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Théologie Morale

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Message par Lotfi Sam 29 Sep 2012 - 2:21

L'Espérance
Michel Labourdette op (année 1959 - 1960)
Première partie du cours concernant les vertus théologales affectives. Secunda-Secundae q. 17-22


PÉCHÉS CONTRAIRES À L’ESPÉRANCE


Introduction

Les péchés contraires à la foi, et en particulier l'infidélité en ses diverses formes, ont offert à notre étude un vaste domaine et des problèmes de première grandeur : toucher à la foi, c'est remettre tout en question. Il peut y avoir, nous l'avons dit, des péchés actuellement plus graves, d'une malice plus entière, p.ex. la haine de Dieu ; mais il n'y en a pas, si on peut dire, de plus « radicaux », de plus totalement destructeurs, et nous avons vu jusqu'à quel enténèbrement, quel aveuglement intérieur, ils peuvent conduire.

Avec l'espérance, et les péchés qui se commettent contre elle, nous sommes dans un autre domaine, qui est, par un côté, de moindre portée, mais où on pourrait aussi arriver à l’irréparable. L’étude que nous avons à en faire est plus simple et sera beaucoup plus rapide mais il ne faudrait pas en méconnaître la profondeur.

1. Il y aura d'abord toujours, pour le mot même de péché, cette sorte de coefficient général, que nous sommes dans l'ordre théologal. Pour l'infidélité, il a suffi de la signaler, c'était patent. Ici, il faudra y insister, parce que les péchés dont nous allons parler se réalisent aussi au plan de la vie morale, de la vie humaine, par rapport à cette espérance de type moral qu'on appelle la magnanimité. Or, entre ces deux sortes d'espérance, et par suite entre les péchés qui s’opposent à chacune d'elles il y a une différence d'ordre. C'est surtout ici que S. Thomas va mettre en lumière le caractère propre de tout péché anti-théologal. Quand nous l'aurons compris, nous pourrons dire, ceteris paribus, qu’un péché contre l'espérance est de soi moins grave qu'un péché contre la charité, ou qu'un péché contre la foi ; nous ne risquerons pas de méconnaître qu'il reste très grave et toujours absolument plus grave (génétiquement et objectivement parlant) que tout péché contraire aux vertus morales.

D'où vient cette gravité globale à tout ce qui est anti-théologal ? S. Thomas la place en ceci ; alors que, dans les autres péchés, l’aversion du bien immuable est conséquente, non voulue comme telle par le pécheur qui se porte simplement à un bien créé, ici elle entre dans l'objet même, elle est forcément atteinte par l'intention, elle a un véritable primat.

Il faut bien comprendre ces formules.

2. Je commence par résumer quelques notions que nous avons développées l'année dernière.

En étudiant le péché en général, nous avons fait abstraction de distinctions ultérieures qui séparent diverses catégories de péchés. Nous avons réduit le péché à ses termes les plus simples, à sa structure la plus essentielle.

a) Nous avons distingué dans son essence morale (laissons de côté l'acte physique, qui est sujet de la moralité) la tendance positive à un objet moralement mauvais (c'est-à-dire opposé à la loi éternelle) et la privation qui s'en suit, en laquelle le péché, déjà formellement constitué comme acte humain, s'accomplit dans l'ordre du mal comme tel. La spécification du péché se prend de son objet (qui est sa fin prochaine, finis operis), c'est-à-dire de ce à quoi se porte l'acte libre et conscient.

La gravité objective d'un péché provient de l'opposition plus ou moins grande de son objet à la loi morale, du plus ou moins grand éloignement par rapport à elle. Il y a là une privation de bonté qui ne peut jamais être totale, sans quoi il n'y aurait même plus d'acte humain. L'effort du moraliste est d'apprécier cette distance, qui varie avec chaque espèce de péché et qui est un certain type d'opposition à la règle des mœurs. Cette quantification vient ainsi de l'objet lui-même, considéré dans son rapport avec la loi morale.

La considération de la gravité du péché en entraîne une autre, différente, mais voisine, et qui a beaucoup d'importance pour le vocabulaire. Il y a, dans cet éloignement de la loi morale, un certain seuil, une limite, qui, au point de vue des conséquences du péché, de sa portée et de la peine qu'il mérite, est capitale : un certain degré de désordre exclut l'adhésion à la fin dernière ; passé ce seuil, les péchés continuent à se diversifier et à se graduer en gravité ; mais à partir de là, tout péché infère une privation, qui, elle, est totale, invariable, indivisible : privation de l'ordre à la fin dernière, elle ne consiste pas « in privari », ce qui admet des degrés, mais « in privatum esse ». Le péché revêt dès lors une dimension caractéristique : il est dit mortel, parce qu'il supprime le principe même de la vie morale, l'adhésion à la fin dernière.

b) Or, quand nous avons ensuite examiné pour elle-même, cette distinction entre mortel et véniel, S. Thomas a souligné qu'ils ne sont pas péchés au même titre ; il n'y a entre eux qu'une analogie (I-II, 88, 1, ad 1). Le péché comme tel se réalise premièrement et pleinement dans le péché qui a ce caractère d'être mortel. En deçà, il y a seulement désordre « à côté » de la loi, non contre elle : c'est un péché secundum quid. Il y a certes objet mauvais et désordre, privation de rectitude, et ce désordre tient sa gravité relative du plus ou moins grand écart par rapport à la bonté morale ; mais ce n'est pas encore le péché en ses véritables dimensions de transgression et d'opposition à la fin dernière.

c) Ce que nous analysons toujours, quand nous ne précisons pas, c'est le péché simpliciter, celui qui est mortel, transgression de la loi éternelle. Le péché dit véniel ne le réalise qu'analogiquement, et avec diminution de tel ou tel des éléments du premier. Cela, il importe de se le rappeler pour l'utilisation d'une terminologie, qui nous a beaucoup servi l'an dernier, et qui va nous servir beaucoup dans la question présente : la terminologie augustinienne, plus concrète, qui définit le péché : aversio ab incommutabili bono, conversio ad commutabile bonum. Cette terminologie-là met toujours en cause la fin dernière. Pécher véniellement, c'est pécher « citra aversionem a Deo » (I-II, 72, 6). Sous ce rapport (de l’aversion) mortel et véniel diffèrent « in infinitum » (ibid. ad primum) ; par l'objet sur lequel ils portent au point de vue de la « conversio », ils peuvent être dans le même genre, dans la même espèce. Aussi dit-on que le péché se spécifie dans la ligne de la conversio ad objectum ; c'est cela qui est formel pour l'acte humain, parce que c'est à cela que se porte l'intention. Mais il n'y aura péché simpliciter, péché en toutes ses dimensions que si l'opposition de cet objet à la loi morale est telle qu'elle implique aversion de la fin dernière. C'est dans cette ligne de l’aversion que s'opposent mortel et véniel ; l'aversion ne se réalise en chacun d'eux qu’analogiquement, selon des modes qui sont distants in infinitum.

« Aversio quaedam a regula rationis attenditur secundum corruptionem cujuslibet circumstantiae… Et hujusmodi aversio sufficit ad rationem mali. Hanc autem aversionem a regula rationis sequitur aversio a Deo, cui debet homo per rectam rationem conjungi » (I-II, 73, 7, ad tertium).

3. Qu'en est-il, quand nous entrons dans l'ordre théologal ?

La même analyse vaut toujours : seulement il ne faut pas identifier « conversio ad objectum » et « conversio ad commutabile bonum ». Ici l'objet, c'est Dieu même, le bien immuable. C'est bien vers lui que se tourne par ex. la haine de Dieu. Il y aura une conversio ad commutabile bonum, parce qu'il faut bien que la fin dernière, n'étant plus en Dieu, soit placée dans une créature, mettons dans le pécheur lui-même ; mais ce qui est voulu d'abord et sur quoi se porte l’intention, ce qui est spécifiant à titre de rapport à l'objet, c'est la première « conversio ad Deum ».

Mais attention : cette « conversio » ne signifie pas seulement l'adhésion à un bien pour s'y fixer. Ainsi, dit Cajetan, dans l'homicide, si je tourne mon épée vers mon voisin, c'est bien une conversio ad creaturam, mais pour le tuer, c'est une conversio occisiva ; bien sûr, il y a, au delà, conversion au bien de ma vengeance et de ma haine, à mon bien ; mais l’occasion fait partie de l'objet. De même dans la haine de Dieu, le mouvement vers lui est opposant, et séparant ; aussi S. Thomas l'appellera aversio, une aversion qui fait partie de l'objet et qui est spécifiante, qui prend d’ailleurs la détermination particulière propre aux divers péchés contre les vertus théologales. Mais cette aversion, qui fait ainsi partie de l'objet et qui est visée par l'intention, a une raison formelle particulière, objectivement déterminée : elle est autre chose que l'aversion commune qui suit tout péché mortel, quel que soit son objet, et que le pécheur ne veut pas comme tel.

Cajetan propose de dire : aversion objective, aversion formelle. Peu importe le vocabulaire, il faut comprendre la chose même. Tout péché anti-théologal comporte une aversion dans son objet même, soit de Dieu en lui-même, soit de Dieu secourant, soit de Dieu juste, soit de Dieu révélant, etc… ; cela est objet d'acte et d’intention et cette aversion objective (ou conversion offensive) infère l'aversion commune à tout péché mortel, qui est l'abandon de la fin dernière, la privation de Dieu, par où tout péché mortel prend un caractère d'infinité, qui lui vaut une peine infinie (I-II, 87, 4). Toujours déterminé en son objet (car même l'aversio offensiva a une raison objective particulière par où elle se distingue en divers péchés), il induit par là une privation commune, infinie par ce dont elle prive, et mérite la peine privativement infinie qu'est le dam.

Vous voyez donc d'où se tire la gravité caractéristique de tout péché anti-théologal, comme tel : c'est que, comme les vertus auxquelles il s'oppose, il atteint Dieu non seulement au titre de la fin dernière, mais dans son objet même.

Et parmi les péchés d'ordre anti-théologal, nous mettons une gradation (il s'agit toujours de gravité objective, du péché considéré en soi, quelles que soient les conditions de l'acte humain qui le réalise), d’après la manière même dont ils atteignent Dieu ainsi. La plus grave sera assurément de le viser en lui-même en sa propre bonté, par la haine, ou ce qui dérive de la haine, p. ex. souvent le blasphème ; ce sera ensuite ce qui l'atteint dans sa vérité (péchés contre la foi), ce sera enfin ce qui l'atteint en ces attributs qui le caractérisent par rapport à nous : miséricorde et justice.

Tels sont les péchés contre l'espérance dont nous avons à parler et dont nous comprendrons la profondeur en les analysant. Disons en gros qu'on peut déchoir de l’espérance par lâcheté ou abandon, et par illusion. Le premier péché est le désespoir, le second la présomption.

Pécher par présomption, c'est espérer ce qu'on n’a pas le droit d’attendre d'un Dieu juste, par ex. recevoir le pardon sans pénitence et contrition, ou la gloire sans mérites.

Pécher par désespoir, c'est au contraire ne plus espérer ce qu'on est en droit et qu'on a le devoir d'attendre d'un Dieu miséricordieux, qui a promis le secours de Toute-Puissance, qui, si nous n'y mettons pas obstacle, nous tirera de n'importe quel mauvais pas et nous conduira à la béatitude.

Pour nous en expliquer, il nous suffira de deux questions qui n’ont chacune que quatre articles. Mais si vous avez compris la place de l'espérance, au cœur du dynamisme spirituel, vous saisirez l'importance capitale de cette analyse des manquements à l'espérance, qui sont sans aucun doute parmi les péchés les plus fréquents et qui expliquent tant d'échecs ou de demi-réussites dans la vie spirituelle.

Lotfi
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Message par Lotfi Mar 2 Oct 2012 - 10:52

LES VERTUS THÉOLOGALES AFFECTIVES


Michel Labourdette op (année 1959 - 1960)
Première partie du cours concernant les vertus théologales affectives. Secunda-Secundae q. 17-22


La vie théologale n'est autre chose que la vie divine participée dont la grâce sanctifiante est en nous le principe. Essentiellement spirituelle, elle comprend les deux grandes fonctions en lesquelles consiste toute la vie de l'esprit : connaissance et affection.

Dans le traité de la foi nous avons vu comment se réalise l'élévation surnaturelle de notre connaissance, du moins sous la forme de cette suppléance provisoire de la vision, nécessaire tant que nous sommes en cette vie : c’est bien Dieu même en son mystère naturellement inaccessible à toute créature que nous atteignons par le moyen de sa révélation ; mais sa révélation n'est encore que Parole appelant notre croyance nous sommes a l'école : avant de voir ce qu’est Dieu et ce qu'il a fait pour notre salut, nous devons commencer par l'en croire, faire crédit à son témoignage. Par là la Vérité Première prend possession de notre intelligence, la rend participante de la connaissance qu'elle-même a de soi. C'est bien, pour parler comme le Concile de Trente, « le commencement, la racine et le fondement de toute notre justification », de toute notre vie de grâce.

Mais si ce n'est que le commencement, il y a autre chose. Il n'importe pas moins que Dieu prenne également possession de notre puissance affective pour l'élever aussi à la vie divine. Il ne se présentera plus ici précisément comme Vérité Première, mais comme Bonté souveraine et incréée. Quelles sortes va-t-il susciter en nous ? Elles ne devront pas être moins surnaturelles et moins divines que la connaissance de foi qui les éveille ; elles nous porteront aussi à Dieu en lui-même, en son mystère naturellement inaccessible à tout désir de la créature. Car, non seulement « l'œil n'a vu ni l'oreille entendu ce que Dieu réserve à ceux qui l'aiment », mais « ce n'est pas monté en son cœur », par le seul effet de la nature et en dehors de l'attestation de l'Esprit de Dieu. Ces affections toutes surnaturelles, comment les comprendre ? Ce ne peut être que grâce à ce que Dieu nous en a dit, puisque seule la révélation nous les fait connaître.

La méthode constante de la théologie spéculative pour étudier la Parole de Dieu et pénétrer autant qu'il nous est possible dans l'intelligibilité des mystères, est l'utilisation de l'analogie des réalités créées. C'est que Dieu, pour nous parler, a utilisé les mots de notre langue, des mots qui ont déjà un sens naturel, à travers lequel il nous faut atteindre les réalités transcendantes. Si la paternité n'avait pas une réalisation qui nous fût connue, il aurait été inutile de nous dire qu'il y a en Dieu Paternité et Filiation.

Il en va de même pour les dispositions du salut et les grandes exigences de la vie chrétienne. La vie théologale est essentiellement surnaturelle, connaissance et affections reçues et participées de Dieu, mais connaissance et affection vécues par l'homme, connaissance réalisée dans une intelligence d'homme, affections éprouvées par un cœur, une volonté d'homme. Nous avons besoin, pour les comprendre, de tout ce que nous savons déjà sur la connaissance humaine, sur la volonté et les grandes attitudes affectives, car la grâce ne vient pas bouleverser la nature ou la changer, mais l'élever et, tout en la « guérissant », la parfaire.

Pour analyser la foi théologale, il fallait parler en termes de « vérité », d'adhésion intellectuelle, d'objet et de motif ; il fallait distinguer la croyance d'autres actes de l'esprit tels que la science ou l'opinion etc… Pour analyser l'espérance et la charité, nous devrons utiliser le vocabulaire de l'ordre de l'affection et de l'appétit, tel qu'il a déjà été précisé en divers lieux de la Somme, et plus spécialement dans l'étude des actes humains.

Je vous présente donc en résumé, et parce qu'elles feront notre vocabulaire constant, un ensemble de notions élémentaires concernant le bien, l'appétit, les diverses réactions affectives.



I — Le bien et ses diversifications

Dire que l'être est bon, c'est dire qu'il attire le désir, qu'il suscite l'inclination et s'offre à la combler. Je ne remonte pas à la distinction fondamentale des transcendantaux ; restons dans l'ordre du bien ; et là même sans nous attarder aux notions tout à fait premières, venons-en a une distinction qui va commander plusieurs de nos problèmes les plus délicats. A la réflexion, nous voyons que cette idée même de bonté attirante se diversifie intrinsèquement en modes analogiquement divers ; non seulement en ce sens qu'à chaque être s'offre comme désirable, comme bonne pour lui, une perfection existentielle qui lui est proportionnée, mais aussi en ce sens précis que le rapport de bonté par lequel l'être s'offre à l'appétit se réalise de façons typiquement diverses.

a) En tout premier lieu, un être sera dit bon pour un appétit, soit à raison de lui-même, parce qu'il s'offre à le combler, il apparaît comme un terme, soit à raison d'un autre qu'il servira à faire atteindre. Dans le premier cas, l'être bon et désiré a en lui-même la raison de son attirance, il est voulu pour lui-même, pour sa propre valeur, pour la perfection qu'il est et qu'il apporte ; dans le second cas, il est revêtu et comme traversé de l'attrait qui vient d'un autre, il ne sera voulu que comme conduisant à cet autre, lui servant.

Le premier c’est le bonum honestum, la valeur, la perfection ; si on le veut comme tel, si on tend vers lui et qu'on subisse son attrait, ce ne peut être que comme une fin, comme un terme d'appétition. Sous ce rapport précis on ne l'ordonne pas à autre chose, on s'arrête à lui, on le veut en lui-même et pour lui-même.

Le second c'est le bonum utile, ce dont la bonté consiste à servir ; comme tel, on ne peut le vouloir que comme un moyen, il reporte le désir vers ce à quoi il sert. C'est bien encore là un rapport de bonté, d'attrait exercé sur l'appétit, mais d'un tout autre type que le précédent : le bien n'y est plus un terme mais un passage. Ne disons pas que le moyen n'a d'autre bonté que celle qu'il reçoit de la fin, ou du moins comprenons-le bien : au sens strict, ce serait exclure l'utile de l'ordre du bien comme tel, dire qu'il n'a aucune bonté propre. Ce qui est vrai, c'est qu'il ne saurait exercer d'attrait qu'en dépendance et en vertu de la fin à laquelle il sert ; mais précisément l'aptitude à lui servir est présupposée, elle est caractéristique sur ce point, non de la fin mais du moyen. Aussi y a-t-il d'infinis degrés dans l'utile : un moyen sera d'autant plus apprécié et recherché qu'il est plus indispensable, moins anonyme, moins remplaçable ; et cela il le tient non précisément de la fin, mais de lui-même. Il reste que, comme moyen, il ne peut être voulu pour lui-même.

b) Notons tout de suite que cette division est « formelle » : nous ne séparons pas, d'un côté des choses qui ne peuvent être que des fins, de l'autre des choses qui ne peuvent être que moyens. Il y a une chose qui ne peut être que fin et jamais moyen sous aucun rapport, mais il n’y en a qu'une : c'est la Réalité incréée, la Bonté souveraine qui, ayant en elle toute bonté et pas une ombre de déficience ne peut reporter le désir plus loin, vers une autre valeur. En dehors de là, un même être pourra être sous divers rapports fin ou moyen ; il faut arriver à la limite inférieure de l'être pour trouver des choses qui, du moins par rapport à l'homme, ne sauraient être que moyens, ne présentant aucune valeur à laquelle l'homme puisse aucunement s'arrêter.

Ainsi se dégage l'idée capitale de fin intermédiaire, dans son opposition à la fin absolument dernière et suprême, qui ne peut être qu’unique. Une fin intermédiaire se présente à l'appétit par deux côtés : elle est fin dans la mesure où elle a une certaine valeur absolue en un certain ordre, elle réalise assez l'idée de bonum honestum, pour être sous ce point de vue, un terme de désir ; elle est moyen dans la mesure où, n'étant pas dernière, elle reporte le désir sur un bien plus haut et se présente comme apte à y conduire. Il faut donc et que, dans la ligne de la valeur en soi, elle ne soit pas fin dernière et que, dans la ligne de l'utile, elle soit saisie comme apte à conduire plus haut.

c) Il peut y avoir enfin un troisième type de rapport du bien à l'appétit, non pas qu'entre fin et moyen il y ait un milieu, qu'on pourrait ne vouloir ni comme fin ni comme moyen, mais parce que cela même qui est fin et valeur en soi se présente sous deux aspects voisins qu'il importe de ne pas confondre. Éveillé et attiré par le bien comme valeur en soi, l'appétit le prend pour fin et se porte à l'atteindre, soit pour le réaliser, soit pour le posséder, il s'y porte, il y porte l'être qui désire par les opérations adaptées à cette réalisation ou à cette possession. Il meut l'agir sous forme de désir. Si l'opération réussit, si elle atteint cette perfection non plus de rechercher mais de réaliser ou de posséder la fin désirée, ou de se conformer, de s’assimiler à elle, la recherche s'arrête, l'appétit n'a plus à désirer ce qui n'était pas encore ; il s’épanouit alors en une activité caractéristique, une activité terminale : la délectation, la joie. Ce n'est pas cessation d'activité, mais au contraire épanouissement en activité parfaite, connaturelle, élevée de soi au-dessus du temps et de la succession, soustraite au flux de la recherche et du devenir, plénitude du présent.

Toute délectation est ainsi (pour une considération métaphysique) une image plus ou moins lointaine de la délectation éternelle. Cette délectation, cet épanouissement de l'appétit, c'est le fruit normal d'une activité réussie par où on est arrivé à la réalisation ou possession de la fin ; mais ce n'est pas cette possession ou cette réalisation même. C'en est la résonance en nous. L'être n'est pas bon parce qu'il est délectable, il est délectable parce qu'il est bon. Ce qui est premier, c’est sa valeur en soi, c'est la perfection qu'il représente ; mais plus il est parfait, moins il est possible que de l'atteindre ne soit pas délectable. Nous dirons qu'en sa valeur propre de bonum honestum, il est terme direct d'appétition, il est voulu pour lui-même et en lui-même, mais il a aussi ce rapport inaliénable à l'appétit que de l'atteindre y retentira en délectation, en fruition. En cela, sous ce rapport précis, le bien n'est plus précisément bonum honestum ou bonum utile, il est bonum delectabile.

Vous voyez ce qu'a d'original ce rapport à l'appétit qui mérite lui aussi le nom de bien. Il n'est pas la valeur, il la suppose, mais il se tient du coté de ce qui est fin. Le bien, comme honnête et comme délectable, attire un seul et même mouvement d'appétit ; en ces deux aspects, il exerce la causalité finale, mais le second y participe à sa manière, comme conséquent, fruit du premier et qualifié par lui. Il ne représente pas une finalité ultérieure ; aucun des deux n'est « moyen » par rapport à l'autre, ils intègrent la même fin.

Si donc autre chose que la fin dernière se présente comme délectable, c'est par le côté où elle est, à quelque titre, fin intermédiaire : le pur moyen n'est pas délectable ; mais la même chose peut être à la fois utile et délectable, parce qu'il y a en elle de quoi provoquer déjà une activité qui a, dans Sa ligne, quelque chose de terminal, de parfait. Rappelez-vous l'éternel exemple de la potio dulcis et de la potio amara. Mais de même que le bonum honestum peut être participé en une foule de biens, de telle sorte cependant qu'un seul le réalise en plénitude et peut être fin absolument dernière, de même le bonum delectabile se réalise partout avec lui, de telle sorte cependant que seule la fin dernière s'offre à une fruition définitive et entière.

Là-dessus reposent des formulations qui ne sont peut-être pas parfaites d'un point de vue métaphysique mais qui ont une énorme importance pour la théologie et la catéchèse spirituelle : la célèbre distinction augustinienne entre uti et frui et l'assertion dont nous trouverons bien des échos, que le frui est absolument réservé à la fin dernière ; ce serait très précisément le péché mortel que de l'appliquer à une créature, car ce serait la traiter en fin dernière. D'où la répartition entre les choses dont il est licite de jouir (frui) : il n'y en a qu'une, c'est Dieu seul ; et les choses qu'on a seulement le droit d'utiliser (uti) : et ce sont toutes les créatures. Mais ce que nous avons dit de la fin intermédiaire et du caractère de bien délectable qui l'accompagne nous conduit à distinguer encore dans ce second membre, d'une part ce qui, se présentant comme pur moyen, ne peut être qu’« utilisé », et d'autre part ce qui ayant aussi une valeur propre, quoique participée, s'offre à être non seulement utilisé, mais goûté, ce sera le « cum delectatione uti ». Et cela détermine assurément une attitude d'âme chrétienne, en son exigence de dépassement de toute joie créée comme de tout bien créé, non par refus ou par mépris, mais par choix et préférence de la fin dernière incréée, seul objet de vraie « fruition ».


II — L'appétit et la diversité des affections

Je n’insiste pas sur la notion générale d'appétit et ses diversifications foncières : appétit naturel ou ontologique, qui suit toute forme physiquement possédée, l’inclinant à son être et à son mieux être, à sa perfection — ;

appétit élicite qui suit une forme immatériellement, intentionnellement, possédée par la connaissance, et par lequel le sujet connaissant tend vers cette forme, non comme connue, mais en son être réel, dans les choses.

Alors que le premier est un poids de nature qui ne se distingue pas de la forme dont il est l'inclination, la finalité intrinsèque, pensée et ordonnée par l'Auteur de la nature,

le second est une faculté spéciale du sujet connaissant, inclination de ce sujet même et s'actualisant en opérations qu'il élicite (d'où son nom). C'est essentiellement de cet appétit élicite que nous aurons à parler et c'est à son sujet qu'il faut nous rappeler quelques notions.

A - Tout d'abord, et rapidement, la distinction radicale qui sépare l'appétit qui suit une connaissance d'ordre sensible et l'appétit qui suit la connaissance intellectuelle.

Il y a une différence d'ordre de l'un à l'autre et analogie dans la notion même d'appétit (comme dans celle de connaissance). Le bien ou le mal sensibles, appréhendés par les sens, suscitent des réactions affectives : amour, désir, répulsion, crainte, etc… les onze types formels de passions que nous avons analysées au traité des actes humains, et qui se distinguent selon les rapports que l'appétit peut avoir au bien ou au mal.

Au plan intellectuel, la complication est plus grande ; elle tient à ce qu'il faut ici distinguer deux aspects, qui se recoupent et s'entremêlent :

a) d'une part, l'appétit intellectuel, la volonté, a aussi forcément des réactions affectives au bien et au mal intellectuellement saisis ; et comme ces réactions sont définies en leur essence par le rapport formel de l'appétit comme tel à son objet, nous y retrouvons exactement les mêmes affections qu'au plan de la sensibilité, mais toutes spirituelles, d'un autre « style » et dégagées de ce qui en faisait des « passions ». J'y reviendrai tout à l'heure.

b) d'autre part, l'élévation de la connaissance intellectuelle introduit une condition tout à fait particulière et nouvelle : c'est que la volonté parce qu'elle est déterminée au bien comme tel, en sa raison universelle, en toute son amplitude, n'est déterminée à aucun bien particulier, mais au contraire se détermine à le vouloir ou à le repousser. C'est ce qu'on appelle son indifférence dominatrice, le mystère naturel de sa liberté. Entendez le mot « indifférence » en un pur sens métaphysique : c'est-à-dire aucun bien particulier ne la détermine nécessairement ; non en un sens affectif, où comme appétit, elle est au contraire continuellement sollicitée par l'objet et éprouve à son égard une foule de sentiments, d'attitudes affectives : amour, désir, crainte, espoir, etc… Rien n'est moins « indifférent » qu'elle sous ce rapport. Mais si elle n'est pas maîtresse d'éprouver ou ne pas éprouver des « sentiments » elle reste maîtresse de ses « choix » : sentiments et choix, voilà deux pôles autour desquels se développe toute la vie volontaire. Il appartient à la volonté de ne pas suivre ses premières réactions affectives, tant qu'il ne s'agit pas du bien nécessairement voulu, il lui appartient de suivre l'une et pas l'autre, d'opposer l'une à l’autre, de s'efforcer d'en écarter certaines et d'en susciter de différentes en faisant considérer les divers aspects d'un même objet, toujours mélangé de perfection et de déficience.

La psychologie moderne en est venue à dissocier ces deux aspects et à voir des facultés différentes dans la puissance de sentir ou d'éprouver et dans la puissance de vouloir ou de réaliser. Les anciens ont bien vu que c’est la même et que, si sentiments éprouvés et choix volontaires doivent être distingués, il ne faut pas les séparer : un appétit élicite intellectuel ne peut manquer ni de réagir au bien et au mal en tant qu'appétit, ni d'être maître de ses déterminations et de ses actes en tant qu'éclairé par l'intelligence. Encore faut-il se rappeler que pour une liberté qui n’est pas liberté pure, surtout si elle est celle d'un esprit en condition charnelle, ce pouvoir de domination n'est pas la Toute-Puissance ! Le libre arbitre est inaliénable, mais il n'est pas pure indépendance et beaucoup de déterminismes pèsent du dehors sur notre volonté, qui se conduit trop souvent comme si elle était une puissance sensible — ainsi que fait d'ailleurs la raison même.

c) Au plan de la volonté où nous resterons placés dans tout ce traité, nous aurons beaucoup à parler des réactions affectives et de leurs nuances. Il faudra toujours nous rappeler que c'est à l'intérieur d'une puissance d’appétit qui est en même temps et inaliénablement libre : libre d'accepter ou de refuser, de s'abandonner ou de cultiver par choix et par vertu etc…

Quelles sont donc ces différentes réactions affectives ?

B — Les diverses affections

A partir de maintenant et jusqu’à la fin de la IIa IIae ou presque, il faudra avoir présentes à l'esprit les grandes lignes du traité des passions, qui est, je vous l'ai dit souvent, le traité des réactions affectives, étudiées, selon la méthode habituelle de S. Thomas, dans celui des analogués de l'appétit élicite qui est le plus proche de notre observation, le plus ouvert à une étude objective. Je rappelle brièvement ces grandes lignes auxquelles se rattachent les explications plus précises que j’aurai à donner à propos des affections théologales.

1. L'appétit sensible n'est pas une puissance simple. Il n'atteint pas le bien comme tel, mais tel ou tel bien particulier offert par les sens. A ce niveau cela fait une grande différence, pour l'attrait sur l'appétit, que le bien se présente simplement comme tel, ou au contraire comme rendu difficile ou ardu. Je n’y insiste pas ; vous savez que là-dessus repose la distinction entre un appétit de simple tendance (concupiscible) et un appétit de lutte (irascible). Distinction réelle de facultés sensibles, mais non distinction ex aequo : le premier est beaucoup plus foncier : le second, l'irascible, suppose le concupiscible, trouve en lui le principe et le terme de ses mouvements ; il est plus élevé, plus subtil, spécialement dépendant des sens internes à imagination, mémoire, estimative. — Au niveau intellectuel, cette différence ne distingue pas deux facultés parce que l'objet formel de la volonté : le bien universel englobe les divers aspects et dépasse cette distinction ; mais elle garde toute sa portée pour déterminer divers ordres de réactions affectives.

2. A un appétit de simple tendance, l'objet se présente soit comme un bien, soit comme un mal :

1) La première réaction au bien c'est l'amour : c'est une première complaisance et conformation, par manière de tendance, au bien aimé. Nous en reparlerons : c’est le principe de toute détermination affective, toutes les autres la supposent.

2) L'amour fait abstraction de ce que le bien est absent ou présent. Si le bien est absent, l'amour suscite le désir, animateur de la recherche.

3) Si le bien est présent, ou quand il l'est, l'amour suscite la délectation, la joie. Désir et joie sont des actes distincts de l'amour, ils ont un objet plus particulier, mais ils naissent de l'amour, le supposent, se nourrissent de lui.

4) Si l'objet se présente comme un mal, la première réaction de l'appétit par rapport à lui est la haine ; je dis première par rapport à lui, parce qu'elle ne peut pas être tout à fait première en soi, elle suppose qu'on aime ce à quoi ce mal s'oppose. A la racine même de la haine, il faut déjà un amour.

5) Ici encore le mal qu'on déteste peut s'offrir comme encore absent ou comme déjà présent. S'il est absent, la haine suscite l'attitude de fuite ou de répulsion, attitude inverse du désir et qui meut à prendre les moyens d'y échapper.

6) Si le mal est déjà présent et nous affecte, la haine suscite la tristesse.

Telles sont les grandes attitudes simples de l'appétit. Inutile de souligner qu'elles ont chacunes d'infinies nuances ; elles se mêlent souvent parce qu'aucun objet, en dehors de Dieu vu face à face ne se présente comme totalement et indiscutablement bon, aucun comme absolument et purement mauvais. Elles s'appellent et se suscitent l'une l'autre, avec une toute autre logique que celle des idées. La vie affective ne se développe pas comme un syllogisme ; elle foisonne d'attitudes contradictoires, à moins qu'elle ne se systématise en quelque grande passion dominante, qui draine tout.

3. Mais le bien et le mal ne se présentent pas comme des termes de simple attirance ou de simple répulsion, ils se présentent, dès qu'ils ont quelque grandeur, comme exigeant l'effort, la lutte. Ici, ce qui va déterminer l'attitude affective, outre le fait que l'objet est bon ou mauvais, c’est l'orientation même du mouvement selon que, considérant l'obstacle, l'arduité, on se porte à en triompher ou au contraire on se retire, on se replie. Il y aura ainsi :

1) par rapport à un bien encore futur à un mouvement en avant, l'espoir ;

2) ou au contraire un mouvement de retrait, le désespoir.

3) par rapport à un mal encore futur ; un mouvement de retrait : la crainte.

4) ou au contraire un mouvement d'attaque l'audace. Si le bien ardu est présent, c'est qu'il est conquis ; la joie n'en est que plus grande. Si le mal ardu est présent : on en est accablé et c'est encore une réaction de concupiscible, la tristesse.

5) Ou bien on se redresse contre lui on lui fait front : c'est la colère, seule réaction de l'irascible à un objet présent.

Même remarque que plus haut : ce sont ici encore des attitudes typiques générales, quoique moins simples ; chacune aura une infinité de nuances. Elles supposent au moins l'amour et le désir ou la haine et se terminent à la joie ou à la tristesse. Il nous suffit pour le moment d'avoir rappelé ce schéma général. N'y voyez pas de simples cadres a priori. Certes il est tiré de l'analyse des rapports de l'appétit comme tel avec le bien et le mal ; mais c'est précisément cela qui est formel. C'est par là que la vie affective, toute grouillante de réactions infiniment diversifiées et nuancées, est ramenée à l'intelligibilité, non de catégories étrangères, mais des siennes. On fait ressortir dans les données de l'observation, le principe d'ordre qui permet de les comprendre, et il suffit de retourner à l'observation pour le vérifier.


III — Les affections d'ordre théologal

Entrant dans notre esprit, la Vérité Première y suscite une intense vie intellectuelle, une connaissance très haute, Entrant dans notre cœur, la Bonté souveraine va susciter une intense vie affective, non point séparée de la vie de foi, la supposant et se nourrissant d'elle, mais se développant néanmoins selon ses lois propres.

C'est cette vie affective théologale que nous allons étudier dans les deux traités de l'espérance et de la charité. Toute affection surnaturelle n'y sera pas vertu, surtout vertu théologale ; mais elles concourent toutes à la même vie profonde et sont plus ou moins nécessaires, sinon à son épanouissement, où certaines s’efforceront, du moins à ses débuts et à son progrès. Car cette vie a son dynamisme interne, même quand, au plan des habitus, elle est donnée toute ensemble. Nous discernerons même, au niveau des actes, une sorte de dialectique affective nous élevant progressivement d'affections moins parfaites jusqu'à la charité.

Je ne veux pas anticiper ici sur ce qui doit être le développement même de nos traités. Je veux seulement noter où s'insère notre recherche par rapport à ce qu'a déjà déterminé le traité de la foi, et schématiquement, quel sera son domaine.

1) En réalité nous n'abordons pas pour la première fois l'étude de la vie affective surnaturelle, cette étude est déjà commencée au traité de la foi. La connaissance de foi n'est pas possible sans la volonté de croire, sans une « pieuse affection de croire ». Dès la première présentation de l'objet de foi, sous l'illumination surnaturelle qui l'éclaire, la volonté est intéressée, ses réactions affectives sont éveillées ; elles sont déjà complexes et nuancées.

Dans une âme trop attachée aux biens terrestres, la prédication du salut peut provoquer l'aversion et la crainte. De l'amour de soi et d'un bonheur humain entrevu peut naître cette répulsion qui n'a assurément rien de surnaturel et qui est mauvaise, mais qui provient de l'irruption dans la vie d'un surnaturel gênant : ne va-t-il pas compromettre cet équilibre pour lequel on a déjà dépensé tant d'effort ? Si on suit cette première impression, la volonté se portera au refus de croire.

Mais on peut, sous l'impulsion de la grâce, dépasser cette réaction mauvaise : il se peut aussi que l'âme, déçue par la vie présente, soit déjà secrètement en attente et s'ouvre aussitôt à l'annonce évangélique comme à une réponse inespérée et merveilleuse. C'est alors un premier amour surnaturel qui suscite immédiatement le désir ; « quidem appetitus boni repromissi ». Nous reviendrons souvent sur cet amour et sur sa qualité propre ; ici je veux seulement rappeler ce que nous en savons déjà. Il est à la racine du pius credulitatis affectus en tant que celui-ci concourt au « credere Deum ». Amour et désir de Dieu comme faisant notre plénitude, notre bonheur, amour qui entre dans la volonté surnaturelle de croire.

Et cet amour lui-même se nuance ; il ne peut aller sans une certaine gratitude envers celui qui nous propose ce salut gratuit, sans une volonté de lui faire confiance, de lui faire crédit. Par là, le pius credulitatis affectus concourt à la foi en tant que « credere Deo ». Et c'est déjà un rapport beaucoup plus personnel : nous ne sommes pas loin de ce que sera l'espérance et la porte est ouverte à la charité.

2) Mais la prédication évangélique n'annonce pas qu'une béatitude, il y a la contrepartie.

D'abord les difficultés mêmes que la recherche de cette béatitude implique, la croix. Et il peut y avoir déjà là cette mauvaise crainte dont je parlais tout à l'heure.

Mais il y a aussi la menace de la perte éternelle et de l'enfer. Si la béatitude suscite le désir, l'enfer suscite la crainte ; non plus la crainte « mondaine » et toute naturelle, essentiellement mauvaise, qui vient du regret des biens de la terre, mais une crainte déjà surnaturelle, éclairée par la foi. Nous verrons comment elle se développe et par quelles purifications elle doit passer.

Mais c'est alors que l'âme, voyant que, si la béatitude est naturellement hors de notre atteinte, nous avons cependant pour y parvenir le secours du Dieu Tout-Puissant, se porte ou plutôt est portée par la grâce à la grande affection surnaturelle de l'espérance. Espérance et crainte resteront deux pôles indispensables de cette vie affective surnaturelle. Pourquoi l'une est proprement théologale et l'autre non, nous l'expliquerons en son lieu. Et nous verrons que, pour purifier cette crainte et la porter à ses plus hauts fruits, il ne faut pas moins qu'un don spécial du Saint-Esprit. Mais cela même exigera une affection beaucoup plus haute, le vrai sommet de notre vie théologale ici-bas, la charité.

Tel est le cadre, encore tout schématique, que nous allons nous efforcer de remplir.

Les deux points centraux en sont les vertus d'espérance et de charité : mais il faut bien voir, sous la division de ces traités, l'unité plus profonde de cette étude de la vie affective surnaturelle au plan théologal. Commencée au traité de la foi, elle ne s'achèvera qu'à la toute dernière question, consacrée au don de sagesse.

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Message par Maud Mar 2 Oct 2012 - 11:57

Merci Lotfi pour ces réflexions de haute Théologie

Je voudrai y amener mon " petit et humble grain de sel " connaissance acquise par une lecture récente et qui nous ramène aux vertus chrétiennes notamment celle de l' Espérance

La Foi engendre l' " Espérance " . Pour l' L' Eglise catholique la vertu théologale de l' Espérance est celle qui fait prendre conscience et suscite en chacun le désir de bonheur dans le Royaume des Cieux et la Vie éternelle introduisant la confiance dans les promesses faites par Jésus le Sauveur , et invitant ainsi à prendre appui sur le secours et la grâce du Saint - Esprit

L'Espérance chrétienne mène vers un but , un point de réflexion , elle élance vers le Seigneur Jésus- Christ et son prochain retour .

Voilà à ce que tend la vertu de l' Espérance ,pour un chrétien , Vers DIEU , qui dont l' Amour infini ne prépare pas vers un espoir inconnu mais à Jésus le Seigneur qui ..EST et qui reviendra dans toute Sa Gloire

En humble partage
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Message par cj Mar 2 Oct 2012 - 23:12

je crois que pour moi la théologie morale dite moderne , repose à accepter la faiblesse d avoir et de reconnaitre nos fautes par le geste poser d adam et éve. mais il ya une certaine dérivation à la tendance dite de la théologie morale une certaine déviation vers l absence de ne pas reconnaitre cette faiblesse en contournant la dite bible et l évangile dans nos propres termes.

et de cela dérive des nouveaux apostolats à l ordination des pasteurs en toute les principes de la bible sous différents nom comme mormons baptiste anglican jéhovah , adventiste des saints dernier jour et bien - d autres nous en sommes rendue là.

prochaine étape la tour à babel d ou l on se comprendrs plus
cj
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Message par Lotfi Dim 18 Nov 2012 - 3:30


Table de matière


LES VERTUS THÉOLOGALES AFFECTIVES

I — Le bien et ses diversifications

II — L'appétit et la diversité des affections

III — Les affections d'ordre théologal

LA RÉVÉLATION DE L'ESPÉRANCE

LE TRAITÉ DE L'ESPÉRANCE

PREMIÈRE PARTIE
LA VERTU D’ESPÉRANCE

Question 17 - L'ESPÉRANCE EN ELLE-MÊME

I - Elle est vertu théologale

L'ESPÉRANCE VERTU THÉOLOGALE

A - L'Espérance est une vertu

Introduction à l'article 1

Article 1 — L'espérance est-elle une vertu ?

B - Objet de l'espérance chrétienne

Article 2 - La béatitude éternelle est-elle l'objet propre de notre espérance ?

EXTENSION DE L'ESPÉRANCE

Article 3 — Peut-on espérer la béatitude éternelle pour autrui ?

I - L'union affective

II - Amour de convoitise et Amour d'amitié

III - La racine métaphysique de l'amour.

Article 4 — Peut-on légitimement placer son espoir en un homme ?

C - L'espérance vertu théologale

Article 5 — L'espérance est-elle une vertu théologale ?

II - Ses rapports avec la Foi et la Charité

I - Le premier amour surnaturel

II - L'Espérance

III — Les affections ultérieures

Question 18 - L'ESPÉRANCE EN SON SUJET

A- Son sujet prochain

Article 1 — L'espérance est-elle dans la volonté comme en son sujet ?

B - Ses sujets éloignés

Annotation aux Articles 2 et 3

C - Sa certitude

Article 4 — Chez ceux qui sont « in via », l'espérance a-t-elle quelque certitude ?

DEUXIÈME PARTIE

Question 19 - LE DON DE CRAINTE

Introduction

A) La crainte en général

B) La crainte de Dieu

I - Les affections de crainte de Dieu

A – Peut-on crainde Dieu ?

Article 1 — Dieu peut-il être objet de crainte ?

B — Les diverses formes de crainte de Dieu

1. Énumération

Article 2 — La division en crainte filiale, initiale, servile, mondaine, est-elle bonne ?

Article 3 — La crainte mondaine est-elle toujours mauvaise ?

2. La crainte mondaine

3 - La crainte servile

Article 4 — La crainte servile est-elle bonne ?

Article 5 — La crainte servile s'identifie-t-elle substantiellement à la crainte filiale ?

Article 6 — La crainte servile demeure-t-elle avec la charité ?

4 - Crainte initiale

Article 8 — La crainte initiale est-elle substantiellement différente de la crainte filiale ?

Les diverses affections de crainte

II - La crainte : don du Saint-Esprit

A - Le don

a) sa nature

Article 9 — La crainte est-elle un don du Saint-Esprit ?

b) Sa permanence

Article 10 — La crainte diminue-t-elle avec le progrès de la charité ?

Article 11 — La crainte demeure-t-elle au ciel ?

B - La béatitude des pauvres

Article 12 — La pauvreté en esprit est-elle la béatitude qui répond au don de crainte ?

TROISIÈME PARTIE

Questions 20 — 21
PÉCHÉS CONTRAIRES À L’ESPÉRANCE

I - Le désespoir

A - Sa nature

Article 1 — Le désespoir est-il un péché ?

Article 2 — Peut-il y avoir désespoir sans faute contre la foi ?

- B – Le désespoir est-il le plus grand des péchés ?

Article 3 — Le désespoir est-il le plus grand des péchés ?

- C - Les sources du défaut d'espérance

Article 4 — Le désespoir a-t-il pour origine l'acedia ?

II - La présomption

A - Sa nature

Article 1 — Le présomptueux s'appuie-t-il sur Dieu ou sur ses propres forces ?

B - Sa malice

Article 2 — La présomption est-elle un péché ?

Article 3 — La présomption s'oppose-t-elle plutôt à la crainte qu'à l'espérance ?

C - Ses sources

Article 4 — La présomption, naît-elle de la vaine gloire ?

QUATRIÈME PARTIE —
Les préceptes concernant l’espérance

Lotfi
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