaient lui prouver la tendresse de son affection; celle-ci appartenait d'ailleurs à notre auguste Princesse, à raison de son excellence et de sa dignité. C'est pour ces raisons, et pour plusieurs autres qu'il n'est pas nécessaire d'énumérer ici, qu'il m'a été déclaré que la bienheureuse Marie assista à la transfiguration de son très-saint Fils notre Rédempteur.
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1101. Elle ne vit pas seulement l'humanité de notre Seigneur Jésus-Christ transfigurée et glorieuse, mais de plus elle vit clairement la Divinité pendant tout le temps que ce mystère dura ; car elle ne devait pas recevoir cette faveur de la manière dont les apôtres la reçurent, mais avec plus d'abondance et de plénitude. Et en la vision même de la gloire du corps, qui fut commune à tous, il y eut une grande différence entre notre auguste Reine et les apôtres, non-seulement parce qu'ils succombèrent de sommeil lorsque le Sauveur se retira su commencement pour prier, comme le rapporte saint Luc (1), mais aussi parce qu'ayant ouï cette voix du ciel, ils furent saisis de frayeur, et tombèrent le visage contre terre, demeurant en cet état jusqu'à ce que le Seigneur leur eût dit de se lever et de ne point craindre, comme le raconte saint Matthieu (2); quant à la divine Mère, elle resta toujours immobile, parce que, outre quelle était accoutumée à d'aussi grands bienfaits, elle se trouvait alors comblée de nouveaux dons de lumière et de force pour voir la Divinité; ainsi elle pouvait regarder fixement la gloire du corps transfiguré sans ressentir la crainte et la faiblesse qu’éprouvèrent les apôtres en la partie sensitive. La bienheureuse Marie avait vu autrefois le corps de son adorable Fils transfiguré, comme je l'ai dit ailleurs; mais dans cette occasion elle le vit avec des circonstances particulières, avec une plus vive admiration, et avec des
(1) Luc., IX, 32. — (2) Matth., XVII, 16.
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lumières et des faveurs plus extraordinaires; les effets que cette vision produisit en son âme très-pure furent aussi spéciaux ; car elle en sortit toute renouvelée, toute enflammée d'amour, et toute divinisée. Tant qu'elle vécut dans sa chair mortelle, elle conserva l'image de cette vision, qui s'appliquait à l'humanité glorieuse de notre Seigneur Jésus-Christ. Et quoique ce souvenir lui apportât une grande consolation en l'absence de son Fils, lorsque la même image ne lui était point représentée au milieu d'autres bienfaits, que nous rapporterons dans la troisième partie, il ne laissa pas que de lui rendre plus sensibles les affronts de la passion de Celui qu'elle avait contemplé dans les splendeurs de la gloire, dont il lui retraçait le tableau.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1102. On ne saurait trouver dans les langues humaines des termes pour expliquer les effets que produisit en son âme très-sainte cette vision de l'être entier de Jésus-Christ glorieux: non-seulement parce quelle vit briller d'un éclat si divin cette substance que le Verbe avait prise de son propre sang, et qu'elle avait portée dans son sein et nourrie de son propre lait; mais parce qu'elle ouït la voix du Père éternel qui reconnaissait pour Fils celui qui était aussi le sien, et qui le donnait en même temps aux hommes pour maître. Elle pénétrait tous ces mystères, les considérait avec reconnaissance, et en louait dignement le Tout-Puissant. Elle fit de nouveaux cantiques avec ses anges, et célébra ce jour si solennel pour son âme et pour l'humanité de son très-saint Fils. Je ne m'arrête
429
point à d'autres détails relatifs à ce mystère, ni à dire en quoi consista la transfiguration du corps sacré de Jésus-Christ. Il suffit qu'on sache que son visage devint resplendissant comme le soleil, et ses vêtements plus blancs que la neige (1); et que cette gloire qui rejaillit sur le corps venait de celle que le Sauveur avait toujours en son âme divine et glorieuse. Car le miracle en vertu duquel, au moment de l'incarnation, furent suspendus les effets glorieux que le corps en devait recevoir d'une manière permanente, cessa pour quelque temps en la transfiguration, où le corps très-pur de Jésus-Christ participa à cette gloire de son âme. Ce fut là cette splendeur qui en frappa les témoins. Mais bientôt le même miracle continua à suspendre comme auparavant les effets de l'âme glorieuse de ce divin Sauveur Et comme elle était toujours bienheureuse, ce fut encore une chose merveilleuse que le corps ait joui momentanément d'un privilège qui lui était naturellement perpétuel aussi bien qu'à l'âme.
1103. Après le mystère de la transfiguration, l'auguste Marie fut ramenée en sa maison de Nazareth ; son très-saint Fils descendit de la montagne, et aussitôt il l'alla trouver pour revoir une dernière fois sa patrie et prendre ensuite le chemin de Jérusalem , où il devait souffrir à la Pâque prochaine, qui devait être la dernière pour sa Majesté. Après qu'il eut passé quelques jours à Nazareth, il en sortit accompagné de
(1) Matth., XVII, 2.
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sa très-sainte Mère, des apôtres, des disciples gui il avait et de plusieurs saintes femmes; traversant la Galilée et la Samarie jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés en Judée et à Jérusalem. L'évangéliste saint Luc (1), écrivant ce voyage, dit que le Sauveur afermit son visage pour se rendre à Jérusalem; parce qu'en, par; tant il avait une physionomie joyeuse, il brûlait du désir de parvenir à sa passion, il allait spontanément et librement se sacrifier, avec une volonté efficace, pour le salut du genre humain; ainsi il ne devait plus retourner en Galilée, où il avait opéré tant de prodiges. Dans cette résolution de quitter Nazareth , il glorifia comme homme le Père éternel, et lui rendit des actions de grâces de ce qu'il avait reçu en ce lieu l’être humain, qu'il livrait pour le remède des hommes à la passion et à la mort qu'il allait subir. Entre autres choses que dit notre Rédempteur Jésus-Christ dans cette oraison, que je ne saurais bien traduire par mes paroles, j'entendis ce qui suit :
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point à d'autres détails relatifs à ce mystère, ni à dire en quoi consista la transfiguration du corps sacré de Jésus-Christ. Il suffit qu'on sache que son visage devint resplendissant comme le soleil, et ses vêtements plus blancs que la neige (1); et que cette gloire qui rejaillit sur le corps venait de celle que le Sauveur avait toujours en son âme divine et glorieuse. Car le miracle en vertu duquel, au moment de l'incarnation, furent suspendus les effets glorieux que le corps en devait recevoir d'une manière permanente, cessa pour quelque temps en la transfiguration, où le corps très-pur de Jésus-Christ participa à cette gloire de son âme. Ce fut là cette splendeur qui en frappa les témoins. Mais bientôt le même miracle continua à suspendre comme auparavant les effets de l'âme glorieuse de ce divin Sauveur Et comme elle était toujours bienheureuse, ce fut encore une chose merveilleuse que le corps ait joui momentanément d'un privilège qui lui était naturellement perpétuel aussi bien qu'à l'âme.
1103. Après le mystère de la transfiguration, l'auguste Marie fut ramenée en sa maison de Nazareth ; son très-saint Fils descendit de la montagne, et aussitôt il l'alla trouver pour revoir une dernière fois sa patrie et prendre ensuite le chemin de Jérusalem , où il devait souffrir à la Pâque prochaine, qui devait être la dernière pour sa Majesté. Après qu'il eut passé quelques jours à Nazareth, il en sortit accompagné de
(1) Matth., XVII, 2.
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sa très-sainte Mère, des apôtres, des disciples gui il avait et de plusieurs saintes femmes; traversant la Galilée et la Samarie jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés en Judée et à Jérusalem. L'évangéliste saint Luc (1), écrivant ce voyage, dit que le Sauveur afermit son visage pour se rendre à Jérusalem; parce qu'en, par; tant il avait une physionomie joyeuse, il brûlait du désir de parvenir à sa passion, il allait spontanément et librement se sacrifier, avec une volonté efficace, pour le salut du genre humain; ainsi il ne devait plus retourner en Galilée, où il avait opéré tant de prodiges. Dans cette résolution de quitter Nazareth , il glorifia comme homme le Père éternel, et lui rendit des actions de grâces de ce qu'il avait reçu en ce lieu l’être humain, qu'il livrait pour le remède des hommes à la passion et à la mort qu'il allait subir. Entre autres choses que dit notre Rédempteur Jésus-Christ dans cette oraison, que je ne saurais bien traduire par mes paroles, j'entendis ce qui suit :
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1104.« Mou l'ère éternel, je vais avec bonne volonté et avec joie accomplir votre commandement, satisfaire votre justice et souffrir jusqu'à la mort; réconcilier, avec vous tous les enfants d'Adam (2), payer la dette de leurs péchés et leur ouvrir les portes du ciel, qu'ils se sont fermées par ces mentes péchés. Je vais chercher ceux qui se sont égarés (3) en se détournant de moi, et je les ramènerai par la force de mon amour. Je vais
(1) Luc., IX, 51. — (2) Rom., V, 10. — (3) Luc., XIX, 10.
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sembler les dispersés de la maison de Jacob (1), relever ceux qui sont tombés, enrichir les pauvres, rafraîchir ceux qui ont soif, abattre les superbes et élever les humbles. Je veux vaincre l'enfer, et rehausser le triomphe de votre gloire contre Lucifer et contre les vices qu'il a semés dans le monde (2). Je veux arborer l'étendard de la croix (3), sous lequel toutes les vertus et tous ceux qui les pratiqueront doivent combattre. Je veux rassasier mon coeur des opprobres et des affronts dont il est affamé (4), et qui sont si estimables à vos yeux. Je veux m'humilier jusqu'à recevoir la mort des mains de mes ennemis (5), afin que nos amis et nos élus soient honorés et consolés dans leurs tribulations, et soient élevés à de hautes récompenses lorsqu'ils s'humilieront à les souffrir à mort exemple. O Croix désirée! quand est-ce que tu me recevras entre tes bras? O doux opprobres ! ô affronts ! ô douleurs! quand est-ce que vous me conduirez à la mort, pour la vaincre eu ma chair innocente (6)? Peines, affronts, ignominies, verges, épines, passion, mort, venez, venez à moi, qui vous cherche; laissez-vous bientôt trouver par celui qui vous aime et qui tonnait votre valeur. Si le monde vous abhorre, moi je vous convoite. S'il vous méprise dans son ignorance, moi,
qui suis la vérité et la sagesse, je vous appelle, parce a que je vous aime. Venez donc à moi, car si je vous
(1) Isa., LVI, 8. — (2) I Joan., III, 8. — (3) Matth., XVI, 24. — (4) Thren., III, 30. — (5) Philip., II, 8. — (6) Hebr., II, 14.
432
accepte comme homme, je vous rendrai comme Dieu l'honneur que le péché et ceux qui l'ont commis vous ont ôté. Venez à moi, ne tardez point de satisfaire mes désirs; que si vous appréhendez de m'aborder parce que je suis tout-puissant, je vous permets de déployer toutes vos forces et toutes vos rigueurs contre mon humanité. Je ne vous rejetterai point comme font les mortels. Je veux bannir l'erreur et les illusions des enfants d'Adam, qui aiment la vanité, qui cherchent le mensonge (1), et qui croient malheureux les pauvres, les affligés et les méprisés du monde; quand ils verront Celui a qui est véritablement leur Dieu, leur Créateur, leur Maître et leur Père souffrir les opprobres, les affronts, les ignominies, les tourments, la nudité et la mort de la croix, ils abjureront l'erreur et se feront gloire de suivre leur Dieu crucifié. »
1105. Ce sont là quelques-uns des sentiments que le Maître de la vie notre Sauveur forma dans son coeur, selon l'intelligence qui m'en a été donnée. Et les faits ont manifesté, par l'amour avec lequel il a cherché et enduré les supplices de la passion, de la croix et de la mort, ce que je ne saurais exprimer par mes paroles, de l'estime que l'ors doit faire des souffrances. Mais les enfants de la terre ont encore le coeur appesanti, et ne cessent de s'attacher à la vanité (2). Ayant devant les yeux la vie et la vérité, ils se laissent toujours entraîner à l'orgueil; l'humilité leur déplait, les plaisirs
433
les enchantent, et ils fuient tout ce qui leur parait pénible. O erreur déplorable! Travailler et se fatiguer beaucoup pour éviter une petite gène! Se résoudre follement à souffrir une confusion éternelle pour. ne pas essuyer le plus léger affront, et même pour ne pas se priver d'un honneur vain et apparent ! Dira-t-on après cela (si on n'a perdu le jugement) que c'est s'aimer soi-même, puisque notre plus mortel ennemi, avec toute sa haine, ne peut nous causer un plus grand préjudice que celui que nous nous causons nous-mêmes lorsque nous faisons quelque chose contre le bon plaisir de Dieu? Certes, nous ne croirions pas notre ami celui qui ne nous flatterait que pour mieux dissimuler sa trahison, et nous tiendrions pour fou celui qui, voyant le piège, s'y jetterait tête baissée pour un misérable cadeau. Si cela est vrai, comme ce l'est en effet, que dirons-nous de la conduite des mortels qui se laissent tromper par le monde? Qui est-ce qui leur a ôté le jugement? Qui est-ce qui les prive de l'usage de la raison? Oh! que le nombre des insensés est grand (1) !
(1) Luc., IX, 51. — (2) Rom., V, 10. — (3) Luc., XIX, 10.
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sembler les dispersés de la maison de Jacob (1), relever ceux qui sont tombés, enrichir les pauvres, rafraîchir ceux qui ont soif, abattre les superbes et élever les humbles. Je veux vaincre l'enfer, et rehausser le triomphe de votre gloire contre Lucifer et contre les vices qu'il a semés dans le monde (2). Je veux arborer l'étendard de la croix (3), sous lequel toutes les vertus et tous ceux qui les pratiqueront doivent combattre. Je veux rassasier mon coeur des opprobres et des affronts dont il est affamé (4), et qui sont si estimables à vos yeux. Je veux m'humilier jusqu'à recevoir la mort des mains de mes ennemis (5), afin que nos amis et nos élus soient honorés et consolés dans leurs tribulations, et soient élevés à de hautes récompenses lorsqu'ils s'humilieront à les souffrir à mort exemple. O Croix désirée! quand est-ce que tu me recevras entre tes bras? O doux opprobres ! ô affronts ! ô douleurs! quand est-ce que vous me conduirez à la mort, pour la vaincre eu ma chair innocente (6)? Peines, affronts, ignominies, verges, épines, passion, mort, venez, venez à moi, qui vous cherche; laissez-vous bientôt trouver par celui qui vous aime et qui tonnait votre valeur. Si le monde vous abhorre, moi je vous convoite. S'il vous méprise dans son ignorance, moi,
qui suis la vérité et la sagesse, je vous appelle, parce a que je vous aime. Venez donc à moi, car si je vous
(1) Isa., LVI, 8. — (2) I Joan., III, 8. — (3) Matth., XVI, 24. — (4) Thren., III, 30. — (5) Philip., II, 8. — (6) Hebr., II, 14.
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accepte comme homme, je vous rendrai comme Dieu l'honneur que le péché et ceux qui l'ont commis vous ont ôté. Venez à moi, ne tardez point de satisfaire mes désirs; que si vous appréhendez de m'aborder parce que je suis tout-puissant, je vous permets de déployer toutes vos forces et toutes vos rigueurs contre mon humanité. Je ne vous rejetterai point comme font les mortels. Je veux bannir l'erreur et les illusions des enfants d'Adam, qui aiment la vanité, qui cherchent le mensonge (1), et qui croient malheureux les pauvres, les affligés et les méprisés du monde; quand ils verront Celui a qui est véritablement leur Dieu, leur Créateur, leur Maître et leur Père souffrir les opprobres, les affronts, les ignominies, les tourments, la nudité et la mort de la croix, ils abjureront l'erreur et se feront gloire de suivre leur Dieu crucifié. »
1105. Ce sont là quelques-uns des sentiments que le Maître de la vie notre Sauveur forma dans son coeur, selon l'intelligence qui m'en a été donnée. Et les faits ont manifesté, par l'amour avec lequel il a cherché et enduré les supplices de la passion, de la croix et de la mort, ce que je ne saurais exprimer par mes paroles, de l'estime que l'ors doit faire des souffrances. Mais les enfants de la terre ont encore le coeur appesanti, et ne cessent de s'attacher à la vanité (2). Ayant devant les yeux la vie et la vérité, ils se laissent toujours entraîner à l'orgueil; l'humilité leur déplait, les plaisirs
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les enchantent, et ils fuient tout ce qui leur parait pénible. O erreur déplorable! Travailler et se fatiguer beaucoup pour éviter une petite gène! Se résoudre follement à souffrir une confusion éternelle pour. ne pas essuyer le plus léger affront, et même pour ne pas se priver d'un honneur vain et apparent ! Dira-t-on après cela (si on n'a perdu le jugement) que c'est s'aimer soi-même, puisque notre plus mortel ennemi, avec toute sa haine, ne peut nous causer un plus grand préjudice que celui que nous nous causons nous-mêmes lorsque nous faisons quelque chose contre le bon plaisir de Dieu? Certes, nous ne croirions pas notre ami celui qui ne nous flatterait que pour mieux dissimuler sa trahison, et nous tiendrions pour fou celui qui, voyant le piège, s'y jetterait tête baissée pour un misérable cadeau. Si cela est vrai, comme ce l'est en effet, que dirons-nous de la conduite des mortels qui se laissent tromper par le monde? Qui est-ce qui leur a ôté le jugement? Qui est-ce qui les prive de l'usage de la raison? Oh! que le nombre des insensés est grand (1) !
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1106. La très-pure Marie fut la seule entre les enfants d'Adam qui, comme l'image vivante de son très saint Fils, se conforma entièrement à sa volonté, à sa vie, à toutes ses oeuvres et à sa doctrine. Elle tut celle qui suppléa par sa prudence et par la plénitude de sa sagesse aux fautes que notre ignorance et notre folie nous font commettre, et qui nous acquit la lumière
(1) Eccles., I, 15.
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de la vérité au milieu de nos plus épaisses ténèbres. Il arriva, dans la circonstance dont je parle, que cette auguste Reine vit dans l'âme très sainte de son Fils, comme dans un miroir, tous les actes d'amour qu'il faisait; et, comme elle le prenait pour le modèle de ses actions, elle pria conjointement avec lui le Père éternel, et dit intérieurement : « Dieu tout, puissant, Père de miséricorde, je glorifie votre être infini et immuable; je vous bénis et vous bénirai à
jamais de ce qu'après m'avoir créée, vous avez daigné déployer en ce lieu la puissance de votre bras en m'élevant à la dignité de Mère de votre Fils unique, et en m'enrichissant de la plénitude de votre esprit et de vos anciennes miséricordes , que vous avez répandues si abondamment sur notre très-humble servante; et de ce qui ensuite, sans que je l'eusse mérité, votre Fils unique et le mien, en l'humanité qu'il a reçue de ma substance, a bien voulu me souffrir en sa compagnie si désirable, et m'éclairer par les influences de sa grâce et de sa doctrine pendant le cours de trente-trois années. Je quitte Seigneur, aujourd'hui ma patrie, j’accompagne mon Fils et mon Maître, selon votre bon plaisir, pour assister au sacrifice de sa vie et de son être humain qu'il doit offrir pour tous les hommes. Il n'est point de douleur qui soit égale à la mienne (1), puisque je dois voir l'Agneau qui ôte les péchés du monde (2) en proie aux loups ravissants; Celui
(1) Thren., I, 12. — (2) jerem., XI, 19.
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qui est la splendeur de votre gloire et l'image de votre substance (1); Celui qui est engendré de toute éternité en égalité de cette même substance et qui le sera éternellement ; Celui à qui j'ai donné litre humain dans mon sein virginal livré aux opprobres et à la mort de la croix, et la beauté de son visage, qui est la lumière de mes yeux et la joie des anges, défigurée par les tourments (2). Oh! s'il était possible que je subisse moi seule les peines et les douleurs qui l'attendent, et que je me livrasse à la mort pour lui conserver la vie! Agréez, Père éternel, le sacrifice que je vous offre avec mon bien aimé pour accomplir votre très-sainte volonté. Oh ! que les jours et les heures qui doivent amener la triste nuit de mes douleurs accourent avec vitesse ! Ce sera un jour heureux pour le genre humain, mais une nuit affreuse pour mon coeur consterné de l'absente du Soleil qui l’éclairait. O enfants d'Adam, ennemis de vous-mêmes et plongés dans un funeste sommeil ! sortez de votre léthargie, et reconnaissez l'énormité de vos fautes par les peines qu'elles font souffrir à votre divin Rédempteur. Reconnaissez-la par mes défaillances, mes angoissés et les amer tomes de ma douleur; commencez enfin à apprécier les ravages du péché. »
1107. Je ne saurais dignement raconter toutes les oeuvres que fit la bienheureuse Vierge lors de ce dernier départ de Nazareth, les pensées qu'elle conçut,
(1) Sap., VII, 26; Hebr., I, 3. —(2) Isa., LIII, 2.
436
les prières qu'elle adressa au Père éternel, les entretiens à la fois si pleins de charmes et si douloureux qu'elle eut avec son très-saint Fils, la grandeur de son affliction, les mérites incomparables qu'elle acquit; parce que le pur amour avec lequel elle souhaitait comme mère la vie de Jésus-Christ et l'exemption des tourments qu'il devait endurer, se trouvant uni à la conformité qu'elle avait à la volonté de cet adorable Sauveur et du Père éternel, son âme en était transpercée du glaive de douleur que Siméon lui avait montré de loin (1). Dans cette désolation, elle tenait à son Fils des discours dictés par la prudence et la sagesse; mais elle y mêlait les plaintes les plus douces et les plus tendres, de ce qu'elle ne pouvait ni empêcher sa passion, ni mourir avec lui. Elle surpassa en ces peines tous les martyrs qui ont paru. et qui paraîtront dans le monde. C'est dans ces dispositions et ces sentiments cachés aux hommes que le Roi et la Reine ale l'univers sortirent de Nazareth pour aller à Jérusalem- en traversant la Galilée, où le Sauveur du monde ne retourna plus pendant sa vie mortelle. Et, comme il voyait que le temps de souffrir et de mourir pour le salut des hommes s'approchait, il fit de plus grandes merveilles pendant les derniers mois qui précédèrent sa passion et sa mort, ainsi que le rapportent les écrivains sacrés, parlant de ce qui arriva depuis qu'il fut sorti de Galilée jusqu'au jour de son entrée triomphale, dans Jérusalem, dont je ferai mention
(1) Luc., II, 35.
437
ci-après, Et jusqu'à cette époque le Seigneur, se mil, lorsque la fête des Tabernacles fut passée, à parcourir et à évangéliser la Judée, en attendant l'heure déterminée où il se devait offrir au sacrifice en la manière et au moment qu'il l'avait résolu.
(1) Eccles., I, 15.
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de la vérité au milieu de nos plus épaisses ténèbres. Il arriva, dans la circonstance dont je parle, que cette auguste Reine vit dans l'âme très sainte de son Fils, comme dans un miroir, tous les actes d'amour qu'il faisait; et, comme elle le prenait pour le modèle de ses actions, elle pria conjointement avec lui le Père éternel, et dit intérieurement : « Dieu tout, puissant, Père de miséricorde, je glorifie votre être infini et immuable; je vous bénis et vous bénirai à
jamais de ce qu'après m'avoir créée, vous avez daigné déployer en ce lieu la puissance de votre bras en m'élevant à la dignité de Mère de votre Fils unique, et en m'enrichissant de la plénitude de votre esprit et de vos anciennes miséricordes , que vous avez répandues si abondamment sur notre très-humble servante; et de ce qui ensuite, sans que je l'eusse mérité, votre Fils unique et le mien, en l'humanité qu'il a reçue de ma substance, a bien voulu me souffrir en sa compagnie si désirable, et m'éclairer par les influences de sa grâce et de sa doctrine pendant le cours de trente-trois années. Je quitte Seigneur, aujourd'hui ma patrie, j’accompagne mon Fils et mon Maître, selon votre bon plaisir, pour assister au sacrifice de sa vie et de son être humain qu'il doit offrir pour tous les hommes. Il n'est point de douleur qui soit égale à la mienne (1), puisque je dois voir l'Agneau qui ôte les péchés du monde (2) en proie aux loups ravissants; Celui
(1) Thren., I, 12. — (2) jerem., XI, 19.
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qui est la splendeur de votre gloire et l'image de votre substance (1); Celui qui est engendré de toute éternité en égalité de cette même substance et qui le sera éternellement ; Celui à qui j'ai donné litre humain dans mon sein virginal livré aux opprobres et à la mort de la croix, et la beauté de son visage, qui est la lumière de mes yeux et la joie des anges, défigurée par les tourments (2). Oh! s'il était possible que je subisse moi seule les peines et les douleurs qui l'attendent, et que je me livrasse à la mort pour lui conserver la vie! Agréez, Père éternel, le sacrifice que je vous offre avec mon bien aimé pour accomplir votre très-sainte volonté. Oh ! que les jours et les heures qui doivent amener la triste nuit de mes douleurs accourent avec vitesse ! Ce sera un jour heureux pour le genre humain, mais une nuit affreuse pour mon coeur consterné de l'absente du Soleil qui l’éclairait. O enfants d'Adam, ennemis de vous-mêmes et plongés dans un funeste sommeil ! sortez de votre léthargie, et reconnaissez l'énormité de vos fautes par les peines qu'elles font souffrir à votre divin Rédempteur. Reconnaissez-la par mes défaillances, mes angoissés et les amer tomes de ma douleur; commencez enfin à apprécier les ravages du péché. »
1107. Je ne saurais dignement raconter toutes les oeuvres que fit la bienheureuse Vierge lors de ce dernier départ de Nazareth, les pensées qu'elle conçut,
(1) Sap., VII, 26; Hebr., I, 3. —(2) Isa., LIII, 2.
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les prières qu'elle adressa au Père éternel, les entretiens à la fois si pleins de charmes et si douloureux qu'elle eut avec son très-saint Fils, la grandeur de son affliction, les mérites incomparables qu'elle acquit; parce que le pur amour avec lequel elle souhaitait comme mère la vie de Jésus-Christ et l'exemption des tourments qu'il devait endurer, se trouvant uni à la conformité qu'elle avait à la volonté de cet adorable Sauveur et du Père éternel, son âme en était transpercée du glaive de douleur que Siméon lui avait montré de loin (1). Dans cette désolation, elle tenait à son Fils des discours dictés par la prudence et la sagesse; mais elle y mêlait les plaintes les plus douces et les plus tendres, de ce qu'elle ne pouvait ni empêcher sa passion, ni mourir avec lui. Elle surpassa en ces peines tous les martyrs qui ont paru. et qui paraîtront dans le monde. C'est dans ces dispositions et ces sentiments cachés aux hommes que le Roi et la Reine ale l'univers sortirent de Nazareth pour aller à Jérusalem- en traversant la Galilée, où le Sauveur du monde ne retourna plus pendant sa vie mortelle. Et, comme il voyait que le temps de souffrir et de mourir pour le salut des hommes s'approchait, il fit de plus grandes merveilles pendant les derniers mois qui précédèrent sa passion et sa mort, ainsi que le rapportent les écrivains sacrés, parlant de ce qui arriva depuis qu'il fut sorti de Galilée jusqu'au jour de son entrée triomphale, dans Jérusalem, dont je ferai mention
(1) Luc., II, 35.
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ci-après, Et jusqu'à cette époque le Seigneur, se mil, lorsque la fête des Tabernacles fut passée, à parcourir et à évangéliser la Judée, en attendant l'heure déterminée où il se devait offrir au sacrifice en la manière et au moment qu'il l'avait résolu.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1108. Sa très-sainte Mère l'accompagna continuellement dans ce voyage, excepté quand parfois ils se séparèrent pour travailler tous deux à des couvres différentes qui regardaient le salut des âmes, et ce n'était que pour fort peu de temps. Saint Jean restait près d'elle dans ces occasions pour lui tenir compagnie et pour la servir; et dès lors l'écrivain sacré découvrit de grands mystères cachés en la très-pure Vierge Mère, et il fut éclairé d'une très-sublime lumière pour les pénétrer. Quand cette puissante Reine s'employait à instruire les âmes et à prier pour leur justification, les merveilles qu'elle opérait étaient plus éclatantes et manifestaient plus hautement sa charité; car elle accorda, comme son très-saint Fils, de plus insignes bienfaits aux hommes dans ces derniers jours qui précédèrent la passion, convertissant plusieurs personnes, guérissant les malades, consolant les affligés, secourant les pauvres, assistant les agonisants, servant tous les malheureux de ses propres mains, et de préférence ceux qui étaient plus délaissés ou atteints de maux plus cruels. Le bien-aimé disciple, qui s'était déjà chargé de la servir, était témoin de tout cela. Mais, comme elle brûlait d'un si ardent amour pour son Fils et son Dieu éternel, et qu'elle le voyait sur le point de passer de ce monde à son Père, et de la
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priver ainsi de son aimable présence, elle ressentait une si grande peine lorsqu'il était absent, elle éprouvait un désir si véhément de le voir, qu'elle tombait en des défaillances amoureuses quand il tardait un peu plus qu'à l'ordinaire à venir la rejoindre. Et le Seigneur, qui comme Dieu et comme fils observait ce qui se passait en sa très-amoureuse Mère, lui témoignait sa complaisance par une fidélité réciproque, et lui répondait au plus intime de son âme ces paroles, qui furent ici vérifiées à la lettre : Vous avez blessé mon cœur, ma sœur, vous avez blessé mon coeur par un seul de vos regards (1). Car blessant ainsi , vainquant le coeur de son Fils par son amour, elle l'attirait incontinent en sa présence. Et, selon ce que j'ai appris à cet égard, notre Seigneur Jésus-Christ, en tant qu’homme, ne savait pas rester longtemps éloigné de la très-pure Marie, quand il laissait agir dans toute sa force l'amour qu'il portait à une Mère si tendre; de sorte qu'il était naturellement consolé de la voir; et la beauté de l'âme immaculée de sa Mère adoucissait ses peines et ses fatigues, parce qu'il là regardait comme son fruit unique, exquis entre tous; ainsi la très-douce présence de cette auguste Dame était d'un grand soulagement pour sa Majesté au milieu de ses travaux et de ses peines sensibles.
1109. En ce temps-là, il arriva que le Sauveur, continuant ses merveilles en Judée, ressuscita Lazare, à Béthanie, où il avait été appelé par les deux soeurs
(1) Cant., IV, 9.
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Marthe et Marie (1). Et comme ce lieu était fort proche de Jérusalem, le miracle y fut aussitôt divulgué. Alors les princes des prêtres et les pharisiens, jaloux de cette merveille, assemblèrent le conseil, où ils résolurent la mort du Sauveur (2), ordonnant à leurs satellites de leur transmettre les nouvelles qu'ils en apprendraient : car, après avoir ressuscité Lazare, le divin Maître se retira dans une ville nommée Éphrem (3), jusqu'à ce que la fête de Pâque, qui approchait, fût arrivée. Quand il fut temps que notre Rédempteur l'allât célébrer par sa mort, il s'ouvrit davantage aux douze disciples, qui étaient ses apôtres; et, leur parlant en particulier, il les avertit que dans cette ville de Jérusalem, où ils se rendaient, le Fils de l'homme, qui n'était autre que lui-même, serait livré aux princes des pharisiens, et qu'il serait, pris, flagellé et outragé jusqu'à mourir sur une croix (4). Cependant les prêtres épiaient toutes ses démarches, pour, savoir s'il viendrait célébrer la Pâque. Six jours avant cette fête il revint à Béthanie, où il avait ressuscité Lazare, et où les deux soeurs le reçurent dans leur maison et préparèrent un copieux souper au divin Sauveur, à sa très-sainte Mère et à tous. ceux qui les accompagnaient pour la célébration de la Pâque; Lazare, que le Seigneur avait ressuscité peu de jours auparavant, se trouvait au nombre des convives (5).
1110. Le divin Maître était pendant le repas appuyé
(1) Joan., XI, 17. — (II) Ibid., 47. — ( Ibid., 54. — (4) Matth., XX, 18. — (5) Joan., XII, 1.
440
sur le côté, selon la coutume des Juifs, lorsque Marie-Madeleine entra pénétrée d'une céleste lumière, de très-hautes pensées, et de l'amour très-ardent qu'elle avait pour le Sauveur du monde; elle lui versa sur la tête et sur les pieds une précieuse liqueur de nard et d'autres essences aromatiques (1), qu'elle portait dans un vase d'albâtre, et elle lui essuya les pieds avec ses cheveux, comme elle l'avait déjà fait dans la maison du pharisien au temps de sa conversion, ainsi que le marque saint Luc (2). Et quoique les trois autres évangélistes racontent cette seconde onction de la Madeleine d'une manière un peu différente, je n'ai pas appris qu'il s'agisse dans leur récit de deux onctions ni de deux femmes; ils n'ont parlé que d'une seule Madeleine, mue du divin Esprit et du fervent amour qu'elle avait voué à notre Sauveur Jésus-Christ. Là maison fut remplie de la délicieuse odeur de ces parfums, parce qu'il y en avait une assez grande quantité, et la généreuse amante rompit le vase pour mieux l'épuiser à l'honneur de son adorable Maître. L'avare apôtre qui aurait voulu qu'on le lui remit pour le vendre et en toucher le prix, commença à murmurer de cette onction mystérieuse, et à provoquer quelques-uns des autres apôtres à en faire autant, sous prétexte de pauvreté et de charité envers les pauvres, disant qu'on les privait d'une aumône en prodiguant ainsi inutilement une chose d'une si grande valeur, tandis que cette onction n'avait
(1) Joan., XII, 3. — (2) Luc., VII, 38.
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été faite que par une disposition divine, et que lui-même n'était qu'un hypocrite effronté et cupide.
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priver ainsi de son aimable présence, elle ressentait une si grande peine lorsqu'il était absent, elle éprouvait un désir si véhément de le voir, qu'elle tombait en des défaillances amoureuses quand il tardait un peu plus qu'à l'ordinaire à venir la rejoindre. Et le Seigneur, qui comme Dieu et comme fils observait ce qui se passait en sa très-amoureuse Mère, lui témoignait sa complaisance par une fidélité réciproque, et lui répondait au plus intime de son âme ces paroles, qui furent ici vérifiées à la lettre : Vous avez blessé mon cœur, ma sœur, vous avez blessé mon coeur par un seul de vos regards (1). Car blessant ainsi , vainquant le coeur de son Fils par son amour, elle l'attirait incontinent en sa présence. Et, selon ce que j'ai appris à cet égard, notre Seigneur Jésus-Christ, en tant qu’homme, ne savait pas rester longtemps éloigné de la très-pure Marie, quand il laissait agir dans toute sa force l'amour qu'il portait à une Mère si tendre; de sorte qu'il était naturellement consolé de la voir; et la beauté de l'âme immaculée de sa Mère adoucissait ses peines et ses fatigues, parce qu'il là regardait comme son fruit unique, exquis entre tous; ainsi la très-douce présence de cette auguste Dame était d'un grand soulagement pour sa Majesté au milieu de ses travaux et de ses peines sensibles.
1109. En ce temps-là, il arriva que le Sauveur, continuant ses merveilles en Judée, ressuscita Lazare, à Béthanie, où il avait été appelé par les deux soeurs
(1) Cant., IV, 9.
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Marthe et Marie (1). Et comme ce lieu était fort proche de Jérusalem, le miracle y fut aussitôt divulgué. Alors les princes des prêtres et les pharisiens, jaloux de cette merveille, assemblèrent le conseil, où ils résolurent la mort du Sauveur (2), ordonnant à leurs satellites de leur transmettre les nouvelles qu'ils en apprendraient : car, après avoir ressuscité Lazare, le divin Maître se retira dans une ville nommée Éphrem (3), jusqu'à ce que la fête de Pâque, qui approchait, fût arrivée. Quand il fut temps que notre Rédempteur l'allât célébrer par sa mort, il s'ouvrit davantage aux douze disciples, qui étaient ses apôtres; et, leur parlant en particulier, il les avertit que dans cette ville de Jérusalem, où ils se rendaient, le Fils de l'homme, qui n'était autre que lui-même, serait livré aux princes des pharisiens, et qu'il serait, pris, flagellé et outragé jusqu'à mourir sur une croix (4). Cependant les prêtres épiaient toutes ses démarches, pour, savoir s'il viendrait célébrer la Pâque. Six jours avant cette fête il revint à Béthanie, où il avait ressuscité Lazare, et où les deux soeurs le reçurent dans leur maison et préparèrent un copieux souper au divin Sauveur, à sa très-sainte Mère et à tous. ceux qui les accompagnaient pour la célébration de la Pâque; Lazare, que le Seigneur avait ressuscité peu de jours auparavant, se trouvait au nombre des convives (5).
1110. Le divin Maître était pendant le repas appuyé
(1) Joan., XI, 17. — (II) Ibid., 47. — ( Ibid., 54. — (4) Matth., XX, 18. — (5) Joan., XII, 1.
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sur le côté, selon la coutume des Juifs, lorsque Marie-Madeleine entra pénétrée d'une céleste lumière, de très-hautes pensées, et de l'amour très-ardent qu'elle avait pour le Sauveur du monde; elle lui versa sur la tête et sur les pieds une précieuse liqueur de nard et d'autres essences aromatiques (1), qu'elle portait dans un vase d'albâtre, et elle lui essuya les pieds avec ses cheveux, comme elle l'avait déjà fait dans la maison du pharisien au temps de sa conversion, ainsi que le marque saint Luc (2). Et quoique les trois autres évangélistes racontent cette seconde onction de la Madeleine d'une manière un peu différente, je n'ai pas appris qu'il s'agisse dans leur récit de deux onctions ni de deux femmes; ils n'ont parlé que d'une seule Madeleine, mue du divin Esprit et du fervent amour qu'elle avait voué à notre Sauveur Jésus-Christ. Là maison fut remplie de la délicieuse odeur de ces parfums, parce qu'il y en avait une assez grande quantité, et la généreuse amante rompit le vase pour mieux l'épuiser à l'honneur de son adorable Maître. L'avare apôtre qui aurait voulu qu'on le lui remit pour le vendre et en toucher le prix, commença à murmurer de cette onction mystérieuse, et à provoquer quelques-uns des autres apôtres à en faire autant, sous prétexte de pauvreté et de charité envers les pauvres, disant qu'on les privait d'une aumône en prodiguant ainsi inutilement une chose d'une si grande valeur, tandis que cette onction n'avait
(1) Joan., XII, 3. — (2) Luc., VII, 38.
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été faite que par une disposition divine, et que lui-même n'était qu'un hypocrite effronté et cupide.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1111. Le Maître de la vérité et de la vie justifia Madeleine, que Judas voulait faire passer pour imprudente et pour prodigue (1). Il lui recommanda à lui et aux autres en même temps de ne la point inquiéter, parce qu'elle avait fait une bonne oeuvre, qu'il y aurait toujours parmi eux des pauvres à qui ils pourraient faire l'aumône, mais qu'ils n'auraient pas toit jours le moyen de rendre cet honneur à sa personne; et que cette libérale amante, poussée par l'Esprit du ciel, avait répandu ce baume sur son corps pour honorer par avancé sa sépulture; car elle annonçait par cette mystérieuse onction que le Seigneur souffrirait bientôt pour le genre humain, et que sa mort et ses funérailles étaient fort proches. Mais le perfide disciple ne faisait nulle attention à tout cela; au contraire, il fut extrêmement indigné contre son Maître de ce. qu'il avait justifié l'action de Madeleine. Or Lucifer voyant les dispositions de ce coeur endurci, lui lança de nouveaux traits, et lui inspira avec une nouvelle avarice une haine mortelle contre l'Auteur de la vie. Dès lors Judas résolut de machiner sa perte, de faire son rapport aux pharisiens en arrivant à Jérusalem, et de l'accuser auprès d'eux avec l'impudence qu'il montra en effet. Car il les alla trouver secrètement, et leur dit que son Maître enseignait des nouveautés contraires aux lois de Moïse et à celles
(1) Matth., XXVI, 10.
442
des empereurs; qu'il aimait la bonne chère et les gens de mauvaise vie, qu'il en admettait beaucoup dans sa compagnie, soit des hommes, soit des femmes, et qu'il les entraînait à sa suite; enfin, qu'ils devaient songer à y remédier s'ils voulaient prévenir leur irréparable ruine. Et comme les pharisiens partageaient déjà ces sentiments, conduits qu'ils étaient aussi bien que Judas par le prince des ténèbres, ils reçurent cet avis avec plaisir, et convinrent ensuite de la vente de notre Sauveur Jésus-Christ.
1112. Toutes les pensées et les démarches de Judas étaient connues non-seulement de notre divin Maître, mais aussi de sa très-sainte Mère. Néanmoins le Seigneur n'en dit pas un mot à Judas, et ne laissa pas de lui parler comme un père plein de tendresse, et de lui envoyer de saintes inspirations. La Mère de la Sagesse y ajoutait de nouvelles exhortations et des soins particuliers pour arrêter ce disciple sur les bords du précipice. Elle l'appela dans la nuit même du festin (c'était le samedi avant notre dimanche des Rameaux),lui parla en particulier dans les termes les plus pathétiques, et lui représenta, en versant des larmes abondantes, le danger formidable qu'il courait; elle le supplia,de changer de dessein, et s'il était fâché contre son Maître , de tourner sa vengeance contre elle, pour se rendre moins coupable, attendu qu'elle était une simple créature, tandis que Jésus-Christ était son Seigneur et son Dieu. Et pour satisfaire l'avarice insatiable de Judas, elle lui offrit divers cadeaux qu'elle avait reçus de Madeleine à cette
(1) Matth., XXVI, 10.
443
intention. Mais rien ne fut capable de toucher ce cœur obstiné: plus dur que le diamant, il résistait à tous les coups. Au contraire , comme la force des raisons de la bienheureuse Vierge le mettait dans la confusion, il s'en irrita davantage, ne témoignant sa sourde colère que par un sombre silence. Il eut pourtant l'effronterie de prendre ce qu'elle lui donnait, parce qu'il était aussi cupide que perfide. Alors notre très-prudente Reine le quitta pour aller trouver son Fils; et fondant en larmes, elle se prosterna à ses pieds, et lui parla avec une sagesse admirable; mais ses paroles exprimaient tant de douleur, de tendresse et de compassion, qu'elles procurèrent quelque consolation sensible à son Fils bien-aimé, qu'elle voyait affligé en son humanité sainte pour les mêmes raisons qui lui firent dire depuis à ses disciples que son âme était saisie d'une tristesse mortelle (1). Toutes ses peines étaient causées par les péchés des hommes qui ne profiteraient pas de sa passion et de sa mort, comme je le dirai dans la suite.
(1) Matth., XXVI, 10.
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des empereurs; qu'il aimait la bonne chère et les gens de mauvaise vie, qu'il en admettait beaucoup dans sa compagnie, soit des hommes, soit des femmes, et qu'il les entraînait à sa suite; enfin, qu'ils devaient songer à y remédier s'ils voulaient prévenir leur irréparable ruine. Et comme les pharisiens partageaient déjà ces sentiments, conduits qu'ils étaient aussi bien que Judas par le prince des ténèbres, ils reçurent cet avis avec plaisir, et convinrent ensuite de la vente de notre Sauveur Jésus-Christ.
1112. Toutes les pensées et les démarches de Judas étaient connues non-seulement de notre divin Maître, mais aussi de sa très-sainte Mère. Néanmoins le Seigneur n'en dit pas un mot à Judas, et ne laissa pas de lui parler comme un père plein de tendresse, et de lui envoyer de saintes inspirations. La Mère de la Sagesse y ajoutait de nouvelles exhortations et des soins particuliers pour arrêter ce disciple sur les bords du précipice. Elle l'appela dans la nuit même du festin (c'était le samedi avant notre dimanche des Rameaux),lui parla en particulier dans les termes les plus pathétiques, et lui représenta, en versant des larmes abondantes, le danger formidable qu'il courait; elle le supplia,de changer de dessein, et s'il était fâché contre son Maître , de tourner sa vengeance contre elle, pour se rendre moins coupable, attendu qu'elle était une simple créature, tandis que Jésus-Christ était son Seigneur et son Dieu. Et pour satisfaire l'avarice insatiable de Judas, elle lui offrit divers cadeaux qu'elle avait reçus de Madeleine à cette
(1) Matth., XXVI, 10.
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intention. Mais rien ne fut capable de toucher ce cœur obstiné: plus dur que le diamant, il résistait à tous les coups. Au contraire , comme la force des raisons de la bienheureuse Vierge le mettait dans la confusion, il s'en irrita davantage, ne témoignant sa sourde colère que par un sombre silence. Il eut pourtant l'effronterie de prendre ce qu'elle lui donnait, parce qu'il était aussi cupide que perfide. Alors notre très-prudente Reine le quitta pour aller trouver son Fils; et fondant en larmes, elle se prosterna à ses pieds, et lui parla avec une sagesse admirable; mais ses paroles exprimaient tant de douleur, de tendresse et de compassion, qu'elles procurèrent quelque consolation sensible à son Fils bien-aimé, qu'elle voyait affligé en son humanité sainte pour les mêmes raisons qui lui firent dire depuis à ses disciples que son âme était saisie d'une tristesse mortelle (1). Toutes ses peines étaient causées par les péchés des hommes qui ne profiteraient pas de sa passion et de sa mort, comme je le dirai dans la suite.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
Instruction que notre auguste Maîtresse m'a donnée.
1113. Ma fille, puisque, plus vous avancez en ce que vous écrivez de mon histoire, plus vous connaissez
(1) Matth., XXVI, 38.
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et déclarez l'amour si ardent avec lequel mon Seigneur votre époux et moi aussi embrassâmes la carrière de la souffrance et de la croix, et mieux vous comprenez que ce fut la seule chose que nous choisîmes en la vie mortelle; il est juste qu’éclairée de ces lumières et initiée par votre maîtresse aux secrets de la doctrine de mon Fils, vous fassiez tous vos efforts pour la mettre en pratique. Cette obligation s'accroît pour vous depuis le jour qu'il vous a choisie pour épouse; elle augmente sans cesse, et vous ne sauriez vous en acquitter si vous n'embrassez les afflictions, et si vous ne les aimez d'un amour tel, que pour vous la plus grande de toutes les peines soit de n'en point avoir. Renouvelez chaque jour ce désir dans votre coeur, car je veux que vous soyez fort savante en cette science, que le monde ignore et déteste. Mais remarquez en même temps que Dieu ne veut pas affliger la créature seulement pour l'affliger, mais pour la rendre ,par ce moyen digne des faveurs et des trésors qu'il lui a préparés au delà de tout ce que les hommes peuvent concevoir (1). En preuve de cette vérité, et comme pour gage de cette promesse, le Sauveur a voulu se transfigurer sur le Thabor en ma présence et en celle de quelques-uns de ses disciples. Et dans la prière qu'il y adressa au Père éternel; et qui ne fut connue que de moi seule, après que sa très-sainte humanité se fut humiliée, comme elle le faisait toutes les fois qu'elle commençait une prière, et l'eut glorifié et
(1) I Cor., II, 9.
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reconnu pour Dieu véritable et infini en ses perfections et en ses attributs, il lui demanda que les corps de tous les mortels qui s'affligeraient pour son amour, et qui souffriraient à son imitation dans la nouvelle loi de grâce, participassent ensuite à la gloire de son propre corps, et qu'ils ressuscitassent su jour du jugement universel, unis de nouveau aux mêmes Ames, afin de jouir de cette gloire, chacun su degré qu'il aurait mérité. Le Père éternel exauça tette prière; c'est pourquoi il voulut confirmer te privilège comme un contrat entre Dieu et les hommes, par la gloire que reçut le corps de leur Rédempteur, en lui donnant pour arrhes la possession de ce qu'il demandait pour tous ceux qui l'imiteraient. C'est le poids que produisent les afflictions si courtes et si légères que souffrent les mortels en se privant des vains et vils plaisirs de la terre (1), et en mortifiant leur chair pour Jésus-Christ, mon Fils et mon Seigneur.
1114. Par les mérites infinis qui accompagnèrent cette demande , cette gloire que les hommes doivent recevoir en qualité de membres de Jésus-Christ, leur divin chef qui la leur a acquise, les ceindra comme une couronne de justice (2). Mais l'union des membres au chef ne peut se réaliser que par la grâce et par l'imitation dans la souffrance, à laquelle correspond la récompense. Que si le moindre travail corporel doit obtenir la couronne, combien belle sera celle de ceux qui souffrent de grandes peines, qui pardonnent les
(1) II Cor., IV, 17. — (2) II Tim., IV, 8.
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injures, et qui ne s'en vengent que par des bienfaits, comme nous le fîmes à l'égard de Judas? Car non-seulement le Seigneur ne le priva point de l'apostolat, et ne lui témoigna aucune aigreur, mais il l'attendit jusqu'à la fin et jusqu à ce qu’il se fût mis par sa malice dans l'impossibilité de revenir au bien, en se livrant lui-même au démon. Pendant la vie mortelle le Seigneur est fort lent à punir; mais dans la suite la grandeur de la punition suppléera à ce retardement. Et si Dieu montre tant d'indulgence et de longanimité, à combien plus forte raison, un abject vermisseau ne doit-il pas supporter un autre vermisseau semblable à lui ! Vous devez régler votre patience, vos souffrances, et le soin du salut des âmes sur cette vérité et sur le zèle de la charité de votre Seigneur et votre époux. Je ne veux pas dire pour cela que vous tolériez ce que l'on fera contre l'honneur de Dieu, car ce ne serait pas aimer véritablement le bien de votre prochain; mais il faut que vous aimiez l'ouvrage du Seigneur, et que vous n'ayez en horreur que le péché; que vous souffriez et dissimuliez les injures qui vous seront personnelles,-que vous priiez pour tous, et que vous travailliez suivant vos forces au salut de tous. Ne perdez pas courage si vous ne voyez pas aussitôt le fruit de vos efforts; continuez au contraire à présenter au Père éternel les mérites de mon très-saint Fils, raton intercession et celle des anges et des saints; car comme Dieu est amour (1) , et que les bienheureux demeurent en
(1) I Joam., IV, 16.
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Dieu, ils ne cessent d'exercer la charité en faveur de ceux qui sont dans l'état de voyageurs.
1113. Ma fille, puisque, plus vous avancez en ce que vous écrivez de mon histoire, plus vous connaissez
(1) Matth., XXVI, 38.
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et déclarez l'amour si ardent avec lequel mon Seigneur votre époux et moi aussi embrassâmes la carrière de la souffrance et de la croix, et mieux vous comprenez que ce fut la seule chose que nous choisîmes en la vie mortelle; il est juste qu’éclairée de ces lumières et initiée par votre maîtresse aux secrets de la doctrine de mon Fils, vous fassiez tous vos efforts pour la mettre en pratique. Cette obligation s'accroît pour vous depuis le jour qu'il vous a choisie pour épouse; elle augmente sans cesse, et vous ne sauriez vous en acquitter si vous n'embrassez les afflictions, et si vous ne les aimez d'un amour tel, que pour vous la plus grande de toutes les peines soit de n'en point avoir. Renouvelez chaque jour ce désir dans votre coeur, car je veux que vous soyez fort savante en cette science, que le monde ignore et déteste. Mais remarquez en même temps que Dieu ne veut pas affliger la créature seulement pour l'affliger, mais pour la rendre ,par ce moyen digne des faveurs et des trésors qu'il lui a préparés au delà de tout ce que les hommes peuvent concevoir (1). En preuve de cette vérité, et comme pour gage de cette promesse, le Sauveur a voulu se transfigurer sur le Thabor en ma présence et en celle de quelques-uns de ses disciples. Et dans la prière qu'il y adressa au Père éternel; et qui ne fut connue que de moi seule, après que sa très-sainte humanité se fut humiliée, comme elle le faisait toutes les fois qu'elle commençait une prière, et l'eut glorifié et
(1) I Cor., II, 9.
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reconnu pour Dieu véritable et infini en ses perfections et en ses attributs, il lui demanda que les corps de tous les mortels qui s'affligeraient pour son amour, et qui souffriraient à son imitation dans la nouvelle loi de grâce, participassent ensuite à la gloire de son propre corps, et qu'ils ressuscitassent su jour du jugement universel, unis de nouveau aux mêmes Ames, afin de jouir de cette gloire, chacun su degré qu'il aurait mérité. Le Père éternel exauça tette prière; c'est pourquoi il voulut confirmer te privilège comme un contrat entre Dieu et les hommes, par la gloire que reçut le corps de leur Rédempteur, en lui donnant pour arrhes la possession de ce qu'il demandait pour tous ceux qui l'imiteraient. C'est le poids que produisent les afflictions si courtes et si légères que souffrent les mortels en se privant des vains et vils plaisirs de la terre (1), et en mortifiant leur chair pour Jésus-Christ, mon Fils et mon Seigneur.
1114. Par les mérites infinis qui accompagnèrent cette demande , cette gloire que les hommes doivent recevoir en qualité de membres de Jésus-Christ, leur divin chef qui la leur a acquise, les ceindra comme une couronne de justice (2). Mais l'union des membres au chef ne peut se réaliser que par la grâce et par l'imitation dans la souffrance, à laquelle correspond la récompense. Que si le moindre travail corporel doit obtenir la couronne, combien belle sera celle de ceux qui souffrent de grandes peines, qui pardonnent les
(1) II Cor., IV, 17. — (2) II Tim., IV, 8.
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injures, et qui ne s'en vengent que par des bienfaits, comme nous le fîmes à l'égard de Judas? Car non-seulement le Seigneur ne le priva point de l'apostolat, et ne lui témoigna aucune aigreur, mais il l'attendit jusqu'à la fin et jusqu à ce qu’il se fût mis par sa malice dans l'impossibilité de revenir au bien, en se livrant lui-même au démon. Pendant la vie mortelle le Seigneur est fort lent à punir; mais dans la suite la grandeur de la punition suppléera à ce retardement. Et si Dieu montre tant d'indulgence et de longanimité, à combien plus forte raison, un abject vermisseau ne doit-il pas supporter un autre vermisseau semblable à lui ! Vous devez régler votre patience, vos souffrances, et le soin du salut des âmes sur cette vérité et sur le zèle de la charité de votre Seigneur et votre époux. Je ne veux pas dire pour cela que vous tolériez ce que l'on fera contre l'honneur de Dieu, car ce ne serait pas aimer véritablement le bien de votre prochain; mais il faut que vous aimiez l'ouvrage du Seigneur, et que vous n'ayez en horreur que le péché; que vous souffriez et dissimuliez les injures qui vous seront personnelles,-que vous priiez pour tous, et que vous travailliez suivant vos forces au salut de tous. Ne perdez pas courage si vous ne voyez pas aussitôt le fruit de vos efforts; continuez au contraire à présenter au Père éternel les mérites de mon très-saint Fils, raton intercession et celle des anges et des saints; car comme Dieu est amour (1) , et que les bienheureux demeurent en
(1) I Joam., IV, 16.
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Dieu, ils ne cessent d'exercer la charité en faveur de ceux qui sont dans l'état de voyageurs.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
CHAPITRE VII. Du mystère caché qui précéda le triomphe de Jésus-Christ dans Jérusalem. — De l'entrée qu'il y fit, et comment il y fut reçu des habitants.
1115. Entre les oeuvres de Dieu que l'on appelle du dehors parce qu'il les a faites au dehors de lui-même, la plus grande a été celle de prendre chair humaine, pour souffrir et mourir pour le salut des hommes. La sagesse humaine n'aurait su pénétrer ce mystère (1); si Celui qui en était l'auteur ne le lui eût révélé par tant de témoignages. Malgré cela, il S'est trouvé beaucoup de sages selon la chair qui ont en peine à croire ce mystère, qui était leur véritable bonheur et leur remède efficace. D'autres l'ont cru, mais sans admettre les conditions réelles avec lesquelles il est arrivé. Les autres, qui sont les catholiques, croient, confessent et connaissent ce mystère dans le degré de lainière qu'en a la sainte Église. Et
(1) Matth., XVI, 17.
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dans cette foi explicite des mystères révélés, nous confessons implicitement ceux qui s'y trouvent,renfermés et qui n'ont pas été manifestés au monde, parce qu'ils n'étaient pas précisément nécessaires au salut; car Dieu réserve les uns pour le temps qu'il juge convenable , les autres pour le dernier jour auquel le secret de tous les coeurs sera révélé devant le juste Juge (1). Le dessein que le Seigneur a eu lorsqu'il m'a prescrit d'écrire cette histoire, comme je l'ai déjà dit et comme je l'ai souvent appris, a été de manifester quelques-uns de ces mystères cachés, sans opinions et sans conjectures humaines; c'est pourquoi j'en si écrit plusieurs qui m'ont été déclarés, tout en sachant que j'en laisse plusieurs autres qui sont dignes d'une grande admiration et d'une vénération singulière. Je veux, à l'égard de ceux que je .manifeste, prévenir la piété et la foi catholique des fidèles; car ceux-ci ne feront pas difficulté de croire l'accessoire, attendu qu'ils confessent déjà par cette même foi le principal des vérités chrétiennes, sur lesquelles est fondé tout ce que j'ai écrit, et tout ce que j'écrirai dans la suite, notamment de la passion de notre Rédempteur.
1116. Le samedi auquel Madeleine versa le baume sur le Seigneur à Béthanie, comme je l'ai rapporté au chapitre précédent, notre divin Maître se retira après le souper dans son oratoire, et la très-sainte Mère ayant laissé Judas dans son obstination,
(1) I Cor., IV, 5.
449
suivit bientôt son très-aimable Fils, et l'imita selon sa coutume, en ses prières et en ses exercices. Le Sauveur allait engager le plus grand combat de sa carrière, lui qui, selon l'expression de David (1), s'était élancé du plus haut du ciel pour y retourner, après avoir vaincu le démon, le péché et la mort. Et comme cet adorable et très-obéissant Fils allait volontairement à la passion et à la croix, au moment où il s'en approchait il s'offrit de nouveau au Père éternel, et s'étant prosterné, il le glorifia et fit du fond de son âme une prière pleine de la plus sublime résignation, par laquelle il accepta les affronts de sa passion, les peines, les ignominies et la mort de la croix pour la gloire de son Père, et pour le rachat de tout le genre humain. Sa bienheureuse Mère était retirée dans un coin de cet oratoire, s'associant à son bien-aimé Fils et Seigneur, de sorte que le Fils et la Mère priaient ensemble avec des larmes et des gémissements.
1115. Entre les oeuvres de Dieu que l'on appelle du dehors parce qu'il les a faites au dehors de lui-même, la plus grande a été celle de prendre chair humaine, pour souffrir et mourir pour le salut des hommes. La sagesse humaine n'aurait su pénétrer ce mystère (1); si Celui qui en était l'auteur ne le lui eût révélé par tant de témoignages. Malgré cela, il S'est trouvé beaucoup de sages selon la chair qui ont en peine à croire ce mystère, qui était leur véritable bonheur et leur remède efficace. D'autres l'ont cru, mais sans admettre les conditions réelles avec lesquelles il est arrivé. Les autres, qui sont les catholiques, croient, confessent et connaissent ce mystère dans le degré de lainière qu'en a la sainte Église. Et
(1) Matth., XVI, 17.
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dans cette foi explicite des mystères révélés, nous confessons implicitement ceux qui s'y trouvent,renfermés et qui n'ont pas été manifestés au monde, parce qu'ils n'étaient pas précisément nécessaires au salut; car Dieu réserve les uns pour le temps qu'il juge convenable , les autres pour le dernier jour auquel le secret de tous les coeurs sera révélé devant le juste Juge (1). Le dessein que le Seigneur a eu lorsqu'il m'a prescrit d'écrire cette histoire, comme je l'ai déjà dit et comme je l'ai souvent appris, a été de manifester quelques-uns de ces mystères cachés, sans opinions et sans conjectures humaines; c'est pourquoi j'en si écrit plusieurs qui m'ont été déclarés, tout en sachant que j'en laisse plusieurs autres qui sont dignes d'une grande admiration et d'une vénération singulière. Je veux, à l'égard de ceux que je .manifeste, prévenir la piété et la foi catholique des fidèles; car ceux-ci ne feront pas difficulté de croire l'accessoire, attendu qu'ils confessent déjà par cette même foi le principal des vérités chrétiennes, sur lesquelles est fondé tout ce que j'ai écrit, et tout ce que j'écrirai dans la suite, notamment de la passion de notre Rédempteur.
1116. Le samedi auquel Madeleine versa le baume sur le Seigneur à Béthanie, comme je l'ai rapporté au chapitre précédent, notre divin Maître se retira après le souper dans son oratoire, et la très-sainte Mère ayant laissé Judas dans son obstination,
(1) I Cor., IV, 5.
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suivit bientôt son très-aimable Fils, et l'imita selon sa coutume, en ses prières et en ses exercices. Le Sauveur allait engager le plus grand combat de sa carrière, lui qui, selon l'expression de David (1), s'était élancé du plus haut du ciel pour y retourner, après avoir vaincu le démon, le péché et la mort. Et comme cet adorable et très-obéissant Fils allait volontairement à la passion et à la croix, au moment où il s'en approchait il s'offrit de nouveau au Père éternel, et s'étant prosterné, il le glorifia et fit du fond de son âme une prière pleine de la plus sublime résignation, par laquelle il accepta les affronts de sa passion, les peines, les ignominies et la mort de la croix pour la gloire de son Père, et pour le rachat de tout le genre humain. Sa bienheureuse Mère était retirée dans un coin de cet oratoire, s'associant à son bien-aimé Fils et Seigneur, de sorte que le Fils et la Mère priaient ensemble avec des larmes et des gémissements.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1117. En cette circonstance, le Père éternel apparut avant minuit sous une forme humaine, avec le Saint-Esprit et une multitude innombrable d'anges. Le Père accepta le sacrifice de Jésus-Christ son très-saint Fils, et consentit, pour pardonner au monde, à ce que la rigueur de sa justice fût exercée sur lui. Le même Père, s'adressant ensuite à la bienheureuse Mère, lui dit: « Marie, notre Fille et notre Épouse, je veux que vous livriez de nouveau; votre Fils,
(1) Ps. XVIII, 5.
450
afin qu'il me soit sacrifié, puisque je le livre pouf la rédemption du genre humain. » L'humble et innocente colombe répondit: « Je ne suis, Seigneur, que cendre et poussière, mille fois indigne d'être Mère de votre Fils unique et Rédempteur du monde. Mais étant soumise à votre bonté ineffable, qui lui a donné la forme humaine dans mon sein, je l'offre et moi avec lui à votre divine volonté. Je vous supplie, Seigneur, de me recevoir, afin que je souffre conjointement avec votre Fils et le mien. » Le hère éternel agréa aussi l'offrande que la très-pure Marie lui faisait comme un sacrifice agréable. Et relevant le Fils et la Mère de l'humble posture où ils étaient, il dit : Voici le fruit béni de la terre que je désire. Alors il éleva le Verbe incarné au trône sur lequel il siégeait, et le mit à sa droite en partageant avec lui son autorité et sa prééminence.
1118. L'auguste Marie resta à l'endroit où elle se trouvait, mais transportée d'une sainte joie, revêtue d'une splendeur céleste et comme toute transformée. Et, voyant son Fils assis à la droite de son Père éternel, elle dit ces premières paroles du psaume cent neuvième, dans lequel David avait prophétisé ce mystère : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite (1). Notre divine Reine fit sur ces paroles (comme en les paraphrasant) un cantique mystérieux à la louange du Père éternel et du Verbe incarné. Et, après qu'elle eut achevé de parler, le Père
(1) Ps., CIX, 1.
451
continua tout le reste du psaume jusqu'au dernier verset inclusivement, comme accomplissant par son décret immuable tout ce que contiennent ces profondes paroles. Il m'est très -difficile d'exprimer en termes propres les notions qui m'ont été données sur un si haut mystère; mais j'en dirai quelque chose, avec l'aide du Seigneur, afin que l'on pénètre en partie cette merveille si cachée du Tout-Puissant, et ce que le Père éternel en découvrit à la très-pure Marie et aux esprits célestes qui y assistaient.
(1) Ps. XVIII, 5.
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afin qu'il me soit sacrifié, puisque je le livre pouf la rédemption du genre humain. » L'humble et innocente colombe répondit: « Je ne suis, Seigneur, que cendre et poussière, mille fois indigne d'être Mère de votre Fils unique et Rédempteur du monde. Mais étant soumise à votre bonté ineffable, qui lui a donné la forme humaine dans mon sein, je l'offre et moi avec lui à votre divine volonté. Je vous supplie, Seigneur, de me recevoir, afin que je souffre conjointement avec votre Fils et le mien. » Le hère éternel agréa aussi l'offrande que la très-pure Marie lui faisait comme un sacrifice agréable. Et relevant le Fils et la Mère de l'humble posture où ils étaient, il dit : Voici le fruit béni de la terre que je désire. Alors il éleva le Verbe incarné au trône sur lequel il siégeait, et le mit à sa droite en partageant avec lui son autorité et sa prééminence.
1118. L'auguste Marie resta à l'endroit où elle se trouvait, mais transportée d'une sainte joie, revêtue d'une splendeur céleste et comme toute transformée. Et, voyant son Fils assis à la droite de son Père éternel, elle dit ces premières paroles du psaume cent neuvième, dans lequel David avait prophétisé ce mystère : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite (1). Notre divine Reine fit sur ces paroles (comme en les paraphrasant) un cantique mystérieux à la louange du Père éternel et du Verbe incarné. Et, après qu'elle eut achevé de parler, le Père
(1) Ps., CIX, 1.
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continua tout le reste du psaume jusqu'au dernier verset inclusivement, comme accomplissant par son décret immuable tout ce que contiennent ces profondes paroles. Il m'est très -difficile d'exprimer en termes propres les notions qui m'ont été données sur un si haut mystère; mais j'en dirai quelque chose, avec l'aide du Seigneur, afin que l'on pénètre en partie cette merveille si cachée du Tout-Puissant, et ce que le Père éternel en découvrit à la très-pure Marie et aux esprits célestes qui y assistaient.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1119. Or, poursuivant ce que la bienheureuse Vierge avait commencé, il dit : Jusqu'à ce que je réduise vos ennemis à voua servir de marchepied (1). Car, vous étant humiliée suivant ma volonté éternelle, vous avez mérité l'élévation que je vous donne au-dessus de toutes les créatures (2), et de régner à me droite en la nature humaine que vous avez prise, pendant toute la durée des siècles qui ne doivent pas finir; c'est pourquoi je mettrai pendant toute cette éternité vos ennemis sous vos pieds et sous la puissance de votre empire, comme étant leur Dieu et le Restaurateur des hommes, afin que ces mêmes ennemis, qui ne vous ont pas obéi ni reçu, voient votre humanité, c'est-à-dire vos pieds, dans les splendeurs de la plus haute gloire. Et, quoique je n'exécute pas encore cette promesse (afin que le décret de la rédemption du genre humain soit accompli), je veux néanmoins que mes courtisans voient dès à présent ce que les démons
(1) Ps. CIX, 1. — (2) Philip., II, 8 et 9.
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et les hommes connaîtront dans la suite; savoir, que je vous établis à ma droite, au moment même où vous vous humiliez jusqu'à la mort ignominieuse de la croix; et que si je vous livre à toutes ses rigueurs et à leur malice, c'est pour ma propre gloire, c'est afin qu'ils éprouvent une plus grande confusion lorsque je les mettrai sous vos pieds.
Le Seigneur fera sortir de Sion le sceptre de votre puissance, pour vous faire régner au milieu de vos ennemis (1). Car moi qui suis le Dieu tout-puissant, et Celui qui suis (2), je ferai sortir et soutiendrai véritablement le sceptre de votre puissance invincible; de sorte que non-seulement les hommes vous reconnaîtront pour leur Restaurateur, leur guide, leur chef, et pour le Seigneur de l'univers, après que vous aurez triomphé de la mort en consommant leur rédemption; mais je veux que, dès aujourd'hui, et même avant de subir la mort, vous remportiez le triomphe le plus magnifique, quand ces mêmes hommes méditent votre ruine et vous accablent de leur mépris. Je veux que vous triomphiez de leur malice comme de la mort, et que, cédant à la force de votre puissance, ils en viennent librement jusqu'à vous honorer, vous glorifier et vous adorer en vous rendant un culte respectueux : je veux aussi que les démons soient vaincus et abattus par le sceptre de votre autorité, et que les prophètes et les justes qui vous attendent dans les limbes reconnaissent aussi bien que les anges cette
(1) Ps., CIX, 2. — (2) Exod., III, 14.
453
élévation merveilleuse, que vous avez méritée en mon acceptation et en mon bon plaisir.
Le principe est avec vous au jour de votre force, au milieu de la splendeur de vos saints; je vous ai engendré de mon sein avant l'aurore (1). Au jour de cette force invincible que vous avez pour triompher de vos ennemis, je suis en vous et avec vous comme principe dont vous procédez par la génération éternelle de mon entendement fécond avant que l'aurore de la grâce, par laquelle nous avons résolu de nous manifester aux créatures, fût formée, et dans les splendeurs dont jouiront les saints lorsqu'ils seront béatifiés par notre gloire. Comme homme, votre principe est aussi avec vous, et vous avez été engendré au jour de votre puissance, parce que, dès l'instant où vous avez reçu l'être humain par la génération temporelle, de votre Mère, vous avez été enrichi du mérite que vous donnent maintenant les oeuvres par lesquelles vous vous rendez digne de l'honneur et de la gloire qui doivent couronner votre puissance en ce jour et en celui de mon éternité.
Le Seigneur a juré, et son serment demeurera irrévocable, que vous êtes le Prêtre éternel selon l'ordre de Melchisédech (2). Moi, qui suis le Seigneur et qui suis tout-puissant pour accomplir ce que je promets, j'ai décidé, avec un serment irrévocable, que vous seriez le souverain Prêtre de la nouvelle Église et de la loi de l'Évangile selon l'ancien ordre du prêtre Melchisédech ;
(1) Ps. CIX, 3. — (2) Ibid., 4.
454
car vous serez le véritable Prêtre qui offrirez le pain et le vin que l'oblation de Melchisédech a figurés (1). Je ne me repentirai point de ce décret, parce que cette oblation que vous ferez sera pure et agréable, et je l'accepterai comme un sacrifice de louanges.
Le Seigneur est d votre droite; il écrasera les rois au jour de sa colère (2). Par les oeuvres de votre humanité, dont la droite est la divinité qui lui est unie, et par la vertu de laquelle vous les devez faire, et par le moyen de cette même humanité, je briserai, moi qui suis un Dieu avec vous (3), le pouvoir tyrannique que les princes des ténèbres et du monde, soit les anges apostats, soit les hommes, ont montré en ce qu'ils ne vous ont pas adoré, ni reconnu, ni servi comme leur Dieu et leur chef. Ma justice a déjà frappé un coup quand Lucifer et ses sectateurs ont refusé de vous reconnaître : ce fut pour eux le jour de ma colère; le jour viendra plus tard où elle en frappera un second sur les hommes qui ne vous auront pas reçu, et qui ne se seront pas soumis à votre sainte loi. Je les humilierai et les écraserai tons sous le poids de ma juste indignation.
Il exercera son jugement au milieu des nations, il remplira les ruines; il écrasera sur la terre les têtes d'un grand nombre d'hommes (4). Votre cause étant justifiée contre toux les enfants d'Adam qui ne profiteront pas de la miséricorde dont vous usez envers
(1) Gen., XIV, 18. — (2) Ps. CIX, 5. — (3) Joan., X, 30. — (4) Ps. CIX, 6.
455
eux en les rachetant gratuitement du péché et de la mort éternelle, le même Seigneur, qui n'est autre que moi, jugera avec équité toutes les nations, séparera les justes et les élus d'avec les pécheurs et d'avec les réprouvés, et remplira le vide des ruines qu'ont laissées les anges apostats, qui ne conservèrent ni leur grâce ni leur propre demeure. C'est ainsi qu'il brisera sur la terre la tête des superbes, qui serrant en fort grand nombre à cause de la dépravation et de l'obstination de leur volonté.
Il boira de l'eau du torrent dans le chemin, et c'est pour cela qu'il lèvera la tête (1). l e même Seigneur et le Dieu des vengeances la mettra au comble de la gloire; et, pour juger la terre et rendre aux superbes ce qu'ils auront mérité, il s'élèvera, et, comme s'il buvait le torrent de son indignation, il enivrera ses flèches du sang de ses ennemis (2), et par l'épée de sa vengeance il les renversera dans le chemin par où ils devaient arriver à leur félicité. C'est ainsi qu'il vous fera lever la tête et dominer sur les rebelles indociles à votre loi, infidèles à votre vérité et à votre doctrine. Cette conduite sera fondée en justice sur ce que vous aurez bu le torrent des opprobres et des affronts jusqu'à la mort de la croix, dans le temps que vous aurez opéré leur rédemption.
(1) Ps. CIX, 1. — (2) Philip., II, 8 et 9.
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et les hommes connaîtront dans la suite; savoir, que je vous établis à ma droite, au moment même où vous vous humiliez jusqu'à la mort ignominieuse de la croix; et que si je vous livre à toutes ses rigueurs et à leur malice, c'est pour ma propre gloire, c'est afin qu'ils éprouvent une plus grande confusion lorsque je les mettrai sous vos pieds.
Le Seigneur fera sortir de Sion le sceptre de votre puissance, pour vous faire régner au milieu de vos ennemis (1). Car moi qui suis le Dieu tout-puissant, et Celui qui suis (2), je ferai sortir et soutiendrai véritablement le sceptre de votre puissance invincible; de sorte que non-seulement les hommes vous reconnaîtront pour leur Restaurateur, leur guide, leur chef, et pour le Seigneur de l'univers, après que vous aurez triomphé de la mort en consommant leur rédemption; mais je veux que, dès aujourd'hui, et même avant de subir la mort, vous remportiez le triomphe le plus magnifique, quand ces mêmes hommes méditent votre ruine et vous accablent de leur mépris. Je veux que vous triomphiez de leur malice comme de la mort, et que, cédant à la force de votre puissance, ils en viennent librement jusqu'à vous honorer, vous glorifier et vous adorer en vous rendant un culte respectueux : je veux aussi que les démons soient vaincus et abattus par le sceptre de votre autorité, et que les prophètes et les justes qui vous attendent dans les limbes reconnaissent aussi bien que les anges cette
(1) Ps., CIX, 2. — (2) Exod., III, 14.
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élévation merveilleuse, que vous avez méritée en mon acceptation et en mon bon plaisir.
Le principe est avec vous au jour de votre force, au milieu de la splendeur de vos saints; je vous ai engendré de mon sein avant l'aurore (1). Au jour de cette force invincible que vous avez pour triompher de vos ennemis, je suis en vous et avec vous comme principe dont vous procédez par la génération éternelle de mon entendement fécond avant que l'aurore de la grâce, par laquelle nous avons résolu de nous manifester aux créatures, fût formée, et dans les splendeurs dont jouiront les saints lorsqu'ils seront béatifiés par notre gloire. Comme homme, votre principe est aussi avec vous, et vous avez été engendré au jour de votre puissance, parce que, dès l'instant où vous avez reçu l'être humain par la génération temporelle, de votre Mère, vous avez été enrichi du mérite que vous donnent maintenant les oeuvres par lesquelles vous vous rendez digne de l'honneur et de la gloire qui doivent couronner votre puissance en ce jour et en celui de mon éternité.
Le Seigneur a juré, et son serment demeurera irrévocable, que vous êtes le Prêtre éternel selon l'ordre de Melchisédech (2). Moi, qui suis le Seigneur et qui suis tout-puissant pour accomplir ce que je promets, j'ai décidé, avec un serment irrévocable, que vous seriez le souverain Prêtre de la nouvelle Église et de la loi de l'Évangile selon l'ancien ordre du prêtre Melchisédech ;
(1) Ps. CIX, 3. — (2) Ibid., 4.
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car vous serez le véritable Prêtre qui offrirez le pain et le vin que l'oblation de Melchisédech a figurés (1). Je ne me repentirai point de ce décret, parce que cette oblation que vous ferez sera pure et agréable, et je l'accepterai comme un sacrifice de louanges.
Le Seigneur est d votre droite; il écrasera les rois au jour de sa colère (2). Par les oeuvres de votre humanité, dont la droite est la divinité qui lui est unie, et par la vertu de laquelle vous les devez faire, et par le moyen de cette même humanité, je briserai, moi qui suis un Dieu avec vous (3), le pouvoir tyrannique que les princes des ténèbres et du monde, soit les anges apostats, soit les hommes, ont montré en ce qu'ils ne vous ont pas adoré, ni reconnu, ni servi comme leur Dieu et leur chef. Ma justice a déjà frappé un coup quand Lucifer et ses sectateurs ont refusé de vous reconnaître : ce fut pour eux le jour de ma colère; le jour viendra plus tard où elle en frappera un second sur les hommes qui ne vous auront pas reçu, et qui ne se seront pas soumis à votre sainte loi. Je les humilierai et les écraserai tons sous le poids de ma juste indignation.
Il exercera son jugement au milieu des nations, il remplira les ruines; il écrasera sur la terre les têtes d'un grand nombre d'hommes (4). Votre cause étant justifiée contre toux les enfants d'Adam qui ne profiteront pas de la miséricorde dont vous usez envers
(1) Gen., XIV, 18. — (2) Ps. CIX, 5. — (3) Joan., X, 30. — (4) Ps. CIX, 6.
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eux en les rachetant gratuitement du péché et de la mort éternelle, le même Seigneur, qui n'est autre que moi, jugera avec équité toutes les nations, séparera les justes et les élus d'avec les pécheurs et d'avec les réprouvés, et remplira le vide des ruines qu'ont laissées les anges apostats, qui ne conservèrent ni leur grâce ni leur propre demeure. C'est ainsi qu'il brisera sur la terre la tête des superbes, qui serrant en fort grand nombre à cause de la dépravation et de l'obstination de leur volonté.
Il boira de l'eau du torrent dans le chemin, et c'est pour cela qu'il lèvera la tête (1). l e même Seigneur et le Dieu des vengeances la mettra au comble de la gloire; et, pour juger la terre et rendre aux superbes ce qu'ils auront mérité, il s'élèvera, et, comme s'il buvait le torrent de son indignation, il enivrera ses flèches du sang de ses ennemis (2), et par l'épée de sa vengeance il les renversera dans le chemin par où ils devaient arriver à leur félicité. C'est ainsi qu'il vous fera lever la tête et dominer sur les rebelles indociles à votre loi, infidèles à votre vérité et à votre doctrine. Cette conduite sera fondée en justice sur ce que vous aurez bu le torrent des opprobres et des affronts jusqu'à la mort de la croix, dans le temps que vous aurez opéré leur rédemption.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1120. Telle fut, et plus complète, plus profonde et plus inexplicable encore l'intelligence qu'eut l'auguste Marie des paroles mystérieuses de ce psaume que le
(1) Ps. CIX, 7. — (2) Deut., XXVII, 42.
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Père éternel prononça. Et; quoique plusieurs soient dites à la troisième personne, elles ne peuvent s'appliquer néanmoins qu'à la propre personne du Père et au Verbe incarné. Tous ces mystères se réduisent principalement à deux points: l’un qui regarde les menaces contre les pécheurs, les infidèles et les mauvais chrétiens, parce que, ou ils ne reconnaissent point le Rédempteur du monde, ou ils n'ont pas gardé sa divine loi;'l'autre qui renferme les promesses que le Père éternel fit à son Fils incarné de glorifier son saint nom contre et sur ses ennemis. Et comme pour gage et figure de cette exaltation universelle de Jésus-Christ après son ascension et surtout au dernier jugement, le Père voulut qu'il reçut, en son entrée dans Jérusalem, ces applaudissements et cette gloire que les habitants de cette ville lui donnèrent le jour qui suivit celui auquel eut lieu cette vision si mystérieuse, après laquelle le Père et le Saint-Esprit disparurent aussi bien que les anges qui avaient assisté avec admiration à cette scène ineffable. Notre Rédempteur Jésus-Christ et sa bienheureuse Mère passèrent le reste de cette nuit fortunée en de divers entretiens.
1121. Lorsque fut arrivé le jour qui répond au dimanche des Rameaux, le Sauveur s'approcha de Jérusalem avec ses disciples, accompagné d'une grande multitude d'anges qui bénissaient la charité si tendre qu'il manifestait envers les hommes, et son zèle si ardent pour leur salut éternel. Et, ayant marché environ deux lieues, il ne fut pas plutôt arrivé à Bethphagé, qu'il envoya, deux de ses disciples chez un
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homme de considération dont la maison n'était pas éloignée (1), et avec son agrément ils amenèrent à leur Maître une ânesse et son poulain, que, personne n'avait encore monté. Et, après que les disciples. les eurent couverts de leurs manteaux, le Sauveur prit le chemin de Jérusalem , et se servit dans ce triomphe de l'ânesse et de l'ânon, ainsi que l'avaient,prédit les prophètes Isaïe et Zacharie plusieurs siècles auparavant (2), afin que les prêtres et les docteurs de. la loi ne pussent prétexter leur ignorance. Les quatre, évangélistes ont aussi décrit ce triomphe merveilleux de Jésus-Christ, et racontent ce que virent ceux qui y assistèrent (3). Pendant que le Rédempteur s'avançait, les disciples et tout le peuple avec eux le reconnaissaient par leurs acclamations pour le Messie, pour le fils de David, le Sauveur du monde et le véritable Roi. Les uns disaient : la paix soit dans le ciel et la gloire dans les lieux les plus hauts; béni soit le Roi qui vient au nom du Seigneur; les autres disaient : Hosanna, Fili David ! Sauvez-nous, Fils de David; béni soit le règne de notre père David, qui est déjà arrivé. Tous. coupaient des palmes et des branches d'arbres en signe de triomphe et d'allégresse, et les répandaient eu étendant leurs manteaux sur le chemin par où devait passer le nouveau triomphateur des armées, notre Seigneur Jésus-Christ.
1122. Toutes ces marques de culte et d'admiration,
(1) Matth., XXI,1. — (2) Isa., LXII, 11 ; Zach., IX, 9. — (3) Matth., XXI, 1 ; Marc, XI, 8 ; Luc., XIX, 36 ; Joan., XII, 18.
458
toutes ces acclamations que les hommes donnaient au Verbe incarné prouvaient le pouvoir de sa Divinité, d'autant plus que c'était le moment auquel les prêtres et les pharisiens l'attendaient dans cette même ville pour le faire mourir. Car s'ils n'eussent été mus et excités intérieurement par la vertu divine qui éclatait dans les miracles qu'il avait faits, il n'eût pas été possible que tant de gens réunis, dont beaucoup étaient idolâtres et les autres ses ennemis déclarés, l'eussent publiquement reconnu pour le véritable Roi, pour le Sauveur et le Messie, et se fussent soumis à un homme pauvre, humble et persécuté, qui venait sans pompe guerrière, sans armes, sans escorte, sans richesses, sans chars de triomphe ni chevaux superbes. En apparence, tout lui manquait; il entrait sur un petit ânon; il paraissait n'avoir rien que de méprisable dans l'opinion d'un monde plein de vanité; son air, toujours grave, serein, majestueux, répondait seul à sa dignité cachée, mais tout le reste était contraire à ce que le monde estime et applaudit. Ainsi l'on découvrait par ses effets la puissance divine, qui mouvait par sa force les coeurs des hommes et les contraignait à se soumettre à leur Créateur et Restaurateur.
(1) Ps. CIX, 7. — (2) Deut., XXVII, 42.
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Père éternel prononça. Et; quoique plusieurs soient dites à la troisième personne, elles ne peuvent s'appliquer néanmoins qu'à la propre personne du Père et au Verbe incarné. Tous ces mystères se réduisent principalement à deux points: l’un qui regarde les menaces contre les pécheurs, les infidèles et les mauvais chrétiens, parce que, ou ils ne reconnaissent point le Rédempteur du monde, ou ils n'ont pas gardé sa divine loi;'l'autre qui renferme les promesses que le Père éternel fit à son Fils incarné de glorifier son saint nom contre et sur ses ennemis. Et comme pour gage et figure de cette exaltation universelle de Jésus-Christ après son ascension et surtout au dernier jugement, le Père voulut qu'il reçut, en son entrée dans Jérusalem, ces applaudissements et cette gloire que les habitants de cette ville lui donnèrent le jour qui suivit celui auquel eut lieu cette vision si mystérieuse, après laquelle le Père et le Saint-Esprit disparurent aussi bien que les anges qui avaient assisté avec admiration à cette scène ineffable. Notre Rédempteur Jésus-Christ et sa bienheureuse Mère passèrent le reste de cette nuit fortunée en de divers entretiens.
1121. Lorsque fut arrivé le jour qui répond au dimanche des Rameaux, le Sauveur s'approcha de Jérusalem avec ses disciples, accompagné d'une grande multitude d'anges qui bénissaient la charité si tendre qu'il manifestait envers les hommes, et son zèle si ardent pour leur salut éternel. Et, ayant marché environ deux lieues, il ne fut pas plutôt arrivé à Bethphagé, qu'il envoya, deux de ses disciples chez un
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homme de considération dont la maison n'était pas éloignée (1), et avec son agrément ils amenèrent à leur Maître une ânesse et son poulain, que, personne n'avait encore monté. Et, après que les disciples. les eurent couverts de leurs manteaux, le Sauveur prit le chemin de Jérusalem , et se servit dans ce triomphe de l'ânesse et de l'ânon, ainsi que l'avaient,prédit les prophètes Isaïe et Zacharie plusieurs siècles auparavant (2), afin que les prêtres et les docteurs de. la loi ne pussent prétexter leur ignorance. Les quatre, évangélistes ont aussi décrit ce triomphe merveilleux de Jésus-Christ, et racontent ce que virent ceux qui y assistèrent (3). Pendant que le Rédempteur s'avançait, les disciples et tout le peuple avec eux le reconnaissaient par leurs acclamations pour le Messie, pour le fils de David, le Sauveur du monde et le véritable Roi. Les uns disaient : la paix soit dans le ciel et la gloire dans les lieux les plus hauts; béni soit le Roi qui vient au nom du Seigneur; les autres disaient : Hosanna, Fili David ! Sauvez-nous, Fils de David; béni soit le règne de notre père David, qui est déjà arrivé. Tous. coupaient des palmes et des branches d'arbres en signe de triomphe et d'allégresse, et les répandaient eu étendant leurs manteaux sur le chemin par où devait passer le nouveau triomphateur des armées, notre Seigneur Jésus-Christ.
1122. Toutes ces marques de culte et d'admiration,
(1) Matth., XXI,1. — (2) Isa., LXII, 11 ; Zach., IX, 9. — (3) Matth., XXI, 1 ; Marc, XI, 8 ; Luc., XIX, 36 ; Joan., XII, 18.
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toutes ces acclamations que les hommes donnaient au Verbe incarné prouvaient le pouvoir de sa Divinité, d'autant plus que c'était le moment auquel les prêtres et les pharisiens l'attendaient dans cette même ville pour le faire mourir. Car s'ils n'eussent été mus et excités intérieurement par la vertu divine qui éclatait dans les miracles qu'il avait faits, il n'eût pas été possible que tant de gens réunis, dont beaucoup étaient idolâtres et les autres ses ennemis déclarés, l'eussent publiquement reconnu pour le véritable Roi, pour le Sauveur et le Messie, et se fussent soumis à un homme pauvre, humble et persécuté, qui venait sans pompe guerrière, sans armes, sans escorte, sans richesses, sans chars de triomphe ni chevaux superbes. En apparence, tout lui manquait; il entrait sur un petit ânon; il paraissait n'avoir rien que de méprisable dans l'opinion d'un monde plein de vanité; son air, toujours grave, serein, majestueux, répondait seul à sa dignité cachée, mais tout le reste était contraire à ce que le monde estime et applaudit. Ainsi l'on découvrait par ses effets la puissance divine, qui mouvait par sa force les coeurs des hommes et les contraignait à se soumettre à leur Créateur et Restaurateur.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
1123. Mais, outre le mouvement universel que l'on remarqua dans Jérusalem à cause de la divine lumière dont le Seigneur éclaira l'esprit de tous ses habitants, afin qu'ils reconnussent notre Sauveur, ce triomphe s'étendit sur toutes les créatures, ou sur plusieurs plus capables de raison, pour accomplir ce que le Père éternel avait promis à son Fils, comme
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on l'a vu plus haut. Car, tandis que notre Sauveur Jésus-Christ faisait son entrée dans Jérusalem, l'ange saint Michel fut envoyé aux limbes pour donner connaissance de ce mystère aux saints, aux patriarches et aux prophètes qui s'y trouvaient; ils eurent tous en même temps une vision particulière de cette entrée et de ses circonstances, de sorte que du fond de leur retraite ils adorèrent notre divin maître, le reconnurent pour le véritable Dieu et le Rédempteur du mondé, et lui firent de nouveaux cantiques de gloire et de louanges pour son triomphe admirable sur la mort, sur le péché et sur l'enfer. Le pouvoir divin s'étendit aussi sur les coeurs de beaucoup d'autres personnes qu'il toucha dans l'univers entier. Ainsi ceux qui avaient quelque connaissance de Jésus-Christ, non-seulement dans la Palestine et dans les lieux circonvoisins, mais en Égypte et en d'autres royaumes, se sentirent poussés à adorer en esprit le Rédempteur en cette heure solennelle, comme ils le firent avec une joie singulière que leur causa l'influence de la divine lumière qu'ils reçurent à cet effet, quoiqu'ils ne comprissent bien ni le principe ni le but de l'impulsion à laquelle ils obéissaient. Elle ne leur fut pourtant pas inutile, car elle les fit singulièrement avancer dans la foi et dans la pratique des bonnes couvres. Et, afin que le triomphe que notre Sauveur remportait dans cette occasion sur la mort fût plus glorieux, le Très-Haut ne permit pas qu'elle eût en ce jour le moindre droit sur la vie d'aucun des mortels; il ne mourut donc personne dans le monde ce jour-là, quoique bien
460
des gens fussent naturellement morts, si le Tout-puissant ne l'eût empêché, afin que le triomphe de Jésus-Christ fût tout à fait prodigieux.
1124. Cette victoire que le Sauveur remporta sur la mort fut suivie de celle qu'il remporta sur l'enfer; et celle-ci fut beaucoup plus glorieuse, quoiqu'elle fût plus cachée. Car dans le même temps que les hommes commencèrent à invoquer notre divin Maître et à le reconnaître pour le Sauveur et pour le Roi qui venait au nom du Seigneur, les démons sentirent le pouvoir de sa droite qui les chassa du monde tous tant qu'ils étaient, et les précipita dans les profonds cachots de l'enfer, de sorte que durant le peu de temps que Jésus-Christ continua encore sa marche, il ne resta aucun esprit malin sur la terre; tous roulèrent dans les abîmes, aussi pleins de terreur que de rage. Dès lors ils craignirent plus qu'ils n'avaient encore fait, que le Messie ne se trouvât dans le monde , et se communiquèrent le sujet de cette crainte, comme je le dirai dans le chapitre suivant. Le triomphe du Sauveur dura jusqu'à ce qu'il fût entré dans Jérusalem, et les saints anges qui l'accompagnaient adressèrent à sa divinité, dans un concert d'harmonie ineffable, de nouvelles hymnes de louanges. En entrant dans la ville au milieu des applaudissements de tous ses habitants, il descendit de l'ânon, et dirigea ses pas du côté du Temple, où il opéra les merveilles que les évangélistes racontent, et qui excitèrent une admiration universelle. Il renversa les tables de ceux qui vendaient et achetaient
461
dans le Temple, témoignant le zèle qu'il avait pour l'honneur de la maison de son Père, et en chassa ceux qui en faisaient une maison de négoce et une caverne de voleurs (1). Mais aussitôt que le triomphe fut achevé,. la droite du Seigneur suspendit l'influence qu'elle avait fait sentir aux coeurs des habitants de cette ville. Les justes en profitèrent en restant justifiés ou en devenant meilleurs; les autres reprirent leurs vices et leurs mauvaises habitudes, parce qu'ils n'usèrent pas de la lumière et des inspirations que la bonté divine leur envoya. Et parmi tant de personnes qui avaient reconnu publiquement notre Seigneur Jésus-Christ pour le roi de Jérusalem, il n'y en eut pas une seule qui s'offrît à le loger, et qui le reçût dans sa maison (2).
1125. Le Sauveur demeura dans le Temple, où il instruisit le peuple jusqu'au soir. Et pour attester le respect que l'on devait avoir pour ce saint lieu, pour cette maison de prière, il ne voulut pas permettre qu'on lui apportât même un vase d'eau pour boire; et sans avoir pris ce rafraîchissement ni aucune nourriture, il s'en retourna ce même soir à Béthanie, d'où il était parti, et continua ensuite de se rendre les jours suivants à Jérusalem jusqu'à sa Passion (3). La bienheureuse Vierge passa ce jour-là à Béthanie retirée dans sa solitude, d'où elle voyait par une vision particulière tout ce qui arrivait dans le triomphe
(1) Matth., XXI, 12; Luc., XIX, 45. — (2) Marc., XI, 11. — (3) Matth., XXI, 17 et 18.
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admirable de son Fils et de son Maître. Elle vit ce que les anges faisaient dans le ciel, ce que les hommes faisaient sur la terre, ce qu'éprouvaient les démons dans l’enfer, et comment en toutes ces merveilles le Père éternel accomplissait les promesses qu'il avait faites à son Fils incarné et lui donnait l'empire sur tous ses ennemis. Elle vit aussi tout ce que notre Sauveur fit dans ce triomphe et dans le Temple. Elle entendit cette voix du Père qui vint du ciel d'une manière intelligible pour tous les assistants, et qui, répondant à notre Seigneur Jésus-Christ , lui dit : Je vous ai glorifié, et je vous glorifierai de nouveau (1). Ces paroles faisaient connaître qu'outre la gloire et le triomphe que le Père avait donnés ce même jour au Verbe incarné, il le glorifierait de nouveau et l'exalterait après sa mort : car les paroles du Père éternel renferment tout cela ; et c'est ce que l'auguste Marie entendit et pénétra avec une joie inexprimable.
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on l'a vu plus haut. Car, tandis que notre Sauveur Jésus-Christ faisait son entrée dans Jérusalem, l'ange saint Michel fut envoyé aux limbes pour donner connaissance de ce mystère aux saints, aux patriarches et aux prophètes qui s'y trouvaient; ils eurent tous en même temps une vision particulière de cette entrée et de ses circonstances, de sorte que du fond de leur retraite ils adorèrent notre divin maître, le reconnurent pour le véritable Dieu et le Rédempteur du mondé, et lui firent de nouveaux cantiques de gloire et de louanges pour son triomphe admirable sur la mort, sur le péché et sur l'enfer. Le pouvoir divin s'étendit aussi sur les coeurs de beaucoup d'autres personnes qu'il toucha dans l'univers entier. Ainsi ceux qui avaient quelque connaissance de Jésus-Christ, non-seulement dans la Palestine et dans les lieux circonvoisins, mais en Égypte et en d'autres royaumes, se sentirent poussés à adorer en esprit le Rédempteur en cette heure solennelle, comme ils le firent avec une joie singulière que leur causa l'influence de la divine lumière qu'ils reçurent à cet effet, quoiqu'ils ne comprissent bien ni le principe ni le but de l'impulsion à laquelle ils obéissaient. Elle ne leur fut pourtant pas inutile, car elle les fit singulièrement avancer dans la foi et dans la pratique des bonnes couvres. Et, afin que le triomphe que notre Sauveur remportait dans cette occasion sur la mort fût plus glorieux, le Très-Haut ne permit pas qu'elle eût en ce jour le moindre droit sur la vie d'aucun des mortels; il ne mourut donc personne dans le monde ce jour-là, quoique bien
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des gens fussent naturellement morts, si le Tout-puissant ne l'eût empêché, afin que le triomphe de Jésus-Christ fût tout à fait prodigieux.
1124. Cette victoire que le Sauveur remporta sur la mort fut suivie de celle qu'il remporta sur l'enfer; et celle-ci fut beaucoup plus glorieuse, quoiqu'elle fût plus cachée. Car dans le même temps que les hommes commencèrent à invoquer notre divin Maître et à le reconnaître pour le Sauveur et pour le Roi qui venait au nom du Seigneur, les démons sentirent le pouvoir de sa droite qui les chassa du monde tous tant qu'ils étaient, et les précipita dans les profonds cachots de l'enfer, de sorte que durant le peu de temps que Jésus-Christ continua encore sa marche, il ne resta aucun esprit malin sur la terre; tous roulèrent dans les abîmes, aussi pleins de terreur que de rage. Dès lors ils craignirent plus qu'ils n'avaient encore fait, que le Messie ne se trouvât dans le monde , et se communiquèrent le sujet de cette crainte, comme je le dirai dans le chapitre suivant. Le triomphe du Sauveur dura jusqu'à ce qu'il fût entré dans Jérusalem, et les saints anges qui l'accompagnaient adressèrent à sa divinité, dans un concert d'harmonie ineffable, de nouvelles hymnes de louanges. En entrant dans la ville au milieu des applaudissements de tous ses habitants, il descendit de l'ânon, et dirigea ses pas du côté du Temple, où il opéra les merveilles que les évangélistes racontent, et qui excitèrent une admiration universelle. Il renversa les tables de ceux qui vendaient et achetaient
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dans le Temple, témoignant le zèle qu'il avait pour l'honneur de la maison de son Père, et en chassa ceux qui en faisaient une maison de négoce et une caverne de voleurs (1). Mais aussitôt que le triomphe fut achevé,. la droite du Seigneur suspendit l'influence qu'elle avait fait sentir aux coeurs des habitants de cette ville. Les justes en profitèrent en restant justifiés ou en devenant meilleurs; les autres reprirent leurs vices et leurs mauvaises habitudes, parce qu'ils n'usèrent pas de la lumière et des inspirations que la bonté divine leur envoya. Et parmi tant de personnes qui avaient reconnu publiquement notre Seigneur Jésus-Christ pour le roi de Jérusalem, il n'y en eut pas une seule qui s'offrît à le loger, et qui le reçût dans sa maison (2).
1125. Le Sauveur demeura dans le Temple, où il instruisit le peuple jusqu'au soir. Et pour attester le respect que l'on devait avoir pour ce saint lieu, pour cette maison de prière, il ne voulut pas permettre qu'on lui apportât même un vase d'eau pour boire; et sans avoir pris ce rafraîchissement ni aucune nourriture, il s'en retourna ce même soir à Béthanie, d'où il était parti, et continua ensuite de se rendre les jours suivants à Jérusalem jusqu'à sa Passion (3). La bienheureuse Vierge passa ce jour-là à Béthanie retirée dans sa solitude, d'où elle voyait par une vision particulière tout ce qui arrivait dans le triomphe
(1) Matth., XXI, 12; Luc., XIX, 45. — (2) Marc., XI, 11. — (3) Matth., XXI, 17 et 18.
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admirable de son Fils et de son Maître. Elle vit ce que les anges faisaient dans le ciel, ce que les hommes faisaient sur la terre, ce qu'éprouvaient les démons dans l’enfer, et comment en toutes ces merveilles le Père éternel accomplissait les promesses qu'il avait faites à son Fils incarné et lui donnait l'empire sur tous ses ennemis. Elle vit aussi tout ce que notre Sauveur fit dans ce triomphe et dans le Temple. Elle entendit cette voix du Père qui vint du ciel d'une manière intelligible pour tous les assistants, et qui, répondant à notre Seigneur Jésus-Christ , lui dit : Je vous ai glorifié, et je vous glorifierai de nouveau (1). Ces paroles faisaient connaître qu'outre la gloire et le triomphe que le Père avait donnés ce même jour au Verbe incarné, il le glorifierait de nouveau et l'exalterait après sa mort : car les paroles du Père éternel renferment tout cela ; et c'est ce que l'auguste Marie entendit et pénétra avec une joie inexprimable.
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
Instruction que j'ai reçue de notre grande Reine.
1126. Ma fille, vous avez moins écrit que vous n'avez connu des mystères cachés du triomphe que mon très-saint Fils reçut le jour qu'il entra dans Jérusalem,
(1) Joa., XII, 28.
463
et de ce qui le précéda: mais vous en connaîtrez beaucoup plus dans le Seigneur, parce qu'on ne saurait tout pénétrer dans l'état de voyageur. Les mortels sont néanmoins assez instruits et détrompés par ce qui leur en a été découvert, pour comprendre combien les jugements du Seigneur sont différents de leurs jugements, et combien ses pensées sont au-dessus de leurs pensées (1). Le Très- Haut regarde le coeur et l'intérieur des créatures (2), où se trouve la beauté de la fille du Roi (3), et les hommes ne regardent que ce qui- est apparent et sensible. C'est pour cela qui aux yeux de la divine sagesse les justes et les élus sont estimés et élevés quand ils s'abaissent et s'humilient; et que les superbes sont humiliés et regardés avec horreur quand ils s'élèvent. Cette science, ma fille, est ignorée de presque tous les hommes: c'est pourquoi les enfants des ténèbres ne savent désirer et rechercher d'autre honneur, d'autre élévation que, ceux que leur donne le monde. Et quoique les enfants de la sainte Église sachent et confessent que cette gloire est vaine et inconsistante , qu'elle se flétrit comme la fleur et l'herbe des champs, ils ne laissent pas, dans la pratique, que d'oublier cette vérité. Et comme leur conscience privée de la lumière de la grâce ne leur rend pas le témoignage fidèle des vertus, ils sollicitent auprès des hommes l'estime et les applaudissements qu'ils peuvent accorder, quoique tout cela ne soit que fausseté et que
(1) Isa., LV, 9. — (2) I Reg., XVI, 7. — (3) Ps. XLIV, 13.
464
mensonge: car Dieu est le seul qui honore et qui élève sans se tromper ceux qui le méritent. Le monde change ordinairement les lots, et décerne ses honneurs à ceux qui en sont le moins dignes, ou aux intrigants qui savent les capter avec le plus d'adresse.
1127. Fuyez cet écueil, ma fille; ne vous attachez point au plaisir que procurent les louanges des hommes ; rejetez leurs avances et leurs flatteries. Donnez à chaque chose le nom et l'estime quelle mérite, car les enfants de ce siècle se conduisent en cela avec trop peu de réflexion. Jamais aucun des mortels n'a pu mériter d'être honoré des créatures comme mon très-saint Fils; et pourtant il ne fit que dédaigner et accepter un instant les honneurs qu'on lui rendit à son entrée dans Jérusalem; il ne permit ce triomphe que pour manifester sa puissance divine, et pour rendre ensuite sa passion plus ignominieuse, ainsi que pour enseigner aux hommes qu'on ne doit pas recevoir les honneurs du monde pour eux-mêmes, si l'intérêt de la gloire, du Très-Haut ne présente pas une autre fin plus relevée, à laquelle on puisse les rapporter ; car sans cela ils sont vains et inutiles, puisqu'ils ne sauraient faire la véritable félicité des créatures capables d'un bonheur éternel. Et comme je vois que vous souhaitez savoir la raison pour laquelle je ne me trouvai point près de mon très-saint Fils dans ce triomphe, je veux satisfaire votre désir, en vous rappelant ce que vous avez écrit souvent dans cette histoire de la vision que j'avais des oeuvres intérieures de mon Fils bien-aimé dans le très-pur
465
miroir de son âme. Cette vision me faisait connaître quand et pourquoi il voulait s'éloigner de moi. Alors je me prosternais à ses pieds, et le suppliais de me déclarer sa volonté sur ce que je devais faire : et quelquefois cet adorable Seigneur me le déclarait et me le commandait expressément; d'autres fois il le laissait à mon choix, afin que je le fisse avec le secours de la lumière divine, et avec la prudence dont il m'avait douée. C'est ce qui eut lieu lorsqu'il résolut d'entrer dans Jérusalem triomphant de ses ennemis. Ainsi il me laissa libre de L'accompagner ou de rester à Béthanie; alors je le priai de me permettre de ne pas assister à cette manifestation mystérieuse, le suppliant néanmoins de me mener avec lui quand il retournerait à Jérusalem pour y souffrir et pour y mourir; parce que je crus qu'il lui serait plus agréable que je m'offrisse à participer aux ignominies et aux douleurs de sa Passion, qu'aux honneurs que les hommes lui rendaient; et il m'en serait revenu une part en qualité de mère, si j'eusse assisté à son triomphe, étant connue pour telle de ceux qui le bénissaient et le louaient; mais je ne recherchais point les applaudissements, et je savais d'ailleurs que le Seigneur les ordonnait pour découvrir sa divinité .et sa puissance infinie, auxquelles je n'avais aucune part; et que par l'honneur qu'on me rendrait alors, je n'augmenterais pas celui qu'on lui devait comme à l'unique Sauveur du genre humain. Ainsi, pour jouir dans ma solitude de ce mystère et glorifier le Très-Haut en ses merveilles, j'eus dans ma retraite la connaissance de tout
466
ce que vous avez écrit. Il y a là pour vous une leçon qui vous excitera à imiter mon humilité, à détacher votre affection de tout ce qui est terrestre , et à vous élever aux choses célestes, qui vous inspireront un profond dégoût pour les honneurs du monde, connaissant par la divine lumière qu'ils ne sont que vanité des vanités et affliction d'esprit (1).
1126. Ma fille, vous avez moins écrit que vous n'avez connu des mystères cachés du triomphe que mon très-saint Fils reçut le jour qu'il entra dans Jérusalem,
(1) Joa., XII, 28.
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et de ce qui le précéda: mais vous en connaîtrez beaucoup plus dans le Seigneur, parce qu'on ne saurait tout pénétrer dans l'état de voyageur. Les mortels sont néanmoins assez instruits et détrompés par ce qui leur en a été découvert, pour comprendre combien les jugements du Seigneur sont différents de leurs jugements, et combien ses pensées sont au-dessus de leurs pensées (1). Le Très- Haut regarde le coeur et l'intérieur des créatures (2), où se trouve la beauté de la fille du Roi (3), et les hommes ne regardent que ce qui- est apparent et sensible. C'est pour cela qui aux yeux de la divine sagesse les justes et les élus sont estimés et élevés quand ils s'abaissent et s'humilient; et que les superbes sont humiliés et regardés avec horreur quand ils s'élèvent. Cette science, ma fille, est ignorée de presque tous les hommes: c'est pourquoi les enfants des ténèbres ne savent désirer et rechercher d'autre honneur, d'autre élévation que, ceux que leur donne le monde. Et quoique les enfants de la sainte Église sachent et confessent que cette gloire est vaine et inconsistante , qu'elle se flétrit comme la fleur et l'herbe des champs, ils ne laissent pas, dans la pratique, que d'oublier cette vérité. Et comme leur conscience privée de la lumière de la grâce ne leur rend pas le témoignage fidèle des vertus, ils sollicitent auprès des hommes l'estime et les applaudissements qu'ils peuvent accorder, quoique tout cela ne soit que fausseté et que
(1) Isa., LV, 9. — (2) I Reg., XVI, 7. — (3) Ps. XLIV, 13.
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mensonge: car Dieu est le seul qui honore et qui élève sans se tromper ceux qui le méritent. Le monde change ordinairement les lots, et décerne ses honneurs à ceux qui en sont le moins dignes, ou aux intrigants qui savent les capter avec le plus d'adresse.
1127. Fuyez cet écueil, ma fille; ne vous attachez point au plaisir que procurent les louanges des hommes ; rejetez leurs avances et leurs flatteries. Donnez à chaque chose le nom et l'estime quelle mérite, car les enfants de ce siècle se conduisent en cela avec trop peu de réflexion. Jamais aucun des mortels n'a pu mériter d'être honoré des créatures comme mon très-saint Fils; et pourtant il ne fit que dédaigner et accepter un instant les honneurs qu'on lui rendit à son entrée dans Jérusalem; il ne permit ce triomphe que pour manifester sa puissance divine, et pour rendre ensuite sa passion plus ignominieuse, ainsi que pour enseigner aux hommes qu'on ne doit pas recevoir les honneurs du monde pour eux-mêmes, si l'intérêt de la gloire, du Très-Haut ne présente pas une autre fin plus relevée, à laquelle on puisse les rapporter ; car sans cela ils sont vains et inutiles, puisqu'ils ne sauraient faire la véritable félicité des créatures capables d'un bonheur éternel. Et comme je vois que vous souhaitez savoir la raison pour laquelle je ne me trouvai point près de mon très-saint Fils dans ce triomphe, je veux satisfaire votre désir, en vous rappelant ce que vous avez écrit souvent dans cette histoire de la vision que j'avais des oeuvres intérieures de mon Fils bien-aimé dans le très-pur
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miroir de son âme. Cette vision me faisait connaître quand et pourquoi il voulait s'éloigner de moi. Alors je me prosternais à ses pieds, et le suppliais de me déclarer sa volonté sur ce que je devais faire : et quelquefois cet adorable Seigneur me le déclarait et me le commandait expressément; d'autres fois il le laissait à mon choix, afin que je le fisse avec le secours de la lumière divine, et avec la prudence dont il m'avait douée. C'est ce qui eut lieu lorsqu'il résolut d'entrer dans Jérusalem triomphant de ses ennemis. Ainsi il me laissa libre de L'accompagner ou de rester à Béthanie; alors je le priai de me permettre de ne pas assister à cette manifestation mystérieuse, le suppliant néanmoins de me mener avec lui quand il retournerait à Jérusalem pour y souffrir et pour y mourir; parce que je crus qu'il lui serait plus agréable que je m'offrisse à participer aux ignominies et aux douleurs de sa Passion, qu'aux honneurs que les hommes lui rendaient; et il m'en serait revenu une part en qualité de mère, si j'eusse assisté à son triomphe, étant connue pour telle de ceux qui le bénissaient et le louaient; mais je ne recherchais point les applaudissements, et je savais d'ailleurs que le Seigneur les ordonnait pour découvrir sa divinité .et sa puissance infinie, auxquelles je n'avais aucune part; et que par l'honneur qu'on me rendrait alors, je n'augmenterais pas celui qu'on lui devait comme à l'unique Sauveur du genre humain. Ainsi, pour jouir dans ma solitude de ce mystère et glorifier le Très-Haut en ses merveilles, j'eus dans ma retraite la connaissance de tout
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ce que vous avez écrit. Il y a là pour vous une leçon qui vous excitera à imiter mon humilité, à détacher votre affection de tout ce qui est terrestre , et à vous élever aux choses célestes, qui vous inspireront un profond dégoût pour les honneurs du monde, connaissant par la divine lumière qu'ils ne sont que vanité des vanités et affliction d'esprit (1).
Re: La Cité Mystique de Dieu Vénérable Marie d'Agreda
CHAPITRE-VIII. Les démons s’assemblent clans l'enfer pour délibérer sur le triomphe que notre Sauveur Jésus-Christ reçoit dans Jérusalem. — Ce qui résulte de cette assemblée. — Les princes des prêtres et les pharisiens se réunissent de leur côté.
1128. Tous les mystères que renfermait le triomphe de notre Sauveur furent grands et admirables, comme nous l'avons remarqué; mais ce qui se passa dans l'enfer accablé par le pouvoir divin , lorsque les démons y furent précipités au moment de l'entrée triomphale de Jésus dans la ville sainte, ne nous fournit pas en son genre un moindre sujet d'admiration. Depuis le dimanche auquel ils essuyèrent cette défaite jusqu'au mardi suivant, ils restèrent deux jours
(1) Eccles., I, 14.
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entiers sous le poids de-la droite du Très-Haut, éperdus à la fois de honte et fureur, et ils exhalaient leur rage devant tous les damnés par des hurlements effroyables ; une nouvelle épouvante se répandit à travers ces sombres régions, dont les infortunés habitants virent s'accroître leurs tourments. Le prince des ténèbres Lucifer, plus troublé que tous les autres, convoqua tous les démons, et se plaçant, comme leur chef, dans un lieu plus élevé, il leur dit
1129.« II n'est pas possible que cet homme, qui nous persécute de la sorte, qui ruine notre empire et qui brise mes forces, ne soit plus que prophète. Car Moïse, Élie et Élisée, et nos autres anciens ennemis ne nous ont jamais vaincu avec une pareille. violence, quoiqu'ils aient opéré d'autres merveilles ; et je remarque même qu'il ne m'a pas été caché autant d'oeuvres de ceux-là que de celui-ci , surtout quant à ce qui se passe dans son intérieur, où je ne sais presque rien découvrir. Or comment un simple homme pourrait-il faire cela, et exercer sur toutes choses un pouvoir aussi absolu que celui que tout le monde lui reconnaît ? Il reçoit sans émotion et sans aucune complaisance les louanges que les hommes lui donnent pour les merveilles qu'il a faites. Il a montré en cette entrée triomphante qu'il vient de faire dans Jérusalem un nouveau pouvoir sur nous et sur le monde, puisque je ne me trouve pas assez fort pour accomplir mon dessein, qui est de le détruire et d'effacer son nom de la terre des vivants (1). A l'occasion de ce
(1) Jerem., XI, 19.
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triomphe, non-seulement les siens l'ont proclamé publiquement bienheureux, mais beaucoup de gens soumis à ma domination se sont joints à eux et l'ont même reconnu pour le Messie, pour Celui qui est promis dans la loi des Juifs; de sorte qu'ils ont tous été portés à le révérer et à l'adorer. C'est beaucoup pour un simple mortel, et si celui-ci n'est rien de plus, il est sûr qu'aucun autre n'a joui auprès dé Dieu d'une aussi haute faveur, et qu'il s'en sert et s'en servira encore pour nous causer de grandes. pertes ; car depuis que nous avons été chassés du ciel , il ne nous est pas arrivé d'essuyer des défaites comparables à celles auxquelles nous accoutume cet homme depuis sa naissance, ni de rencontrer une pareille vertu. Et s'il est par malheur le Verbe incarné (comme nous avons sujet de le craindre), nous ne devons rien négliger, c'est une affaire qui demande toute notre attention : parce que si nous le laissons vivre, il attirera tous les hommes après lui par son exemple et par sa doctrine. J'ai tâché quelquefois, pour assouvir ma haine, de lui ôter la vie, mais ç'a été toujours en vain; car dans son pays j'avais disposé quelques personnes à le précipiter du haut d'une montagne, et il eut la puissance d'échapper à ses ennemis (1). Une autre fois, étant à Jérusalem, je fis prendre à plusieurs pharisiens la résolution de le lapider, et il se déroba tout à coup à leurs regards (2).
1128. Tous les mystères que renfermait le triomphe de notre Sauveur furent grands et admirables, comme nous l'avons remarqué; mais ce qui se passa dans l'enfer accablé par le pouvoir divin , lorsque les démons y furent précipités au moment de l'entrée triomphale de Jésus dans la ville sainte, ne nous fournit pas en son genre un moindre sujet d'admiration. Depuis le dimanche auquel ils essuyèrent cette défaite jusqu'au mardi suivant, ils restèrent deux jours
(1) Eccles., I, 14.
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entiers sous le poids de-la droite du Très-Haut, éperdus à la fois de honte et fureur, et ils exhalaient leur rage devant tous les damnés par des hurlements effroyables ; une nouvelle épouvante se répandit à travers ces sombres régions, dont les infortunés habitants virent s'accroître leurs tourments. Le prince des ténèbres Lucifer, plus troublé que tous les autres, convoqua tous les démons, et se plaçant, comme leur chef, dans un lieu plus élevé, il leur dit
1129.« II n'est pas possible que cet homme, qui nous persécute de la sorte, qui ruine notre empire et qui brise mes forces, ne soit plus que prophète. Car Moïse, Élie et Élisée, et nos autres anciens ennemis ne nous ont jamais vaincu avec une pareille. violence, quoiqu'ils aient opéré d'autres merveilles ; et je remarque même qu'il ne m'a pas été caché autant d'oeuvres de ceux-là que de celui-ci , surtout quant à ce qui se passe dans son intérieur, où je ne sais presque rien découvrir. Or comment un simple homme pourrait-il faire cela, et exercer sur toutes choses un pouvoir aussi absolu que celui que tout le monde lui reconnaît ? Il reçoit sans émotion et sans aucune complaisance les louanges que les hommes lui donnent pour les merveilles qu'il a faites. Il a montré en cette entrée triomphante qu'il vient de faire dans Jérusalem un nouveau pouvoir sur nous et sur le monde, puisque je ne me trouve pas assez fort pour accomplir mon dessein, qui est de le détruire et d'effacer son nom de la terre des vivants (1). A l'occasion de ce
(1) Jerem., XI, 19.
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triomphe, non-seulement les siens l'ont proclamé publiquement bienheureux, mais beaucoup de gens soumis à ma domination se sont joints à eux et l'ont même reconnu pour le Messie, pour Celui qui est promis dans la loi des Juifs; de sorte qu'ils ont tous été portés à le révérer et à l'adorer. C'est beaucoup pour un simple mortel, et si celui-ci n'est rien de plus, il est sûr qu'aucun autre n'a joui auprès dé Dieu d'une aussi haute faveur, et qu'il s'en sert et s'en servira encore pour nous causer de grandes. pertes ; car depuis que nous avons été chassés du ciel , il ne nous est pas arrivé d'essuyer des défaites comparables à celles auxquelles nous accoutume cet homme depuis sa naissance, ni de rencontrer une pareille vertu. Et s'il est par malheur le Verbe incarné (comme nous avons sujet de le craindre), nous ne devons rien négliger, c'est une affaire qui demande toute notre attention : parce que si nous le laissons vivre, il attirera tous les hommes après lui par son exemple et par sa doctrine. J'ai tâché quelquefois, pour assouvir ma haine, de lui ôter la vie, mais ç'a été toujours en vain; car dans son pays j'avais disposé quelques personnes à le précipiter du haut d'une montagne, et il eut la puissance d'échapper à ses ennemis (1). Une autre fois, étant à Jérusalem, je fis prendre à plusieurs pharisiens la résolution de le lapider, et il se déroba tout à coup à leurs regards (2).
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