Poésie - Sainte Anne et la nuit

par **Gaëlle** Jeu 7 Oct 2010 - 21:45

SAINTE ANNE ET LA NUIT

Sainte Anne de la nuit, tu fermes les paupières
Pour les rouvrir sur l’aube éclatante d’oiseaux
Tu roules dans le temps, sainte Anne prisonnière
Moins de nos simples cœurs que du ciel des berceaux
Sainte Anne de la nuit, le jour fuit de tes lèvres
Tu vogues sur la mer, sainte Anne tu t’éveilles
Sainte Anne de l’espace et sainte Anne des eaux
Dans une goutte d’ombre où Dieu trouve ses ailes.

J’étais l’enfant, je n’avais pas de livre
Et je captais le monde en mon miroir
J’étais l’oiseau, mais je n’étais pas libre
J’étais le vent, nul ne pouvait me voir
Ah, je chantais la gloire d’un royaume
Où toute peur mourait sous le soleil
Je suis de nuit et quand j’ouvre mes paumes
C’est pour y voir un monstre à mon réveil.

Sainte Anne de la nuit, si ton mari te frappe
Son bras est un fléau s’abattant sur les blés
Le bon grain jaillira dans toutes les Bretagnes
Et ce sera l’étoile au front du nouveau-né.
Sainte Anne de la nuit, jeune fille et grand-mère
Offerte à tous les vents, sainte Anne mon pardon
Je vivrai de ta voix dans toutes les tempêtes
Et je verrai s’ouvrir les mondes sur ton nom.

Je parle au nom de tous les morts de terre
Et je dis ciel aux destructeurs de blés
Je dis sainte Anne et sainte Anne me baigne
De plus d’amour qu’il n’en fut dans l’été
Je parle au nom des hommes, des abîmes
De tout regret s’échappant de mes mains
Je reste seul dans la ville où demain
L’homme sur l’homme ira jeter ses crimes.

Sainte Anne de la nuit, qu’y puis-je si les arbres
Ne donnent plus de fruits, sainte Anne si les coups
Ne donnent que la mort. Sur la terre sainte Anne
Les forêts de l’hiver ne gardent plus les loups
Sainte Anne, dans ce temps, je rêve d’un village
Où les vieilles s’en vont te porter des rameaux
Sainte Anne de la nuit, tu protèges, tu gardes,
Tous les porteurs de Christ et les hommes nouveaux.

Ce poème a été écrit en 1956 sur la demande de Charles Le Quintrec auteur du livre : « Sainte Anne d’Arvor ou la grâce de la Bretagne. »

Hannah

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Lilia non laborant neque nent