Le nazisme fut-il moderne ?

Bonjour,

J'attire l'attention sur le contenu de cette conférence. Un mot : passionnant. Mais j'ajouterais : éclairant. Le conférencier nous force à revisiter complètement notre propre histoire contemporaine des dernières décennies.  

Le fil conducteur de la conférence s'avère en bonne partie le profil d'un homme ayant pu faire carrière au sommet dans la SS et assurer ensuite sa reconversion à la vie civil dans un monde dit «libre» et «démocratique», nos sociétés libérales atlantisées. Les techniques d'administration «bien à la page», popularisées et vendues par le professeur Reinhard Höhn dans les années d'après-guerre et jusque dans les années 1980 n'étaient pas bien différentes des méthodes de gestion des subordonnés dans l'appareil militaire allemand du IIIe Reich. Son école d'administration pour personnel cadre des grandes entreprises commerciales privées aurait fait fureur en Allemagne de l'Ouest et ailleurs. A sa mort survenant en l'année 2000, le patronat allemand et des articles de presse de tout bord auront salué son génie, son apport remarquable à cette science de la gestion. 

A écouter la conférence, on réalise que la dénazification n'est pas un phénomène qui aurait dû intervenir rapidement à l'Ouest. Au contraire, des centaines de milliers d'anciens collaborateurs actifs du régime déchu auront pu être recyclés sans mal dans l'opération de reconstruction. On retient le concept de liberté dérivé d'une sorte de libéralisme d'une part, puis celle de l'efficacité ou de la productivité et son corollaire d'une improductivité à sanctionner (le poids mort, bouches inutiles, ceux qui ne sont rien dixit Emmanuel Macron). Cette technique administrative de génie a pour effet de rendre intouchables ou irresponsables les grands managers. Pas moyen de leur imputer les conséquences désastreuses observées sur le terrain, et en tout cas désastreuses du point de vue des victimes certainement.

Oui, le rapprochement est pertinent. Il me semble que la démarche de ces grands administrateurs du forum de Davos se présente comme une dynamique totalitaire. Il n'existe apparemment aucune alternative à leur système, à les entendre. Pas de place non plus pour la dissidence. Ils prétendent donner la direction, confier des missions, des objectifs à atteindre. Ils ne seront jamais responsables en tant que tel du chaos provoqué, du désastre économique, de la guerre et tout. Non imputables : ils vont recommencer, recommencer et reconduire à nouveau les décisions débouchant sur le massacre, jusqu'à l'épuisement complet des ressources et l'autodestruction. 

C'est encore plus stupéfiant quand on associe cette mentalité managériale à la question de l'Europe, dans une démonstration magistrale que François Asselineau a fait concernant l'Union européenne, démontrant par A + B comment ses premiers grands promoteurs ou propagandistes furent les nazis durant la guerre. Un projet qui s'accompagne de la destruction des États (ce que Johann Chapoutot explique dans sa conférence, l'État alors compris comme une entité statique nuisible, et nuisible parce que trop susceptible souvent de mettre des entraves aux projets novateurs, la créativité dynamique des plus performants, des «meilleurs»).

Un immense orgueil se trouve à la racine de tout cela. Évidemment !