Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
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Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Vous parler du sacrement de l'Extrême-Onction, M.F., c'est vous faire ressouvenir que notre vie ici-bas n'est pas éternelle, et que bientôt nous sortirons de ce monde. Notre vie n'est qu'un petit passage, où nous sommes placés pour combattre le démon, le monde et nos penchants, afin de nous assurer le ciel ; c'est vous dire que nos corps, que nous cherchons tant à contenter, que nous craignons tant de faire souffrir, seront détruits par la violence des souffrances, par la puissance de la mort, et que nous irons paraître devant notre juge, pour lui rendre compte de tout le bien et de tout le mal que nous aurons fait pendant notre vie. Après cela, « nous irons nous ensevelir dans la maison de notre éternité » Ah ! M.F., que cette pensée nous serait salutaire, si nous avions le bonheur de la bien graver dans notre cœur ! En effet, comment pourrions-nous commettre le péché ? comment pourrions-nous vivre dans le péché, si nous nous disions en nous-même : Un jour viendra que la maladie et la mort détruiront ce corps ; un jour vien-dra qu'il me faudra rendre compte de toutes les actions de ma vie, et, après ce jugement, ma demeure sera ou le ciel ou l'enfer. O mon Dieu, que celui qui ferait de cette pensée son pain quotidien, vivrait saintement !...
Le sacrement de l'Extrême-Onction a été institué par Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour le soulagement spiri-tuel et même corporel des pauvres malades. Pour notre âme, elle est sûre d'y trouver toujours la santé, si elle est bien préparée ; et, de même, notre corps y trouve aussi la santé, si elle peut être utile à la gloire de Dieu et à notre salut. Saint Jacques nous dit : « Si quelqu'un est malade, faites venir le ministre de l'Église, qui fera sur lui les onctions, et le Seigneur effacera ses péchés et lui rendra la santé du corps . » De sorte que, non seu-lement nous recevons la santé de notre âme, c'est-à-dire, le pardon de nos péchés, mais encore une grâce de force, pour nous défendre contre le démon, qui redouble ses attaques à ces derniers moments, espérant toujours nous perdre avant notre mort. Bien plus, ce sacrement répand dans nos âmes une douce consolation ; il ranime notre confiance en Dieu, il nous le fait considérer, non comme un juge sévère, mais comme un bon Sauveur et un ten-dre Père, qui vient pour nous consoler, et nous encou-rager par l'espoir de la récompense qu'il nous prépare dans le ciel.
La maladie est une grâce bien précieuse, elle nous rappelle à Dieu, et nous fait rentrer en nous-même ; elle nous détache de la vie ; elle nous fait considérer toutes les choses créées, les biens, les plaisirs et les honneurs, comme des choses viles et méprisables, indignes d'y attacher notre cœur. Moment précieux, M.F. ! C'est ordinairement dans ce temps-là que nous nous remet-tons devant les yeux toute notre vie : je veux dire le bien et le mal que nous avons fait. N'est-ce pas dans ce mo-ment, M.F., que nous regrettons de ne pas avoir vécu dans l'amitié de Dieu ? N'est-ce pas lorsque nous sommes étendus : par ce lit de douleur, que nous pleurons des péchés que peut-être, sans une longue maladie, nous n'aurions jamais pleurés. N'est-ce pas dans ce moment que nous prenons les résolutions de changer de vie, si Dieu est assez bon pour nous rendre la santé ? N'est-ce pas dans ce temps-là, que nous concevons une aversion infinie pour tout ce qui nous a porté au péché, soit plai-sirs ou mauvaises compagnies ? N'est-ce pas dans ce moment que nous commençons à penser aux tourments que la justice de Dieu prépare aux pécheurs ? N'est-ce pas une maladie qui nous fait nous réconcilier avec notre ennemi ? qui nous fait rendre le bien qui n'est pas à nous ? N'est-ce pas encore dans ces derniers moments que nous éprouvons combien le bon Dieu est riche en miséricorde ? N'est-ce pas là que la pensée du jugement nous fait trembler, à l'aspect de notre destinée éter-nelle ? Oh ! M.F., qu'une maladie longue est avantageuse pour un chrétien qui sait en profiter ; car elle lui fournit des moyens efficaces et puissants pour revenir à Dieu, rentrer en lui-même, et satisfaire à la justice divine pour ses péchés : Hélas ! que d'âmes sont en enfer, et qui seraient dans le ciel si elles avaient eu de longues maladies ! Combien, au jour du jugement, verront que les maladies leur ont gagné un grand nombre d'an-nées de purgatoire !
Le sacrement de l'Extrême-Onction a été institué par Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour le soulagement spiri-tuel et même corporel des pauvres malades. Pour notre âme, elle est sûre d'y trouver toujours la santé, si elle est bien préparée ; et, de même, notre corps y trouve aussi la santé, si elle peut être utile à la gloire de Dieu et à notre salut. Saint Jacques nous dit : « Si quelqu'un est malade, faites venir le ministre de l'Église, qui fera sur lui les onctions, et le Seigneur effacera ses péchés et lui rendra la santé du corps . » De sorte que, non seu-lement nous recevons la santé de notre âme, c'est-à-dire, le pardon de nos péchés, mais encore une grâce de force, pour nous défendre contre le démon, qui redouble ses attaques à ces derniers moments, espérant toujours nous perdre avant notre mort. Bien plus, ce sacrement répand dans nos âmes une douce consolation ; il ranime notre confiance en Dieu, il nous le fait considérer, non comme un juge sévère, mais comme un bon Sauveur et un ten-dre Père, qui vient pour nous consoler, et nous encou-rager par l'espoir de la récompense qu'il nous prépare dans le ciel.
La maladie est une grâce bien précieuse, elle nous rappelle à Dieu, et nous fait rentrer en nous-même ; elle nous détache de la vie ; elle nous fait considérer toutes les choses créées, les biens, les plaisirs et les honneurs, comme des choses viles et méprisables, indignes d'y attacher notre cœur. Moment précieux, M.F. ! C'est ordinairement dans ce temps-là que nous nous remet-tons devant les yeux toute notre vie : je veux dire le bien et le mal que nous avons fait. N'est-ce pas dans ce mo-ment, M.F., que nous regrettons de ne pas avoir vécu dans l'amitié de Dieu ? N'est-ce pas lorsque nous sommes étendus : par ce lit de douleur, que nous pleurons des péchés que peut-être, sans une longue maladie, nous n'aurions jamais pleurés. N'est-ce pas dans ce moment que nous prenons les résolutions de changer de vie, si Dieu est assez bon pour nous rendre la santé ? N'est-ce pas dans ce temps-là, que nous concevons une aversion infinie pour tout ce qui nous a porté au péché, soit plai-sirs ou mauvaises compagnies ? N'est-ce pas dans ce moment que nous commençons à penser aux tourments que la justice de Dieu prépare aux pécheurs ? N'est-ce pas une maladie qui nous fait nous réconcilier avec notre ennemi ? qui nous fait rendre le bien qui n'est pas à nous ? N'est-ce pas encore dans ces derniers moments que nous éprouvons combien le bon Dieu est riche en miséricorde ? N'est-ce pas là que la pensée du jugement nous fait trembler, à l'aspect de notre destinée éter-nelle ? Oh ! M.F., qu'une maladie longue est avantageuse pour un chrétien qui sait en profiter ; car elle lui fournit des moyens efficaces et puissants pour revenir à Dieu, rentrer en lui-même, et satisfaire à la justice divine pour ses péchés : Hélas ! que d'âmes sont en enfer, et qui seraient dans le ciel si elles avaient eu de longues maladies ! Combien, au jour du jugement, verront que les maladies leur ont gagné un grand nombre d'an-nées de purgatoire !
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
La mort même est un grand bienfait de Dieu et un moyen capable de nous réunir à lui ; car, vouloir vivre longtemps, c'est vouloir prolonger ses misères ici-bas. Saint Augustin nous dit : « Celui qui craint la mort, n'aime pas le bon Dieu. » En effet, si nous aimons quel-qu'un, nous devons aimer ce qui peut nous y conduire ; par conséquent, celui qui aime Dieu ne craint pas la mort. Mais n'allons pas plus loin, occupons-nous de ce qui regarde directement l'Extrême-onction, qui est le sacrement des mourants.
Ce sacrement est un signe sensible qui produit en nous des effets invisibles. Ces signes sont les onctions que le prêtre fait sur le malade avec l'huile sainte, bénite par l'évêque, et les prières qui les accompagnent. Si vous ne savez pas pour quoi l'on donne à ce sacrement le nom d'Extrême-Onction, le voici. C'est que ces onctions sont les dernières que l'on fait sur un chrétien. Les premières se font lorsque nous recevons le Baptême ; les secondes, lorsque l'évêque nous donne la Confirmation, et les dernières lorsque nous sommes malades. Nous voyons que Jésus-Christ, en instituant les sacrements, a choisi les signes les plus capables de nous faire connaître les effets que chaque sacrement produit en nous. Dans le sacrement de Baptême, nous recevons l'eau, dont l'usage ordinaire est de laver quelque chose de sale, pour nous montrer que la grâce reçue dans ce sacrement, purifie notre âme de ses péchés. Dans celui de l'Eucharistie, nous recevons Jésus-Christ sous l'espèce du pain et du vin, pour nous faire connaître qu'il nourrit nos âmes, comme le pain et le vin nourrissent nos corps. Dans ceux de l'Extrême-Onction, nous recevons l'huile sainte. Or, la propriété de l'huile c'est de guérir les blessures, d'adoucir les plaies, de fortifier les membres ; de plus, l'huile d'o-lives est encore le symbole de la paix. Vous savez que Noé, après le déluge, envoya une colombe pour savoir si les eaux s'étaient retirées ; elle lui apporta une bran-che d'olivier, pour lui signifier que la colère de Dieu était apaisée, et que la paix était rendue à la terre . Voilà précisément, M.F., les effets que produit le sacrement de l'Extrême-Onction dans celui qui le reçoit avec de bonnes dispositions, après s'être bien préparé par le sacrement de Pénitence.
Il est vrai que par le sacrement de Pénitence, tous nos péchés nous sont déjà pardonnés ; mais le sacrement de l'Extrême-Onction achève de nous purifier de tous les péchés véniels que nous pouvons avoir commis depuis ce temps-là. Hélas ! que de fautes, dont ces pauvres malades se rendent coupables ! Tantôt ils murmurent dans leurs souffrances, tantôt ils ne se soumettent pas bien à la volonté de Dieu ; une autre fois, ils s'occupent trop d'affaires temporelles ; un autre moment, ils seront de mauvaise humeur contre ceux qui en ont soin. Voilà les fautes qu'un pauvre malade commet ordinairement. Elles sont légères, c'est vrai, mais elles ne laisseront pas que de le conduire bien des années en purgatoire. C'est pour cela que les saints Pères appellent ce sacrement « la perfection du sacrement de Pénitence. » Vous voyez qu'il nous procure une grâce bien précieuse en nous donnant le bonheur d'aller voir Dieu, aussitôt après notre mort. De plus, il nous fortifie contre les tentations du démon, qui en ce moment sont plus fortes et plus fréquentes.
En effet, c'est principalement dans nos maladies que le démon, comme nous dit saint Pierre, roule autour de nous pour nous dévorer ; soit en nous portant au désespoir, en nous faisant considérer nos péchés comme trop grands pour être pardonnés, ainsi veut-il nous faire perdre toute espérance ; soit encore par la présomption, en nous persuadant que nous n'avons rien à craindre, que Dieu ne nous a pas créés pour nous damner ; avec cette vaine espérance, nous mourons dans notre péché, et nous sommes perdus. Ce sacrement, au contraire, nous fait tenir un juste milieu : il nous donne une crainte salutaire, qui, en nous faisant nous amender, ne laisse pas que de nous faire espérer en la miséricorde de Dieu, et nous engage à prendre tous les moyens que le bon Dieu nous a donnés pour assurer notre salut.
Un autre bien que produit en nous ce sacrement, c'est de nous rassurer contre les frayeurs de la mort. Il nous la fait envisager comme un bien, car en nous séparant de la vie, elle nous conduit à notre véritable patrie ; nous l'acceptons alors en esprit de pénitence. Si la crainte du jugement à subir nous effraie, ce sacre-ment nous rassure, en nous faisant penser qu'à la vue du sang adorable de Jésus-Christ dont nous sommes tout couverts, il est impossible que le Père Éternel ne veuille pas nous reconnaître pour son ouvrage, pour ses fils, ses enfants et les chrétiens de son royaume. Ce sacrement fortifie encore le malade, il lui fait supporter ses souffrances avec patience et résignation à la volonté de Dieu ; bien plus, il adoucit ses douleurs, et elles lui paraissent moins violentes. Nous savons bien, il est vrai, ce qu'est la souffrance ; plusieurs d'entre nous, ont éprouvé des douleurs bien violentes ; mais aucun d'entre nous ne sait ce que l'on souffre pour mourir. Dans ce moment surtout, nous avons besoin que ce sacre-ment adoucisse nos maux. Écoutez saint Jacques « Quelqu'un est-il malade ? qu'il fasse venir le ministre du Seigneur, et la prière de foi qu'il fera sur lui le soulagera. » En effet, que de malades, après avoir reçu ce sacrement, se sont trouvés mieux !
Ce qui nous rend la mort si effrayante, c'est qu'il nous faut aller rendre compte de notre pauvre vie, qui n'a été peut-être qu'une chaîne de péchés. Que de sacrilèges ! que de profanations du saint jour du Dimanche ! Que de fois n'avons-nous pas profané notre esprit, notre cœur et notre corps par l'impureté ? Il est vrai que nous avons bien confessé tout cela ; mais, mon Dieu ! avons-nous apporté assez de préparation ? avons-nous eu assez de contrition ? O moment terrible pour un chrétien, qui n'a pas pensé sérieusement à son salut ! Eh bien ! si nous recevons ce sacrement saintement, nous avons une grande certitude que Dieu nous pardonnera. Oui, M.F., lorsque nous voyons venir le prêtre pour nous donner ce grand sacrement, c'est comme si nous voyons un ange venir nous annoncer que le ciel va se réconcilier avec nous, et que Jésus-Christ nous attend dans la gran-deur de sa miséricorde. Disons encore quelque chose de plus consolant. Dans ce sacrement, Jésus-Christ descend vraiment dans nos âmes par sa grâce, il vient y faire sa demeure, et nous conduire lui-même en triomphe dans le ciel, ainsi qu'il le fit à ce pénitent, dont saint Siméon Stylite vit l'âme emportée au ciel par le Sauveur lui--même . Que de fois, M.F., nous voyons des malades, que la pensée de la mort effrayait presque jusqu'au désespoir, et qui ont fini par dire, après avoir reçu ce sacrement : « Je ne croyais pas qu'il fût si doux et si consolant de mourir ! »
D'après cela, je conclus que dans ce sacrement, tout est pour nous une consolation, car il nous procure les plus grands biens pour le temps et pour l'éternité. Oui, M.F., cela doit nous engager à demander à Dieu, tous les jours de notre vie, la grâce de recevoir ce sacrement avant de mourir. Je sais qu'il n'est pas absolument nécessaire pour être sauvé ; mais, si nous négligions de le recevoir, nous nous rendrions coupables, nous nous priverions de grandes grâces ; nous semblerions, en effet, mépriser les moyens que le bon Dieu nous pré-sente pour nous aider à opérer notre salut. Bien plus, nous nous exposerions grandement à faire une mau-vaise mort, ce qui est le plus grand de tous les mal-heurs.
Ce sacrement est un signe sensible qui produit en nous des effets invisibles. Ces signes sont les onctions que le prêtre fait sur le malade avec l'huile sainte, bénite par l'évêque, et les prières qui les accompagnent. Si vous ne savez pas pour quoi l'on donne à ce sacrement le nom d'Extrême-Onction, le voici. C'est que ces onctions sont les dernières que l'on fait sur un chrétien. Les premières se font lorsque nous recevons le Baptême ; les secondes, lorsque l'évêque nous donne la Confirmation, et les dernières lorsque nous sommes malades. Nous voyons que Jésus-Christ, en instituant les sacrements, a choisi les signes les plus capables de nous faire connaître les effets que chaque sacrement produit en nous. Dans le sacrement de Baptême, nous recevons l'eau, dont l'usage ordinaire est de laver quelque chose de sale, pour nous montrer que la grâce reçue dans ce sacrement, purifie notre âme de ses péchés. Dans celui de l'Eucharistie, nous recevons Jésus-Christ sous l'espèce du pain et du vin, pour nous faire connaître qu'il nourrit nos âmes, comme le pain et le vin nourrissent nos corps. Dans ceux de l'Extrême-Onction, nous recevons l'huile sainte. Or, la propriété de l'huile c'est de guérir les blessures, d'adoucir les plaies, de fortifier les membres ; de plus, l'huile d'o-lives est encore le symbole de la paix. Vous savez que Noé, après le déluge, envoya une colombe pour savoir si les eaux s'étaient retirées ; elle lui apporta une bran-che d'olivier, pour lui signifier que la colère de Dieu était apaisée, et que la paix était rendue à la terre . Voilà précisément, M.F., les effets que produit le sacrement de l'Extrême-Onction dans celui qui le reçoit avec de bonnes dispositions, après s'être bien préparé par le sacrement de Pénitence.
Il est vrai que par le sacrement de Pénitence, tous nos péchés nous sont déjà pardonnés ; mais le sacrement de l'Extrême-Onction achève de nous purifier de tous les péchés véniels que nous pouvons avoir commis depuis ce temps-là. Hélas ! que de fautes, dont ces pauvres malades se rendent coupables ! Tantôt ils murmurent dans leurs souffrances, tantôt ils ne se soumettent pas bien à la volonté de Dieu ; une autre fois, ils s'occupent trop d'affaires temporelles ; un autre moment, ils seront de mauvaise humeur contre ceux qui en ont soin. Voilà les fautes qu'un pauvre malade commet ordinairement. Elles sont légères, c'est vrai, mais elles ne laisseront pas que de le conduire bien des années en purgatoire. C'est pour cela que les saints Pères appellent ce sacrement « la perfection du sacrement de Pénitence. » Vous voyez qu'il nous procure une grâce bien précieuse en nous donnant le bonheur d'aller voir Dieu, aussitôt après notre mort. De plus, il nous fortifie contre les tentations du démon, qui en ce moment sont plus fortes et plus fréquentes.
En effet, c'est principalement dans nos maladies que le démon, comme nous dit saint Pierre, roule autour de nous pour nous dévorer ; soit en nous portant au désespoir, en nous faisant considérer nos péchés comme trop grands pour être pardonnés, ainsi veut-il nous faire perdre toute espérance ; soit encore par la présomption, en nous persuadant que nous n'avons rien à craindre, que Dieu ne nous a pas créés pour nous damner ; avec cette vaine espérance, nous mourons dans notre péché, et nous sommes perdus. Ce sacrement, au contraire, nous fait tenir un juste milieu : il nous donne une crainte salutaire, qui, en nous faisant nous amender, ne laisse pas que de nous faire espérer en la miséricorde de Dieu, et nous engage à prendre tous les moyens que le bon Dieu nous a donnés pour assurer notre salut.
Un autre bien que produit en nous ce sacrement, c'est de nous rassurer contre les frayeurs de la mort. Il nous la fait envisager comme un bien, car en nous séparant de la vie, elle nous conduit à notre véritable patrie ; nous l'acceptons alors en esprit de pénitence. Si la crainte du jugement à subir nous effraie, ce sacre-ment nous rassure, en nous faisant penser qu'à la vue du sang adorable de Jésus-Christ dont nous sommes tout couverts, il est impossible que le Père Éternel ne veuille pas nous reconnaître pour son ouvrage, pour ses fils, ses enfants et les chrétiens de son royaume. Ce sacrement fortifie encore le malade, il lui fait supporter ses souffrances avec patience et résignation à la volonté de Dieu ; bien plus, il adoucit ses douleurs, et elles lui paraissent moins violentes. Nous savons bien, il est vrai, ce qu'est la souffrance ; plusieurs d'entre nous, ont éprouvé des douleurs bien violentes ; mais aucun d'entre nous ne sait ce que l'on souffre pour mourir. Dans ce moment surtout, nous avons besoin que ce sacre-ment adoucisse nos maux. Écoutez saint Jacques « Quelqu'un est-il malade ? qu'il fasse venir le ministre du Seigneur, et la prière de foi qu'il fera sur lui le soulagera. » En effet, que de malades, après avoir reçu ce sacrement, se sont trouvés mieux !
Ce qui nous rend la mort si effrayante, c'est qu'il nous faut aller rendre compte de notre pauvre vie, qui n'a été peut-être qu'une chaîne de péchés. Que de sacrilèges ! que de profanations du saint jour du Dimanche ! Que de fois n'avons-nous pas profané notre esprit, notre cœur et notre corps par l'impureté ? Il est vrai que nous avons bien confessé tout cela ; mais, mon Dieu ! avons-nous apporté assez de préparation ? avons-nous eu assez de contrition ? O moment terrible pour un chrétien, qui n'a pas pensé sérieusement à son salut ! Eh bien ! si nous recevons ce sacrement saintement, nous avons une grande certitude que Dieu nous pardonnera. Oui, M.F., lorsque nous voyons venir le prêtre pour nous donner ce grand sacrement, c'est comme si nous voyons un ange venir nous annoncer que le ciel va se réconcilier avec nous, et que Jésus-Christ nous attend dans la gran-deur de sa miséricorde. Disons encore quelque chose de plus consolant. Dans ce sacrement, Jésus-Christ descend vraiment dans nos âmes par sa grâce, il vient y faire sa demeure, et nous conduire lui-même en triomphe dans le ciel, ainsi qu'il le fit à ce pénitent, dont saint Siméon Stylite vit l'âme emportée au ciel par le Sauveur lui--même . Que de fois, M.F., nous voyons des malades, que la pensée de la mort effrayait presque jusqu'au désespoir, et qui ont fini par dire, après avoir reçu ce sacrement : « Je ne croyais pas qu'il fût si doux et si consolant de mourir ! »
D'après cela, je conclus que dans ce sacrement, tout est pour nous une consolation, car il nous procure les plus grands biens pour le temps et pour l'éternité. Oui, M.F., cela doit nous engager à demander à Dieu, tous les jours de notre vie, la grâce de recevoir ce sacrement avant de mourir. Je sais qu'il n'est pas absolument nécessaire pour être sauvé ; mais, si nous négligions de le recevoir, nous nous rendrions coupables, nous nous priverions de grandes grâces ; nous semblerions, en effet, mépriser les moyens que le bon Dieu nous pré-sente pour nous aider à opérer notre salut. Bien plus, nous nous exposerions grandement à faire une mau-vaise mort, ce qui est le plus grand de tous les mal-heurs.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
II. – Si vous me demandez dans quel temps il faut avoir recours à ce sacrement ? je vous dirai, que c'est lorsque nous avons une maladie qui semble vouloir nous conduire au tombeau. Vous savez que ce sacrement ne peut être reçu qu'une fois dans la même maladie ; mais, toutes les fois que nous revenons à la santé et que nous retombons malades, nous pouvons de nouveau le rece-voir. Si maintenant vous me demandez à quel âge on peut recevoir ce sacrement ? Je vous répondrai : Dès que nous avons l'âge de raison, c'est-à-dire dès que nous pouvons distinguer le bien d'avec le mal ; aussi, lorsque vos enfants commencent à distinguer le bien d'avec le mal, il ne faut jamais manquer de les faire confesser, afin qu'ils soient en état de recevoir ce sacrement.
Je vais vous montrer en gros, les fautes dont nous pouvons, sur ce point, nous rendre coupables. Nous sommes coupables lorsque nous avons négligé de de-mander à Dieu, pendant notre vie, la grâce de recevoir ce sacrement à l'heure de notre mort, ou si nous l'avons considéré comme peu de chose. Hélas ! M.F., si j'osais, je vous dirais qu'il y a des chrétiens qui, dans toute leur vie, n'ont jamais demandé au bon Dieu cette grâce. Nous sommes encore coupables, si nous ne prions pas pour ceux que l'on va administrer ; si nous négligeons d'aller auprès d'eux pouvant le faire ; si, étant auprès des malades, nous leur cachons leur état ; si nous détour-nons ceux qui veulent faire venir le prêtre, ou si nous ne l'avons pas appelé quand les malades le réclamaient ; si nous négligeons de les instruire sur ce sacrement, de leur apprendre qui l'a institué, les effets qu'il produit en nous, pourquoi on nous le donne, et quelles sont les dispositions que nous devons y apporter ; enfin, si nous n'avons pas prié pour ces pauvres malades, pendant qu'on leur administrait ce sacrement. Nous ne devons pas nous contenter d'y assister, mais il faut, autant que nous le pouvons, solliciter la miséricorde de Dieu pour eux.
Ceux qui les gardent doivent, autant que possible, leur laver les pieds et les mains avec de l'eau tiède, par res-pect pour le sacrement. Si c'est une fille ou une femme, ne jamais les laisser sans leur mettre un mouchoir au cou ; ces pauvres malades n'y pensent pas !... Hélas ! que de maîtres sont coupables, en envoyant leurs domesti-ques à l'hôpital presque morts ; ils meurent quelquefois en chemin, ou bien, arrivés à l'hôpital, ils reçoivent ce sacrement sans connaissance, et, par conséquent, sans fruit ! Combien d'autres ont de pauvres malades chez eux, et les laissent mourir, sans en avertir le prêtre de la paroisse ?... Les pères et mères, les maîtres et maî-tresses, doivent encore voir s'ils ont négligé d'instruire leurs enfants et leurs domestiques de ce qui regarde ce sacrement, dès qu'ils sont en état de le recevoir ; s'ils négligent cela, ils seront cause que leurs enfants et leurs domestiques le profaneront. Mon Dieu, où sont ceux qui remplissent bien leurs devoirs ? Hélas ! qu'il y en a peu !...
Il faut encore vous examiner si vous n'avez pas pris plaisir à entendre, ou à dire vous-mômes de ces paroles impies : « Il peut partir, ses bottes sont engraissées, ou encore : Il est… » c'est se railler des choses saintes. Il faut encore voir, si vous n'avez pas accompagné le bon Dieu plutôt par curiosité, que pour prier auprès du ma-lade. Quant aux malades, ils ne doivent jamais attendre ces moments pour mettre ordre à leurs affaires temporelles ; ils doivent y penser tandis qu'ils sont en santé afin que, dans la maladie, ils ne s'occupent que du salut de leur âme. Ne manquez jamais de vous retenir des messes, ne vous fiez pas sur les promesses de vos héri-tiers, vous savez ce que l'on dit dans le monde, et cela est très vrai : « Le souvenir des morts s'en va avec le son des cloches. »
Les saints, M.F., regardaient comme un grand péché de laisser mourir une personne sans sacrements. Il y en a qui ont peur d'effrayer les malades, et n'osent pas leur parler de recevoir les sacrements ; quelle cruelle ami-tié !... Il est rapporté dans l'histoire qu'un pauvre père étant à l'article de la mort, personne ne lui parlait de se confesser ; une petite fille qui venait du catéchisme lui dit : « Mon père, le médecin dit que vous allez mourir ; ma mère pleure dans sa chambre, personne ne vous parle de vous confesser ; monsieur le curé nous a dit que c'était un grand péché que de laisser mourir une per-sonne sans sacrements, voulez-vous que je le fasse ve-nir ? » – « Ah ! mon enfant, lui dit le père, va vite le chercher, je n'y pensais pas ; je souffre tant ! » Le prêtre vint, et le malade se confessa dans de très bonnes dis-positions. Avant de mourir, il fit venir sa fille auprès de son lit, en lui disant : « Ah ! mon enfant, que je te re-mercie ! sans toi, j'étais damné ; je ne pensais pas à me confesser. »
Hélas ! que de pauvres malades meurent sans sacre-ments et se damnent par la faute de ceux qui les entou-rent, et qui n'ont pas la charité de les faire confesser ! Nous devons encore avoir une grande dévotion à sainte Barbe, pour demander au bon Dieu, par sa protection, de recevoir nos derniers sacrements . Il est rapporté dans l'histoire qu'un saint évêque exilé, n'ayant point de moyens de recevoir les sacrements, la sainte Vierge vint avec des anges, etc.... Il faut encore ne jamais man-quer, si le prêtre n'y pensait pas, de lui faire appliquer au malade les indulgences plénières, qui sont la remise de toutes les peines que nous devons souffrir en purgatoire.
Je vais vous montrer en gros, les fautes dont nous pouvons, sur ce point, nous rendre coupables. Nous sommes coupables lorsque nous avons négligé de de-mander à Dieu, pendant notre vie, la grâce de recevoir ce sacrement à l'heure de notre mort, ou si nous l'avons considéré comme peu de chose. Hélas ! M.F., si j'osais, je vous dirais qu'il y a des chrétiens qui, dans toute leur vie, n'ont jamais demandé au bon Dieu cette grâce. Nous sommes encore coupables, si nous ne prions pas pour ceux que l'on va administrer ; si nous négligeons d'aller auprès d'eux pouvant le faire ; si, étant auprès des malades, nous leur cachons leur état ; si nous détour-nons ceux qui veulent faire venir le prêtre, ou si nous ne l'avons pas appelé quand les malades le réclamaient ; si nous négligeons de les instruire sur ce sacrement, de leur apprendre qui l'a institué, les effets qu'il produit en nous, pourquoi on nous le donne, et quelles sont les dispositions que nous devons y apporter ; enfin, si nous n'avons pas prié pour ces pauvres malades, pendant qu'on leur administrait ce sacrement. Nous ne devons pas nous contenter d'y assister, mais il faut, autant que nous le pouvons, solliciter la miséricorde de Dieu pour eux.
Ceux qui les gardent doivent, autant que possible, leur laver les pieds et les mains avec de l'eau tiède, par res-pect pour le sacrement. Si c'est une fille ou une femme, ne jamais les laisser sans leur mettre un mouchoir au cou ; ces pauvres malades n'y pensent pas !... Hélas ! que de maîtres sont coupables, en envoyant leurs domesti-ques à l'hôpital presque morts ; ils meurent quelquefois en chemin, ou bien, arrivés à l'hôpital, ils reçoivent ce sacrement sans connaissance, et, par conséquent, sans fruit ! Combien d'autres ont de pauvres malades chez eux, et les laissent mourir, sans en avertir le prêtre de la paroisse ?... Les pères et mères, les maîtres et maî-tresses, doivent encore voir s'ils ont négligé d'instruire leurs enfants et leurs domestiques de ce qui regarde ce sacrement, dès qu'ils sont en état de le recevoir ; s'ils négligent cela, ils seront cause que leurs enfants et leurs domestiques le profaneront. Mon Dieu, où sont ceux qui remplissent bien leurs devoirs ? Hélas ! qu'il y en a peu !...
Il faut encore vous examiner si vous n'avez pas pris plaisir à entendre, ou à dire vous-mômes de ces paroles impies : « Il peut partir, ses bottes sont engraissées, ou encore : Il est… » c'est se railler des choses saintes. Il faut encore voir, si vous n'avez pas accompagné le bon Dieu plutôt par curiosité, que pour prier auprès du ma-lade. Quant aux malades, ils ne doivent jamais attendre ces moments pour mettre ordre à leurs affaires temporelles ; ils doivent y penser tandis qu'ils sont en santé afin que, dans la maladie, ils ne s'occupent que du salut de leur âme. Ne manquez jamais de vous retenir des messes, ne vous fiez pas sur les promesses de vos héri-tiers, vous savez ce que l'on dit dans le monde, et cela est très vrai : « Le souvenir des morts s'en va avec le son des cloches. »
Les saints, M.F., regardaient comme un grand péché de laisser mourir une personne sans sacrements. Il y en a qui ont peur d'effrayer les malades, et n'osent pas leur parler de recevoir les sacrements ; quelle cruelle ami-tié !... Il est rapporté dans l'histoire qu'un pauvre père étant à l'article de la mort, personne ne lui parlait de se confesser ; une petite fille qui venait du catéchisme lui dit : « Mon père, le médecin dit que vous allez mourir ; ma mère pleure dans sa chambre, personne ne vous parle de vous confesser ; monsieur le curé nous a dit que c'était un grand péché que de laisser mourir une per-sonne sans sacrements, voulez-vous que je le fasse ve-nir ? » – « Ah ! mon enfant, lui dit le père, va vite le chercher, je n'y pensais pas ; je souffre tant ! » Le prêtre vint, et le malade se confessa dans de très bonnes dis-positions. Avant de mourir, il fit venir sa fille auprès de son lit, en lui disant : « Ah ! mon enfant, que je te re-mercie ! sans toi, j'étais damné ; je ne pensais pas à me confesser. »
Hélas ! que de pauvres malades meurent sans sacre-ments et se damnent par la faute de ceux qui les entou-rent, et qui n'ont pas la charité de les faire confesser ! Nous devons encore avoir une grande dévotion à sainte Barbe, pour demander au bon Dieu, par sa protection, de recevoir nos derniers sacrements . Il est rapporté dans l'histoire qu'un saint évêque exilé, n'ayant point de moyens de recevoir les sacrements, la sainte Vierge vint avec des anges, etc.... Il faut encore ne jamais man-quer, si le prêtre n'y pensait pas, de lui faire appliquer au malade les indulgences plénières, qui sont la remise de toutes les peines que nous devons souffrir en purgatoire.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
III. – Mais quelles sont les dispositions que nous devons avoir pour recevoir dignement ce sacrement ? J'en trouve trois. La première, c'est d'être en état de grâce, la seconde, c'est la résignation à la volonté de Dieu, la troi-sième, souffrir la maladie avec patience. Je dis qu'il faut être en état de grâce, c'est-à-dire, s'être confessé ; parce que si l'on recevait ce sacrement avec un péché mortel sur la conscience, l'on commettrait un horrible sacrilège. O mon Dieu, quel malheur !... Si vous êtes en état de péché et que vous ne puissiez parler, il faut vous exciter à la contrition, et vous confesser par signes, autant que vous pourrez. Hélas ! qu'il est difficile de bien se con-fesser dans ce moment, quand on a négligé de le faire pendant le temps de la santé !... Il ne faut pas cependant se laisser aller au désespoir, quelque misérable que l'on soit ; quand même nous aurions commis de grands et nombreux péchés, il faut toujours espérer en la bonté de Dieu. Il faut faire mettre un crucifix devant nos yeux, afin qu'en le regardant, nous voyons la grandeur de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs. Cette image fera naître en nous une grande confiance, en pensant que la miséricorde de Dieu est encore infiniment plus grande que nos péchés, et que, quoique bien pécheurs, nous pouvons espérer notre pardon. Il est vrai qu'il faut bien craindre pour tant de grâces méprisées et tant de péchés commis ; mais il faut penser que Dieu a promis que jamais il ne refuserait le pardon à celui qui le lui demande comme il faut.
2° Une autre disposition que doit avoir le malade, c'est de se soumettre entièrement à la volonté de Dieu, et de ne point se tourmenter de sa guérison ; il faut qu'il sache que si la santé est nécessaire au salut de son âme, le bon Dieu le guérira. Il est vrai qu'il n'est pas défendu d'avoir recours au médecin ni aux remèdes, puisque Dieu a établi les médecins et créé les remèdes. Nous voyons que Jésus-Christ lui-même a cherché quelques consolations dans ses peines, lorsqu'il alla trouver ses apôtres en leur disant : « Mon âme est triste jusqu'à la mort ; » et lors-qu'étant sur la croix il dit aussi : « Mon père, pourquoi m'avez-vous abandonné ? » Ce n'est pas qu'il eût besoin de secours, mais seulement pour nous montrer qu'il n'est pas défendu de chercher quelque soulagement dans nos maladies et quelques consolations dans nos peines. Mais à l'exemple de Jésus-Christ, disons à Dieu : « Mon Dieu, que votre sainte volonté se fasse toujours, et non la mienne », soyons toujours contents, de quelque manière qu'on se conduise à notre égard, nous sommes sûrs que le salut de notre âme s'y trouvera.
Tout nous engage donc à faire recevoir les derniers sacrements à ceux qui sont dans nos maisons ; d'abord il y a une bénédiction particulière qu’apporte Jésus--Christ en y venant. Ensuite, nous ne pouvons pas rendre un plus grand service, c'est-à-dire faire une plus belle oeuvre de charité, que de fournir à un malade les moyens de s'assurer le ciel. Enfin, nous sommes sûrs que le bon Dieu ne nous refusera pas la même grâce, quand nous se-rons à l'heure de la mort. Nous ne devons jamais négliger de faire venir un prêtre ; il vaut mieux que le prêtre vienne vingt fois de trop, que si vous laissiez mourir votre ma-lade sans sacrements. D'ailleurs un prêtre a toujours un grand plaisir à voir un malade, et les malades à leur tour doivent sentir le bonheur de cette visite. Saint Ber-nard nous rapporte que saint Malachie, archevêque de Cologne, avait été appelé par un malade. Quand il fut arrivé, on lui dit que le malade n'était pas en danger, qu'il pouvait attendre au lendemain ; et sur cela l'arche-vêque reprit son chemin. Peu d'instants après, on court après lui, disant que le malade est mort. « Ah ! malheu-reux, s'écrie-t-il, c'est bien par ma faute. » Il se rend près de lui, quoiqu'il fût mort, se prosterne la face contre terre, répand des larmes en abondance, et engage tous ceux qui étaient avec lui à prier aussi. « Non, mon Dieu, je n'aurai point de consolation que vous n'ayez rendu la vie à ce mort ! redoublons nos larmes, mes enfants, disait-il à ceux qui étaient avec lui, peut-être que le bon Dieu se laissera toucher. » Après avoir passé toute la nuit à prier, il regarde le mort, il le voit remuer les yeux et les lèvres. « Ah ! mes amis, s'écrie-t-il, le bon Dieu lui rend la vie. » Il lui administre alors les sacrements, il ne les avait pas plutôt reçus, qu'il expira .
Il n'y a pas pour nous de spectacle plus salutaire que celui de voir administrer à un malade les derniers sacre-ments. Lorsqu'étant en santé, nous entendons sonner la cloche du viatique, quittons notre ouvrage pour un ins-tant ; allons voir ce que nous serons un jour, et ce que nous pouvons dans ce moment de notre vie. Allons, M.F., entendre ce pauvre malade nous crier : « Ah ! mes amis, venez à mon secours, demandez au bon Dieu qu'il veuille bien avoir pitié de moi ; venez voir, semble-t-il nous dire, ce que vous serez vous-même un jour. » Si, quand nous voyons administrer un malade, nous faisions bien ces réflexions : Oui, un jour viendra que je serai à la place de ce pauvre malade, quelles seront mes pensées dans ce moment ? Que penserai-je et que dirai-je de mes plaisirs, de mon attachement à ces biens qui en ont perdu tant d'autres ? Que penserai-je de mes vengeances, de mes injustices et de mon ivrognerie ? Quelle vie, pour aller paraître devant un Dieu qui ne me fera pas grâce d'une minute, et qui voudra savoir comment je l'ai employée ! Hélas ! dirons-nous dans toute l'amer-tume de notre âme ! ah ! moment épouvantable, qui a porté les plus grands saints presque au désespoir. Ah ! triste moment pour un chrétien qui a fait le mal !... Quel spectacle plus capable de nous convertir que la présence d'un mourant qui va quitter ce monde pour toujours ?. . Regardez-le un instant, M.F., voyez ces pauvres yeux mourants et presque éteints, il semble nous dire : « Ah ! mon ami, n'attendez pas d'être comme moi pour faire le bien !... si Dieu me rendait la santé, oh ! que ma vie serait bien plus chrétienne qu'elle n'a été jusqu'à pré-sent ! Si le bon Dieu me retire de ce monde dans cette maladie, que vais-je devenir ?... puisque dans ma vie je ne vois que du mal et presque pas de bien. Ah ! priez Dieu qu'il veuille me pardonner »
Lorsque nous voyons entrer le prêtre dans la chambre d'un mourant, disons-nous : Quel va être le sort de ce- malade ? Ou le ciel, ou l'enfer ! Mon Dieu que ce moment est terrible !... Oui, dans ce moment, le bon Dieu va ou le recevoir dans son sein, ou le vomir pour jamais de sa présence. Oh ! quel malheur de n'avoir vécu que pour se creuser un enfer !... Le prêtre, avant de lui administrer les sacrements, fait plusieurs prières pour implorer la miséricorde de Dieu sur lui ; il prend l'huile sainte pour faire les onctions, et semble lui dire : « Mon ami, pro-fitez bien du peu de temps qui vous reste, si vous ne revenez pas, c'est la dernière grâce que le bon Dieu vous accorde en ce monde. » Il implore les prières des assis-tants, afin de demander miséricorde pour le malade ; puis, il fait les onctions. Il commence par les yeux, comme s'il lui disait : « Fermez ces yeux qui, tant de fois, se sont ouverts sur des objets impurs, et qui ont ainsi perdu votre âme ; refusez-leur pour un instant la lu-mière, puisqu'ils en ont si mal profité. » « Mon Dieu, dit le prêtre, pardonnez-lui tant de mauvais regards, et tant de curiosités, par lesquels le péché est entré dans son âme et lui a donné la mort. Mon Dieu, pardonnez--lui tous les péchés qu'il a commis par le sens de la vue. » Considérez, M.F., ces yeux qui autrefois étaient ardents pour le mal, dont le regard brillait d'un feu impur, voyez-les, dis-je, sous la main du prêtre, dont la présence le frappe de terreur ; voyez et considérez sous la main du ministre du Seigneur la pauvre tête de cette jeune fille qui a tant pris de soin à se parer, qui tant de fois a passé des heures entières à se considérer devant une glace de miroir, qui, dans toutes ses manières, ne cherchait qu'à plaire et à s'attirer les regards du monde. Ses yeux, qui autrefois allumaient des flammes dans le cœur du jeune libertin, les voilà maintenant qui jettent l'épouvante dans l'âme de ceux qui l'environnent.
Le prêtre fait l'onction des oreilles. Hélas ! voyez com-ment l'on tourne et retourne cette tête défaillante qui fut l'idole du monde et qui croyait être la seule bien faite. Ces oreilles autrefois ornées d'or ou de diamants, dont elle avait tant de soins de faire briller l'éclat devant les rayons du soleil. Voyez ces cheveux que le prêtre écarte, ces cheveux qu'elle arrangeait et frisait jadis avec tant de soins, les voilà tout ruisselants des sueurs de la mort. « Mon Dieu, dit le ministre du Seigneur, pardonnez à cette pauvre mourante, tous les péchés qu'elle a commis par ses oreilles, par l'or et les diamants, dont elle a pris tant de soins d'embellir cette tête d'iniquité. » Laissons, M.F., cette tête ornée avec tant d'artifice ; laissons-la, l'enfer semble l'attendre, et la mort la presser.
Le prêtre lui fait des onctions sur le nez, ce nez qui, tant de fois, a cherché les bonnes odeurs et qui mainte-nant exhale déjà la corruption . Le prêtre lui fait des onctions sur les lèvres, instruments de tant de voluptés, de tant de médisances, de calomnies, de paroles et de chansons infâmes. « Mon Dieu, dit le prêtre, que cette bouche soit purifiée par cette onction, de toutes les mau-vaises paroles prononcées. Faites à cette pécheresse, la grâce de ne jamais entendre ces foudroyantes paroles que tout réprouvé entendra un jour sortir de votre bou-che : « Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éter-nel. »
Le prêtre prend ses mains, mains qui ont commis tant d'iniquités, ces pauvres mains qui sont à cette heure trempées des sueurs de la mort ! « Mon Dieu, pardonnez à ces mains souillées de tant de péchés ! » De là, le prêtre fait les onctions sur la poitrine , cette poitrine ornée avec tant de soin, et des soins si souvent répétés, tou-jours dans la coupable espérance d'attirer les yeux et de plaire au monde ; voilà le moment où le Seigneur semble descendre dans ce cœur, avec le flambeau à la main pour en examiner tous les plis et replis . « Mon Dieu, dit le prêtre, pardonnez à cette malheureuse tous les péchés qu'elle a commis, par tant de pensées d'orgueil, de haine, de vengeance, par toutes les mauvaises pensées et les mauvais désirs qui ont corrompu son pauvre cœur ! Enfin, le prêtre fait l'onction aux pieds, ces pieds qui autrefois étaient actifs à courir au mal ; ces pieds qui l'ont tant de fois portée dans les jeux, les danses et les bals ; les voilà donc comme liés dans ces draps, inca-pables même de se remuer. Voilà ce corps déjà enlacé dans les bras de la mort...
Oui, considérez un moment, M.F., le corps de cette jeune fille de vanité, qui n'a cherché que les moyens de relever sa beauté. Voyez ce visage, qu'elle lavait autre-fois avec tant de précaution, afin de lui conserver sa fraîcheur ; le voilà tout décomposé. Voyez ce cou, qui était embelli avec tant d'art de riches bijoux et qui por-tait ces deux ou trois rangs de collerettes ; hélas ! il ne peut plus seulement soutenir sa pauvre tête. Qu'est devenue cette beauté que rehaussait encore ces vêtements de forme et de couleurs si bien choisies ? Et dans ce corps, mon Dieu, qu'est devenue cette pauvre âme, que vous aviez faite par le Baptême aussi belle qu'un ange ?... Mon Dieu, mon Dieu ! quelle route va-t-elle prendre ? Sera-ce le ciel, sera-ce l'enfer, qui doit être sa demeure éternelle ?
Oui, M.F., ce sera le ciel, si cette pauvre âme reçoit le sacrement de l'Extrême-Onction avec les dispositions que je vous ai indiquées plus haut ; si, sincèrement péni-tente de sa vie criminelle, elle reçoit comme il faut ces derniers sacrements et se jette dans les bras de la misé-ricorde de Dieu. Mais pour nous, tâchons de vivre sain-tement, et nous sommes sûrs qu'en retour, le bon Dieu ne nous privera pas du bonheur de faire une bonne mort. C'est ce que je vous souhaite.
2° Une autre disposition que doit avoir le malade, c'est de se soumettre entièrement à la volonté de Dieu, et de ne point se tourmenter de sa guérison ; il faut qu'il sache que si la santé est nécessaire au salut de son âme, le bon Dieu le guérira. Il est vrai qu'il n'est pas défendu d'avoir recours au médecin ni aux remèdes, puisque Dieu a établi les médecins et créé les remèdes. Nous voyons que Jésus-Christ lui-même a cherché quelques consolations dans ses peines, lorsqu'il alla trouver ses apôtres en leur disant : « Mon âme est triste jusqu'à la mort ; » et lors-qu'étant sur la croix il dit aussi : « Mon père, pourquoi m'avez-vous abandonné ? » Ce n'est pas qu'il eût besoin de secours, mais seulement pour nous montrer qu'il n'est pas défendu de chercher quelque soulagement dans nos maladies et quelques consolations dans nos peines. Mais à l'exemple de Jésus-Christ, disons à Dieu : « Mon Dieu, que votre sainte volonté se fasse toujours, et non la mienne », soyons toujours contents, de quelque manière qu'on se conduise à notre égard, nous sommes sûrs que le salut de notre âme s'y trouvera.
Tout nous engage donc à faire recevoir les derniers sacrements à ceux qui sont dans nos maisons ; d'abord il y a une bénédiction particulière qu’apporte Jésus--Christ en y venant. Ensuite, nous ne pouvons pas rendre un plus grand service, c'est-à-dire faire une plus belle oeuvre de charité, que de fournir à un malade les moyens de s'assurer le ciel. Enfin, nous sommes sûrs que le bon Dieu ne nous refusera pas la même grâce, quand nous se-rons à l'heure de la mort. Nous ne devons jamais négliger de faire venir un prêtre ; il vaut mieux que le prêtre vienne vingt fois de trop, que si vous laissiez mourir votre ma-lade sans sacrements. D'ailleurs un prêtre a toujours un grand plaisir à voir un malade, et les malades à leur tour doivent sentir le bonheur de cette visite. Saint Ber-nard nous rapporte que saint Malachie, archevêque de Cologne, avait été appelé par un malade. Quand il fut arrivé, on lui dit que le malade n'était pas en danger, qu'il pouvait attendre au lendemain ; et sur cela l'arche-vêque reprit son chemin. Peu d'instants après, on court après lui, disant que le malade est mort. « Ah ! malheu-reux, s'écrie-t-il, c'est bien par ma faute. » Il se rend près de lui, quoiqu'il fût mort, se prosterne la face contre terre, répand des larmes en abondance, et engage tous ceux qui étaient avec lui à prier aussi. « Non, mon Dieu, je n'aurai point de consolation que vous n'ayez rendu la vie à ce mort ! redoublons nos larmes, mes enfants, disait-il à ceux qui étaient avec lui, peut-être que le bon Dieu se laissera toucher. » Après avoir passé toute la nuit à prier, il regarde le mort, il le voit remuer les yeux et les lèvres. « Ah ! mes amis, s'écrie-t-il, le bon Dieu lui rend la vie. » Il lui administre alors les sacrements, il ne les avait pas plutôt reçus, qu'il expira .
Il n'y a pas pour nous de spectacle plus salutaire que celui de voir administrer à un malade les derniers sacre-ments. Lorsqu'étant en santé, nous entendons sonner la cloche du viatique, quittons notre ouvrage pour un ins-tant ; allons voir ce que nous serons un jour, et ce que nous pouvons dans ce moment de notre vie. Allons, M.F., entendre ce pauvre malade nous crier : « Ah ! mes amis, venez à mon secours, demandez au bon Dieu qu'il veuille bien avoir pitié de moi ; venez voir, semble-t-il nous dire, ce que vous serez vous-même un jour. » Si, quand nous voyons administrer un malade, nous faisions bien ces réflexions : Oui, un jour viendra que je serai à la place de ce pauvre malade, quelles seront mes pensées dans ce moment ? Que penserai-je et que dirai-je de mes plaisirs, de mon attachement à ces biens qui en ont perdu tant d'autres ? Que penserai-je de mes vengeances, de mes injustices et de mon ivrognerie ? Quelle vie, pour aller paraître devant un Dieu qui ne me fera pas grâce d'une minute, et qui voudra savoir comment je l'ai employée ! Hélas ! dirons-nous dans toute l'amer-tume de notre âme ! ah ! moment épouvantable, qui a porté les plus grands saints presque au désespoir. Ah ! triste moment pour un chrétien qui a fait le mal !... Quel spectacle plus capable de nous convertir que la présence d'un mourant qui va quitter ce monde pour toujours ?. . Regardez-le un instant, M.F., voyez ces pauvres yeux mourants et presque éteints, il semble nous dire : « Ah ! mon ami, n'attendez pas d'être comme moi pour faire le bien !... si Dieu me rendait la santé, oh ! que ma vie serait bien plus chrétienne qu'elle n'a été jusqu'à pré-sent ! Si le bon Dieu me retire de ce monde dans cette maladie, que vais-je devenir ?... puisque dans ma vie je ne vois que du mal et presque pas de bien. Ah ! priez Dieu qu'il veuille me pardonner »
Lorsque nous voyons entrer le prêtre dans la chambre d'un mourant, disons-nous : Quel va être le sort de ce- malade ? Ou le ciel, ou l'enfer ! Mon Dieu que ce moment est terrible !... Oui, dans ce moment, le bon Dieu va ou le recevoir dans son sein, ou le vomir pour jamais de sa présence. Oh ! quel malheur de n'avoir vécu que pour se creuser un enfer !... Le prêtre, avant de lui administrer les sacrements, fait plusieurs prières pour implorer la miséricorde de Dieu sur lui ; il prend l'huile sainte pour faire les onctions, et semble lui dire : « Mon ami, pro-fitez bien du peu de temps qui vous reste, si vous ne revenez pas, c'est la dernière grâce que le bon Dieu vous accorde en ce monde. » Il implore les prières des assis-tants, afin de demander miséricorde pour le malade ; puis, il fait les onctions. Il commence par les yeux, comme s'il lui disait : « Fermez ces yeux qui, tant de fois, se sont ouverts sur des objets impurs, et qui ont ainsi perdu votre âme ; refusez-leur pour un instant la lu-mière, puisqu'ils en ont si mal profité. » « Mon Dieu, dit le prêtre, pardonnez-lui tant de mauvais regards, et tant de curiosités, par lesquels le péché est entré dans son âme et lui a donné la mort. Mon Dieu, pardonnez--lui tous les péchés qu'il a commis par le sens de la vue. » Considérez, M.F., ces yeux qui autrefois étaient ardents pour le mal, dont le regard brillait d'un feu impur, voyez-les, dis-je, sous la main du prêtre, dont la présence le frappe de terreur ; voyez et considérez sous la main du ministre du Seigneur la pauvre tête de cette jeune fille qui a tant pris de soin à se parer, qui tant de fois a passé des heures entières à se considérer devant une glace de miroir, qui, dans toutes ses manières, ne cherchait qu'à plaire et à s'attirer les regards du monde. Ses yeux, qui autrefois allumaient des flammes dans le cœur du jeune libertin, les voilà maintenant qui jettent l'épouvante dans l'âme de ceux qui l'environnent.
Le prêtre fait l'onction des oreilles. Hélas ! voyez com-ment l'on tourne et retourne cette tête défaillante qui fut l'idole du monde et qui croyait être la seule bien faite. Ces oreilles autrefois ornées d'or ou de diamants, dont elle avait tant de soins de faire briller l'éclat devant les rayons du soleil. Voyez ces cheveux que le prêtre écarte, ces cheveux qu'elle arrangeait et frisait jadis avec tant de soins, les voilà tout ruisselants des sueurs de la mort. « Mon Dieu, dit le ministre du Seigneur, pardonnez à cette pauvre mourante, tous les péchés qu'elle a commis par ses oreilles, par l'or et les diamants, dont elle a pris tant de soins d'embellir cette tête d'iniquité. » Laissons, M.F., cette tête ornée avec tant d'artifice ; laissons-la, l'enfer semble l'attendre, et la mort la presser.
Le prêtre lui fait des onctions sur le nez, ce nez qui, tant de fois, a cherché les bonnes odeurs et qui mainte-nant exhale déjà la corruption . Le prêtre lui fait des onctions sur les lèvres, instruments de tant de voluptés, de tant de médisances, de calomnies, de paroles et de chansons infâmes. « Mon Dieu, dit le prêtre, que cette bouche soit purifiée par cette onction, de toutes les mau-vaises paroles prononcées. Faites à cette pécheresse, la grâce de ne jamais entendre ces foudroyantes paroles que tout réprouvé entendra un jour sortir de votre bou-che : « Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éter-nel. »
Le prêtre prend ses mains, mains qui ont commis tant d'iniquités, ces pauvres mains qui sont à cette heure trempées des sueurs de la mort ! « Mon Dieu, pardonnez à ces mains souillées de tant de péchés ! » De là, le prêtre fait les onctions sur la poitrine , cette poitrine ornée avec tant de soin, et des soins si souvent répétés, tou-jours dans la coupable espérance d'attirer les yeux et de plaire au monde ; voilà le moment où le Seigneur semble descendre dans ce cœur, avec le flambeau à la main pour en examiner tous les plis et replis . « Mon Dieu, dit le prêtre, pardonnez à cette malheureuse tous les péchés qu'elle a commis, par tant de pensées d'orgueil, de haine, de vengeance, par toutes les mauvaises pensées et les mauvais désirs qui ont corrompu son pauvre cœur ! Enfin, le prêtre fait l'onction aux pieds, ces pieds qui autrefois étaient actifs à courir au mal ; ces pieds qui l'ont tant de fois portée dans les jeux, les danses et les bals ; les voilà donc comme liés dans ces draps, inca-pables même de se remuer. Voilà ce corps déjà enlacé dans les bras de la mort...
Oui, considérez un moment, M.F., le corps de cette jeune fille de vanité, qui n'a cherché que les moyens de relever sa beauté. Voyez ce visage, qu'elle lavait autre-fois avec tant de précaution, afin de lui conserver sa fraîcheur ; le voilà tout décomposé. Voyez ce cou, qui était embelli avec tant d'art de riches bijoux et qui por-tait ces deux ou trois rangs de collerettes ; hélas ! il ne peut plus seulement soutenir sa pauvre tête. Qu'est devenue cette beauté que rehaussait encore ces vêtements de forme et de couleurs si bien choisies ? Et dans ce corps, mon Dieu, qu'est devenue cette pauvre âme, que vous aviez faite par le Baptême aussi belle qu'un ange ?... Mon Dieu, mon Dieu ! quelle route va-t-elle prendre ? Sera-ce le ciel, sera-ce l'enfer, qui doit être sa demeure éternelle ?
Oui, M.F., ce sera le ciel, si cette pauvre âme reçoit le sacrement de l'Extrême-Onction avec les dispositions que je vous ai indiquées plus haut ; si, sincèrement péni-tente de sa vie criminelle, elle reçoit comme il faut ces derniers sacrements et se jette dans les bras de la misé-ricorde de Dieu. Mais pour nous, tâchons de vivre sain-tement, et nous sommes sûrs qu'en retour, le bon Dieu ne nous privera pas du bonheur de faire une bonne mort. C'est ce que je vous souhaite.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
SERMONS INÉDITS
SERMON
SUR L'EXAMEN DE CONSCIENCE
Qui ascondit scelera sua, non dirigetur : qui autem confessus fuerit et reliquerit ea, misericordiam conse-quetur.
Celui qui cache ses péchés se perdra ; mais celui qui les confesse et qui s'en retire obtiendra miséricorde.
(PROV. XXVIII, 13.)
Nous avons vu, M.F., il y a peu de temps, qu'il fallait nécessairement et absolument confesser tous ses péchés mortels avec leur espèce, leur nombre et enfin leurs circonstances, si nous voulons en obtenir le pardon. Le Saint-Esprit nous dit lui-même que celui qui cache quelques péchés, par honte ou par négligence, se perdra, c'est-à-dire sera damné. Cacher ses péchés par honte ou par crainte et avec réflexion, c'est un crime qui fait frémir. Nous cachons nos péchés par négligence, lorsque nous ne donnons pas tous les soins et le temps qu'il faut pour nous examiner, afin de con-naître nos péchés tels qu'ils sont aux yeux de Dieu et que nous les connaîtrons au jour du jugement. La confession serait mauvaise, si l'on faisait une confession générale, pour accuser les péchés que l'on a commis depuis sa dernière confession, en les mettant tous en-semble, afin d'avoir moins de honte.
Voici un des effets les plus funestes du péché, c'est d'aveugler celui qui le commet d'une manière si affreuse qu'il ne se connaît nullement, et, bien plus, qu'il ne cherche pas même à se connaître ; ou d'une manière si légère qu'il ne voit point l'étal de son âme. C'est d'abord l'état d'un chrétien qui profane les sacre-ments. On sera accoutumé à une certaine routine d'exa-men, on se contente de se rappeler quelques foules qui sont les plus ordinaires, comme sont les blasphèmes, les jurements et les colères, mais sans se donner la peine de descendre dans son cœur pour en connaître le nombre et la malice. C'est, en second lieu, l'état d'un chrétien qui multiplie ses sacrilèges. Celui-ci examine, non ce qu'il a fait, mais ce qu'il va dire, c'est-à-dire la manière dont il va s'accuser pour éprouver moins de honte ; comme si, en trompant un confesseur, il pouvait tromper Dieu, qui a pesé et compté tous ses péchés. C'est, en troisième lieu, l'état d'un pécheur qui profane les sacrements. Celui-ci se présentera sans s'être seule-ment examiné, pensant que le confesseur l'interrogera pour lui faire connaître ses péchés : autre profanation. Quand même un prêtre vous ferait assez connaître vos péchés de manière à n'en point laisser, quand est-ce que vous allez demander à Dieu la contrition ? C'est après votre confession, après avoir reçu l'absolution ? Confession sacrilège ! O mon Dieu ! peut-on bien y penser et vivre tranquille ? Quel est mon dessein ? M.F., le voici : c'est de vous montrer que, pour faire une bonne confession, nous devons nous examiner sérieusement et de bonne foi ; 2° de vous apprendre la manière de vous confesser ; 3° de vous faire connaître ceux qui font de mauvaises confessions ; 4° de vous faire voir les moyens que vous devez prendre pour réparer celles qui ont été mal faites.
SERMON
SUR L'EXAMEN DE CONSCIENCE
Qui ascondit scelera sua, non dirigetur : qui autem confessus fuerit et reliquerit ea, misericordiam conse-quetur.
Celui qui cache ses péchés se perdra ; mais celui qui les confesse et qui s'en retire obtiendra miséricorde.
(PROV. XXVIII, 13.)
Nous avons vu, M.F., il y a peu de temps, qu'il fallait nécessairement et absolument confesser tous ses péchés mortels avec leur espèce, leur nombre et enfin leurs circonstances, si nous voulons en obtenir le pardon. Le Saint-Esprit nous dit lui-même que celui qui cache quelques péchés, par honte ou par négligence, se perdra, c'est-à-dire sera damné. Cacher ses péchés par honte ou par crainte et avec réflexion, c'est un crime qui fait frémir. Nous cachons nos péchés par négligence, lorsque nous ne donnons pas tous les soins et le temps qu'il faut pour nous examiner, afin de con-naître nos péchés tels qu'ils sont aux yeux de Dieu et que nous les connaîtrons au jour du jugement. La confession serait mauvaise, si l'on faisait une confession générale, pour accuser les péchés que l'on a commis depuis sa dernière confession, en les mettant tous en-semble, afin d'avoir moins de honte.
Voici un des effets les plus funestes du péché, c'est d'aveugler celui qui le commet d'une manière si affreuse qu'il ne se connaît nullement, et, bien plus, qu'il ne cherche pas même à se connaître ; ou d'une manière si légère qu'il ne voit point l'étal de son âme. C'est d'abord l'état d'un chrétien qui profane les sacre-ments. On sera accoutumé à une certaine routine d'exa-men, on se contente de se rappeler quelques foules qui sont les plus ordinaires, comme sont les blasphèmes, les jurements et les colères, mais sans se donner la peine de descendre dans son cœur pour en connaître le nombre et la malice. C'est, en second lieu, l'état d'un chrétien qui multiplie ses sacrilèges. Celui-ci examine, non ce qu'il a fait, mais ce qu'il va dire, c'est-à-dire la manière dont il va s'accuser pour éprouver moins de honte ; comme si, en trompant un confesseur, il pouvait tromper Dieu, qui a pesé et compté tous ses péchés. C'est, en troisième lieu, l'état d'un pécheur qui profane les sacrements. Celui-ci se présentera sans s'être seule-ment examiné, pensant que le confesseur l'interrogera pour lui faire connaître ses péchés : autre profanation. Quand même un prêtre vous ferait assez connaître vos péchés de manière à n'en point laisser, quand est-ce que vous allez demander à Dieu la contrition ? C'est après votre confession, après avoir reçu l'absolution ? Confession sacrilège ! O mon Dieu ! peut-on bien y penser et vivre tranquille ? Quel est mon dessein ? M.F., le voici : c'est de vous montrer que, pour faire une bonne confession, nous devons nous examiner sérieusement et de bonne foi ; 2° de vous apprendre la manière de vous confesser ; 3° de vous faire connaître ceux qui font de mauvaises confessions ; 4° de vous faire voir les moyens que vous devez prendre pour réparer celles qui ont été mal faites.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Ne désirant rien autre que le salut de vos âmes et votre bonheur éternel, je vais donc, avec la grâce de Dieu, vous débrouiller, autant qu'il me sera possible, l'état d'aveuglement où le péché nous a réduits, qui nous empêche de pouvoir nous connaître tels que nous sommes aux yeux de Dieu, et que nous nous connaîtrons au grand jour des vengeances. Venons, M.F., avec notre simplicité ordinaire. Je vous demande qui sait ce que c'est qu'un examen ? Je vous dirai que c'est la recherche, avec tous les soins possibles, des péchés que nous avons commis depuis le baptême ou depuis notre dernière confession ; et cette connaissance de nous-mêmes est plus difficile que vous ne pensez. C'est, pour celui qui veut bien la faire, une affaire qui lui demande tous ses soins et du temps.
Si vous me demandez ce qu'il faut faire pour s'exa-miner comme il faut, c'est-à-dire pour faire une confes-sion qui nous mérite notre pardon, il faut retirer son cœur et son esprit de toute affaire temporelle, je veux dire ne penser ni à son commerce, ni à son ménage, descendre, avec une espèce d'horreur et d'indi-gnation, dans son cœur, avec un flambeau d'une main et une balance de l'autre, pour examiner rigoureuse-ment le nombre, toutes les circonstances et peser toute la malice de nos péchés. Mais n'étant que ténèbres, de nous-mêmes, nous sommes donc incapables de pouvoir pénétrer à fond cet abîme de corruption qui n'est bien connu que de Dieu seul. C'est donc à lui à qui nous devons nous adresser avec une humilité profonde, à la vue de nos péchés, et une grande confiance à sa bonté qui est infinie ; implorer les lumières du Saint-Esprit par une prière fervente et animée d'une foi plus vive qui touche le cœur de Dieu et attire sur nous ses misé-ricordes. Étant rentrés en nous-mêmes, M.F., disons--lui du fond de notre cœur : « Mon Dieu, ayez pitié d'un misérable pécheur tout couvert d'iniquités, qui n'en connaît ni le nombre ni la malice. Je m'adresse à vous qui êtes la lumière du monde ; mon Dieu, faites des-cendre dans mon cœur un rayon de votre lumière ; montrez-moi, je vous prie, mes péchés, afin que je puisse les détester et mériter mon pardon. » Oui, M.F., le péché jette dans notre esprit des ténèbres affreuses qui bouchent les yeux de notre âme.
Voyez, M.F., ce qui arriva à David qui, avant que le péché tombât sur son âme, apercevait avec tant de con-naissance les moindres fautes qu'il faisait. Mais ayant le malheur d'être tombé dans son premier péché, les yeux de son âme perdirent leur lumière. Non content de déshonorer la femme d'Urie, il le fait encore mourir, et reste un an dans cet état malheureux, sans se repro-cher ni son adultère, ni son homicide. Il ne s'en aper-çoit pas même, il faut que Dieu lui envoie son prophète Nathan pour lui ouvrir les yeux, et ce ne fut que dans ce moment qu'il se reconnut coupable .
Voilà une image terrible d'un pécheur qui croupit dans quelques péchés d'habitude ; il faut que Dieu le prévienne et aille le chercher, pour ainsi dire, dans ses désordres ; sans quoi, jamais nous n'en sortirions. Ce qui nous montre, M.F., qu'il est impossible de con-naître nos péchés et de faire une bonne confession si nous n'implorons pas de tout notre cœur les lumières du Saint-Esprit, afin de bien nous faire connaître le mal que nous avons fait et de nous donner la douleur néces-saire pour les détester. Voulez-vous savoir à quoi le pécheur ressemble ? A une personne extrêmement contrefaite et laide et qui se croit bien faite et bien belle, parce qu'elle ne s'est jamais bien regardée dans un miroir ; mais qui, dès qu'elle se considère, se trouve si laide, si affreuse, qu'elle ne peut se regarder, ni même y penser sans horreur. La même chose arrive au pécheur qui est resté quelque temps dans le péché, sans faire aucun retour sur lui-même. Mais rentrant en lui--même, il ne peut pas concevoir comment il a pu rester dans un état si déplorable. Qu'est-ce qui fait tant verser de larmes à certains pécheurs ? Rien autre, sinon qu'ils sont rentrés en eux-mêmes et qu'ils ont vu ce qu'ils n'avaient pas vu jusqu'à présent. Pourquoi est-ce que tant d'autres encore plus coupables sont tranquilles, ne versent point de larmes ? hélas ! M.F., c'est qu'ils ont fermé les yeux sur l'état de malheur où est réduite leur pauvre âme.
En second lieu, je dis que nous avons bien besoin des lumières du Sain-Esprit pour connaître nos péchés, parce que notre cœur est le siège de l'orgueil, qui ne cherche que les moyens de nous les faire connaître moindres qu'ils ne sont. Vous voyez que nous avons absolument besoin des secours du Saint-Esprit pour connaître nos péchés tels qu'ils sont.
3° Je dis que le pécheur, étant encore l'esclave du péché, a besoin d'une grâce forte pour le détacher entièrement du péché et des objets qui l'ont porté au péché. Combien ne trouvons-nous pas encore de cer-tains pécheurs qui semblent être convertis et qui res-sentent encore une certaine satisfaction en pensant aux désordres auxquels ils se sont livrés il y a quelque temps ! Nous avons donc bien besoin de la grâce de Dieu, qui nous inspire une horreur profonde de nos péchés passés.
Dites-moi, M.F., dans vos confessions et avant vos confessions avez-vous eu soin de demander à Dieu ses grâces et ses lumières pour ne pas profaner ce sacre-ment de miséricorde ? Oui, nous oublions peut-être que sans Dieu nous ne pouvons rien que faire mal. Avez--vous fait comme l'aveugle de Jéricho, qui reconnut son aveuglement et qui le déplora amèrement ? Avez-vous fait comme lui, qui s'adressa à Dieu avec tant de sincérité, animé d'une foi si vive, qu'il mérita de recouvrer la vue ? « O Jésus ! fils de David, ayez pitié de moi ! » Cela plusieurs fois de suite : « O Jésus ! fils de David, ayez pitié de moi. » Jésus, touché, toujours prêt à nous écouter et à nous accorder l'effet de nos demandes, se tourne contre lui en lui disant : «Que voulez-vous de moi ? » – « Mon Dieu, lui répond l'aveugle, faites que je voie. » – « Eh bien, lui dit ce bon Jésus, voyez ! » Hélas ! M.F., si lorsque nous sommes dans le péché nous sommes dans les ténèbres, nous pouvons nous adresser à Dieu comme l'aveugle : « Mon Dieu, devons--nous lui dire, faites que je voie le nombre et la malice de mes péchés. » Disons encore comme le saint roi David : « Mon Dieu, vous êtes ma lumière, éclairez mes ténèbres. » Et avec le saint homme Job : « Seigneur, montrez-moi mes péchés et toutes mes fautes . » Dieu qui désire mille fois mieux notre salut que nous le désirons nous-mêmes, ne manquera pas certainement de nous accorder la grâce que nous demandons.
Aussi, M.F., étant seuls et en la présence de Dieu, il faut commencer notre examen de conscience et re-chercher tous nos péchés ; prenez les commande-ments de Dieu et ceux de l'Eglise et les péchés capi-taux, et voyez comment et en combien de manières vous avez péché contre ces commandements. Examinez les devoirs de votre état, comparez votre vie avec vos devoirs ; remarquez avec soin, sans vous presser, en quoi vous vous en êtes écartés par pensées, par désirs, par actions et omissions. Pour vous faciliter cette recherche, examinez quelles sont vos occupations les plus ordinaires, les lieux où vous allez, les personnes que vous voyez.
Je n'entrerai pas dans tous ces détails, cela ne finirait plus ; c'est à chacun de vous à vous examiner là-dessus, et à voir en quoi vous êtes coupable. D'abord, examinez--vous sur vos confessions passées et voyez si vous avez assez accusé tous vos péchés mortels, avec une véritable douleur d'avoir offensé Dieu et un ferme propos de vous corriger et de quitter non seulement le péché, mais encore l'occasion prochaine du péché ; comme, par exemple, si vous demeuriez dans une maison où il y avait quelques personnes qui vous sollicitaient au mal ; que vous eussiez manqué de le dire par crainte que l'on vous en fît sortir : votre confession ne vaudrait rien. Voyez si vous avez bien fait votre pénitence dans le temps qu'on vous l'avait ordonnée ; si vous avez fait toute réparation et les restitutions que vous pouviez et deviez faire, qui vous étaient commandées par votre confesseur.
2° Examinez-vous sur les devoirs de votre état, com-ment vous les avez remplis, c'est à quoi beaucoup de personnes ne font pas attention, et ce qui en jettera un grand nombre en enfer. – Mais, me direz-vous, comment faut-il donc s'examiner sur les devoirs de son état ? -Et comment ? Cela n'est pas bien difficile. Vous savez bien à quoi vous vous occupez, qui sont ceux qui sont sous votre conduite, dont Dieu vous demandera compte un jour. Êtes-vous père ou mère de famille ? Hé bien ! examinez-vous, comment vous vous êtes conduits envers vos enfants. Les avez-vous instruits de tous leurs de-voirs de religion ? Avez-vous eu soin de leur apprendre leurs prières dès qu'ils ont commencé à parler ? Leur avez-vous inspiré le respect qu'ils devaient avoir en la sainte présence de Dieu ? Ne leur avez-vous pas fait prier le bon Dieu sans prendre de l'eau bénite, sans leur dire pourquoi l'on prenait de l'eau bénite et les grâces qu'elle nous procurait ? Leur avez-vous appris les prin-cipaux mystères de la religion, nécessaires pour être sauvés ? Ne les avez-vous pas laissés dans une ignorance crasse, ne prenant pas tant à cœur le salut de leur âme que la conservation de vos bêtes ? Les avez-vous fait travailler, avant de les faire prier le bon Dieu ? Avez-vous négligé de les corriger les voyant offenser le Bon Dieu ? En avez-vous ri au lieu de les châtier chrétien-nement ? Leur avez-vous donné le mauvais exemple en vous mettant en colère, en vous disputant avec votre mari, vos voisins ou voisines ? N'avez-vous pas médit ou calomnié en leur présence ? Leur avez-vous appris à ne jamais mépriser les pauvres, en leur faisant donner l'aumône aux pauvres ? Avez-vous fait tout ce que vous avez pu pour les rendre agréables à Dieu et assurer leur salut ? Avez-vous manqué un jour de prier le bon Dieu pour eux ? Avez-vous manqué de les mettre sous la pro-tection de la Sainte Vierge quand ils sont venus au monde ?
Si vous avez des domestiques, avez-vous eu bien soin de les instruire ou de les faire instruire ? Les avez--vous fait assister aux catéchismes ? N'avez-vous rien négligé pour leur apprendre les moyens nécessaires pour se sauver ? Ne les avez-vous pas laissés dans l'ignorance crasse qui, de la mort, les traînera en enfer ? Avez-vous préféré le soin de vos bêtes au soin de leurs pauvres âmes qui ont tant coûté à Jésus-Christ, et que vous laissez perdre si misérablement en leur faisant manquer les offices et les instructions ? Avez-vous bien veillé sur leur conduite ? Leur avez-vous bien payé tous leurs gages ? En avez-vous eu soin dans leurs maladies ?
Si vous me demandez ce qu'il faut faire pour s'exa-miner comme il faut, c'est-à-dire pour faire une confes-sion qui nous mérite notre pardon, il faut retirer son cœur et son esprit de toute affaire temporelle, je veux dire ne penser ni à son commerce, ni à son ménage, descendre, avec une espèce d'horreur et d'indi-gnation, dans son cœur, avec un flambeau d'une main et une balance de l'autre, pour examiner rigoureuse-ment le nombre, toutes les circonstances et peser toute la malice de nos péchés. Mais n'étant que ténèbres, de nous-mêmes, nous sommes donc incapables de pouvoir pénétrer à fond cet abîme de corruption qui n'est bien connu que de Dieu seul. C'est donc à lui à qui nous devons nous adresser avec une humilité profonde, à la vue de nos péchés, et une grande confiance à sa bonté qui est infinie ; implorer les lumières du Saint-Esprit par une prière fervente et animée d'une foi plus vive qui touche le cœur de Dieu et attire sur nous ses misé-ricordes. Étant rentrés en nous-mêmes, M.F., disons--lui du fond de notre cœur : « Mon Dieu, ayez pitié d'un misérable pécheur tout couvert d'iniquités, qui n'en connaît ni le nombre ni la malice. Je m'adresse à vous qui êtes la lumière du monde ; mon Dieu, faites des-cendre dans mon cœur un rayon de votre lumière ; montrez-moi, je vous prie, mes péchés, afin que je puisse les détester et mériter mon pardon. » Oui, M.F., le péché jette dans notre esprit des ténèbres affreuses qui bouchent les yeux de notre âme.
Voyez, M.F., ce qui arriva à David qui, avant que le péché tombât sur son âme, apercevait avec tant de con-naissance les moindres fautes qu'il faisait. Mais ayant le malheur d'être tombé dans son premier péché, les yeux de son âme perdirent leur lumière. Non content de déshonorer la femme d'Urie, il le fait encore mourir, et reste un an dans cet état malheureux, sans se repro-cher ni son adultère, ni son homicide. Il ne s'en aper-çoit pas même, il faut que Dieu lui envoie son prophète Nathan pour lui ouvrir les yeux, et ce ne fut que dans ce moment qu'il se reconnut coupable .
Voilà une image terrible d'un pécheur qui croupit dans quelques péchés d'habitude ; il faut que Dieu le prévienne et aille le chercher, pour ainsi dire, dans ses désordres ; sans quoi, jamais nous n'en sortirions. Ce qui nous montre, M.F., qu'il est impossible de con-naître nos péchés et de faire une bonne confession si nous n'implorons pas de tout notre cœur les lumières du Saint-Esprit, afin de bien nous faire connaître le mal que nous avons fait et de nous donner la douleur néces-saire pour les détester. Voulez-vous savoir à quoi le pécheur ressemble ? A une personne extrêmement contrefaite et laide et qui se croit bien faite et bien belle, parce qu'elle ne s'est jamais bien regardée dans un miroir ; mais qui, dès qu'elle se considère, se trouve si laide, si affreuse, qu'elle ne peut se regarder, ni même y penser sans horreur. La même chose arrive au pécheur qui est resté quelque temps dans le péché, sans faire aucun retour sur lui-même. Mais rentrant en lui--même, il ne peut pas concevoir comment il a pu rester dans un état si déplorable. Qu'est-ce qui fait tant verser de larmes à certains pécheurs ? Rien autre, sinon qu'ils sont rentrés en eux-mêmes et qu'ils ont vu ce qu'ils n'avaient pas vu jusqu'à présent. Pourquoi est-ce que tant d'autres encore plus coupables sont tranquilles, ne versent point de larmes ? hélas ! M.F., c'est qu'ils ont fermé les yeux sur l'état de malheur où est réduite leur pauvre âme.
En second lieu, je dis que nous avons bien besoin des lumières du Sain-Esprit pour connaître nos péchés, parce que notre cœur est le siège de l'orgueil, qui ne cherche que les moyens de nous les faire connaître moindres qu'ils ne sont. Vous voyez que nous avons absolument besoin des secours du Saint-Esprit pour connaître nos péchés tels qu'ils sont.
3° Je dis que le pécheur, étant encore l'esclave du péché, a besoin d'une grâce forte pour le détacher entièrement du péché et des objets qui l'ont porté au péché. Combien ne trouvons-nous pas encore de cer-tains pécheurs qui semblent être convertis et qui res-sentent encore une certaine satisfaction en pensant aux désordres auxquels ils se sont livrés il y a quelque temps ! Nous avons donc bien besoin de la grâce de Dieu, qui nous inspire une horreur profonde de nos péchés passés.
Dites-moi, M.F., dans vos confessions et avant vos confessions avez-vous eu soin de demander à Dieu ses grâces et ses lumières pour ne pas profaner ce sacre-ment de miséricorde ? Oui, nous oublions peut-être que sans Dieu nous ne pouvons rien que faire mal. Avez--vous fait comme l'aveugle de Jéricho, qui reconnut son aveuglement et qui le déplora amèrement ? Avez-vous fait comme lui, qui s'adressa à Dieu avec tant de sincérité, animé d'une foi si vive, qu'il mérita de recouvrer la vue ? « O Jésus ! fils de David, ayez pitié de moi ! » Cela plusieurs fois de suite : « O Jésus ! fils de David, ayez pitié de moi. » Jésus, touché, toujours prêt à nous écouter et à nous accorder l'effet de nos demandes, se tourne contre lui en lui disant : «Que voulez-vous de moi ? » – « Mon Dieu, lui répond l'aveugle, faites que je voie. » – « Eh bien, lui dit ce bon Jésus, voyez ! » Hélas ! M.F., si lorsque nous sommes dans le péché nous sommes dans les ténèbres, nous pouvons nous adresser à Dieu comme l'aveugle : « Mon Dieu, devons--nous lui dire, faites que je voie le nombre et la malice de mes péchés. » Disons encore comme le saint roi David : « Mon Dieu, vous êtes ma lumière, éclairez mes ténèbres. » Et avec le saint homme Job : « Seigneur, montrez-moi mes péchés et toutes mes fautes . » Dieu qui désire mille fois mieux notre salut que nous le désirons nous-mêmes, ne manquera pas certainement de nous accorder la grâce que nous demandons.
Aussi, M.F., étant seuls et en la présence de Dieu, il faut commencer notre examen de conscience et re-chercher tous nos péchés ; prenez les commande-ments de Dieu et ceux de l'Eglise et les péchés capi-taux, et voyez comment et en combien de manières vous avez péché contre ces commandements. Examinez les devoirs de votre état, comparez votre vie avec vos devoirs ; remarquez avec soin, sans vous presser, en quoi vous vous en êtes écartés par pensées, par désirs, par actions et omissions. Pour vous faciliter cette recherche, examinez quelles sont vos occupations les plus ordinaires, les lieux où vous allez, les personnes que vous voyez.
Je n'entrerai pas dans tous ces détails, cela ne finirait plus ; c'est à chacun de vous à vous examiner là-dessus, et à voir en quoi vous êtes coupable. D'abord, examinez--vous sur vos confessions passées et voyez si vous avez assez accusé tous vos péchés mortels, avec une véritable douleur d'avoir offensé Dieu et un ferme propos de vous corriger et de quitter non seulement le péché, mais encore l'occasion prochaine du péché ; comme, par exemple, si vous demeuriez dans une maison où il y avait quelques personnes qui vous sollicitaient au mal ; que vous eussiez manqué de le dire par crainte que l'on vous en fît sortir : votre confession ne vaudrait rien. Voyez si vous avez bien fait votre pénitence dans le temps qu'on vous l'avait ordonnée ; si vous avez fait toute réparation et les restitutions que vous pouviez et deviez faire, qui vous étaient commandées par votre confesseur.
2° Examinez-vous sur les devoirs de votre état, com-ment vous les avez remplis, c'est à quoi beaucoup de personnes ne font pas attention, et ce qui en jettera un grand nombre en enfer. – Mais, me direz-vous, comment faut-il donc s'examiner sur les devoirs de son état ? -Et comment ? Cela n'est pas bien difficile. Vous savez bien à quoi vous vous occupez, qui sont ceux qui sont sous votre conduite, dont Dieu vous demandera compte un jour. Êtes-vous père ou mère de famille ? Hé bien ! examinez-vous, comment vous vous êtes conduits envers vos enfants. Les avez-vous instruits de tous leurs de-voirs de religion ? Avez-vous eu soin de leur apprendre leurs prières dès qu'ils ont commencé à parler ? Leur avez-vous inspiré le respect qu'ils devaient avoir en la sainte présence de Dieu ? Ne leur avez-vous pas fait prier le bon Dieu sans prendre de l'eau bénite, sans leur dire pourquoi l'on prenait de l'eau bénite et les grâces qu'elle nous procurait ? Leur avez-vous appris les prin-cipaux mystères de la religion, nécessaires pour être sauvés ? Ne les avez-vous pas laissés dans une ignorance crasse, ne prenant pas tant à cœur le salut de leur âme que la conservation de vos bêtes ? Les avez-vous fait travailler, avant de les faire prier le bon Dieu ? Avez-vous négligé de les corriger les voyant offenser le Bon Dieu ? En avez-vous ri au lieu de les châtier chrétien-nement ? Leur avez-vous donné le mauvais exemple en vous mettant en colère, en vous disputant avec votre mari, vos voisins ou voisines ? N'avez-vous pas médit ou calomnié en leur présence ? Leur avez-vous appris à ne jamais mépriser les pauvres, en leur faisant donner l'aumône aux pauvres ? Avez-vous fait tout ce que vous avez pu pour les rendre agréables à Dieu et assurer leur salut ? Avez-vous manqué un jour de prier le bon Dieu pour eux ? Avez-vous manqué de les mettre sous la pro-tection de la Sainte Vierge quand ils sont venus au monde ?
Si vous avez des domestiques, avez-vous eu bien soin de les instruire ou de les faire instruire ? Les avez--vous fait assister aux catéchismes ? N'avez-vous rien négligé pour leur apprendre les moyens nécessaires pour se sauver ? Ne les avez-vous pas laissés dans l'ignorance crasse qui, de la mort, les traînera en enfer ? Avez-vous préféré le soin de vos bêtes au soin de leurs pauvres âmes qui ont tant coûté à Jésus-Christ, et que vous laissez perdre si misérablement en leur faisant manquer les offices et les instructions ? Avez-vous bien veillé sur leur conduite ? Leur avez-vous bien payé tous leurs gages ? En avez-vous eu soin dans leurs maladies ?
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Et vous, ouvriers, en vous faisant bien payer, avez--vous eu soin de bien faire l'ouvrage tel que vous l'aviez promis ? Et vous, domestiques, examinez en quoi vous avez manqué envers vos maîtres : défaut de respect, murmure en obéissant, temps perdu : ne leur auriez--vous pas désobéi lorsqu'ils vous envoyaient aux offices ou aux catéchismes ? Ne les avez-vous pas décriés auprès des autres domestiques, pour leur donner mauvaise réputation ? Que chacun, M.F., sonde sa conscience, afin de pouvoir se rendre compte à soi-même, afin de pouvoir se connaître, dans le tribunal de la pénitence, aussi coupable que l'on est.
3° Je dis qu'il faut encore s'examiner sur les péchés d'omission, et presque personne n'y pense. Par exemple : pouvant faire l'aumône, avez-vous négligé de la faire ? Pouvant assister à la messe les jours ouvriers, y avez--vous manqué ? Pouvant rendre quelques services à votre prochain, l'avez-vous refusé ? Avez-vous donné de bons exemples à vos enfants, à vos domestiques ? Vous ont-ils vu manquer la Messe, les Vêpres, vos prières le matin et le soir ? Êtes-vous fidèles à fuir les occasions de péché, telles que la danse, le cabaret et les jeux ? Avez-vous travaillé à vous rendre agréables à Dieu ?
4° Je dis qu'il faut encore vous examiner sur vos péchés d'habitude. Sur chaque péché que l'on découvre, il faut encore examiner les circonstances nécessaires pour les bien faire connaître, et le nombre de fois que l'on y est tombé ; déclarer qui nous a donné l'occasion et quelles ont été les suites. Comme par exemple : si l'on vous avait confié un secret, il ne suffirait pas de dire que vous avez violé le secret, mais il faudrait encore dire quel mal cela a fait, sur quelle personne le mal est tombé. Si vous avez maudit, il faut dire si c'est par haine ou par ressentiment, ou simplement par légèreté si c'est en présence de plusieurs personnes, si cela a été applaudi par plusieurs, si votre mauvais exemple les a portés à maudire, combien de personnes et combien de fois. Si c'est un péché d'habitude, il faut dire combien a duré cette habitude, dans quel temps et dans quel lieu on l'a commis, ce qui est encore nécessaire pour en fixer la malice.
Vous conviendrez avec moi, M.F., que pour un tel examen il faut du temps, de l'application et de l’instruc-tion. Pour savoir combien il faut de temps, il est bien difficile de le savoir : il n'est pas douteux que ceux qui ne se confessent que rarement, il leur faut plus de temps qu'à ceux qui se confessent souvent. – Mais quelle application ou quels soins faut-il donner ? – Ce que vous donneriez pour faire une affaire que vous auriez à cœur de faire réussir, et que vous regarderiez comme un grand malheur si elle manquait.
Il n'est pas nécessaire, M.F., de vous parler longtemps du bonheur d'une bonne confession, ni du malheur d'une mauvaise. Vous savez qu'une bonne confession nous rend le ciel et l'amitié de notre Dieu, et qu'une mauvaise nous chasse du Paradis et nous précipite au plus profond des enfers. Cette seule pensée doit nous faire comprendre le temps et le soin que nous devons y apporter pour la faire saintement. Hélas ! M.F., combien de pécheurs qui s'aveuglent quand ils n'ont pas ces gros péchés que souvent même des païens honnêtes ne com-mettraient pas ! Il n'ont rien à dire. Cependant on les verra, pendant les saints offices, sans respect, sans dévo-tion, vivant dans une négligence habituelle de leur salut : et ils n'ont rien ! Hélas ! c'est qu'ils ne veulent pas se donner la peine de descendre dans leur cœur, où ils trouveraient de quoi les faire mourir d'horreur. Hélas ! combien de mensonges pernicieux, combien d'injustices, combien d'usures dans leurs prêts ! Combien de torts et, par conséquent, de restitutions à faire. Il en est de même pour ceux qui mènent une vie lâche et sensuelle ; qui croient que c'est assez d'une messe ; encore Dieu seul sait comment ils l'entendent ! Point de difficulté de manquer les vêpres, les catéchismes et les autres exercices de piété ! Hélas ! ils ne veulent pas chercher leurs fautes, parce qu'ils ne veulent pas changer de vie continuant à vivre dans une ignorance crasse et des plus criminelles. Mais, sans aller plus loin, une partie des chrétiens ne voient pas leurs péchés, parce qu'ils ne veillent pas assez sur eux-mêmes ; ils ne veulent pas prendre la peine de se faire instruire de leurs devoirs et de leur religion. Que s'ensuit-il de là, M.F., sinon une chaîne de confessions sacrilèges ? O mon Dieu, que de chrétiens damnés à cause de leur ignorance ! qui, en sortant du tribunal de la pénitence, sortent plus cou-pables qu'ils ne sont entrés.
Et que devez-vous faire pour éviter un si grand mal-heur ? M.F., le voici : ayez un grand soin de vous bien faire instruire de vos devoirs ; et, pour cela, soyez assi-dus et attentifs à écouter les instructions, catéchismes, lectures de piété. Soyez de bonne foi avec vous-mêmes, ayez une volonté ferme de sauver votre pauvre âme. Prenez l'habitude de vous examiner le matin, à midi et le soir, comment vous avez passé la journée. Le di-manche, rappelez à votre mémoire les plus gros péchés de la semaine : en suivant cette marche vous ne per-drez jamais vos péchés pour les déclarer ; vous vous en rappellerez, et, en vous en rappelant, vous ne pourrez pas vous empêcher de les détester et de faire tous vos efforts pour vous en corriger. Oui, M.F., lors-que vous pensez de vous approcher du sacrement de pénitence, il faut apporter, si vous le pouvez, la même diligence et la même rigueur que celle avec laquelle Jésus-Christ nous examinera au grand jour. Oh ! qu'il y a de quoi trembler, puisque Dieu nous y demandera compte même d'une parole inutile ! Hélas ! que vont devenir ceux qui seront coupables de tant de blas-phèmes, de jurements et de scandales ? Oui, M.F., crai-gnez, avec le saint roi David , que, malgré tous les soins que vous prendrez pour vous examiner, vous ne laissiez encore bien des péchés que vous ne connaîtrez qu'à la mort pour en rendre compte. Dites souvent avec le roi David : « Mon Dieu, pardonnez-moi les péchés que je ne connais pas. » Oui, M.F., soyons parfaitement sûrs qu'il y a beaucoup de péchés que nous ne connaî-trons jamais en ce monde. Comme, par exemple, un homme qui se livre à l'ivrognerie ne saura qu'au juge-ment de Dieu toutes les suites de ses intempérances et de ses excès. Celui qui se sera abandonné au vice infâme d'impureté ne saura jamais qu'au moment où il paraîtra devant son souverain Juge, les péchés sans nombre qu'il aura commis. Une fille mondaine ne connaîtra bien qu'après sa mort toutes les suites malheureuses de sa vanité, de ses immodesties et de son peu de pudeur. Les parents, les maîtres qui auront négligé de veiller sur leurs enfants et leurs domestiques et ne les ont pas instruits, qui les ont laissés courir dans les jeux, les cabarets et les danses, ne sauront qu'au tribunal de Dieu les suites funestes de leur négligence, et de tous les désordres dont ils ont été la cause et l'occasion. O mon Dieu, quelle sera pour lors leur surprise ! Quel désespoir effroyable d'un pécheur qui n'ouvre les yeux sur l'état de son âme qu'après sa mort, quand il n'y a plus de remède ! M.F., n'attendons pas ce moment mal-heureux qui nous causera tant de regrets ; profitons du temps que Dieu veut bien encore nous donner pour purifier notre conscience, afin de la faire connaître au ministre du Seigneur telle qu'elle est. Faisons comme dit saint Paul : Jugeons-nous rigoureusement nous--mêmes, afin que Dieu nous épargne dans son juge-ment . Cependant, M.F., malgré qu'il soit si difficile de connaître nos fautes, si nous agissons de bonne foi, si nous faisons ce que nous pouvons pour nous montrer tels que nous sommes, soyons tranquilles : Dieu est un père plein de miséricorde, qui nous aime infiniment et qui ne nous demandera jamais ce que nous n'avons pas pu faire.
Que devons-nous faire, M.F., après nous être bien examinés ? Le voici : c'est de demander à Dieu de tout notre cœur la contrition de nos fautes et un ferme propos, c'est-à-dire une bonne résolution de n'y plus retomber. Voilà, M.F., ce qui regarde l'examen de conscience.
3° Je dis qu'il faut encore s'examiner sur les péchés d'omission, et presque personne n'y pense. Par exemple : pouvant faire l'aumône, avez-vous négligé de la faire ? Pouvant assister à la messe les jours ouvriers, y avez--vous manqué ? Pouvant rendre quelques services à votre prochain, l'avez-vous refusé ? Avez-vous donné de bons exemples à vos enfants, à vos domestiques ? Vous ont-ils vu manquer la Messe, les Vêpres, vos prières le matin et le soir ? Êtes-vous fidèles à fuir les occasions de péché, telles que la danse, le cabaret et les jeux ? Avez-vous travaillé à vous rendre agréables à Dieu ?
4° Je dis qu'il faut encore vous examiner sur vos péchés d'habitude. Sur chaque péché que l'on découvre, il faut encore examiner les circonstances nécessaires pour les bien faire connaître, et le nombre de fois que l'on y est tombé ; déclarer qui nous a donné l'occasion et quelles ont été les suites. Comme par exemple : si l'on vous avait confié un secret, il ne suffirait pas de dire que vous avez violé le secret, mais il faudrait encore dire quel mal cela a fait, sur quelle personne le mal est tombé. Si vous avez maudit, il faut dire si c'est par haine ou par ressentiment, ou simplement par légèreté si c'est en présence de plusieurs personnes, si cela a été applaudi par plusieurs, si votre mauvais exemple les a portés à maudire, combien de personnes et combien de fois. Si c'est un péché d'habitude, il faut dire combien a duré cette habitude, dans quel temps et dans quel lieu on l'a commis, ce qui est encore nécessaire pour en fixer la malice.
Vous conviendrez avec moi, M.F., que pour un tel examen il faut du temps, de l'application et de l’instruc-tion. Pour savoir combien il faut de temps, il est bien difficile de le savoir : il n'est pas douteux que ceux qui ne se confessent que rarement, il leur faut plus de temps qu'à ceux qui se confessent souvent. – Mais quelle application ou quels soins faut-il donner ? – Ce que vous donneriez pour faire une affaire que vous auriez à cœur de faire réussir, et que vous regarderiez comme un grand malheur si elle manquait.
Il n'est pas nécessaire, M.F., de vous parler longtemps du bonheur d'une bonne confession, ni du malheur d'une mauvaise. Vous savez qu'une bonne confession nous rend le ciel et l'amitié de notre Dieu, et qu'une mauvaise nous chasse du Paradis et nous précipite au plus profond des enfers. Cette seule pensée doit nous faire comprendre le temps et le soin que nous devons y apporter pour la faire saintement. Hélas ! M.F., combien de pécheurs qui s'aveuglent quand ils n'ont pas ces gros péchés que souvent même des païens honnêtes ne com-mettraient pas ! Il n'ont rien à dire. Cependant on les verra, pendant les saints offices, sans respect, sans dévo-tion, vivant dans une négligence habituelle de leur salut : et ils n'ont rien ! Hélas ! c'est qu'ils ne veulent pas se donner la peine de descendre dans leur cœur, où ils trouveraient de quoi les faire mourir d'horreur. Hélas ! combien de mensonges pernicieux, combien d'injustices, combien d'usures dans leurs prêts ! Combien de torts et, par conséquent, de restitutions à faire. Il en est de même pour ceux qui mènent une vie lâche et sensuelle ; qui croient que c'est assez d'une messe ; encore Dieu seul sait comment ils l'entendent ! Point de difficulté de manquer les vêpres, les catéchismes et les autres exercices de piété ! Hélas ! ils ne veulent pas chercher leurs fautes, parce qu'ils ne veulent pas changer de vie continuant à vivre dans une ignorance crasse et des plus criminelles. Mais, sans aller plus loin, une partie des chrétiens ne voient pas leurs péchés, parce qu'ils ne veillent pas assez sur eux-mêmes ; ils ne veulent pas prendre la peine de se faire instruire de leurs devoirs et de leur religion. Que s'ensuit-il de là, M.F., sinon une chaîne de confessions sacrilèges ? O mon Dieu, que de chrétiens damnés à cause de leur ignorance ! qui, en sortant du tribunal de la pénitence, sortent plus cou-pables qu'ils ne sont entrés.
Et que devez-vous faire pour éviter un si grand mal-heur ? M.F., le voici : ayez un grand soin de vous bien faire instruire de vos devoirs ; et, pour cela, soyez assi-dus et attentifs à écouter les instructions, catéchismes, lectures de piété. Soyez de bonne foi avec vous-mêmes, ayez une volonté ferme de sauver votre pauvre âme. Prenez l'habitude de vous examiner le matin, à midi et le soir, comment vous avez passé la journée. Le di-manche, rappelez à votre mémoire les plus gros péchés de la semaine : en suivant cette marche vous ne per-drez jamais vos péchés pour les déclarer ; vous vous en rappellerez, et, en vous en rappelant, vous ne pourrez pas vous empêcher de les détester et de faire tous vos efforts pour vous en corriger. Oui, M.F., lors-que vous pensez de vous approcher du sacrement de pénitence, il faut apporter, si vous le pouvez, la même diligence et la même rigueur que celle avec laquelle Jésus-Christ nous examinera au grand jour. Oh ! qu'il y a de quoi trembler, puisque Dieu nous y demandera compte même d'une parole inutile ! Hélas ! que vont devenir ceux qui seront coupables de tant de blas-phèmes, de jurements et de scandales ? Oui, M.F., crai-gnez, avec le saint roi David , que, malgré tous les soins que vous prendrez pour vous examiner, vous ne laissiez encore bien des péchés que vous ne connaîtrez qu'à la mort pour en rendre compte. Dites souvent avec le roi David : « Mon Dieu, pardonnez-moi les péchés que je ne connais pas. » Oui, M.F., soyons parfaitement sûrs qu'il y a beaucoup de péchés que nous ne connaî-trons jamais en ce monde. Comme, par exemple, un homme qui se livre à l'ivrognerie ne saura qu'au juge-ment de Dieu toutes les suites de ses intempérances et de ses excès. Celui qui se sera abandonné au vice infâme d'impureté ne saura jamais qu'au moment où il paraîtra devant son souverain Juge, les péchés sans nombre qu'il aura commis. Une fille mondaine ne connaîtra bien qu'après sa mort toutes les suites malheureuses de sa vanité, de ses immodesties et de son peu de pudeur. Les parents, les maîtres qui auront négligé de veiller sur leurs enfants et leurs domestiques et ne les ont pas instruits, qui les ont laissés courir dans les jeux, les cabarets et les danses, ne sauront qu'au tribunal de Dieu les suites funestes de leur négligence, et de tous les désordres dont ils ont été la cause et l'occasion. O mon Dieu, quelle sera pour lors leur surprise ! Quel désespoir effroyable d'un pécheur qui n'ouvre les yeux sur l'état de son âme qu'après sa mort, quand il n'y a plus de remède ! M.F., n'attendons pas ce moment mal-heureux qui nous causera tant de regrets ; profitons du temps que Dieu veut bien encore nous donner pour purifier notre conscience, afin de la faire connaître au ministre du Seigneur telle qu'elle est. Faisons comme dit saint Paul : Jugeons-nous rigoureusement nous--mêmes, afin que Dieu nous épargne dans son juge-ment . Cependant, M.F., malgré qu'il soit si difficile de connaître nos fautes, si nous agissons de bonne foi, si nous faisons ce que nous pouvons pour nous montrer tels que nous sommes, soyons tranquilles : Dieu est un père plein de miséricorde, qui nous aime infiniment et qui ne nous demandera jamais ce que nous n'avons pas pu faire.
Que devons-nous faire, M.F., après nous être bien examinés ? Le voici : c'est de demander à Dieu de tout notre cœur la contrition de nos fautes et un ferme propos, c'est-à-dire une bonne résolution de n'y plus retomber. Voilà, M.F., ce qui regarde l'examen de conscience.
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II. – Que devons-nous faire après cela ? Le voici c'est de nous approcher du tribunal de la pénitence avec respect et une espèce de tremblement, et ne pas faire comme les enfants qui tournent la tête, qui parfois rient et parlent Cela annoncerait que vous ne comprenez pas mieux qu'eux la grandeur de l'action que vous allez faire. Au contraire, M.F., imitez le publicain qui se regardait indigne de porter ses yeux vers le ciel, baissait les yeux vers la terre, avec une profonde humilité . En attendant de vous confesser, repassez dans votre mémoire tous les péchés que vous avez trouvés dans votre examen ; renouvelez votre con-trition, prenez-là de bonnes résolutions de mieux vivre, que vous n'avez fait jusqu'à présent ; priez avec ferveur le bon Dieu, afin qu'il daigne avoir pitié de vous. Prenez garde de ne jamais ni pousser, ni presser les personnes qui se confessent ; ni vous tenir trop près du confessionnal, crainte d'entendre la confession des autres. Si vous aviez entendu quelques péchés, n'oubliez pas que vous êtes obligés au même secret que le prêtre ; mais si vous les aviez écoutés exprès et que vous les disiez à un autre, c'est un gros péché qui vous damnerait, si vous aviez le malheur de ne pas vous en accuser avant de mourir. Il faut encore dire si vous avez eu la volonté d'entendre les péchés des autres.
Lorsque vous êtes au confessionnal, ne regardez que Jésus-Christ dans la personne du prêtre qui tient sa place. Faites le signe de la croix avec respect et un peu incliné, en disant : « Mon Père, bénissez-moi parce que j'ai beaucoup péché » ; et là, pénétré du regret que doivent vous donner vos péchés et la grande charité de Jésus-Christ qui veut bien, tout coupable que vous êtes, vous souffrir à ses pieds, pensant que vos crimes vous mériteraient d'être précipité dans les enfers, récitez votre Confesse à Dieu jusqu'à ces mots : C'est ma faute. Ensuite, sans attendre que le prêtre vous interroge, dites depuis quel temps vous ne vous êtes pas con-fessé, si vous avez reçu l'absolution ou si vous ne l'avez pas reçue, en lui disant pourquoi on vous l'a refusée ; si vous avez fait votre pénitence dans le temps qu'on vous l'avait commandée ; de même si vous avez manqué de faire les aumônes, les restitutions, les réconciliations que vous deviez faire avant de revenir vous confesser ; si vous avez laissé quelques péchés mortels dans vos dernières confessions ; si c'est invo-lontairement, par négligence, faute de ne vous être pas assez examiné, ou si c'est par honte ou par crainte ; bien lui expliquer tout cela. Ensuite, autant bien que vous le pourrez, lui accuser tous les péchés que vous avez commis depuis votre dernière confession, vous rappelant qu'il faut les avouer humblement, entière-ment, avec simplicité et avec prudence ; et après avoir déclaré tant que vous pouvez vos péchés, vous dites Mon Père, je m'accuse de tous ces péchés et de tous ceux de ma vie, tous ceux dont je ne me souviens pas ; j'en demande bien pardon à Dieu de tout mon cœur et à vous la pénitence et l'absolution, si vous le jugez à propos .
Votre confession étant faite, le prêtre vous fera les interrogations qu'il vous croira nécessaires. Il faut lui répondre avec vérité. S'il vous donne quelques avis, il faut les écouter avec attention sans vous occuper à chercher vos péchés que vous pourriez avoir oubliés et ne jamais l'interroger mal à propos. Lorsque vous recevez votre pénitence, il faut la recevoir avec un ferme désir de l'accomplir le mieux que vous pourrez. S'il vous refuse l'absolution, il faut s'y soumettre avec humilité, parce que s'il vous la donnait lorsque vous ne la méritez pas, il vous perdrait et se perdrait lui-même, c'est-à-dire que vous vous damneriez tous les deux. Faites bien atten-tion aux raisons pourquoi il vous refuse l'absolution afin de bien employer le temps que vous devez passer sans revenir vous confesser, à vous corriger, afin qu'il ne soit pas obligé de vous la refuser encore une fois. S'il jugeait à propos de vous la donner, achevez votre Confesse à Dieu. Dans ce moment précieux, M.F., renou-velez tous les sentiments de piété dont vous êtes capables ; faites votre acte de contrition de tout votre cœur, unissez votre douleur à celle que Jésus-Christ eut de vos péchés au jardin des Olives. Demandez ardemment à Dieu qu'il veuille bien ratifier dans le ciel l'absolution que le prêtre vient de vous donner.
Après cela, il faut se retirer du confessionnal avec modestie, se prosterner humblement aux pieds du bon Dieu, le remercier de la grâce qu'il vient de vous faire. Rappelez-vous bien des moyens que le prêtre vous a donnés pour vous corriger ; et puis vous prenez de bonnes résolutions de les mettre en pratique. Avant de sortir de l'église, commencez à faire votre pénitence qui vous a été imposée. Prenez une bonne résolution de veiller désormais sur vous-même, pour ne pas perdre la grâce précieuse que vous venez de recevoir. – Et que faut-il faire pour cela ? – M.F., le voici : C'est de se défier beau-coup de soi-même, et se tenir continuellement sur ses gardes. Oui, la vue de notre faiblesse doit nous faire trembler. Non. seulement nous sommes continuellement portés au mal ; mais le démon, après une bonne con-fession, redouble tous ses efforts afin de nous faire retomber dans les péchés que nous avons confessés. Cette seule pensée faisait trembler les plus grands saints. Hélas ! que devons-nous faire, nous qui tombons presque chaque fois que le démon nous tente ? Que devons-nous faire encore ? C'est d'éviter, autant que nous pouvons, les occasions et les personnes qui nous ont portés au mal ; sans quoi, jamais nous n'exécuterons nos bonnes résolu-tions. Hélas ! M.F., combien de pécheurs qui aidés de la grâce sont rentrés dans le bon chemin du salut, mais qui, n'ayant pas fui les occasions, sont retombés, et ne sont sortis du péché que pour aller brûler dans les enfers ! Troisièmement, il faut avoir grandement recours à la prière et Jésus-Christ nous le dit lui-même : « Veillez et priez sans cesse, de crainte que vous ne succombiez à la tentation. » Enfin, si vous aviez le malheur de retomber, hâtez-vous de vous relever ; parce que plus vous resterez dans votre péché, plus il vous sera difficile d'en sortir. Oui, M.F., si nous employons tous ces moyens, nous sommes sûrs de nous corriger, quelque forte que soit notre mauvaise habitude. Il n'en est pas des maladies de l'âme comme de celles du corps. Celles-ci quelquefois n'ont point de guérison, mais celles de l'âme ne sont jamais sans remède, si le pécheur le veut sincère-ment ; et cette guérison vous sera très certainement ac-cordée, si vous le voulez. O mon Dieu ! quel bonheur pour un pécheur qui désire de regagner le ciel et l'amitié de Dieu qu'il a perdus par le péché, d'être sûr de réussir dans son entreprise ! Voilà donc, M.F., ce que vous devez faire avant et pendant votre confession.
Lorsque vous êtes au confessionnal, ne regardez que Jésus-Christ dans la personne du prêtre qui tient sa place. Faites le signe de la croix avec respect et un peu incliné, en disant : « Mon Père, bénissez-moi parce que j'ai beaucoup péché » ; et là, pénétré du regret que doivent vous donner vos péchés et la grande charité de Jésus-Christ qui veut bien, tout coupable que vous êtes, vous souffrir à ses pieds, pensant que vos crimes vous mériteraient d'être précipité dans les enfers, récitez votre Confesse à Dieu jusqu'à ces mots : C'est ma faute. Ensuite, sans attendre que le prêtre vous interroge, dites depuis quel temps vous ne vous êtes pas con-fessé, si vous avez reçu l'absolution ou si vous ne l'avez pas reçue, en lui disant pourquoi on vous l'a refusée ; si vous avez fait votre pénitence dans le temps qu'on vous l'avait commandée ; de même si vous avez manqué de faire les aumônes, les restitutions, les réconciliations que vous deviez faire avant de revenir vous confesser ; si vous avez laissé quelques péchés mortels dans vos dernières confessions ; si c'est invo-lontairement, par négligence, faute de ne vous être pas assez examiné, ou si c'est par honte ou par crainte ; bien lui expliquer tout cela. Ensuite, autant bien que vous le pourrez, lui accuser tous les péchés que vous avez commis depuis votre dernière confession, vous rappelant qu'il faut les avouer humblement, entière-ment, avec simplicité et avec prudence ; et après avoir déclaré tant que vous pouvez vos péchés, vous dites Mon Père, je m'accuse de tous ces péchés et de tous ceux de ma vie, tous ceux dont je ne me souviens pas ; j'en demande bien pardon à Dieu de tout mon cœur et à vous la pénitence et l'absolution, si vous le jugez à propos .
Votre confession étant faite, le prêtre vous fera les interrogations qu'il vous croira nécessaires. Il faut lui répondre avec vérité. S'il vous donne quelques avis, il faut les écouter avec attention sans vous occuper à chercher vos péchés que vous pourriez avoir oubliés et ne jamais l'interroger mal à propos. Lorsque vous recevez votre pénitence, il faut la recevoir avec un ferme désir de l'accomplir le mieux que vous pourrez. S'il vous refuse l'absolution, il faut s'y soumettre avec humilité, parce que s'il vous la donnait lorsque vous ne la méritez pas, il vous perdrait et se perdrait lui-même, c'est-à-dire que vous vous damneriez tous les deux. Faites bien atten-tion aux raisons pourquoi il vous refuse l'absolution afin de bien employer le temps que vous devez passer sans revenir vous confesser, à vous corriger, afin qu'il ne soit pas obligé de vous la refuser encore une fois. S'il jugeait à propos de vous la donner, achevez votre Confesse à Dieu. Dans ce moment précieux, M.F., renou-velez tous les sentiments de piété dont vous êtes capables ; faites votre acte de contrition de tout votre cœur, unissez votre douleur à celle que Jésus-Christ eut de vos péchés au jardin des Olives. Demandez ardemment à Dieu qu'il veuille bien ratifier dans le ciel l'absolution que le prêtre vient de vous donner.
Après cela, il faut se retirer du confessionnal avec modestie, se prosterner humblement aux pieds du bon Dieu, le remercier de la grâce qu'il vient de vous faire. Rappelez-vous bien des moyens que le prêtre vous a donnés pour vous corriger ; et puis vous prenez de bonnes résolutions de les mettre en pratique. Avant de sortir de l'église, commencez à faire votre pénitence qui vous a été imposée. Prenez une bonne résolution de veiller désormais sur vous-même, pour ne pas perdre la grâce précieuse que vous venez de recevoir. – Et que faut-il faire pour cela ? – M.F., le voici : C'est de se défier beau-coup de soi-même, et se tenir continuellement sur ses gardes. Oui, la vue de notre faiblesse doit nous faire trembler. Non. seulement nous sommes continuellement portés au mal ; mais le démon, après une bonne con-fession, redouble tous ses efforts afin de nous faire retomber dans les péchés que nous avons confessés. Cette seule pensée faisait trembler les plus grands saints. Hélas ! que devons-nous faire, nous qui tombons presque chaque fois que le démon nous tente ? Que devons-nous faire encore ? C'est d'éviter, autant que nous pouvons, les occasions et les personnes qui nous ont portés au mal ; sans quoi, jamais nous n'exécuterons nos bonnes résolu-tions. Hélas ! M.F., combien de pécheurs qui aidés de la grâce sont rentrés dans le bon chemin du salut, mais qui, n'ayant pas fui les occasions, sont retombés, et ne sont sortis du péché que pour aller brûler dans les enfers ! Troisièmement, il faut avoir grandement recours à la prière et Jésus-Christ nous le dit lui-même : « Veillez et priez sans cesse, de crainte que vous ne succombiez à la tentation. » Enfin, si vous aviez le malheur de retomber, hâtez-vous de vous relever ; parce que plus vous resterez dans votre péché, plus il vous sera difficile d'en sortir. Oui, M.F., si nous employons tous ces moyens, nous sommes sûrs de nous corriger, quelque forte que soit notre mauvaise habitude. Il n'en est pas des maladies de l'âme comme de celles du corps. Celles-ci quelquefois n'ont point de guérison, mais celles de l'âme ne sont jamais sans remède, si le pécheur le veut sincère-ment ; et cette guérison vous sera très certainement ac-cordée, si vous le voulez. O mon Dieu ! quel bonheur pour un pécheur qui désire de regagner le ciel et l'amitié de Dieu qu'il a perdus par le péché, d'être sûr de réussir dans son entreprise ! Voilà donc, M.F., ce que vous devez faire avant et pendant votre confession.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
III. – Je vous ai dit que je vous montrerais qui sont ceux qui font de mauvaises confessions, et ce qu'il fallait faire pour les réparer et n'être pas damné. J'en trouve sept sortes, de ceux qui profanent ce sacrement et qui s'abîment au plus profond des enfers. Ecoutez-le bien, afin que vous puissiez connaître si vous êtes de ce nombre. D'abord je suis sûr qu'il y en a de ceux qui m'écoutent qui sont de ce nombre, qui peut-être n'ou-vriront pas encore les yeux aujourd'hui sur cet état affreux et malheureux, parce qu'ils sont sourds et aveu-gles pour comprendre ; la parole de Dieu ne les touche pas ; et les lumières de l'Esprit-Saint, à qui ils ont fermé la porte de leur cœur, ne leur montrera pas l'état épou-vantable où le péché les a précipités. Ils mourront comme ils ont vécu, c'est-à-dire « vivre en pécheur et mourir en réprouvé. » Ecoutez-moi bien, et ensuite vous descen-drez dans vos consciences avec le flambeau d'une main et la balance de l'autre : ensuite vous jugerez vous--mêmes, avant que Dieu vous juge et vous jette en enfer.
Les premiers sont ceux qui par honte ou par crainte ont volontairement caché quelques péchés dans leurs confessions, ou quelques circonstances considérables, ceux qui n'ont pas dit le nombre de leurs péchés mor-tels ; ceux qui n'ont pas déclaré quelques péchés mor-tels ; ceux qui vont confessera à un autre quelques gros péchés et reviennent au même dire leurs petits péchés ; ceux qui à confesse pensent qu'on aura bonne opinion d'eux, s'ils les conservent, parce qu'ils ont négligé de se faire instruire ou de profiter des instructions ; ceux qui n'ont déclaré un péché mortel que parce que le con-fesseur le leur a demandé, et qui, sans cette demande, ne l'auraient pas dit. – 2° Je dis que ceux-là font de mau-vaises confessions, qui ne donnent pas tout le temps nécessaire pour connaître leurs péchés mortels ; ceux qui se confessent par routine, par habitude, sans avoir une véritable douleur de leurs péchés, ni le ferme propos de ne plus les commettre, de préférer la mort même, s'il le faut, plutôt que d'y retomber. – 3° Ceux qui vont chercher les confesseurs pour passer plus faci-lement. O mon Dieu ! que de confessions sacrilèges ! O mon Dieu ! que de chrétiens damnés ! – 4° Ceux qui, ayant quelques restitutions, ne veulent pas ou ne font pas tous leurs efforts pour les faire ; comme ceux encore qui ont été chargés de faire des aumônes, de faire dire des Messes, et laissent tout cela de côté. – 5° Ceux qui croient qu'il n'y a point de mal de tirer intérêt de leur argent, sans avoir les titres légitimes. – 6° Ceux qui ont conti-nué à vivre dans l'occasion du péché, pouvant la quitter comme serait une personne qui est dans une maison où il y a une peste et qui n'en sort pas ; comme ceux qui vont dans les veilles, où ils sont sûrs de n'y entendre que de mauvais propos contre la religion et contre la pureté, qui continuent d'y aller malgré leurs remords de conscience et la défense de leur confesseur. Ceux qui ont continué à vivre dans les habitudes du péché, comme les pensées volontaires, les désirs, les paroles et les actions déshonnêtes ; qui ne font pas d'efforts pour se corriger : comme un ivrogne qui tombe toujours à peu près de même ; ceux qui jurent le saint nom de Dieu ; et ainsi des autres péchés mortels. Ceux qui vivent sans se réconcilier avec leur prochain, qui ne veulent pas pardonner ou qui ne pardonnent qu'à moitié. Ceux qui ont flétri la réputation du prochain et ne font ce qu'ils peuvent pour la rétablir. Ne vouloir pas faire sa pénitence, pensant que le prêtre n'a pas entendu ou com-pris un péché mortel. – 7° Tous ceux qui fréquentent les sacrements sans être suffisamment instruits des prin-cipaux mystères de la religion, ou qui ignorent, par leur faute, ce qui regarde les sacrements qu'ils reçoivent.
Les pères et les mères, les maîtres et maîtresses qui ne connaissent leurs devoirs envers leurs enfants et leurs domestiques, toutes ces personnes sont indignes d'absolution ; et toutes les absolutions qu'ils ont reçues jusqu'à ce moment sont autant de sacrilèges qui ne leur serviront qu'à les jeter plus profond dans les enfers. Ces sortes de chrétiens ont donc, dans ce moment, la conscience chargée de mille et mille sacrilèges, et encore sont couverts de tous les péchés qu'ils ont commis et confessés jusqu'à présent, comme de ceux qu'ils n'ont pas confessés.
Que conclure de cela, M.F. ? Rien autre, qu'après tant de sacrilèges, après tant de péchés cachés ou confessés sans contrition, ni résolution de préférer même la mort que de les recommettre, ils ne craignent pas si la mort les attrape dans cet état malheureux, d'être précipités dans les flammes pendant toute l'éternité. O mon Dieu, que de chrétiens qui sont dans cet abîme et qui ne le croient pas, parce qu'ils ne veulent pas prendre la peine de des-cendre dans l'intérieur de leur cœur pour y reconnaître les maux infinis que le péché leur a faits ! Hélas ! que la lumière du grand jour des vengeances va faire trouver de sacrilèges !
D'après cela, M.F., il vous est donc extrêmement nécessaire de vous examiner avec soin, si vous n'êtes pas dans quelques-uns des cas dont je viens de vous parler. Si vous doutez de la moindre chose , ne vous endormez pas là-dessus, enfoncés dans vous-mêmes. Peut-être qu'examinant bien, vous verrez ce que vous n'avez jamais vu ; peut-être qu'au premier coup d’œil vous allez frémir et trembler de trouver des crimes auxquels vous n'aviez jamais réfléchi. Revenez, M.F., sur vos pas ; si vous doutez de toute votre vie, refaites vos confessions de toute votre vie, ou au moins consi-dérez bien depuis quel temps vous êtes coupable : si c'est toute votre vie, il faut redire tous vos péchés mor-tels que vous avez commis, le nombre et les circons-tances autant que vous pourrez, accusez toutes vos confessions et communions qui sont autant de sacri-lèges .
Les premiers sont ceux qui par honte ou par crainte ont volontairement caché quelques péchés dans leurs confessions, ou quelques circonstances considérables, ceux qui n'ont pas dit le nombre de leurs péchés mor-tels ; ceux qui n'ont pas déclaré quelques péchés mor-tels ; ceux qui vont confessera à un autre quelques gros péchés et reviennent au même dire leurs petits péchés ; ceux qui à confesse pensent qu'on aura bonne opinion d'eux, s'ils les conservent, parce qu'ils ont négligé de se faire instruire ou de profiter des instructions ; ceux qui n'ont déclaré un péché mortel que parce que le con-fesseur le leur a demandé, et qui, sans cette demande, ne l'auraient pas dit. – 2° Je dis que ceux-là font de mau-vaises confessions, qui ne donnent pas tout le temps nécessaire pour connaître leurs péchés mortels ; ceux qui se confessent par routine, par habitude, sans avoir une véritable douleur de leurs péchés, ni le ferme propos de ne plus les commettre, de préférer la mort même, s'il le faut, plutôt que d'y retomber. – 3° Ceux qui vont chercher les confesseurs pour passer plus faci-lement. O mon Dieu ! que de confessions sacrilèges ! O mon Dieu ! que de chrétiens damnés ! – 4° Ceux qui, ayant quelques restitutions, ne veulent pas ou ne font pas tous leurs efforts pour les faire ; comme ceux encore qui ont été chargés de faire des aumônes, de faire dire des Messes, et laissent tout cela de côté. – 5° Ceux qui croient qu'il n'y a point de mal de tirer intérêt de leur argent, sans avoir les titres légitimes. – 6° Ceux qui ont conti-nué à vivre dans l'occasion du péché, pouvant la quitter comme serait une personne qui est dans une maison où il y a une peste et qui n'en sort pas ; comme ceux qui vont dans les veilles, où ils sont sûrs de n'y entendre que de mauvais propos contre la religion et contre la pureté, qui continuent d'y aller malgré leurs remords de conscience et la défense de leur confesseur. Ceux qui ont continué à vivre dans les habitudes du péché, comme les pensées volontaires, les désirs, les paroles et les actions déshonnêtes ; qui ne font pas d'efforts pour se corriger : comme un ivrogne qui tombe toujours à peu près de même ; ceux qui jurent le saint nom de Dieu ; et ainsi des autres péchés mortels. Ceux qui vivent sans se réconcilier avec leur prochain, qui ne veulent pas pardonner ou qui ne pardonnent qu'à moitié. Ceux qui ont flétri la réputation du prochain et ne font ce qu'ils peuvent pour la rétablir. Ne vouloir pas faire sa pénitence, pensant que le prêtre n'a pas entendu ou com-pris un péché mortel. – 7° Tous ceux qui fréquentent les sacrements sans être suffisamment instruits des prin-cipaux mystères de la religion, ou qui ignorent, par leur faute, ce qui regarde les sacrements qu'ils reçoivent.
Les pères et les mères, les maîtres et maîtresses qui ne connaissent leurs devoirs envers leurs enfants et leurs domestiques, toutes ces personnes sont indignes d'absolution ; et toutes les absolutions qu'ils ont reçues jusqu'à ce moment sont autant de sacrilèges qui ne leur serviront qu'à les jeter plus profond dans les enfers. Ces sortes de chrétiens ont donc, dans ce moment, la conscience chargée de mille et mille sacrilèges, et encore sont couverts de tous les péchés qu'ils ont commis et confessés jusqu'à présent, comme de ceux qu'ils n'ont pas confessés.
Que conclure de cela, M.F. ? Rien autre, qu'après tant de sacrilèges, après tant de péchés cachés ou confessés sans contrition, ni résolution de préférer même la mort que de les recommettre, ils ne craignent pas si la mort les attrape dans cet état malheureux, d'être précipités dans les flammes pendant toute l'éternité. O mon Dieu, que de chrétiens qui sont dans cet abîme et qui ne le croient pas, parce qu'ils ne veulent pas prendre la peine de des-cendre dans l'intérieur de leur cœur pour y reconnaître les maux infinis que le péché leur a faits ! Hélas ! que la lumière du grand jour des vengeances va faire trouver de sacrilèges !
D'après cela, M.F., il vous est donc extrêmement nécessaire de vous examiner avec soin, si vous n'êtes pas dans quelques-uns des cas dont je viens de vous parler. Si vous doutez de la moindre chose , ne vous endormez pas là-dessus, enfoncés dans vous-mêmes. Peut-être qu'examinant bien, vous verrez ce que vous n'avez jamais vu ; peut-être qu'au premier coup d’œil vous allez frémir et trembler de trouver des crimes auxquels vous n'aviez jamais réfléchi. Revenez, M.F., sur vos pas ; si vous doutez de toute votre vie, refaites vos confessions de toute votre vie, ou au moins consi-dérez bien depuis quel temps vous êtes coupable : si c'est toute votre vie, il faut redire tous vos péchés mor-tels que vous avez commis, le nombre et les circons-tances autant que vous pourrez, accusez toutes vos confessions et communions qui sont autant de sacri-lèges .
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
IV. – Je ne doute pas, M.F., que si vous n'avez pas encore entièrement perdu la foi, cela vous trouble et vous inquiète sur vos confessions et communions passées. – Comment pouvoir me rappeler de tout ce que j'ai fait à quatorze ou vingt ans, et peut-être à cin-quante ou soixante ans ? – M.F., ce qui nous parait tout à fait impossible à nous-mêmes, nous est non seule-ment possible, mais facile avec la grâce de Dieu. Est-ce l'examen de votre conscience qui vous effraie ? Main-tenant vous allez voir qu'il n'est pas si difficile que vous vous le représentez. Je vous dirai que pour faire une confession générale il n'est pas nécessaire d'accuser ses péchés véniels en particulier, c'est-à-dire d'en dire le nombre, toutes les circonstances, comme sont les petites désobéissances, les mensonges, les médisances qui ne portent perte à personne, c'est-à-dire en matière légère, les distractions dans ses prières, faute de s'y être, bien préparé, et autres péchés semblables. Il vous suffira de vous en accuser en général à la fin de votre confession. Votre examen ne va donc rouler que sur vos péchés mortels. Tous vos péchés sont ou des péchés que vous ne commettez que rarement, ou sont des péchés d'habi-tude : ou votre habitude n'a duré qu'un certain temps, ou elle a duré toujours depuis que vous l'avez com-mencée.
1° Si vous n'avez commis certains péchés que rare-ment, comme serait par exemple de jurer le saint nom de Dieu, de vous mettre en colère, de maudire votre travail, vos enfants ou vos bêtes, il n'est pas bien difficile de dire combien de fois à peu près vous y êtes tombé par année, par mois ou par semaine. Si c'est un péché d'habitude, vous savez bien combien d'années a duré cette habitude, à quel âge vous l'avez commencée, à peu près quel temps elle a duré, si vous l'avez perdue pen-dant quelque temps dans le temps que vous tombiez ; il n'est pas difficile de dire combien vous avez commis ce péché par mois et par semaine et par jour. Hé bien ! M.F., voilà tout ce qu'il faudrait faire pour avoir le bonheur de réparer toutes vos confessions et communions mauvaises, en les accusant en disant : « Mon père, je m'accuse d'avoir fait tant de confessions et de commu-nions pendant ma vie, ou par année ou par mois . » Lorsque vous ne pouvez vous rappeler au juste, dites seu-lement : « Mon père, je m'accuse à peu près tant de fois. » Dieu n'en demande pas davantage : pourvu que vous ayez donné à votre examen tout le temps et tous les soins qu'il faut et que vous soyez de bonne foi, c'est-à-dire sincère dans vos accusations et dans votre repentir, vous êtes sûr que quand toutes vos confessions et communions seraient des sacrilèges, que le bon Dieu vous pardonnera et que vous serez sauvés. D'un autre côté, le confesseur, qui désire autant que vous le salut de votre bonne âme, ne manquera pas de faire tout ce qu'il pourra pour vous aider, soit par ses interrogations, soit par ses prières, surtout pendant la sainte Messe, en demandant à Dieu pour vous les grâces et les forces qui vous sont nécessaires pour bien faire votre confession.
Prenez bien garde de ne pas vous laisser prendre à ce piège du démon qui en perd un grand nombre, qui est de leur faire commencer à accuser tous leurs petits péchés les premiers, afin qu'ils n'aient pas la force de dire les gros ensuite. Commencez, M.F., à dire au con-traire tous vos plus gros péchés les premiers, alors, vous ôtez tout au démon. – Mais, me direz-vous, cela est bien aisé à dire, mais le faire c'est bien autre chose. Com-ment avoir la force de dire tant de péchés, si affreux qui font horreur rien que d'y penser. – Voulez-vous, M.F. , une vérité bien claire ? C'est que ce n'est qu'un orgueil-leux qui a honte de dire ses péchés ou qui les a cachés. Otez cet orgueil de votre cœur, et vous vous accuserez de vos péchés tels que vous voudriez les avoir accusés à l'heure de la mort. Toute personne qui désire vérita-blement à cœur son salut, ne craint nullement d'en faire l'accusation. En voici un exemple bien frappant, rapporté par saint Jean Climaque : Me trouvant un jour, nous dit ce grand saint, dans un monastère, il vint un homme se présenter afin de passer sa vie dans la pénitence ; pen-dant toute sa vie il n'avait fait que brigandages. Le supé-rieur lui ordonna de passer sept jours à la porte du monastère. Voyant qu'il persévérait, il lui ordonna de déclarer devant tout le monde tous les péchés qu'il avait commis. Ce voleur avoua sincèrement tout ce qu'il avait fait. Le supérieur, pour éprouver si sa conversion était bien sincère, lui commanda de les accuser encore devant les religieux du monastère. Cet homme, qui était véritablement touché, qui ne cherchait que les moyens de fléchir la justice divine, répondit au supérieur que non seulement il était prêt à les déclarer devant les reli-gieux, mais au milieu de toute la ville d'Alexandrie. Alors le supérieur fit assembler tous les religieux qui étaient plus de trois cents. Comme c'était un dimanche, après l'évangile, il commande qu'on lui amène ce cou-pable déjà justifié, les mains liées, revêtu d'un cilice, la tête couverte de cendres, conduit par plusieurs reli-gieux qui le frappaient à coups de verges. Ce spectacle attendrit si fort les assistants que tous fondaient en larmes. Le supérieur lui dit de rester à la porte de l'église, qu'il ne méritait pas d'y entrer. Ces paroles le frappèrent si fortement qu'il tomba la face contre terre. Le supérieur, le voyant en cet état, lui commanda de dire publiquement ses péchés. Il le fit avec tant de larmes et de douleur, qu'il lui semblait perdre la vie, tant la dou-leur de ses péchés était grande. L'on fut obligé de lui dire de cesser.
Voyez encore saint Augustin, a-t-il craint, a-t-il eu honte de faire l'aveu de ses péchés, non seulement à un prêtre, mais à tout l'univers ? M.F., non, nous n'aurons point de honte et de crainte, si nous avons l'humilité et la connaissance de nous-même.
De là je conclus que tout chrétien qui, après avoir péché, craint de s'accuser, n'est qu'un orgueilleux. Voyez-vous, M.F., un motif bien capable de nous engager à une confession de toute notre vie, si vous vous sentez coupable ; c'est de là que dépend votre bonheur ou votre malheur éternel. Ce soir, lorsque vous serez au lit, mettez-vous dans la posture où vous serez un jour dans la bière, le corps étendu, les mains croisées sur la poi-trine, les yeux fermés et tout enveloppé dans un suaire, ensuite dites-vous à vous-même : Que voudrai-je avoir fait lorsque je me trouverai à ce moment ? Mon âme est souillée de tant de péchés qui ne me sont pas pardonnés, voudrais-je bien paraître devant le tribunal de Dieu en cet état ? Reverrai-je un confesseur à l'heure de la mort ? Si je venais à mourir de mort subite et que je n'aie pas le temps de le faire, il faudrait tomber en enfer ! Non, mon Dieu, plus de retard, je vais commencer aujour-d'hui à m'y préparer et je le ferai tant, que je pourrai regagner votre amitié et mériter le ciel à la fin de ma vie, en assurant mon salut. Amen.
1° Si vous n'avez commis certains péchés que rare-ment, comme serait par exemple de jurer le saint nom de Dieu, de vous mettre en colère, de maudire votre travail, vos enfants ou vos bêtes, il n'est pas bien difficile de dire combien de fois à peu près vous y êtes tombé par année, par mois ou par semaine. Si c'est un péché d'habitude, vous savez bien combien d'années a duré cette habitude, à quel âge vous l'avez commencée, à peu près quel temps elle a duré, si vous l'avez perdue pen-dant quelque temps dans le temps que vous tombiez ; il n'est pas difficile de dire combien vous avez commis ce péché par mois et par semaine et par jour. Hé bien ! M.F., voilà tout ce qu'il faudrait faire pour avoir le bonheur de réparer toutes vos confessions et communions mauvaises, en les accusant en disant : « Mon père, je m'accuse d'avoir fait tant de confessions et de commu-nions pendant ma vie, ou par année ou par mois . » Lorsque vous ne pouvez vous rappeler au juste, dites seu-lement : « Mon père, je m'accuse à peu près tant de fois. » Dieu n'en demande pas davantage : pourvu que vous ayez donné à votre examen tout le temps et tous les soins qu'il faut et que vous soyez de bonne foi, c'est-à-dire sincère dans vos accusations et dans votre repentir, vous êtes sûr que quand toutes vos confessions et communions seraient des sacrilèges, que le bon Dieu vous pardonnera et que vous serez sauvés. D'un autre côté, le confesseur, qui désire autant que vous le salut de votre bonne âme, ne manquera pas de faire tout ce qu'il pourra pour vous aider, soit par ses interrogations, soit par ses prières, surtout pendant la sainte Messe, en demandant à Dieu pour vous les grâces et les forces qui vous sont nécessaires pour bien faire votre confession.
Prenez bien garde de ne pas vous laisser prendre à ce piège du démon qui en perd un grand nombre, qui est de leur faire commencer à accuser tous leurs petits péchés les premiers, afin qu'ils n'aient pas la force de dire les gros ensuite. Commencez, M.F., à dire au con-traire tous vos plus gros péchés les premiers, alors, vous ôtez tout au démon. – Mais, me direz-vous, cela est bien aisé à dire, mais le faire c'est bien autre chose. Com-ment avoir la force de dire tant de péchés, si affreux qui font horreur rien que d'y penser. – Voulez-vous, M.F. , une vérité bien claire ? C'est que ce n'est qu'un orgueil-leux qui a honte de dire ses péchés ou qui les a cachés. Otez cet orgueil de votre cœur, et vous vous accuserez de vos péchés tels que vous voudriez les avoir accusés à l'heure de la mort. Toute personne qui désire vérita-blement à cœur son salut, ne craint nullement d'en faire l'accusation. En voici un exemple bien frappant, rapporté par saint Jean Climaque : Me trouvant un jour, nous dit ce grand saint, dans un monastère, il vint un homme se présenter afin de passer sa vie dans la pénitence ; pen-dant toute sa vie il n'avait fait que brigandages. Le supé-rieur lui ordonna de passer sept jours à la porte du monastère. Voyant qu'il persévérait, il lui ordonna de déclarer devant tout le monde tous les péchés qu'il avait commis. Ce voleur avoua sincèrement tout ce qu'il avait fait. Le supérieur, pour éprouver si sa conversion était bien sincère, lui commanda de les accuser encore devant les religieux du monastère. Cet homme, qui était véritablement touché, qui ne cherchait que les moyens de fléchir la justice divine, répondit au supérieur que non seulement il était prêt à les déclarer devant les reli-gieux, mais au milieu de toute la ville d'Alexandrie. Alors le supérieur fit assembler tous les religieux qui étaient plus de trois cents. Comme c'était un dimanche, après l'évangile, il commande qu'on lui amène ce cou-pable déjà justifié, les mains liées, revêtu d'un cilice, la tête couverte de cendres, conduit par plusieurs reli-gieux qui le frappaient à coups de verges. Ce spectacle attendrit si fort les assistants que tous fondaient en larmes. Le supérieur lui dit de rester à la porte de l'église, qu'il ne méritait pas d'y entrer. Ces paroles le frappèrent si fortement qu'il tomba la face contre terre. Le supérieur, le voyant en cet état, lui commanda de dire publiquement ses péchés. Il le fit avec tant de larmes et de douleur, qu'il lui semblait perdre la vie, tant la dou-leur de ses péchés était grande. L'on fut obligé de lui dire de cesser.
Voyez encore saint Augustin, a-t-il craint, a-t-il eu honte de faire l'aveu de ses péchés, non seulement à un prêtre, mais à tout l'univers ? M.F., non, nous n'aurons point de honte et de crainte, si nous avons l'humilité et la connaissance de nous-même.
De là je conclus que tout chrétien qui, après avoir péché, craint de s'accuser, n'est qu'un orgueilleux. Voyez-vous, M.F., un motif bien capable de nous engager à une confession de toute notre vie, si vous vous sentez coupable ; c'est de là que dépend votre bonheur ou votre malheur éternel. Ce soir, lorsque vous serez au lit, mettez-vous dans la posture où vous serez un jour dans la bière, le corps étendu, les mains croisées sur la poi-trine, les yeux fermés et tout enveloppé dans un suaire, ensuite dites-vous à vous-même : Que voudrai-je avoir fait lorsque je me trouverai à ce moment ? Mon âme est souillée de tant de péchés qui ne me sont pas pardonnés, voudrais-je bien paraître devant le tribunal de Dieu en cet état ? Reverrai-je un confesseur à l'heure de la mort ? Si je venais à mourir de mort subite et que je n'aie pas le temps de le faire, il faudrait tomber en enfer ! Non, mon Dieu, plus de retard, je vais commencer aujour-d'hui à m'y préparer et je le ferai tant, que je pourrai regagner votre amitié et mériter le ciel à la fin de ma vie, en assurant mon salut. Amen.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
SERMON
SUR LES QUALITÉS DE LA CONFESSION
Surgam, et ibo ad patrem meum, et dicam ei : Pater, peccavi in cœlum et coram te.
Je me lèverai, et j'irai me jeter aux pieds de mon père en lui disant : Mon père, j'ai péché contre le ciel et contre vous.
(S. Luc, XV, 18.)
Tels sont, M.F., la douleur et le regret que la pensée de nos péchés doit produire dans nos cœurs, et telle fut la démarche que fit l'enfant prodigue, lorsque, rentrant en lui-même, il reconnut sa profonde misère et les biens qu'il avait perdus en se séparant d'un si bon père. Oui, s'écrie-t-il, je me lèverai et j'irai retrouver ce bon père ; me jetant à ses pieds, je les arroserai de mes larmes « O mon père, couvert de péchés et de la honte qui m'accable, je n'ose plus regarder le ciel, ni vous comme mon père, puisque je vous ai si affreusement méprisé ; mais trop heureux si vous voulez bien me ranger au nombre de vos serviteurs. » Beau modèle, M.F., pour un pécheur qui, étant touché de la grâce, éprouve la profondeur de sa misère et le poids de ses péchés et de ses remords qui le dévorent : Heureux et mille fois heu-reux le pécheur qui s'approche de son Dieu avec les mêmes sentiments de douleur et de confiance que ce grand pénitent. Oui, M.F., comme lui il est sûr de trouver en Dieu un père plein de bonté et de tendresse, qui lui remettra volontiers ses péchés et lui rendra tous les biens que le péché lui avait ravis.
Mais de quoi vais-je donc vous parier ? Ah ! consolez-vous, je viens vous annoncer le plus grand de tous les bonheurs. Ah ! que dis-je ? je viens étaler à vos yeux la grandeur des miséricordes de Dieu. Ah ! pauvre âme, consolez-vous ; il me semble que je vous entends vous écrier comme l'aveugle de Jéricho : « Ah ! Jésus, fils de David, ayez pitié de moi » Oui, pauvre âme, vous trouverez... Quel est mon dessein ? M.F., le voici : c'est de vous montrer, de la manière la plus simple et la plus familière, les dispositions que vous devez apporter en vous approchant du sacrement de pénitence. Il en est cinq, et les voici : notre confession, pour être bonne et nous mériter le pardon de nos péchés, doit être : 1° humble, 2° simple, 3° prudente, 4° entière, 3° sincère. Si vos confessions sont accompagnées de ces conditions, vous êtes sûrs de votre pardon. Nous verrons ensuite de quelles manières l'absence de ces conditions peut rendre nos confessions sacrilèges.
SUR LES QUALITÉS DE LA CONFESSION
Surgam, et ibo ad patrem meum, et dicam ei : Pater, peccavi in cœlum et coram te.
Je me lèverai, et j'irai me jeter aux pieds de mon père en lui disant : Mon père, j'ai péché contre le ciel et contre vous.
(S. Luc, XV, 18.)
Tels sont, M.F., la douleur et le regret que la pensée de nos péchés doit produire dans nos cœurs, et telle fut la démarche que fit l'enfant prodigue, lorsque, rentrant en lui-même, il reconnut sa profonde misère et les biens qu'il avait perdus en se séparant d'un si bon père. Oui, s'écrie-t-il, je me lèverai et j'irai retrouver ce bon père ; me jetant à ses pieds, je les arroserai de mes larmes « O mon père, couvert de péchés et de la honte qui m'accable, je n'ose plus regarder le ciel, ni vous comme mon père, puisque je vous ai si affreusement méprisé ; mais trop heureux si vous voulez bien me ranger au nombre de vos serviteurs. » Beau modèle, M.F., pour un pécheur qui, étant touché de la grâce, éprouve la profondeur de sa misère et le poids de ses péchés et de ses remords qui le dévorent : Heureux et mille fois heu-reux le pécheur qui s'approche de son Dieu avec les mêmes sentiments de douleur et de confiance que ce grand pénitent. Oui, M.F., comme lui il est sûr de trouver en Dieu un père plein de bonté et de tendresse, qui lui remettra volontiers ses péchés et lui rendra tous les biens que le péché lui avait ravis.
Mais de quoi vais-je donc vous parier ? Ah ! consolez-vous, je viens vous annoncer le plus grand de tous les bonheurs. Ah ! que dis-je ? je viens étaler à vos yeux la grandeur des miséricordes de Dieu. Ah ! pauvre âme, consolez-vous ; il me semble que je vous entends vous écrier comme l'aveugle de Jéricho : « Ah ! Jésus, fils de David, ayez pitié de moi » Oui, pauvre âme, vous trouverez... Quel est mon dessein ? M.F., le voici : c'est de vous montrer, de la manière la plus simple et la plus familière, les dispositions que vous devez apporter en vous approchant du sacrement de pénitence. Il en est cinq, et les voici : notre confession, pour être bonne et nous mériter le pardon de nos péchés, doit être : 1° humble, 2° simple, 3° prudente, 4° entière, 3° sincère. Si vos confessions sont accompagnées de ces conditions, vous êtes sûrs de votre pardon. Nous verrons ensuite de quelles manières l'absence de ces conditions peut rendre nos confessions sacrilèges.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Parlant, M.F., à des chrétiens qui ne cherchent que les moyens de sauver leurs pauvres âmes, il n'est pas nécessaire de vous prouver la divinité de la confession, il suffit de vous dire que c'est Jésus-Christ lui-même qui l'a établie, en disant à ses apôtres ainsi qu'à tous leurs successeurs : « Recevez le Saint-Esprit, les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez et retenus à ceux à qui vous les retiendrez » ; ou bien encore, si vous voulez, lorsqu'il dit : « Tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel ; et tout ce que vous lierez sur la terre, sera lié dans le ciel » ; parole qui nous montre véritablement la divinité de la confession et la nécessité de la confession. En effet, comment pouvoir remettre ou retenir les péchés si on ne les faisait pas connaître à ceux qui ont ce pouvoir sublime et admi-rable ? Il n'est pas encore nécessaire de vous montrer les avantages de la confession ; un mot suffit, puisque, après un seul péché mortel, sans la confession, jamais nous ne verrons Dieu, et que, pendant toute l'éternité, nous serons condamnés à éprouver toutes les rigueurs de sa colère et à être maudits. Je ne vous dirai pas encore que la confession nous fait regagner l'amitié de notre Dieu et redonne à notre âme la vie et toutes nos œuvres que le péché avait fait mourir. Si vous ne sentez pas tout ce bon-heur, tous les avantages de la confession, allez interroger les démons qui brûlent, ils vous apprendront à l'estimer et à en profiter. Oui, M.F., si nous interrogeons tous les chrétiens damnés, pourquoi ils brûlent, tous nous diront que la cause de leur malheur vient ou de ce qu'ils ont méprisé le sacrement de pénitence qui est la con-fession, ou qu'ils n'avaient pas les dispositions néces-saires lorsqu'ils s'en sont approchés. Si de ce lieu d'horreur vous montez dans le ciel, que vous deman-diez à tous ces anciens pécheurs qui ont passé vingt ou trente ans dans le désordre, ce qui leur procure tant de joie et de plaisirs, tous vous diront que ce seul sacre-ment de pénitence leur a valu ces biens infinis. Non, M.F., personne ne doute d'une vérité si consolante pour un pécheur qui a perdu son Dieu par le péché, de trouver un moyen si facile et si efficace pour regagner ce que le péché lui avait ravi . Si je demandais à un enfant : Qu'est-ce que la confes-sion ? Il me répondrait simplement que c'est l'accusation de ses péchés faite à un prêtre approuvé, pour en rece-voir l'absolution, c'est-à-dire le pardon. – Mais pour-quoi, me direz-vous, est-ce que Jésus-Christ nous assu-jettit à une accusation si humiliante, qui coûte tant à notre amour-propre ? Mon ami, je vous répondrai que c'est précisément pour nous humilier que Jésus-Christ nous y a condamnés. II n'est pas douteux qu'il est pénible à un orgueilleux d'aller dire à un confesseur tout le mal qu'il a fait, tout celui qu'il a eu dessein de faire, tant de mauvaises pensées, tant de désirs corrompus, tant d'actions injustes et honteuses qu'on voudrait pou-voir se cacher à soi-même. Mais vous ne faites pas atten-tion que l'orgueil est la source de tous les péchés, et que tout péché est une orgueilleuse révolte de la créature contre le Créateur ; il est donc juste que Dieu nous ait condamnés à cette accusation si humiliante pour un orgueilleux. Mais regardons cette humiliation des yeux de la foi, est-ce une chose bien pénible que de changer une confusion publique et éternelle, avec une confusion de cinq minutes qu'il nous faut pour dire nos péchés à un ministre du Seigneur, pour regagner le ciel et l'amitié de notre Dieu ! – Pourquoi est-ce, me direz-vous, qu'il y en a qui ont tant de répugnance pour la confession, et que la plupart s'en approchent mal ? Hélas ! M.F., c'est que les uns ont perdu la foi, les autres sont orgueilleux et d'au-tres ne sentent pas les plaies de leur pauvre âme, ni les consolations que la confession procure à un chrétien qui s'en approche dignement. Qui est celui, M.F., qui nous commande de nous confesser de tous nos péchés sous peine de damnation éternelle ? Hélas ! M.F., vous le savez aussi bien que moi, c'est Jésus-Christ lui-même ; et tous y sont obligés, depuis le Saint Père jusqu'au dernier des artisans. Mon Dieu, quel aveuglement de mépriser et de ne faire pas cas d'un moyen si facile et si efficace pour gagner un bonheur infini, en se délivrant du plus grand de tous les malheurs qui est la colère éternelle.
Mais tout ceci, M.F., n'est pas encore ce qui vous parait le plus nécessaire à savoir, puisque vous savez que la confession est le seul moyen qui nous reste pour sortir du péché : ou nous confesserons nos péchés, ou nous irons brûler dans les enfers ; nous savons que, quelques grands, énormes et nombreux que soient nos péchés, nous sommes sûrs de notre pardon, si nous les con-fessons. Voici ce que vous devez absolument savoir écoutez-moi bien. En premier lieu, je dis que la confes-sion doit être humble, c'est-à-dire que nous devons nous regarder dans le tribunal de la pénitence comme un criminel devant son juge, qui est Dieu lui-même, nous devons accuser nous-mêmes nos péchés, sans attendre que le prêtre nous interroge, à l'exemple de David qui disait : « Oui, mon Dieu, j'accuserai moi--même mes péchés au Seigneur », et ne pas faire comme font la plupart des pécheurs qui racontent leurs péchés comme une histoire indifférente, qui ne montrent ni douleur ni regret d'avoir offensé Dieu, qui semblent ne se confesser que pour commettre des sacri-lèges. O mon Dieu, peut-on bien y penser sans mourir d'horreur ! Si le confesseur se voit forcé de vous faire quelques remontrances qui blessent un peu votre amour propre ; s'il vous impose quelque pénitence qui vous répugne, ou même s'il vous diffère l'absolution : prenez garde de ne jamais murmurer ; soumettez-vous humble-ment ; prenez encore bien garde de ne pas murmurer et encore moins de vous disputer avec lui, en lui répondant avec arrogance, comme font quelques pécheurs endurcis et vendus à l'impiété ; qui même sortiront de l'église en colère, sans se mettre à genoux. N'oubliez jamais que le tribunal de la pénitence où le prêtre est assis, c'est véritablement le tribunal de Jésus-Christ ; qu'il écoute votre accusation, qu'il vous interroge, qu'il vous parle et qu'il prononce la sentence d'absolution. Je dis qu'il faut s'accuser avec humilité, c'est-à-dire ne jamais rejeter ses fautes sur les autres, comme font plusieurs à confesse, semblables à Adam, qui s'excusa sur Ève et Ève sur le serpent, au lieu de s'avouer humblement coupables, en disant que ce n'est que par leur faute qu'ils ont péché ; ils font tout le contraire. Un homme sujet à la colère s'excusera sur sa femme et ses enfants ; un ivro-gne sur la compagnie qui l'a sollicité à boire ; un vindi-catif, sur une injure qui lui a été faite ; un médisant, sur ce qu'il ne dit que la vérité ; un homme qui travaille le dimanche, sur ses affaires qui pressent ou qui se gâtent. Une mère qui fait manquer les prières à ses enfants s'excusera sur ce qu'elle n'a pas eu le temps. Dites-moi, M.F., est-ce-là une confession humble. Vous voyez clairement que non. « Mon Dieu, disait le saint roi David, mettez, s'il vous plaît, une garde à ma bouche, afin que la malice de mon cœur ne trouve point d'excuses à mes péchés . » Je dis donc que nous devons nous faire connaître tels que nous sommes, afin que notre confession soit bonne et capable de nous regagner l'ami-tié du bon Dieu.
Mais tout ceci, M.F., n'est pas encore ce qui vous parait le plus nécessaire à savoir, puisque vous savez que la confession est le seul moyen qui nous reste pour sortir du péché : ou nous confesserons nos péchés, ou nous irons brûler dans les enfers ; nous savons que, quelques grands, énormes et nombreux que soient nos péchés, nous sommes sûrs de notre pardon, si nous les con-fessons. Voici ce que vous devez absolument savoir écoutez-moi bien. En premier lieu, je dis que la confes-sion doit être humble, c'est-à-dire que nous devons nous regarder dans le tribunal de la pénitence comme un criminel devant son juge, qui est Dieu lui-même, nous devons accuser nous-mêmes nos péchés, sans attendre que le prêtre nous interroge, à l'exemple de David qui disait : « Oui, mon Dieu, j'accuserai moi--même mes péchés au Seigneur », et ne pas faire comme font la plupart des pécheurs qui racontent leurs péchés comme une histoire indifférente, qui ne montrent ni douleur ni regret d'avoir offensé Dieu, qui semblent ne se confesser que pour commettre des sacri-lèges. O mon Dieu, peut-on bien y penser sans mourir d'horreur ! Si le confesseur se voit forcé de vous faire quelques remontrances qui blessent un peu votre amour propre ; s'il vous impose quelque pénitence qui vous répugne, ou même s'il vous diffère l'absolution : prenez garde de ne jamais murmurer ; soumettez-vous humble-ment ; prenez encore bien garde de ne pas murmurer et encore moins de vous disputer avec lui, en lui répondant avec arrogance, comme font quelques pécheurs endurcis et vendus à l'impiété ; qui même sortiront de l'église en colère, sans se mettre à genoux. N'oubliez jamais que le tribunal de la pénitence où le prêtre est assis, c'est véritablement le tribunal de Jésus-Christ ; qu'il écoute votre accusation, qu'il vous interroge, qu'il vous parle et qu'il prononce la sentence d'absolution. Je dis qu'il faut s'accuser avec humilité, c'est-à-dire ne jamais rejeter ses fautes sur les autres, comme font plusieurs à confesse, semblables à Adam, qui s'excusa sur Ève et Ève sur le serpent, au lieu de s'avouer humblement coupables, en disant que ce n'est que par leur faute qu'ils ont péché ; ils font tout le contraire. Un homme sujet à la colère s'excusera sur sa femme et ses enfants ; un ivro-gne sur la compagnie qui l'a sollicité à boire ; un vindi-catif, sur une injure qui lui a été faite ; un médisant, sur ce qu'il ne dit que la vérité ; un homme qui travaille le dimanche, sur ses affaires qui pressent ou qui se gâtent. Une mère qui fait manquer les prières à ses enfants s'excusera sur ce qu'elle n'a pas eu le temps. Dites-moi, M.F., est-ce-là une confession humble. Vous voyez clairement que non. « Mon Dieu, disait le saint roi David, mettez, s'il vous plaît, une garde à ma bouche, afin que la malice de mon cœur ne trouve point d'excuses à mes péchés . » Je dis donc que nous devons nous faire connaître tels que nous sommes, afin que notre confession soit bonne et capable de nous regagner l'ami-tié du bon Dieu.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
2° Je dis qu'il faut qu'elle soit simple ; c'est-à-dire éviter toutes ces accusations inutiles, tous ces scrupules qui font dire cent fois la même chose, qui font perdre le temps au confesseur, fatiguent ceux qui attendent pour se confesser, et éteignent la dévotion. Il faut se montrer tel que l'on est par une déclaration sincère ; il faut accuser ce qui est douteux comme douteux, ce qui est certain comme certain ; par exemple : si vous disiez que vous ne vous êtes pas arrêtés à de mauvaises pensées, tandis que vous doutez que vous y ayez pris plaisir, ce serait manquer de sincérité de dire que vous n'avez eu que la pensée ; dire que ce que vous avez pris ne vaut que tant, pensant que peut-être cela valait plus ; ou bien de dire : « Mon père, je m'accuse d'avoir oublié un péché dans une de mes confessions, » tandis que c'était par une mauvaise honte ou par négligence. Ces manières de vous accuser seraient cause que vous commettriez un horrible sacrilège. Je dis encore que c'est manquer de sincérité que d'attendre que le confesseur vous interroge sur certains péchés ; si vous aviez eu la volonté de ne pas le dire, il ne suffirait pas de le déclarer parce que le confesseur vous le demande, il faudrait encore dire « Mon père, si vous ne m'aviez pas interrogé sur ce péché, je ne vous l'aurais pas dit. » Si vous manquiez de cette sincérité, votre confession serait nulle et sacrilège.
Evitez, M.F., évitez tous ces déguisements : que votre cœur soit sur vos lèvres. Vous pouvez bien tromper votre confesseur, mais rappelez-vous bien que vous ne tromperez pas le bon Dieu, qui voit et connaît vos péchés mieux que vous. Si quelquefois le démon, ce maudit Satan, vous tentait pour vous faire cacher où déguiser quelque péché, faites vite cette réflexion : Mais je vais me rendre encore bien plus coupable que je n'étais ; je vais commettre un péché bien plus affreux que celui que je vais cacher, puisque ce sera un sacri-lège ; je puis bien le cacher au prêtre, mais Dieu le connaît mieux que moi ; tôt ou tard il faudra bien que je le déclare, ou me résoudre d'aller éternellement brûler dans les enfers. Il me faudra avoir une petite humiliation en le déclarant, il est vrai ; mais qu'est cela en compa-raison de cette confusion publique et éternelle ? Un malade, devez-vous dire, qui désire sa guérison ne craint pas de découvrir les maladies les plus honteuses et les plus secrètes, afin d'y faire appliquer les remèdes ; et moi je craindrais de découvrir les plaies de ma pauvre âme à mon médecin spirituel afin de la guérir ? Pourrais-j-e bien rester dans un état de damnation pendant le reste de ma vie ! Si vous ne vous sentez pas le courage de déclarer certains péchés, dites au prêtre : « Mon père, j'ai un péché que je n'ose pas vous dire, aidez--moi, s'il vous plaît. » Quoique cette disposition soit imparfaite, néanmoins cela vous le fera accuser : ce qui est absolument nécessaire.
En troisième lieu, je dis que la confession doit être prudente : cela veut dire qu'il faut accuser ses péchés en termes honnêtes ; ensuite, qu'il ne faut pas faire con-naître les péchés des autres sans nécessité. Je dis sans nécessité, parce qu'il y a quelquefois qu'il est nécessaire, quand on ne peut pas faire autrement, de faire connaître les fautes, comme par exemple : vous avez eu le malheur de commettre un péché contre la sainte vertu de pureté, et cela avec un ou une de vos parents ; il faut bien dire cette circonstance, sans quoi vous feriez un sacrilège. Vous vous trouvez dans une maison où il y a une per-sonne qui vous porte au mal, vous êtes encore obligé de le dire, parce que vous vous trouvez dans l'occasion prochaine du péché. Mais en disant cela, il faut avoir en vue d'accuser vos péchés et non ceux des autres.
En quatrième lieu, je dis qu'il faut que la confession soit entière, c'est-à-dire qu'il faut déclarer tous ses péchés mortels, l'espèce, le nombre et les circonstances nécessaires.
Je dis d'abord l'espèce : ce n'est pas assez de dire en général que l'on a beaucoup péché, mais il faut encore dire quelles sont ces sortes de péchés que l'on accuse, si c'est vol, mensonge, impureté, et le reste. Ce n'est pas encore assez de dire l'espèce, il faut encore dire le nombre ; par exemple, si vous disiez : Mon père, je m'accuse d'avoir manqué la messe, d'avoir volé, d'avoir médit, d'avoir fait des choses deshonnêtes : tout cela ne serait pas bien ; il faut dire combien de fois vous les avez commis ; il faut encore entrer dans les détail, dire certaines circonstances.
Peut-être que vous ne comprenez pas ce que c'est qu'une circonstance : c'est-à-dire les particularités qui accompagnent nos péchés, qui les rendent plus ou moins considérables ou plus ou moins excusables ; et ces cir-constances se tirent d'abord de la personne qui pèche avec une autre, si c'est une parente, à quel degré, père et mère, frère ou sœur, une filleule avec son parrain, un filleul avec sa marraine, un beau-frère avec sa belle-sœur ; 2° de la qualité ou quantité de l'objet qui est la matière du péché ; 3° du motif qui vous porte au péché ; 4° du temps où vous avez péché, si c'est un dimanche, si c'est pendant les offices ; 5° du lieu : si c'est dans un endroit consacré à la prière, c'est-à-dire une église ; 6° de la manière dont on a commis le péché, et enfin quelles ont été les suites du péché. Il y a encore des circonstances qui changent l'espèce du péché, c'est--à-dire qui font un péché d'une autre nature. Par exemple : commettre l'impureté avec une personne mariée, c'est un adultère ; avec une parente, c'est un inceste ; s'arrêter à une mauvaise pensée, consentir à un mauvais désir, à un mauvais regard, c'est un péché contre la chasteté. Mais si c'est dans une église c'est une profanation du lieu saint, c'est une espèce de sacrilège. Voilà les circonstances qui changent l'espèce du péché. Il y en a qui, sans la changer, l'aggravent beaucoup, par exemple : celui qui fait quelque péché en présence de plusieurs personnes, devant ses enfants ; celui qui a juré le saint nom de Dieu, tenu des propos deshon-nêtes, fait des médisances devant plusieurs, a fait un plus grand péché que celui qui l'a fait devant peu de personnes ; celui qui a dit des paroles déshonnêtes pen-dant des heures entières a fait un plus grand péché que s'il n'en avait dit guère. Médire par haine, par envie, par ressentiment, c'est un péché bien plus grave que si ce n'était que par légèreté. S'enivrer, aller à la danse, au bal, au cabaret un dimanche, est un plus gros péché qu'un jour d'œuvre, à cause que ce jour est consacré à Dieu d'une manière particulière. Voilà, M.F., des cir-constances qu'il faut déclarer ; sans quoi tremblez pour vos confessions. Hélas ! où sont ceux qui ont ces pré-cautions ? mais aussi où sont ceux qui font les bonnes confessions ? on le voit bien par la manière de vivre.
Il faut encore accuser si c'est un péché d'habitude, et combien de temps cette habitude a duré ; si les péchés que l'on a commis, on les a faits par malice ou avec réflexion, et les suites des péchés que l'on a commis parce que ce n'est que de cette manière que nous pou-vons nous faire connaître. Voyez un malade à l'égard de son médecin, comment se comporte-t-il ? Il lui découvre non seulement son mal ; mais encore le commencement et les progrès ; il ne se sert que des termes les plus clairs. Si le médecin ne le comprend pas, il répète, il ne cache et il ne déguise rien de tout ce qu'il croit être nécessaire pour faire connaître sa maladie et procurer sa guérison. Voilà, M.F., comment nous nous devons comporter envers notre médecin spirituel, afin de le mettre en état de bien connaître les plaies de notre âme, c'est-à-dire tels que nous nous connaissons devant Dieu.
3° Je dis qu'il faut dire le nombre. Rappelez-vous bien que si vous ne dites pas le nombre de vos péchés mortels, vos confessions ne valent rien ; il faut dire combien de fois l'on est tombé dans le même péché, parce que chaque fois c'est un nouveau péché. Si vous aviez commis trois fois un péché et que vous ne disiez que deux fois, celui que vous laisseriez serait cause que votre confession serait un sacrilège, si c'est un péché mortel, comme on le suppose. Hélas ! M.F., combien de ceux qui sont tombés dans ces fautes, les uns brûlent en enfer et les autres peut-être ne répareront jamais cette chaîne de confessions et de communions sacrilèges ! Ils se contenteront de dire : « Mon père, je m'accuse d'avoir médit, d'avoir juré. » – « Mais combien de fois ? » leur dira le prêtre. – « Pas souvent, toujours quelquefois. » Est-ce là, M.F., une confession entière ? Hélas ! que de damnés ! que d'âmes réprouvées. Savez--vous, M.F., quand il est permis de dire « tant de fois, à peu près ? » c'est lorsque vous faites une confession longue, qu'il vous est impossible de dire au juste que vous avez fait tel péché : alors, voilà ce que vous faites, vous dites combien de temps a duré l'habitude, com-bien de fois à peu près vous y avez tombé par semaine, par mois, ou par ,jour ; si l'habitude a été interrompue pendant quelque temps ; et de cette manière vous approchez du nombre autant que vous le pouvez. Si malgré tous les soins que vous avez donnés à votre examen, il vous est resté quelques péchés, votre confession ne laisserait pas d'être bonne, il vous suffirait de dire dans votre prochaine confession : « Mon père, je m'accuse d'avoir oublié involontairement un péché dans ma dernière confession, il est ainsi compris avec ceux que vous avez accusés. C'est pour cela que, quand vous vous accusez, vous dites : « Mon père, je m'accuse de ces péchés et de ceux dont je ne me souviens pas. »
Quant aux péchés véniels, où l'on tombe si souvent, l'on n'est pas obligé de s'en confesser parce que ces péchés ne nous font pas perdre la grâce et l'amitié du bon Dieu, et qu'on peut en obtenir le pardon par d'autres moyens, je veux dire par la contrition du cœur, la prière, le jeûne, l'aumône et le saint sacrifice. Mais le saint Concile de Trente nous enseigne qu'il est très utile de s'en confesser . En voici les raisons : c'est que souvent un péché que nous croyons véniel se trouve mortel devant Dieu ; 2° que nous en recevons beaucoup plus facilement le pardon par le sacrement de pénitence ; 3° que la confession de nos péchés véniels nous rend plus vigilants sur nous-mêmes ; 4° que les avis du confesseur peuvent beaucoup nous aider à nous cor-riger ; 5° que l'absolution que nous recevons, nous donne des forces pour nous les faire éviter. Mais si nous nous en confessons, il faut le faire avec regret et désir de s'en corriger : sinon, nous nous exposerions à com-mettre des sacrilèges. C'est pour cela que, selon le conseil de saint François de Sales, lorsque vous n'avez que des péchés véniels à vous reprocher, il faut, à la fin de votre confession, vous accuser d'un gros péché de votre vie passée, en disant : « Mon père, je m'accuse d'avoir autrefois commis un tel péché ; » en le disant comme si nous ne l'avions jamais confessé, les circons-tances et le nombre de fois que nous l'avons commis.
Voilà à peu près, M.F., les qualités que doit avoir une confession pour être bonne. C'est maintenant à vous à examiner si vos confessions passées ont été accompa-gnées de toutes les qualités dont nous venons de parler. Si vous vous trouvez coupables, ne perdez pas de temps peut-être que le moment où vous vous promettez de revenir sur vos pas, vous ne serez plus au monde, vous brûlerez dans les enfers avec le regret de n'avoir pas accompli ce que vous pouviez si bien, étant encore sur la terre et ayant tous les moyens nécessaires pour cela.
Evitez, M.F., évitez tous ces déguisements : que votre cœur soit sur vos lèvres. Vous pouvez bien tromper votre confesseur, mais rappelez-vous bien que vous ne tromperez pas le bon Dieu, qui voit et connaît vos péchés mieux que vous. Si quelquefois le démon, ce maudit Satan, vous tentait pour vous faire cacher où déguiser quelque péché, faites vite cette réflexion : Mais je vais me rendre encore bien plus coupable que je n'étais ; je vais commettre un péché bien plus affreux que celui que je vais cacher, puisque ce sera un sacri-lège ; je puis bien le cacher au prêtre, mais Dieu le connaît mieux que moi ; tôt ou tard il faudra bien que je le déclare, ou me résoudre d'aller éternellement brûler dans les enfers. Il me faudra avoir une petite humiliation en le déclarant, il est vrai ; mais qu'est cela en compa-raison de cette confusion publique et éternelle ? Un malade, devez-vous dire, qui désire sa guérison ne craint pas de découvrir les maladies les plus honteuses et les plus secrètes, afin d'y faire appliquer les remèdes ; et moi je craindrais de découvrir les plaies de ma pauvre âme à mon médecin spirituel afin de la guérir ? Pourrais-j-e bien rester dans un état de damnation pendant le reste de ma vie ! Si vous ne vous sentez pas le courage de déclarer certains péchés, dites au prêtre : « Mon père, j'ai un péché que je n'ose pas vous dire, aidez--moi, s'il vous plaît. » Quoique cette disposition soit imparfaite, néanmoins cela vous le fera accuser : ce qui est absolument nécessaire.
En troisième lieu, je dis que la confession doit être prudente : cela veut dire qu'il faut accuser ses péchés en termes honnêtes ; ensuite, qu'il ne faut pas faire con-naître les péchés des autres sans nécessité. Je dis sans nécessité, parce qu'il y a quelquefois qu'il est nécessaire, quand on ne peut pas faire autrement, de faire connaître les fautes, comme par exemple : vous avez eu le malheur de commettre un péché contre la sainte vertu de pureté, et cela avec un ou une de vos parents ; il faut bien dire cette circonstance, sans quoi vous feriez un sacrilège. Vous vous trouvez dans une maison où il y a une per-sonne qui vous porte au mal, vous êtes encore obligé de le dire, parce que vous vous trouvez dans l'occasion prochaine du péché. Mais en disant cela, il faut avoir en vue d'accuser vos péchés et non ceux des autres.
En quatrième lieu, je dis qu'il faut que la confession soit entière, c'est-à-dire qu'il faut déclarer tous ses péchés mortels, l'espèce, le nombre et les circonstances nécessaires.
Je dis d'abord l'espèce : ce n'est pas assez de dire en général que l'on a beaucoup péché, mais il faut encore dire quelles sont ces sortes de péchés que l'on accuse, si c'est vol, mensonge, impureté, et le reste. Ce n'est pas encore assez de dire l'espèce, il faut encore dire le nombre ; par exemple, si vous disiez : Mon père, je m'accuse d'avoir manqué la messe, d'avoir volé, d'avoir médit, d'avoir fait des choses deshonnêtes : tout cela ne serait pas bien ; il faut dire combien de fois vous les avez commis ; il faut encore entrer dans les détail, dire certaines circonstances.
Peut-être que vous ne comprenez pas ce que c'est qu'une circonstance : c'est-à-dire les particularités qui accompagnent nos péchés, qui les rendent plus ou moins considérables ou plus ou moins excusables ; et ces cir-constances se tirent d'abord de la personne qui pèche avec une autre, si c'est une parente, à quel degré, père et mère, frère ou sœur, une filleule avec son parrain, un filleul avec sa marraine, un beau-frère avec sa belle-sœur ; 2° de la qualité ou quantité de l'objet qui est la matière du péché ; 3° du motif qui vous porte au péché ; 4° du temps où vous avez péché, si c'est un dimanche, si c'est pendant les offices ; 5° du lieu : si c'est dans un endroit consacré à la prière, c'est-à-dire une église ; 6° de la manière dont on a commis le péché, et enfin quelles ont été les suites du péché. Il y a encore des circonstances qui changent l'espèce du péché, c'est--à-dire qui font un péché d'une autre nature. Par exemple : commettre l'impureté avec une personne mariée, c'est un adultère ; avec une parente, c'est un inceste ; s'arrêter à une mauvaise pensée, consentir à un mauvais désir, à un mauvais regard, c'est un péché contre la chasteté. Mais si c'est dans une église c'est une profanation du lieu saint, c'est une espèce de sacrilège. Voilà les circonstances qui changent l'espèce du péché. Il y en a qui, sans la changer, l'aggravent beaucoup, par exemple : celui qui fait quelque péché en présence de plusieurs personnes, devant ses enfants ; celui qui a juré le saint nom de Dieu, tenu des propos deshon-nêtes, fait des médisances devant plusieurs, a fait un plus grand péché que celui qui l'a fait devant peu de personnes ; celui qui a dit des paroles déshonnêtes pen-dant des heures entières a fait un plus grand péché que s'il n'en avait dit guère. Médire par haine, par envie, par ressentiment, c'est un péché bien plus grave que si ce n'était que par légèreté. S'enivrer, aller à la danse, au bal, au cabaret un dimanche, est un plus gros péché qu'un jour d'œuvre, à cause que ce jour est consacré à Dieu d'une manière particulière. Voilà, M.F., des cir-constances qu'il faut déclarer ; sans quoi tremblez pour vos confessions. Hélas ! où sont ceux qui ont ces pré-cautions ? mais aussi où sont ceux qui font les bonnes confessions ? on le voit bien par la manière de vivre.
Il faut encore accuser si c'est un péché d'habitude, et combien de temps cette habitude a duré ; si les péchés que l'on a commis, on les a faits par malice ou avec réflexion, et les suites des péchés que l'on a commis parce que ce n'est que de cette manière que nous pou-vons nous faire connaître. Voyez un malade à l'égard de son médecin, comment se comporte-t-il ? Il lui découvre non seulement son mal ; mais encore le commencement et les progrès ; il ne se sert que des termes les plus clairs. Si le médecin ne le comprend pas, il répète, il ne cache et il ne déguise rien de tout ce qu'il croit être nécessaire pour faire connaître sa maladie et procurer sa guérison. Voilà, M.F., comment nous nous devons comporter envers notre médecin spirituel, afin de le mettre en état de bien connaître les plaies de notre âme, c'est-à-dire tels que nous nous connaissons devant Dieu.
3° Je dis qu'il faut dire le nombre. Rappelez-vous bien que si vous ne dites pas le nombre de vos péchés mortels, vos confessions ne valent rien ; il faut dire combien de fois l'on est tombé dans le même péché, parce que chaque fois c'est un nouveau péché. Si vous aviez commis trois fois un péché et que vous ne disiez que deux fois, celui que vous laisseriez serait cause que votre confession serait un sacrilège, si c'est un péché mortel, comme on le suppose. Hélas ! M.F., combien de ceux qui sont tombés dans ces fautes, les uns brûlent en enfer et les autres peut-être ne répareront jamais cette chaîne de confessions et de communions sacrilèges ! Ils se contenteront de dire : « Mon père, je m'accuse d'avoir médit, d'avoir juré. » – « Mais combien de fois ? » leur dira le prêtre. – « Pas souvent, toujours quelquefois. » Est-ce là, M.F., une confession entière ? Hélas ! que de damnés ! que d'âmes réprouvées. Savez--vous, M.F., quand il est permis de dire « tant de fois, à peu près ? » c'est lorsque vous faites une confession longue, qu'il vous est impossible de dire au juste que vous avez fait tel péché : alors, voilà ce que vous faites, vous dites combien de temps a duré l'habitude, com-bien de fois à peu près vous y avez tombé par semaine, par mois, ou par ,jour ; si l'habitude a été interrompue pendant quelque temps ; et de cette manière vous approchez du nombre autant que vous le pouvez. Si malgré tous les soins que vous avez donnés à votre examen, il vous est resté quelques péchés, votre confession ne laisserait pas d'être bonne, il vous suffirait de dire dans votre prochaine confession : « Mon père, je m'accuse d'avoir oublié involontairement un péché dans ma dernière confession, il est ainsi compris avec ceux que vous avez accusés. C'est pour cela que, quand vous vous accusez, vous dites : « Mon père, je m'accuse de ces péchés et de ceux dont je ne me souviens pas. »
Quant aux péchés véniels, où l'on tombe si souvent, l'on n'est pas obligé de s'en confesser parce que ces péchés ne nous font pas perdre la grâce et l'amitié du bon Dieu, et qu'on peut en obtenir le pardon par d'autres moyens, je veux dire par la contrition du cœur, la prière, le jeûne, l'aumône et le saint sacrifice. Mais le saint Concile de Trente nous enseigne qu'il est très utile de s'en confesser . En voici les raisons : c'est que souvent un péché que nous croyons véniel se trouve mortel devant Dieu ; 2° que nous en recevons beaucoup plus facilement le pardon par le sacrement de pénitence ; 3° que la confession de nos péchés véniels nous rend plus vigilants sur nous-mêmes ; 4° que les avis du confesseur peuvent beaucoup nous aider à nous cor-riger ; 5° que l'absolution que nous recevons, nous donne des forces pour nous les faire éviter. Mais si nous nous en confessons, il faut le faire avec regret et désir de s'en corriger : sinon, nous nous exposerions à com-mettre des sacrilèges. C'est pour cela que, selon le conseil de saint François de Sales, lorsque vous n'avez que des péchés véniels à vous reprocher, il faut, à la fin de votre confession, vous accuser d'un gros péché de votre vie passée, en disant : « Mon père, je m'accuse d'avoir autrefois commis un tel péché ; » en le disant comme si nous ne l'avions jamais confessé, les circons-tances et le nombre de fois que nous l'avons commis.
Voilà à peu près, M.F., les qualités que doit avoir une confession pour être bonne. C'est maintenant à vous à examiner si vos confessions passées ont été accompa-gnées de toutes les qualités dont nous venons de parler. Si vous vous trouvez coupables, ne perdez pas de temps peut-être que le moment où vous vous promettez de revenir sur vos pas, vous ne serez plus au monde, vous brûlerez dans les enfers avec le regret de n'avoir pas accompli ce que vous pouviez si bien, étant encore sur la terre et ayant tous les moyens nécessaires pour cela.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Il. – Voyons maintenant un mot en combien de manières on pèche contre ces dispositions ? Vous savez, M.F., on vous l'a appris dès votre enfance, que l'inté-grité et la sincérité sont les qualités absolument néces-saires pour faire une bonne confession, c'est-à-dire pour avoir le bonheur de recevoir le pardon de vos péchés. Le moyen le plus sûr de faire une bonne confession est de déclarer vos péchés avec simplicité, après vous être bien examinés ; car un péché laissé par faute de vous être examinés, quoique si vous l'aviez connu, vous l'eussiez dit, ne laisserait pas tout de même que de rendre votre confession sacrilège. Cependant, M.F., on trouve un grand nombre de chrétiens qui vont se confesser souvent sans même penser à leurs fautes, ou du moins, d'une manière si légère, que quand ils se confessent ils n'ont rien à dire si le prêtre ne les examine pas lui-même. C'est surtout parmi ceux qui ne se confessent que rarement, qui souvent ne craignent pas de mentir à Dieu même, en cachant volontairement des péchés, que leur conscience leur reproche, et qui, après une pareille confession, ont la hardiesse d'aller se pré-senter à la Table sainte pour manger, comme le dit saint Paul, leur condamnation . Mais voilà, M.F., ceux qui sont les plus sujets à faire de mauvaises confessions : ce sont ceux qui pendant quelque temps ont rempli fidè-lement leurs devoirs de religion. Le démon, qui n'épargne rien pour les perdre, les tente affreusement. S'ils vien-nent à succomber : d'un côté, effrayés par honte de leur péché, de l'autre par la crainte de se faire connaître aussi coupables, ils sont conduits à une fin bien malheu-reuse. Ils ont la coutume d'aller à confesse une telle fête, cependant ils craignent qu'on les remarque s'ils n'y vont pas ; mais ils ne voudraient pas s'avouer coupables, et que font-ils ? ils ne disent pas leur péché et commen-cent une chaîne de sacrilèges qui peut-être durera jusqu'à la mort, sans avoir la force de la rompre une autre fois. Ce sera un homme qui n'est pas disposé à restituer une chose qu'il aura dérobée, à réparer une injustice qu'il a faite, à ne plus retirer intérêt de son argent ; ou, si vous voulez encore, une femme ou une fille, qui a quelque fréquentation mauvaise et ne voudra pas la rompre. Et quel parti prennent ces personnes-là ? Le voici : c'est de ne rien dire, et de s'engager volontai-rement dans la route de l'enfer.
Mes amis, je vous dirai : vous vous aveuglez affreuse-ment ; qui est celui que vous croyez tromper, et à qui vous voulez cacher votre péché ? ce n'est pas à un homme, mais à Dieu lui-même, qui les connaît bien mieux que vous, qui vous attend dans l'autre vie pour vous punir non un moment, mais une éternité. Combien encore sont de ce nombre ! des personnes qui font pro-fession de piété et qui se laissent tromper par ces misé-rables considérations : « Que pensera-t-on de moi, si l'on ne me voit pas communier comme à mon ordinaire ? » Cette considération les arrête et les jette dans le sacri-lège. O mon Dieu, peut-on après cela vivre tranquille ? Mais, grâce à Dieu, ces âmes noires et vouées à l'iniquité ne sont pas les plus nombreuses. Mais voici la corde par laquelle le démon en entraîne le plus en enfer : ce sont ceux qui, en déclarant leurs péchés, les cachent par la manière dont ils les accusent ; on ne les connaît guère mieux après leur confession qu'avant. Qui pourrait raconter tous les déguisements, tous les artifices que le démon leur inspire pour les perdre et tromper leur con-fesseur. Vous allez le voir :
Je dis 1° déguisement dans la manière de les accuser, ils se serviront de termes les plus capables d'en dimi-nuer la honte. Quelle est la préparation de certains ? Ce n'est pas de demander à Dieu la grâce de bien con-naître leurs péchés ; mais de se tourmenter comment ils pourront les dire pour éprouver moins de honte. Sans presque s'en apercevoir, ils les affaiblissent considéra-blement ; les emportements de la colère ne seront que des impatiences, les discours les plus indécents ne seront que des paroles un peu trop libres ; les désirs les plus honteux, les actions les plus infâmes, ne seront que des familiarités peu décentes ; les injustices les plus mar-quées ne seront que de petits torts ; les excès de l'avarice ne seront qu'un attachement un peu trop grand aux biens de la terre. De sorte que, quand la mort arrivera et que Dieu leur fera voir leurs péchés tels qu'ils sont, ils recon-naîtront alors qu'ils n'ont dit leurs péchés qu'à moitié dans presque toutes leurs confessions. Et que s'ensui-vra-t-il de là, sinon une chaîne de sacrilèges ? O mon Dieu, peut-on bien y penser et ne pas mieux être sincère dans ses confessions pour avoir le bonheur d'en recevoir le pardon ?
2° Je dis que l'on déguise ses péchés dans les circons-tances que l'on a bien soin de ne pas déclarer, qui sou-vent sont plus criminelles que les actions mêmes, par exemple une personne dont l'occupation est de médire, de censurer, ou peut-être même de calomnier, s'accusera d'avoir dit des paroles désavantageuses au prochain ; mais elle ne dit pas que cela était par orgueil, par envie, par haine et par ressentiment ; mais ne dit pas quelle perte elle a portée à sa réputation. Au contraire, si on lui demande si ces paroles ont nui au prochain, elle répond tranquillement que non, sans avoir examiné le oui ou le non. Vous dites bien que vous avez médit, vous ne dites pas que c'était contre votre pasteur ou une autre per-sonne consacrée à Dieu, dont la réputation est absolu-ment nécessaire pour le bien de la religion. Mais vous ne dites pas que ce que vous avez dit était faux, c'est-à-dire une calomnie ; vous vous accusez bien d'avoir dit des paroles contre la religion et contre la modestie, mais vous ne dites pas que votre intention était d'ébranler la foi de cette jeune personne, afin de lui persuader de consentir à vos mauvais désirs, en lui disant qu'il n'y avait point de mal en cela, qu'il ne fallait pas s'en confesser. Une jeune fille dira bien qu'elle s'est habillée avec le désir de plaire ; mais elle ne dira pas que son intention était de donner lieu aux mauvaises pensées. O mon Dieu, ne devrait-on pas les reléguer au fond des forêts où les rayons du soleil n'ont jamais pu pénétrer ? Un père s'accusera bien d'avoir été au cabaret, de s'être enivré ; mais il ne dira pas qu'il a servi de scandale à toute sa famille. Une mère dira bien qu'elle a dit des paroles contre le prochain et qu'elle s'est mise en colère ; mais elle ne dit pas que ses enfants et ses voisines en ont été témoins. Un autre s'accusera bien d'avoir eu ou per-mis des familiarités peu décentes ; mais ne dira pas que son intention était de pécher avec la personne, s'il avait pu la séduire, ou s'il n'avait pas craint le monde. Celui-ci dira bien qu'il a manqué la sainte Messe le dimanche, mais il ne dira pas qu'il l'a fait manquer à d'autres, ou bien que plusieurs personnes l'ont vu, ce qui les a scan-dalisées, et peut-être même ses enfants ou ses domesti-ques. Vous vous accusez bien d'avoir été au cabaret ; mais vous ne dites pas que c'est un dimanche et pendant la messe ou les vêpres ; que votre intention était d'en amener d'autres avec vous, si vous aviez pu. Vous ne dites pas encore que vous êtes sorti de l'église pour aller au cabaret, et que c'était pendant l'instruction, en vous raillant de ce que disait votre pasteur. Vous vous accusez bien d'avoir mangé de la viande les jours défendus ; mais vous ne dites pas que c'est pour vous moquer de la reli-gion et mépriser ses lois saintes. Vous dites bien que vous avez prononcé des paroles sales ; mais vous ne dites pas que c'est parce qu'il y avait devant vous une personne de piété, afin de pouvoir décrier la religion et la détruire de son cœur. Vous dites bien encore que vous travaillez le dimanche ; mais vous ne dites pas que c'est par avarice, en méprisant les défenses de l'Eglise. Vous vous accu-serez bien d'avoir eu de mauvaises pensées ; mais vous ne dites pas que vous y avez donné occasion en allant volontairement avec des personnes que vous saviez très bien n'avoir que de mauvais propos à débiter. Vous dites bien que vous n'avez pas entendu la sainte Messe comme il faut ; mais vous oubliez de dire que vous y aviez donné occasion en venant jusqu'à la porte de l'église sans vous y préparer ; peut-être vous entrez sans faire un acte de contrition, et vous ne dites rien de tout cela : et cepen-dant une bonne partie de ces circonstances manquant peuvent rendre vos confessions sacrilèges. O que de chrétiens damnés, parce qu'ils n'auront pas su se con-fesser ! Vous vous êtes peut-être bien accusé de n'être pas bien instruit ; mais vous avez manqué de dire que vous ne saviez pas les principaux mystères, ce qu'il faut absolument pour être sauvé. Vous avez manqué de dire que vous n'osez pas bien demander à votre confesseur de vous interroger, pour savoir si vous êtes suffisamment instruit pour ne pas vous damner et pour recevoir les sacrements dignement ; peut-être n'y avez-vous jamais pensé ! O mon Dieu, que de chrétiens perdus !
En troisième lieu, je dis déguisement dans le ton de la voix que l'on emploie pour déclarer certains péchés les plus humiliants, dans le soin que l'on prend de les placer de manière que le confesseur puisse les entendre sans y faire attention. L'on commencera à accuser beau-coup de petits péchés, comme : « Mon père, je m'accuse d'avoir manqué de prendre de l'eau bénite le matin et le soir, d'avoir eu des distractions pendant mes prières, et autres choses semblables, après avoir endormi, autant qu'ils peuvent, l'attention du confesseur, d'une voix un peu plus basse et de la manière la plus rapide, on glisse des abominations et des horreurs. » Insensés, pourrait-on leur dire, quel est donc le démon qui vous a ainsi séduits pour vous porter à trahir misérablement la vérité ? Dites-moi, M.F., quel est le motif qui peut vous porter à mentir de la sorte en confession ? Est-ce la crainte que le confesseur ait mauvaise opinion de vous ? Vous vous trompez. Est-ce que vous espérez que les péchés que vous dites vous seront pardonnés ? Vous vous trompez encore grossièrement. Mais, dites-moi, pourquoi est-ce que vous venez dire au confesseur une partie de vos péchés avec l'espérance de le tromper ? mais vous savez bien que vous ne tromperez pas Dieu, de qui vous devez recevoir votre pardon. Dites-moi, cette absolution que vous aurez surprise, pouvez-vous bien espérer qu'elle sera ratifiée dans le ciel ? Hélas ! M.F., tel est l'aveu-glement de certains pécheurs qui osent se persuader que, pourvu qu'ils aient obtenu une absolution, n'importe qu'ils aient dit ou pas dit tous leurs péchés, qu'ils aient trompé ou non leur confesseur, ils se croient pardonnés. Mais, dites-moi, pécheurs aveugles, pécheurs endurcis et vendus à l'impiété, je vous le demande, êtes-vous bien contents de cette absolution, lorsque vous êtes sortis du tribunal de la pénitence ? Avez-vous éprouvé cette paix et cette douce consolation qui est la récompense d'une confession bien faite ? N'avez-vous pas été, au contraire, obligés, pour calmer vos remords de conscience, de vous dire en vous-mêmes qu'un jour vous referiez la confession que vous veniez de faire ? Mais, mon ami, tout bien examiné, vous auriez mieux fait cent fois de ne pas vous confesser. Vous savez très bien que tous les péchés que vous avez ainsi confessés ne sont pas pardonnés, sans parler de ceux que vous avez voulu cacher. Vous n'étiez pas assez coupables ? et vous avez voulu ajouter à tous vos énormes péchés un affreux sacrilège ! – Mais, me direz-vous, je voulais commu-nier, parce que j'avais l'habitude de communier ce jour--là. – Vous vous trompez ; il faut dire que vous vouliez commettre un sacrilège, vous enfoncer plus profond dans les enfers ; vous aviez peut-être peur de n'être pas assez coupables pour aller en enfer ; vous aviez peut--être peur d'aller au ciel. Ah ! ne vous tourmentez pas tant, vous avez assez de péchés pour ne pas aller au ciel et pour être précipités dans les flammes.
Hélas ! je ne vous dis rien de toutes ces confessions sacrilèges par défaut de contrition, qui, seules, damnent plus de monde que tous les autres péchés. J'espère qu'un jour je vous en parlerai. N'est-ce pas, mon ami, que vous espérez de réparer le mal que vous avez fait ? – Oui, me direz-vous. – Hélas ! mon ami, tremblez que ce temps ne vous soit pas donné et que, pour toute préparation, vous n'ayez à la mort que vos sacrilèges. Voulez-vous savoir la récompense de ces profanations ? La voici : endurcissement pendant la vie et désespoir à l'heure de la mort. Vous avez trompé votre confesseur, mais non le bon Dieu, et c'est lui qui vous jugera.
Que devez-vous faire, M.F., pour éviter un mal aussi effroyable ? Hâtez-vous de réparer tous ces défauts de vos confessions passées, par une accusation sincère et entière. Comprenez que jamais Dieu ne vous pardonnera ni vos péchés cachés, ni vos confessions sacrilèges. Vos péchés cachés seront publiés à la face de tout l'univers ; au lieu que si vous les avez bien confessés, jamais on ne pourrait vous les reprocher. Frémissez, M.F., à la vue de l'affreux désespoir qui vous attend à l'heure de la mort, lorsque tous vos sacrilèges vont venir se préci-piter sur vous pour vous ôter toute espérance de pardon. Rappelez-vous l'exemple d'Ananie et de sa femme qui tombèrent morts aux pieds de saint Pierre pour lui avoir menti. Rappelez-vous encore la terrible punition de cette fille rapportée par Saint Antonin...
M.F., que toutes ces considérations vous engagent à faire toutes vos confessions d'après les règles que je viens de vous tracer, et vous êtes sûrs de trouver dans vos confessions le pardon de vos péchés, la paix de l'âme et la vie éternelle à la fin de vos jours. Ce que je vous souhaite.
Mes amis, je vous dirai : vous vous aveuglez affreuse-ment ; qui est celui que vous croyez tromper, et à qui vous voulez cacher votre péché ? ce n'est pas à un homme, mais à Dieu lui-même, qui les connaît bien mieux que vous, qui vous attend dans l'autre vie pour vous punir non un moment, mais une éternité. Combien encore sont de ce nombre ! des personnes qui font pro-fession de piété et qui se laissent tromper par ces misé-rables considérations : « Que pensera-t-on de moi, si l'on ne me voit pas communier comme à mon ordinaire ? » Cette considération les arrête et les jette dans le sacri-lège. O mon Dieu, peut-on après cela vivre tranquille ? Mais, grâce à Dieu, ces âmes noires et vouées à l'iniquité ne sont pas les plus nombreuses. Mais voici la corde par laquelle le démon en entraîne le plus en enfer : ce sont ceux qui, en déclarant leurs péchés, les cachent par la manière dont ils les accusent ; on ne les connaît guère mieux après leur confession qu'avant. Qui pourrait raconter tous les déguisements, tous les artifices que le démon leur inspire pour les perdre et tromper leur con-fesseur. Vous allez le voir :
Je dis 1° déguisement dans la manière de les accuser, ils se serviront de termes les plus capables d'en dimi-nuer la honte. Quelle est la préparation de certains ? Ce n'est pas de demander à Dieu la grâce de bien con-naître leurs péchés ; mais de se tourmenter comment ils pourront les dire pour éprouver moins de honte. Sans presque s'en apercevoir, ils les affaiblissent considéra-blement ; les emportements de la colère ne seront que des impatiences, les discours les plus indécents ne seront que des paroles un peu trop libres ; les désirs les plus honteux, les actions les plus infâmes, ne seront que des familiarités peu décentes ; les injustices les plus mar-quées ne seront que de petits torts ; les excès de l'avarice ne seront qu'un attachement un peu trop grand aux biens de la terre. De sorte que, quand la mort arrivera et que Dieu leur fera voir leurs péchés tels qu'ils sont, ils recon-naîtront alors qu'ils n'ont dit leurs péchés qu'à moitié dans presque toutes leurs confessions. Et que s'ensui-vra-t-il de là, sinon une chaîne de sacrilèges ? O mon Dieu, peut-on bien y penser et ne pas mieux être sincère dans ses confessions pour avoir le bonheur d'en recevoir le pardon ?
2° Je dis que l'on déguise ses péchés dans les circons-tances que l'on a bien soin de ne pas déclarer, qui sou-vent sont plus criminelles que les actions mêmes, par exemple une personne dont l'occupation est de médire, de censurer, ou peut-être même de calomnier, s'accusera d'avoir dit des paroles désavantageuses au prochain ; mais elle ne dit pas que cela était par orgueil, par envie, par haine et par ressentiment ; mais ne dit pas quelle perte elle a portée à sa réputation. Au contraire, si on lui demande si ces paroles ont nui au prochain, elle répond tranquillement que non, sans avoir examiné le oui ou le non. Vous dites bien que vous avez médit, vous ne dites pas que c'était contre votre pasteur ou une autre per-sonne consacrée à Dieu, dont la réputation est absolu-ment nécessaire pour le bien de la religion. Mais vous ne dites pas que ce que vous avez dit était faux, c'est-à-dire une calomnie ; vous vous accusez bien d'avoir dit des paroles contre la religion et contre la modestie, mais vous ne dites pas que votre intention était d'ébranler la foi de cette jeune personne, afin de lui persuader de consentir à vos mauvais désirs, en lui disant qu'il n'y avait point de mal en cela, qu'il ne fallait pas s'en confesser. Une jeune fille dira bien qu'elle s'est habillée avec le désir de plaire ; mais elle ne dira pas que son intention était de donner lieu aux mauvaises pensées. O mon Dieu, ne devrait-on pas les reléguer au fond des forêts où les rayons du soleil n'ont jamais pu pénétrer ? Un père s'accusera bien d'avoir été au cabaret, de s'être enivré ; mais il ne dira pas qu'il a servi de scandale à toute sa famille. Une mère dira bien qu'elle a dit des paroles contre le prochain et qu'elle s'est mise en colère ; mais elle ne dit pas que ses enfants et ses voisines en ont été témoins. Un autre s'accusera bien d'avoir eu ou per-mis des familiarités peu décentes ; mais ne dira pas que son intention était de pécher avec la personne, s'il avait pu la séduire, ou s'il n'avait pas craint le monde. Celui-ci dira bien qu'il a manqué la sainte Messe le dimanche, mais il ne dira pas qu'il l'a fait manquer à d'autres, ou bien que plusieurs personnes l'ont vu, ce qui les a scan-dalisées, et peut-être même ses enfants ou ses domesti-ques. Vous vous accusez bien d'avoir été au cabaret ; mais vous ne dites pas que c'est un dimanche et pendant la messe ou les vêpres ; que votre intention était d'en amener d'autres avec vous, si vous aviez pu. Vous ne dites pas encore que vous êtes sorti de l'église pour aller au cabaret, et que c'était pendant l'instruction, en vous raillant de ce que disait votre pasteur. Vous vous accusez bien d'avoir mangé de la viande les jours défendus ; mais vous ne dites pas que c'est pour vous moquer de la reli-gion et mépriser ses lois saintes. Vous dites bien que vous avez prononcé des paroles sales ; mais vous ne dites pas que c'est parce qu'il y avait devant vous une personne de piété, afin de pouvoir décrier la religion et la détruire de son cœur. Vous dites bien encore que vous travaillez le dimanche ; mais vous ne dites pas que c'est par avarice, en méprisant les défenses de l'Eglise. Vous vous accu-serez bien d'avoir eu de mauvaises pensées ; mais vous ne dites pas que vous y avez donné occasion en allant volontairement avec des personnes que vous saviez très bien n'avoir que de mauvais propos à débiter. Vous dites bien que vous n'avez pas entendu la sainte Messe comme il faut ; mais vous oubliez de dire que vous y aviez donné occasion en venant jusqu'à la porte de l'église sans vous y préparer ; peut-être vous entrez sans faire un acte de contrition, et vous ne dites rien de tout cela : et cepen-dant une bonne partie de ces circonstances manquant peuvent rendre vos confessions sacrilèges. O que de chrétiens damnés, parce qu'ils n'auront pas su se con-fesser ! Vous vous êtes peut-être bien accusé de n'être pas bien instruit ; mais vous avez manqué de dire que vous ne saviez pas les principaux mystères, ce qu'il faut absolument pour être sauvé. Vous avez manqué de dire que vous n'osez pas bien demander à votre confesseur de vous interroger, pour savoir si vous êtes suffisamment instruit pour ne pas vous damner et pour recevoir les sacrements dignement ; peut-être n'y avez-vous jamais pensé ! O mon Dieu, que de chrétiens perdus !
En troisième lieu, je dis déguisement dans le ton de la voix que l'on emploie pour déclarer certains péchés les plus humiliants, dans le soin que l'on prend de les placer de manière que le confesseur puisse les entendre sans y faire attention. L'on commencera à accuser beau-coup de petits péchés, comme : « Mon père, je m'accuse d'avoir manqué de prendre de l'eau bénite le matin et le soir, d'avoir eu des distractions pendant mes prières, et autres choses semblables, après avoir endormi, autant qu'ils peuvent, l'attention du confesseur, d'une voix un peu plus basse et de la manière la plus rapide, on glisse des abominations et des horreurs. » Insensés, pourrait-on leur dire, quel est donc le démon qui vous a ainsi séduits pour vous porter à trahir misérablement la vérité ? Dites-moi, M.F., quel est le motif qui peut vous porter à mentir de la sorte en confession ? Est-ce la crainte que le confesseur ait mauvaise opinion de vous ? Vous vous trompez. Est-ce que vous espérez que les péchés que vous dites vous seront pardonnés ? Vous vous trompez encore grossièrement. Mais, dites-moi, pourquoi est-ce que vous venez dire au confesseur une partie de vos péchés avec l'espérance de le tromper ? mais vous savez bien que vous ne tromperez pas Dieu, de qui vous devez recevoir votre pardon. Dites-moi, cette absolution que vous aurez surprise, pouvez-vous bien espérer qu'elle sera ratifiée dans le ciel ? Hélas ! M.F., tel est l'aveu-glement de certains pécheurs qui osent se persuader que, pourvu qu'ils aient obtenu une absolution, n'importe qu'ils aient dit ou pas dit tous leurs péchés, qu'ils aient trompé ou non leur confesseur, ils se croient pardonnés. Mais, dites-moi, pécheurs aveugles, pécheurs endurcis et vendus à l'impiété, je vous le demande, êtes-vous bien contents de cette absolution, lorsque vous êtes sortis du tribunal de la pénitence ? Avez-vous éprouvé cette paix et cette douce consolation qui est la récompense d'une confession bien faite ? N'avez-vous pas été, au contraire, obligés, pour calmer vos remords de conscience, de vous dire en vous-mêmes qu'un jour vous referiez la confession que vous veniez de faire ? Mais, mon ami, tout bien examiné, vous auriez mieux fait cent fois de ne pas vous confesser. Vous savez très bien que tous les péchés que vous avez ainsi confessés ne sont pas pardonnés, sans parler de ceux que vous avez voulu cacher. Vous n'étiez pas assez coupables ? et vous avez voulu ajouter à tous vos énormes péchés un affreux sacrilège ! – Mais, me direz-vous, je voulais commu-nier, parce que j'avais l'habitude de communier ce jour--là. – Vous vous trompez ; il faut dire que vous vouliez commettre un sacrilège, vous enfoncer plus profond dans les enfers ; vous aviez peut-être peur de n'être pas assez coupables pour aller en enfer ; vous aviez peut--être peur d'aller au ciel. Ah ! ne vous tourmentez pas tant, vous avez assez de péchés pour ne pas aller au ciel et pour être précipités dans les flammes.
Hélas ! je ne vous dis rien de toutes ces confessions sacrilèges par défaut de contrition, qui, seules, damnent plus de monde que tous les autres péchés. J'espère qu'un jour je vous en parlerai. N'est-ce pas, mon ami, que vous espérez de réparer le mal que vous avez fait ? – Oui, me direz-vous. – Hélas ! mon ami, tremblez que ce temps ne vous soit pas donné et que, pour toute préparation, vous n'ayez à la mort que vos sacrilèges. Voulez-vous savoir la récompense de ces profanations ? La voici : endurcissement pendant la vie et désespoir à l'heure de la mort. Vous avez trompé votre confesseur, mais non le bon Dieu, et c'est lui qui vous jugera.
Que devez-vous faire, M.F., pour éviter un mal aussi effroyable ? Hâtez-vous de réparer tous ces défauts de vos confessions passées, par une accusation sincère et entière. Comprenez que jamais Dieu ne vous pardonnera ni vos péchés cachés, ni vos confessions sacrilèges. Vos péchés cachés seront publiés à la face de tout l'univers ; au lieu que si vous les avez bien confessés, jamais on ne pourrait vous les reprocher. Frémissez, M.F., à la vue de l'affreux désespoir qui vous attend à l'heure de la mort, lorsque tous vos sacrilèges vont venir se préci-piter sur vous pour vous ôter toute espérance de pardon. Rappelez-vous l'exemple d'Ananie et de sa femme qui tombèrent morts aux pieds de saint Pierre pour lui avoir menti. Rappelez-vous encore la terrible punition de cette fille rapportée par Saint Antonin...
M.F., que toutes ces considérations vous engagent à faire toutes vos confessions d'après les règles que je viens de vous tracer, et vous êtes sûrs de trouver dans vos confessions le pardon de vos péchés, la paix de l'âme et la vie éternelle à la fin de vos jours. Ce que je vous souhaite.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Il. – Voyons maintenant un mot en combien de manières on pèche contre ces dispositions ? Vous savez, M.F., on vous l'a appris dès votre enfance, que l'inté-grité et la sincérité sont les qualités absolument néces-saires pour faire une bonne confession, c'est-à-dire pour avoir le bonheur de recevoir le pardon de vos péchés. Le moyen le plus sûr de faire une bonne confession est de déclarer vos péchés avec simplicité, après vous être bien examinés ; car un péché laissé par faute de vous être examinés, quoique si vous l'aviez connu, vous l'eussiez dit, ne laisserait pas tout de même que de rendre votre confession sacrilège. Cependant, M.F., on trouve un grand nombre de chrétiens qui vont se confesser souvent sans même penser à leurs fautes, ou du moins, d'une manière si légère, que quand ils se confessent ils n'ont rien à dire si le prêtre ne les examine pas lui-même. C'est surtout parmi ceux qui ne se confessent que rarement, qui souvent ne craignent pas de mentir à Dieu même, en cachant volontairement des péchés, que leur conscience leur reproche, et qui, après une pareille confession, ont la hardiesse d'aller se pré-senter à la Table sainte pour manger, comme le dit saint Paul, leur condamnation . Mais voilà, M.F., ceux qui sont les plus sujets à faire de mauvaises confessions : ce sont ceux qui pendant quelque temps ont rempli fidè-lement leurs devoirs de religion. Le démon, qui n'épargne rien pour les perdre, les tente affreusement. S'ils vien-nent à succomber : d'un côté, effrayés par honte de leur péché, de l'autre par la crainte de se faire connaître aussi coupables, ils sont conduits à une fin bien malheu-reuse. Ils ont la coutume d'aller à confesse une telle fête, cependant ils craignent qu'on les remarque s'ils n'y vont pas ; mais ils ne voudraient pas s'avouer coupables, et que font-ils ? ils ne disent pas leur péché et commen-cent une chaîne de sacrilèges qui peut-être durera jusqu'à la mort, sans avoir la force de la rompre une autre fois. Ce sera un homme qui n'est pas disposé à restituer une chose qu'il aura dérobée, à réparer une injustice qu'il a faite, à ne plus retirer intérêt de son argent ; ou, si vous voulez encore, une femme ou une fille, qui a quelque fréquentation mauvaise et ne voudra pas la rompre. Et quel parti prennent ces personnes-là ? Le voici : c'est de ne rien dire, et de s'engager volontai-rement dans la route de l'enfer.
Mes amis, je vous dirai : vous vous aveuglez affreuse-ment ; qui est celui que vous croyez tromper, et à qui vous voulez cacher votre péché ? ce n'est pas à un homme, mais à Dieu lui-même, qui les connaît bien mieux que vous, qui vous attend dans l'autre vie pour vous punir non un moment, mais une éternité. Combien encore sont de ce nombre ! des personnes qui font pro-fession de piété et qui se laissent tromper par ces misé-rables considérations : « Que pensera-t-on de moi, si l'on ne me voit pas communier comme à mon ordinaire ? » Cette considération les arrête et les jette dans le sacri-lège. O mon Dieu, peut-on après cela vivre tranquille ? Mais, grâce à Dieu, ces âmes noires et vouées à l'iniquité ne sont pas les plus nombreuses. Mais voici la corde par laquelle le démon en entraîne le plus en enfer : ce sont ceux qui, en déclarant leurs péchés, les cachent par la manière dont ils les accusent ; on ne les connaît guère mieux après leur confession qu'avant. Qui pourrait raconter tous les déguisements, tous les artifices que le démon leur inspire pour les perdre et tromper leur con-fesseur. Vous allez le voir :
Je dis 1° déguisement dans la manière de les accuser, ils se serviront de termes les plus capables d'en dimi-nuer la honte. Quelle est la préparation de certains ? Ce n'est pas de demander à Dieu la grâce de bien con-naître leurs péchés ; mais de se tourmenter comment ils pourront les dire pour éprouver moins de honte. Sans presque s'en apercevoir, ils les affaiblissent considéra-blement ; les emportements de la colère ne seront que des impatiences, les discours les plus indécents ne seront que des paroles un peu trop libres ; les désirs les plus honteux, les actions les plus infâmes, ne seront que des familiarités peu décentes ; les injustices les plus mar-quées ne seront que de petits torts ; les excès de l'avarice ne seront qu'un attachement un peu trop grand aux biens de la terre. De sorte que, quand la mort arrivera et que Dieu leur fera voir leurs péchés tels qu'ils sont, ils recon-naîtront alors qu'ils n'ont dit leurs péchés qu'à moitié dans presque toutes leurs confessions. Et que s'ensui-vra-t-il de là, sinon une chaîne de sacrilèges ? O mon Dieu, peut-on bien y penser et ne pas mieux être sincère dans ses confessions pour avoir le bonheur d'en recevoir le pardon ?
2° Je dis que l'on déguise ses péchés dans les circons-tances que l'on a bien soin de ne pas déclarer, qui sou-vent sont plus criminelles que les actions mêmes, par exemple une personne dont l'occupation est de médire, de censurer, ou peut-être même de calomnier, s'accusera d'avoir dit des paroles désavantageuses au prochain ; mais elle ne dit pas que cela était par orgueil, par envie, par haine et par ressentiment ; mais ne dit pas quelle perte elle a portée à sa réputation. Au contraire, si on lui demande si ces paroles ont nui au prochain, elle répond tranquillement que non, sans avoir examiné le oui ou le non. Vous dites bien que vous avez médit, vous ne dites pas que c'était contre votre pasteur ou une autre per-sonne consacrée à Dieu, dont la réputation est absolu-ment nécessaire pour le bien de la religion. Mais vous ne dites pas que ce que vous avez dit était faux, c'est-à-dire une calomnie ; vous vous accusez bien d'avoir dit des paroles contre la religion et contre la modestie, mais vous ne dites pas que votre intention était d'ébranler la foi de cette jeune personne, afin de lui persuader de consentir à vos mauvais désirs, en lui disant qu'il n'y avait point de mal en cela, qu'il ne fallait pas s'en confesser. Une jeune fille dira bien qu'elle s'est habillée avec le désir de plaire ; mais elle ne dira pas que son intention était de donner lieu aux mauvaises pensées. O mon Dieu, ne devrait-on pas les reléguer au fond des forêts où les rayons du soleil n'ont jamais pu pénétrer ? Un père s'accusera bien d'avoir été au cabaret, de s'être enivré ; mais il ne dira pas qu'il a servi de scandale à toute sa famille. Une mère dira bien qu'elle a dit des paroles contre le prochain et qu'elle s'est mise en colère ; mais elle ne dit pas que ses enfants et ses voisines en ont été témoins. Un autre s'accusera bien d'avoir eu ou per-mis des familiarités peu décentes ; mais ne dira pas que son intention était de pécher avec la personne, s'il avait pu la séduire, ou s'il n'avait pas craint le monde. Celui-ci dira bien qu'il a manqué la sainte Messe le dimanche, mais il ne dira pas qu'il l'a fait manquer à d'autres, ou bien que plusieurs personnes l'ont vu, ce qui les a scan-dalisées, et peut-être même ses enfants ou ses domesti-ques. Vous vous accusez bien d'avoir été au cabaret ; mais vous ne dites pas que c'est un dimanche et pendant la messe ou les vêpres ; que votre intention était d'en amener d'autres avec vous, si vous aviez pu. Vous ne dites pas encore que vous êtes sorti de l'église pour aller au cabaret, et que c'était pendant l'instruction, en vous raillant de ce que disait votre pasteur. Vous vous accusez bien d'avoir mangé de la viande les jours défendus ; mais vous ne dites pas que c'est pour vous moquer de la reli-gion et mépriser ses lois saintes. Vous dites bien que vous avez prononcé des paroles sales ; mais vous ne dites pas que c'est parce qu'il y avait devant vous une personne de piété, afin de pouvoir décrier la religion et la détruire de son cœur. Vous dites bien encore que vous travaillez le dimanche ; mais vous ne dites pas que c'est par avarice, en méprisant les défenses de l'Eglise. Vous vous accu-serez bien d'avoir eu de mauvaises pensées ; mais vous ne dites pas que vous y avez donné occasion en allant volontairement avec des personnes que vous saviez très bien n'avoir que de mauvais propos à débiter. Vous dites bien que vous n'avez pas entendu la sainte Messe comme il faut ; mais vous oubliez de dire que vous y aviez donné occasion en venant jusqu'à la porte de l'église sans vous y préparer ; peut-être vous entrez sans faire un acte de contrition, et vous ne dites rien de tout cela : et cepen-dant une bonne partie de ces circonstances manquant peuvent rendre vos confessions sacrilèges. O que de chrétiens damnés, parce qu'ils n'auront pas su se con-fesser ! Vous vous êtes peut-être bien accusé de n'être pas bien instruit ; mais vous avez manqué de dire que vous ne saviez pas les principaux mystères, ce qu'il faut absolument pour être sauvé. Vous avez manqué de dire que vous n'osez pas bien demander à votre confesseur de vous interroger, pour savoir si vous êtes suffisamment instruit pour ne pas vous damner et pour recevoir les sacrements dignement ; peut-être n'y avez-vous jamais pensé ! O mon Dieu, que de chrétiens perdus !
En troisième lieu, je dis déguisement dans le ton de la voix que l'on emploie pour déclarer certains péchés les plus humiliants, dans le soin que l'on prend de les placer de manière que le confesseur puisse les entendre sans y faire attention. L'on commencera à accuser beau-coup de petits péchés, comme : « Mon père, je m'accuse d'avoir manqué de prendre de l'eau bénite le matin et le soir, d'avoir eu des distractions pendant mes prières, et autres choses semblables, après avoir endormi, autant qu'ils peuvent, l'attention du confesseur, d'une voix un peu plus basse et de la manière la plus rapide, on glisse des abominations et des horreurs. » Insensés, pourrait-on leur dire, quel est donc le démon qui vous a ainsi séduits pour vous porter à trahir misérablement la vérité ? Dites-moi, M.F., quel est le motif qui peut vous porter à mentir de la sorte en confession ? Est-ce la crainte que le confesseur ait mauvaise opinion de vous ? Vous vous trompez. Est-ce que vous espérez que les péchés que vous dites vous seront pardonnés ? Vous vous trompez encore grossièrement. Mais, dites-moi, pourquoi est-ce que vous venez dire au confesseur une partie de vos péchés avec l'espérance de le tromper ? mais vous savez bien que vous ne tromperez pas Dieu, de qui vous devez recevoir votre pardon. Dites-moi, cette absolution que vous aurez surprise, pouvez-vous bien espérer qu'elle sera ratifiée dans le ciel ? Hélas ! M.F., tel est l'aveu-glement de certains pécheurs qui osent se persuader que, pourvu qu'ils aient obtenu une absolution, n'importe qu'ils aient dit ou pas dit tous leurs péchés, qu'ils aient trompé ou non leur confesseur, ils se croient pardonnés. Mais, dites-moi, pécheurs aveugles, pécheurs endurcis et vendus à l'impiété, je vous le demande, êtes-vous bien contents de cette absolution, lorsque vous êtes sortis du tribunal de la pénitence ? Avez-vous éprouvé cette paix et cette douce consolation qui est la récompense d'une confession bien faite ? N'avez-vous pas été, au contraire, obligés, pour calmer vos remords de conscience, de vous dire en vous-mêmes qu'un jour vous referiez la confession que vous veniez de faire ? Mais, mon ami, tout bien examiné, vous auriez mieux fait cent fois de ne pas vous confesser. Vous savez très bien que tous les péchés que vous avez ainsi confessés ne sont pas pardonnés, sans parler de ceux que vous avez voulu cacher. Vous n'étiez pas assez coupables ? et vous avez voulu ajouter à tous vos énormes péchés un affreux sacrilège ! – Mais, me direz-vous, je voulais commu-nier, parce que j'avais l'habitude de communier ce jour--là. – Vous vous trompez ; il faut dire que vous vouliez commettre un sacrilège, vous enfoncer plus profond dans les enfers ; vous aviez peut-être peur de n'être pas assez coupables pour aller en enfer ; vous aviez peut--être peur d'aller au ciel. Ah ! ne vous tourmentez pas tant, vous avez assez de péchés pour ne pas aller au ciel et pour être précipités dans les flammes.
Hélas ! je ne vous dis rien de toutes ces confessions sacrilèges par défaut de contrition, qui, seules, damnent plus de monde que tous les autres péchés. J'espère qu'un jour je vous en parlerai. N'est-ce pas, mon ami, que vous espérez de réparer le mal que vous avez fait ? – Oui, me direz-vous. – Hélas ! mon ami, tremblez que ce temps ne vous soit pas donné et que, pour toute préparation, vous n'ayez à la mort que vos sacrilèges. Voulez-vous savoir la récompense de ces profanations ? La voici : endurcissement pendant la vie et désespoir à l'heure de la mort. Vous avez trompé votre confesseur, mais non le bon Dieu, et c'est lui qui vous jugera.
Que devez-vous faire, M.F., pour éviter un mal aussi effroyable ? Hâtez-vous de réparer tous ces défauts de vos confessions passées, par une accusation sincère et entière. Comprenez que jamais Dieu ne vous pardonnera ni vos péchés cachés, ni vos confessions sacrilèges. Vos péchés cachés seront publiés à la face de tout l'univers ; au lieu que si vous les avez bien confessés, jamais on ne pourrait vous les reprocher. Frémissez, M.F., à la vue de l'affreux désespoir qui vous attend à l'heure de la mort, lorsque tous vos sacrilèges vont venir se préci-piter sur vous pour vous ôter toute espérance de pardon. Rappelez-vous l'exemple d'Ananie et de sa femme qui tombèrent morts aux pieds de saint Pierre pour lui avoir menti. Rappelez-vous encore la terrible punition de cette fille rapportée par Saint Antonin...
M.F., que toutes ces considérations vous engagent à faire toutes vos confessions d'après les règles que je viens de vous tracer, et vous êtes sûrs de trouver dans vos confessions le pardon de vos péchés, la paix de l'âme et la vie éternelle à la fin de vos jours. Ce que je vous souhaite.
Mes amis, je vous dirai : vous vous aveuglez affreuse-ment ; qui est celui que vous croyez tromper, et à qui vous voulez cacher votre péché ? ce n'est pas à un homme, mais à Dieu lui-même, qui les connaît bien mieux que vous, qui vous attend dans l'autre vie pour vous punir non un moment, mais une éternité. Combien encore sont de ce nombre ! des personnes qui font pro-fession de piété et qui se laissent tromper par ces misé-rables considérations : « Que pensera-t-on de moi, si l'on ne me voit pas communier comme à mon ordinaire ? » Cette considération les arrête et les jette dans le sacri-lège. O mon Dieu, peut-on après cela vivre tranquille ? Mais, grâce à Dieu, ces âmes noires et vouées à l'iniquité ne sont pas les plus nombreuses. Mais voici la corde par laquelle le démon en entraîne le plus en enfer : ce sont ceux qui, en déclarant leurs péchés, les cachent par la manière dont ils les accusent ; on ne les connaît guère mieux après leur confession qu'avant. Qui pourrait raconter tous les déguisements, tous les artifices que le démon leur inspire pour les perdre et tromper leur con-fesseur. Vous allez le voir :
Je dis 1° déguisement dans la manière de les accuser, ils se serviront de termes les plus capables d'en dimi-nuer la honte. Quelle est la préparation de certains ? Ce n'est pas de demander à Dieu la grâce de bien con-naître leurs péchés ; mais de se tourmenter comment ils pourront les dire pour éprouver moins de honte. Sans presque s'en apercevoir, ils les affaiblissent considéra-blement ; les emportements de la colère ne seront que des impatiences, les discours les plus indécents ne seront que des paroles un peu trop libres ; les désirs les plus honteux, les actions les plus infâmes, ne seront que des familiarités peu décentes ; les injustices les plus mar-quées ne seront que de petits torts ; les excès de l'avarice ne seront qu'un attachement un peu trop grand aux biens de la terre. De sorte que, quand la mort arrivera et que Dieu leur fera voir leurs péchés tels qu'ils sont, ils recon-naîtront alors qu'ils n'ont dit leurs péchés qu'à moitié dans presque toutes leurs confessions. Et que s'ensui-vra-t-il de là, sinon une chaîne de sacrilèges ? O mon Dieu, peut-on bien y penser et ne pas mieux être sincère dans ses confessions pour avoir le bonheur d'en recevoir le pardon ?
2° Je dis que l'on déguise ses péchés dans les circons-tances que l'on a bien soin de ne pas déclarer, qui sou-vent sont plus criminelles que les actions mêmes, par exemple une personne dont l'occupation est de médire, de censurer, ou peut-être même de calomnier, s'accusera d'avoir dit des paroles désavantageuses au prochain ; mais elle ne dit pas que cela était par orgueil, par envie, par haine et par ressentiment ; mais ne dit pas quelle perte elle a portée à sa réputation. Au contraire, si on lui demande si ces paroles ont nui au prochain, elle répond tranquillement que non, sans avoir examiné le oui ou le non. Vous dites bien que vous avez médit, vous ne dites pas que c'était contre votre pasteur ou une autre per-sonne consacrée à Dieu, dont la réputation est absolu-ment nécessaire pour le bien de la religion. Mais vous ne dites pas que ce que vous avez dit était faux, c'est-à-dire une calomnie ; vous vous accusez bien d'avoir dit des paroles contre la religion et contre la modestie, mais vous ne dites pas que votre intention était d'ébranler la foi de cette jeune personne, afin de lui persuader de consentir à vos mauvais désirs, en lui disant qu'il n'y avait point de mal en cela, qu'il ne fallait pas s'en confesser. Une jeune fille dira bien qu'elle s'est habillée avec le désir de plaire ; mais elle ne dira pas que son intention était de donner lieu aux mauvaises pensées. O mon Dieu, ne devrait-on pas les reléguer au fond des forêts où les rayons du soleil n'ont jamais pu pénétrer ? Un père s'accusera bien d'avoir été au cabaret, de s'être enivré ; mais il ne dira pas qu'il a servi de scandale à toute sa famille. Une mère dira bien qu'elle a dit des paroles contre le prochain et qu'elle s'est mise en colère ; mais elle ne dit pas que ses enfants et ses voisines en ont été témoins. Un autre s'accusera bien d'avoir eu ou per-mis des familiarités peu décentes ; mais ne dira pas que son intention était de pécher avec la personne, s'il avait pu la séduire, ou s'il n'avait pas craint le monde. Celui-ci dira bien qu'il a manqué la sainte Messe le dimanche, mais il ne dira pas qu'il l'a fait manquer à d'autres, ou bien que plusieurs personnes l'ont vu, ce qui les a scan-dalisées, et peut-être même ses enfants ou ses domesti-ques. Vous vous accusez bien d'avoir été au cabaret ; mais vous ne dites pas que c'est un dimanche et pendant la messe ou les vêpres ; que votre intention était d'en amener d'autres avec vous, si vous aviez pu. Vous ne dites pas encore que vous êtes sorti de l'église pour aller au cabaret, et que c'était pendant l'instruction, en vous raillant de ce que disait votre pasteur. Vous vous accusez bien d'avoir mangé de la viande les jours défendus ; mais vous ne dites pas que c'est pour vous moquer de la reli-gion et mépriser ses lois saintes. Vous dites bien que vous avez prononcé des paroles sales ; mais vous ne dites pas que c'est parce qu'il y avait devant vous une personne de piété, afin de pouvoir décrier la religion et la détruire de son cœur. Vous dites bien encore que vous travaillez le dimanche ; mais vous ne dites pas que c'est par avarice, en méprisant les défenses de l'Eglise. Vous vous accu-serez bien d'avoir eu de mauvaises pensées ; mais vous ne dites pas que vous y avez donné occasion en allant volontairement avec des personnes que vous saviez très bien n'avoir que de mauvais propos à débiter. Vous dites bien que vous n'avez pas entendu la sainte Messe comme il faut ; mais vous oubliez de dire que vous y aviez donné occasion en venant jusqu'à la porte de l'église sans vous y préparer ; peut-être vous entrez sans faire un acte de contrition, et vous ne dites rien de tout cela : et cepen-dant une bonne partie de ces circonstances manquant peuvent rendre vos confessions sacrilèges. O que de chrétiens damnés, parce qu'ils n'auront pas su se con-fesser ! Vous vous êtes peut-être bien accusé de n'être pas bien instruit ; mais vous avez manqué de dire que vous ne saviez pas les principaux mystères, ce qu'il faut absolument pour être sauvé. Vous avez manqué de dire que vous n'osez pas bien demander à votre confesseur de vous interroger, pour savoir si vous êtes suffisamment instruit pour ne pas vous damner et pour recevoir les sacrements dignement ; peut-être n'y avez-vous jamais pensé ! O mon Dieu, que de chrétiens perdus !
En troisième lieu, je dis déguisement dans le ton de la voix que l'on emploie pour déclarer certains péchés les plus humiliants, dans le soin que l'on prend de les placer de manière que le confesseur puisse les entendre sans y faire attention. L'on commencera à accuser beau-coup de petits péchés, comme : « Mon père, je m'accuse d'avoir manqué de prendre de l'eau bénite le matin et le soir, d'avoir eu des distractions pendant mes prières, et autres choses semblables, après avoir endormi, autant qu'ils peuvent, l'attention du confesseur, d'une voix un peu plus basse et de la manière la plus rapide, on glisse des abominations et des horreurs. » Insensés, pourrait-on leur dire, quel est donc le démon qui vous a ainsi séduits pour vous porter à trahir misérablement la vérité ? Dites-moi, M.F., quel est le motif qui peut vous porter à mentir de la sorte en confession ? Est-ce la crainte que le confesseur ait mauvaise opinion de vous ? Vous vous trompez. Est-ce que vous espérez que les péchés que vous dites vous seront pardonnés ? Vous vous trompez encore grossièrement. Mais, dites-moi, pourquoi est-ce que vous venez dire au confesseur une partie de vos péchés avec l'espérance de le tromper ? mais vous savez bien que vous ne tromperez pas Dieu, de qui vous devez recevoir votre pardon. Dites-moi, cette absolution que vous aurez surprise, pouvez-vous bien espérer qu'elle sera ratifiée dans le ciel ? Hélas ! M.F., tel est l'aveu-glement de certains pécheurs qui osent se persuader que, pourvu qu'ils aient obtenu une absolution, n'importe qu'ils aient dit ou pas dit tous leurs péchés, qu'ils aient trompé ou non leur confesseur, ils se croient pardonnés. Mais, dites-moi, pécheurs aveugles, pécheurs endurcis et vendus à l'impiété, je vous le demande, êtes-vous bien contents de cette absolution, lorsque vous êtes sortis du tribunal de la pénitence ? Avez-vous éprouvé cette paix et cette douce consolation qui est la récompense d'une confession bien faite ? N'avez-vous pas été, au contraire, obligés, pour calmer vos remords de conscience, de vous dire en vous-mêmes qu'un jour vous referiez la confession que vous veniez de faire ? Mais, mon ami, tout bien examiné, vous auriez mieux fait cent fois de ne pas vous confesser. Vous savez très bien que tous les péchés que vous avez ainsi confessés ne sont pas pardonnés, sans parler de ceux que vous avez voulu cacher. Vous n'étiez pas assez coupables ? et vous avez voulu ajouter à tous vos énormes péchés un affreux sacrilège ! – Mais, me direz-vous, je voulais commu-nier, parce que j'avais l'habitude de communier ce jour--là. – Vous vous trompez ; il faut dire que vous vouliez commettre un sacrilège, vous enfoncer plus profond dans les enfers ; vous aviez peut-être peur de n'être pas assez coupables pour aller en enfer ; vous aviez peut--être peur d'aller au ciel. Ah ! ne vous tourmentez pas tant, vous avez assez de péchés pour ne pas aller au ciel et pour être précipités dans les flammes.
Hélas ! je ne vous dis rien de toutes ces confessions sacrilèges par défaut de contrition, qui, seules, damnent plus de monde que tous les autres péchés. J'espère qu'un jour je vous en parlerai. N'est-ce pas, mon ami, que vous espérez de réparer le mal que vous avez fait ? – Oui, me direz-vous. – Hélas ! mon ami, tremblez que ce temps ne vous soit pas donné et que, pour toute préparation, vous n'ayez à la mort que vos sacrilèges. Voulez-vous savoir la récompense de ces profanations ? La voici : endurcissement pendant la vie et désespoir à l'heure de la mort. Vous avez trompé votre confesseur, mais non le bon Dieu, et c'est lui qui vous jugera.
Que devez-vous faire, M.F., pour éviter un mal aussi effroyable ? Hâtez-vous de réparer tous ces défauts de vos confessions passées, par une accusation sincère et entière. Comprenez que jamais Dieu ne vous pardonnera ni vos péchés cachés, ni vos confessions sacrilèges. Vos péchés cachés seront publiés à la face de tout l'univers ; au lieu que si vous les avez bien confessés, jamais on ne pourrait vous les reprocher. Frémissez, M.F., à la vue de l'affreux désespoir qui vous attend à l'heure de la mort, lorsque tous vos sacrilèges vont venir se préci-piter sur vous pour vous ôter toute espérance de pardon. Rappelez-vous l'exemple d'Ananie et de sa femme qui tombèrent morts aux pieds de saint Pierre pour lui avoir menti. Rappelez-vous encore la terrible punition de cette fille rapportée par Saint Antonin...
M.F., que toutes ces considérations vous engagent à faire toutes vos confessions d'après les règles que je viens de vous tracer, et vous êtes sûrs de trouver dans vos confessions le pardon de vos péchés, la paix de l'âme et la vie éternelle à la fin de vos jours. Ce que je vous souhaite.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
SERMON
SUR LE PÉCHÉ MORTEL
Vœ nobis, quia peccavimus.
Malheur à nous, parce que nous avons péché.
(Lament. v, 16.)
Le prophète Jérémie, M.F., se regardait comme chargé des péchés de son peuple ; il s'écrie, en pleurant amèrement : « Enfin, enfin, nous avons perdu par nos péchés ces plaisirs purs dont nos cœurs jouissaient, nos joies se sont changées en tristesse, et la couronne de gloire que nous avions sur nos têtes est tombée. Malheur à nous, parce que nous avons pêché.» Quoi, M.F., de plus digne de nos réflexions et de nos larmes que ces paroles du prophète, qui nous montre les ravages effroyables que le péché fait dans celui qui est si malheureux que de le commettre ? Comment, M.F., oserai-je vouloir entreprendre de vous parler de la grandeur, de la malice du péché envers Dieu contre qui il est commis et des malheurs qu'il attire à celui qui le commet. Hélas ! M.F., vous parler de détruire en vous le péché, de le noyer dans vos larmes, et de l'anéantir par vos pénitences c'est vouloir entreprendre de détruire ce que les rois, quelque puissants qu'ils aient été, n'ont jamais pu ren-verser, ni par la sévérité des supplices, ni par la rigueur et la multitude de leurs ordonnances ; c'est vouloir empêcher ce que les prophètes de l'Ancien Testament n'ont jamais pu empêcher par la force de leur éloquence toute divine ; c'est vouloir détruire ce que les apôtres, enflammés par l'amour de Dieu et animés par la force de l'Esprit-Saint, n'ont jamais pu détruire. Hélas ! M.F., c'est vouloir anéantir ce que tous les martyrs n'ont jamais pu étouffer dans l'effusion de tout leur sang. Ah ! que dis-je ? C'est vouloir exterminer ce que Jésus-Christ lui-même, tout Dieu qu'il est, n'a pas entiè-rement exterminé par tous ses tourments et les rigueurs inexprimables de sa douloureuse et cruelle passion. Oui, M.F., je vais donc vous parler du péché, c'est-à--dire de ce que le bon Dieu lui-même, depuis plus de six mille ans, n'a pas renversé par toutes les grâces de sa religion sainte et divine, par toutes les forces de ses sacrements et par tout le zèle de ses ministres. O péché ! ô maudit péché mortel, si familier aux hommes et si peu connu des hommes ! O maudit péché, destructeur de notre sainte religion, cruel bourreau de nos âmes !... germe de réprobation ! Horreur du ciel et désolation de la terre ! O maudit péché, qui est la cause de tous nos malheurs pour le temps et pour l'éternité ! ô sanglant meurtrier de Jésus-Christ même ! ô mon Dieu, si nous con-naissions bien ce que c'est que le péché, pourrions-nous le commettre avec plaisir ; et, après l'avoir commis, pourrions-nous vivre tranquilles ! Mon Dieu, que nous sommes aveugles ! Voyons donc tous ensemble ce que c'est que le péché mortel, sa malice, ensuite l'aveugle-ment de celui qui le commet et les maux qu'il nous attire.
SUR LE PÉCHÉ MORTEL
Vœ nobis, quia peccavimus.
Malheur à nous, parce que nous avons péché.
(Lament. v, 16.)
Le prophète Jérémie, M.F., se regardait comme chargé des péchés de son peuple ; il s'écrie, en pleurant amèrement : « Enfin, enfin, nous avons perdu par nos péchés ces plaisirs purs dont nos cœurs jouissaient, nos joies se sont changées en tristesse, et la couronne de gloire que nous avions sur nos têtes est tombée. Malheur à nous, parce que nous avons pêché.» Quoi, M.F., de plus digne de nos réflexions et de nos larmes que ces paroles du prophète, qui nous montre les ravages effroyables que le péché fait dans celui qui est si malheureux que de le commettre ? Comment, M.F., oserai-je vouloir entreprendre de vous parler de la grandeur, de la malice du péché envers Dieu contre qui il est commis et des malheurs qu'il attire à celui qui le commet. Hélas ! M.F., vous parler de détruire en vous le péché, de le noyer dans vos larmes, et de l'anéantir par vos pénitences c'est vouloir entreprendre de détruire ce que les rois, quelque puissants qu'ils aient été, n'ont jamais pu ren-verser, ni par la sévérité des supplices, ni par la rigueur et la multitude de leurs ordonnances ; c'est vouloir empêcher ce que les prophètes de l'Ancien Testament n'ont jamais pu empêcher par la force de leur éloquence toute divine ; c'est vouloir détruire ce que les apôtres, enflammés par l'amour de Dieu et animés par la force de l'Esprit-Saint, n'ont jamais pu détruire. Hélas ! M.F., c'est vouloir anéantir ce que tous les martyrs n'ont jamais pu étouffer dans l'effusion de tout leur sang. Ah ! que dis-je ? C'est vouloir exterminer ce que Jésus-Christ lui-même, tout Dieu qu'il est, n'a pas entiè-rement exterminé par tous ses tourments et les rigueurs inexprimables de sa douloureuse et cruelle passion. Oui, M.F., je vais donc vous parler du péché, c'est-à--dire de ce que le bon Dieu lui-même, depuis plus de six mille ans, n'a pas renversé par toutes les grâces de sa religion sainte et divine, par toutes les forces de ses sacrements et par tout le zèle de ses ministres. O péché ! ô maudit péché mortel, si familier aux hommes et si peu connu des hommes ! O maudit péché, destructeur de notre sainte religion, cruel bourreau de nos âmes !... germe de réprobation ! Horreur du ciel et désolation de la terre ! O maudit péché, qui est la cause de tous nos malheurs pour le temps et pour l'éternité ! ô sanglant meurtrier de Jésus-Christ même ! ô mon Dieu, si nous con-naissions bien ce que c'est que le péché, pourrions-nous le commettre avec plaisir ; et, après l'avoir commis, pourrions-nous vivre tranquilles ! Mon Dieu, que nous sommes aveugles ! Voyons donc tous ensemble ce que c'est que le péché mortel, sa malice, ensuite l'aveugle-ment de celui qui le commet et les maux qu'il nous attire.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Non, M.F., jamais il ne sera donné aux mortels de comprendre la grandeur de la malice du péché mortel. Quand j'aurais le pouvoir d'ouvrir les portes de l'enfer, et de vous faire environner de toutes ces malheureuses victimes de la juste colère de Dieu, que chacune vous ferait de la manière la plus déchirante la peinture des larmes qu'elles ont répandues, des soupirs et des cris qu'elles ont poussés, des douleurs qu'elles ont ressenties et qu'elles endureront jusqu'à la fin de l'éternité, s'il était possible qu'il y eût fin. Tout cela ne serait encore rien. Et si vous m'en demandez la raison, la voici c'est qu'il faudrait pouvoir vous faire comprendre d'un côté jusqu'à quel degré le péché outrage le bon Dieu, et d'un autre côté jusqu'à quel degré la puissance infinie de Dieu punit le péché ; ce qui ne sera jamais donné, même aux anges, de savoir. Tout ce que je vais vous en dire ne sera donc rien en comparaison de ce qu'il est.
Si vous demandez, M.F., ce que c'est que le péché mortel, voici ce que saint Augustin nous en dit : C'est une aversion de Dieu et un attachement déréglé et cri-minel aux créatures. Voilà donc, M.F. la matière du péché, non seulement s'éloigner de Dieu, mais encore le haïr. O mon Dieu, quel malheur est comparable à celui-là, s'attacher à une vile créature, lui donner toutes les affections de son cœur, au mépris de son Créateur, de son Dieu ? Pouvons-nous, M.F., nous figurer une plus noire malice et une plus effroyable énormité ! Mais encore, M.F., qui nous dira ce que c'est que ce mal d'aversion de Dieu ? Le voici : c'est une opposition uni-verselle à la volonté de Dieu. Voilà le langage que nous tenons à Dieu en péchant : « Retirez-vous de moi, je ne veux plus que vous soyez mon Dieu, ni moi être votre serviteur : je vous méprise avec tous vos biens. Vous voulez cela ; eh bien ! moi je ne le veux pas. Vous ne voulez pas cela ; eh bien ! moi je le veux. Vous me com-mandez de faire cela, je ne veux pas le faire. » Voulez-vous mieux le comprendre ? Ecoutez-moi un instant : Vous me commandez, disons-nous à Dieu, de vous prier matin et soir ; eh bien ! moi je ne veux pas vous prier. Vous voulez que je sanctifie le saint jour de dimanche ; eh bien ! moi je ne veux pas, je veux le profaner par les travaux que vous m'avez défendus, encore plus, en me livrant aux plaisirs et à la débauche. Vous me commandez de conserver mon corps et mon âme purs et chastes ; eh bien ! moi je ne veux pas ; je les profanerai par les pensées, les désirs sales et honteux, par les actions les plus infâmes. Vous voulez que je pardonne à mon ennemi ; eh bien ! moi je veux me venger. Vous voulez que je vous aime ; eh bien ! je vous méprise et me donne aux créatures. Vous voulez que je profite de votre sainte parole, que vos ministres m'an-noncent pour me faire connaître les moyens de bien me conduire ; vous voulez que je profite des grâces que la religion nous présente pour nous aider à vaincre nos penchants ; eh bien ! moi je veux mépriser votre parole et celui qui l'annonce et fouler aux pieds toutes vos grâces. Voilà, M.F., le langage que nous tenons au bon Dieu toutes les fois que nous péchons ; c'est pour cela que le prophète Isaïe appelle les pécheurs des rebelles qui font toujours le contraire de la volonté du Sei-gneur .
En deuxième lieu, je dis que ce mot d'aversion veut encore dire un dégoût, un soulèvement de cœur contre tout ce qui a rapport à la religion : la pénitence, les morti-fications, le pardon des ennemis, les violences qu'il faut se faire pour vaincre les penchants corrompus de son cœur, la privation de certains plaisirs, ainsi que du reste, cela nous fait peur, nous rend malades d'y penser ; l'on trouve que le bon Dieu exige trop, qu'il est trop difficile de servir le bon Dieu ; nous aimons mieux nous exposer d'aller souffrir pendant toute l'éternité que de nous faire quelques violences pour plaire à Dieu en évitant le péché. O mon Dieu, que l'homme est aveugle ! Est-il bien possible qu'une vile créature ose se révolter contre son Créateur, qui d'un seul regard l'anéantirait à l'instant même.
En troisième lieu, je dis que non seulement le pécheur en péchant préfère la créature à la majesté de Dieu : quelle honte ! quelle horreur pour un chrétien, s'il connaissait ce qu'il fait en péchant ! Mais encore saint Augustin dit : « Autant de passions nous contentons, autant de dieux étrangers nous adorons. » Oh ! quelle injustice le pécheur ne fait-il pas à Dieu, de le mettre au-dessous de sa passion ! Oui, nous dit ce saint, ce mal-heureux impudique met son Dieu au chevet d'une femme infâme... oui, il met son Dieu dans les regards d'un impudique, dans les plaisirs brutaux et infâmes d'un homme lascif. Qu'est-ce qu'un impudique ? nous dit saint Augustin ; c'est un homme pauvre et mal-heureux qui ne respire que la chair et l'ordure. Qu'est-ce qu'un emporté ? C'est un homme qui jette le feu par les yeux et les narines. Qu'est-ce qu'un envieux ? C'est un homme qui crève de dépit et qui se consume de rage. Qu'est-ce qu'un ambitieux ? C'est, nous dit-il, un homme qui n'est rempli que de fumée. Eh bien ! où pensez-vous que le pécheur mette son Dieu ? croyez-vous que c'est dans ses yeux ? Encore plus bas. Est-ce dans son cœur ? Non, nous dit-il, encore plus bas. Est-ce dans le fond des abîmes ? Non, nous dit-il, encore plus bas... Où est-ce donc ? Ah ! malheureux, le voici : si tu peux l'entendre sans mourir d'horreur, malheur à toi. Ah ! malheureux pécheur, tu places ton Dieu sous l'écume de tes emportements, sous la sordide passion de ton avarice ; mal-heureux, c'est sous la bile de ta fureur, sous la rage de ton envie, sous la fumée de ton ambition. Ah ! que dis-je ? tu le places et tu voudrais le noyer dans le jus de tes tur-pitudes impures et infâmes. O mon Dieu, qui comprendra ce que c'est que le péché et pourra encore le commet-tre ?
J'ai appris, M.F., dans l'Écriture sainte, que le ciel et la terre, ne peuvent renfermer la grandeur de la majesté de Dieu. J'ai bien appris qu'il a son trône dans le soleil et qu'il est environné de lumières ; mais je n'avais jamais vu que la divinité d'un Dieu trois fois saint pût être salie, tachée d'ordures, noircie de la fumée des passions des hommes infâmes. O péché ! ô maudit péché ! que tu fais bien voir ce que nous ne comprendrons jamais ! O quelle horreur, M.F., que la divinité soit arrachée de son trône par un infâme pécheur pour la mettre sous les pieds de ses passions ! O éternité ! seras-tu assez longue pour punir ces malheureux ? Saint Paul, voulant nous décrire l'énormité du péché de la chair, nous dit des paroles si étonnantes, que si vous pouviez bien les comprendre, il vous serait impossible de jamais tomber dans ce péché « Ne savez-vous pas que votre corps est un membre de Jésus-Christ ? » De sorte qu'un impudique qui s'aban-donne à une infâme créature, de son corps qui est un membre de Jésus-Christ, il en fait le membre d'une infâme prostituée. O horreur ! ô abomination, qui doit faire même frémir l'enfer d'horreur ! Dites-moi, M.F., que penseriez-vous d'un homme qui serait assez enragé, que de prendre du sang le plus impur des sales animaux et de le mettre dans le calice avec le sang précieux de Jésus-Christ après la consécration ? Cela seul vous fait horreur ; et cependant le pécheur va encore plus loin en préférant le démon au Fils de Dieu, et les mouvements de Satan aux mouvements de la grâce de Jésus-Christ.
Si vous demandez, M.F., ce que c'est que le péché mortel, voici ce que saint Augustin nous en dit : C'est une aversion de Dieu et un attachement déréglé et cri-minel aux créatures. Voilà donc, M.F. la matière du péché, non seulement s'éloigner de Dieu, mais encore le haïr. O mon Dieu, quel malheur est comparable à celui-là, s'attacher à une vile créature, lui donner toutes les affections de son cœur, au mépris de son Créateur, de son Dieu ? Pouvons-nous, M.F., nous figurer une plus noire malice et une plus effroyable énormité ! Mais encore, M.F., qui nous dira ce que c'est que ce mal d'aversion de Dieu ? Le voici : c'est une opposition uni-verselle à la volonté de Dieu. Voilà le langage que nous tenons à Dieu en péchant : « Retirez-vous de moi, je ne veux plus que vous soyez mon Dieu, ni moi être votre serviteur : je vous méprise avec tous vos biens. Vous voulez cela ; eh bien ! moi je ne le veux pas. Vous ne voulez pas cela ; eh bien ! moi je le veux. Vous me com-mandez de faire cela, je ne veux pas le faire. » Voulez-vous mieux le comprendre ? Ecoutez-moi un instant : Vous me commandez, disons-nous à Dieu, de vous prier matin et soir ; eh bien ! moi je ne veux pas vous prier. Vous voulez que je sanctifie le saint jour de dimanche ; eh bien ! moi je ne veux pas, je veux le profaner par les travaux que vous m'avez défendus, encore plus, en me livrant aux plaisirs et à la débauche. Vous me commandez de conserver mon corps et mon âme purs et chastes ; eh bien ! moi je ne veux pas ; je les profanerai par les pensées, les désirs sales et honteux, par les actions les plus infâmes. Vous voulez que je pardonne à mon ennemi ; eh bien ! moi je veux me venger. Vous voulez que je vous aime ; eh bien ! je vous méprise et me donne aux créatures. Vous voulez que je profite de votre sainte parole, que vos ministres m'an-noncent pour me faire connaître les moyens de bien me conduire ; vous voulez que je profite des grâces que la religion nous présente pour nous aider à vaincre nos penchants ; eh bien ! moi je veux mépriser votre parole et celui qui l'annonce et fouler aux pieds toutes vos grâces. Voilà, M.F., le langage que nous tenons au bon Dieu toutes les fois que nous péchons ; c'est pour cela que le prophète Isaïe appelle les pécheurs des rebelles qui font toujours le contraire de la volonté du Sei-gneur .
En deuxième lieu, je dis que ce mot d'aversion veut encore dire un dégoût, un soulèvement de cœur contre tout ce qui a rapport à la religion : la pénitence, les morti-fications, le pardon des ennemis, les violences qu'il faut se faire pour vaincre les penchants corrompus de son cœur, la privation de certains plaisirs, ainsi que du reste, cela nous fait peur, nous rend malades d'y penser ; l'on trouve que le bon Dieu exige trop, qu'il est trop difficile de servir le bon Dieu ; nous aimons mieux nous exposer d'aller souffrir pendant toute l'éternité que de nous faire quelques violences pour plaire à Dieu en évitant le péché. O mon Dieu, que l'homme est aveugle ! Est-il bien possible qu'une vile créature ose se révolter contre son Créateur, qui d'un seul regard l'anéantirait à l'instant même.
En troisième lieu, je dis que non seulement le pécheur en péchant préfère la créature à la majesté de Dieu : quelle honte ! quelle horreur pour un chrétien, s'il connaissait ce qu'il fait en péchant ! Mais encore saint Augustin dit : « Autant de passions nous contentons, autant de dieux étrangers nous adorons. » Oh ! quelle injustice le pécheur ne fait-il pas à Dieu, de le mettre au-dessous de sa passion ! Oui, nous dit ce saint, ce mal-heureux impudique met son Dieu au chevet d'une femme infâme... oui, il met son Dieu dans les regards d'un impudique, dans les plaisirs brutaux et infâmes d'un homme lascif. Qu'est-ce qu'un impudique ? nous dit saint Augustin ; c'est un homme pauvre et mal-heureux qui ne respire que la chair et l'ordure. Qu'est-ce qu'un emporté ? C'est un homme qui jette le feu par les yeux et les narines. Qu'est-ce qu'un envieux ? C'est un homme qui crève de dépit et qui se consume de rage. Qu'est-ce qu'un ambitieux ? C'est, nous dit-il, un homme qui n'est rempli que de fumée. Eh bien ! où pensez-vous que le pécheur mette son Dieu ? croyez-vous que c'est dans ses yeux ? Encore plus bas. Est-ce dans son cœur ? Non, nous dit-il, encore plus bas. Est-ce dans le fond des abîmes ? Non, nous dit-il, encore plus bas... Où est-ce donc ? Ah ! malheureux, le voici : si tu peux l'entendre sans mourir d'horreur, malheur à toi. Ah ! malheureux pécheur, tu places ton Dieu sous l'écume de tes emportements, sous la sordide passion de ton avarice ; mal-heureux, c'est sous la bile de ta fureur, sous la rage de ton envie, sous la fumée de ton ambition. Ah ! que dis-je ? tu le places et tu voudrais le noyer dans le jus de tes tur-pitudes impures et infâmes. O mon Dieu, qui comprendra ce que c'est que le péché et pourra encore le commet-tre ?
J'ai appris, M.F., dans l'Écriture sainte, que le ciel et la terre, ne peuvent renfermer la grandeur de la majesté de Dieu. J'ai bien appris qu'il a son trône dans le soleil et qu'il est environné de lumières ; mais je n'avais jamais vu que la divinité d'un Dieu trois fois saint pût être salie, tachée d'ordures, noircie de la fumée des passions des hommes infâmes. O péché ! ô maudit péché ! que tu fais bien voir ce que nous ne comprendrons jamais ! O quelle horreur, M.F., que la divinité soit arrachée de son trône par un infâme pécheur pour la mettre sous les pieds de ses passions ! O éternité ! seras-tu assez longue pour punir ces malheureux ? Saint Paul, voulant nous décrire l'énormité du péché de la chair, nous dit des paroles si étonnantes, que si vous pouviez bien les comprendre, il vous serait impossible de jamais tomber dans ce péché « Ne savez-vous pas que votre corps est un membre de Jésus-Christ ? » De sorte qu'un impudique qui s'aban-donne à une infâme créature, de son corps qui est un membre de Jésus-Christ, il en fait le membre d'une infâme prostituée. O horreur ! ô abomination, qui doit faire même frémir l'enfer d'horreur ! Dites-moi, M.F., que penseriez-vous d'un homme qui serait assez enragé, que de prendre du sang le plus impur des sales animaux et de le mettre dans le calice avec le sang précieux de Jésus-Christ après la consécration ? Cela seul vous fait horreur ; et cependant le pécheur va encore plus loin en préférant le démon au Fils de Dieu, et les mouvements de Satan aux mouvements de la grâce de Jésus-Christ.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
En quatrième lieu, je dis que le péché mortel nous aveugle de manière que nous ne connaissons presque plus le mal que nous faisons ; du moins d'une manière si faible que nous péchons presque sans nous en aper-cevoir. Le péché se présente-t-il, nous le recevons ; la grâce vient, nous la méprisons ; de sorte qu'une fois aveuglés et endurcis nous faisons autant de chutes que de pas. Le bon Dieu, en punition de nos péchés, nous rejette de sa présence et nous livre entre les mains de nos passions. D'après cela, notre vie n'est autre chose qu'un tissu de crimes et une suite et un enchaînement de péchés. Le cœur de l'homme est semblable à une mer agitée par d'horribles tempêtes dont un flot en produit un autre : de même en arrive-t-il au pécheur. Le premier péché en produit un autre, ainsi ils se poussent les uns les autres, et le dernier pousse à l'impénitence finale, et l'impénitence finale à la mort, et la mort à l'éternité malheureuse. De sorte, nous dit Tertullien, qu'un péché devient la matière d'un autre. De là je conclus, M.F., que le pécheur ne cesse de pécher que dans le moment où il cesse de vivre ; toute sa vie n'est qu'un enchaînement de crimes, jusqu'à ce qu'il soit arrivé au dernier.
L'Ecriture sainte nous en fournit un fameux exemple dans la personne de l'infortuné Amasias, roi de Juda. Ce prince avait toutes les qualités naturelles que l'on pour-rait souhaiter pour un bon roi, et, selon toute apparence, avait les meilleures dispositions. Il monta sur le trône à l'âge de 25 ans. Jusqu'alors il avait assez bien vécu ; mais, hélas ! à peine fut-il élevé, que l'orgueil et l'ambi-tion se saisirent de lui. Il voulut savoir à combien de personnes il aurait droit de commander ; il en eut trois cent mille capables de porter les armes : « Voilà bien du monde, se dit-il en lui-même ; mais où vais-je trouver de l'argent pour les payer ? Il fait établir un impôt dont il écrasa son peuple, et le fit exécuter avec la dernière cruauté. Le Seigneur lui envoya un prophète pour le reprendre ; mais non, un aveugle, rien ne peut le tou-cher ; il méprise les réprimandes du prophète ; même il le menace de mort, se baignant pour ainsi dire dans le vice de son orgueil. Voyant que le prophète le reprenait, il lui dit : « Vous ne cessez de m'importuner ; eh bien ! j'abandonnerai le vrai Dieu et j'adorerai les idoles. » En effet il le fit. Se voyant à la tête d'une superbe armée, bien équipée, il croit que rien n'est capable de lui résister. Il va attaquer le roi d'Israël : il veut se rendre maître de ses États et faire mourir le roi ; mais, hélas ! son armée fut taillée en pièces et lui-même fut pris et conduit en captivité, ce qui dura quinze ans ; enfin ses propres domestiques l'égorgèrent . Voilà, M.F., précisément l'image d'un pécheur endurci, dont l'endur-cissement consiste dans un certain enchaînement de crimes et dans une suite continuelle de mauvaises actions, et dans un certain flux et reflux d'impiété ; il ne cesse de pécher qu'en cessant de vivre ; il n'y a que la mort qui lui fasse ouvrir les yeux sur son état.
En cinquième lieu, ce qui rend cet endurcissement si terrible, c'est l'abandon de Dieu qui se retire du pécheur et qui finit par le livrer entre les mains de ses passions. Une fois arrivé à ce degré d'aveuglement, hélas ! rien ne le touche et rien n'est capable de lui faire connaître l'état malheureux où le péché le conduit ; il méprise tout ce qui est capable de le rappeler à Dieu ; il rejette la grâce autant de fois qu'elle vient. Cependant il sait qu'il est dans le péché, il sait qu'il n'a point fait de pâques, il sait qu'il a caché ses péchés en confession, il sait qu'il possède le bien de son prochain, il sait que s'il meurt dans cet état il sera perdu. Il entend le ministre du Seigneur qui lui montre au doigt l'état épouvantable de son âme et ne cesse de le lui représenter. Oui, il sait tout cela ; mais il ne l'entend que pour railler et mépriser même celui qui voudrait lui tendre la main ; il ne recevra les grâces du salut que pour les fouler sous ses pieds. Écoutez parler cet aveugle, cet endurci : « Tout ce que les prêtres disent n'est que des mensonges ; c'est leur métier. » Si dans une instruction il y a quelque chose qui les regarde ou qui les touche un peu de près, il n'y a sortes d'abominations qu'ils ne vomissent contre le prêtre. Vous les voyez sortir et faire tout ce qu'ils peuvent pour en entraîner d'autres dans leur répro-bation. Ils ont une telle fureur contre Dieu et sa religion, qu'ils affecteront de faire le mal devant les gens de bien, c'est-à-dire de débiter des impiétés contre la religion, contre ses ministres, de travailler les saints jours du dimanche et de faire gras les jours défendus. Dites-moi, M.F., auriez-vous pu vous former une idée qu'une personne fût capable d'arriver à cet état d'aveu-glement et d'endurcissement ? Ce qui met le comble à leur malheur, c'est qu'ils sont peut-être tranquilles, et peut-être le seront-ils jusqu'au moment où ils tomberont entre les mains de leur ennemi éternel. Nous en avons un bel exemple dans l'Écriture sainte, où nous lisons que le roi de Syrie, ayant conçu le dessein d'assiéger une ville de la Judée , fit mettre ses soldats en embuscade. Le prophète Élisée, à qui le Seigneur le fit savoir, se mit en prières en demandant au bon Dieu d'aveugler tous ceux qui venaient le chercher. Après avoir fait sa prière, il va trouver ces gens et leur dit : « Vous vous trompez : suivez-moi, vous n'avez pas pris la route qu'il fallait prendre, ce n'est pas ici la ville que vous aviez dessein d'assiéger. Venez et suivez-moi, et je vous conduirai où il faut que vous alliez. Le prophète se mit à leur tête et les mena droit à Samarie, et après les avoir mis entre les mains de leurs ennemis qui avaient résolu de les perdre, il s'en alla . Image terrible de ce qui se passe ordinairement à la mort de ce pécheur endurci : s'il est assisté d'un prêtre, ce n'est souvent que pour son malheur. Le prêtre le console, en lui fai-sant envisager la grandeur de la miséricorde de Dieu ; les assistants se consolent en voyant les faveurs qui lui sont prodiguées dans ce terrible moment ; mais le prêtre ne fait que l'endormir dans une fausse paix, et les sacrements ne font pas autre chose que de l'aveugler davantage. Il reçoit le prêtre avec une hospitalité extraor-dinaire ; et les démons n'attendent que le moment où la mort le frappe pour le traîner en enfer. Il a tout méprisé, il s'est moqué de tout, le voilà réduit, sous la rigueur de la justice de celui contre qui il a tant vomi d'impiétés. Mon Dieu, que l'état de ce pauvre malheureux est digne de nos prières et de nos larmes !
L'Ecriture sainte nous en fournit un fameux exemple dans la personne de l'infortuné Amasias, roi de Juda. Ce prince avait toutes les qualités naturelles que l'on pour-rait souhaiter pour un bon roi, et, selon toute apparence, avait les meilleures dispositions. Il monta sur le trône à l'âge de 25 ans. Jusqu'alors il avait assez bien vécu ; mais, hélas ! à peine fut-il élevé, que l'orgueil et l'ambi-tion se saisirent de lui. Il voulut savoir à combien de personnes il aurait droit de commander ; il en eut trois cent mille capables de porter les armes : « Voilà bien du monde, se dit-il en lui-même ; mais où vais-je trouver de l'argent pour les payer ? Il fait établir un impôt dont il écrasa son peuple, et le fit exécuter avec la dernière cruauté. Le Seigneur lui envoya un prophète pour le reprendre ; mais non, un aveugle, rien ne peut le tou-cher ; il méprise les réprimandes du prophète ; même il le menace de mort, se baignant pour ainsi dire dans le vice de son orgueil. Voyant que le prophète le reprenait, il lui dit : « Vous ne cessez de m'importuner ; eh bien ! j'abandonnerai le vrai Dieu et j'adorerai les idoles. » En effet il le fit. Se voyant à la tête d'une superbe armée, bien équipée, il croit que rien n'est capable de lui résister. Il va attaquer le roi d'Israël : il veut se rendre maître de ses États et faire mourir le roi ; mais, hélas ! son armée fut taillée en pièces et lui-même fut pris et conduit en captivité, ce qui dura quinze ans ; enfin ses propres domestiques l'égorgèrent . Voilà, M.F., précisément l'image d'un pécheur endurci, dont l'endur-cissement consiste dans un certain enchaînement de crimes et dans une suite continuelle de mauvaises actions, et dans un certain flux et reflux d'impiété ; il ne cesse de pécher qu'en cessant de vivre ; il n'y a que la mort qui lui fasse ouvrir les yeux sur son état.
En cinquième lieu, ce qui rend cet endurcissement si terrible, c'est l'abandon de Dieu qui se retire du pécheur et qui finit par le livrer entre les mains de ses passions. Une fois arrivé à ce degré d'aveuglement, hélas ! rien ne le touche et rien n'est capable de lui faire connaître l'état malheureux où le péché le conduit ; il méprise tout ce qui est capable de le rappeler à Dieu ; il rejette la grâce autant de fois qu'elle vient. Cependant il sait qu'il est dans le péché, il sait qu'il n'a point fait de pâques, il sait qu'il a caché ses péchés en confession, il sait qu'il possède le bien de son prochain, il sait que s'il meurt dans cet état il sera perdu. Il entend le ministre du Seigneur qui lui montre au doigt l'état épouvantable de son âme et ne cesse de le lui représenter. Oui, il sait tout cela ; mais il ne l'entend que pour railler et mépriser même celui qui voudrait lui tendre la main ; il ne recevra les grâces du salut que pour les fouler sous ses pieds. Écoutez parler cet aveugle, cet endurci : « Tout ce que les prêtres disent n'est que des mensonges ; c'est leur métier. » Si dans une instruction il y a quelque chose qui les regarde ou qui les touche un peu de près, il n'y a sortes d'abominations qu'ils ne vomissent contre le prêtre. Vous les voyez sortir et faire tout ce qu'ils peuvent pour en entraîner d'autres dans leur répro-bation. Ils ont une telle fureur contre Dieu et sa religion, qu'ils affecteront de faire le mal devant les gens de bien, c'est-à-dire de débiter des impiétés contre la religion, contre ses ministres, de travailler les saints jours du dimanche et de faire gras les jours défendus. Dites-moi, M.F., auriez-vous pu vous former une idée qu'une personne fût capable d'arriver à cet état d'aveu-glement et d'endurcissement ? Ce qui met le comble à leur malheur, c'est qu'ils sont peut-être tranquilles, et peut-être le seront-ils jusqu'au moment où ils tomberont entre les mains de leur ennemi éternel. Nous en avons un bel exemple dans l'Écriture sainte, où nous lisons que le roi de Syrie, ayant conçu le dessein d'assiéger une ville de la Judée , fit mettre ses soldats en embuscade. Le prophète Élisée, à qui le Seigneur le fit savoir, se mit en prières en demandant au bon Dieu d'aveugler tous ceux qui venaient le chercher. Après avoir fait sa prière, il va trouver ces gens et leur dit : « Vous vous trompez : suivez-moi, vous n'avez pas pris la route qu'il fallait prendre, ce n'est pas ici la ville que vous aviez dessein d'assiéger. Venez et suivez-moi, et je vous conduirai où il faut que vous alliez. Le prophète se mit à leur tête et les mena droit à Samarie, et après les avoir mis entre les mains de leurs ennemis qui avaient résolu de les perdre, il s'en alla . Image terrible de ce qui se passe ordinairement à la mort de ce pécheur endurci : s'il est assisté d'un prêtre, ce n'est souvent que pour son malheur. Le prêtre le console, en lui fai-sant envisager la grandeur de la miséricorde de Dieu ; les assistants se consolent en voyant les faveurs qui lui sont prodiguées dans ce terrible moment ; mais le prêtre ne fait que l'endormir dans une fausse paix, et les sacrements ne font pas autre chose que de l'aveugler davantage. Il reçoit le prêtre avec une hospitalité extraor-dinaire ; et les démons n'attendent que le moment où la mort le frappe pour le traîner en enfer. Il a tout méprisé, il s'est moqué de tout, le voilà réduit, sous la rigueur de la justice de celui contre qui il a tant vomi d'impiétés. Mon Dieu, que l'état de ce pauvre malheureux est digne de nos prières et de nos larmes !
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
II. – Mais peut-être que cela vous a peu touchés, M.F. ; voyons et considérons le péché sous un autre rapport. Je veux dire les maux qu'il entraîne avec lui.
Je dis donc 1° que le péché est la source de toutes les misères temporelles que nous éprouvons pendant notre vie. Le Saint-Esprit nous assure que le péché nous rend malheureux, même dès ce monde ; la pauvreté, les maladies, les afflictions, les autres maux et surtout la mort, c'est le péché qui en est la cause. Le Saint-Esprit nous dit dans plusieurs endroits de l'Écriture sainte, que si vous gardez mes commandements, je ferai que tout réussira chez vous, vos terres produiront des grains en abondance et vos arbres seront chargés de fruits ; mais si vous m'offensez je vous accablerai de toutes sortes de maux ; tout périra chez vous . Cela est facile à comprendre, que tous nos maux spirituels et tem-porels nous soient donnés en punitions de nos péchés. Qu'est-ce qui a été cause que les anges sont tombés du ciel dans les enfers ? Qu'est-ce qui a chassé Adam du paradis terrestre, et qui lui attira tant de malheurs et à tous ses descendants ? Rien autre que le péché . Qui força le Seigneur à faire périr tout l'univers par un déluge universel, sinon les crimes des hommes qui étaient sur la terre ? Qui a été la cause de l’embrasement de Sodome, de Gomorrhe et de tant d'autres villes, sinon le péché ? Ah ! maudit péché, qui te pourrait connaître et te commettre ? Le prophète Nathan dit à David : « Puisque vous avez commis un adultère et fait mourir le mari de cette femme, les fléaux de Dieu ne sortiront point de votre maison ». Le Saint--Esprit nous dit que la misère et la pauvreté viendront de la part de Dieu dans la maison du pécheur et que les maisons des gens de bien seront bénies . Oui, M.F., nous devrions éviter le péché, quand ce ne serait que pour n'être pas malheureux pendant notre vie.
En deuxième lieu, je dis que le péché abrège même la vie de celui qui le commet, puisque le Saint-Esprit nous assure que les années du pécheur seront abrégées. Le Seigneur nous dit par la bouche du prophète Isaïe que la vie d'un pécheur est coupée comme le fil du tisserand, lequel ne pouvant le débrouiller, le coupe. Le bon Dieu souffre longtemps un pécheur ; mais voyant qu'il ne veut pas se convertir, il l'ôte de ce monde. Le roi Ezéchias étant malade, le prophète Isaïe lui dit de mettre ordre à ses affaires, parce qu'il allait mourir dans peu de temps. Ce roi se tourna du côté de la muraille, et se mit à pleurer ses péchés : « Quoi, se disait-il, faut--il que mes péchés soient cause que je meure au milieu de mes années ? » Le Seigneur, touché de sa pénitence, prolongea sa vie encore de quinze ans . Mais le roi Sédécias n'en fit pas de même ; ses crimes furent la cause qu'il fut fait prisonnier avec tous ses enfants ; on lui creva les yeux et il mourut misérablement . Le roi Antiochus reconnut bien que ses péchés étaient la cause qu'il mourait avant le temps. Il s'écria : « Ah ! que je me souviens bien que les maux que j'ai faits à Jérusalem font que je meurs ! » Et sa mort fut si cruelle que les vers le rongeaient tout vivant . L'histoire nous apprend que l'empereur Anastase étant tombé malade la nuit, il vit dans sa chambre un homme horrible tenant un livre où tous ses péchés étaient écrits, et cet homme lui dit : « Ta vie est abrégée de 40 ans, à cause de tes péchés. » Hélas ! M.F., tout ceci, il est vrai, est bien effrayant, surtout pour une personne qui aime la vie ; mais, un peu plus tôt ou plus tard, il faut toujours mourir ; et désirer de vivre plus longtemps, c'est désirer de prolonger ses misères et de multiplier ses fautes.
Mais je dis en troisième lieu, que les maux que le péché fait à notre pauvre âme sont bien plus déplo-rables. Ecartez de lui la mort, notre corps vit, c'est le bien le plus précieux de l'homme en ce monde ; un corps sans âme n'est capable de jouir d'aucun bien ni de rien faire, ce n'est plus qu'un cadavre puant. De même, M.F., le péché qui ôte la vie à notre âme la rend incapable de faire le moindre bien qui soit récompensé pour le ciel. Hélas ! M.F., une âme privée de la grâce de Dieu est comme un corps privé de son âme, ce n'est plus qu'un cadavre qui fait horreur à Dieu, aux anges mêmes. Non, M.F., rien de si beau qu'une âme dans la grâce ; mais rien de si horrible qu'une âme dans le péché. Nous lisons, dans la vie de sainte Catherine de Sienne, que le bon Dieu lui ayant fait voir en esprit une âme dans la grâce, elle en fut si charmée et si ravie, qu'elle s'écria : « Ah ! Seigneur, si la foi ne m'apprenait pas qu'il n'y a qu'une divinité, je croirais que c'est un Dieu. Ah ! non, mon Dieu, je ne m'étonne plus de ce que vous êtes mort pour une si belle âme. » Mais, hélas, M.F., dès qu'une âme vient à tomber dans le péché, ô Dieu, cette beauté, cette âme, plus blanche que la neige, qui était semblable aux anges, est devenue semblable aux démons. Elle nous dit qu'une âme dans le péché est aussi horrible aux yeux de Dieu, qu'une charogne traînée pendant huit jours à la rigueur du soleil l'est aux yeux du monde. Ah ! pauvre âme, qu'es-tu devenue ? Nous voyons que la mort dépouille un homme de tous ses biens, de même quand une âme a le malheur de tomber dans le péché, elle perd le mérite de tout le bien qu'elle a pu faire pendant toute sa vie, quand elle seule serait aussi riche que tous les anges et les saints ensemble ; si elle tombe dans un péché mortel, tout est perdu pour elle, plus que l'enfer pour elle ! Ah ! maudit péché, que les ravages que tu fais dans une âme sont terribles ! Hélas ! M.F., que de chrétiens qui m'écoutent sont morts de cette manière, et qui n'y pensent pas ! Ah ! plût à Dieu que l'on eût autant de crainte de la mort de l'âme que de celle du corps
Mais je vais plus loin, en disant que le péché mortel nous prive de la paix de l'âme. Le Saint-Esprit nous dit que celui qui a son âme en paix est en un festin conti-nuel . Et saint Paul nous dit que la paix d'une âme qui est bien avec le bon Dieu surpasse tous les plaisirs que l'on peut goûter par ses sens . Mais au contraire, le pro-phète Isaïe nous dit que le cœur d'un pécheur souffre des douleurs inconcevables . Saint Paul, écrivant aux Romains, leur dit que les tribulations accableront les pécheurs tous les jours de leur vie . Ah ! mon ami, pourquoi rester dans le péché, puisque vous y êtes si malheureux ?
Je dis donc 1° que le péché est la source de toutes les misères temporelles que nous éprouvons pendant notre vie. Le Saint-Esprit nous assure que le péché nous rend malheureux, même dès ce monde ; la pauvreté, les maladies, les afflictions, les autres maux et surtout la mort, c'est le péché qui en est la cause. Le Saint-Esprit nous dit dans plusieurs endroits de l'Écriture sainte, que si vous gardez mes commandements, je ferai que tout réussira chez vous, vos terres produiront des grains en abondance et vos arbres seront chargés de fruits ; mais si vous m'offensez je vous accablerai de toutes sortes de maux ; tout périra chez vous . Cela est facile à comprendre, que tous nos maux spirituels et tem-porels nous soient donnés en punitions de nos péchés. Qu'est-ce qui a été cause que les anges sont tombés du ciel dans les enfers ? Qu'est-ce qui a chassé Adam du paradis terrestre, et qui lui attira tant de malheurs et à tous ses descendants ? Rien autre que le péché . Qui força le Seigneur à faire périr tout l'univers par un déluge universel, sinon les crimes des hommes qui étaient sur la terre ? Qui a été la cause de l’embrasement de Sodome, de Gomorrhe et de tant d'autres villes, sinon le péché ? Ah ! maudit péché, qui te pourrait connaître et te commettre ? Le prophète Nathan dit à David : « Puisque vous avez commis un adultère et fait mourir le mari de cette femme, les fléaux de Dieu ne sortiront point de votre maison ». Le Saint--Esprit nous dit que la misère et la pauvreté viendront de la part de Dieu dans la maison du pécheur et que les maisons des gens de bien seront bénies . Oui, M.F., nous devrions éviter le péché, quand ce ne serait que pour n'être pas malheureux pendant notre vie.
En deuxième lieu, je dis que le péché abrège même la vie de celui qui le commet, puisque le Saint-Esprit nous assure que les années du pécheur seront abrégées. Le Seigneur nous dit par la bouche du prophète Isaïe que la vie d'un pécheur est coupée comme le fil du tisserand, lequel ne pouvant le débrouiller, le coupe. Le bon Dieu souffre longtemps un pécheur ; mais voyant qu'il ne veut pas se convertir, il l'ôte de ce monde. Le roi Ezéchias étant malade, le prophète Isaïe lui dit de mettre ordre à ses affaires, parce qu'il allait mourir dans peu de temps. Ce roi se tourna du côté de la muraille, et se mit à pleurer ses péchés : « Quoi, se disait-il, faut--il que mes péchés soient cause que je meure au milieu de mes années ? » Le Seigneur, touché de sa pénitence, prolongea sa vie encore de quinze ans . Mais le roi Sédécias n'en fit pas de même ; ses crimes furent la cause qu'il fut fait prisonnier avec tous ses enfants ; on lui creva les yeux et il mourut misérablement . Le roi Antiochus reconnut bien que ses péchés étaient la cause qu'il mourait avant le temps. Il s'écria : « Ah ! que je me souviens bien que les maux que j'ai faits à Jérusalem font que je meurs ! » Et sa mort fut si cruelle que les vers le rongeaient tout vivant . L'histoire nous apprend que l'empereur Anastase étant tombé malade la nuit, il vit dans sa chambre un homme horrible tenant un livre où tous ses péchés étaient écrits, et cet homme lui dit : « Ta vie est abrégée de 40 ans, à cause de tes péchés. » Hélas ! M.F., tout ceci, il est vrai, est bien effrayant, surtout pour une personne qui aime la vie ; mais, un peu plus tôt ou plus tard, il faut toujours mourir ; et désirer de vivre plus longtemps, c'est désirer de prolonger ses misères et de multiplier ses fautes.
Mais je dis en troisième lieu, que les maux que le péché fait à notre pauvre âme sont bien plus déplo-rables. Ecartez de lui la mort, notre corps vit, c'est le bien le plus précieux de l'homme en ce monde ; un corps sans âme n'est capable de jouir d'aucun bien ni de rien faire, ce n'est plus qu'un cadavre puant. De même, M.F., le péché qui ôte la vie à notre âme la rend incapable de faire le moindre bien qui soit récompensé pour le ciel. Hélas ! M.F., une âme privée de la grâce de Dieu est comme un corps privé de son âme, ce n'est plus qu'un cadavre qui fait horreur à Dieu, aux anges mêmes. Non, M.F., rien de si beau qu'une âme dans la grâce ; mais rien de si horrible qu'une âme dans le péché. Nous lisons, dans la vie de sainte Catherine de Sienne, que le bon Dieu lui ayant fait voir en esprit une âme dans la grâce, elle en fut si charmée et si ravie, qu'elle s'écria : « Ah ! Seigneur, si la foi ne m'apprenait pas qu'il n'y a qu'une divinité, je croirais que c'est un Dieu. Ah ! non, mon Dieu, je ne m'étonne plus de ce que vous êtes mort pour une si belle âme. » Mais, hélas, M.F., dès qu'une âme vient à tomber dans le péché, ô Dieu, cette beauté, cette âme, plus blanche que la neige, qui était semblable aux anges, est devenue semblable aux démons. Elle nous dit qu'une âme dans le péché est aussi horrible aux yeux de Dieu, qu'une charogne traînée pendant huit jours à la rigueur du soleil l'est aux yeux du monde. Ah ! pauvre âme, qu'es-tu devenue ? Nous voyons que la mort dépouille un homme de tous ses biens, de même quand une âme a le malheur de tomber dans le péché, elle perd le mérite de tout le bien qu'elle a pu faire pendant toute sa vie, quand elle seule serait aussi riche que tous les anges et les saints ensemble ; si elle tombe dans un péché mortel, tout est perdu pour elle, plus que l'enfer pour elle ! Ah ! maudit péché, que les ravages que tu fais dans une âme sont terribles ! Hélas ! M.F., que de chrétiens qui m'écoutent sont morts de cette manière, et qui n'y pensent pas ! Ah ! plût à Dieu que l'on eût autant de crainte de la mort de l'âme que de celle du corps
Mais je vais plus loin, en disant que le péché mortel nous prive de la paix de l'âme. Le Saint-Esprit nous dit que celui qui a son âme en paix est en un festin conti-nuel . Et saint Paul nous dit que la paix d'une âme qui est bien avec le bon Dieu surpasse tous les plaisirs que l'on peut goûter par ses sens . Mais au contraire, le pro-phète Isaïe nous dit que le cœur d'un pécheur souffre des douleurs inconcevables . Saint Paul, écrivant aux Romains, leur dit que les tribulations accableront les pécheurs tous les jours de leur vie . Ah ! mon ami, pourquoi rester dans le péché, puisque vous y êtes si malheureux ?
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Mais je vais encore plus loin, en vous disant que le péché mortel vend notre âme au démon et la rend son esclave. Oui, M.F., une personne qui est dans la grâce de Dieu, est un enfant de Dieu ; mais dès qu'elle tombe dans le péché, elle devient un enfant du démon et un esclave de Satan. Saint Jean nous assure que celui qui commet le péché est un démon, parce que, nous dit-il, il n'y a que le démon qui ait péché dès le commence-ment . Saint Augustin nous dit que celui qui commet un péché mortel vend son âme au démon. Cela est si vrai que, si l'on vient à mourir dans ce péché, le démon aura notre âme pendant toute l'éternité. Ah ! pauvre âme, que l'on te vend pour bien peu de chose ; puisque un ivrogne te vend pour un verre de vin, un avare pour une poignée de foin, un gourmand pour un bon repas et un impudique pour un plaisir infâme ! Ah ! pauvre âme, que l'on t'estime peu de chose !
Si nous allons plus loin, nous voyons que le péché mortel nous rend ennemis de Dieu et nous ferme la porte du ciel. Oui, M.F., une âme qui a le bonheur d'être dans la grâce est dans l'amitié de Dieu et elle porte avec elle le gage du bonheur des saints. Mais, dès que nous com-mettons le péché mortel, nous perdons la grâce et l'ami-tié de Dieu et le gage de la vie éternelle. O mon Dieu, quel malheur d'être votre ennemi, vous qui êtes si bon, si aimable et seul capable de faire notre bonheur ! Ah ! M.F., si nous connaissions ce que c'est que de perdre le bon Dieu, nous aimerions mieux perdre tout plutôt que de tomber dans ce malheur. Voyez les trois enfants, ils aimèrent mieux être jetés dans une fournaise ardente . Oui, M.F., tous les martyrs ont mieux aimé souffrir toutes sortes de tourments que de perdre l'amitié de leur Dieu. Voyez, M.F., ce qu'ont souffert les martyrs pour ne pas perdre l'amitié du Sauveur. Aux uns, l'on mettait sur leur tête des coins que l'on avait fait rougir au feu, comme on fit à saint Clément, évêque d'Ancyre, à saint Sabinien et à saint Christophe ; à d'autres, on leur arrachait les dents, on les leur cassait à coup de pierre, comme on fit à sainte Apollonie, à saint Janvier . Que vous dirai-je encore ? on les écorchait tout en vie, comme on fit à un saint Barthélemy, à une sainte Reine ; voyez un saint Venant qui aima mieux se laisser arracher les entrailles, et brûler avec des torches ardentes, que de perdre la grâce du bon Dieu par le péché. Disons mieux, M.F., il n'y a sortes de tourments qu'ils n'étaient prêts à endu-rer pour ne pas pécher. O mon Dieu, qu'ils connaissaient donc bien mieux que nous la grandeur du malheur de celui qui perd la grâce par le péché. Hélas ! M.F., quel malheur pour nous, puisqu'en péchant nous renonçons à notre place dans le ciel et nous nous en marquons une en enfer. O beau ciel, ne te voir jamais ! Y a-t-il un malheur comparable à celui-là ? Que penseriez-vous, M.F., d'une personne qui dirait au bon Dieu : Je ne veux point du ciel, je choisis l'enfer pour mon partage, je renonce à la compagnie des anges et des saints ; j'aime mieux contenter ma passion et aller en enfer avec les démons pour y brûler pendant toute l'éternité. J'aime mieux aller dans ces feux éternels que de me priver de ces plaisirs, que de renoncer à ma volonté, que de par-donner à mon ennemi et que de rendre ce bien. – Mais, me direz-vous, je ne dis pas cela. – Mon ami, je vous réponds que votre péché le dit. Oui, cet impudique dit dans son langage : j'aime mieux prendre mon plaisir charnel et aller en enfer, que de m'en priver pour aller au ciel. Un avare dit : j'aime mieux jouir des biens de ce monde, que d'aller en paradis. Un ivrogne dit : j'aime mieux contenter mon ventre et aller en enfer souffrir une faim et une soif enragées, que d'aller en paradis.
Comprenez, M.F., si vous le pouvez, quel est l'aveugle-ment du pécheur de préférer un plaisir d'une bête à des joies éternelles ; de préférer un peu de bien à un royaume éternel, une gourmandise au rassasiement qu'éprouvent les bienheureux dans cette belle cité. O mon Dieu, que nous sommes aveugles lorsque nous péchons !
Si nous allons plus loin, nous voyons que le péché est le plus grand mal qui puisse jamais nous arriver dans ce monde. Sainte Thérèse nous dit que le bon Dieu lui ayant fait voir une âme en état de péché mortel, elle en fut si effrayée qu'elle souffrirait plutôt tout ce que jamais l'enfer pourrait inventer de tourments que d'en commettre un seul. Saint Thomas s'étonnait qu'une per-sonne qui avait commis un péché pût rire une fois dans sa vie. Sainte Catherine de Sienne, à qui le bon Dieu avait fait voir une partie de la malice du péché mortel, nous dit que Dieu, tout Dieu qu'il est, ne pourra jamais tant faire de mal à une âme qu'elle s'en fait elle-même par le péché. Sainte Catherine de Gênes s'écriait : « Ah ! plût à Dieu que je pusse vous faire comprendre ce que le bon Dieu m'a fait connaître de la malice du péché ! Non, non, s'écriait-elle, je ne m'étonne plus des peines de l'enfer, elles me semblent plus douces et plus tolé-rables que le péché. O mon Dieu, j'aimerais mieux être abîmée en enfer que de vous voir offensé. Saint Anselme nous dit qu'il aimerait mieux passer toute son éternité dans les enfers que de commettre un seul péché mortel Sainte Madeleine de Pazzi nous dit qu'elle n'a jamais pu concevoir que l'on puisse offenser un Dieu si faci-lement, et que Jésus-Christ soit mort pour racheter de si chétives créatures. Nous lisons dans l'histoire qu'une religieuse carmélite, n'étant âgée que de quatre ans, une autre religieuse lui dit : « Ah ! pauvre enfant, que tu serais heureuse de mourir à présent, n'ayant pas encore offensé le bon Dieu ! » Ces paroles la pénétrèrent si fort qu'elle leva les yeux au ciel, elle le vit ouvert, et Notre--Seigneur, dans une grande majesté, qui lui fit connaître qu'elle aurait une grande ; récompense si elle avait le bonheur de ne jamais l'offenser. Cela lui donna une si grande horreur du péché, qu'elle pleura toute sa vie. On lui demanda un jour pourquoi elle pleurait, elle ré-pondit : « Hélas ! j'appréhende d'offenser le bon Dieu. »
Oui, M.F., tous les saints n'ont rien craint en ce monde que le péché. Ah ! si Dieu, M.F., nous faisait voir combien le péché lui déplait et les maux qui le suivent, nous choisirions mille fois la mort plutôt que d'en commettre un seul. Voulez-vous, M.F., vous don-ner une nouvelle horreur du péché ? Rappelez-vous que c'est le péché qui est la cause de la mort de Jésus--Christ. Considérons tous ensemble, M.F., Jésus-Christ mourant en croix, le corps tout déchiré de coups de fouet, le visage tout meurtri et couvert de sales cra-chats, la tête toute percée et couronnée d'épines, ce pauvre corps tout en lambeaux, qui ne ressemble plus qu'à un monceau de chair découpé. Rappelez-vous, M.F., que cette mort jeta la confusion et la consternation dans tout le monde : le soleil se couvre de ténèbres, la terre tremble et semble frémir, les rochers se brisent, les tombeaux s'ouvrent et les morts se promènent par les rues de Jérusalem. Si cela vous étonne, M.F., demandez à Jésus-Christ lui-même pourquoi il souffre une mort si ignominieuse et si cruelle : « Ah ! mon fils, vous répon-dra-t-il, c'est le péché qui en est la cause, c'est pour satisfaire pour les péchés des hommes, c'est pour dé-truire ce maudit péché... Non, non, mon fils, nous dit ce tendre Sauveur, quand toutes les créatures du ciel et de la terre se seraient réunies ensemble et qu'elles auraient donné leur vie, enduré ce que jamais les bourreaux, guidés par l'enfer, auraient inventé, elles n'auraient pas été capables de satisfaire pour un seul péché véniel. Voilà, mon fils, nous dit Jésus-Christ, pourquoi j'ai tant souffert. Ah ! si du moins l'on cessait de me faire souffrir ! » O mon Dieu, que l'homme est in-grat de n'être pas encore content de tout ce que Jésus--Christ a souffert pour nous ! Mais, ô éternité, que tu seras longue pour venger l'outrage que le péché a fait à un Dieu si bon, si patient et si charitable !
Finissons, M.F. : ce langage fait frémir. Jusqu'à quand, M.F., vivrons-nous en aveugles ? jusqu'à quand tien-drons-nous notre Dieu sur la croix ? Non, M.F., n'atten-dons pas la mort où tous nos efforts, nos larmes et notre repentir ne nous serviront de rien. Ouvrons les yeux, M.F., reconnaissons nos égarements, pleurons nos crimes commis, livrons-nous à la pénitence, profi-tons de tout ce que le bon Dieu a mis à notre dispo-sition ; venons pleurer nos péchés passés et cessons de pécher ; perdons tout plutôt que de recommettre le moindre péché et ne cessons de pleurer tant que Dieu ne nous dira pas que c'est assez. Allons, M.F., au pied de la croix pour y mêler au moins nos larmes avec le sang adorable de Jésus-Christ : écoutons un instant les réprouvés qui pleurent, qui crient, qui hurlent et qui demandent miséricorde sans pouvoir l'obtenir. Mais pour nous, nous le pouvons encore, il nous appelle, ce tendre Sauveur, il vient au-devant de nous pour nous dire qu'il nous aime. Ah ! M.F., ne perdons jamais de vue ce qu'est le péché, les maux qu'il nous prépare pour l'autre vie, les biens qu'il nous fait perdre pour l'éter-nité. Nous voulons tous le ciel ; mais jamais le péché ne pourra entrer dans le séjour de délices. Oui, M.F., tout nous invite à quitter le péché ; le Fils de Dieu du haut de sa croix nous conjure de ne pas faire que les mérites de sa mort soient perdus pour nous ; les anges et les saints nous crient du haut du ciel combien est grand le bonheur qui nous est préparé, si nous évitons le péché. Les réprouvés, eux, nous disent d'être sages à leurs dépens, de ne pas les imiter, de ne pas venir dans ces lieux où les ont renfermés toute la puissance et la colère d'un Dieu . Ah ! M.F., encore un instant, et nous ne serons plus de ce monde, encore quelques mi-nutes et nous serons du nombre ou des saints ou des réprouvés. Tenons-nous bien sur nos gardes, M.F., puisque le moment de notre départ nous est inconnu. Heureux et mille fois heureux qui tiendra son âme tou-jours prête à paraître devant son Dieu. C'est tout le bonheur que je vous souhaite.
Si nous allons plus loin, nous voyons que le péché mortel nous rend ennemis de Dieu et nous ferme la porte du ciel. Oui, M.F., une âme qui a le bonheur d'être dans la grâce est dans l'amitié de Dieu et elle porte avec elle le gage du bonheur des saints. Mais, dès que nous com-mettons le péché mortel, nous perdons la grâce et l'ami-tié de Dieu et le gage de la vie éternelle. O mon Dieu, quel malheur d'être votre ennemi, vous qui êtes si bon, si aimable et seul capable de faire notre bonheur ! Ah ! M.F., si nous connaissions ce que c'est que de perdre le bon Dieu, nous aimerions mieux perdre tout plutôt que de tomber dans ce malheur. Voyez les trois enfants, ils aimèrent mieux être jetés dans une fournaise ardente . Oui, M.F., tous les martyrs ont mieux aimé souffrir toutes sortes de tourments que de perdre l'amitié de leur Dieu. Voyez, M.F., ce qu'ont souffert les martyrs pour ne pas perdre l'amitié du Sauveur. Aux uns, l'on mettait sur leur tête des coins que l'on avait fait rougir au feu, comme on fit à saint Clément, évêque d'Ancyre, à saint Sabinien et à saint Christophe ; à d'autres, on leur arrachait les dents, on les leur cassait à coup de pierre, comme on fit à sainte Apollonie, à saint Janvier . Que vous dirai-je encore ? on les écorchait tout en vie, comme on fit à un saint Barthélemy, à une sainte Reine ; voyez un saint Venant qui aima mieux se laisser arracher les entrailles, et brûler avec des torches ardentes, que de perdre la grâce du bon Dieu par le péché. Disons mieux, M.F., il n'y a sortes de tourments qu'ils n'étaient prêts à endu-rer pour ne pas pécher. O mon Dieu, qu'ils connaissaient donc bien mieux que nous la grandeur du malheur de celui qui perd la grâce par le péché. Hélas ! M.F., quel malheur pour nous, puisqu'en péchant nous renonçons à notre place dans le ciel et nous nous en marquons une en enfer. O beau ciel, ne te voir jamais ! Y a-t-il un malheur comparable à celui-là ? Que penseriez-vous, M.F., d'une personne qui dirait au bon Dieu : Je ne veux point du ciel, je choisis l'enfer pour mon partage, je renonce à la compagnie des anges et des saints ; j'aime mieux contenter ma passion et aller en enfer avec les démons pour y brûler pendant toute l'éternité. J'aime mieux aller dans ces feux éternels que de me priver de ces plaisirs, que de renoncer à ma volonté, que de par-donner à mon ennemi et que de rendre ce bien. – Mais, me direz-vous, je ne dis pas cela. – Mon ami, je vous réponds que votre péché le dit. Oui, cet impudique dit dans son langage : j'aime mieux prendre mon plaisir charnel et aller en enfer, que de m'en priver pour aller au ciel. Un avare dit : j'aime mieux jouir des biens de ce monde, que d'aller en paradis. Un ivrogne dit : j'aime mieux contenter mon ventre et aller en enfer souffrir une faim et une soif enragées, que d'aller en paradis.
Comprenez, M.F., si vous le pouvez, quel est l'aveugle-ment du pécheur de préférer un plaisir d'une bête à des joies éternelles ; de préférer un peu de bien à un royaume éternel, une gourmandise au rassasiement qu'éprouvent les bienheureux dans cette belle cité. O mon Dieu, que nous sommes aveugles lorsque nous péchons !
Si nous allons plus loin, nous voyons que le péché est le plus grand mal qui puisse jamais nous arriver dans ce monde. Sainte Thérèse nous dit que le bon Dieu lui ayant fait voir une âme en état de péché mortel, elle en fut si effrayée qu'elle souffrirait plutôt tout ce que jamais l'enfer pourrait inventer de tourments que d'en commettre un seul. Saint Thomas s'étonnait qu'une per-sonne qui avait commis un péché pût rire une fois dans sa vie. Sainte Catherine de Sienne, à qui le bon Dieu avait fait voir une partie de la malice du péché mortel, nous dit que Dieu, tout Dieu qu'il est, ne pourra jamais tant faire de mal à une âme qu'elle s'en fait elle-même par le péché. Sainte Catherine de Gênes s'écriait : « Ah ! plût à Dieu que je pusse vous faire comprendre ce que le bon Dieu m'a fait connaître de la malice du péché ! Non, non, s'écriait-elle, je ne m'étonne plus des peines de l'enfer, elles me semblent plus douces et plus tolé-rables que le péché. O mon Dieu, j'aimerais mieux être abîmée en enfer que de vous voir offensé. Saint Anselme nous dit qu'il aimerait mieux passer toute son éternité dans les enfers que de commettre un seul péché mortel Sainte Madeleine de Pazzi nous dit qu'elle n'a jamais pu concevoir que l'on puisse offenser un Dieu si faci-lement, et que Jésus-Christ soit mort pour racheter de si chétives créatures. Nous lisons dans l'histoire qu'une religieuse carmélite, n'étant âgée que de quatre ans, une autre religieuse lui dit : « Ah ! pauvre enfant, que tu serais heureuse de mourir à présent, n'ayant pas encore offensé le bon Dieu ! » Ces paroles la pénétrèrent si fort qu'elle leva les yeux au ciel, elle le vit ouvert, et Notre--Seigneur, dans une grande majesté, qui lui fit connaître qu'elle aurait une grande ; récompense si elle avait le bonheur de ne jamais l'offenser. Cela lui donna une si grande horreur du péché, qu'elle pleura toute sa vie. On lui demanda un jour pourquoi elle pleurait, elle ré-pondit : « Hélas ! j'appréhende d'offenser le bon Dieu. »
Oui, M.F., tous les saints n'ont rien craint en ce monde que le péché. Ah ! si Dieu, M.F., nous faisait voir combien le péché lui déplait et les maux qui le suivent, nous choisirions mille fois la mort plutôt que d'en commettre un seul. Voulez-vous, M.F., vous don-ner une nouvelle horreur du péché ? Rappelez-vous que c'est le péché qui est la cause de la mort de Jésus--Christ. Considérons tous ensemble, M.F., Jésus-Christ mourant en croix, le corps tout déchiré de coups de fouet, le visage tout meurtri et couvert de sales cra-chats, la tête toute percée et couronnée d'épines, ce pauvre corps tout en lambeaux, qui ne ressemble plus qu'à un monceau de chair découpé. Rappelez-vous, M.F., que cette mort jeta la confusion et la consternation dans tout le monde : le soleil se couvre de ténèbres, la terre tremble et semble frémir, les rochers se brisent, les tombeaux s'ouvrent et les morts se promènent par les rues de Jérusalem. Si cela vous étonne, M.F., demandez à Jésus-Christ lui-même pourquoi il souffre une mort si ignominieuse et si cruelle : « Ah ! mon fils, vous répon-dra-t-il, c'est le péché qui en est la cause, c'est pour satisfaire pour les péchés des hommes, c'est pour dé-truire ce maudit péché... Non, non, mon fils, nous dit ce tendre Sauveur, quand toutes les créatures du ciel et de la terre se seraient réunies ensemble et qu'elles auraient donné leur vie, enduré ce que jamais les bourreaux, guidés par l'enfer, auraient inventé, elles n'auraient pas été capables de satisfaire pour un seul péché véniel. Voilà, mon fils, nous dit Jésus-Christ, pourquoi j'ai tant souffert. Ah ! si du moins l'on cessait de me faire souffrir ! » O mon Dieu, que l'homme est in-grat de n'être pas encore content de tout ce que Jésus--Christ a souffert pour nous ! Mais, ô éternité, que tu seras longue pour venger l'outrage que le péché a fait à un Dieu si bon, si patient et si charitable !
Finissons, M.F. : ce langage fait frémir. Jusqu'à quand, M.F., vivrons-nous en aveugles ? jusqu'à quand tien-drons-nous notre Dieu sur la croix ? Non, M.F., n'atten-dons pas la mort où tous nos efforts, nos larmes et notre repentir ne nous serviront de rien. Ouvrons les yeux, M.F., reconnaissons nos égarements, pleurons nos crimes commis, livrons-nous à la pénitence, profi-tons de tout ce que le bon Dieu a mis à notre dispo-sition ; venons pleurer nos péchés passés et cessons de pécher ; perdons tout plutôt que de recommettre le moindre péché et ne cessons de pleurer tant que Dieu ne nous dira pas que c'est assez. Allons, M.F., au pied de la croix pour y mêler au moins nos larmes avec le sang adorable de Jésus-Christ : écoutons un instant les réprouvés qui pleurent, qui crient, qui hurlent et qui demandent miséricorde sans pouvoir l'obtenir. Mais pour nous, nous le pouvons encore, il nous appelle, ce tendre Sauveur, il vient au-devant de nous pour nous dire qu'il nous aime. Ah ! M.F., ne perdons jamais de vue ce qu'est le péché, les maux qu'il nous prépare pour l'autre vie, les biens qu'il nous fait perdre pour l'éter-nité. Nous voulons tous le ciel ; mais jamais le péché ne pourra entrer dans le séjour de délices. Oui, M.F., tout nous invite à quitter le péché ; le Fils de Dieu du haut de sa croix nous conjure de ne pas faire que les mérites de sa mort soient perdus pour nous ; les anges et les saints nous crient du haut du ciel combien est grand le bonheur qui nous est préparé, si nous évitons le péché. Les réprouvés, eux, nous disent d'être sages à leurs dépens, de ne pas les imiter, de ne pas venir dans ces lieux où les ont renfermés toute la puissance et la colère d'un Dieu . Ah ! M.F., encore un instant, et nous ne serons plus de ce monde, encore quelques mi-nutes et nous serons du nombre ou des saints ou des réprouvés. Tenons-nous bien sur nos gardes, M.F., puisque le moment de notre départ nous est inconnu. Heureux et mille fois heureux qui tiendra son âme tou-jours prête à paraître devant son Dieu. C'est tout le bonheur que je vous souhaite.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
SERMON
SUR LA COMMUNION INDIGNE
Anima quæ peccaverit, ipsa morietur.
L'âme qui péchera, mourra.
(Ez. XVIII, 6.)
Si tout péché mortel, M.F., donne la mort à notre âme, la sépare de Dieu pour jamais, la précipite dans toutes sortes de malheurs, dans quel état doit donc réduire le plus affreux de tous les crimes, qui est le sacrilège ? O mon Dieu, quel est celui qui pourra jamais se former une idée de l'état épouvantable d'une âme couverte de sacrilèges ? Oui, nous dit Jésus-Christ, lorsque vous verrez l'abomination de la désolation dans le lieu saint, prédite par le prophète Daniel, comprenez-le bien . Hélas ! M.F., s'étant choisi le cœur de l'homme pour en faire sa demeure et son temple, Jésus- Christ prévoyait sans doute les profanations et les désastreuses abominations que le démon en ferait par le péché ; quelle triste et désolante pensée pour un Dieu ! Mais la plus grande et la plus terrible de toutes les douleurs est de prévoir que l'on profanerait son corps adorable et son sang précieux. O mon Dieu ! O malheur incompréhensible ! des chrétiens peuvent-ils bien se rendre coupables d'un tel crime, dont jamais l'enfer n'a jamais pu inventer de semblable ! Hélas ! saint Paul le déplorait déjà de son temps. Ne pouvant un jour leur faire sentir toute la noirceur de ce crime épouvantable, il leur disait en pleurant amèrement : Quel supplice ne recevrait pas celui qui porterait une main parricide sur le corps d'un Dieu fait homme, qui frapperait ce cœur... Ah ! ce tendre cœur qui nous aime jusqu'à la croix, et qui lui arracherait le sang de ses veines !... Ah ! ce sang adorable versé pour nous, qui nous a sanctifiés dans le saint baptême, qui nous a purifiés dans le sacrement de pénitence... ; il semblerait être impossible de trouver des châtiments assez rigoureux et des chrétiens capables d'un tel crime. Hélas ! s'écrie-t-il, en voilà un encore infiniment plus épouvantable, c'est de recevoir indigne-ment le corps adorable et le sang précieux de Jésus--Christ, c'est le profaner, le souiller, l'avilir ; ce crime est-il possible ?... Ah ! du moins, l'est-il à des chrétiens ? Oui, il y en a de ces monstres d'ingratitude qui portent leur fureur jusqu'à un tel excès ! Oui, M.F., si le bon Dieu, dans ce moment, montrait les communions de tous ceux qui sont ici, à découvert, hélas ! combien qui paraîtraient avec leur sentence de réprobation écrite dans leur conscience criminelle avec le sang d'un Dieu fait homme ! Cette pensée fait frémir, et cependant rien de si commun que ces communions indignes ; combien qui ont la témérité de s'approcher de la Table sainte avec des péchés cachés et déguisés en confession ! Com-bien qui n'ont pas cette douleur que le bon Dieu demande d'eux ; combien qui ne font pas tous leurs efforts pour se corriger ! combien qui conservent une volonté secrète de retomber dans le péché ! Combien qui n'évitent pas les occasions du péché, pouvant le faire ; combien qui conservent jusqu'à la Table sainte des inimitiés dans leur cœur ! Sondez vos consciences, M.F., et voyez si vous n'avez jamais été dans une de ces dispositions en vous approchant de la sainte communion ; si vous aviez eu ce malheur, M.F., de quels termes pourrais-je donc me servir pour vous en faire sentir toute l'horribilité ? Ah ! s'il m'était permis, j'irais en enfer pour y arracher un infâme et un traître Judas encore tout fumant du sang adorable de Jésus-Christ qu'il a si horriblement profané. Ah ! si vous pouviez entendre les cris et les hurlements qu'il pousse ; ah ! si vous pouviez com-prendre les tourments qu'il endure à cause de son sacri-lège, vous mourriez de frayeur. Hélas ! que sera-ce donc de ceux qui, peut-être toute leur vie, n'ont fait que des sacrilèges ! des chrétiens qui vont m'entendre et qui sont coupables, pourront-ils bien vivre encore ? Oui, M.F., le sacrilège est le plus grand de tous les crimes, puisqu'il attaque un Dieu et lui donne la mort, et nous attire tous les plus grands malheurs.
SUR LA COMMUNION INDIGNE
Anima quæ peccaverit, ipsa morietur.
L'âme qui péchera, mourra.
(Ez. XVIII, 6.)
Si tout péché mortel, M.F., donne la mort à notre âme, la sépare de Dieu pour jamais, la précipite dans toutes sortes de malheurs, dans quel état doit donc réduire le plus affreux de tous les crimes, qui est le sacrilège ? O mon Dieu, quel est celui qui pourra jamais se former une idée de l'état épouvantable d'une âme couverte de sacrilèges ? Oui, nous dit Jésus-Christ, lorsque vous verrez l'abomination de la désolation dans le lieu saint, prédite par le prophète Daniel, comprenez-le bien . Hélas ! M.F., s'étant choisi le cœur de l'homme pour en faire sa demeure et son temple, Jésus- Christ prévoyait sans doute les profanations et les désastreuses abominations que le démon en ferait par le péché ; quelle triste et désolante pensée pour un Dieu ! Mais la plus grande et la plus terrible de toutes les douleurs est de prévoir que l'on profanerait son corps adorable et son sang précieux. O mon Dieu ! O malheur incompréhensible ! des chrétiens peuvent-ils bien se rendre coupables d'un tel crime, dont jamais l'enfer n'a jamais pu inventer de semblable ! Hélas ! saint Paul le déplorait déjà de son temps. Ne pouvant un jour leur faire sentir toute la noirceur de ce crime épouvantable, il leur disait en pleurant amèrement : Quel supplice ne recevrait pas celui qui porterait une main parricide sur le corps d'un Dieu fait homme, qui frapperait ce cœur... Ah ! ce tendre cœur qui nous aime jusqu'à la croix, et qui lui arracherait le sang de ses veines !... Ah ! ce sang adorable versé pour nous, qui nous a sanctifiés dans le saint baptême, qui nous a purifiés dans le sacrement de pénitence... ; il semblerait être impossible de trouver des châtiments assez rigoureux et des chrétiens capables d'un tel crime. Hélas ! s'écrie-t-il, en voilà un encore infiniment plus épouvantable, c'est de recevoir indigne-ment le corps adorable et le sang précieux de Jésus--Christ, c'est le profaner, le souiller, l'avilir ; ce crime est-il possible ?... Ah ! du moins, l'est-il à des chrétiens ? Oui, il y en a de ces monstres d'ingratitude qui portent leur fureur jusqu'à un tel excès ! Oui, M.F., si le bon Dieu, dans ce moment, montrait les communions de tous ceux qui sont ici, à découvert, hélas ! combien qui paraîtraient avec leur sentence de réprobation écrite dans leur conscience criminelle avec le sang d'un Dieu fait homme ! Cette pensée fait frémir, et cependant rien de si commun que ces communions indignes ; combien qui ont la témérité de s'approcher de la Table sainte avec des péchés cachés et déguisés en confession ! Com-bien qui n'ont pas cette douleur que le bon Dieu demande d'eux ; combien qui ne font pas tous leurs efforts pour se corriger ! combien qui conservent une volonté secrète de retomber dans le péché ! Combien qui n'évitent pas les occasions du péché, pouvant le faire ; combien qui conservent jusqu'à la Table sainte des inimitiés dans leur cœur ! Sondez vos consciences, M.F., et voyez si vous n'avez jamais été dans une de ces dispositions en vous approchant de la sainte communion ; si vous aviez eu ce malheur, M.F., de quels termes pourrais-je donc me servir pour vous en faire sentir toute l'horribilité ? Ah ! s'il m'était permis, j'irais en enfer pour y arracher un infâme et un traître Judas encore tout fumant du sang adorable de Jésus-Christ qu'il a si horriblement profané. Ah ! si vous pouviez entendre les cris et les hurlements qu'il pousse ; ah ! si vous pouviez com-prendre les tourments qu'il endure à cause de son sacri-lège, vous mourriez de frayeur. Hélas ! que sera-ce donc de ceux qui, peut-être toute leur vie, n'ont fait que des sacrilèges ! des chrétiens qui vont m'entendre et qui sont coupables, pourront-ils bien vivre encore ? Oui, M.F., le sacrilège est le plus grand de tous les crimes, puisqu'il attaque un Dieu et lui donne la mort, et nous attire tous les plus grands malheurs.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Si je parlais à des idolâtres ou même à des héré-tiques, je commencerais à leur prouver la réalité de Jésus-Christ dans le sacrement adorable de l'Eucharistie ; mais non, personne n'a le moindre doute là-dessus. Hélas ! il faudrait que pour ceux qui l'approchent en de mauvaises dispositions, Jésus-Christ n'y fût pas ; mais non, il y est aussi bien pour ceux qui osent se présenter avec le péché dans le cœur, que pour ceux qui sont en état de grâce. Je veux seulement, en commençant, vous citer un exemple qui fortifiera votre foi là-dessus, et vous donnera une idée des dispositions que vous devez y apporter, pour ne pas profaner ce grand Sacrement d'amour. Il est rapporté, dans l'histoire, qu'un prêtre qui disait la sainte Messe, après avoir prononcé les paroles de la consécration, douta si Jésus-Christ était réellement présent en corps et en âme dans la sainte Hostie ; à l'instant même la sainte Hostie fut toute teinte de sang. Jésus-Christ semblait vouloir par un si grand miracle reprocher à son ministre son peu de foi et affermir les chrétiens dans cette vérité de foi, qu'il est réellement présent dans la sainte Eucharistie. La sainte Hostie versa du sang avec tant d'abondance que le corporal, les nappes de l'autel, et l'autel même en furent rougies. Le Saint Père, en étant informé, fit apporter dans une église le corporal, que l'on portait tous les ans le jour de la Fête--Dieu, en grande vénération . Non, M.F., tout ceci n'est pas ce qui vous est le plus nécessaire, parce que personne n'en doute ; mais mon intention est de vous montrer autant qu'il me sera possible la grandeur et l'horribilité du sacrilège. Non, jamais cette connaissance ne sera donnée à l'homme mortel ; il faudrait être Dieu lui-même, afin de pouvoir le comprendre ; cependant, pour vous en donner une faible idée, je vous dirai que celui qui a ce grand malheur, fait un péché qui outrage plus le bon Dieu que tous les péchés mortels qui se sont commis depuis le commencement du monde et que ceux qui pourront se commettre jusqu'à la fin des siècles . Il est donc tout à fait impossible de vous le montrer dans toute sa noirceur ; hélas ! cependant, rien de si commun que ces sacrilèges.
Si je voulais, M.F., vous parler de la mort corporelle de Jésus-Christ, je n'aurais qu'à vous faire la peinture des tourments qu'il a endurés pendant sa vie ; je n'au-rais qu'à vous montrer ce pauvre corps tout en lam-beaux, tel qu'il était après sa flagellation, tel qu'il est maintenant sur l'arbre de la croix ; il n'en faudrait pas davantage pour vous toucher le cœur et faire couler vos larmes. En effet, quel est le pécheur le plus en-durci qui pourrait y résister et qui ne mêlerait pas ses larmes avec ce sang adorable ? Quelle est la jeune per-sonne, si j'allais me jeter à ses pieds avec un Dieu qui pleure ses péchés, en la priant en grâce de ne pas lui donner la mort, son cœur fût-il plus dur qu'un rocher, que de suite ses larmes couleraient, et, foulant aux pieds ses plaisirs, elle leur dirait adieu pour jamais. Quel est l'avare, à qui je présenterais un Dieu dépouillé de toutes choses, tout nu sur une croix, qui pourrait encore aimer les biens de ce monde ? Quel est l'im-pudique que j'irais attendre à son passage, qui court comme un désespéré vers l'objet de sa passion, si je lui présentais son Dieu tout couvert de plaies, de sang, lui demandant en grâce de ne pas lui ôter la vie, ne tomberait-il pas à ses pieds en criant miséricorde ? Hélas ! M.F., la mort que nous donnons à Jésus-Christ par la communion sacrilège est encore infiniment plus affreuse et douloureuse. Lorsqu'il était sur la terre, il n'a souffert qu'un certain temps, et il n'est mort qu'une fois ; encore, c'est son amour qui l'a fait souffrir et mourir ; mais, ici, ce n'est plus la même chose. Il meurt malgré lui, et sa mort, bien loin d'être pour nous avantageuse comme la première fois, tourne à notre malheur en nous attirant toutes sortes de châtiments et dans ce monde et dans l'autre. O mon Dieu ! que nous sommes cruels envers un Dieu si bon ! Oui, M.F., lorsque nous réfléchissons sur la conduite de cet apôtre perfide qui trahit et vendit son divin Maître, qui, depuis plusieurs années, l'avait admis au nombre de ses plus chers favoris, qui l'avait comblé de tant de bienfaits, qui lui avait donné une charge de préférence aux autres, qui avait été témoin de tant de miracles ; lorsque nous nous rappelons, dis-je, les cruautés et la barbarie des juifs qui firent à ce divin Sauveur tout ce que leur rage put inventer de plus cruel, à ce divin Sauveur qui n'était venu dans ce monde que pour les arracher à la tyrannie du démon, les élever à la glorieuse qualité d'enfants de Dieu, de cohéritiers de son royaume, nous ne pouvons les considérer que comme des monstres d'ingratitude, dignes de l'exécration du ciel et de la terre et des châtiments les plus rigoureux que le bon Dieu puisse faire sentir aux réprouvés dans toute sa puis-sance et sa juste colère.
Je dis d'abord, M.F., que celui qui a le grand malheur de communier indignement, son crime est encore infi-niment plus horrible que celui de Judas qui trahit et vendit son divin Maître, et que celui des juifs qui le crucifièrent ; parce que Judas et les juifs semblaient encore avoir quelque excuse de douter s'il était vérita-blement le Sauveur. Mais ce chrétien, mais ce malheu-reux profanateur, peuvent-ils en douter ? Les preuves de sa divinité ne sont-elles pas assez évidentes ? Ne savent-ils pas qu'à sa mort toutes les créatures parurent s'en attendrir, que la nature entière parut s'anéantir en voyant expirer son Créateur ? Sa résurrection ne fut--elle pas manifestée par une infinité de prodiges les plus frappants, qui ne pouvaient laisser aucun doute de sa divinité ? Son ascension ne se fit-elle pas en présence de plus de 500 personnes, qui, presque toutes, ont versé leur sang pour soutenir ces vérités ? Mais le malheureux profanateur n'ignore rien de tout cela, et avec toutes ses connaissances il trahit et vend son Dieu et son Sauveur au démon et le crucifie dans son cœur par le péché. Judas se servit d'un baiser de paix pour le livrer à ses ennemis ; mais l'indigne communiant porte encore plus loin sa cruauté : après avoir menti au Saint-Esprit dans le tribunal de la pénitence en cachant ou déguisant quelque péché, il ose, ce malheureux, aller se placer parmi les fidèles destinés à manger ce pain, avec un respect hypocrite sur le front ! Ah ! non, non, rien ne l'arrête, ce monstre d'ingratitude ; il s'avance et va consommer sa réprobation. En vain, ce tendre Sauveur, le voyant venir à lui, crie-t-il du fond de son tabernacle comme au perfide Judas : « Mon ami, que viens-tu faire ici ? Quoi, mon ami, tu vas trahir ton Dieu et ton Sau-veur par un signe de paix ? Arrête, arrête, mon fils ; ah ! de grâce, épargne-moi. » Mais, non, non, ni les remords de sa conscience, ni les tendres reproches que lui fait son Dieu ne peuvent arrêter ses pas criminels. Ah ! il s'avance, il va poignarder son Dieu et son Sau-veur ! Oh ciel ! quelle horreur ! pouvez-vous bien soutenir sans trembler ce malheureux meurtrier de votre Créa-teur ? Ah ! n'est-ce pas là le comble du crime et de l'abomination dans le lieu saint ? Ah ! non, non, jamais l'enfer dans toute sa fureur n'a rien pu inventer de semblable ; non, non, jamais les nations idolâtres n'ont pu inventer rien de semblable en haine du vrai Dieu, si nous le comparons aux outrages qu'un chrétien qui communie indignement fait à Jésus-Christ.
Si je voulais, M.F., vous parler de la mort corporelle de Jésus-Christ, je n'aurais qu'à vous faire la peinture des tourments qu'il a endurés pendant sa vie ; je n'au-rais qu'à vous montrer ce pauvre corps tout en lam-beaux, tel qu'il était après sa flagellation, tel qu'il est maintenant sur l'arbre de la croix ; il n'en faudrait pas davantage pour vous toucher le cœur et faire couler vos larmes. En effet, quel est le pécheur le plus en-durci qui pourrait y résister et qui ne mêlerait pas ses larmes avec ce sang adorable ? Quelle est la jeune per-sonne, si j'allais me jeter à ses pieds avec un Dieu qui pleure ses péchés, en la priant en grâce de ne pas lui donner la mort, son cœur fût-il plus dur qu'un rocher, que de suite ses larmes couleraient, et, foulant aux pieds ses plaisirs, elle leur dirait adieu pour jamais. Quel est l'avare, à qui je présenterais un Dieu dépouillé de toutes choses, tout nu sur une croix, qui pourrait encore aimer les biens de ce monde ? Quel est l'im-pudique que j'irais attendre à son passage, qui court comme un désespéré vers l'objet de sa passion, si je lui présentais son Dieu tout couvert de plaies, de sang, lui demandant en grâce de ne pas lui ôter la vie, ne tomberait-il pas à ses pieds en criant miséricorde ? Hélas ! M.F., la mort que nous donnons à Jésus-Christ par la communion sacrilège est encore infiniment plus affreuse et douloureuse. Lorsqu'il était sur la terre, il n'a souffert qu'un certain temps, et il n'est mort qu'une fois ; encore, c'est son amour qui l'a fait souffrir et mourir ; mais, ici, ce n'est plus la même chose. Il meurt malgré lui, et sa mort, bien loin d'être pour nous avantageuse comme la première fois, tourne à notre malheur en nous attirant toutes sortes de châtiments et dans ce monde et dans l'autre. O mon Dieu ! que nous sommes cruels envers un Dieu si bon ! Oui, M.F., lorsque nous réfléchissons sur la conduite de cet apôtre perfide qui trahit et vendit son divin Maître, qui, depuis plusieurs années, l'avait admis au nombre de ses plus chers favoris, qui l'avait comblé de tant de bienfaits, qui lui avait donné une charge de préférence aux autres, qui avait été témoin de tant de miracles ; lorsque nous nous rappelons, dis-je, les cruautés et la barbarie des juifs qui firent à ce divin Sauveur tout ce que leur rage put inventer de plus cruel, à ce divin Sauveur qui n'était venu dans ce monde que pour les arracher à la tyrannie du démon, les élever à la glorieuse qualité d'enfants de Dieu, de cohéritiers de son royaume, nous ne pouvons les considérer que comme des monstres d'ingratitude, dignes de l'exécration du ciel et de la terre et des châtiments les plus rigoureux que le bon Dieu puisse faire sentir aux réprouvés dans toute sa puis-sance et sa juste colère.
Je dis d'abord, M.F., que celui qui a le grand malheur de communier indignement, son crime est encore infi-niment plus horrible que celui de Judas qui trahit et vendit son divin Maître, et que celui des juifs qui le crucifièrent ; parce que Judas et les juifs semblaient encore avoir quelque excuse de douter s'il était vérita-blement le Sauveur. Mais ce chrétien, mais ce malheu-reux profanateur, peuvent-ils en douter ? Les preuves de sa divinité ne sont-elles pas assez évidentes ? Ne savent-ils pas qu'à sa mort toutes les créatures parurent s'en attendrir, que la nature entière parut s'anéantir en voyant expirer son Créateur ? Sa résurrection ne fut--elle pas manifestée par une infinité de prodiges les plus frappants, qui ne pouvaient laisser aucun doute de sa divinité ? Son ascension ne se fit-elle pas en présence de plus de 500 personnes, qui, presque toutes, ont versé leur sang pour soutenir ces vérités ? Mais le malheureux profanateur n'ignore rien de tout cela, et avec toutes ses connaissances il trahit et vend son Dieu et son Sauveur au démon et le crucifie dans son cœur par le péché. Judas se servit d'un baiser de paix pour le livrer à ses ennemis ; mais l'indigne communiant porte encore plus loin sa cruauté : après avoir menti au Saint-Esprit dans le tribunal de la pénitence en cachant ou déguisant quelque péché, il ose, ce malheureux, aller se placer parmi les fidèles destinés à manger ce pain, avec un respect hypocrite sur le front ! Ah ! non, non, rien ne l'arrête, ce monstre d'ingratitude ; il s'avance et va consommer sa réprobation. En vain, ce tendre Sauveur, le voyant venir à lui, crie-t-il du fond de son tabernacle comme au perfide Judas : « Mon ami, que viens-tu faire ici ? Quoi, mon ami, tu vas trahir ton Dieu et ton Sau-veur par un signe de paix ? Arrête, arrête, mon fils ; ah ! de grâce, épargne-moi. » Mais, non, non, ni les remords de sa conscience, ni les tendres reproches que lui fait son Dieu ne peuvent arrêter ses pas criminels. Ah ! il s'avance, il va poignarder son Dieu et son Sau-veur ! Oh ciel ! quelle horreur ! pouvez-vous bien soutenir sans trembler ce malheureux meurtrier de votre Créa-teur ? Ah ! n'est-ce pas là le comble du crime et de l'abomination dans le lieu saint ? Ah ! non, non, jamais l'enfer dans toute sa fureur n'a rien pu inventer de semblable ; non, non, jamais les nations idolâtres n'ont pu inventer rien de semblable en haine du vrai Dieu, si nous le comparons aux outrages qu'un chrétien qui communie indignement fait à Jésus-Christ.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Cependant nous lisons dans l'histoire des exemples qui font frémir. Nous voyons qu'un empereur païen, en haine de Jésus-Christ, plaça des idoles infâmes sur le Calvaire et sur le Saint Sépulcre, et il crut en cela ne pas pouvoir porter plus loin sa fureur envers Jésus--Christ. Hé ! grand Dieu ! y a-t-il quelque chose de compa-rable avec l'indigne communiant ! Ah ! non, non, ce n'est plus parmi des idoles muettes et insensibles qu'il place son Dieu, mais, hélas ! au milieu de ses passions infâmes et vivantes, qui sont autant de bourreaux qui crucifient son Sauveur ! Hélas ! que dis-je ? ce malheu-reux unit le Saint des saints à des meurtriers prostitués et le vend à l'iniquité. Oui, ce malheureux plonge son Dieu dans un enfer intense. Peut-on bien concevoir quelque chose de plus épouvantable ? Oui, M.F., nous sommes saisis d'horreur en voyant dans l'histoire les profanations que l'on a faites des saintes Hosties .
Je vais vous en citer une qui vous fera horreur. Il est rapporté qu'une femme chrétienne, qui était pauvre, avait emprunté d'un Juif une petite somme d'argent, et lui avait laissé pour gage une de ses robes. La fête de Pâques étant proche, elle pria le Juif de lui remettre pour ce jour les affaires qu'elle lui avait données. Le Juif lui dit qu'il lui donnerait tout et la tiendrait quitte si, après avoir communié, elle lui apportait la sainte Hostie. Cette malheureuse, pour n'être pas obligée de lui rendre la somme, lui dit que oui. Dès le lendemain, elle alla à l'église, et, après avoir reçu la sainte Hostie dans sa bouche, de suite elle la retire, la met dans son mouchoir et la porte au malheureux Juif qui ne la lui avait demandée que pour exercer sa fureur contre Jésus-Christ. L'ayant une fois entre les mains, il la traita avec la dernière cruauté. Nous voyons que Jésus-Christ lui montra constamment combien il était sensible aux outrages que ce malheureux lui faisait. Le Juif mit la sainte Hostie sur une table, et lui donna quantité de coups de canifs ; il en sortit une si grande quantité de sang que la table en fut toute couverte. Il la prit et la suspendit par un clou, lui donna des coups de fouet jusqu'à ce qu'il fût content ; il la perça avec une lance, il en sortit du sang comme au moment où il fut cru-cifié ; ensuite, il la jeta dans le feu, où on la voyait voltiger ça et là parmi les flammes sans en recevoir aucun dommage ; sa rage le porta à la jeter dans une chaudière d'huile bouillante : l'eau sembla être changée en sang. La sainte Hostie, dans ce moment, prit la forme de Jésus-Christ en croix. Ce malheureux, frappé de ter-reur, court se cacher dans un réduit de sa maison. Cependant, un des enfants du Juif voyant des chrétiens qui allaient à l'église, leur dit : « Vous ne devez plus aller chercher votre Dieu, mon père l'a fait mourir. » Une femme écoutant cet enfant, entra dans la maison, vit encore la sainte Hostie qui était en forme de croix ; cette femme court prendre un petit vase ; dans le mo-ment qu'elle présenta son vase, la sainte Hostie reprit son ancienne forme et se plaça dans le vase qu'elle avait apporté. Ce malheureux Juif fut si endurci qu'il aima mieux se laisser brûler vif que de se faire baptiser.
Nous ne pouvons penser à ces horreurs sans frémir. Hélas ! M.F., si nous connaissions ce que c'est que le sacrilège, c'est-à-dire l'outrage que fait à Jésus-Christ celui qui communie indignement, la seule pensée nous ferait mourir de frayeur. Ce Juif, après avoir assouvi toute sa fureur contre Jésus-Christ en traitant si indi-gnement cette sainte Hostie, ressemble à peu près comme un péché véniel a ressemblance avec un péché mortel, si nous le comparons avec un sacrilège que fait un mauvais chrétien qui a le malheur de s'appro-cher de la Table sainte sans être en état de grâce. Ah ! non, non, jamais l'enfer n'a pu rien inventer de plus affreux que le sacrilège pour faire souffrir Jésus-Christ.
2° Je dis qu'à la perfidie de Judas l'indigne commu-niant ajoute l'ingratitude, la fureur et la malice des Juifs. Écoutons le tendre reproche que Jésus-Christ faisait aux Juifs : « Pourquoi me persécutez-vous ? Est-ce parce que j'ai éclairé les aveugles, redressé les boiteux, rendu la santé aux malades, ressuscité les morts ? Est-ce donc un crime de vous avoir tant aimés ?» Tel est le langage que Jésus-Christ adresse aux profa-nateurs de son corps adorable et de son sang précieux. Encore, nous dit-il par la bouche d'un de ses pro-phètes , si cet outrage et cet affront m'avaient été faits par des ennemis ou par des idolâtres qui n'ont jamais eu le bonheur de me connaître, ou même par des hérétiques nés dans l'erreur, cela m'aurait été moins sensible ; mais vous, nous dit-il, que j'ai placés dans le sein de mon Église, vous que j'ai enrichis de mes dons les plus précieux ; vous qui, par le Baptême, étiez deve-nus mes enfants, les héritiers de mon royaume !... Quoi '. mon fils, c'est vous qui osez m'outrager par le sacrilège le plus horrible ; quoi ! mon fils, vous pouvez encore frapper le cœur du meilleur de tous les pères, qui vous a aimé jusqu'à la mort. Hé quoi ! ingrats, vous n'êtes pas encore satisfaits de toutes les cruautés que l’on a exercées sur mon corps innocent pendant ma doulou-reuse passion ! Avez-vous oublié l'état pitoyable où je fus réduit après ma douloureuse et sanglante flagel-lation, où mon corps fut semblable à un morceau de viande découpée ? Hé quoi ! ingrats, avez-vous oublié les souffrances que je ressentis en portant ma croix ; autant de pas, autant de chutes, et autant de fois relevé à coups de pieds ? Avez-vous oublié que c'est pour vous arracher de l'enfer et vous ouvrir le ciel que je suis mort sur le bois infâme de la croix ? Ah ! mon fils, ne seras-tu pas encore touché ? Pouvais-je porter plus loin mon amour pour toi ? Arrête, mon fils. Ah ! de grâce, épargne ton Dieu qui t'a tant aimé ; pourquoi veux-tu me donner une seconde fois la mort, en me recevant avec le péché dans ton cœur ?
Dites-moi, quel est celui d'entre nous qui aurait le courage, après des reproches si tendres et si amoureux de son Dieu, qui pourrait encore avoir la fureur d'aller se présenter à la Table sainte avec une conscience souillée de péchés ? Mon Dieu, qui pourra comprendre l'aveuglement de ces malheureux ! Ah ! si encore, avant de se lever pour aller donner la mort à leur Dieu, ils pensaient à ces terribles paroles de saint Paul, qu'ils vont s'incorporer leur jugement et leur condamna-tion , oseraient-ils bien porter leur audace jusqu'à un tel excès ? Ce Dieu d'amour aurait-il pu penser, je ne dis pas que ceux qui n'ont pas le bonheur de le connaître, mais que des chrétiens ne soient pas encore satisfaits de ce que les Juifs lui ont fait endurer pendant sa dou-loureuse passion ? Sur le Calvaire, aurait-il pu penser que le plus grand nombre des chrétiens deviendraient ses bourreaux, attenteraient à ses jours, et le cruci-fieraient dans leur cœur en le recevant dans leur cons-cience souillée de péchés ? Écoutez ce qu'il nous dit par la bouche d'un prophète : Guérira-t-il une âme qui aime ses blessures, c'est-à-dire ses passions ? Enflammera-t-il de l'ardeur de son amour un cœur qui brûle de l'amour profane du monde ? Non, non, dit-il, tout Dieu qu'il est, il ne le fera jamais.
Oui, M.F., Jésus-Christ, dans un cœur criminel, est sans action et sans mouvement, de sorte que celui qui est assez malheureux que de communier indignement, la mort spirituelle qu'il donne à son Dieu est encore plus surprenante que celle qu'il a endurée sur la Croix. En effet, M.F., si les Juifs le persécutèrent d'une manière si indigne, ce ne fut du moins que pendant sa vie mor-telle, mais l'indigne communiant l'outrage dans le séjour de sa gloire. Si la mort de Jésus-Christ sur le Calvaire parut si violente et si douloureuse, du moins la nature entière parut en témoigner sa douleur, et les créatures les plus insensibles parurent s'en attendrir et semblaient en cela vouloir partager ses souffrances. Mais ici, rien de tout cela ne paraît, il est insulté, il est outragé, meurtri ; ah ! que dis-je ? il est égorgé par un vil néant ; tout est dans le silence et tout paraît insensible à ses souffrances. Le soleil ne s'éclipse point, la terre ne tremble pas, l'autel ne se renverse pas ; ce Dieu de bonté si indigne-ment outragé ne peut-il pas se plaindre à plus juste titre que sur l'arbre de la Croix qu'il est abandonné ? ne devrait-il pas s'écrier : « Ah ! mon Père, pourquoi m'avez--vous abandonné à la fureur de mes ennemis, faut-il que je meure à chaque instant ? » Mais, mon Dieu, comment est-ce qu'un chrétien peut avoir le courage d'aller à la Table sainte avec le péché dans le cœur pour y donner la mort à son Dieu ?... Mon Dieu, quel malheur ! Non, non, jamais l'enfer dans sa fureur ne put rien inventer de plus outrageant à Jésus-Christ que le sacrilège commis par les chrétiens.
Mais, me direz-vous, qui sont donc ceux qui ont ce grand malheur ? – Hélas ! M.F., que le nombre en est grand ! – Mais, me direz-vous, qui pourrait donc en être capable ? – Qui pourrait en être capable ? C'est vous, mon ami, qui avez conté vos péchés avec si peu de douleur qu'une histoire indifférente. Qui est coupable ? Mon ami n'est-ce pas vous qui après vos confessions retombez avec la même facilité ; qu'on n'aperçoit aucun changement dans votre manière de vivre ; qui avez toujours les mêmes péchés à dire dans toutes vos confessions ? Qui en est coupable ? C'est vous, misérable, qui avez fermé la bouche avant d'avoir accusé vos péchés. Qui en est coupable ? C'est vous, pauvres aveugles, qui avez bien compris que vous ne disiez pas vos péchés tels que vous les connaissiez. Dites-moi, pourquoi est-ce que dans cet état vous osez aller à la Table sainte ? – C'est, dites-vous, parce que je veux faire mes pâques, je veux commu-nier. – Vous voulez communier : mais, malheureux, où voulez-vous mettre votre Dieu ? Est-ce dans vos yeux, que vous avez souillés par tant de regards impurs et adultères ? Vous voulez communier : mais où mettrez--vous donc votre Dieu ? Est-ce dans vos mains, que vous avez souillées par tant d'attouchements infâmes ? Vous voulez communier : mais où allez-vous mettre votre Dieu ? Est-ce dans votre bouche et sur votre langue ? Hé ! grand Dieu, une bouche et une langue que vous avez tant de fois profanées par des baisers impurs ! Vous vou-lez communier : mais où espérez-vous donc placer votre Dieu ? Est-ce dans votre cœur ? O horreur ! O abomina-tion ! Un cœur qui est rembruni et noirci par le crime, semblable à un tison, qui depuis quinze jours ou trois semaines roule dans le feu. Vous voulez communier, mon ami ; vous voulez faire vos pâques ? Allons, lève-toi, avance, malheureux ; quand Judas, l'infâme Judas, eut vendu son divin Maître, il fut comme un désespéré, tant qu'il ne l'eût pas livré à ses bourreaux pour le faire condamner à la mort. Avance, malheureux, lève-toi, tu viens de le vendre au démon, au tribunal de la péni-tence, en cachant et en déguisant tes péchés, cours, malheureux, le livrer au démon. Ah ! grand Dieu, tes nerfs pourront-ils bien soutenir ce corps qui va com-mettre le plus grand de tous les crimes ? Levez-vous, malheureux, avancez, puisque le Calvaire est dans votre cœur, et que la victime est devant vous, marchez tou-jours, laissez crier votre conscience, tâchez seulement d'en étouffer les remords autant que vous le pourrez. Va, malheureux, t'asseoir à la Table sainte, va manger le pain des anges ; mais, avant que d'ouvrir ta bouche souillée par tant de crimes, écoute ce que va te dire le grand saint Cyprien, et tu verras la récompense de tes sacrilèges. Une femme, nous dit-il, qui osa se présenter à la Table sainte avec une conscience souillée de péchés, dans le moment où je lui donnais la sainte communion, un coup de foudre du ciel lui tomba dessus et l'écrasa à mes pieds. Hélas ! mon Dieu, comment une personne qui est coupable peut-elle aller à la sainte communion pour commettre le plus grand de tous les sacrilèges ? Oui, M.F., saint Paul nous dit que si les Juifs avaient connu Jésus-Christ pour le Sauveur, ils ne l'auraient jamais fait souffrir, ni mourir ; mais vous, mon ami, pouvez-vous ignorer celui que vous allez recevoir ? Si vous n'y pensiez pas, écoutez le prêtre qui vous crie à haute voix : « Voici l'Agneau de Dieu, voici Celui qui efface les péchés du monde. » Il est saint, il est pur. Si vous êtes coupables, malheureux, n'avancez pas : sinon, tremblez que les foudres du ciel ne viennent se précipiter sur votre tête criminelle pour vous punir et jeter votre âme en enfer.
Je vais vous en citer une qui vous fera horreur. Il est rapporté qu'une femme chrétienne, qui était pauvre, avait emprunté d'un Juif une petite somme d'argent, et lui avait laissé pour gage une de ses robes. La fête de Pâques étant proche, elle pria le Juif de lui remettre pour ce jour les affaires qu'elle lui avait données. Le Juif lui dit qu'il lui donnerait tout et la tiendrait quitte si, après avoir communié, elle lui apportait la sainte Hostie. Cette malheureuse, pour n'être pas obligée de lui rendre la somme, lui dit que oui. Dès le lendemain, elle alla à l'église, et, après avoir reçu la sainte Hostie dans sa bouche, de suite elle la retire, la met dans son mouchoir et la porte au malheureux Juif qui ne la lui avait demandée que pour exercer sa fureur contre Jésus-Christ. L'ayant une fois entre les mains, il la traita avec la dernière cruauté. Nous voyons que Jésus-Christ lui montra constamment combien il était sensible aux outrages que ce malheureux lui faisait. Le Juif mit la sainte Hostie sur une table, et lui donna quantité de coups de canifs ; il en sortit une si grande quantité de sang que la table en fut toute couverte. Il la prit et la suspendit par un clou, lui donna des coups de fouet jusqu'à ce qu'il fût content ; il la perça avec une lance, il en sortit du sang comme au moment où il fut cru-cifié ; ensuite, il la jeta dans le feu, où on la voyait voltiger ça et là parmi les flammes sans en recevoir aucun dommage ; sa rage le porta à la jeter dans une chaudière d'huile bouillante : l'eau sembla être changée en sang. La sainte Hostie, dans ce moment, prit la forme de Jésus-Christ en croix. Ce malheureux, frappé de ter-reur, court se cacher dans un réduit de sa maison. Cependant, un des enfants du Juif voyant des chrétiens qui allaient à l'église, leur dit : « Vous ne devez plus aller chercher votre Dieu, mon père l'a fait mourir. » Une femme écoutant cet enfant, entra dans la maison, vit encore la sainte Hostie qui était en forme de croix ; cette femme court prendre un petit vase ; dans le mo-ment qu'elle présenta son vase, la sainte Hostie reprit son ancienne forme et se plaça dans le vase qu'elle avait apporté. Ce malheureux Juif fut si endurci qu'il aima mieux se laisser brûler vif que de se faire baptiser.
Nous ne pouvons penser à ces horreurs sans frémir. Hélas ! M.F., si nous connaissions ce que c'est que le sacrilège, c'est-à-dire l'outrage que fait à Jésus-Christ celui qui communie indignement, la seule pensée nous ferait mourir de frayeur. Ce Juif, après avoir assouvi toute sa fureur contre Jésus-Christ en traitant si indi-gnement cette sainte Hostie, ressemble à peu près comme un péché véniel a ressemblance avec un péché mortel, si nous le comparons avec un sacrilège que fait un mauvais chrétien qui a le malheur de s'appro-cher de la Table sainte sans être en état de grâce. Ah ! non, non, jamais l'enfer n'a pu rien inventer de plus affreux que le sacrilège pour faire souffrir Jésus-Christ.
2° Je dis qu'à la perfidie de Judas l'indigne commu-niant ajoute l'ingratitude, la fureur et la malice des Juifs. Écoutons le tendre reproche que Jésus-Christ faisait aux Juifs : « Pourquoi me persécutez-vous ? Est-ce parce que j'ai éclairé les aveugles, redressé les boiteux, rendu la santé aux malades, ressuscité les morts ? Est-ce donc un crime de vous avoir tant aimés ?» Tel est le langage que Jésus-Christ adresse aux profa-nateurs de son corps adorable et de son sang précieux. Encore, nous dit-il par la bouche d'un de ses pro-phètes , si cet outrage et cet affront m'avaient été faits par des ennemis ou par des idolâtres qui n'ont jamais eu le bonheur de me connaître, ou même par des hérétiques nés dans l'erreur, cela m'aurait été moins sensible ; mais vous, nous dit-il, que j'ai placés dans le sein de mon Église, vous que j'ai enrichis de mes dons les plus précieux ; vous qui, par le Baptême, étiez deve-nus mes enfants, les héritiers de mon royaume !... Quoi '. mon fils, c'est vous qui osez m'outrager par le sacrilège le plus horrible ; quoi ! mon fils, vous pouvez encore frapper le cœur du meilleur de tous les pères, qui vous a aimé jusqu'à la mort. Hé quoi ! ingrats, vous n'êtes pas encore satisfaits de toutes les cruautés que l’on a exercées sur mon corps innocent pendant ma doulou-reuse passion ! Avez-vous oublié l'état pitoyable où je fus réduit après ma douloureuse et sanglante flagel-lation, où mon corps fut semblable à un morceau de viande découpée ? Hé quoi ! ingrats, avez-vous oublié les souffrances que je ressentis en portant ma croix ; autant de pas, autant de chutes, et autant de fois relevé à coups de pieds ? Avez-vous oublié que c'est pour vous arracher de l'enfer et vous ouvrir le ciel que je suis mort sur le bois infâme de la croix ? Ah ! mon fils, ne seras-tu pas encore touché ? Pouvais-je porter plus loin mon amour pour toi ? Arrête, mon fils. Ah ! de grâce, épargne ton Dieu qui t'a tant aimé ; pourquoi veux-tu me donner une seconde fois la mort, en me recevant avec le péché dans ton cœur ?
Dites-moi, quel est celui d'entre nous qui aurait le courage, après des reproches si tendres et si amoureux de son Dieu, qui pourrait encore avoir la fureur d'aller se présenter à la Table sainte avec une conscience souillée de péchés ? Mon Dieu, qui pourra comprendre l'aveuglement de ces malheureux ! Ah ! si encore, avant de se lever pour aller donner la mort à leur Dieu, ils pensaient à ces terribles paroles de saint Paul, qu'ils vont s'incorporer leur jugement et leur condamna-tion , oseraient-ils bien porter leur audace jusqu'à un tel excès ? Ce Dieu d'amour aurait-il pu penser, je ne dis pas que ceux qui n'ont pas le bonheur de le connaître, mais que des chrétiens ne soient pas encore satisfaits de ce que les Juifs lui ont fait endurer pendant sa dou-loureuse passion ? Sur le Calvaire, aurait-il pu penser que le plus grand nombre des chrétiens deviendraient ses bourreaux, attenteraient à ses jours, et le cruci-fieraient dans leur cœur en le recevant dans leur cons-cience souillée de péchés ? Écoutez ce qu'il nous dit par la bouche d'un prophète : Guérira-t-il une âme qui aime ses blessures, c'est-à-dire ses passions ? Enflammera-t-il de l'ardeur de son amour un cœur qui brûle de l'amour profane du monde ? Non, non, dit-il, tout Dieu qu'il est, il ne le fera jamais.
Oui, M.F., Jésus-Christ, dans un cœur criminel, est sans action et sans mouvement, de sorte que celui qui est assez malheureux que de communier indignement, la mort spirituelle qu'il donne à son Dieu est encore plus surprenante que celle qu'il a endurée sur la Croix. En effet, M.F., si les Juifs le persécutèrent d'une manière si indigne, ce ne fut du moins que pendant sa vie mor-telle, mais l'indigne communiant l'outrage dans le séjour de sa gloire. Si la mort de Jésus-Christ sur le Calvaire parut si violente et si douloureuse, du moins la nature entière parut en témoigner sa douleur, et les créatures les plus insensibles parurent s'en attendrir et semblaient en cela vouloir partager ses souffrances. Mais ici, rien de tout cela ne paraît, il est insulté, il est outragé, meurtri ; ah ! que dis-je ? il est égorgé par un vil néant ; tout est dans le silence et tout paraît insensible à ses souffrances. Le soleil ne s'éclipse point, la terre ne tremble pas, l'autel ne se renverse pas ; ce Dieu de bonté si indigne-ment outragé ne peut-il pas se plaindre à plus juste titre que sur l'arbre de la Croix qu'il est abandonné ? ne devrait-il pas s'écrier : « Ah ! mon Père, pourquoi m'avez--vous abandonné à la fureur de mes ennemis, faut-il que je meure à chaque instant ? » Mais, mon Dieu, comment est-ce qu'un chrétien peut avoir le courage d'aller à la Table sainte avec le péché dans le cœur pour y donner la mort à son Dieu ?... Mon Dieu, quel malheur ! Non, non, jamais l'enfer dans sa fureur ne put rien inventer de plus outrageant à Jésus-Christ que le sacrilège commis par les chrétiens.
Mais, me direz-vous, qui sont donc ceux qui ont ce grand malheur ? – Hélas ! M.F., que le nombre en est grand ! – Mais, me direz-vous, qui pourrait donc en être capable ? – Qui pourrait en être capable ? C'est vous, mon ami, qui avez conté vos péchés avec si peu de douleur qu'une histoire indifférente. Qui est coupable ? Mon ami n'est-ce pas vous qui après vos confessions retombez avec la même facilité ; qu'on n'aperçoit aucun changement dans votre manière de vivre ; qui avez toujours les mêmes péchés à dire dans toutes vos confessions ? Qui en est coupable ? C'est vous, misérable, qui avez fermé la bouche avant d'avoir accusé vos péchés. Qui en est coupable ? C'est vous, pauvres aveugles, qui avez bien compris que vous ne disiez pas vos péchés tels que vous les connaissiez. Dites-moi, pourquoi est-ce que dans cet état vous osez aller à la Table sainte ? – C'est, dites-vous, parce que je veux faire mes pâques, je veux commu-nier. – Vous voulez communier : mais, malheureux, où voulez-vous mettre votre Dieu ? Est-ce dans vos yeux, que vous avez souillés par tant de regards impurs et adultères ? Vous voulez communier : mais où mettrez--vous donc votre Dieu ? Est-ce dans vos mains, que vous avez souillées par tant d'attouchements infâmes ? Vous voulez communier : mais où allez-vous mettre votre Dieu ? Est-ce dans votre bouche et sur votre langue ? Hé ! grand Dieu, une bouche et une langue que vous avez tant de fois profanées par des baisers impurs ! Vous vou-lez communier : mais où espérez-vous donc placer votre Dieu ? Est-ce dans votre cœur ? O horreur ! O abomina-tion ! Un cœur qui est rembruni et noirci par le crime, semblable à un tison, qui depuis quinze jours ou trois semaines roule dans le feu. Vous voulez communier, mon ami ; vous voulez faire vos pâques ? Allons, lève-toi, avance, malheureux ; quand Judas, l'infâme Judas, eut vendu son divin Maître, il fut comme un désespéré, tant qu'il ne l'eût pas livré à ses bourreaux pour le faire condamner à la mort. Avance, malheureux, lève-toi, tu viens de le vendre au démon, au tribunal de la péni-tence, en cachant et en déguisant tes péchés, cours, malheureux, le livrer au démon. Ah ! grand Dieu, tes nerfs pourront-ils bien soutenir ce corps qui va com-mettre le plus grand de tous les crimes ? Levez-vous, malheureux, avancez, puisque le Calvaire est dans votre cœur, et que la victime est devant vous, marchez tou-jours, laissez crier votre conscience, tâchez seulement d'en étouffer les remords autant que vous le pourrez. Va, malheureux, t'asseoir à la Table sainte, va manger le pain des anges ; mais, avant que d'ouvrir ta bouche souillée par tant de crimes, écoute ce que va te dire le grand saint Cyprien, et tu verras la récompense de tes sacrilèges. Une femme, nous dit-il, qui osa se présenter à la Table sainte avec une conscience souillée de péchés, dans le moment où je lui donnais la sainte communion, un coup de foudre du ciel lui tomba dessus et l'écrasa à mes pieds. Hélas ! mon Dieu, comment une personne qui est coupable peut-elle aller à la sainte communion pour commettre le plus grand de tous les sacrilèges ? Oui, M.F., saint Paul nous dit que si les Juifs avaient connu Jésus-Christ pour le Sauveur, ils ne l'auraient jamais fait souffrir, ni mourir ; mais vous, mon ami, pouvez-vous ignorer celui que vous allez recevoir ? Si vous n'y pensiez pas, écoutez le prêtre qui vous crie à haute voix : « Voici l'Agneau de Dieu, voici Celui qui efface les péchés du monde. » Il est saint, il est pur. Si vous êtes coupables, malheureux, n'avancez pas : sinon, tremblez que les foudres du ciel ne viennent se précipiter sur votre tête criminelle pour vous punir et jeter votre âme en enfer.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
II. – Non, non, M.F., je ne parle pas ici des maux temporels que les sacrilèges attirent dans le monde ; je passerai sous silence les châtiments épouvantables que les Juifs éprouvèrent après avoir fait mourir Jésus--Christ. Le seul récit fait frémir : ils s'égorgeaient les uns les autres ; les rues étaient couvertes de cadavres, le sang coulait dans les rues comme l'eau d'une rivière ; la famine fut si grande que les mères allèrent jusqu'à manger leurs enfants.
Saint Jean Damascène nous dit que le sacrilège est un crime si épouvantable, qu'un seul sacrilège est capable d'attirer toutes sortes de malheurs dans le monde ; il nous dit que c'est principalement sur les profanateurs que Jésus-Christ versera pendant toute l'éternité le fiel de sa fureur. Voici un exemple qui va vous montrer l'état d'un profanateur à l'heure de la mort. Il est rap-porté qu'un pauvre malheureux qui avait fait des com-munions sacrilèges pendant sa vie, vit un démon qui s'approcha de lui en lui disant : Parce que tu as com-munié indignement pendant ta vie, tu recevras aujour-d'hui la communion de ma main ; ce pauvre malheureux s'écria : Hélas ! la vengeance de Dieu est sur moi, et mourut dans le désespoir en prononçant ces paroles. Oui, M.F., si nous pouvions nous former une idée de la grandeur du sacrilège, nous mourrions plutôt mille fois que de le commettre. En effet, un chrétien qui est si malheureux que de communier indignement, se rend coupable du plus détestable de tous les sacrilèges, de la plus noire de toutes les ingratitudes ; disons mieux, il empoisonne son cœur, il tue son âme, il ouvre la porte de son cœur au démon, et se rend volontairement son esclave. Oui, M.F., l'horreur de son sacrilège vient de ce qu'il profane non un lieu ou un vase saint, mais un corps qui est la source de toute sainteté, qui est celui de Jésus-Christ. L'énormité de son ingratitude paraît en ce qu'il outrage son bienfaiteur par le plus signalé de ses bienfaits ; et bien plus, il se sert de lui-même pour l'ou-trager. La communion sacrilège est semblable à une épée très aiguë qu'il enfonce dans ses entrailles, elle l'em-poisonne comme Judas fut empoisonné par la sienne, elle donne au démon plein pouvoir de se saisir de lui après qu'il a communié, Il ne faudrait donc point, M.F., oser ainsi faire. Mieux vaudrait ne jamais communier puisqu'elle n'apporte ni profit, ni plaisir, ni honneur ; mais cause le plus grand dommage, de très cruels remords de conscience et une infamie éternelle. Saint Cyprien rapporte qu'une femme, en sortant de commu-nier indignement, fut saisie par le démon qui la tour-menta si horriblement, qu'elle fut elle-même son bour-reau ; après s'être coupé la langue, elle mourut...
O mon Dieu, un chrétien peut-il bien avoir le courage d'aller à la Table sainte en ayant des péchés cachés, ou des péchés dont il ne veut pas se corriger, ou, si vous voulez, qui malgré tant de communions passées ne change pas de vie ? Mon Dieu, que l'homme est aveugle ! Hélas ! ce ne sera qu'au jour du jugement que nous verrons toutes ces abominations. Écoutez saint Paul, parlant aux Corinthiens : « Vous vous présentez, leur disait-il, à la table du Seigneur, avec aussi peu de res-pect et de religion que si vous vous présentiez à une table profane ; vous allez manger le pain des anges avec aussi peu de décence que si vous mangiez du pain matériel ; pouvez-vous vous étonner si vous êtes acca-blés de tant de maux ? » Hélas ! M.F., reconnaissons en pleurant sincèrement, que si nous sommes accablés de tant de malheurs et de tant de châtiments, ce ne sont que les sacrilèges qui en sont la véritable source. Que de guerres, que de famines, que de maladies et de morts subites ! Insensés, qui attribuez tout cela au hasard, ouvrez les yeux, et vous reconnaîtrez que ce ne sont que vos sacrilèges. Oui, M.F., si l'on pouvait vous dépeindre toutes les conséquences d'un sacrilège, pas un de vous qui oserait communier. II est rapporté par saint Gode-froi, qui était évêque d'Amiens, qu'il avait défendu à tous les prêtres de donner l'absolution pendant les fêtes de Pâques à tous ceux qui avaient mangé de la viande pendant le carême. Un libertin, qui était coupable de ce crime, c'est-à-dire qui avait mangé de la viande, prit l'habit d'une femme afin de tromper son confesseur. Cet artifice lui réussit, mais pour son malheur : car il n'eut pas plutôt reçu le corps de Jésus-Christ, qu'une force invisible le renversa, il commença à écumer comme une personne enragée, se roulant par terre et mourut dans sa fureur. Non, non, M.F., quelques terreurs que les communions indignes puissent jeter dans le cœur de l'homme par les châtiments épouvantables qu'elles nous attirent, ce n'est encore rien si nous les comparons à ceux que Jésus-Christ exerce sur les âmes ; et ces châti-ments sont ordinairement l'endurcissement pendant la vie et le désespoir à l'heure de la mort. Le bon Dieu, en punition de ses abominations, abandonne ce malheureux à son aveuglement ; le démon qui l'a trompé pendant sa vie, ne le lui laisse apercevoir que dans le moment où il prévoit que le bon Dieu l'a abandonné ; il va de crime en crime, de sacrilège en sacrilège, il finit par ne plus y penser, il avale l'iniquité comme l'eau ; enfin, malgré tout le temps et les secours, il meurt dans le sacrilège comme il y a vécu. En voici un exemple bien frappant, rapporté par un juif qui l'apprit d'un prêtre à qui cela était arrivé. Lorsque j'étais, nous dit le père Lejeune, dans une mission près de Bruxelles, il y avait une femme dévote .... Cela vous étonne, sans doute, qu'elle meure ainsi, pouvant si bien réparer le mal qu'elle avait fait ; pour moi, cela ne m'étonne pas, parce que, le sacrilège étant le plus grand des crimes, l'on mérite bien d'être abandonné du bon Dieu et de ne pas savoir profiter ni du temps, ni des grâces.
Saint Jean Damascène nous dit que le sacrilège est un crime si épouvantable, qu'un seul sacrilège est capable d'attirer toutes sortes de malheurs dans le monde ; il nous dit que c'est principalement sur les profanateurs que Jésus-Christ versera pendant toute l'éternité le fiel de sa fureur. Voici un exemple qui va vous montrer l'état d'un profanateur à l'heure de la mort. Il est rap-porté qu'un pauvre malheureux qui avait fait des com-munions sacrilèges pendant sa vie, vit un démon qui s'approcha de lui en lui disant : Parce que tu as com-munié indignement pendant ta vie, tu recevras aujour-d'hui la communion de ma main ; ce pauvre malheureux s'écria : Hélas ! la vengeance de Dieu est sur moi, et mourut dans le désespoir en prononçant ces paroles. Oui, M.F., si nous pouvions nous former une idée de la grandeur du sacrilège, nous mourrions plutôt mille fois que de le commettre. En effet, un chrétien qui est si malheureux que de communier indignement, se rend coupable du plus détestable de tous les sacrilèges, de la plus noire de toutes les ingratitudes ; disons mieux, il empoisonne son cœur, il tue son âme, il ouvre la porte de son cœur au démon, et se rend volontairement son esclave. Oui, M.F., l'horreur de son sacrilège vient de ce qu'il profane non un lieu ou un vase saint, mais un corps qui est la source de toute sainteté, qui est celui de Jésus-Christ. L'énormité de son ingratitude paraît en ce qu'il outrage son bienfaiteur par le plus signalé de ses bienfaits ; et bien plus, il se sert de lui-même pour l'ou-trager. La communion sacrilège est semblable à une épée très aiguë qu'il enfonce dans ses entrailles, elle l'em-poisonne comme Judas fut empoisonné par la sienne, elle donne au démon plein pouvoir de se saisir de lui après qu'il a communié, Il ne faudrait donc point, M.F., oser ainsi faire. Mieux vaudrait ne jamais communier puisqu'elle n'apporte ni profit, ni plaisir, ni honneur ; mais cause le plus grand dommage, de très cruels remords de conscience et une infamie éternelle. Saint Cyprien rapporte qu'une femme, en sortant de commu-nier indignement, fut saisie par le démon qui la tour-menta si horriblement, qu'elle fut elle-même son bour-reau ; après s'être coupé la langue, elle mourut...
O mon Dieu, un chrétien peut-il bien avoir le courage d'aller à la Table sainte en ayant des péchés cachés, ou des péchés dont il ne veut pas se corriger, ou, si vous voulez, qui malgré tant de communions passées ne change pas de vie ? Mon Dieu, que l'homme est aveugle ! Hélas ! ce ne sera qu'au jour du jugement que nous verrons toutes ces abominations. Écoutez saint Paul, parlant aux Corinthiens : « Vous vous présentez, leur disait-il, à la table du Seigneur, avec aussi peu de res-pect et de religion que si vous vous présentiez à une table profane ; vous allez manger le pain des anges avec aussi peu de décence que si vous mangiez du pain matériel ; pouvez-vous vous étonner si vous êtes acca-blés de tant de maux ? » Hélas ! M.F., reconnaissons en pleurant sincèrement, que si nous sommes accablés de tant de malheurs et de tant de châtiments, ce ne sont que les sacrilèges qui en sont la véritable source. Que de guerres, que de famines, que de maladies et de morts subites ! Insensés, qui attribuez tout cela au hasard, ouvrez les yeux, et vous reconnaîtrez que ce ne sont que vos sacrilèges. Oui, M.F., si l'on pouvait vous dépeindre toutes les conséquences d'un sacrilège, pas un de vous qui oserait communier. II est rapporté par saint Gode-froi, qui était évêque d'Amiens, qu'il avait défendu à tous les prêtres de donner l'absolution pendant les fêtes de Pâques à tous ceux qui avaient mangé de la viande pendant le carême. Un libertin, qui était coupable de ce crime, c'est-à-dire qui avait mangé de la viande, prit l'habit d'une femme afin de tromper son confesseur. Cet artifice lui réussit, mais pour son malheur : car il n'eut pas plutôt reçu le corps de Jésus-Christ, qu'une force invisible le renversa, il commença à écumer comme une personne enragée, se roulant par terre et mourut dans sa fureur. Non, non, M.F., quelques terreurs que les communions indignes puissent jeter dans le cœur de l'homme par les châtiments épouvantables qu'elles nous attirent, ce n'est encore rien si nous les comparons à ceux que Jésus-Christ exerce sur les âmes ; et ces châti-ments sont ordinairement l'endurcissement pendant la vie et le désespoir à l'heure de la mort. Le bon Dieu, en punition de ses abominations, abandonne ce malheureux à son aveuglement ; le démon qui l'a trompé pendant sa vie, ne le lui laisse apercevoir que dans le moment où il prévoit que le bon Dieu l'a abandonné ; il va de crime en crime, de sacrilège en sacrilège, il finit par ne plus y penser, il avale l'iniquité comme l'eau ; enfin, malgré tout le temps et les secours, il meurt dans le sacrilège comme il y a vécu. En voici un exemple bien frappant, rapporté par un juif qui l'apprit d'un prêtre à qui cela était arrivé. Lorsque j'étais, nous dit le père Lejeune, dans une mission près de Bruxelles, il y avait une femme dévote .... Cela vous étonne, sans doute, qu'elle meure ainsi, pouvant si bien réparer le mal qu'elle avait fait ; pour moi, cela ne m'étonne pas, parce que, le sacrilège étant le plus grand des crimes, l'on mérite bien d'être abandonné du bon Dieu et de ne pas savoir profiter ni du temps, ni des grâces.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Oui, M.F., le sacrilège paraît si affreux qu'il semble impossible que des chrétiens puissent se rendre cou-pables d'un tel crime ; et cependant, rien de si commun. Jetons un coup d’œil sur les communions, combien ne trouverons-nous pas de confessions et de communions faites par respect humain ! Combien par hypocrisie, par coutume ! combien que, si les Pâques ne revenaient que tous les trente ans, ils ne communieraient, hélas ! jamais... Combien d'autres, qui ne voient venir ce temps si précieux qu'avec peine, et qui ne s'en approchent que parce que d'autres le font, et non pour plaire à Dieu et nourrir leur pauvre âme. Preuve bien évidente, M.F., que ces confessions et communions ne valent rien, puis-que l'on ne voit point de changement dans leur manière de vivre. Les voit-on après la confession plus doux, plus patients dans leurs peines et les contradictions de la vie, plus charitables, plus portés à cacher et à excuser les fautes de leurs frères ? Non, non, M.F., il n'est plus question de changement dans leur conduite ; ils ont péché jusqu'à présent, ils continuent. Oh ! malheur épouvantable, mais bien peu connu du plus grand nom-bre des chrétiens ! O mon Dieu, auriez-vous pu penser que vos enfants se portassent avec un tel excès de fureur contre vous ? Non, non, M.F., ce n'est pas sans raison, que l'on place un crucifix sur la table de la communion, hélas ! que de fois il est crucifié à la Table sainte ! Regarde-le bien, mon âme, toi qui oses planter le poignard dans ce cœur qui nous a aimés plus que lui--même ; regarde-le bien, c'est ton Juge, Celui qui doit fixer ta demeure pour l'éternité. Sondez bien votre cons-cience ; si vous êtes en mauvais état, malheureux, n'avancez pas. Oui, Jésus-Christ est ressuscité de la mort naturelle, et il ne mourra plus ; mais cette mort que vous lui donnez par vos communions indignes, ah ! quand est-ce qu'elle finira ? O quelle longue agonie ! étant sur la terre, il n'y avait qu'un calvaire pour le crucifier ; mais ici, autant de cœurs, autant de croix où il est attaché ! O patience de mon Dieu, que vous êtes grande, de souf-frir tant de cruautés sans dire un seul mot, même pour vous plaindre, étant traité si indignement par une vile créature, pour laquelle vous avez déjà tant souffert ! Voulez-vous, M.F., savoir ce que fait celui qui com-munie indignement ? écoutez-le bien, afin que vous puissiez comprendre la grandeur de votre atrocité envers Jésus-Christ. Que diriez-vous, M.F., d'un homme dont le père serait conduit dans un lieu pour être exécuté à mort, si, ne se trouvant point là de potence pour l'at-tacher, il s'adressait aux bourreaux, leur disant : Vous n'avez point de potence, voilà mes bras, servez-vous-en pour y pendre mon père ? Vous ne pourriez voir une telle action de barbarie sans frémir d'horreur, il y aurait sans doute bien de quoi. Eh bien ! M.F., si j'osais, je vous dirais que cela n'est encore rien, si nous le com-parons au crime épouvantable que commet celui qui communie indignement. En effet, quels sont les bien-faits qu'un père a faits à son enfant, si nous les com-parons à ce que Jésus-Christ a fait pour nous ? Dites-moi, M.F., si vous faisiez ces réflexions avant de vous présenter à la Table sainte, auriez-vous le cou-rage d'y aller sans bien vous examiner ce que vous allez faire. Oseriez-vous bien y aller avec des péchés cachés, déguisés, confessés sans contrition et sans désir de les quitter ? Voilà ce que vous dites au démon, lorsque vous êtes si aveugles et si téméraires : Il n'y a ni croix, ni calvaire comme autrefois ; mais j'ai trouvé quelque chose qui peut y suppléer. – Quoi ? vous dit le démon, tout étonné d'une telle proposition. – C'est, lui dites--vous, mon cœur. Tenez-vous prêt, je vais me saisir de lui ; il vous a précipité dans les enfers, vengez-vous à votre tour, égorgez-le sur cette croix. – O mon Dieu, peut-on penser à cela sans frémir d'horreur ? Cependant, voilà ce que fait celui qui communie indignement. Ah ! non, non, jamais l'enfer dans toute sa fureur n'a rien pu inventer de semblable. Non, non, quand il y aurait mille enfers pour un seul profanateur, cela ne serait rien, si nous le comparons à la grandeur de son crime. « Que fait, nous dit saint Paul, celui qui communie indigne-ment ? Hélas ! ce malheureux, il boit et mange son juge et son jugement. » L'on a bien vu, selon les lois, lire aux criminels leur condamnation, mais a-t-on jamais vu leur faire manger leur sentence de condamna-tion, et, de cette sorte, de leur condamnation et d'eux--mêmes ne faire qu'une même chose ? O malheur épou-vantable ! ce n'est plus sur du papier qu'est écrit l'arrêt de réprobation de ces profanateurs, mais sur leur propre cœur. A l'heure de la mort, Jésus-Christ descendra, un flambeau à la main, dans ces cœurs sacrilèges, y trouvera son sang adorable tant de fois profané, qui criera ven-geance. O divin Sauveur, la colère et la puissance de votre Père sera-t-elle assez puissante pour foudroyer ces malheureux Judas au plus profond des abîmes ? Eh bien ! M.F., avez-vous compris ce que c'est qu'une commu-nion indigne, vous qui vous confessez avec si peu de préparation, qui y donnez moins de soins que vous n'en donneriez pour l'affaire la plus commune et la plus indifférente ? Dites-moi, M.F., pour être tranquilles comme vous le paraissez, êtes-vous bien sûrs que toutes vos confessions et vos communions ont été accompa-gnées de toutes les dispositions nécessaires pour être bonnes et mettre votre salut en sûreté ? Avez-vous bien dé-testé vos péchés ? Les avez-vous bien pleurés ? En avez-vous bien fait pénitence ? Avez-vous bien pris tous les moyens que le bon Dieu vous a inspirés pour n'y plus re-tomber ? Revenez, mon ami, sur vos années passées, exa-minez toutes les confessions et communions qui n'ont été accompagnées d'aucun amendement, point de change-ment dans votre vie. Prenez le flambeau à la main, vous--même, pour voir l'état de votre âme, avant que Jésus--Christ ne vous le fasse voir lui-même pour vous juger et vous condamner pour jamais. Frémissez, M.F., sur cette grande incertitude de la validité de tant de confes-sions et de communions ; une seule chose doit vous empêcher de tomber dans le désespoir, c'est que vous êtes en vie et que le bon Dieu vous offre sa grâce pour vous tirer de cet abîme dont la profondeur est infinie, et que pour cela il ne faut rien moins que la puissance d'un Dieu. Hélas ! M.F., que de chrétiens qui maintenant brûlent dans les enfers, qui ont entendu les mêmes choses que vous entendez aujourd'hui, mais qui n'ont pas voulu en profiter, quoique leur conscience criait ! Mais, hélas ! ils n'ont voulu en sortir que quand ils n'ont pas pu, et sont tombés dans les enfers. Hélas ! combien parmi ceux qui m'écoutent qui sont de ce nombre, qui auront le même sort ! Mon Dieu, est-il bien possible de connaître son état et de ne pas vouloir en sortir. – Mais, me direz-vous, qui osera donc s'appro-cher de la Table sainte, et qui osera espérer d'avoir fait une bonne communion dans sa vie ? Pourra-t-on bien se lever pour aller à la Table sainte, ne va-t-il pas sembler qu'une main invisible va me repousser et me frapper de mort ? – Mon ami, pour cela je ne vous en dis rien ; sondez votre conscience, et voyez dans quel état elle est ; voyez si en sortant de la Table sainte vous paraîtriez avec confiance devant le tribunal de Jésus-Christ. -Mais, me direz-vous, il vaut mieux tout laisser que de s'exposer à un tel crime. – Mon ami, en vous donnant une idée de la grandeur du sacrilège, ce n'a pas été mon intention de vous éloigner de la sainte communion, mais seulement de faire ouvrir les yeux à ceux qui sont de ce nombre, pour réparer le mal qu'ils ont fait, pen-dant qu'il est temps, et pour porter ceux qui ont l'espé-rance d'être exempts de ce crime épouvantable, à y apporter encore des dispositions plus parfaites.
Que devons-nous conclure, M.F., de tout cela ? Le voici : c'est de faire nos confessions et nos communions comme nous voudrions les avoir faites à l'heure de la mort, lorsque nous paraîtrons devant le tribunal de Jésus-Christ, afin que, faisant toujours bien, nous ayons le ciel pour récompense. C'est ce que je vous souhaite.
Que devons-nous conclure, M.F., de tout cela ? Le voici : c'est de faire nos confessions et nos communions comme nous voudrions les avoir faites à l'heure de la mort, lorsque nous paraîtrons devant le tribunal de Jésus-Christ, afin que, faisant toujours bien, nous ayons le ciel pour récompense. C'est ce que je vous souhaite.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
SERMON
SUR LES DEVOIRS DES PARENTS
Patres, educate filios vestros in disciplina et correctione Domini.
Pères et mères, élevez vos enfants en les instruisant et en les corrigeant selon le Seigneur.
(Eph., VI, 6.)
Si, comme chrétiens, M.F., nous sommes tous obligés de nous aider à nous sauver, parce que, étant tous les enfants d'un même père, nous sommes tous destinés à aller régner un jour dans le ciel ; si saint Paul nous dit que les maîtres « qui n'ont pas soin de leurs domesti-ques ont renoncé à leur foi et qu'ils sont pires que les païens », je vous laisse à penser, M.F., quels doivent être les soins et les précautions que les pères et mères doivent prendre pour sauver les âmes de leurs pauvres enfants qui sont une partie d'eux-mêmes, que le bon Dieu ne leur a confiés que comme un trésor dont il doit un jour leur demander un compte si redoutable. Mais, sans chercher de détour, les pères et mères doivent savoir que leur plus grande occupation doit être de tra-vailler à sauver les âmes de leurs enfants et qu'ils n'ont point d'ouvrage qui doive passer avant celui-là ; bien plus, que leur salut est attaché à celui de leurs enfants, comme nous allons le voir. Pères et mères, pour remplir vos devoirs, vous devez donc instruire vos enfants, leur donner bon exemple et les corriger. Si vous faites cela, vous irez au ciel en y conduisant vos enfants ; vos enfants feront votre gloire dans le ciel, comme ils feront votre désespoir dans les enfers si vous êtes si malheureux que de les laisser perdre. Il n'est pas nécessaire, M.F., de vous montrer l'obligation où vous êtes d'avoir soin de vos enfants, c'est-à-dire de les nourrir, de les entretenir, puisque les païens et les idolâtres qui ne connaissent pas le vrai Dieu et ne se conduisent que par un amour naturel, s'en acquittent parfaitement. Non, ce n'est pas là la chose que vous négligez le plus : j'aurais plutôt envie de vous dire de ne pas tant leur prodiguer d'affaires, et que vous feriez beaucoup mieux de faire quelque bonne œuvre de plus pour leur attirer les béné-dictions du ciel.
SUR LES DEVOIRS DES PARENTS
Patres, educate filios vestros in disciplina et correctione Domini.
Pères et mères, élevez vos enfants en les instruisant et en les corrigeant selon le Seigneur.
(Eph., VI, 6.)
Si, comme chrétiens, M.F., nous sommes tous obligés de nous aider à nous sauver, parce que, étant tous les enfants d'un même père, nous sommes tous destinés à aller régner un jour dans le ciel ; si saint Paul nous dit que les maîtres « qui n'ont pas soin de leurs domesti-ques ont renoncé à leur foi et qu'ils sont pires que les païens », je vous laisse à penser, M.F., quels doivent être les soins et les précautions que les pères et mères doivent prendre pour sauver les âmes de leurs pauvres enfants qui sont une partie d'eux-mêmes, que le bon Dieu ne leur a confiés que comme un trésor dont il doit un jour leur demander un compte si redoutable. Mais, sans chercher de détour, les pères et mères doivent savoir que leur plus grande occupation doit être de tra-vailler à sauver les âmes de leurs enfants et qu'ils n'ont point d'ouvrage qui doive passer avant celui-là ; bien plus, que leur salut est attaché à celui de leurs enfants, comme nous allons le voir. Pères et mères, pour remplir vos devoirs, vous devez donc instruire vos enfants, leur donner bon exemple et les corriger. Si vous faites cela, vous irez au ciel en y conduisant vos enfants ; vos enfants feront votre gloire dans le ciel, comme ils feront votre désespoir dans les enfers si vous êtes si malheureux que de les laisser perdre. Il n'est pas nécessaire, M.F., de vous montrer l'obligation où vous êtes d'avoir soin de vos enfants, c'est-à-dire de les nourrir, de les entretenir, puisque les païens et les idolâtres qui ne connaissent pas le vrai Dieu et ne se conduisent que par un amour naturel, s'en acquittent parfaitement. Non, ce n'est pas là la chose que vous négligez le plus : j'aurais plutôt envie de vous dire de ne pas tant leur prodiguer d'affaires, et que vous feriez beaucoup mieux de faire quelque bonne œuvre de plus pour leur attirer les béné-dictions du ciel.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
I. – Je dis donc d'abord que les pères doivent ins-truire leurs enfants, c'est-à-dire leur apprendre à prier le bon Dieu, à le connaître ; leur enseigner ce qu'ils doivent faire pour gagner le ciel et éviter l'enfer. Si vous ne sentez pas bien la grandeur de ce devoir, écoutez ce que le bon Dieu va vous dire lui-même. Nous lisons dans l'Écriture sainte qu'après que le Seigneur eût donné ses commandements à son peuple il ajouta ces belles paroles : « Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre âme et de toutes vos affec-tions, et le prochain comme vous-mêmes. Pères et mères, vous apprendrez tout cela à vos enfants et vous les en instruirez le matin en vous levant, le soir en vous couchant, lorsque vous marcherez, lorsque vous serez assis, c'est-à-dire tous les jours de votre vie ». Pères et mères, Dieu pouvait-il vous montrer d'une manière plus claire la grandeur de vos devoirs envers vos en-fants ? Pouvez-vous trouver quelque prétexte qui puisse vous en exempter, ou même tant soit peu vous les faire négliger ? Le Saint-Esprit nous dit encore : « Si vous avez des enfants, il faut les instruire dès leur jeunesse », aussitôt qu'ils peuvent remuer les bras . Oui, M.F., dès qu'un enfant commence à dire quelques mots, ses parents doivent lui apprendre à prononcer les saints noms de Jésus et de Marie. Nous lisons de saint Thomas de Villeneuve que les premières paroles qui sortirent de sa bouche furent « Jésus, Marie », parce qu'il avait des parents bien chrétiens qui lui disaient souvent ces pa-roles. Les pères et mères doivent apprendre à leurs en-fants à faire le signe de la croix aussitôt qu'ils peuvent. Dès qu'ils commencent à remuer leurs petits bras, leur donner de l'eau bénite, les faire prier le bon Dieu à genoux le matin et le soir, leur inspirer un grand res-pect pour la présence du bon Dieu, et pour cela se mettre soi-même à genoux à côté d'eux, les faire tourner contre quelque image. Si vous allez les faire prier le bon Dieu en travaillant, ils regarderont et penseront à ce que vous faites et non à ce qu'ils font. Vous devez leur apprendre à donner leur cœur au bon Dieu le matin en s'éveillant, à offrir leur journée, toutes leurs actions, à dire leur Benedicite et leur action de grâce, leur Angelus.
Vous ne devez pas vous contenter de leur apprendre le Notre Père, il leur faut apprendre le Salut Marie, le Crois en Dieu, le Confesse à Dieu, les commandements de Dieu, et de plus les trois actes de foi, d'espérance et de cha-rité, puisque le bon Dieu nous dit dans l'Écriture sainte : « Pères et mères, apprenez mes commandements à vos enfants. » Hélas ! M.F., il y a des enfants qui ont neuf et dix ans, qui ne savent pas encore leur prière entière. Dites-moi, pères et mères, quel jugement peut-on porter de vous, sinon que vous avez moins de soin de vos pauvres enfants, c'est-à-dire de leurs pauvres âmes qui ont tant coûté à Jésus-Christ que vous n'avez soin de vos bêtes que vous tenez dans vos écuries. Si vous aimez vos enfants, vous ne devez donc pas vous fier à eux quand ils vous disent qu'ils ont fait leur prière ; il faut que vous les entendiez vous-mêmes. Saint Thomas nous dit que, dès qu'un enfant a l'âge de raison, il doit savoir l'abrégé de la religion, qui sont les principaux mys-tères ; qu'ils se rendent grandement coupables aux yeux de Dieu les pères et mères qui négligent de les apprendre à leurs enfants. Voilà ce que saint Thomas veut que les pères et mères apprennent à leurs enfants dès l'âge de raison : le mystère de la Très Sainte Trinité, qui est un seul Dieu en trois personnes ; que le Fils s'est incarné dans le sein de la bienheureuse Vierge par l'opé-ration du Saint-Esprit, le 25 mars ; qu'il est né le jour de Noël, qu'il est mort pour nous sur une croix le Vendredi saint ; qu'il est ressuscité le jour de Pâques, qu'il est monté au ciel le jour de l'Ascension ; qu'il a envoyé son Esprit-Saint à ses apôtres, le jour de la Pentecôte. Et dès que les enfants sont un peu plus grands, il faut leur apprendre le jour que Jésus-Christ a institué le sacre-ment adorable de l'Eucharistie, avec tous les autres sacrements et les dispositions qu'il faut avoir pour les recevoir. S'ils ne peuvent pas encore bien comprendre leurs trois actes, il faut leur faire dire ces abrégés : « Mon Dieu, je crois en vous ; mon Dieu, j'espère en vous ; mon Dieu, je vous aime de tout mon cœur. » Il faut, nous dit saint Thomas, souvent leur parler du bon-heur du paradis qui est préparé aux enfants bien sages ; et pour leur donner une grande horreur du péché il faut leur faire comprendre, autant que l'on peut, combien le bon Dieu punit en enfer, par des châtiments terribles, un seul péché mortel, et leur faire comprendre ce que c'est qu'un péché mortel. C'est de cette manière que se comportait sainte Blanche envers son fils saint Louis ; elle lui fit concevoir une telle horreur du péché, que l'on croit qu'il n'ait jamais commis un péché mortel et qu'il a eu le bonheur de porter l'innocence de son bap-tême dans le ciel. Ce saint roi disait qu'il se souvenait toujours de ces paroles de sa mère, qu'elle aimerait mieux le voir mourir que commettre un péché, qu'il ne devait rien tant craindre que le péché. Etant roi, il demanda un jour à un de ses officiers ce qu'il aimerait le mieux d'être toute sa vie couvert d'une lèpre ou de commettre un péché ; ce pauvre homme lui répondit qu'il aimerait mieux commettre un péché que d'être couvert d'une lèpre. Le roi lui dit : « Mon ami, vous n'avez jamais compris ce que c'est que le péché, et la laideur de la lèpre n'est rien en comparaison du péché. » O heureux enfants, à qui les parents inspirent une pareille horreur du péché ! Le saint homme Tobie disait à son fils : « Mon fils, prenez bien garde de ne jamais commettre un péché. » Quand il se vit près de mourir, il fit venir son enfant auprès de son lit, et lui dit. : « Mon fils, je vous laisse votre mère, ayez soin d'elle ; mais surtout je vous recommande d'éviter les mauvaises com-pagnies ; gardez-vous bien de toute iniquité, ne faites tort à personne, donnez l'aumône autant que vous le pourrez : je vous recommande d'avoir une grande crainte de Dieu. Il vaudrait mieux, mon fils, mourir que d'of-fenser le bon Dieu . »
Vous ne devez pas vous contenter de leur apprendre le Notre Père, il leur faut apprendre le Salut Marie, le Crois en Dieu, le Confesse à Dieu, les commandements de Dieu, et de plus les trois actes de foi, d'espérance et de cha-rité, puisque le bon Dieu nous dit dans l'Écriture sainte : « Pères et mères, apprenez mes commandements à vos enfants. » Hélas ! M.F., il y a des enfants qui ont neuf et dix ans, qui ne savent pas encore leur prière entière. Dites-moi, pères et mères, quel jugement peut-on porter de vous, sinon que vous avez moins de soin de vos pauvres enfants, c'est-à-dire de leurs pauvres âmes qui ont tant coûté à Jésus-Christ que vous n'avez soin de vos bêtes que vous tenez dans vos écuries. Si vous aimez vos enfants, vous ne devez donc pas vous fier à eux quand ils vous disent qu'ils ont fait leur prière ; il faut que vous les entendiez vous-mêmes. Saint Thomas nous dit que, dès qu'un enfant a l'âge de raison, il doit savoir l'abrégé de la religion, qui sont les principaux mys-tères ; qu'ils se rendent grandement coupables aux yeux de Dieu les pères et mères qui négligent de les apprendre à leurs enfants. Voilà ce que saint Thomas veut que les pères et mères apprennent à leurs enfants dès l'âge de raison : le mystère de la Très Sainte Trinité, qui est un seul Dieu en trois personnes ; que le Fils s'est incarné dans le sein de la bienheureuse Vierge par l'opé-ration du Saint-Esprit, le 25 mars ; qu'il est né le jour de Noël, qu'il est mort pour nous sur une croix le Vendredi saint ; qu'il est ressuscité le jour de Pâques, qu'il est monté au ciel le jour de l'Ascension ; qu'il a envoyé son Esprit-Saint à ses apôtres, le jour de la Pentecôte. Et dès que les enfants sont un peu plus grands, il faut leur apprendre le jour que Jésus-Christ a institué le sacre-ment adorable de l'Eucharistie, avec tous les autres sacrements et les dispositions qu'il faut avoir pour les recevoir. S'ils ne peuvent pas encore bien comprendre leurs trois actes, il faut leur faire dire ces abrégés : « Mon Dieu, je crois en vous ; mon Dieu, j'espère en vous ; mon Dieu, je vous aime de tout mon cœur. » Il faut, nous dit saint Thomas, souvent leur parler du bon-heur du paradis qui est préparé aux enfants bien sages ; et pour leur donner une grande horreur du péché il faut leur faire comprendre, autant que l'on peut, combien le bon Dieu punit en enfer, par des châtiments terribles, un seul péché mortel, et leur faire comprendre ce que c'est qu'un péché mortel. C'est de cette manière que se comportait sainte Blanche envers son fils saint Louis ; elle lui fit concevoir une telle horreur du péché, que l'on croit qu'il n'ait jamais commis un péché mortel et qu'il a eu le bonheur de porter l'innocence de son bap-tême dans le ciel. Ce saint roi disait qu'il se souvenait toujours de ces paroles de sa mère, qu'elle aimerait mieux le voir mourir que commettre un péché, qu'il ne devait rien tant craindre que le péché. Etant roi, il demanda un jour à un de ses officiers ce qu'il aimerait le mieux d'être toute sa vie couvert d'une lèpre ou de commettre un péché ; ce pauvre homme lui répondit qu'il aimerait mieux commettre un péché que d'être couvert d'une lèpre. Le roi lui dit : « Mon ami, vous n'avez jamais compris ce que c'est que le péché, et la laideur de la lèpre n'est rien en comparaison du péché. » O heureux enfants, à qui les parents inspirent une pareille horreur du péché ! Le saint homme Tobie disait à son fils : « Mon fils, prenez bien garde de ne jamais commettre un péché. » Quand il se vit près de mourir, il fit venir son enfant auprès de son lit, et lui dit. : « Mon fils, je vous laisse votre mère, ayez soin d'elle ; mais surtout je vous recommande d'éviter les mauvaises com-pagnies ; gardez-vous bien de toute iniquité, ne faites tort à personne, donnez l'aumône autant que vous le pourrez : je vous recommande d'avoir une grande crainte de Dieu. Il vaudrait mieux, mon fils, mourir que d'of-fenser le bon Dieu . »
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Oui, M.F., nous voyons que le bon Dieu fait tant d'état d'un père qui instruit bien ses enfants, que quand il voulut perdre Sodome et Gomorrhe par le feu du ciel, il dit : « Je ne veux pas cacher cela à mon serviteur Abraham, parce que je sais qu'il apprend à ses enfants à garder ma loi ».
Oh ! combien le bon Dieu aime les pères et mères qui instruisent leurs enfants de leurs devoirs de reli-gion, et combien il se plait à répandre sur eux ses béné-dictions ! Ecoutez ce que nous dit sainte Thérèse que ses père et mère faisaient toute leur occupation de bien lui apprendre à servir le bon Dieu, aussi est-elle devenue une sainte. Voyez encore les père et mère de saint Bernard : ils avaient si bien instruit leurs enfants qu'ils firent tous des saints.
Nous lisons dans l'histoire qu'une mère avait un petit enfant qui n'avait que cinq ans. Comme c'était dans un temps de persécution, cette mère disait souvent à son fils : « Ah ! mon fils, si vous avez le bonheur de bien aimer le bon Dieu et de bien éviter le péché, vous aurez le bonheur d'aller au ciel ; mais, si vous avez le malheur de commettre le péché, vous irez en enfer. Elle le menait, quoique bien petit, à toutes les instructions qu'elle pouvait. Etant prise par les barbares comme chrétienne avec son enfant, on demanda à la mère ce qu'elle était : elle répondit qu'elle était chrétienne. Comme l'on avait séparé d'elle son enfant, l'on dit à l'enfant ce qu'il était : il répondit qu'il était et qu'il vou-lait mourir chrétien. On le menace, on le fait jeûner, on le fouette : il ne disait autre chose sinon qu'il était chré-tien et qu'il voulait mourir chrétien. Comme l'on ne pou-vait rien gagner, on le mena sur l'échafaud avec sa mère, dans l'espérance que la tendresse de la mère et de l'enfant les porterait à renoncer à Jésus-Christ ; mais, dès que la mère aperçut son enfant, elle lui cria : « Cou-rage, mon cher enfant, courage : il nous faut mourir chrétiens ». Mais aussi cette tendre mère avait tant fait de prières pour demander à Dieu la persévérance de son enfant ! Ce pauvre enfant avait déjà beaucoup souffert, sans avoir ni bu ni mangé. Il mourait de soif. Il dit donc à sa mère : « Hélas ! ma mère, que j'ai donc soif ! Cou-rage, mon enfant, vous irez boire en paradis. » Ce pau-vre petit innocent ne dit rien plus ; il leva ses petits yeux vers le ciel et tendit le cou au bourreau qui lui coupa la tête. Quand la mère vit que son enfant avait perdu la vie pour le bon Dieu, elle s'écria : « Faites-moi tout ce que vous voudrez, puisque mon enfant est en paradis ». On lui coupa aussi la tête. O heureux enfant d'avoir une telle mère ! O heureuse mère, d'avoir un semblable enfant !
Oui, M.F., il est très certain, après un tel exemple, et vous conviendrez avec moi que la sainteté des enfants dépend des instructions que les parents leur ont don-nées dans leur enfance. Hélas ! mon Dieu, nous ne voyons plus à présent les pères et mère conduire leurs enfants de cette manière. Aussi, que sont la plupart des enfants de nos jours ? de pauvres enfants qui ont déjà mille fois transgressé les commandements de Dieu sans les connaître, qui ont l'esprit et le cœur remplis des affaires du monde, sans savoir pourquoi le bon Dieu les a créés et pour quelle fin ils sont sur la terre ; ce qu'ils doivent craindre ou espérer après l'autre vie. Savez-vous la pensée que j'ai quand vous m'apportez un enfant pour le baptiser ? Après l'avoir mis au nombre des enfants de Dieu, je me dis en moi-même : « Ah ! pauvre enfant, si le bon Dieu te faisait la grâce que la même plume qui atteste que tu es enfant de Dieu pouvait montrer que tu n'es plus de ce monde, quel bonheur pour toi ! Si tu vis encore quelque temps, le monde et le démon vont faire tout ce qu'ils pourront pour te perdre. Mais ce qu'il y aura encore de plus malheureux, c'est que tes parents qui devraient t'éloigner du mal seront peut-être les premiers à te précipiter dans le péché par leurs conseils pernicieux et leurs mauvais exemples.
Hélas ! mon Dieu, que peut-on bien penser des enfants, voyant la conduite des parents qui sont peu dévots ? Ces pauvres enfants voient des parents si indif-férents pour leur religion, qui ne font rien pour assurer le salut de leurs pauvres âmes ; qui souvent ne font leur prière ni le matin ni le soir, ou, s'ils font quelque chose, c'est d'une manière si misérable ; qui montrent bien qu'ils ne font pas attention aux pauvres enfants qui sont témoins que leurs parents ne font point de pâques et ne se confessent presque jamais ; qui manqueront combien de dimanches de suite tous les saints offices ; qui travail-leront le dimanche ; qui mangeront de la viande les jours défendus ; qui n'ont que de mauvaises raisons à la bou-che ; qui ne parlent que des choses du monde, des richesses, et presque jamais du bon Dieu ; des parents qui ne respirent que la vengeance ! Hélas ! que peuvent devenir les enfants dans une telle école ?
Oh ! combien le bon Dieu aime les pères et mères qui instruisent leurs enfants de leurs devoirs de reli-gion, et combien il se plait à répandre sur eux ses béné-dictions ! Ecoutez ce que nous dit sainte Thérèse que ses père et mère faisaient toute leur occupation de bien lui apprendre à servir le bon Dieu, aussi est-elle devenue une sainte. Voyez encore les père et mère de saint Bernard : ils avaient si bien instruit leurs enfants qu'ils firent tous des saints.
Nous lisons dans l'histoire qu'une mère avait un petit enfant qui n'avait que cinq ans. Comme c'était dans un temps de persécution, cette mère disait souvent à son fils : « Ah ! mon fils, si vous avez le bonheur de bien aimer le bon Dieu et de bien éviter le péché, vous aurez le bonheur d'aller au ciel ; mais, si vous avez le malheur de commettre le péché, vous irez en enfer. Elle le menait, quoique bien petit, à toutes les instructions qu'elle pouvait. Etant prise par les barbares comme chrétienne avec son enfant, on demanda à la mère ce qu'elle était : elle répondit qu'elle était chrétienne. Comme l'on avait séparé d'elle son enfant, l'on dit à l'enfant ce qu'il était : il répondit qu'il était et qu'il vou-lait mourir chrétien. On le menace, on le fait jeûner, on le fouette : il ne disait autre chose sinon qu'il était chré-tien et qu'il voulait mourir chrétien. Comme l'on ne pou-vait rien gagner, on le mena sur l'échafaud avec sa mère, dans l'espérance que la tendresse de la mère et de l'enfant les porterait à renoncer à Jésus-Christ ; mais, dès que la mère aperçut son enfant, elle lui cria : « Cou-rage, mon cher enfant, courage : il nous faut mourir chrétiens ». Mais aussi cette tendre mère avait tant fait de prières pour demander à Dieu la persévérance de son enfant ! Ce pauvre enfant avait déjà beaucoup souffert, sans avoir ni bu ni mangé. Il mourait de soif. Il dit donc à sa mère : « Hélas ! ma mère, que j'ai donc soif ! Cou-rage, mon enfant, vous irez boire en paradis. » Ce pau-vre petit innocent ne dit rien plus ; il leva ses petits yeux vers le ciel et tendit le cou au bourreau qui lui coupa la tête. Quand la mère vit que son enfant avait perdu la vie pour le bon Dieu, elle s'écria : « Faites-moi tout ce que vous voudrez, puisque mon enfant est en paradis ». On lui coupa aussi la tête. O heureux enfant d'avoir une telle mère ! O heureuse mère, d'avoir un semblable enfant !
Oui, M.F., il est très certain, après un tel exemple, et vous conviendrez avec moi que la sainteté des enfants dépend des instructions que les parents leur ont don-nées dans leur enfance. Hélas ! mon Dieu, nous ne voyons plus à présent les pères et mère conduire leurs enfants de cette manière. Aussi, que sont la plupart des enfants de nos jours ? de pauvres enfants qui ont déjà mille fois transgressé les commandements de Dieu sans les connaître, qui ont l'esprit et le cœur remplis des affaires du monde, sans savoir pourquoi le bon Dieu les a créés et pour quelle fin ils sont sur la terre ; ce qu'ils doivent craindre ou espérer après l'autre vie. Savez-vous la pensée que j'ai quand vous m'apportez un enfant pour le baptiser ? Après l'avoir mis au nombre des enfants de Dieu, je me dis en moi-même : « Ah ! pauvre enfant, si le bon Dieu te faisait la grâce que la même plume qui atteste que tu es enfant de Dieu pouvait montrer que tu n'es plus de ce monde, quel bonheur pour toi ! Si tu vis encore quelque temps, le monde et le démon vont faire tout ce qu'ils pourront pour te perdre. Mais ce qu'il y aura encore de plus malheureux, c'est que tes parents qui devraient t'éloigner du mal seront peut-être les premiers à te précipiter dans le péché par leurs conseils pernicieux et leurs mauvais exemples.
Hélas ! mon Dieu, que peut-on bien penser des enfants, voyant la conduite des parents qui sont peu dévots ? Ces pauvres enfants voient des parents si indif-férents pour leur religion, qui ne font rien pour assurer le salut de leurs pauvres âmes ; qui souvent ne font leur prière ni le matin ni le soir, ou, s'ils font quelque chose, c'est d'une manière si misérable ; qui montrent bien qu'ils ne font pas attention aux pauvres enfants qui sont témoins que leurs parents ne font point de pâques et ne se confessent presque jamais ; qui manqueront combien de dimanches de suite tous les saints offices ; qui travail-leront le dimanche ; qui mangeront de la viande les jours défendus ; qui n'ont que de mauvaises raisons à la bou-che ; qui ne parlent que des choses du monde, des richesses, et presque jamais du bon Dieu ; des parents qui ne respirent que la vengeance ! Hélas ! que peuvent devenir les enfants dans une telle école ?
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
II. – Nous disons, M.F., que le second devoir des parents est de donner bon exemple à leurs enfants. Mon Dieu, où sont-ils les bons exemples que les parents donnent à leurs enfants ? ou plutôt, où sont les mauvais exemples qu'ils ne leur donnent pas ? Si nous avons dit, M.F., que l'ignorance où les parents laissent leurs pauvres enfants est si déplorable aux yeux de la foi, nécessairement ils seront damnés par les mauvais exemples qu'ils leur donnent .
Hélas ! pauvres enfants ! si vous êtes obligés de suivre les exemples de vos parents, que vous êtes malheureux ! II faudra nécessairement vous damner. Oui, pères et mères, si vos enfants veulent se sauver, il faudra qu'ils fassent tout le contraire de ce que vous faites. – Mais, me direz-vous, nous ne leur donnons pas mauvais exemple. – Vous ne leur donnez pas mauvais exem-ple ? Ouvrez donc un instant les yeux sur ce que vous faites et sur ce que devriez faire pour conduire saintement vos enfants. Dites-moi, mon père, vous ne faites point de pâques, vous ne vous confessez presque jamais : vous savez très bien que c'est un péché mortel, et que, si vous veniez à mourir dans cet état, vous seriez-damné. Eh bien ! dites-moi, si vous voulez que vos enfants suivent vos exemples, il faudra donc qu'ils ne fassent point de pâques, c'est-à-dire que si vos enfants sont obligés de marcher sur vos traces, il leur faudra absolument se résoudre à se damner. Qu'en pensez-vous, mon père ? est-ce oui, ou non ? Vous ne donnez pas mauvais exemple à vos enfants, me dites--vous, mais vous travaillez le saint jour du dimanche, vous faites gras les jours défendus, même devant vos enfants ; vous savez bien que c'est un péché mortel. Si vous voulez que vos enfants vous imitent, quelle route voulez-vous leur faire prendre, à vos pauvres enfants ? Combien de fois vos enfants vous ont vu jeter sur votre lit, si j'osais dire, comme un cheval sur son fumier, sans faire aucun signe de chrétien ? Alors, si vos enfants vous imitent, il faudra qu'ils ne donnent plus aucune marque de religion. Combien de fois que vos enfants vous entendent dire des paroles sales ou indécentes, qui portent le poison dans leur pauvre âme !
N'allons pas plus loin, M.F., pleurons le malheur des parents et des enfants qui se traînent chaque jour les uns les autres en enfer. – Mais, me direz-vous peut--être, quand je les entends dire de mauvaises raisons, je sais bien leur imposer silence et les châtier. – Oui, sans doute, mais vous avez bien bonne grâce de défendre à vos enfants ce que vous faites vous-mêmes. Ne peu-vent-ils pas vous dire ou, s'ils n'osent pas le dire, le penser : « Médecin, guérissez-vous vous-même. » Mon père, commencez à vous corriger, ensuite vous nous direz de nous corriger. Hélas ! pauvre mère aveugle !… . Soyez bien sûrs, M.F., que vos coups et votre bâton ne servent pas de grand'chose. En voici un exemple : Il est rapporté dans l'histoire qu'il y avait une mère qui tâchait d'élever son enfant autant bien qu'elle pouvait. Mais comme le père n'avait point de religion, il gâtait tout ce que la mère faisait. Un jour que l'enfant se trou-vait un peu de mauvaise humeur en faisant sa prière, son père se trouvant de passer , il se lève et court sauter à son cou, en lui disant : « N'est-ce pas, mon père, quand je serai grand comme toi, je ne ferai point de prière ?» Vous voyez donc bien que tout ce que vous pouvez dire à vos enfants c'est perdu, à cause des mau-vais exemples que vous leur donnez.
Ecoutez-moi un instant, et vous allez voir combien votre conduite est ridicule. Vous dites à votre enfant qu'il ne faut pas jurer, qu'il offense le bon Dieu en jurant : vous avez bien raison ; mais vous comprenez-vous vous-même en le grondant de ce qu'il jure ? Vous jurez vous-même. – Si vous entendez vos enfants dire des paroles grossières, vous les reprenez, et vous faites très bien : mais en les reprenant, vous en dites qui sont encore plus grossières. Un père dit à son enfant : « Mon fils, il faut être bon, affable à tout le monde et être patient. » Certainement que vous parlez comme un bon père ; mais que doit penser votre fils en vous entendant parler de la sorte, tandis qu'il n'y a qu'un moment qu'il vous a vu vous emporter contre sa mère, peut-être mal-traiter un domestique et quereller un voisin ? N'est-ce pas, mon ami, que vous avez bonne grâce de parler ainsi à votre enfant ? Dites-moi, mon père, aurez-vous la force de dire à votre fils : « Mon enfant, il ne faut pas fréquenter le cabaret, ni s'enivrer : c'est un gros péché, c'est manger son argent mal à propos ; » tandis qu'il n'y a peut-être pas encore huit jours qu'il vous a vu venir du cabaret, plein de vin, avec bien moins de raison qu'une de vos bêtes qui est à l'écurie, dans une fureur semblable à celle d'un lion qui court dévorer tout ce qui se présente devant lui ? « Mon fils, dira peut-être ce bon père, il ne faut vouloir mal à personne : laissons la ven-geance à Dieu seul. » Cela est très bien, mais tout à l'heure vous disiez qu'un tel vous avait trompé et qu'à la première occasion il s'en repentira. Dites-moi, que pensez-vous de tout cela ? Est-ce ce que vous faites, oui ou non ? Vous voyez bien que vous détruisez par vos mauvais exemples tout le bien que vos entretiens pour-raient faire.
L'on dit aussi que les paroles peuvent persuader, mais que les exemples entraînent. Si vous voulez que vos enfants fassent bien, c'est-à-dire qu'ils soient bien sages, commencez à être sages vous-mêmes ; faites en sorte que tout ce que vous ferez, vos enfants puissent l'imiter. C'est vraiment une chose épouvantable de vouloir reprendre dans les autres ce que l'on fait soi-même. Voyez une mère qui dira à sa fille : « Ma fille, il ne faut mépriser personne, aime tout le monde. » Mais vous n'y pensez pas, mère : tout à l'heure elle vous a entendu dire du mal de votre voisine. – « Vois-tu, ma fille, lui dira-t-elle, il ne faut pas courir après les plaisirs ; cela n'annonce rien de bon. » Vous avez bien raison ; si elle suivait ce que vous lui dites et non ce que vous avez fait, elle serait heureuse. Mais vous avez oublié que tout à l'heure vous lui faisiez le récit de toutes les folies de votre jeunesse, auxquelles vous ne devriez penser que pour en pleurer le reste de vos jours. A vous entendre parler, il semble que vous regrettez de ne plus pouvoir vous y livrer, et vous voulez que vos enfants en soient honteux !
Après une conduite comme la vôtre, pères et mères, plaignez-vous de ce que vos enfants ne valent rien, qu'ils sont jureurs, opiniâtres, vindicatifs, ivrognes, libertins. – Si je ne craignais pas de vous faire de la peine, je vous dirais simplement qu'ils suivent le che-min que vous leur avez tracé ; ils font ce qu'ils vous ont vu faire ; ils ont oublié vos leçons et vos belles remon-trances, mais ils se guident d'après votre conduite : et, pour couper encore plus court, ils vous ressemblent. Quoique vous pensiez peut-être que cela n'est pas, ce n'est pas moins la vérité. Convenons tous ensemble que, si les enfants n'ont point de religion, cela ne doit être attribué qu'aux parents ; et au jour du jugement le bon Dieu vous en fera convenir sans pouvoir trouver aucune excuse.
Hélas ! pauvres enfants ! si vous êtes obligés de suivre les exemples de vos parents, que vous êtes malheureux ! II faudra nécessairement vous damner. Oui, pères et mères, si vos enfants veulent se sauver, il faudra qu'ils fassent tout le contraire de ce que vous faites. – Mais, me direz-vous, nous ne leur donnons pas mauvais exemple. – Vous ne leur donnez pas mauvais exem-ple ? Ouvrez donc un instant les yeux sur ce que vous faites et sur ce que devriez faire pour conduire saintement vos enfants. Dites-moi, mon père, vous ne faites point de pâques, vous ne vous confessez presque jamais : vous savez très bien que c'est un péché mortel, et que, si vous veniez à mourir dans cet état, vous seriez-damné. Eh bien ! dites-moi, si vous voulez que vos enfants suivent vos exemples, il faudra donc qu'ils ne fassent point de pâques, c'est-à-dire que si vos enfants sont obligés de marcher sur vos traces, il leur faudra absolument se résoudre à se damner. Qu'en pensez-vous, mon père ? est-ce oui, ou non ? Vous ne donnez pas mauvais exemple à vos enfants, me dites--vous, mais vous travaillez le saint jour du dimanche, vous faites gras les jours défendus, même devant vos enfants ; vous savez bien que c'est un péché mortel. Si vous voulez que vos enfants vous imitent, quelle route voulez-vous leur faire prendre, à vos pauvres enfants ? Combien de fois vos enfants vous ont vu jeter sur votre lit, si j'osais dire, comme un cheval sur son fumier, sans faire aucun signe de chrétien ? Alors, si vos enfants vous imitent, il faudra qu'ils ne donnent plus aucune marque de religion. Combien de fois que vos enfants vous entendent dire des paroles sales ou indécentes, qui portent le poison dans leur pauvre âme !
N'allons pas plus loin, M.F., pleurons le malheur des parents et des enfants qui se traînent chaque jour les uns les autres en enfer. – Mais, me direz-vous peut--être, quand je les entends dire de mauvaises raisons, je sais bien leur imposer silence et les châtier. – Oui, sans doute, mais vous avez bien bonne grâce de défendre à vos enfants ce que vous faites vous-mêmes. Ne peu-vent-ils pas vous dire ou, s'ils n'osent pas le dire, le penser : « Médecin, guérissez-vous vous-même. » Mon père, commencez à vous corriger, ensuite vous nous direz de nous corriger. Hélas ! pauvre mère aveugle !… . Soyez bien sûrs, M.F., que vos coups et votre bâton ne servent pas de grand'chose. En voici un exemple : Il est rapporté dans l'histoire qu'il y avait une mère qui tâchait d'élever son enfant autant bien qu'elle pouvait. Mais comme le père n'avait point de religion, il gâtait tout ce que la mère faisait. Un jour que l'enfant se trou-vait un peu de mauvaise humeur en faisant sa prière, son père se trouvant de passer , il se lève et court sauter à son cou, en lui disant : « N'est-ce pas, mon père, quand je serai grand comme toi, je ne ferai point de prière ?» Vous voyez donc bien que tout ce que vous pouvez dire à vos enfants c'est perdu, à cause des mau-vais exemples que vous leur donnez.
Ecoutez-moi un instant, et vous allez voir combien votre conduite est ridicule. Vous dites à votre enfant qu'il ne faut pas jurer, qu'il offense le bon Dieu en jurant : vous avez bien raison ; mais vous comprenez-vous vous-même en le grondant de ce qu'il jure ? Vous jurez vous-même. – Si vous entendez vos enfants dire des paroles grossières, vous les reprenez, et vous faites très bien : mais en les reprenant, vous en dites qui sont encore plus grossières. Un père dit à son enfant : « Mon fils, il faut être bon, affable à tout le monde et être patient. » Certainement que vous parlez comme un bon père ; mais que doit penser votre fils en vous entendant parler de la sorte, tandis qu'il n'y a qu'un moment qu'il vous a vu vous emporter contre sa mère, peut-être mal-traiter un domestique et quereller un voisin ? N'est-ce pas, mon ami, que vous avez bonne grâce de parler ainsi à votre enfant ? Dites-moi, mon père, aurez-vous la force de dire à votre fils : « Mon enfant, il ne faut pas fréquenter le cabaret, ni s'enivrer : c'est un gros péché, c'est manger son argent mal à propos ; » tandis qu'il n'y a peut-être pas encore huit jours qu'il vous a vu venir du cabaret, plein de vin, avec bien moins de raison qu'une de vos bêtes qui est à l'écurie, dans une fureur semblable à celle d'un lion qui court dévorer tout ce qui se présente devant lui ? « Mon fils, dira peut-être ce bon père, il ne faut vouloir mal à personne : laissons la ven-geance à Dieu seul. » Cela est très bien, mais tout à l'heure vous disiez qu'un tel vous avait trompé et qu'à la première occasion il s'en repentira. Dites-moi, que pensez-vous de tout cela ? Est-ce ce que vous faites, oui ou non ? Vous voyez bien que vous détruisez par vos mauvais exemples tout le bien que vos entretiens pour-raient faire.
L'on dit aussi que les paroles peuvent persuader, mais que les exemples entraînent. Si vous voulez que vos enfants fassent bien, c'est-à-dire qu'ils soient bien sages, commencez à être sages vous-mêmes ; faites en sorte que tout ce que vous ferez, vos enfants puissent l'imiter. C'est vraiment une chose épouvantable de vouloir reprendre dans les autres ce que l'on fait soi-même. Voyez une mère qui dira à sa fille : « Ma fille, il ne faut mépriser personne, aime tout le monde. » Mais vous n'y pensez pas, mère : tout à l'heure elle vous a entendu dire du mal de votre voisine. – « Vois-tu, ma fille, lui dira-t-elle, il ne faut pas courir après les plaisirs ; cela n'annonce rien de bon. » Vous avez bien raison ; si elle suivait ce que vous lui dites et non ce que vous avez fait, elle serait heureuse. Mais vous avez oublié que tout à l'heure vous lui faisiez le récit de toutes les folies de votre jeunesse, auxquelles vous ne devriez penser que pour en pleurer le reste de vos jours. A vous entendre parler, il semble que vous regrettez de ne plus pouvoir vous y livrer, et vous voulez que vos enfants en soient honteux !
Après une conduite comme la vôtre, pères et mères, plaignez-vous de ce que vos enfants ne valent rien, qu'ils sont jureurs, opiniâtres, vindicatifs, ivrognes, libertins. – Si je ne craignais pas de vous faire de la peine, je vous dirais simplement qu'ils suivent le che-min que vous leur avez tracé ; ils font ce qu'ils vous ont vu faire ; ils ont oublié vos leçons et vos belles remon-trances, mais ils se guident d'après votre conduite : et, pour couper encore plus court, ils vous ressemblent. Quoique vous pensiez peut-être que cela n'est pas, ce n'est pas moins la vérité. Convenons tous ensemble que, si les enfants n'ont point de religion, cela ne doit être attribué qu'aux parents ; et au jour du jugement le bon Dieu vous en fera convenir sans pouvoir trouver aucune excuse.
Re: Tome 1,2,3,4 des Sermons + Etre prêtre selon le curé d'Ars
Mais si vous n'avez pas tout à fait perdu la foi et la raison, vous voyez que presque tous les parents qui ont été bons chrétiens ont eu des enfants saints. En voulez-vous encore un exemple ? Ecoutez-moi un instant. II est rapporté dans l'histoire qu'il y avait, dans le Japon, un père et une mère qui, ayant embrassé la religion chré-tienne, étaient cruellement persécutés par les barbares. Ils attendaient chaque jour de souffrir le martyre. Ils avaient un petit enfant de neuf ou dix ans. Un jour, étant auprès du feu, le mari disait à sa femme : « Nous espérons bien que le bon Dieu nous fera la grâce de mourir mar-tyrs ; mais que va devenir notre pauvre enfant ? Peut--être qu'il va renoncer sa religion ; il nous faut redoubler nos prières afin que le bon Dieu lui donne la grâce et la force pour souffrir pour Jésus-Christ. » Pendant ce temps, l'enfant qui ne faisait semblant de rien, prit un morceau de fer et le mit au feu. Quand il l'eut bien fait rougir, il se tourna contre ses parents, se l'appliqua sur la main avec un courage incroyable. Le père tout étonné court lui ôter le fer, qui dans un instant, lui aurait brûlé toute la main : il lui demande ce qu'il prétendait faire : « Mon père, lui répond l'enfant, pour vous faire voir que j'espère d'avoir la force de souffrir aussi bien que vous, avec la grâce du bon Dieu. » Ce bon père embrasse son enfant en voyant de si bonnes dispositions dans son pauvre petit. Heureuse récompense, M.F., des soins d'une bonne éducation qu'ils avaient donnée à leur enfant. Oui, M.F., dès qu'un enfant est baptisé, quelques mauvais pen-chants qu'il ait, nous sommes sûrs que si les parents veulent lui donner les soins que le bon Dieu veut, ils en feront un saint. Je vous répéterai toujours que, si vos enfants n'ont point de religion, cela ne vient que de votre faute seule, et que la damnation de vos pauvres enfants ne doit être attribuée qu'à votre négligence ou à votre ignorance, et pas à une autre cause.
Voici un exemple qui va vous montrer que si la négligence ou l'ignorance perd tant d'enfants, vous verrez aussi que les soins, la prière et les saintes ins-tructions les sauvent. Il est rapporté dans l'histoire que saint Jean , étant dans une ville, jeta les yeux sur un jeune homme dont le beau physique l'avait frappé ; puis il se tourna contre l'évêque du lieu, lui disant : « Je vous recommande bien fort ce jeune homme, je vous le donne en présence de Jésus-Christ et de son Église comme un dépôt. L'évêque lui promit d'en avoir soin. Au bout de quelque temps saint Jean s'en retourna à Éphèse. Cet évêque prit le jeune homme que saint Jean lui avait confié, le nourrit, le garda chez lui, et, après l'avoir bien instruit, il le baptisa. Mais de peu à peu, il le négligea, et, lui ayant donné trop de liberté, il fré-quenta des jeunes gens qui le perdirent. Il alla si loin qu'il se mit avec une troupe de voleurs... A la fin, désespérant de son salut, il ne pensa plus qu'à se livrer à tout ce que son cœur put désirer. Ayant donc avec lui une troupe de jeunes étourdis comme lui, il forma une troupe de voleurs. Comme il était hardi, il se rendit leur chef et devint le plus violent et le plus cruel de tous. Quelque temps après, saint Jean passa dans la même ville ; il va trouver l'évêque en lui disant de lui rendre le dépôt qu'il lui avait confié. L'évêque ne pensant plus à ce jeune homme crut qu'on lui demandait quelque dépôt qu'on lui avait confié. Le voyant embarrassé, il lui dit : « Ce jeune homme que je vous ai laissé lorsque je partis, qu'en avez-vous fait ? qu'est-il devenu ? » Alors l'évêque, baissant les yeux, lui dit avec un profond soupir et avec larmes qu'il était mort. « Et comment, lui dit saint Jean, de quelle mort ? » « Il est mort à Dieu, répondit l'évêque, car il est devenu un méchant, un perdu ; et, pour tout vous dire, il est un voleur qui, maintenant, au lieu d'être dans l'église comme autre-fois, roule dans les montagnes, où il demeure avec une troupe qui, comme lui, égorge les gens pour les voler. » Saint Jean, entendant ces paroles, déchire ses habits ; puis, jetant un profond soupir et se frappant la tête, il dit à l'évêque : « Oui, certainement, j'ai laissé en votre personne un fidèle gardien de l'âme de votre frère ! Qu'on m'amène un cheval et qu'on me donne un guide. » Aussitôt il sortit de l'église, monte ce cheval et court vers l'endroit qu'on lui avait indiqué. A son arrivée, les sentinelles des voleurs coururent pour se saisir de lui. Il ne s'enfuit point. « Montrez-moi, leur dit-il, à votre capitaine. » On le mena vers ce jeune homme qui l'attendait d'abord les armes à la main. Mais aussitôt qu'il reconnut saint Jean qui venait à lui, la honte l'obligea de s'enfuir. Mais le saint lui cria : « Mon fils, pourquoi fuyez-vous votre père, un homme vieux et sans armes ? Ayez pitié de moi, ne craignez point ; il y a encore espérance pour votre salut ; je répondrai pour vous à Jésus-Christ. S'il est nécessaire, je souffrirais volontiers la mort pour vous comme je la souffrirai pour vous tous ensemble ; je donnerais mon âme pour la vôtre. Mon fils, arrêtez, et croyez que c'est Jésus--Christ qui m'envoie vers vous. » Le jeune homme, en-tendant parler de la sorte saint Jean, s'arrêta d'abord, tenant les yeux fixés en terre ; ensuite, il rompit ses armes, et, saisi de frayeur, il pleura amèrement. Comme il vit que le saint vieillard approchait, il alla l'embras-ser ; ses larmes lui servaient bien de baptême. Seule-ment, il cachait sa main droite qui avait été souillée de tant de crimes. Alors saint Jean lui promit par serment qu'il se chargeait de ses péchés auprès de Jésus-Christ ; puis, se mettant à genoux devant lui, il lui baisa la main droite comme ayant été lavée par ses larmes. I1 le ramena à l'église et ne se sépara plus de lui avant qu'il ne l'eût remis et bien affermi dans la voie du salut. Il fut, par la suite, un grand saint qui a gagné bien des âmes par ses prières, ses instructions et ses bons exemples.
Dites-moi, pères et mères, vos enfants que vous voyez si tranquillement se damner, en disant que vous n'en pouvez pas davantage, ont-ils été si loin que ce jeune homme que saint Jean va chercher ? Avez-vous tout quitté pour leur courir après, comme fit saint Jean ? Avez-vous exposé votre vie pour sauver leurs âmes ? Avez-vous versé des larmes amères, comme fit ce saint, afin d'obtenir leur pardon ? Vous êtes-vous engagés à répondre pour eux au tribunal de Jésus-Christ ? Vous ne pouvez pas, dites-vous, faire servir le bon Dieu à vos enfants ; mais, dites-moi, mon père et ma mère, où sont donc vos efforts ? où sont vos larmes ? où sont vos pénitences et vos aumônes ? Vous ne pouvez pas les rendre sages, mais vous n'en savez rien ; vous n'avez pas essayé. Allez, malheureux, le bon Dieu vous attend, et il vous fera bien voir que si vous aviez voulu vous les auriez sauvés et que leur perte ne vient que de vous.
Je crois, M.F., que je me suis bien trompé en vous faisant cette instruction qui tend à vous faire comprendre la grandeur de vos devoirs envers vos enfants, et combien vous êtes obligés de travailler à leur salut : il fallait plutôt, commencer à vous faire comprendre la nécessité où vous êtes de travailler à votre propre sanctification : et, une fois bien convaincus de la nécessité où vous êtes de vous sauver, l'on n'aurait pas grand'peine à vous faire con-naître le soin que vous devez prendre de l'âme de vos enfants Comment, en effet, vous pouvoir convaincre de faire pour vos enfants ce que vous ne faites pas pour vous mêmes ? Si vos enfants vous voyaient travailler avec empressement à leur salut, ils se diraient avec rai-son : « Mon père et ma mère font comme les charlatans qui veulent faire croire des choses qu'ils ne croient pas. » Nous voyons tous les jours que les parents qui laissent si tranquillement perdre leurs enfants, se perdent eux aussi tranquillement. O mon Dieu, quel malheur pour ces pauvres enfants de naître de parents sans reli-gion ! Leur réprobation est presque certaine sans un miracle qui arrive bien rarement. Si je ne craignais pas de vous faire de la peine, je vous montrerais dans des enfants toute l'iniquité de leurs parents et dans d'autres toutes leurs vertus, sans rien me tromper. Cependant je ne veux pas le faire : je préfère prier le bon Dieu qu'il change vos cœurs, afin que vous travailliez à changer ceux de vos enfants. Qu'il serait beau, nous dit un Père de l'Eglise, si l'on voyait de temps en temps un père ou une mère avec un crucifix à la main montrer à ses petits enfants ce que Jésus-Christ a souffert pour les sauver, combien le péché est détestable ! Que ces enfants seraient bientôt changés ! Mais, hélas ! dans le temps où nous vivons, les parents auraient bien honte de le faire. Cepen-dant rien ne touche si vivement un cœur que ce langage. Et, en effet, nous lisons dans l'histoire qu'il y avait un père qui était veuf et n'avait qu'une petite fille. Un jour, cher-chant quelque chose dans l'armoire de sa mère défunte, la petite trouva par hasard un crucifix : elle le porta à son père en lui disant : « Mon père, qu'est-ce que c'est que cela ? » – «Mon enfant, lui dit son père, c'est un cru-cifix. » – « Mais, lui dit sa fille, que veut dire un cru-cifix ? » – « Je vous l'ai bien appris : vous l'avez donc déjà oublié ? Eh bien ! je vais vous l'apprendre : c'est une représentation de Jésus-Christ crucifié. » – « Mais, dit l'enfant, que veut dire la représentation de Jésus--Christ crucifié ? » – « Eh bien ! écoutez-moi ; vous savez que le Fils de Dieu est descendu du Ciel, qu'il s'est fait homme pour nous sauver, que sans lui nous serions tous perdus, qu'il a passé toute sa vie dans la pénitence à pleu-rer nos péchés ; il a appris aux hommes ce qu'il fallait faire pour gagner le ciel, qui est un bonheur qu'il nous a mérité par toutes ses souffrances. Les juifs l'ont traité cruellement, l'ont fait mourir sur une croix ; ils l'ont couronné d'épines, ils l'ont flagellé, ils l'ont élevé sur une croix, et il est mort dans ce supplice, où il a répandu tout son sang avant de mourir. Il a demandé pardon pour nous. Eh bien ! mon enfant, lui dit le père, voilà ce que ce crucifix vous rappelle. » Le père, voyant que son enfant écoutait avec beaucoup d'attention, lui dit : « Vous savez, mon enfant, ce qui a traité Jésus-Christ de la sorte ? » – « Non, lui répondit l'enfant. » – « Hélas ! mon enfant, ce sont nos péchés et ceux de tout le monde qui sont la cause de toutes ses souffrances et de sa mort. Souvenez--vous, mon enfant, que toutes les fois que vous avez péché vous avez fait souffrir Jésus-Christ, vous avez aidé à le faire mourir. » Voyant que les larmes coulaient des yeux de son enfant, il ajouta : « Ah ! mon enfant, voudrez-vous encore continuer d'affliger Jésus-Christ ? Ne voudrez--vous jamais l'aimer ? » Cette pauvre enfant, ne pouvant plus se contenir, tant son tendre cœur était attendri au récit des souffrances de Jésus-Christ, prend le crucifix d'entre les mains de son père en pleurant à chaudes lar-mes : « Ah ! mon père, en grâce, donne-moi ce crucifix. » Elle court s'enfermer dans sa chambre, se jette aux pieds de son crucifix, l'embrasse et l'arrose de ses larmes. « Ah ! mon Dieu, s'écrie cette pauvre enfant, c'est donc moi qui vous ai tant fait souffrir ! Mon Dieu, pardonnez--moi, s'il vous plaît. Ah ! si j'avais su que je vous eusse tant fait de mal, jamais je n'aurais fait ce que j'ai fait. Mon Dieu, pardonnez-moi mon ignorance. » Mais ce ne fut point pour un moment : la grâce du bon Dieu opéra un tel changement dans ce petit cœur qu'elle devint un modèle de vertu pour toute la paroisse. Dès qu'elle avait quelque peine, vite elle se jetait aux pieds de son cru-cifix, en lui disant : « Mon Dieu, comment oserais-je me plaindre, en voyant ce que vous avez souffert pour moi ? » Un jour qu'elle fut bien maltraitée par un brutal qui l'avait prise pour une autre, quand elle fut sortie d'entre ses mains elle alla se prosterner devant son crucifix, en lui disant : « Mon Dieu, lorsque vous étiez sur la croix vous avez bien pardonné à ceux qui vous ont fait mourir ; eh bien ! mon Dieu, je pardonne de bon cœur à cet homme qui vient de me maltraiter. Pour lui montrer que je ne lui veux point de mal, je voudrais avoir l'occasion de lui rendre quelque service : en effet, au bout de quel-que temps cet homme tomba, la petite dit à son père, qui ne savait pas qu'il l'avait battue, s'il voulait lui donner quelque chose pour porter à cet homme ; il lui accorda ce qu'elle lui demanda. « Tenez, lui dit-elle, voilà ce que je vous apporte : je n'ai pas dit à mon père ce que vous m'aviez fait, crainte de... » Cet homme, voyant la charité de cette petite, se mit à pleurer ; il la remercia bien et lui demanda pardon. Un jour qu'elle vit une de ses voi-sines qui se désolait de ce que son mari mangeait tout ce qu'il avait dans les cabarets, elle lui dit : « Ma chère voi-sine, vous n'avez donc point de crucifix dans votre mai-son ? » – « Mais si, j'en ai un. » – «Mais si vous en avez un, il ne sert donc de rien ? Allez, ma chère amie, à ses pieds, et là vous apprendrez à souffrir pour un Dieu qui a tant souffert pour nous sans se plaindre, quoiqu'il fût innocent. » Ces paroles firent tant d'impression sur le cœur de cette femme qu'elle devint un modèle de patience ; on ne l'entendit plus se plaindre et, bien plus, elle eut le bonheur de convertir son mari. Mais pour la jeune fille, elle eut le bonheur de mourir de la mort des saints.
Eh bien ! qui lui procura cette grâce ? n'est-ce pas les instructions que son père lui donna, surtout en lui fai-sant le récit des souffrances de Jésus-Christ ? Hélas ! M.F., combien parmi ceux qui ont des enfants de dix--sept ou vingt ans, à qui ils n'ont jamais dit un mot des souffrances de Jésus-Christ ! Hélas ! peut-être d'autres qui n'ont point de crucifix dans leur maison, ou s'ils en ont, ils sont ensevelis dans la poussière ou dans les araignées ; ils ont bien soin de nettoyer leurs souliers tous les samedis, mais ils ne font point de cas de laisser l'image de leur Sauveur parmi les équevilles . Mon Dieu, est-ce là des chrétiens ? et est-ce là des pères, des mères que le bon Dieu n'a mis sur la terre que pour conduire des enfants au ciel ? Qui pourra jamais assez pleurer la grandeur de leur aveuglement ? Hélas ! que de pauvres enfants damnés pour l'éternité ! N'est-ce pas, M.F., que si vos enfants n'ont point de religion, c'est parce que vous ne voulez pas vous donner la peine de les instruire ni de leur donner bons exemples ?
Voici un exemple qui va vous montrer que si la négligence ou l'ignorance perd tant d'enfants, vous verrez aussi que les soins, la prière et les saintes ins-tructions les sauvent. Il est rapporté dans l'histoire que saint Jean , étant dans une ville, jeta les yeux sur un jeune homme dont le beau physique l'avait frappé ; puis il se tourna contre l'évêque du lieu, lui disant : « Je vous recommande bien fort ce jeune homme, je vous le donne en présence de Jésus-Christ et de son Église comme un dépôt. L'évêque lui promit d'en avoir soin. Au bout de quelque temps saint Jean s'en retourna à Éphèse. Cet évêque prit le jeune homme que saint Jean lui avait confié, le nourrit, le garda chez lui, et, après l'avoir bien instruit, il le baptisa. Mais de peu à peu, il le négligea, et, lui ayant donné trop de liberté, il fré-quenta des jeunes gens qui le perdirent. Il alla si loin qu'il se mit avec une troupe de voleurs... A la fin, désespérant de son salut, il ne pensa plus qu'à se livrer à tout ce que son cœur put désirer. Ayant donc avec lui une troupe de jeunes étourdis comme lui, il forma une troupe de voleurs. Comme il était hardi, il se rendit leur chef et devint le plus violent et le plus cruel de tous. Quelque temps après, saint Jean passa dans la même ville ; il va trouver l'évêque en lui disant de lui rendre le dépôt qu'il lui avait confié. L'évêque ne pensant plus à ce jeune homme crut qu'on lui demandait quelque dépôt qu'on lui avait confié. Le voyant embarrassé, il lui dit : « Ce jeune homme que je vous ai laissé lorsque je partis, qu'en avez-vous fait ? qu'est-il devenu ? » Alors l'évêque, baissant les yeux, lui dit avec un profond soupir et avec larmes qu'il était mort. « Et comment, lui dit saint Jean, de quelle mort ? » « Il est mort à Dieu, répondit l'évêque, car il est devenu un méchant, un perdu ; et, pour tout vous dire, il est un voleur qui, maintenant, au lieu d'être dans l'église comme autre-fois, roule dans les montagnes, où il demeure avec une troupe qui, comme lui, égorge les gens pour les voler. » Saint Jean, entendant ces paroles, déchire ses habits ; puis, jetant un profond soupir et se frappant la tête, il dit à l'évêque : « Oui, certainement, j'ai laissé en votre personne un fidèle gardien de l'âme de votre frère ! Qu'on m'amène un cheval et qu'on me donne un guide. » Aussitôt il sortit de l'église, monte ce cheval et court vers l'endroit qu'on lui avait indiqué. A son arrivée, les sentinelles des voleurs coururent pour se saisir de lui. Il ne s'enfuit point. « Montrez-moi, leur dit-il, à votre capitaine. » On le mena vers ce jeune homme qui l'attendait d'abord les armes à la main. Mais aussitôt qu'il reconnut saint Jean qui venait à lui, la honte l'obligea de s'enfuir. Mais le saint lui cria : « Mon fils, pourquoi fuyez-vous votre père, un homme vieux et sans armes ? Ayez pitié de moi, ne craignez point ; il y a encore espérance pour votre salut ; je répondrai pour vous à Jésus-Christ. S'il est nécessaire, je souffrirais volontiers la mort pour vous comme je la souffrirai pour vous tous ensemble ; je donnerais mon âme pour la vôtre. Mon fils, arrêtez, et croyez que c'est Jésus--Christ qui m'envoie vers vous. » Le jeune homme, en-tendant parler de la sorte saint Jean, s'arrêta d'abord, tenant les yeux fixés en terre ; ensuite, il rompit ses armes, et, saisi de frayeur, il pleura amèrement. Comme il vit que le saint vieillard approchait, il alla l'embras-ser ; ses larmes lui servaient bien de baptême. Seule-ment, il cachait sa main droite qui avait été souillée de tant de crimes. Alors saint Jean lui promit par serment qu'il se chargeait de ses péchés auprès de Jésus-Christ ; puis, se mettant à genoux devant lui, il lui baisa la main droite comme ayant été lavée par ses larmes. I1 le ramena à l'église et ne se sépara plus de lui avant qu'il ne l'eût remis et bien affermi dans la voie du salut. Il fut, par la suite, un grand saint qui a gagné bien des âmes par ses prières, ses instructions et ses bons exemples.
Dites-moi, pères et mères, vos enfants que vous voyez si tranquillement se damner, en disant que vous n'en pouvez pas davantage, ont-ils été si loin que ce jeune homme que saint Jean va chercher ? Avez-vous tout quitté pour leur courir après, comme fit saint Jean ? Avez-vous exposé votre vie pour sauver leurs âmes ? Avez-vous versé des larmes amères, comme fit ce saint, afin d'obtenir leur pardon ? Vous êtes-vous engagés à répondre pour eux au tribunal de Jésus-Christ ? Vous ne pouvez pas, dites-vous, faire servir le bon Dieu à vos enfants ; mais, dites-moi, mon père et ma mère, où sont donc vos efforts ? où sont vos larmes ? où sont vos pénitences et vos aumônes ? Vous ne pouvez pas les rendre sages, mais vous n'en savez rien ; vous n'avez pas essayé. Allez, malheureux, le bon Dieu vous attend, et il vous fera bien voir que si vous aviez voulu vous les auriez sauvés et que leur perte ne vient que de vous.
Je crois, M.F., que je me suis bien trompé en vous faisant cette instruction qui tend à vous faire comprendre la grandeur de vos devoirs envers vos enfants, et combien vous êtes obligés de travailler à leur salut : il fallait plutôt, commencer à vous faire comprendre la nécessité où vous êtes de travailler à votre propre sanctification : et, une fois bien convaincus de la nécessité où vous êtes de vous sauver, l'on n'aurait pas grand'peine à vous faire con-naître le soin que vous devez prendre de l'âme de vos enfants Comment, en effet, vous pouvoir convaincre de faire pour vos enfants ce que vous ne faites pas pour vous mêmes ? Si vos enfants vous voyaient travailler avec empressement à leur salut, ils se diraient avec rai-son : « Mon père et ma mère font comme les charlatans qui veulent faire croire des choses qu'ils ne croient pas. » Nous voyons tous les jours que les parents qui laissent si tranquillement perdre leurs enfants, se perdent eux aussi tranquillement. O mon Dieu, quel malheur pour ces pauvres enfants de naître de parents sans reli-gion ! Leur réprobation est presque certaine sans un miracle qui arrive bien rarement. Si je ne craignais pas de vous faire de la peine, je vous montrerais dans des enfants toute l'iniquité de leurs parents et dans d'autres toutes leurs vertus, sans rien me tromper. Cependant je ne veux pas le faire : je préfère prier le bon Dieu qu'il change vos cœurs, afin que vous travailliez à changer ceux de vos enfants. Qu'il serait beau, nous dit un Père de l'Eglise, si l'on voyait de temps en temps un père ou une mère avec un crucifix à la main montrer à ses petits enfants ce que Jésus-Christ a souffert pour les sauver, combien le péché est détestable ! Que ces enfants seraient bientôt changés ! Mais, hélas ! dans le temps où nous vivons, les parents auraient bien honte de le faire. Cepen-dant rien ne touche si vivement un cœur que ce langage. Et, en effet, nous lisons dans l'histoire qu'il y avait un père qui était veuf et n'avait qu'une petite fille. Un jour, cher-chant quelque chose dans l'armoire de sa mère défunte, la petite trouva par hasard un crucifix : elle le porta à son père en lui disant : « Mon père, qu'est-ce que c'est que cela ? » – «Mon enfant, lui dit son père, c'est un cru-cifix. » – « Mais, lui dit sa fille, que veut dire un cru-cifix ? » – « Je vous l'ai bien appris : vous l'avez donc déjà oublié ? Eh bien ! je vais vous l'apprendre : c'est une représentation de Jésus-Christ crucifié. » – « Mais, dit l'enfant, que veut dire la représentation de Jésus--Christ crucifié ? » – « Eh bien ! écoutez-moi ; vous savez que le Fils de Dieu est descendu du Ciel, qu'il s'est fait homme pour nous sauver, que sans lui nous serions tous perdus, qu'il a passé toute sa vie dans la pénitence à pleu-rer nos péchés ; il a appris aux hommes ce qu'il fallait faire pour gagner le ciel, qui est un bonheur qu'il nous a mérité par toutes ses souffrances. Les juifs l'ont traité cruellement, l'ont fait mourir sur une croix ; ils l'ont couronné d'épines, ils l'ont flagellé, ils l'ont élevé sur une croix, et il est mort dans ce supplice, où il a répandu tout son sang avant de mourir. Il a demandé pardon pour nous. Eh bien ! mon enfant, lui dit le père, voilà ce que ce crucifix vous rappelle. » Le père, voyant que son enfant écoutait avec beaucoup d'attention, lui dit : « Vous savez, mon enfant, ce qui a traité Jésus-Christ de la sorte ? » – « Non, lui répondit l'enfant. » – « Hélas ! mon enfant, ce sont nos péchés et ceux de tout le monde qui sont la cause de toutes ses souffrances et de sa mort. Souvenez--vous, mon enfant, que toutes les fois que vous avez péché vous avez fait souffrir Jésus-Christ, vous avez aidé à le faire mourir. » Voyant que les larmes coulaient des yeux de son enfant, il ajouta : « Ah ! mon enfant, voudrez-vous encore continuer d'affliger Jésus-Christ ? Ne voudrez--vous jamais l'aimer ? » Cette pauvre enfant, ne pouvant plus se contenir, tant son tendre cœur était attendri au récit des souffrances de Jésus-Christ, prend le crucifix d'entre les mains de son père en pleurant à chaudes lar-mes : « Ah ! mon père, en grâce, donne-moi ce crucifix. » Elle court s'enfermer dans sa chambre, se jette aux pieds de son crucifix, l'embrasse et l'arrose de ses larmes. « Ah ! mon Dieu, s'écrie cette pauvre enfant, c'est donc moi qui vous ai tant fait souffrir ! Mon Dieu, pardonnez--moi, s'il vous plaît. Ah ! si j'avais su que je vous eusse tant fait de mal, jamais je n'aurais fait ce que j'ai fait. Mon Dieu, pardonnez-moi mon ignorance. » Mais ce ne fut point pour un moment : la grâce du bon Dieu opéra un tel changement dans ce petit cœur qu'elle devint un modèle de vertu pour toute la paroisse. Dès qu'elle avait quelque peine, vite elle se jetait aux pieds de son cru-cifix, en lui disant : « Mon Dieu, comment oserais-je me plaindre, en voyant ce que vous avez souffert pour moi ? » Un jour qu'elle fut bien maltraitée par un brutal qui l'avait prise pour une autre, quand elle fut sortie d'entre ses mains elle alla se prosterner devant son crucifix, en lui disant : « Mon Dieu, lorsque vous étiez sur la croix vous avez bien pardonné à ceux qui vous ont fait mourir ; eh bien ! mon Dieu, je pardonne de bon cœur à cet homme qui vient de me maltraiter. Pour lui montrer que je ne lui veux point de mal, je voudrais avoir l'occasion de lui rendre quelque service : en effet, au bout de quel-que temps cet homme tomba, la petite dit à son père, qui ne savait pas qu'il l'avait battue, s'il voulait lui donner quelque chose pour porter à cet homme ; il lui accorda ce qu'elle lui demanda. « Tenez, lui dit-elle, voilà ce que je vous apporte : je n'ai pas dit à mon père ce que vous m'aviez fait, crainte de... » Cet homme, voyant la charité de cette petite, se mit à pleurer ; il la remercia bien et lui demanda pardon. Un jour qu'elle vit une de ses voi-sines qui se désolait de ce que son mari mangeait tout ce qu'il avait dans les cabarets, elle lui dit : « Ma chère voi-sine, vous n'avez donc point de crucifix dans votre mai-son ? » – « Mais si, j'en ai un. » – «Mais si vous en avez un, il ne sert donc de rien ? Allez, ma chère amie, à ses pieds, et là vous apprendrez à souffrir pour un Dieu qui a tant souffert pour nous sans se plaindre, quoiqu'il fût innocent. » Ces paroles firent tant d'impression sur le cœur de cette femme qu'elle devint un modèle de patience ; on ne l'entendit plus se plaindre et, bien plus, elle eut le bonheur de convertir son mari. Mais pour la jeune fille, elle eut le bonheur de mourir de la mort des saints.
Eh bien ! qui lui procura cette grâce ? n'est-ce pas les instructions que son père lui donna, surtout en lui fai-sant le récit des souffrances de Jésus-Christ ? Hélas ! M.F., combien parmi ceux qui ont des enfants de dix--sept ou vingt ans, à qui ils n'ont jamais dit un mot des souffrances de Jésus-Christ ! Hélas ! peut-être d'autres qui n'ont point de crucifix dans leur maison, ou s'ils en ont, ils sont ensevelis dans la poussière ou dans les araignées ; ils ont bien soin de nettoyer leurs souliers tous les samedis, mais ils ne font point de cas de laisser l'image de leur Sauveur parmi les équevilles . Mon Dieu, est-ce là des chrétiens ? et est-ce là des pères, des mères que le bon Dieu n'a mis sur la terre que pour conduire des enfants au ciel ? Qui pourra jamais assez pleurer la grandeur de leur aveuglement ? Hélas ! que de pauvres enfants damnés pour l'éternité ! N'est-ce pas, M.F., que si vos enfants n'ont point de religion, c'est parce que vous ne voulez pas vous donner la peine de les instruire ni de leur donner bons exemples ?
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