Le pape François contre le vide culturel de l'Europe
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Le pape François contre le vide culturel de l'Europe
article Le Figaro
Louis Manaranche est agrégé d'histoire et président du laboratoire d'idées Fonder demain. Son livre Retrouver l'histoire est paru en 2015 aux éditions du Cerf.
«Un lieu vide»… Voilà une description de l'Europe qui ne s'encombre pas de précautions oratoires. Aux yeux du pape, c'est ce que devient notre continent oublieux de ses racines culturelles. Évoquant la crise d'identité et de rayonnement de la «grand-mère» Europe à la délégation française qu'il recevait mardi, François a rappelé qu'elle naissait avant tout d'une grande rupture dans la transmission et l'affirmation de ce que nous sommes. Il ne s'agit pas de proclamer un attachement cocardier mais de rappeler comment l'Europe a une «vocation d'universalité», selon une expression du pontife. On se figure trop rapidement que cette formule renvoie aux droits de l'homme, à la démocratie, voire à l'économie de marché… C'est vrai, mais c'est secondaire.
L'universalité que l'Europe porte dans son être même renvoie d'abord à une vision plus structurante de l'homme, marquée, selon la formule de Paul Valéry, par Athènes, Rome et Jérusalem. Le chef de l'Église romaine invite à accomplir à nouveau la démarche romaine: assumer un héritage, celui des Grecs, avec leur philosophie, leur science, leur langue, l'offrir à tous par le génie propre de la politique et du droit, et intégrer un apport judéo-chrétien qui à la fois complète ce qui a été reçu et le renouvelle de fond en comble. Il y a dans l'identité européenne une dialectique: je reçois un héritage que je transforme et que j'offre au monde. Se fonder et rayonner.
Vouloir niveler ces aspérités et proposer une Europe standard, c'est attenter à l'Europe même. L'Union européenne n'est d'ailleurs pas la moins encline à succomber à cette tentation…
Une telle opération suppose que l'on accepte que l'Europe présente des différences. Chaque peuple, chaque corps politique a trouvé son génie propre dans l'incarnation particulière de ce qu'est l'Europe. Vouloir niveler ces aspérités et proposer une Europe standard, c'est attenter à l'Europe même. L'Union européenne n'est d'ailleurs pas la moins encline à succomber à cette tentation… Peut-être même a-t-elle été, dans sa version la plus technicienne, un des fossoyeurs de l'idée européenne. Un exemple est significatif: celui des billets d'euros. Éminemment symboliques puisque communs à tous les pays de la zone, ils ne représentent aucun monument, aucun personnage, aucune œuvre réels. Tout au plus a-t-on affaire à une vague évocation de l'Antiquité romaine, du Moyen-âge gothique… sans aucune incarnation.
La tâche est lourde car la destruction a été réalisée avec grand soin. L'éducation doit y jouer un rôle primordial. Son renouveau est le commencement de toute politique.
Or, la culture, c'est précisément l'incarnation d'une vision universelle qui, si elle ne renvoie qu'à des valeurs abstraites, devient une idéologie à inculquer par des moyens forts ou doux, selon l'humeur des peuples et de leurs gouvernants. On se rend alors compte de la profondeur de la crise. Lorsque, pour prendre l'exemple de notre pays, entendant réarmer moralement les jeunes français après les attaques de l'an passé, on préconise avant tout un «enseignement moral et civique», on brade inconsciemment notre culture commune. Celle-ci n'est pas avant tout une question de vieilles pierres ou de bons fromages mais la quête de ce qu'est une vie bonne, qui se décline dans notre littérature ancienne et moderne, dans notre philosophie, dans notre histoire etc. Dans les humanités se cache la plus belle éducation civique, pour peu qu'on leur donne le temps et l'ampleur qu'elles méritent. On y trouve aussi une quête spirituelle que seule une vision étriquée de la laïcité entendrait passer sous silence ou renvoyer à un passé révolu. On trouverait en somme tout ce qui pourrait faire vraiment aimer l'Europe et la France tant aux habitants de vieille souche qu'à ceux qui arrivent et qui sont si souvent frappés par notre vacuité culturelle et spirituelle.
La tâche est lourde car la destruction a été réalisée avec grand soin. L'éducation doit y jouer un rôle primordial. Son renouveau est le commencement de toute politique. Car c'est de cela qu'il s'agit, en fin de compte. Faire du politique, c'est vouloir habiter un lieu, donner forme à un territoire avant même de s'atteler à ce qui constitue la vie quotidienne des habitants de celui-ci. Notre vieille Europe, en rougissant de sa culture, n'offre plus les conditions du politique. Ne croyons pas que la mondialisation nous les donnera davantage. Elle ne sera que la diffusion sans frontières ni limites de la loi du marché et le terreau de toutes les idéologies si elle n'a pas une Europe solide qui se met à son service pour lui dire ce qu'est l'homme. Le monde a besoin de l'Europe.
Louis Manaranche est agrégé d'histoire et président du laboratoire d'idées Fonder demain. Son livre Retrouver l'histoire est paru en 2015 aux éditions du Cerf.
«Un lieu vide»… Voilà une description de l'Europe qui ne s'encombre pas de précautions oratoires. Aux yeux du pape, c'est ce que devient notre continent oublieux de ses racines culturelles. Évoquant la crise d'identité et de rayonnement de la «grand-mère» Europe à la délégation française qu'il recevait mardi, François a rappelé qu'elle naissait avant tout d'une grande rupture dans la transmission et l'affirmation de ce que nous sommes. Il ne s'agit pas de proclamer un attachement cocardier mais de rappeler comment l'Europe a une «vocation d'universalité», selon une expression du pontife. On se figure trop rapidement que cette formule renvoie aux droits de l'homme, à la démocratie, voire à l'économie de marché… C'est vrai, mais c'est secondaire.
L'universalité que l'Europe porte dans son être même renvoie d'abord à une vision plus structurante de l'homme, marquée, selon la formule de Paul Valéry, par Athènes, Rome et Jérusalem. Le chef de l'Église romaine invite à accomplir à nouveau la démarche romaine: assumer un héritage, celui des Grecs, avec leur philosophie, leur science, leur langue, l'offrir à tous par le génie propre de la politique et du droit, et intégrer un apport judéo-chrétien qui à la fois complète ce qui a été reçu et le renouvelle de fond en comble. Il y a dans l'identité européenne une dialectique: je reçois un héritage que je transforme et que j'offre au monde. Se fonder et rayonner.
Vouloir niveler ces aspérités et proposer une Europe standard, c'est attenter à l'Europe même. L'Union européenne n'est d'ailleurs pas la moins encline à succomber à cette tentation…
Une telle opération suppose que l'on accepte que l'Europe présente des différences. Chaque peuple, chaque corps politique a trouvé son génie propre dans l'incarnation particulière de ce qu'est l'Europe. Vouloir niveler ces aspérités et proposer une Europe standard, c'est attenter à l'Europe même. L'Union européenne n'est d'ailleurs pas la moins encline à succomber à cette tentation… Peut-être même a-t-elle été, dans sa version la plus technicienne, un des fossoyeurs de l'idée européenne. Un exemple est significatif: celui des billets d'euros. Éminemment symboliques puisque communs à tous les pays de la zone, ils ne représentent aucun monument, aucun personnage, aucune œuvre réels. Tout au plus a-t-on affaire à une vague évocation de l'Antiquité romaine, du Moyen-âge gothique… sans aucune incarnation.
La tâche est lourde car la destruction a été réalisée avec grand soin. L'éducation doit y jouer un rôle primordial. Son renouveau est le commencement de toute politique.
Or, la culture, c'est précisément l'incarnation d'une vision universelle qui, si elle ne renvoie qu'à des valeurs abstraites, devient une idéologie à inculquer par des moyens forts ou doux, selon l'humeur des peuples et de leurs gouvernants. On se rend alors compte de la profondeur de la crise. Lorsque, pour prendre l'exemple de notre pays, entendant réarmer moralement les jeunes français après les attaques de l'an passé, on préconise avant tout un «enseignement moral et civique», on brade inconsciemment notre culture commune. Celle-ci n'est pas avant tout une question de vieilles pierres ou de bons fromages mais la quête de ce qu'est une vie bonne, qui se décline dans notre littérature ancienne et moderne, dans notre philosophie, dans notre histoire etc. Dans les humanités se cache la plus belle éducation civique, pour peu qu'on leur donne le temps et l'ampleur qu'elles méritent. On y trouve aussi une quête spirituelle que seule une vision étriquée de la laïcité entendrait passer sous silence ou renvoyer à un passé révolu. On trouverait en somme tout ce qui pourrait faire vraiment aimer l'Europe et la France tant aux habitants de vieille souche qu'à ceux qui arrivent et qui sont si souvent frappés par notre vacuité culturelle et spirituelle.
La tâche est lourde car la destruction a été réalisée avec grand soin. L'éducation doit y jouer un rôle primordial. Son renouveau est le commencement de toute politique. Car c'est de cela qu'il s'agit, en fin de compte. Faire du politique, c'est vouloir habiter un lieu, donner forme à un territoire avant même de s'atteler à ce qui constitue la vie quotidienne des habitants de celui-ci. Notre vieille Europe, en rougissant de sa culture, n'offre plus les conditions du politique. Ne croyons pas que la mondialisation nous les donnera davantage. Elle ne sera que la diffusion sans frontières ni limites de la loi du marché et le terreau de toutes les idéologies si elle n'a pas une Europe solide qui se met à son service pour lui dire ce qu'est l'homme. Le monde a besoin de l'Europe.
sga- MEDIATEUR
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Re: Le pape François contre le vide culturel de l'Europe
C'est carrément le manifeste des Veilleurs, vous connaissez ?
26 mai 2013. on s'est fait gazé par les flics. C'est ce qui m'a décidé à les rejoindre "Bon! puisqu'ils se font gazés, moi je les rejoins" et depuis je suis Veilleurs
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Sur la photo 2 on voit Charles Edouards à gauche
26 mai 2013. on s'est fait gazé par les flics. C'est ce qui m'a décidé à les rejoindre "Bon! puisqu'ils se font gazés, moi je les rejoins" et depuis je suis Veilleurs
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Sur la photo 2 on voit Charles Edouards à gauche
Dernière édition par Phiphi le Sam 5 Mar 2016 - 12:33, édité 4 fois
Philippe Marie- Avec Saint Joseph
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Inscription : 13/07/2010
Re: Le pape François contre le vide culturel de l'Europe
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Philippe Marie- Avec Saint Joseph
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