Du Cardinal Sarah
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Re: Du Cardinal Sarah
Homélie prononcée par le Cardinal Sarah
préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, le dimanche de Pentecôte, 9 juin 2019, en la Cathédrale Saint-Bavon de Haarlem (Pays-Bas).
Chers Frères et Sœurs,
La solennité de la Pentecôte clôt le temps pascal. Aujourd’hui, nous fêtons le don de l’Esprit Saint aux Apôtres, réunis au Cénacle, avec Marie, la Mère de Jésus, qui devient alors la Mère de l’Eglise. Le Saint-Esprit transmet la Vie de Dieu, il vivifie, il éclaire et, par ses sept dons[1], il permet aux Apôtres et à nous tous, baptisés et confirmés, de prendre pleinement conscience d’être nous aussi fils de Dieu. Par la force du Saint-Esprit, notre intelligence et notre cœur s’ouvrent à une lumière nouvelle. Nous sommes introduits dans le mystère de Jésus, Fils de Dieu ; il nous est donné d’accueillir avec foi son enseignement, de comprendre pleinement la réalité concrète des Saintes Ecritures. Tous, nous avons été baptisés dans l’Esprit Saint et le feu. Par le baptême, Dieu notre Père a pris possession de notre vie, il nous a régénérés et incorporés à celle du Christ et nous a envoyé le Saint-Esprit pour que désormais il nous conduise, nous donne la vie nouvelle : la vie de Dieu. En effet, l’Ecriture nous enseigne que « le Seigneur nous a sauvés par le bain de la régénération et de la rénovation en l’Esprit Saint. Et cet Esprit, il l’a répandu sur nous à profusion, par Jésus-Christ, notre Sauveur, afin que, justifiés par la grâce du Christ, nous obtenions en héritage la vie éternelle ». L’Esprit Saint est notre force, et aussi l’inspirateur et l’âme de notre prière. Il nous apprend à prier et il prie en nous. C’est pourquoi, exactement comme nous sommes réunis dans cette cathédrale, les Apôtres se trouvaient réunis en prière avec la Très Sainte Vierge Marie, la Mère de l’Eglise ; ils attendaient cet évènement que le Seigneur Jésus leur avait annoncé le jour de l’Ascension : « Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ». Aussitôt, une question s’était emparé de leur esprit, une question qui est encore la nôtre aujourd’hui : « Comment une poignée de douze pauvres pêcheurs, ˝qui étaient des gens sans instruction, ni culture ˝ allaient-ils trouver la force de proclamer l’Evangile jusqu’aux extrémités de la terre ? »,
et de nos jours : « Comment quelques familles chrétiennes, conduites par quelques prêtres et aidées d’un nombre restreint de religieux et de religieuses peuvent-ils être témoins de l’Evangile de la Vie au milieu d’une société dite « post-chrétienne », c’est-à-dire où Dieu est absent par la volonté de ceux qui la dirigent ? ».
Autre question : « Comment les Apôtres pourraient-ils affronter la puissance de l’Empire romain alors à son apogée ? Comment proposer l’Evangile à une société et à une culture avide de « pain et de jeux », sans égard à la dignité humaine des esclaves ? »,
et de nos jours : « Comment quelques baptisés peuvent-ils régénérer une société placée sous la domination de l’argent et des plaisirs du monde ? Comment évangéliser une société qui rejette Dieu et ses enseignements, méprise le pauvre et le faible et fait l’apologie de la théorie du genre et du transhumanisme ? ». Et pourtant, fortifiés le jour de la Pentecôte par l’Esprit Saint, voici que Pierre, le chef des Apôtres, a ouvert toutes grandes les portes et les fenêtres du Cénacle, et, sans peur, il a prononcé la première homélie de l’Eglise naissante : on lit dans les Actes des Apôtres : « Pierre, debout avec les onze autres Apôtres, éleva la voix et leur fit cette déclaration : ˝Vous, Juifs, et vous tous qui résidez à Jérusalem, sachez bien ceci, prêtez l’oreille à mes paroles… Il arrivera dans les derniers jours, dit Dieu, que je répandrai mon Esprit sur toute créature : vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions, et vos anciens auront des songes. Même sur mes serviteurs et sur mes servantes, je répandrai mon Esprit en ces jours-là, et ils prophétiseront…Hommes d’Israël, écoutez les paroles que voici. Il s’agit de Jésus le Nazaréen, homme que Dieu a accrédité auprès de vous en accomplissant par lui des miracles, des prodiges et des signes au milieu de vous, comme vous le savez vous-mêmes. Cet homme, livré selon le dessein bien arrêté et la prescience de Dieu, vous l’avez supprimé en le clouant sur le bois par la main des impies. Mais Dieu l’a ressuscité en le délivrant des douleurs de la mort, car il n’était pas possible qu’elle le retienne en son pouvoir ».Et bientôt l’Evangile va s’étendre jusqu’aux confins de l’Empire romain, et du sang des martyrs versé sur les ruines de ce monde décadent, gangrené par ses turpitudes, va naître une semence de chrétiens, prémices de l’Europe chrétienne. Le tableau de la société de cette époque est semblable à celui que nous pouvons dresser aujourd’hui. Dans l’ouvrage qui vient de paraître : Le soir approche et déjà le jour baisse, je déplore que l’homme occidental « n’ait pas confiance en Dieu »et que, pour lui, « Dieu est un concurrent qui limite sa liberté et qu’il pense n’être pleinement humain que lorsqu’il réussit à le mettre de côté ». Et j’ajoute que « l’homme contemporain vit avec le soupçon que l’amour de Dieu crée une dépendance et qu’il lui est nécessaire de se débarrasser de cette dépendance pour être pleinement lui-même ». Or, ce que nous découvrons dans les sacrements du baptême et de la confirmation, que nous avons reçus, c’est que, au contraire, l’Esprit Saint fait de nous des fils bien-aimés du Père en Jésus-Christ, son Fils unique. Si le baptême, que la tradition chrétienne appelle « le porche de la vie dans l’Esprit Saint », nous fait renaître « d’eau et d’Esprit Saint » en nous faisant participer de façon sacramentelle à la mort et à la résurrection du Christ, le sacrement de la confirmation, quant à lui, nous fait pleinement participer à l’effusion de l’Esprit Saint de la part du Seigneur Ressuscité. Or, nous dit saint Paul : « Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire ». Cela signifie que, désormais, par l’Esprit Saint qui agit dans mon âme, je suis appelé dans le contexte actuel de recherche effrénée d’une liberté sans responsabilité, de déracinement perpétuel et de reniement du père, à redécouvrir que « la dignité de l’homme consiste fondamentalement à être un héritier. Qu’il est beau et libérateur de savoir que j’existe parce que j’ai été aimé ! Je suis le fruit d’une libre volonté de Dieu qui, en son éternité, a voulu mon existence… Hériter est la condition d’une vraie liberté ».
Mais il y a plus : par le baptême, nous avons été incorporés dans l’Eglise, le Corps mystique du Christ. La venue du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte, ne s’est pas limitée à une transformation purement intérieure de l’âme des Apôtres, en les rendant « sans peur et sans reproche », tel le chevalier Bayard ! En reposant sur les Apôtres, comme sur chacun de nous le jour de notre confirmation, le Saint-Esprit les a placés, et il nous place aujourd’hui, au centre de l’Église pour travailler selon la volonté de Jésus à sa construction et à son expansion jusqu’aux extrémités de la terre. Les Pères de l’Eglise voient dans le Saint-Esprit l’Ame de l’Église. L’âme, anima en latin, c’est ce qui permet à un corps de vivre. L’âme ordonne les différents organes en vue d’un but unique : la vie. Au moment de la mort, lorsque l’âme s’est retirée du corps, la vie s’éteint, et les organes se disloquent. Il en va de même pour l’Eglise. Le Saint-Esprit est dans son Cœur comme un souffle de vie. Il forge l’unité de la communauté des croyants et lui donne vie, telle l’âme humaine pour le corps. Par l’action de l’Esprit Saint, l’Eglise est devenue un Corps vivant, le Corps mystique du Christ . Ce Corps nous en faisons partie. Or, trop souvent, nous succombons aux suggestions du Malin, qui est le Diviseur : esprit d’orgueil et de critique, esprit de contradiction et de discorde, esprit de commérage, d’amertume et de désunion… Les fruits de tels mauvais esprits sont manifestes : en effet, d’où proviennent la division dans l’Eglise, les guerres fratricides entre les nations ou à l’intérieur d’une même communauté nationale, ou dans les familles, sinon de l’appât du gain, l’amour excessif de l’argent, la jalousie, et l’absence totale du vrai amour dans les cœurs des hommes ? D’où vient la mort donnée volontairement à l’enfant dans le sein maternel, au malade et à la personne âgée que l’on juge sans valeur et inutile, sinon de l’aveuglement dans lequel nous a placés notre refus d’accueillir la lumière de l’Evangile ? Aujourd’hui, en cette solennité de la Pentecôte, le Saint-Esprit nous convoque au Cœur de l’Église. Demandons-lui la lumière et la vie qui viennent de Dieu. Comme sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, demandons-lui la grâce d’aimer vraiment l’Eglise. Que chacun de nous puisse vraiment comprendre et dire comme sainte Thérèse de l’enfant Jésus : « La Charité me donna la clef de ma vocation. Je compris que si l’Eglise avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l’Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d’Amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Eglise, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Evangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’amour renfermait toutes les vocations, que l’amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux… en un mot, qu’il est éternel !… Alors, dans l’excès de ma joie délirante, je me suis écriée : O Jésus, mon Amour… ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !… Oui j’ai trouvé ma place dans l’Eglise et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… dans le Cœur de l’Eglise, ma Mère, je serai l’Amour… » . Dans nos communautés chrétiennes, dans nos paroisses, dans nos familles, dans nos cœurs, l’Église n’est pas assez aimée : là est sans doute l’une des principales causes du manque de vocations sacerdotales et religieuses dans les pays occidentaux, y compris ici, aux Pays-Bas. Car on ne s’engage pas pour quelqu’un qu’on n’aime pas.
Unis à Marie, Siège de la Sagesse, Porte de la Miséricorde de Dieu et Cause de notre joie, avec tous les chrétiens du monde, redisons encore : Veni Sancte Spiritus. « Viens, Esprit Saint, en nos cœurs et envoie du haut du ciel un rayon de ta lumière…Viens, lumière de nos cœurs… Ô lumière bienheureuse, viens remplir jusqu’à l’intime le cœur de tous tes fidèles »
Amen.
Cardinal Robert Sarah
Dernière édition par Zamie le Dim 23 Juin 2019 - 18:04, édité 1 fois (Raison : correction)
Zamie- Enfant de Dieu
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Zamie- Enfant de Dieu
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Re: Du Cardinal Sarah
Sarah, le lumineux Cardinal
Par Rodolphe Arfeuil
8 septembre 2019 20:00
Le soir approche et déjà le jour baisse. Le titre du dernier opus du Cardinal Sarah, expert en best-sellers, est tiré de l’Evangile de Luc. Les disciples d’Emmaüs cheminent avec un inconnu qui n’est autre que Jésus lui-même, ressuscité trois jour après sa passion et sa mort, mais ils ne le reconnaissent pas. Ils l’invitent à partager leur repas car la nuit vient. A la fraction du pain et à la bénédiction prononcée par cet homme, leurs yeux s’ouvrent mais il disparaît. En choisissant ce verset des Evangiles, qu’a cherché à nous dire le Cardinal, lui qui fut un proche de Jean-Paul II et Benoît XVI abondamment cités dans l’ouvrage ? L’entame du propos est sans équivoque : « Pourquoi prendre à nouveau la parole ? Dans mon dernier livre, je vous invitais au silence. Pourtant, je ne peux plus me taire. Les chrétiens sont désorientés. Chaque jour, je reçois de toute part les appels au secours de ceux qui ne savent plus que croire. Chaque jour, je reçois à Rome des prêtres découragés et blessés. L’expérience de la nuit obscure. Le mystère d’iniquité l’enveloppe et l’aveugle. » La nuit obscure contemporaine que connaissent le christianisme et plus largement le monde effraierait sûrement le frère carme contemplatif Jean de la Croix qui, en son siècle, l’avait charnellement et spirituellement vécue. Par son athéisme fluide, son relativisme universel, la nuit obscure frappe durement des consciences anesthésiées par le capitalisme et le consumérisme, ces valeurs reines d’aujourd’hui. Les cris de profundisdu Cardinal, mélange de stupeur et de douleur, ont pour ambition d’interpeler, secouer, comme ceux de Bernanos ou de Soljenitsyne jadis. Car il n’y a plus de temps à perdre tant le mensonge a grippé les rouages des sociétés humaines, particulièrement en cet Occident dominé par l’arrogance de son rationalisme qui le conduit droit à sa perte. Le Cardinal martèle l’urgence : « Il est temps pour les chrétiens de se tenir devant Dieu et d’y conduire les autres. Celui qui prie se sauve, celui qui ne prie pas se damne, disait saint Alphonse. » Notre prince d’Église invite à une radicale conversion du cœur et de nos modes de vie : « Voici que tout à coup, nous qui pensions avoir tant d’idées importantes, de projets nécessaires, nous nous taisons, terrassés par la grandeur et la transcendance de Dieu. Emplis de crainte filiale, nous levons les yeux vers le Christ glorieux, tandis qu’à chacun de nous, il demande : "M’aimes-tu ?" Laissons résonner sa question. Ne nous hâtons pas de répondre. En vérité l’aimons-nous ? L’aimons-nous à en mourir ? Si nous pouvons répondre humblement, simplement : "Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime.", alors il nous sourira, alors Marie et les saints du ciel nous souriront et à chaque chrétien ils diront, comme autrefois à François d’Assise : "Va et répare mon Église !" Va, répare par ta foi, par ton espérance et ta charité. Va et répare par ta prière et ta fidélité. Grâce à toi, mon Église redeviendra ma maison. »
L’assertion du Cardinal « Le monde moderne a renié le Christ. » répond à celle du fiévreux et mécontemporain Bernanos : « la société moderne, conspiration contre toute forme de vie intérieure ». Dans ce reniement réside la cause des catastrophes qui nous touchent avec une accentuation graduelle au fil des XVIIIème, XIXème et jusqu’au XXIème siècle. La décadence revêt un caractère inéluctable comme naguère le déclin de Rome. Pertinente analogie. Irréversible destin vers la chute promise. Le Cardinal, pour convaincre, appuie sur nos plaies de souffrance : « Nous avons voulu briller aux yeux du monde et, par trois fois, nous avons renié notre Dieu. Nous avons affirmé : je ne suis pas sûr de lui, des Évangiles, des dogmes, de la morale chrétienne. Nous avons eu honte des saints et des martyrs, nous avons rougi de Dieu, de son Église et de sa liturgie, tremblé devant le monde et ses serviteurs. Alors qu’il venait de le trahir, Jésus regarda Pierre. Que d’amour et de miséricorde, mais aussi combien de reproches et de justice dans ce regard. Pierre pleura amèrement. Il sut demander pardon. Accepterons-nous de croiser le regard du Christ ? Je crois que le monde moderne détourne les yeux : il a peur. Il ne veut pas voir son image reflétée dans les yeux si doux de Jésus. Il s’enferme. Mais s’il refuse de se laisser regarder, il finira comme Judas, dans le désespoir. Tel est le sens de la crise contemporaine de la foi. Nous ne voulons pas regarder vers celui que nous avons crucifié. Aussi courrons-nous vers le suicide. Ce livre est un appel au monde moderne, pour qu’il accepte de croiser le regard de Dieu et puisse enfin pleurer. »
Aux barbaries communiste et nazie du XXème siècle succèdent les barbaries plus insidieuses et tout aussi destructrices de l’abandon de Dieu, puis des repères, de l’identité, des cultures singulières, de l’histoire, ouvrant ainsi la porte à la société liquide du nihilisme, de l’individualisme, de la mort de l’âme. Chesterton avait, pour décrire les lubies de l’homme moderne, une phrase comme toujours percutante : « Quand l’homme cesse de croire en Dieu, il ne croit plus en rien. Et quand il ne croit plus en rien, il croit en n’importe quoi. » Il est si affligeant de constater combien nous sommes devenus tristes, vidés de réelle substance, changés en narcisses survoltés, emportés par les vents, incapables de rébellion. Il faut relire Saint-Exupéry qui avait tout vu de ces ruptures et du néant qui advenait. Le professeur et Pape émérite Benoît XVI, quant à lui, expliquait lors d’une catéchèse en 2012 : « L’homme séparé de Dieu est réduit à une seule dimension, horizontale. Ce réductionnisme est justement une des causes fondamentales des totalitarismes qui ont eu des conséquences tragiques au siècle dernier, ainsi que de la crise des valeurs que nous voyons actuellement. En obscurcissant la référence à Dieu, on a obscurci aussi l’horizon éthique, pour laisser place au relativisme et à une conception ambigüe de la liberté, qui au lieu d’être libératrice finit par lier l’homme à des idoles. Les tentations que Jésus a affrontées au désert avant sa mission publique représentent bien ces "idoles" qui séduisent l’homme, quand il ne va pas au-delà de lui-même. Si Dieu perd son caractère central, l’homme perd sa juste place, il ne trouve plus sa place dans le créé, dans les relations avec les autres. » De cette négation assumée de Dieu, de la volonté de le tenir pour définitivement mort découlent en cascade les événements qui orchestrent la décivilisation et la déculturation : disparition du père de famille, pulvérisation de la famille elle-même, marginalisation puis implosion des structures d’autorité (le curé, l’instituteur, le professeur, le docteur, l’avocat, l’homme politique, le représentant de l’Etat, le maire…), perte du sacré. « La perte du sens de la grandeur de Dieu est une formidable régression vers la sauvagerie. Le sens du sacré est en effet le cœur de toute civilisation humaine. La présence d’une réalité sacrée engendre les sentiments de respect, les gestes de vénération. Les rites religieux sont la matrice de toutes les attitudes de politesse et de courtoisie humaine. » rappelle le Cardinal.
De leur côté, les morts ne sont plus honorés, voués à la cendre de l’oubli après passage express en funérarium. Ils ne sont pas de la famille des morts du monde d’avant, chanceux anciens, objets d’un digne respect, dormition puis linceul, poussière comme promesse de vie, de résurrection éternelle aussi, voyage vers le grand mystère. Les symboles d’avant sont jugés obsolètes par tous les esprits formatés de la sphère moderniste. Les résurgences du passé, si fécondes en sens soient-elles, sont antinomiques du progrès, selon la doxa du moment. Les vieillards du monde dit civilisé -contrairement à ce que l’on observe dans les civilisations africaine et asiatique- sont assimilés à des résidus inutiles, parqués dans des Ephad, ces structures de profit, abjects symboles d’un monde qui ne s’aime plus à force de se complaire dans le narcissisme. Les femmes -contrairement encore aux civilisations susnommées- sont avilies, érotisées jusqu’à l’immonde, réifiées en Occident décadent. Les idoles, les veaux d’or, les passions hédonistes, les eugénismes et transhumanismes ne servent à la fin qu’un seul maître : l’argent. Son synonyme est capitalisme, ou encore libéralisme-libertaire mais, quels que soient les qualificatifs pour le définir, il a su ravaler l’homme au rang de bête, à la dernière place, celle dévolue à la chose marchande monétisée, remplaçable, interchangeable.
Certains aphorismes et réflexions du Cardinal sont d’heureuses flèches ardentes et autant d’objets de profonde méditation : « Quand le Christ explique aux hommes vers quoi ils doivent tendre, il ne leur dit pas : "Soyez pleinement et parfaitement hommes, épanouissez-vous jusqu’à la perfection de votre nature humaine", mais : "Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait", c’est-à-dire de la perfection même de Dieu. » ; « La science et la technologie nous hypnotisent au point que nous agissons comme s’il n’y avait rien au-delà de la matière. Nous savons que toute chose sur terre est périssable mais nous continuons à préférer le fugace à l’éternel. ».
Le lumineux Cardinal poursuit, exhorte et encourage ses frères du sacerdoce et de la vie religieuse : « Vous tous prêtres et religieux cachés et oubliés, vous que la société méprise parfois, vous qui êtes fidèles aux promesses de votre ordination, vous faites trembler les puissances de ce monde ! Vous leur rappelez que rien ne résiste à la force du don de votre vie pour la vérité. Votre présence est insupportable au prince du mensonge. Vous n’êtes pas les défenseurs d’une vérité abstraite ou d’un parti. Vous avez décidé de souffrir par amour pour la vérité, pour Jésus-Christ. Sans vous, chers frères prêtres et consacrés, l’humanité serait moins grande et moins belle. ».
Concernant le synode d’Amazonie qui se déroule en 2019 et qui apparaît à bien des égards expérimental et périlleux pour l’avenir de l’Église, Robert Sarah ne mâche pas ses mots : « Les habitants de l’Amazonie ont un besoin profond de prêtres qui ne se bornent pas à accomplir leur travail à horaires fixes avant de retourner en famille s’occuper de leurs enfants. Ils ont besoin d’hommes passionnés par Le Christ, brûlants de son feu, dévorés par le zèle des âmes. Que serais-je aujourd’hui si des missionnaires n’étaient pas venus vivre et mourir dans mon village de Guinée ? Aurais-je eu le désir d’être prêtre si l’on s’était contenté d’ordonner l’un des hommes du village ? L’Église serait-elle à ce point refroidie qu’il n’y ait pas parmi ses enfants suffisamment d’âmes magnanimes pour se lever et partir annoncer le Christ en Amazonie ? ».
Sur la tiédeur de notre temps qui est aussi celle des catholiques, il cite une nouvelle fois Bernanos qui houspille ces derniers, dans son Journal d’un curé de campagne : « Vous revendiquez d’être les pierres du Temple appelé Dieu, les concitoyens des Saints, les enfants du Père Céleste. Avouez que cela ne se voit pas toujours du premier coup ! ».
Sur l’attente d’une période meilleure : « Je l’ai dit souvent, je ne crains pas de le répéter. Le renouveau viendra des monastères. ».
En conclusion, et pour que nous saisissions le cap clair qu’il nous est donné de suivre, le Cardinal Sarah convoque une fois encore les mots de Georges Bernanos : « Qui prétend réformer l’Église par les mêmes moyens qu’on réforme une société temporelle non seulement échoue dans son entreprise, mais finit infailliblement par se trouver hors de l’Église […] On ne réforme les vices de l’Église qu’en prodiguant l’exemple de ses vertus les plus héroïques. Il est possible que Saint François d’Assise n’ait pas été moins révolté que Luther par la débauche et la simonie des prélats. Il n’a pas défié l’iniquité, il n’a pas tenté de lui faire front, il s’est jeté dans la pauvreté, il s’y est enfoncé le plus avant qu’il ait pu, avec les siens, comme dans la source de toute rémission, de toute pureté. Au lieu d’arracher à l’Église les biens mal acquis, il l’a comblée de trésors invisibles, et sous la douce main de ce mendiant le tas d’or et de luxure s’est mis à fleurir comme une haie d’avril. […] Ainsi l’Église n’a pas besoin de réformateurs, mais de saints. »
Tout est dit. Le monde attend le passage des saints, là où les saints passent Dieu passe avec eux. Ainsi le monde redécouvrira son Créateur puis, ce trésor qu’est la juste mesure des choses, l’humilité face à Dieu.
Chronologie des événements fatidiques
Aux barbaries communiste et nazie du XXème siècle succèdent les barbaries plus insidieuses et tout aussi destructrices de l’abandon de Dieu, puis des repères, de l’identité, des cultures singulières, de l’histoire, ouvrant ainsi la porte à la société liquide du nihilisme, de l’individualisme, de la mort de l’âme. Chesterton avait, pour décrire les lubies de l’homme moderne, une phrase comme toujours percutante : « Quand l’homme cesse de croire en Dieu, il ne croit plus en rien. Et quand il ne croit plus en rien, il croit en n’importe quoi. » Il est si affligeant de constater combien nous sommes devenus tristes, vidés de réelle substance, changés en narcisses survoltés, emportés par les vents, incapables de rébellion. Il faut relire Saint-Exupéry qui avait tout vu de ces ruptures et du néant qui advenait. Le professeur et Pape émérite Benoît XVI, quant à lui, expliquait lors d’une catéchèse en 2012 : « L’homme séparé de Dieu est réduit à une seule dimension, horizontale. Ce réductionnisme est justement une des causes fondamentales des totalitarismes qui ont eu des conséquences tragiques au siècle dernier, ainsi que de la crise des valeurs que nous voyons actuellement. En obscurcissant la référence à Dieu, on a obscurci aussi l’horizon éthique, pour laisser place au relativisme et à une conception ambigüe de la liberté, qui au lieu d’être libératrice finit par lier l’homme à des idoles. Les tentations que Jésus a affrontées au désert avant sa mission publique représentent bien ces "idoles" qui séduisent l’homme, quand il ne va pas au-delà de lui-même. Si Dieu perd son caractère central, l’homme perd sa juste place, il ne trouve plus sa place dans le créé, dans les relations avec les autres. » De cette négation assumée de Dieu, de la volonté de le tenir pour définitivement mort découlent en cascade les événements qui orchestrent la décivilisation et la déculturation : disparition du père de famille, pulvérisation de la famille elle-même, marginalisation puis implosion des structures d’autorité (le curé, l’instituteur, le professeur, le docteur, l’avocat, l’homme politique, le représentant de l’Etat, le maire…), perte du sacré. « La perte du sens de la grandeur de Dieu est une formidable régression vers la sauvagerie. Le sens du sacré est en effet le cœur de toute civilisation humaine. La présence d’une réalité sacrée engendre les sentiments de respect, les gestes de vénération. Les rites religieux sont la matrice de toutes les attitudes de politesse et de courtoisie humaine. » rappelle le Cardinal.
De leur côté, les morts ne sont plus honorés, voués à la cendre de l’oubli après passage express en funérarium. Ils ne sont pas de la famille des morts du monde d’avant, chanceux anciens, objets d’un digne respect, dormition puis linceul, poussière comme promesse de vie, de résurrection éternelle aussi, voyage vers le grand mystère. Les symboles d’avant sont jugés obsolètes par tous les esprits formatés de la sphère moderniste. Les résurgences du passé, si fécondes en sens soient-elles, sont antinomiques du progrès, selon la doxa du moment. Les vieillards du monde dit civilisé -contrairement à ce que l’on observe dans les civilisations africaine et asiatique- sont assimilés à des résidus inutiles, parqués dans des Ephad, ces structures de profit, abjects symboles d’un monde qui ne s’aime plus à force de se complaire dans le narcissisme. Les femmes -contrairement encore aux civilisations susnommées- sont avilies, érotisées jusqu’à l’immonde, réifiées en Occident décadent. Les idoles, les veaux d’or, les passions hédonistes, les eugénismes et transhumanismes ne servent à la fin qu’un seul maître : l’argent. Son synonyme est capitalisme, ou encore libéralisme-libertaire mais, quels que soient les qualificatifs pour le définir, il a su ravaler l’homme au rang de bête, à la dernière place, celle dévolue à la chose marchande monétisée, remplaçable, interchangeable.
Fulgurances à l’adresse des cœurs attiédis
Le lumineux Cardinal poursuit, exhorte et encourage ses frères du sacerdoce et de la vie religieuse : « Vous tous prêtres et religieux cachés et oubliés, vous que la société méprise parfois, vous qui êtes fidèles aux promesses de votre ordination, vous faites trembler les puissances de ce monde ! Vous leur rappelez que rien ne résiste à la force du don de votre vie pour la vérité. Votre présence est insupportable au prince du mensonge. Vous n’êtes pas les défenseurs d’une vérité abstraite ou d’un parti. Vous avez décidé de souffrir par amour pour la vérité, pour Jésus-Christ. Sans vous, chers frères prêtres et consacrés, l’humanité serait moins grande et moins belle. ».
Concernant le synode d’Amazonie qui se déroule en 2019 et qui apparaît à bien des égards expérimental et périlleux pour l’avenir de l’Église, Robert Sarah ne mâche pas ses mots : « Les habitants de l’Amazonie ont un besoin profond de prêtres qui ne se bornent pas à accomplir leur travail à horaires fixes avant de retourner en famille s’occuper de leurs enfants. Ils ont besoin d’hommes passionnés par Le Christ, brûlants de son feu, dévorés par le zèle des âmes. Que serais-je aujourd’hui si des missionnaires n’étaient pas venus vivre et mourir dans mon village de Guinée ? Aurais-je eu le désir d’être prêtre si l’on s’était contenté d’ordonner l’un des hommes du village ? L’Église serait-elle à ce point refroidie qu’il n’y ait pas parmi ses enfants suffisamment d’âmes magnanimes pour se lever et partir annoncer le Christ en Amazonie ? ».
Sur la tiédeur de notre temps qui est aussi celle des catholiques, il cite une nouvelle fois Bernanos qui houspille ces derniers, dans son Journal d’un curé de campagne : « Vous revendiquez d’être les pierres du Temple appelé Dieu, les concitoyens des Saints, les enfants du Père Céleste. Avouez que cela ne se voit pas toujours du premier coup ! ».
Sur l’attente d’une période meilleure : « Je l’ai dit souvent, je ne crains pas de le répéter. Le renouveau viendra des monastères. ».
En conclusion, et pour que nous saisissions le cap clair qu’il nous est donné de suivre, le Cardinal Sarah convoque une fois encore les mots de Georges Bernanos : « Qui prétend réformer l’Église par les mêmes moyens qu’on réforme une société temporelle non seulement échoue dans son entreprise, mais finit infailliblement par se trouver hors de l’Église […] On ne réforme les vices de l’Église qu’en prodiguant l’exemple de ses vertus les plus héroïques. Il est possible que Saint François d’Assise n’ait pas été moins révolté que Luther par la débauche et la simonie des prélats. Il n’a pas défié l’iniquité, il n’a pas tenté de lui faire front, il s’est jeté dans la pauvreté, il s’y est enfoncé le plus avant qu’il ait pu, avec les siens, comme dans la source de toute rémission, de toute pureté. Au lieu d’arracher à l’Église les biens mal acquis, il l’a comblée de trésors invisibles, et sous la douce main de ce mendiant le tas d’or et de luxure s’est mis à fleurir comme une haie d’avril. […] Ainsi l’Église n’a pas besoin de réformateurs, mais de saints. »
Tout est dit. Le monde attend le passage des saints, là où les saints passent Dieu passe avec eux. Ainsi le monde redécouvrira son Créateur puis, ce trésor qu’est la juste mesure des choses, l’humilité face à Dieu.
https://www.mauvaisenouvelle.fr/?article=livres-sarah-le-lumineux-cardinal--1439
Zamie- Enfant de Dieu
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Re: Du Cardinal Sarah
Merci Zamie.
Que Dieu bénisse le cardinal Sarah.
Que Dieu bénisse le cardinal Sarah.
Calex- Combat l'antechrist
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Re: Du Cardinal Sarah
@Zamie Merci de bien lire ceci :
https://www.atlantico.fr/decryptage/3570415/cardinal-robert-sarah--ceux-qui-veulent-m-opposer-au-pape-perdent-leur-temps-et-leurs-propos-ne-sont-que-le-paravent-qui-masque-leur-propre-opposition-au-saint-pere-
Cardinal Robert Sarah : “Ceux qui veulent m’opposer au Pape perdent leur temps et leurs propos ne sont que le paravent qui masque leur propre opposition au Saint-Père”
Alors qu’est publié son livre Le soir baisse et déjà le soir approche (Fayard), le Cardinal Robert Sarah aborde frontalement les crises auxquelles est confrontée l’Eglise. Scandales de pédophilie, crise des vocations, trouble théologique et moral, tensions entre progressistes et conservateurs, le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements (équivalent d’un ministère du Vatican) ne mâche pas ses mots. Deuxième et dernière partie.
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Avec Cardinal Robert Sarah, Jean-Sébastien Ferjou
Première partie de l'entretien : ICI
Cardinal Robert Sarah : Lorsque nous écoutons les informations, nous avons l’impression que le mal et les scandales inondent le monde. Nous sommes dans une situation que je qualifierai presque d'unique dans l'histoire. Bien sûr, le fait que les médias diffusent rapidement et à grande échelle ce qui se passe jusque dans les coins les plus reculés du monde accentue cette perception. Néanmoins, je pense que si on parcourt l'histoire, on se rend compte que ce que nous vivons aujourd'hui est véritablement inédit. Je ne suis pas le seul à le dire. Benoit XVI, juste avant son élection au Siège de Pierre, en 2005, avait dit que l'Occident traversait une crise qui ne s'est jamais vérifiée dans l’histoire de l’humanité.
Comme vous le soulignez dans votre question, dans mes échanges avec Nicolas Diat, je passe en revue les crises de l'Eglise : on a l'impression que celle-ci n'a plus de doctrine sûre, qu'elle n'a plus un enseignement moral sûr. L’enseignement de l’Eglise semble aujourd’hui se faner et devenir incertain et liquide. Croyons-nous encore que la Bible est révélée ? Notre attitude à l’égard de Dieu a profondément changé. Dans l’Eglise, Dieu est-il encore considéré comme une personne qui cherche à nouer une relation intime et personnelle avec chacun de nous ? Ou n’est-il plus qu’une idée, un être très lointain ? Le cœur de notre foi réside dans l'Incarnation de Dieu, qui est proche de nous. Nous pouvons le voir de nos yeux, le toucher de nos mains. Il y a Jésus-Christ, et le Père, qui dans la Très Sainte Trinité ne font qu’un avec le Saint-Esprit. Avons-nous encore vraiment cette foi pour laquelle tant de martyrs ont donné leur vie ?
La crise est aussi présente au niveau du sacerdoce. Incontestablement, il y a eu des moments dans l’histoire où la vie des prêtres n’était pas exemplaire. Leur vie ne rayonnait pas l’Evangile, ni la sainteté de Dieu. Et l’Eglise tolérait un véritable laisser-aller sur le plan moral. Mais il s’est toujours dressé des figures comme saint François d’Assise pour la redresser en optant pour la radicalité de l'Evangile, c’est-à-dire l'Evangile dans sa nudité et sa totalité. Il y a eu aussi le Curé d’Ars : un homme de prière et de pénitence, car le démon s’acharne contre le sacerdoce et, souvent, on ne peut le chasser, loin de nous, que par la prière, le jeûne et un profond désir et volonté de conversion. Mais, ce qui se passe aujourd’hui est incroyable. On est d’obligé de reconnaître le péché grave et horrible des prêtres pédophiles. Un peu partout, des hommes qui devaient faire grandir les enfants dans la dignité et dans leur relation à Dieu, sont maintenant accusés d’avoir corrompu et détruit non seulement leur annonce, mais aussi le plus précieux de leur vie. D’autres prêtres déclarent avec fierté qu'ils sont homosexuels et qu'ils veulent contracter un "mariage" avec leur ami. Des évêques, des cardinaux sont mis en cause pour des abus sexuels sur des mineurs. Jamais, je pense, on a vu une telle horreur et une telle concentration du mal dans l’Eglise. L'Eglise est marquée par une grande crise morale, très douloureuse.
L’Eglise est aussi marquée par une grande division au niveau de l’enseignement doctrinal et moral : un évêque dit une chose, un autre le contredit, une conférence épiscopale dit une chose, une autre dit le contraire… La confusion s’installe un peu partout, comme peut-être jamais auparavant.
On entend désormais souvent dire que le célibat des prêtres est une réalité inhumaine, insupportable, qui ne peut être assumée et vécue sereinement. Et en même temps, le prêtre prétend être configuré au Christ ! Car le prêtre n'est pas seulement un alter Christus, un autre Christ, mais il est surtout ipse Christus, c'est-à-dire le Christ lui-même. Le prêtre prononce les mêmes paroles que Jésus lorsqu'il dit "Ceci est mon corps, ceci est mon sang". Il est configuré et identifié au Christ. Il est la présence physique et le plongement du Mystère du Christ sur la terre. Prolonger le Chris, cela n’est pas compatible avec la réalité d’une vie conjugale. On ne peut pas prétendre s'identifier au Christ et en même temps prétendre dissocier le célibat du sacerdoce. Pourtant, un mouvement dans cette direction travaille l’Eglise de l’intérieur. Le synode sur l'Amazonie d’octobre prochain prévoit, semble-t-il, d’aborder la question de l'ordination sacerdotale d’hommes mariés, les viri probati. J’espère vivement que cela ne se produira pas, et que l’Autorité Supérieure, le Pape, n’autorisera jamais une telle rupture avec l’histoire récente de l’Eglise.
Oui, par manque de prêtres, dit-on. Sauf que nous n’avons jamais manqué de prêtres ! Jésus-Christ a ordonné douze prêtres... pour le monde entier ! Pas mille, deux mille, trois mille, mais douze. Au VII siècle, déjà, le pape saint Grégoire le Grand disait : « Le monde est remplie de prêtres, mais on rencontre rarement un ouvrier dans la moisson de Dieu ; nous acceptons bien la fonction sacerdotale, mais nous ne faisons pas le travail de cette fonction ». Le vrai problème n’est pas de se situer pas au niveau du nombre, mais sur le plan de la foi, de la décision de ressembler au Christ.
Les douze prêtres choisis par Jésus ont bouleversé le monde entier par la force de leur foi, par la puissance irrésistible de leur zèle brûlant d’annoncer l’Evangile, et par leur martyre. La question du nombre est donc pour moi un argument qui n'a pas de sens. Si chaque diocèse de l'Amérique Latine donnait un prêtre pour l'Amazonie, il ne manquerait pas de prêtres en Amazonie. Il faut mettre en œuvre la solidarité. Il existe un certain nombre de pays qui ont encore beaucoup de prêtres ; chacun d’entre eux pourrait en envoyer un ou deux, et tout irait bien. Le nombre trop restreint n’est donc qu’un alibi. En réalité, le démon se sert de cette revendication pour changer l’Eglise et ses ministres, pour les réduire à une dimension exclusivement terrestre, c’est-à-dire seulement humaine.
L'Eglise souffre de la tiédeur et de la mondanité du clergé, et donc d’un abandon sur des points essentiels de sa doctrine, des sacrements et de la morale.
Oui. On a cru qu'il fallait être dynamique, qu'il fallait à tout prix être actif, réaliser des projets plus ou moins sophistiqués, en bref d’être à l’image de notre société en perpétuel mouvement. En conséquence, on a abandonné Dieu, on a abandonné la prière, et certains prêtres sont devenus des « opérateurs sociaux ».
Bien sûr ! Car la prière est notre mission première. Le prêtre est fait pour se tenir constamment devant Dieu, pour être un pont entre Dieu et les hommes. Sa fonction primordiale, on l’oublie trop souvent, c'est la prière. Toute sa vie est une liturgie, un face à face avec Dieu. Après la prière, le prêtre doit également parler de Dieu, et donc annoncer l’Evangile du Salut. Mais avant de pouvoir parler de Dieu, il faut l’avoir rencontré personnellement dans le silence de la prière. Le prêtre doit faire comme le Christ, qui pendant trente ans n'a rien dit, mais a uniquement prié et travaillé de ses mains à Nazareth. Avant de commencer sa mission publique, Jésus s’est retiré quarante jours et quarante nuits dans le désert pour être uniquement, dans une intimité silencieuse, avec Dieu son Père. Et très souvent, lorsqu’il était avec ses disciples, il abandonnait la foule pour aller seul, dans le désert, et là, il priait pendant toute la nuit.
Sans la prière, on ne peut rien. On est semblable à un fleuve coupé de sa source. Certes, le fleuve peut continuer à couler abondamment et majestueusement pendant un certain temps, mais après quelques années, il sera à sec. De même, un arbre aux proportions gigantesques, grand et fort, s’il est coupé de ses racines, meurt. Il en va de même pour le prêtre qui ne prie plus. Il est comme un cadavre vivant. Il marche, il court çà et là, il s’agite, mais sans porter de fruits. Il est nuisible et comme un poison mortel pour les âmes.
Dans l'Eglise, mais aussi au niveau de la société, on assiste à des changements terribles, et vraiment horribles dans certains domaines.
Jésus a dit : « Ma doctrine n’est pas de moi, mais de Celui qui m’a envoyé. Si quelqu’un veut faire sa volonté, il reconnaîtra si ma doctrine est de Dieu ou si je parle de moi-même » (Jn 7, 16). Le Christ n'a pas enseigné sa propre doctrine, mais celle du Père. Il n'est pas venu pour contredire les pharisiens ou les grands prêtres. Son rôle était de proclamer la Parole de Dieu, d’enseigner la doctrine de son Père, et rien d’autre. Pour ma part, je n’ai pas fait le choix de combattre ou de contredire quelqu'un. Je désire et veux uniquement dire la parole que j'ai reçue des missionnaires, la Parole de Jésus, et transmettre l’enseignement de l’Eglise. Je ne désire nullement me battre ou m'opposer à quelqu'un. Toutefois, vous me dites qu’en parlant ainsi, je créerais des divisions… au contraire, je veux contribuer à unifier l’Eglise dans sa foi pour qu’elle vive dans l’amour et la communion. Enseigner la doctrine, être fidèle à l’enseignement intangible de l’Eglise, c’est contribuer à créer la communion et l’unité de l’Eglise. Il est triste de voir une famille divisée.
Tous ceux qui veulent m’opposer au Pape perdent leur temps et leurs énergies. Leurs propos sont du vent ou un paravent qui masque leur propre opposition au Saint-Père. Et, ici, je ne parle pas spécifiquement du Figaro. Affirmer que je m’oppose au Pape est à la fois injuste et malhonnête. On a l’impression que, de nos jours, il est interdit de réfléchir. Pourquoi veut-on interdire à un Africain de réfléchir à une question aussi grave et l’opposer au Pape ? Nous devons tous creuser et approfondir ce phénomène tragique des migrations, au lieu de nous opposer les uns aux autres. Ma réflexion sur les migrations présente dans mon livre : Le soir approche et déjà le jour baisse, publié le 20 mars 2019, date de plus d’un an. Pourquoi l’opposer à celle du Pape ! Chacun s’exprime avec ses propres mots tout en assumant ses propos et sa responsabilité devant Dieu. De toute façon, jamais l’Eglise ne peut coopérer à cette nouvelle forme d’esclavage, de mépris de la dignité humaine. L’Occident déstabilise les pays pleins de ressources minières, crée le chaos et les guerres par les armes qu’il fabrique et qu’il troque pour s’emparer par la force et la corruption des richesses de ces pays. On fait semblant de faire la charité et d’accueillir ceux dont on a démoli le pays et la stabilité. Dieu et l’histoire nous révéleront un jour, la vérité de ce phénomène tragique et inédit.
Je ne le crois pas. Le seul mal nécessaire, ou plutôt heureux, pour saint Augustin, est le péché originel, qui nous a valu le Sauveur. Je ne sais pas si Judas était nécessaire. Le Seigneur a tenu des propos extrêmement sévères à son sujet : « Le Fils de l’Homme s’en va selon qu’il est écrit de lui, mais malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’Homme est livré ! Mieux eût valu pour cet homme-là de ne pas naître » (Mt 26, 24). Ce qu'il a fait est horrible, parce qu’il avait été choisi par le Seigneur, et il avait donc été témoin de tout ce que Jésus avait fait. Il l'avait initié à la prière, dans la solitude, il avait reçu son enseignement, il lui avait ouvert le mystère du salut, mais Judas était fermé à cela. Ce qu'il aimait, c'était l'argent. Et saint Jean dit : "comme il tenait la bourse commune, il prenait pour lui ce que l’on y mettait". Je pense que Jésus a tout fait pour le sauver, même à Gethsémani, au Jardin des Oliviers. Le Seigneur lui a tendu encore la main en lui disant : "Mon ami, pourquoi es-tu là ? Ce que tu es venu faire, fais-le ".
Les grands prêtres auraient pu se saisir de Jésus en se servant de cette bande armée qu’eux-mêmes et les Anciens avaient envoyée. Ils auraient pu se passer de Judas. Celui-ci ne fut pas un mal nécessaire. Il reste que Jésus est très sévère à son égard.
Et il est vrai que, aujourd’hui, nous tous pouvons être des Judas, et aussi devenir des Pierre, celui qui a trahi par trois fois le Christ en disant : "Je ne connais pas cet homme". Nous le sommes lorsque nous renions Jésus, son Evangile, en voulant un Evangile « liquide », qui n’exige rien.
Bien sûr. Et la facilité nous éloigne de Jésus parce que le Fils de l'Homme n'avait même pas où reposer sa tête. Ceux qui l'ont suivi d’une manière radicale, comme Pierre ou Paul, ont tout abandonné, laissé leur métier, leur famille… Mais, aujourd'hui, la plupart d'entre nous recherche l'argent, le pouvoir, la facilité, etc... Nous sommes tous un peu comme Judas. Parce que ce qui nous intéresse, c'est notre tranquillité et notre confort. Alors on n’ose plus rien dire, on renonce à la radicalité de la foi, on la noie dans un langage marqué par l’ambiguïté et la confusion, un langage expurgé de toute conviction et de toute exigence, ce qui nous évite d’être attaqué, pour qu'on nous laisse tranquilles.
Je crois que Jésus a une parole très claire à ce sujet : "Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde". Ceux qui sont attachés au Christ sont obligés d'être dans le monde, mais ils ne sont pas du monde. Nous devons à la fois montrer cette séparation, mais dire aussi que nous sommes porteurs d’un message pour le monde, que nous avons une lumière à proposer à ce monde, celui d’aujourd’hui qui est plongé dans les ténèbres du péché et de l’ignorance. Nous devons être le sel et la lumière pour illuminer le monde et lui donner le goût de vivre.
Dans l'Ancien comme dans le Nouveau Testament, nous voyons que le monde marche dans les ténèbres. Nous, les chrétiens, nous sommes la "lumière du monde", nous sommes le "sel de la Terre". Donc, nous ne pouvons pas nous alignés sur le monde. Nous ne devons pas abandonner le monde mais le sauver, comme Jésus l'a fait. Nous rendons témoignage à la vérité en montrant que nous n’appartenons pas au monde. Nous sommes appelés à apporter la Lumière de Dieu, et donc conduire le monde vers Dieu, pour ne pas le laisser s’enfoncer dans son égoïsme, sa violence et ses ambitions. Même si le monde réalise parfois d’excellents projets. Toutefois, si ce que la personne humaine réalise est uniquement bon pour cette vie sur la terre, je ne pense pas qu'elle corresponde entièrement à sa vocation, qui est de vivre pleinement avec Dieu.
Mon intention est vraiment d'encourager les prêtres, qui sont souvent surchargés de travail, seuls et isolés. Quelquefois, ils ont même du mal à rencontrer leur évêque, ils sont dans une paroisse où les pratiquants sont peu nombreux, ce qui peut être décourageant. Je désire aussi encourager les évêques, dont la mission, aujourd’hui, est difficile, délicate, et requiert beaucoup d’amour, beaucoup de souffrances et de courage.
Aujourd'hui, il arrive que les prêtres soient pointés du doigt et qu’on leur dise : « tu es un pédophile », ou « tu es homosexuel ». La semaine dernière, un religieux est venu d'Assise pour me saluer. En se promenant sur l’une des places de Rome avec trois autres franciscains, ils se sont tous fait traiter de pédophiles par des personnes qui avaient croisé leur chemin. Il m'a dit : « Sans rancœur, ni énervement, nous les avons bénis ». De fait, se fâcher pour cela n’en vaut pas la peine. Toutefois, pour beaucoup de prêtres, il est difficile de réagir de cette manière, en bénissant ceux qui les insultent : soit ils ont honte, soit ils pleurent… J'ai vraiment voulu les aider à demeurer sereins en toutes circonstances.
On a chargé Jésus de tous les péchés du monde ; il les a portés sur son dos avec sa croix. C’est pourquoi, je dis à tous ces prêtres qui souffrent : vous aussi, vous êtes appelés à porter sur votre dos tous les péchés du monde, avec Jésus : ne vous étonnez pas si certains vous accusent de pédophilie, de vénalité, d’avidité et de soif de pouvoir, d’homosexualité (d’après certaines enquêtes récentes, tous, évêques et prêtres, nous serions homosexuels, ce qui est complètement absurde et diffamatoire !)…
Bien sûr. Mais vous savez, moi aussi j'ai été évêque diocésain. Et bien souvent, le dernier à savoir ce qui se passe dans son diocèse, c’est justement l'évêque. Pour de multiples raisons, on hésite à lui donner les informations qui blessent ou semblent se présenter comme des dénonciations.
Prenons le cas du Cardinal Barbarin. Je suis certain que ses actions n’étaient pas dictées par la volonté de cacher quelque chose, mais par la volonté de trouver une solution au très grave problème posé par un prêtre dont les actes sont absolument inacceptables. Ses prédécesseurs avaient certainement eux aussi cherché une solution. Mais pas selon les critères d’aujourd’hui. Il me semble qu’il ne faut pas juger la manière dont on résolvait hier ce genre de problèmes selon notre mentalité d'aujourd'hui.
Les statistiques prouvent que dans les familles, les cas de pédophilie sont encore pires. Et on ne dit rien à ce sujet. On ignore tout simplement le drame. Et personne ne le dénonce ! Etrange !
Je veux vraiment encourager les prêtres, et aussi les laïcs, qui sont également désemparés, et leur dire que l'Eglise n'est pas en crise. Ce ne sont que quelques membres de l’Eglise qui sont en crise. En effet, l'Eglise est sainte, sans tache, ni ride, immaculée. Elle est notre Mère, issue des mains de Dieu, intacte. Seuls certains de ses membres, parfois même haut placés dans la hiérarchie, ternissent le visage de leur Mère, la sainte Eglise.
Nous devons continuer à aimer l'Eglise, à nous comporter comme des enfants de notre Mère, la sainte Eglise. Il faut encourager les évêques, qui ont souvent peur aujourd'hui qu’on en vienne à découvrir quelque chose de gravement répréhensible dans leur diocèse, et que les médias s’acharnent à convaincre le public en affirmant : « Voilà ce que l’évêque a délibérément voulu vous cacher ».
Et je veux aussi leur dire que derrière ces diverses accusations, toutes les revendications ne sont pas justifiées. Certains ont le souci de la justice, et il est vrai que les membres de l’Eglise qui ont commis des fautes doivent répondre de leurs actes. Mais d’autres instrumentalisent les égarements d’une infime minorité dans le seul but de faire taire l'Eglise, de la contraindre à changer absolument et totalement sa doctrine et son enseignement moral. Mais la doctrine de l’Eglise n’est pas sa doctrine propre, c’est celle de Dieu. Et la doctrine de Dieu, personne au monde ne peut la modifier. Nous devons apprendre à vivre dans cette situation, c’est-à-dire à la fois que la justice soit rendue, sans pour autant ne rien céder sur la doctrine de l’Eglise. La Parole de l’Eglise n’est pas la sienne, mais celle de Dieu. Or, personne ne peut réduire Dieu au silence.
Je pense qu’il est à la fois inconvenant, injuste et incorrect de parler ainsi du Pape. Nous devons tous nous examiner à ce sujet. De toute façon, une personne est incapable à elle seule de dénaturer l'Eglise. Mais si nous tous, nous trahissons, nous falsifions la Parole de Dieu pour nous accommoder au monde l'Eglise, alors c'est beaucoup plus grave. On peut comprendre, tout en s’opposant radicalement, qu’un évêque ou un cardinal trahisse l'Eglise par ses paroles et son comportement. Toutefois, les apôtres étaient douze, et tous n’ont pas trahi, ni livré le Seigneur. Un seul, Judas, l’a livré, et un autre, Pierre, l’a trahi, lui qui a dit par trois fois : "Je ne connais pas cet homme".
Saint Jean se tenait au pied de la Croix avec la Vierge Marie. Voilà pourquoi j’estime que si, du fait de leurs comportements et de leurs paroles, des personnes haut placées dans la hiérarchie oublient ce qu'est l'Eglise, celle-ci n'est pas pour autant affaiblie. Saint Jean et la Vierge Marie étaient au pied de la Croix et beaucoup de femmes pieuses pleuraient non loin de la Croix, les autres avaient eu peur et s’étaient cachés. Il faut comprendre que l'âme humaine est marquée par la faiblesse et par la peur. Toutefois, on sait aussi que les Onze, après la résurrection de Jésus, ont repris courage. Ils ont publiquement annoncé le Seigneur et son Evangile. Que quelqu'un affaiblisse la doctrine ou l'enseignement de l'Eglise, cela relève de sa propre responsabilité. Mais nous devons savoir que personne ne peut dénaturer l'Eglise, car elle est le Corps mystique du Christ.
Ce sont uniquement ceux qui me connaissent par ouï-dire qui s’expriment de la sorte et cherchent à me poignarder dans le dos. Face à ces accusations ou ces soupçons à la fois injustes et fallacieux, je demeure serein. Ma réponse à votre question est donc claire : « Le Cardinal Sarah, un opposant au Pape ? Non, absolument pas, et cela vaut pour le passé, le présent et l’avenir. Quand j’ouvre la bouche ou quand j’écris, c’est pour dire ma foi en Jésus, ma fidélité à l’Evangile qui ne change pas d’un iota quelles que soient les circonstances, les périodes et les cultures.
C'est dangereux car cela revient à croire que l'Eglise est une réalité que nous avons nous-mêmes fabriquée, et que nous pourrions ou même devrions la changer et la transformer selon les circonstances, ou selon les votes ou l’opinion de la majorité. Mais l'Eglise ne nous appartient pas ! Elle nous vient de Dieu.
L’Evangile selon Saint Matthieu dit clairement : "Tu es Pierre, et sur cette Pierre, je bâtirai mon Eglise". Nous ne bâtissons pas nous-mêmes l’Eglise, et nous n’avons pas le pouvoir de la modifier. L’Eglise, c’est Jésus qui la construit. Elle est le roc que nous sommes tous en tant que baptisés, que tous nous devons être. La démocratie n'y a pas de place. Dans l'Eglise, ce n'est pas le peuple qui décide. C'est Dieu qui décide. Elle appartient à Dieu. En outre, vous voyez bien comment fonctionne la démocratie : trop souvent, ce sont en fait quelques personnes puissantes financièrement et politiquement, qui dirigent la société. Les autres sont laissés de côté, voire abandonnés, entraînés à leur insu vers des décisions ou des orientations désastreuses.
Oui, il y a des personnes intelligentes qui veulent moderniser ou perfectionner l’Eglise, perfectionner le christianisme, le rendre plus moderne. Mais, on ne peut pas moderniser ou perfectionner l’Eglise. Comme l’a écrit Charles Péguy : « C’est un peu comme si on voulait perfectionner le nord, la direction du nord. Le malin qui voudrait perfectionner le nord. Le gros malin (…) Le nord est naturellement fixe, le christianisme est naturellement fixe. Ainsi, les points fixes ont été donnés une fois pour toutes dans l’un et l’autre monde, dans le monde naturel et dans le monde surnaturel, dans le monde physique et dans le monde mystique. Et tout le travail, tout l’effort est ensuite au contraire de les garder, de les tenir, loin de les améliorer au contraire ». Nous n’avons pas à moderniser l’Eglise. Elle est conduite par la puissance de l’Esprit Saint et sous la vigilance de Pierre. Et ce que Dieu fait est saint, pur et parfaitement ordonné à réaliser son plan de Salut pour l’humanité. Je ne peux pas entreprendre une quelconque transformation de l’Eglise sans consulter Dieu, ce que je fais dans la prière. Dans la prière, je sais que ce n'est plus mon œuvre, que je dois suivre les inspirations venant de Dieu, et que celles-ci ne sont pas seulement celles d'aujourd'hui, mais de l'Eglise depuis son origine jusqu'à nos jours. L'Eglise n'a jamais été gouvernée par un peuple, mais par une hiérarchie. Au début, elle était constituée des douze apôtres dont l’un était Pierre. La seule et véritable transformation possible de l’Eglise, c’est qu’elle s’applique à mettre en pratique la Volonté de Dieu. Et la Volonté de Dieu, c’est que nous devenions des saints. Ainsi, dans l’Eglise, tous, qu’ils appartiennent à la hiérarchie ou qu’ils soient régis par elle, sont appelés à la sainteté (cf. Lumen Gentium, 39). C’est Dieu qui transforme l’Eglise en faisant de nous des saints comme lui-même est Saint. Comme l’écrit Georges Bernanos : « Mais sans les saints, moi je vous le dis, la chrétienté ne serait qu’un gigantesque amas de locomotives renversées, de wagons incendiés, de rails tordus et de ferrailles achevant de se rouiller sous la pluie. Aucun train ne circulerait plus depuis longtemps sur les voies envahies par l’herbe ».
Il y a déjà eu des schismes, parce que certains, se croyant inspirés, ont voulu orienter l'Eglise dans une autre direction que celle qui lui avait été assignée par le Christ. Saint François d’Assise a vécu à une époque où la hiérarchie de l’Eglise et le clergé, mais aussi les fidèles chrétiens n’étaient pas des modèles de perfection. La mauvaise conduite d’un grand nombre donnait l’impression que l’Eglise était en train de s’écrouler. Et c’est à ce moment précis que le Christ a demandé à saint François de reconstruire son Eglise. Alors, pour entreprendre cette œuvre magnifique de reconstruction, saint François a opté pour la radicalité de l’Evangile vécu dans le quotidien de son existence.
François a d'abord cru qu'il fallait reconstruire la petite église en ruines de Saint-Damien à Assise, mais il s'agissait en réalité de l'Eglise universelle. Saint François aurait pu concevoir la réforme de l’Eglise à la manière de Luther, en sortant de l’Eglise et en la critiquant sévèrement, en abandonnant les sacrements qui sont des sources de grâces et en s’opposant au Pape. Il était tout autant scandalisé que Luther par les mœurs dépravées du clergé. Mais il a choisi de réformer l’Eglise en réformant sa propre vie, en se convertissant, en priant et en jeûnant, et en s’abandonnant totalement au Christ. Il a voulu ressembler absolument à Jésus, et le Seigneur l’a pris au mot en le marquant des mêmes stigmates, c’est-à-dire de ses plaies et des souffrances de sa Passion. On ne réforme l’Eglise qu’en souffrant avec le Christ et en mourant avec lui et pour lui.
Cette phrase ne doit pas être isolée de son contexte. Il s’agit d’une longue catéchèse que l'Eglise a assumée avant de parvenir à cette étape qu’exprime cette phrase : "Reste avec nous, car le soir approche et le jour baisse". Je dirais que, dans la situation actuelle, nous avons l'impression, comme les disciples d'Emmaüs, que l’espérance a disparu comme un brasier dont il ne resterait que les cendres. L’épisode des disciples d’Emmaüs a lieu le soir de Pâques ; trois jours avant, le Christ avait été crucifié, il était mort, et il avait été enterré. Il semblait alors que toute espérance était vaine. C’est pourquoi les disciples d’Emmaüs, saisis par le découragement, éprouvaient une grande tristesse, et retournaient chez eux pour reprendre leur vie ordinaire comme si Jésus n’avait jamais existé.
Aujourd’hui, le Seigneur nous demande à nous aussi pourquoi nous sommes tristes. Il semble avoir disparu. De fait, Jésus n’est plus au centre de notre vie. Nous vivons comme si Jésus n’avait jamais existé. Sa parole n’oriente plus notre vie, notre travail, nos familles.
Selon Saint-Luc, les disciples d’Emmaüs dirent à l’homme qui leur demandait pourquoi ils éraient tristes : « Vous ne savez donc pas ce qui s'est passé à Jérusalem ? Celui que nous considérions comme le Messie, ils l'ont tué, il est enterré depuis trois jours, et nous avons décidé de rentrer chez nous ». Alors, Jésus ouvrit leur esprit au sens des Ecritures, et à partir de l'Ancien Testament, il leur expliqua ce que les prophètes avaient annoncé. Nous aussi nous devons aujourd'hui reprendre cette catéchèse. Nous devons redécouvrir l'enseignement de l'Eglise. C’est là que le Christ se rend présent et révèle tout de lui-même.
Jésus a révélé à ses disciples que le Messie devait souffrir pour le Salut de l'humanité. En effet, quand on aime, on souffre. Il n'y a pas d'amour sans souffrance. La plus grande preuve d'amour, c'est de mourir pour les autres. Et le Messie, qui aime tous les hommes, a vécu jusqu’au bout cet amour suprême, celui de la Rédemption.
Tandis que Jésus expliquait le sens des Saintes Ecritures en marchant à leurs côtés, les deux disciples l'écoutaient. Ils arrivèrent dans un village appelé Emmaüs. Jésus fit semblant de continuer sa route, mais les deux disciples lui demandèrent de rester avec eux, car il se faisait tard. Il accepta leur invitation. Et là, alors qu’il étaient à table, il répéta les gestes de la sainte Cène du Jeudi Saint : la très Sainte Eucharistie. Il prit le pain, le bénit, le rompit et le leur donna. Les disciples le reconnurent, mais il disparut à leurs yeux.
Nous avons tellement altéré l'Eucharistie, tellement défiguré la liturgie eucharistique, qu’elle est devenue trop souvent une sorte de spectacle, du théâtre, du folklore. On va même jusqu’à faire participer des personnes âgées, depuis une maison de retraite, à la messe des Rameaux en réalité virtuelle. Il n’y a donc aucun prêtre pour leur donner la joie d’une messe célébrée avec elles et pour elles, pour les préparer à cette rencontre non pas virtuelle, mais réelle avec Dieu. Si nous ne retrouvons pas l'enseignement de Jésus, de l'Ancien au Nouveau Testament, si nous ne recommençons pas à célébrer correctement et dignement la Sainte Eucharistie, nous n’avons aucune espérance de rencontrer de nouveau Jésus, de le reconnaître, et de sentir notre cœur brûler d’amour pour lui et pour notre mission d’évangélisation.
Il faut que nous soyons comme les disciples d’Emmaüs, dont le cœur brûlait de l'enseignement de Jésus, que nous ne nous arrêtions pas pour nous reposer, mais que nous retournions le soir-même à Jérusalem pour recréer la communauté ecclésiale, pour reconstruire l’Eglise. Lorsqu’ils arrivèrent, ils dirent qu’ils avaient vu le Seigneur. Ceux qui les reçurent leur dirent qu'à Jérusalem aussi on avait vu le Seigneur ressuscité. Notre problème essentiel est que nous avons abandonné l'enseignement, que nous avons abandonné la liturgie. Il y a un adage qui dit: lex orandi, lex credendi : on croit de la même façon qu'on prie. En essayant de dissocier ces deux éléments, on provoque la crise de la foi, et aussi le désespoir dont nous souffrons à notre époque. En abîmant la liturgie et en dénaturant la doctrine, nous provoquons une terrible crise de l’Eglise et une grande désespérance du monde.
"Dieu s'occupe de nous en réalité. Il pense à nous en chaque instant et il donne des directives parfois très précises. Ses élans d'amour qui affluent dans nos poitrines jusqu'à nous couper le souffle, ses illuminations, ses extases inexplicables si on considère notre nature biologique, notre statut de simple primate, sont des signes extrêmement clairs. Et je comprends aujourd'hui le point de vue du Christ, son agacement répété devant l'endurcissement des cœurs. Ils ont tous les signes, et ils n'en tiennent pas compte. Est-ce qu'il faut vraiment, en supplément, que je donne ma vie pour ces minables ? Est-ce qu'il faut vraiment être à ce point explicite ? Il semblerait que oui."
Il est évident que Dieu ne nous abandonne pas, qu'il est toujours avec nous, qu'il nous envoie des signes, qu'il nous parle. Ce que dit Michel Houellebecq est tout à fait vrai et peut être compris selon une acception catholique. Nous sommes les créatures de Dieu, des enfants bien-aimés de Dieu. Dieu nous aime comme un père. Et il utilise des moyens qui peuvent nous paraître étranges, pour nous parler, nous révéler des vérités, expliciter ce qu'il nous demande, veut et attend de nous. Mais nous sommes souvent aveugles. Nous avons des yeux, mais nous ne voyons pas. Nous avons des oreilles, mais nous n'entendons pas. Nous préférons prendre des antidépresseurs pour nous sentir moins seuls, mais nous ignorons l’amour de Dieu qui est déjà présent dans nos cœurs, sa présence si tendre et si attentive à nos souffrances, à l’image de celui que vous avez cité, Michel Houellebecq, qui a encore ce pas décisif à franchir, avec la grâce de Dieu. Faut-il mieux expliquer cet Amour ? Pourtant, tout est dit dans la Bible et la vie des saints.
Il faut que l'homme redécouvre que, lorsqu’il adore et reçoit la Sainte Eucharistie, il touche le Christ lui-même. Lorsqu'il boit le Sang de l'Eucharistie, il boit le Christ. Et lorsqu'il contemple et adore l'Eucharistie, il contemple et adore Dieu.
Telle est notre foi. Dieu reste constamment avec nous. Il est là, il nous parle par les Saintes Ecritures et dans l'Eucharistie.
Les exemples de témoins du Christ existent. Citons les apôtres, les saints martyrs des premiers siècles. Citons le pape saint Jean-Paul II, qui croyait profondément, réellement en l'Eucharistie : on le vit toujours se mettre à genoux devant la présence réelle, même quand sa santé était tellement dégradée qu’on était obligé de le soulever pour qu’il s’agenouille, et le relever car il n’était plus capable d’aucun mouvement autonome. Sainte Mère Teresa de Calcutta disait qu'elle n’aurait pas été capable de s'occuper des pauvres si elle n'avait pas eu cette relation quotidienne avec l'Eucharistie. Je suis heureux aussi de citer le saint Padre Pio, saint Josemaría Escrivá dont les vies étaient totalement envahies et possédées par Dieu. Ils rayonnaient la lumière et la sainteté de Dieu. Bien sûr, il faudrait que cet exemple vienne aussi de nous, les prêtres, et de nous, les évêques et les cardinaux. Toutefois, je peux vous assurer qu’il existe des milliers de Jean-Paul II et de Mère Teresa parmi les chrétiens, en particulier les petits et les âmes consacrées.
Il faut que nous soyons des hommes de prière, que nous mettions notre confiance en Jésus, en Dieu, et non pas dans nos œuvres ou dans nos capacités personnelles. Aujourd’hui, nous sommes immergés dans le pélagianisme. La grâce ne compte plus : seules importent nos œuvres, notre intelligence, nos capacités. Alors que Jésus a dit : "sans moi, vous ne pouvez rien faire".
C'est pourquoi Jésus a toujours insisté sur ce point : nous devons vivre constamment dans la prière. Sans ce lien intime avec Dieu, sans cette relation personnelle avec lui, sans ce cœur à cœur avec Jésus, nous ne sommes rien. Nous, les prêtres, nous devons constamment reposer notre tête sur le Cœur de Jésus, dans la prière. C’est seulement ainsi que nous pouvons changer l'Eglise, la rendre plus lumineuse, plus apte à porter le Salut au monde entier.
https://www.atlantico.fr/decryptage/3570415/cardinal-robert-sarah--ceux-qui-veulent-m-opposer-au-pape-perdent-leur-temps-et-leurs-propos-ne-sont-que-le-paravent-qui-masque-leur-propre-opposition-au-saint-pere-
Cardinal Robert Sarah : “Ceux qui veulent m’opposer au Pape perdent leur temps et leurs propos ne sont que le paravent qui masque leur propre opposition au Saint-Père”
Alors qu’est publié son livre Le soir baisse et déjà le soir approche (Fayard), le Cardinal Robert Sarah aborde frontalement les crises auxquelles est confrontée l’Eglise. Scandales de pédophilie, crise des vocations, trouble théologique et moral, tensions entre progressistes et conservateurs, le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements (équivalent d’un ministère du Vatican) ne mâche pas ses mots. Deuxième et dernière partie.
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Avec Cardinal Robert Sarah, Jean-Sébastien Ferjou
Première partie de l'entretien : ICI
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Ouverture dans 3
Jean-Sébastien Ferjou : Eminence, vous écrivez dans votre livre que notre monde va mal et vous décrivez beaucoup de crises : que ce soit les crises qui concernent l'Eglise elle-même, la crise du sacerdoce, la crise de la théologie morale, la crise du célibat, mais aussi les crises de l'Occident, de l'homme occidental… D’où vient ce mal qui nous ronge ?
Cardinal Robert Sarah : Lorsque nous écoutons les informations, nous avons l’impression que le mal et les scandales inondent le monde. Nous sommes dans une situation que je qualifierai presque d'unique dans l'histoire. Bien sûr, le fait que les médias diffusent rapidement et à grande échelle ce qui se passe jusque dans les coins les plus reculés du monde accentue cette perception. Néanmoins, je pense que si on parcourt l'histoire, on se rend compte que ce que nous vivons aujourd'hui est véritablement inédit. Je ne suis pas le seul à le dire. Benoit XVI, juste avant son élection au Siège de Pierre, en 2005, avait dit que l'Occident traversait une crise qui ne s'est jamais vérifiée dans l’histoire de l’humanité.
Comme vous le soulignez dans votre question, dans mes échanges avec Nicolas Diat, je passe en revue les crises de l'Eglise : on a l'impression que celle-ci n'a plus de doctrine sûre, qu'elle n'a plus un enseignement moral sûr. L’enseignement de l’Eglise semble aujourd’hui se faner et devenir incertain et liquide. Croyons-nous encore que la Bible est révélée ? Notre attitude à l’égard de Dieu a profondément changé. Dans l’Eglise, Dieu est-il encore considéré comme une personne qui cherche à nouer une relation intime et personnelle avec chacun de nous ? Ou n’est-il plus qu’une idée, un être très lointain ? Le cœur de notre foi réside dans l'Incarnation de Dieu, qui est proche de nous. Nous pouvons le voir de nos yeux, le toucher de nos mains. Il y a Jésus-Christ, et le Père, qui dans la Très Sainte Trinité ne font qu’un avec le Saint-Esprit. Avons-nous encore vraiment cette foi pour laquelle tant de martyrs ont donné leur vie ?
La crise est aussi présente au niveau du sacerdoce. Incontestablement, il y a eu des moments dans l’histoire où la vie des prêtres n’était pas exemplaire. Leur vie ne rayonnait pas l’Evangile, ni la sainteté de Dieu. Et l’Eglise tolérait un véritable laisser-aller sur le plan moral. Mais il s’est toujours dressé des figures comme saint François d’Assise pour la redresser en optant pour la radicalité de l'Evangile, c’est-à-dire l'Evangile dans sa nudité et sa totalité. Il y a eu aussi le Curé d’Ars : un homme de prière et de pénitence, car le démon s’acharne contre le sacerdoce et, souvent, on ne peut le chasser, loin de nous, que par la prière, le jeûne et un profond désir et volonté de conversion. Mais, ce qui se passe aujourd’hui est incroyable. On est d’obligé de reconnaître le péché grave et horrible des prêtres pédophiles. Un peu partout, des hommes qui devaient faire grandir les enfants dans la dignité et dans leur relation à Dieu, sont maintenant accusés d’avoir corrompu et détruit non seulement leur annonce, mais aussi le plus précieux de leur vie. D’autres prêtres déclarent avec fierté qu'ils sont homosexuels et qu'ils veulent contracter un "mariage" avec leur ami. Des évêques, des cardinaux sont mis en cause pour des abus sexuels sur des mineurs. Jamais, je pense, on a vu une telle horreur et une telle concentration du mal dans l’Eglise. L'Eglise est marquée par une grande crise morale, très douloureuse.
L’Eglise est aussi marquée par une grande division au niveau de l’enseignement doctrinal et moral : un évêque dit une chose, un autre le contredit, une conférence épiscopale dit une chose, une autre dit le contraire… La confusion s’installe un peu partout, comme peut-être jamais auparavant.
On entend désormais souvent dire que le célibat des prêtres est une réalité inhumaine, insupportable, qui ne peut être assumée et vécue sereinement. Et en même temps, le prêtre prétend être configuré au Christ ! Car le prêtre n'est pas seulement un alter Christus, un autre Christ, mais il est surtout ipse Christus, c'est-à-dire le Christ lui-même. Le prêtre prononce les mêmes paroles que Jésus lorsqu'il dit "Ceci est mon corps, ceci est mon sang". Il est configuré et identifié au Christ. Il est la présence physique et le plongement du Mystère du Christ sur la terre. Prolonger le Chris, cela n’est pas compatible avec la réalité d’une vie conjugale. On ne peut pas prétendre s'identifier au Christ et en même temps prétendre dissocier le célibat du sacerdoce. Pourtant, un mouvement dans cette direction travaille l’Eglise de l’intérieur. Le synode sur l'Amazonie d’octobre prochain prévoit, semble-t-il, d’aborder la question de l'ordination sacerdotale d’hommes mariés, les viri probati. J’espère vivement que cela ne se produira pas, et que l’Autorité Supérieure, le Pape, n’autorisera jamais une telle rupture avec l’histoire récente de l’Eglise.
Si le synode envisage de le faire, est-ce par volonté de faire évoluer le sens du sacerdoce ou plus prosaïquement par manque de prêtres…
Oui, par manque de prêtres, dit-on. Sauf que nous n’avons jamais manqué de prêtres ! Jésus-Christ a ordonné douze prêtres... pour le monde entier ! Pas mille, deux mille, trois mille, mais douze. Au VII siècle, déjà, le pape saint Grégoire le Grand disait : « Le monde est remplie de prêtres, mais on rencontre rarement un ouvrier dans la moisson de Dieu ; nous acceptons bien la fonction sacerdotale, mais nous ne faisons pas le travail de cette fonction ». Le vrai problème n’est pas de se situer pas au niveau du nombre, mais sur le plan de la foi, de la décision de ressembler au Christ.
Les douze prêtres choisis par Jésus ont bouleversé le monde entier par la force de leur foi, par la puissance irrésistible de leur zèle brûlant d’annoncer l’Evangile, et par leur martyre. La question du nombre est donc pour moi un argument qui n'a pas de sens. Si chaque diocèse de l'Amérique Latine donnait un prêtre pour l'Amazonie, il ne manquerait pas de prêtres en Amazonie. Il faut mettre en œuvre la solidarité. Il existe un certain nombre de pays qui ont encore beaucoup de prêtres ; chacun d’entre eux pourrait en envoyer un ou deux, et tout irait bien. Le nombre trop restreint n’est donc qu’un alibi. En réalité, le démon se sert de cette revendication pour changer l’Eglise et ses ministres, pour les réduire à une dimension exclusivement terrestre, c’est-à-dire seulement humaine.
L'Eglise souffre de la tiédeur et de la mondanité du clergé, et donc d’un abandon sur des points essentiels de sa doctrine, des sacrements et de la morale.
Dans le livre, vous expliquez que ces abandons sont notamment attribuables au fait qu’une partie de l'Eglise s'est beaucoup adonnée à l'activisme social et que cela l’a amenée à renoncer à la radicalité de la foi…
Oui. On a cru qu'il fallait être dynamique, qu'il fallait à tout prix être actif, réaliser des projets plus ou moins sophistiqués, en bref d’être à l’image de notre société en perpétuel mouvement. En conséquence, on a abandonné Dieu, on a abandonné la prière, et certains prêtres sont devenus des « opérateurs sociaux ».
Vous insistez beaucoup sur la prière…
Bien sûr ! Car la prière est notre mission première. Le prêtre est fait pour se tenir constamment devant Dieu, pour être un pont entre Dieu et les hommes. Sa fonction primordiale, on l’oublie trop souvent, c'est la prière. Toute sa vie est une liturgie, un face à face avec Dieu. Après la prière, le prêtre doit également parler de Dieu, et donc annoncer l’Evangile du Salut. Mais avant de pouvoir parler de Dieu, il faut l’avoir rencontré personnellement dans le silence de la prière. Le prêtre doit faire comme le Christ, qui pendant trente ans n'a rien dit, mais a uniquement prié et travaillé de ses mains à Nazareth. Avant de commencer sa mission publique, Jésus s’est retiré quarante jours et quarante nuits dans le désert pour être uniquement, dans une intimité silencieuse, avec Dieu son Père. Et très souvent, lorsqu’il était avec ses disciples, il abandonnait la foule pour aller seul, dans le désert, et là, il priait pendant toute la nuit.
Sans la prière, on ne peut rien. On est semblable à un fleuve coupé de sa source. Certes, le fleuve peut continuer à couler abondamment et majestueusement pendant un certain temps, mais après quelques années, il sera à sec. De même, un arbre aux proportions gigantesques, grand et fort, s’il est coupé de ses racines, meurt. Il en va de même pour le prêtre qui ne prie plus. Il est comme un cadavre vivant. Il marche, il court çà et là, il s’agite, mais sans porter de fruits. Il est nuisible et comme un poison mortel pour les âmes.
Dans l'Eglise, mais aussi au niveau de la société, on assiste à des changements terribles, et vraiment horribles dans certains domaines.
Ce qui est frappant dans votre livre, c’est que vous vous astreignez à une ligne de crête, à un propos en tension mais pas en contradiction : vous dénoncez sans ambigüités les dérives de l’Eglise mais vous dites aussi qu'il ne faut pas céder au démon de la division, que la division dans l'Eglise est l'œuvre du diable. Comment réussir à porter une parole forte, qui puisse réveiller les consciences, sans aller jusqu'à tomber dans les luttes politiques ?
Jésus a dit : « Ma doctrine n’est pas de moi, mais de Celui qui m’a envoyé. Si quelqu’un veut faire sa volonté, il reconnaîtra si ma doctrine est de Dieu ou si je parle de moi-même » (Jn 7, 16). Le Christ n'a pas enseigné sa propre doctrine, mais celle du Père. Il n'est pas venu pour contredire les pharisiens ou les grands prêtres. Son rôle était de proclamer la Parole de Dieu, d’enseigner la doctrine de son Père, et rien d’autre. Pour ma part, je n’ai pas fait le choix de combattre ou de contredire quelqu'un. Je désire et veux uniquement dire la parole que j'ai reçue des missionnaires, la Parole de Jésus, et transmettre l’enseignement de l’Eglise. Je ne désire nullement me battre ou m'opposer à quelqu'un. Toutefois, vous me dites qu’en parlant ainsi, je créerais des divisions… au contraire, je veux contribuer à unifier l’Eglise dans sa foi pour qu’elle vive dans l’amour et la communion. Enseigner la doctrine, être fidèle à l’enseignement intangible de l’Eglise, c’est contribuer à créer la communion et l’unité de l’Eglise. Il est triste de voir une famille divisée.
Non, je vous demandais simplement comment tenir une position difficile. Un article du Figaro paru la semaine passée rebondissait sur vos propos sur l’immigration ou sur l’identité de l’Occident, très éloignés dans l’esprit de ceux tenus par le Pape lors de son voyage au Maroc, pour vous présenter comme un opposant à François. Cela correspond-il à une forme de réalité ?
Tous ceux qui veulent m’opposer au Pape perdent leur temps et leurs énergies. Leurs propos sont du vent ou un paravent qui masque leur propre opposition au Saint-Père. Et, ici, je ne parle pas spécifiquement du Figaro. Affirmer que je m’oppose au Pape est à la fois injuste et malhonnête. On a l’impression que, de nos jours, il est interdit de réfléchir. Pourquoi veut-on interdire à un Africain de réfléchir à une question aussi grave et l’opposer au Pape ? Nous devons tous creuser et approfondir ce phénomène tragique des migrations, au lieu de nous opposer les uns aux autres. Ma réflexion sur les migrations présente dans mon livre : Le soir approche et déjà le jour baisse, publié le 20 mars 2019, date de plus d’un an. Pourquoi l’opposer à celle du Pape ! Chacun s’exprime avec ses propres mots tout en assumant ses propos et sa responsabilité devant Dieu. De toute façon, jamais l’Eglise ne peut coopérer à cette nouvelle forme d’esclavage, de mépris de la dignité humaine. L’Occident déstabilise les pays pleins de ressources minières, crée le chaos et les guerres par les armes qu’il fabrique et qu’il troque pour s’emparer par la force et la corruption des richesses de ces pays. On fait semblant de faire la charité et d’accueillir ceux dont on a démoli le pays et la stabilité. Dieu et l’histoire nous révéleront un jour, la vérité de ce phénomène tragique et inédit.
Le livre s'ouvre sur le mystère de Judas et de la trahison. Certains considèrent que Judas était une sorte de mal nécessaire pour que le Seigneur souffre et offre sa passion aux hommes. Diriez-vous qu'aujourd'hui, certains –au sein de l’Eglise- seraient des sortes de Judas : des traîtres qui lui causent un grand tort mais dont la trahison pourrait provoquer le choc qui lui permette de se sauver ?
Je ne le crois pas. Le seul mal nécessaire, ou plutôt heureux, pour saint Augustin, est le péché originel, qui nous a valu le Sauveur. Je ne sais pas si Judas était nécessaire. Le Seigneur a tenu des propos extrêmement sévères à son sujet : « Le Fils de l’Homme s’en va selon qu’il est écrit de lui, mais malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’Homme est livré ! Mieux eût valu pour cet homme-là de ne pas naître » (Mt 26, 24). Ce qu'il a fait est horrible, parce qu’il avait été choisi par le Seigneur, et il avait donc été témoin de tout ce que Jésus avait fait. Il l'avait initié à la prière, dans la solitude, il avait reçu son enseignement, il lui avait ouvert le mystère du salut, mais Judas était fermé à cela. Ce qu'il aimait, c'était l'argent. Et saint Jean dit : "comme il tenait la bourse commune, il prenait pour lui ce que l’on y mettait". Je pense que Jésus a tout fait pour le sauver, même à Gethsémani, au Jardin des Oliviers. Le Seigneur lui a tendu encore la main en lui disant : "Mon ami, pourquoi es-tu là ? Ce que tu es venu faire, fais-le ".
Les grands prêtres auraient pu se saisir de Jésus en se servant de cette bande armée qu’eux-mêmes et les Anciens avaient envoyée. Ils auraient pu se passer de Judas. Celui-ci ne fut pas un mal nécessaire. Il reste que Jésus est très sévère à son égard.
Et il est vrai que, aujourd’hui, nous tous pouvons être des Judas, et aussi devenir des Pierre, celui qui a trahi par trois fois le Christ en disant : "Je ne connais pas cet homme". Nous le sommes lorsque nous renions Jésus, son Evangile, en voulant un Evangile « liquide », qui n’exige rien.
Vous dites que l'Eglise a trop souvent cédé à la commodité.
Bien sûr. Et la facilité nous éloigne de Jésus parce que le Fils de l'Homme n'avait même pas où reposer sa tête. Ceux qui l'ont suivi d’une manière radicale, comme Pierre ou Paul, ont tout abandonné, laissé leur métier, leur famille… Mais, aujourd'hui, la plupart d'entre nous recherche l'argent, le pouvoir, la facilité, etc... Nous sommes tous un peu comme Judas. Parce que ce qui nous intéresse, c'est notre tranquillité et notre confort. Alors on n’ose plus rien dire, on renonce à la radicalité de la foi, on la noie dans un langage marqué par l’ambiguïté et la confusion, un langage expurgé de toute conviction et de toute exigence, ce qui nous évite d’être attaqué, pour qu'on nous laisse tranquilles.
Justement, les évêques de France se réunissaient il y a quelques jours. Dans votre livre, vous écrivez que « ni les embrassades ni le ghetto ne peuvent résoudre durablement pour le chrétien le problème du monde moderne ». Diriez-vous que certains évêques ont cédé à l'une ou l'autre des tentations que vous évoquiez – celle d'une trop grande facilité à embrasser le monde tel qu’il est ou celle du repli en ne cherchant plus à donner l'exemple de la sainteté ?
Je crois que Jésus a une parole très claire à ce sujet : "Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde". Ceux qui sont attachés au Christ sont obligés d'être dans le monde, mais ils ne sont pas du monde. Nous devons à la fois montrer cette séparation, mais dire aussi que nous sommes porteurs d’un message pour le monde, que nous avons une lumière à proposer à ce monde, celui d’aujourd’hui qui est plongé dans les ténèbres du péché et de l’ignorance. Nous devons être le sel et la lumière pour illuminer le monde et lui donner le goût de vivre.
Dans l'Ancien comme dans le Nouveau Testament, nous voyons que le monde marche dans les ténèbres. Nous, les chrétiens, nous sommes la "lumière du monde", nous sommes le "sel de la Terre". Donc, nous ne pouvons pas nous alignés sur le monde. Nous ne devons pas abandonner le monde mais le sauver, comme Jésus l'a fait. Nous rendons témoignage à la vérité en montrant que nous n’appartenons pas au monde. Nous sommes appelés à apporter la Lumière de Dieu, et donc conduire le monde vers Dieu, pour ne pas le laisser s’enfoncer dans son égoïsme, sa violence et ses ambitions. Même si le monde réalise parfois d’excellents projets. Toutefois, si ce que la personne humaine réalise est uniquement bon pour cette vie sur la terre, je ne pense pas qu'elle corresponde entièrement à sa vocation, qui est de vivre pleinement avec Dieu.
Vous dites que ce livre a vocation à réconcilier les chrétiens et les prêtres fidèles, ceux qui n'ont pas perdu de vue le message mais ont pu être décontenancés par les évolutions de ces dernières décennies. Trouvez-vous que le Pape ou d'autres prélats se soient parfois détournés de leur mission et de la fidélité à cette parole vraie ?
Mon intention est vraiment d'encourager les prêtres, qui sont souvent surchargés de travail, seuls et isolés. Quelquefois, ils ont même du mal à rencontrer leur évêque, ils sont dans une paroisse où les pratiquants sont peu nombreux, ce qui peut être décourageant. Je désire aussi encourager les évêques, dont la mission, aujourd’hui, est difficile, délicate, et requiert beaucoup d’amour, beaucoup de souffrances et de courage.
Aujourd'hui, il arrive que les prêtres soient pointés du doigt et qu’on leur dise : « tu es un pédophile », ou « tu es homosexuel ». La semaine dernière, un religieux est venu d'Assise pour me saluer. En se promenant sur l’une des places de Rome avec trois autres franciscains, ils se sont tous fait traiter de pédophiles par des personnes qui avaient croisé leur chemin. Il m'a dit : « Sans rancœur, ni énervement, nous les avons bénis ». De fait, se fâcher pour cela n’en vaut pas la peine. Toutefois, pour beaucoup de prêtres, il est difficile de réagir de cette manière, en bénissant ceux qui les insultent : soit ils ont honte, soit ils pleurent… J'ai vraiment voulu les aider à demeurer sereins en toutes circonstances.
On a chargé Jésus de tous les péchés du monde ; il les a portés sur son dos avec sa croix. C’est pourquoi, je dis à tous ces prêtres qui souffrent : vous aussi, vous êtes appelés à porter sur votre dos tous les péchés du monde, avec Jésus : ne vous étonnez pas si certains vous accusent de pédophilie, de vénalité, d’avidité et de soif de pouvoir, d’homosexualité (d’après certaines enquêtes récentes, tous, évêques et prêtres, nous serions homosexuels, ce qui est complètement absurde et diffamatoire !)…
Un péché qu’on peut difficilement assimiler à une accusation gratuite n’est-il pas la non-dénonciation des crimes commis par quelques-uns au sein de l’Eglise ?
Bien sûr. Mais vous savez, moi aussi j'ai été évêque diocésain. Et bien souvent, le dernier à savoir ce qui se passe dans son diocèse, c’est justement l'évêque. Pour de multiples raisons, on hésite à lui donner les informations qui blessent ou semblent se présenter comme des dénonciations.
Prenons le cas du Cardinal Barbarin. Je suis certain que ses actions n’étaient pas dictées par la volonté de cacher quelque chose, mais par la volonté de trouver une solution au très grave problème posé par un prêtre dont les actes sont absolument inacceptables. Ses prédécesseurs avaient certainement eux aussi cherché une solution. Mais pas selon les critères d’aujourd’hui. Il me semble qu’il ne faut pas juger la manière dont on résolvait hier ce genre de problèmes selon notre mentalité d'aujourd'hui.
Les statistiques prouvent que dans les familles, les cas de pédophilie sont encore pires. Et on ne dit rien à ce sujet. On ignore tout simplement le drame. Et personne ne le dénonce ! Etrange !
Je veux vraiment encourager les prêtres, et aussi les laïcs, qui sont également désemparés, et leur dire que l'Eglise n'est pas en crise. Ce ne sont que quelques membres de l’Eglise qui sont en crise. En effet, l'Eglise est sainte, sans tache, ni ride, immaculée. Elle est notre Mère, issue des mains de Dieu, intacte. Seuls certains de ses membres, parfois même haut placés dans la hiérarchie, ternissent le visage de leur Mère, la sainte Eglise.
Nous devons continuer à aimer l'Eglise, à nous comporter comme des enfants de notre Mère, la sainte Eglise. Il faut encourager les évêques, qui ont souvent peur aujourd'hui qu’on en vienne à découvrir quelque chose de gravement répréhensible dans leur diocèse, et que les médias s’acharnent à convaincre le public en affirmant : « Voilà ce que l’évêque a délibérément voulu vous cacher ».
Et je veux aussi leur dire que derrière ces diverses accusations, toutes les revendications ne sont pas justifiées. Certains ont le souci de la justice, et il est vrai que les membres de l’Eglise qui ont commis des fautes doivent répondre de leurs actes. Mais d’autres instrumentalisent les égarements d’une infime minorité dans le seul but de faire taire l'Eglise, de la contraindre à changer absolument et totalement sa doctrine et son enseignement moral. Mais la doctrine de l’Eglise n’est pas sa doctrine propre, c’est celle de Dieu. Et la doctrine de Dieu, personne au monde ne peut la modifier. Nous devons apprendre à vivre dans cette situation, c’est-à-dire à la fois que la justice soit rendue, sans pour autant ne rien céder sur la doctrine de l’Eglise. La Parole de l’Eglise n’est pas la sienne, mais celle de Dieu. Or, personne ne peut réduire Dieu au silence.
Vous parlez de ne pas vous renier, l’un des points essentiels de votre livre est justement la description de la menace qui plane sur l’Eglise avec la crise de la doctrine catholique et la crise de la théologie morale. Vous affirmez que quatre colonnes soutiennent l'unité de l'Eglise : la prière, la doctrine catholique, l'amour de Pierre et la charité mutuelle. Un certain nombre d'évêques, notamment américains, considèrent de ce point de vue-là que le pape François trahit la doctrine catholique. Au-delà des forces qui cherchent à faire taire l’Eglise de l’extérieur, que dites-vous de ses affaiblissements internes ?
Je pense qu’il est à la fois inconvenant, injuste et incorrect de parler ainsi du Pape. Nous devons tous nous examiner à ce sujet. De toute façon, une personne est incapable à elle seule de dénaturer l'Eglise. Mais si nous tous, nous trahissons, nous falsifions la Parole de Dieu pour nous accommoder au monde l'Eglise, alors c'est beaucoup plus grave. On peut comprendre, tout en s’opposant radicalement, qu’un évêque ou un cardinal trahisse l'Eglise par ses paroles et son comportement. Toutefois, les apôtres étaient douze, et tous n’ont pas trahi, ni livré le Seigneur. Un seul, Judas, l’a livré, et un autre, Pierre, l’a trahi, lui qui a dit par trois fois : "Je ne connais pas cet homme".
Saint Jean se tenait au pied de la Croix avec la Vierge Marie. Voilà pourquoi j’estime que si, du fait de leurs comportements et de leurs paroles, des personnes haut placées dans la hiérarchie oublient ce qu'est l'Eglise, celle-ci n'est pas pour autant affaiblie. Saint Jean et la Vierge Marie étaient au pied de la Croix et beaucoup de femmes pieuses pleuraient non loin de la Croix, les autres avaient eu peur et s’étaient cachés. Il faut comprendre que l'âme humaine est marquée par la faiblesse et par la peur. Toutefois, on sait aussi que les Onze, après la résurrection de Jésus, ont repris courage. Ils ont publiquement annoncé le Seigneur et son Evangile. Que quelqu'un affaiblisse la doctrine ou l'enseignement de l'Eglise, cela relève de sa propre responsabilité. Mais nous devons savoir que personne ne peut dénaturer l'Eglise, car elle est le Corps mystique du Christ.
Est-ce la raison pour laquelle vous ne voulez pas vous laisser enfermer dans la figure d'opposant au pape François ?
Ce sont uniquement ceux qui me connaissent par ouï-dire qui s’expriment de la sorte et cherchent à me poignarder dans le dos. Face à ces accusations ou ces soupçons à la fois injustes et fallacieux, je demeure serein. Ma réponse à votre question est donc claire : « Le Cardinal Sarah, un opposant au Pape ? Non, absolument pas, et cela vaut pour le passé, le présent et l’avenir. Quand j’ouvre la bouche ou quand j’écris, c’est pour dire ma foi en Jésus, ma fidélité à l’Evangile qui ne change pas d’un iota quelles que soient les circonstances, les périodes et les cultures.
Vous dites aussi que l'Eglise ne peut pas être une société moderne, une démocratie alors qu’on entend souvent, y compris chez des catholiques, que l'Eglise devrait être plus ouverte, qu’elle devrait plus s'adapter plus au monde. Qu'est-ce qui vous paraît dangereux dans cette attitude-là ?
C'est dangereux car cela revient à croire que l'Eglise est une réalité que nous avons nous-mêmes fabriquée, et que nous pourrions ou même devrions la changer et la transformer selon les circonstances, ou selon les votes ou l’opinion de la majorité. Mais l'Eglise ne nous appartient pas ! Elle nous vient de Dieu.
Les Protestants peuvent faire ce qu'ils veulent, c'est leur création, mais pas l'Eglise ?
L’Evangile selon Saint Matthieu dit clairement : "Tu es Pierre, et sur cette Pierre, je bâtirai mon Eglise". Nous ne bâtissons pas nous-mêmes l’Eglise, et nous n’avons pas le pouvoir de la modifier. L’Eglise, c’est Jésus qui la construit. Elle est le roc que nous sommes tous en tant que baptisés, que tous nous devons être. La démocratie n'y a pas de place. Dans l'Eglise, ce n'est pas le peuple qui décide. C'est Dieu qui décide. Elle appartient à Dieu. En outre, vous voyez bien comment fonctionne la démocratie : trop souvent, ce sont en fait quelques personnes puissantes financièrement et politiquement, qui dirigent la société. Les autres sont laissés de côté, voire abandonnés, entraînés à leur insu vers des décisions ou des orientations désastreuses.
Vous expliquez aussi que derrière les bonnes intentions de gens qui voudraient moderniser l'Eglise pour permettre de la sauver, il y a une sorte de faille de raisonnement : comme si ces mêmes personnes doutaient en fait de Dieu alors que la foi doit consister en une espérance et une forme d'abandon. Que son principe même est de se donner tout entier à Dieu y compris dans des circonstances difficiles…
Oui, il y a des personnes intelligentes qui veulent moderniser ou perfectionner l’Eglise, perfectionner le christianisme, le rendre plus moderne. Mais, on ne peut pas moderniser ou perfectionner l’Eglise. Comme l’a écrit Charles Péguy : « C’est un peu comme si on voulait perfectionner le nord, la direction du nord. Le malin qui voudrait perfectionner le nord. Le gros malin (…) Le nord est naturellement fixe, le christianisme est naturellement fixe. Ainsi, les points fixes ont été donnés une fois pour toutes dans l’un et l’autre monde, dans le monde naturel et dans le monde surnaturel, dans le monde physique et dans le monde mystique. Et tout le travail, tout l’effort est ensuite au contraire de les garder, de les tenir, loin de les améliorer au contraire ». Nous n’avons pas à moderniser l’Eglise. Elle est conduite par la puissance de l’Esprit Saint et sous la vigilance de Pierre. Et ce que Dieu fait est saint, pur et parfaitement ordonné à réaliser son plan de Salut pour l’humanité. Je ne peux pas entreprendre une quelconque transformation de l’Eglise sans consulter Dieu, ce que je fais dans la prière. Dans la prière, je sais que ce n'est plus mon œuvre, que je dois suivre les inspirations venant de Dieu, et que celles-ci ne sont pas seulement celles d'aujourd'hui, mais de l'Eglise depuis son origine jusqu'à nos jours. L'Eglise n'a jamais été gouvernée par un peuple, mais par une hiérarchie. Au début, elle était constituée des douze apôtres dont l’un était Pierre. La seule et véritable transformation possible de l’Eglise, c’est qu’elle s’applique à mettre en pratique la Volonté de Dieu. Et la Volonté de Dieu, c’est que nous devenions des saints. Ainsi, dans l’Eglise, tous, qu’ils appartiennent à la hiérarchie ou qu’ils soient régis par elle, sont appelés à la sainteté (cf. Lumen Gentium, 39). C’est Dieu qui transforme l’Eglise en faisant de nous des saints comme lui-même est Saint. Comme l’écrit Georges Bernanos : « Mais sans les saints, moi je vous le dis, la chrétienté ne serait qu’un gigantesque amas de locomotives renversées, de wagons incendiés, de rails tordus et de ferrailles achevant de se rouiller sous la pluie. Aucun train ne circulerait plus depuis longtemps sur les voies envahies par l’herbe ».
Vous dites que l'Eglise a besoin d'une tête. Mais si cette tête, que ce soit le pape François ou un successeur éventuel amenait l'Eglise sur des chemins qui la détourneraient de ce qui est à vos yeux son message véritable, son message de Vérité, redoutez-vous que l'Eglise soit alors menacée de schisme ou de divisions qui mettent en péril son existence même ?
Il y a déjà eu des schismes, parce que certains, se croyant inspirés, ont voulu orienter l'Eglise dans une autre direction que celle qui lui avait été assignée par le Christ. Saint François d’Assise a vécu à une époque où la hiérarchie de l’Eglise et le clergé, mais aussi les fidèles chrétiens n’étaient pas des modèles de perfection. La mauvaise conduite d’un grand nombre donnait l’impression que l’Eglise était en train de s’écrouler. Et c’est à ce moment précis que le Christ a demandé à saint François de reconstruire son Eglise. Alors, pour entreprendre cette œuvre magnifique de reconstruction, saint François a opté pour la radicalité de l’Evangile vécu dans le quotidien de son existence.
François a d'abord cru qu'il fallait reconstruire la petite église en ruines de Saint-Damien à Assise, mais il s'agissait en réalité de l'Eglise universelle. Saint François aurait pu concevoir la réforme de l’Eglise à la manière de Luther, en sortant de l’Eglise et en la critiquant sévèrement, en abandonnant les sacrements qui sont des sources de grâces et en s’opposant au Pape. Il était tout autant scandalisé que Luther par les mœurs dépravées du clergé. Mais il a choisi de réformer l’Eglise en réformant sa propre vie, en se convertissant, en priant et en jeûnant, et en s’abandonnant totalement au Christ. Il a voulu ressembler absolument à Jésus, et le Seigneur l’a pris au mot en le marquant des mêmes stigmates, c’est-à-dire de ses plaies et des souffrances de sa Passion. On ne réforme l’Eglise qu’en souffrant avec le Christ et en mourant avec lui et pour lui.
Vous le répétez dans votre livre : ce ne sont pas les institutions qui sont en cause mais les hommes et ce qu'il y a dans leurs cœurs. Vous croyez par ailleurs beaucoup à la force de l’exemple. Le titre de votre livre renvoie à cela : "Le soir approche et déjà le jour baisse", citation de Saint Luc mais dont il manque le début : "Reste avec nous, le soir approche et déjà le jour baisse". Ce « reste avec nous » qui dans l’Evangile s’adresse à Jésus que les apôtres n’ont pas reconnu alors qu’ils le croisent sur la route d’Emmaüs après sa crucifixion, à qui s’adresse-t-il dans le cas de votre livre ? Qu'est-ce qui vous a inspiré cette citation en particulier ?
Cette phrase ne doit pas être isolée de son contexte. Il s’agit d’une longue catéchèse que l'Eglise a assumée avant de parvenir à cette étape qu’exprime cette phrase : "Reste avec nous, car le soir approche et le jour baisse". Je dirais que, dans la situation actuelle, nous avons l'impression, comme les disciples d'Emmaüs, que l’espérance a disparu comme un brasier dont il ne resterait que les cendres. L’épisode des disciples d’Emmaüs a lieu le soir de Pâques ; trois jours avant, le Christ avait été crucifié, il était mort, et il avait été enterré. Il semblait alors que toute espérance était vaine. C’est pourquoi les disciples d’Emmaüs, saisis par le découragement, éprouvaient une grande tristesse, et retournaient chez eux pour reprendre leur vie ordinaire comme si Jésus n’avait jamais existé.
Aujourd’hui, le Seigneur nous demande à nous aussi pourquoi nous sommes tristes. Il semble avoir disparu. De fait, Jésus n’est plus au centre de notre vie. Nous vivons comme si Jésus n’avait jamais existé. Sa parole n’oriente plus notre vie, notre travail, nos familles.
Selon Saint-Luc, les disciples d’Emmaüs dirent à l’homme qui leur demandait pourquoi ils éraient tristes : « Vous ne savez donc pas ce qui s'est passé à Jérusalem ? Celui que nous considérions comme le Messie, ils l'ont tué, il est enterré depuis trois jours, et nous avons décidé de rentrer chez nous ». Alors, Jésus ouvrit leur esprit au sens des Ecritures, et à partir de l'Ancien Testament, il leur expliqua ce que les prophètes avaient annoncé. Nous aussi nous devons aujourd'hui reprendre cette catéchèse. Nous devons redécouvrir l'enseignement de l'Eglise. C’est là que le Christ se rend présent et révèle tout de lui-même.
Jésus a révélé à ses disciples que le Messie devait souffrir pour le Salut de l'humanité. En effet, quand on aime, on souffre. Il n'y a pas d'amour sans souffrance. La plus grande preuve d'amour, c'est de mourir pour les autres. Et le Messie, qui aime tous les hommes, a vécu jusqu’au bout cet amour suprême, celui de la Rédemption.
Tandis que Jésus expliquait le sens des Saintes Ecritures en marchant à leurs côtés, les deux disciples l'écoutaient. Ils arrivèrent dans un village appelé Emmaüs. Jésus fit semblant de continuer sa route, mais les deux disciples lui demandèrent de rester avec eux, car il se faisait tard. Il accepta leur invitation. Et là, alors qu’il étaient à table, il répéta les gestes de la sainte Cène du Jeudi Saint : la très Sainte Eucharistie. Il prit le pain, le bénit, le rompit et le leur donna. Les disciples le reconnurent, mais il disparut à leurs yeux.
Nous avons tellement altéré l'Eucharistie, tellement défiguré la liturgie eucharistique, qu’elle est devenue trop souvent une sorte de spectacle, du théâtre, du folklore. On va même jusqu’à faire participer des personnes âgées, depuis une maison de retraite, à la messe des Rameaux en réalité virtuelle. Il n’y a donc aucun prêtre pour leur donner la joie d’une messe célébrée avec elles et pour elles, pour les préparer à cette rencontre non pas virtuelle, mais réelle avec Dieu. Si nous ne retrouvons pas l'enseignement de Jésus, de l'Ancien au Nouveau Testament, si nous ne recommençons pas à célébrer correctement et dignement la Sainte Eucharistie, nous n’avons aucune espérance de rencontrer de nouveau Jésus, de le reconnaître, et de sentir notre cœur brûler d’amour pour lui et pour notre mission d’évangélisation.
Il faut que nous soyons comme les disciples d’Emmaüs, dont le cœur brûlait de l'enseignement de Jésus, que nous ne nous arrêtions pas pour nous reposer, mais que nous retournions le soir-même à Jérusalem pour recréer la communauté ecclésiale, pour reconstruire l’Eglise. Lorsqu’ils arrivèrent, ils dirent qu’ils avaient vu le Seigneur. Ceux qui les reçurent leur dirent qu'à Jérusalem aussi on avait vu le Seigneur ressuscité. Notre problème essentiel est que nous avons abandonné l'enseignement, que nous avons abandonné la liturgie. Il y a un adage qui dit: lex orandi, lex credendi : on croit de la même façon qu'on prie. En essayant de dissocier ces deux éléments, on provoque la crise de la foi, et aussi le désespoir dont nous souffrons à notre époque. En abîmant la liturgie et en dénaturant la doctrine, nous provoquons une terrible crise de l’Eglise et une grande désespérance du monde.
Justement, je me permets de vous soumettre quelque chose qui n'est pas vraiment très catholique. Je ne sais pas si vous connaissez Michel Houellebecq, qui est ce grand romancier français qui a beaucoup décrit le désespoir de l'homme dans nos sociétés contemporaines, la dépression de ceux qui se sentent abandonnés, perdus dans une société de marché où tout est marchandisé, les biens, les corps, le désir. Son dernier roman s'appelle Sérotonine. La Sérotonine est une hormone qui permet de fabriquer un médicament contre la dépression. Voici les derniers mots de son livre, que vous inspirent-ils ?
"Dieu s'occupe de nous en réalité. Il pense à nous en chaque instant et il donne des directives parfois très précises. Ses élans d'amour qui affluent dans nos poitrines jusqu'à nous couper le souffle, ses illuminations, ses extases inexplicables si on considère notre nature biologique, notre statut de simple primate, sont des signes extrêmement clairs. Et je comprends aujourd'hui le point de vue du Christ, son agacement répété devant l'endurcissement des cœurs. Ils ont tous les signes, et ils n'en tiennent pas compte. Est-ce qu'il faut vraiment, en supplément, que je donne ma vie pour ces minables ? Est-ce qu'il faut vraiment être à ce point explicite ? Il semblerait que oui."
Il est évident que Dieu ne nous abandonne pas, qu'il est toujours avec nous, qu'il nous envoie des signes, qu'il nous parle. Ce que dit Michel Houellebecq est tout à fait vrai et peut être compris selon une acception catholique. Nous sommes les créatures de Dieu, des enfants bien-aimés de Dieu. Dieu nous aime comme un père. Et il utilise des moyens qui peuvent nous paraître étranges, pour nous parler, nous révéler des vérités, expliciter ce qu'il nous demande, veut et attend de nous. Mais nous sommes souvent aveugles. Nous avons des yeux, mais nous ne voyons pas. Nous avons des oreilles, mais nous n'entendons pas. Nous préférons prendre des antidépresseurs pour nous sentir moins seuls, mais nous ignorons l’amour de Dieu qui est déjà présent dans nos cœurs, sa présence si tendre et si attentive à nos souffrances, à l’image de celui que vous avez cité, Michel Houellebecq, qui a encore ce pas décisif à franchir, avec la grâce de Dieu. Faut-il mieux expliquer cet Amour ? Pourtant, tout est dit dans la Bible et la vie des saints.
Il faut que l'homme redécouvre que, lorsqu’il adore et reçoit la Sainte Eucharistie, il touche le Christ lui-même. Lorsqu'il boit le Sang de l'Eucharistie, il boit le Christ. Et lorsqu'il contemple et adore l'Eucharistie, il contemple et adore Dieu.
Telle est notre foi. Dieu reste constamment avec nous. Il est là, il nous parle par les Saintes Ecritures et dans l'Eucharistie.
Avons-nous besoin de plus de témoins ?
Les exemples de témoins du Christ existent. Citons les apôtres, les saints martyrs des premiers siècles. Citons le pape saint Jean-Paul II, qui croyait profondément, réellement en l'Eucharistie : on le vit toujours se mettre à genoux devant la présence réelle, même quand sa santé était tellement dégradée qu’on était obligé de le soulever pour qu’il s’agenouille, et le relever car il n’était plus capable d’aucun mouvement autonome. Sainte Mère Teresa de Calcutta disait qu'elle n’aurait pas été capable de s'occuper des pauvres si elle n'avait pas eu cette relation quotidienne avec l'Eucharistie. Je suis heureux aussi de citer le saint Padre Pio, saint Josemaría Escrivá dont les vies étaient totalement envahies et possédées par Dieu. Ils rayonnaient la lumière et la sainteté de Dieu. Bien sûr, il faudrait que cet exemple vienne aussi de nous, les prêtres, et de nous, les évêques et les cardinaux. Toutefois, je peux vous assurer qu’il existe des milliers de Jean-Paul II et de Mère Teresa parmi les chrétiens, en particulier les petits et les âmes consacrées.
Il faut que nous soyons des hommes de prière, que nous mettions notre confiance en Jésus, en Dieu, et non pas dans nos œuvres ou dans nos capacités personnelles. Aujourd’hui, nous sommes immergés dans le pélagianisme. La grâce ne compte plus : seules importent nos œuvres, notre intelligence, nos capacités. Alors que Jésus a dit : "sans moi, vous ne pouvez rien faire".
C'est pourquoi Jésus a toujours insisté sur ce point : nous devons vivre constamment dans la prière. Sans ce lien intime avec Dieu, sans cette relation personnelle avec lui, sans ce cœur à cœur avec Jésus, nous ne sommes rien. Nous, les prêtres, nous devons constamment reposer notre tête sur le Cœur de Jésus, dans la prière. C’est seulement ainsi que nous pouvons changer l'Eglise, la rendre plus lumineuse, plus apte à porter le Salut au monde entier.
Joannes Maria- Gloire à toi Seigneur Jésus-Christ
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Re: Du Cardinal Sarah
Le cardinal Sarah bénit les veillées pour la vie
“Je vous confie à la Vierge Marie, à Notre Dame de la Vie, à Notre Dame de l’Eglise… Courage !”Cardinal Sarah, Pardon de Notre Dame du Roncier le dimanche 8 décembre 2019
"Un message d’encouragement qui fait écho à celui reçu quelques mois plus tôt : Merci Cardinal Sarah pour votre soutien à notre mission d’apôtre de l’évangile de la Vie !"
Zamie- Enfant de Dieu
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Re: Du Cardinal Sarah
Du 9 décembre
https://m.facebook.com/CardinalRobertSarah/posts/1408519635971366?refsrc=http%3A%2F%2Fwww.benoit-et-moi.fr%2F2020%2F2019%2F12%2F09%2Fle-cadeau-de-benoit-xvi-au-cardinal-sarah%2F
Je remercie avec émotion le Pape Benoît XVI pour ce merveilleux cadeau à l’occasion du quarantième anniversaire de mon ordination épiscopale. Lors de notre rencontre, j’ai pu une nouvelle fois l’assurer de l’amitié et de la prière à ses intentions des prêtres du monde entier.
+RS
https://m.facebook.com/CardinalRobertSarah/posts/1408519635971366?refsrc=http%3A%2F%2Fwww.benoit-et-moi.fr%2F2020%2F2019%2F12%2F09%2Fle-cadeau-de-benoit-xvi-au-cardinal-sarah%2F
Je remercie avec émotion le Pape Benoît XVI pour ce merveilleux cadeau à l’occasion du quarantième anniversaire de mon ordination épiscopale. Lors de notre rencontre, j’ai pu une nouvelle fois l’assurer de l’amitié et de la prière à ses intentions des prêtres du monde entier.
+RS
Zamie- Enfant de Dieu
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Inscription : 19/05/2016
Re: Du Cardinal Sarah
Je prie pour qu'un jour... s'il plaît à Dieu et à l'Esprit-Saint.
vinz 109- Contemplatif
- Messages : 1877
Inscription : 26/12/2009
Re: Du Cardinal Sarah
L’atroce nouvelle de l’assassinat de onze otages chrétiens par “l’État Islamique” au Nigéria (voir ci) a fait beaucoup moins de bruit dans les médias que la quinzaine de victimes de l’écrasement accidentel d’un avion au Kazakhstan le jour suivant. Y aurait-il des morts plus dignes d’être signalés que d’autres ? Je tenais à rapporter la touchante déclaration du cardinal guinéen Robert Sarah, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, telle qu’on a pu la lire hier sur sa page Facebook, sur cette nouvelle abomination dont des chrétiens africains ont été les nouvelles victimes, après tant d’autres…
Zamie- Enfant de Dieu
- Messages : 3233
Localisation : Sud -Ouest France
Inscription : 19/05/2016
Re: Du Cardinal Sarah
Zamie a écrit:L’atroce nouvelle de l’assassinat de onze otages chrétiens par “l’État Islamique” au Nigéria (voir ci) a fait beaucoup moins de bruit dans les médias que la quinzaine de victimes de l’écrasement accidentel d’un avion au Kazakhstan le jour suivant. Y aurait-il des morts plus dignes d’être signalés que d’autres ? Je tenais à rapporter la touchante déclaration du cardinal guinéen Robert Sarah, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, telle qu’on a pu la lire hier sur sa page Facebook, sur cette nouvelle abomination dont des chrétiens africains ont été les nouvelles victimes, après tant d’autres…
Merci chère amie @Zamie
Joannes Maria- Gloire à toi Seigneur Jésus-Christ
- Messages : 4097
Inscription : 19/05/2010
Re: Du Cardinal Sarah
Union de prières avec les familles de victimes.
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
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Localisation : Velay
Inscription : 03/06/2014
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