LOUIS XVI; Du disciple de Fénelon au Roi Martyr
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LOUIS XVI; Du disciple de Fénelon au Roi Martyr
LOUIS XVI; Du disciple de Fénelon au Roi Martyr.
L’historiographie officielle nous offre des trois derniers Rois de
l’Ancien Régime une caricature très éloignée de la réalité. Ainsi, Louis
XVI nous fut longtemps présenté comme un bon gros bonhomme adonné à la
chasse et à la serrurerie que sa femme menait par le bout du nez.
L’étude des sources nous donne de lui un portrait très différent.
Louis XVI était au physique un colosse, d’une force prodigieuse,
menant une vie très équilibrée, mêlant une activité sportive éprouvante
(la chasse), une activité manuelle et une activité intellectuelle très
importante.
Louis XVI était un intellectuel, homme de cabinet et de dossiers,
comme Louis XV, parlant plusieurs langues, passionné d’histoire, de
géographie, de sciences. L’on sait, par exemple, qu’il prépara
soigneusement les voyages d’exploration de La Pérouse.
Intellectuel, Louis XVI était imprégné d’une éducation fénelonienne
donnée par son gouverneur, le Duc de La Vauguyon et pas ses professeurs,
en particulier Jacob Nicolas Moreau. Cette éducation avait pour ambition
d’en faire un monarque exemplaire par ses vertus, connaissant
parfaitement son royaume afin de réformer les abus de l’administration.
Selon Fénelon, en effet, un bon gouvernement exige que le prince soit
bon.
Un
seul défaut à la cuirasse, mais il est de taille : Personne n’a
jamais appris à Louis XVI l’art de commander aux hommes. Au
contraire, Fénelon enseigne que la couronne est un fardeau pour celui
qui la ceint. De fait, tout sa vie, Louis XVI se plaignit du
« malheur d’être roi », confiant à
son « cher Malesherbes » démissionnaire du gouvernement en mai 1776 :
« Vous, au moins, vous pouvez partir ».
L’influence de Fénelon apparaît tout au long du règne, non seulement
dans l’attitude du Roi, mais dans ses choix politiques : Son souci de
l’opinion publique (dont nous savons grâce à Augustin Cochin à quel
point elle était manipulée par les sociétés de pensée), le conduisit, en
particulier en 1774, à rappeler les Parlements renvoyés par son
grand-père. Ce même souci l’encouragea à se lancer dans la très
dispendieuse guerre d’Indépendance américaine. Il le conduisit à
convoquer les Etats Généraux en 1788. En un mot, elle lui dicta ses plus
lourdes erreurs politiques.
Convaincu que le Roi et la Nation sont deux réalités différentes, Louis
XVI se montra beaucoup plus perméable aux idées nouvelles que son
grand-père, nommant au ministère des hommes des Lumières, tels que
Turgot, Malesherbes, Necker, Loménie de Brienne, Montmorin…
Il
y a là une tension entre modernité et tradition qui éclaire son
comportement lors des journées décisives de mai et juin 1789, au cours
desquelles, le premier, il qualifia, dès le mois de mai, les députés des
Etats de députés « de la Nation » et les Etats généraux d’ « Assemblée
nationale » !
Face à la Révolution, Louis XVI, qui, désormais, rejetait la
philosophie des Lumières, manifesta une très grande lucidité.
Ainsi, il avait parfaitement compris le caractère exceptionnel des
événements révolutionnaires et leur nature profondément subversive. Il
avait jaugé la puissance de l’idéologie des Lumières et du patriotisme
révolutionnaire. « Extrêmement subversives », ces forces l’étaient de
part leur « nature utopique », remarque le Pr. Jean de Viguerie. « Et
l’on sait que l’utopie détruit ce qui est pour affirmer ce qui n’est
pas, lui donnant l’apparence de l’être ». Louis XVI a estimé, dès lors,
le recours à la force inefficace, attendant que l’opinion ouvre les yeux
et comprenne que le bonheur ne viendra pas de la nouvelle constitution.
Inefficace, un tel recours à la force était d’ailleurs impossible tant
les idées révolutionnaires, diffusées par les loges, avaient gangrené
l’armée, polluant les rangs de la Maison militaire elle-même, comme le
montrèrent les journées de juillet et d’octobre 1789.
Le
regard porté par Louis XVI sur la Révolution s’affina davantage encore
grâce à la conversion qu’il connut, probablement fin 1790, début
1791, lors de la crise de la Constitution civile du Clergé.
Entendons nous bien, Louis XVI a toujours
été un bon chrétien, bon mari, bon père, bon maître. Pourtant, jusqu’en
1790, sa piété semblait moins fervente que celle de ses prédécesseurs,
et en particulier de Louis XV. Il semble que l’épreuve ait converti le
Roi en faisant de ce bon chrétien un véritable saint, puisant dans une
foi renouvelée la force d’aller au delà de lui-même.
L’évolution du Roi face à la Constitution civile du Clergé entre juin
1790 et juin 1792 illustre cette conversion.
Ainsi, dans un premier temps, sur les conseils du Haut Clergé, il
manifesta face à la Constitution civile du Clergé une attitude
conciliante, cherchant à convaincre Rome de « baptiser la
Constitution civile du Clergé ». En dépit des exhortations très
fermes du pape Pie VI, transmises par une lettre du 9 juillet 1790, il
promulgua la loi le 26 août suivant.
Quelques mois plus tard, le 26 décembre, il signa le décret enjoignant
aux prêtres de prêter serment à la Constitution civile du Clergé.
Pourtant, l’on sentait déjà que la plume était beaucoup plus hésitante,
et que le Roi n’avait consenti à cette nouvelle disposition qu’à
contre-cœur, sous la pression de plusieurs prélats (lesquels
s’empressèrent d’ailleurs de refuser ce serment).
En avril 1791, à Pâques, Louis XVI refusa
de recevoir la communion des mains d’un prêtre jureur, et, l’agitation
organisée à cette occasion par les révolutionnaires, le décida à partir
pour Montmédy retrouver sa liberté. Tant qu’il demeura sur le trône, il
fut le dernier rempart protégeant le clergé réfractaire contre les
persécutions révolutionnaires, comme en témoigne son attitude courageuse
face à la populace le 20 juin 1792.
Les écrits se mêlent aux actes politiques pour témoigner de la
conversion du Roi, écrits d’une grande beauté spirituelle, qu’il
s’agisse de son Testament, rédigé le jour de Noël 1792, ou
du Vœu de consécration de la France au Sacré-Cœur, texte
écrit vraisemblablement quelques semaines avant la journée du 10 août et
dispersé par les Eudistes, en particulier en Vendée où il devait
encourager les paysans à choisir le sacré-cœur pour emblème.
Dans ces deux textes, Louis XVI prononça un
acte de foi, d’espérance et de charité. Il demanda pardon à Dieu pour
les erreurs qu’il avait commises, faisant explicitement référence à son
attitude face à la Constitution civile du Clergé. A l’imitation du
Christ en Croix, il pardonna à ses persécuteurs.
Il
confia son royaume à la miséricorde divine et offre sa vie en réparation
des offenses infligées à Dieu par son peuple. Depuis 1791, le Roi ne
voyait d’autre salut qu’en Dieu ; pour racheter les fautes de son
peuple, il se prépara au sacrifice. Cette volonté de sacrifice et
d’expiation anima profondément Louis XVI, comme le manifestèrent ses
dernières paroles : « Je pardonne aux auteurs de ma mort, je prie
Dieu que mon sang ne retombe sur la France… ». « Il domine aussi son
malheur par son sacrifice » écrit le Pr. de Viguerie, qui poursuit :
« En offrant sa vie en sacrifice à l’exemple du Rédempteur, il réalise
parfaitement la vocation royale exprimée par son sacre (…) On savait que
le rite du roi exposé signifiait l’abnégation. Mais on ignorait qu’il
signifiait aussi le sacrifice total et jusqu’au sacrifice de la vie.
C’est le mérite de Louis XVI de l’avoir révélé ».
Ce
sacrifice coiffa le chef du Roi de France d’une nouvelle couronne, celle
du Martyre.
Professeur Philippe Pichot-Bravard.
L’historiographie officielle nous offre des trois derniers Rois de
l’Ancien Régime une caricature très éloignée de la réalité. Ainsi, Louis
XVI nous fut longtemps présenté comme un bon gros bonhomme adonné à la
chasse et à la serrurerie que sa femme menait par le bout du nez.
L’étude des sources nous donne de lui un portrait très différent.
Louis XVI était au physique un colosse, d’une force prodigieuse,
menant une vie très équilibrée, mêlant une activité sportive éprouvante
(la chasse), une activité manuelle et une activité intellectuelle très
importante.
Louis XVI était un intellectuel, homme de cabinet et de dossiers,
comme Louis XV, parlant plusieurs langues, passionné d’histoire, de
géographie, de sciences. L’on sait, par exemple, qu’il prépara
soigneusement les voyages d’exploration de La Pérouse.
Intellectuel, Louis XVI était imprégné d’une éducation fénelonienne
donnée par son gouverneur, le Duc de La Vauguyon et pas ses professeurs,
en particulier Jacob Nicolas Moreau. Cette éducation avait pour ambition
d’en faire un monarque exemplaire par ses vertus, connaissant
parfaitement son royaume afin de réformer les abus de l’administration.
Selon Fénelon, en effet, un bon gouvernement exige que le prince soit
bon.
Un
seul défaut à la cuirasse, mais il est de taille : Personne n’a
jamais appris à Louis XVI l’art de commander aux hommes. Au
contraire, Fénelon enseigne que la couronne est un fardeau pour celui
qui la ceint. De fait, tout sa vie, Louis XVI se plaignit du
« malheur d’être roi », confiant à
son « cher Malesherbes » démissionnaire du gouvernement en mai 1776 :
« Vous, au moins, vous pouvez partir ».
L’influence de Fénelon apparaît tout au long du règne, non seulement
dans l’attitude du Roi, mais dans ses choix politiques : Son souci de
l’opinion publique (dont nous savons grâce à Augustin Cochin à quel
point elle était manipulée par les sociétés de pensée), le conduisit, en
particulier en 1774, à rappeler les Parlements renvoyés par son
grand-père. Ce même souci l’encouragea à se lancer dans la très
dispendieuse guerre d’Indépendance américaine. Il le conduisit à
convoquer les Etats Généraux en 1788. En un mot, elle lui dicta ses plus
lourdes erreurs politiques.
Convaincu que le Roi et la Nation sont deux réalités différentes, Louis
XVI se montra beaucoup plus perméable aux idées nouvelles que son
grand-père, nommant au ministère des hommes des Lumières, tels que
Turgot, Malesherbes, Necker, Loménie de Brienne, Montmorin…
Il
y a là une tension entre modernité et tradition qui éclaire son
comportement lors des journées décisives de mai et juin 1789, au cours
desquelles, le premier, il qualifia, dès le mois de mai, les députés des
Etats de députés « de la Nation » et les Etats généraux d’ « Assemblée
nationale » !
Face à la Révolution, Louis XVI, qui, désormais, rejetait la
philosophie des Lumières, manifesta une très grande lucidité.
Ainsi, il avait parfaitement compris le caractère exceptionnel des
événements révolutionnaires et leur nature profondément subversive. Il
avait jaugé la puissance de l’idéologie des Lumières et du patriotisme
révolutionnaire. « Extrêmement subversives », ces forces l’étaient de
part leur « nature utopique », remarque le Pr. Jean de Viguerie. « Et
l’on sait que l’utopie détruit ce qui est pour affirmer ce qui n’est
pas, lui donnant l’apparence de l’être ». Louis XVI a estimé, dès lors,
le recours à la force inefficace, attendant que l’opinion ouvre les yeux
et comprenne que le bonheur ne viendra pas de la nouvelle constitution.
Inefficace, un tel recours à la force était d’ailleurs impossible tant
les idées révolutionnaires, diffusées par les loges, avaient gangrené
l’armée, polluant les rangs de la Maison militaire elle-même, comme le
montrèrent les journées de juillet et d’octobre 1789.
Le
regard porté par Louis XVI sur la Révolution s’affina davantage encore
grâce à la conversion qu’il connut, probablement fin 1790, début
1791, lors de la crise de la Constitution civile du Clergé.
Entendons nous bien, Louis XVI a toujours
été un bon chrétien, bon mari, bon père, bon maître. Pourtant, jusqu’en
1790, sa piété semblait moins fervente que celle de ses prédécesseurs,
et en particulier de Louis XV. Il semble que l’épreuve ait converti le
Roi en faisant de ce bon chrétien un véritable saint, puisant dans une
foi renouvelée la force d’aller au delà de lui-même.
L’évolution du Roi face à la Constitution civile du Clergé entre juin
1790 et juin 1792 illustre cette conversion.
Ainsi, dans un premier temps, sur les conseils du Haut Clergé, il
manifesta face à la Constitution civile du Clergé une attitude
conciliante, cherchant à convaincre Rome de « baptiser la
Constitution civile du Clergé ». En dépit des exhortations très
fermes du pape Pie VI, transmises par une lettre du 9 juillet 1790, il
promulgua la loi le 26 août suivant.
Quelques mois plus tard, le 26 décembre, il signa le décret enjoignant
aux prêtres de prêter serment à la Constitution civile du Clergé.
Pourtant, l’on sentait déjà que la plume était beaucoup plus hésitante,
et que le Roi n’avait consenti à cette nouvelle disposition qu’à
contre-cœur, sous la pression de plusieurs prélats (lesquels
s’empressèrent d’ailleurs de refuser ce serment).
En avril 1791, à Pâques, Louis XVI refusa
de recevoir la communion des mains d’un prêtre jureur, et, l’agitation
organisée à cette occasion par les révolutionnaires, le décida à partir
pour Montmédy retrouver sa liberté. Tant qu’il demeura sur le trône, il
fut le dernier rempart protégeant le clergé réfractaire contre les
persécutions révolutionnaires, comme en témoigne son attitude courageuse
face à la populace le 20 juin 1792.
Les écrits se mêlent aux actes politiques pour témoigner de la
conversion du Roi, écrits d’une grande beauté spirituelle, qu’il
s’agisse de son Testament, rédigé le jour de Noël 1792, ou
du Vœu de consécration de la France au Sacré-Cœur, texte
écrit vraisemblablement quelques semaines avant la journée du 10 août et
dispersé par les Eudistes, en particulier en Vendée où il devait
encourager les paysans à choisir le sacré-cœur pour emblème.
Dans ces deux textes, Louis XVI prononça un
acte de foi, d’espérance et de charité. Il demanda pardon à Dieu pour
les erreurs qu’il avait commises, faisant explicitement référence à son
attitude face à la Constitution civile du Clergé. A l’imitation du
Christ en Croix, il pardonna à ses persécuteurs.
Il
confia son royaume à la miséricorde divine et offre sa vie en réparation
des offenses infligées à Dieu par son peuple. Depuis 1791, le Roi ne
voyait d’autre salut qu’en Dieu ; pour racheter les fautes de son
peuple, il se prépara au sacrifice. Cette volonté de sacrifice et
d’expiation anima profondément Louis XVI, comme le manifestèrent ses
dernières paroles : « Je pardonne aux auteurs de ma mort, je prie
Dieu que mon sang ne retombe sur la France… ». « Il domine aussi son
malheur par son sacrifice » écrit le Pr. de Viguerie, qui poursuit :
« En offrant sa vie en sacrifice à l’exemple du Rédempteur, il réalise
parfaitement la vocation royale exprimée par son sacre (…) On savait que
le rite du roi exposé signifiait l’abnégation. Mais on ignorait qu’il
signifiait aussi le sacrifice total et jusqu’au sacrifice de la vie.
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