Benoît XVI, une nouvelle étape ?
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Benoît XVI, une nouvelle étape ?
Benoît XVI, une nouvelle étape ? |
Le 02 juin 2010 - (E.S.M.) - Après les viles attaques qui ont visé le Saint-Père lui-même dans les honteuses affaires de pédophilie, les grands media semblent se rendre compte que non seulement Benoît XVI n’y était pour rien, mais que, bien au contraire, il a engagé toute l’Église dans un exigeant chemin de vérité et de purification. |
Benoît XVI, une nouvelle étape ?
Editorial de Christophe Geffroy
Le 02 juin 2010 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - De nombreux observateurs étrangers ont estimé que la visite de Benoît XVI au Portugal, du 11 au 14 mai, « ouvre une nouvelle étape de ce pontificat » et que le pape « est en train d’imprimer au Vatican » un « changement de ton » perceptible par tous. Cette analyse, superficielle et discutable, a cependant le mérite de montrer comment les grands media internationaux perçoivent les choses : après les viles attaques qui ont visé le Saint-Père lui-même dans les honteuses affaires de pédophilie, ces grands media semblent se rendre compte que non seulement Benoît XVI n’y était pour rien, mais que, bien au contraire, il a engagé toute l’Église dans un exigeant chemin de vérité et de purification. Évoquant dans l’avion qui le menait à Lisbonne le troisième secret de Fatima, il a répondu aux journalistes que « ce sont des souffrances de l’Église qui sont annoncées » et il a ajouté ces mots très forts : « la plus grande persécution de l’Église ne vient pas de ses ennemis extérieurs, mais naît du péché de l’Église ».
Tant mieux si les media changent d’attitude à l’égard du pape, il n’empêche que les orientations de ce pontificat restent inchangées – orientations pas toujours bien perçues au demeurant par les analyses lues ici ou là à l’occasion du cinquième anniversaire de son élection –, comme le voyage au Portugal l’a montré sur au moins deux points importants.
Le premier est le constant souci de Benoît XVI « de rendre Dieu présent en ce monde et ouvrir aux hommes l’accès à Dieu », pour reprendre les justes termes du cardinal Ruini. À Fatima, le pape a insisté sur cet aspect qui est, en nos pays de vieille Europe rongés par le matérialisme, le sécularisme et le relativisme, d’une extrême urgence : « Combien est grande aujourd’hui la nécessité de ce témoignage ! Beaucoup de nos frères vivent comme s’il n’y avait pas d’Au-delà, sans se préoccuper de leur salut éternel. […] Mais nous sommes responsables de l’annonce de la foi, de la totalité de la foi et de ses exigences. »
Et pour cette mission, il en appelle à l’engagement des laïcs qui ont la charge de la Cité temporelle : « En vérité, les temps dans lesquels nous vivons exigent un nouveau dynamisme missionnaire des chrétiens, appelés à former un laïcat mûr qui s’identifie à l’Église et solidaire de la transformation complexe du monde. Il faut d’authentiques témoins de Jésus-Christ, surtout dans ces milieux humains où le silence de la foi est plus grand et plus profond : les hommes politiques, les intellectuels, les professionnels de la communication ».
Le second est interne à l’Église et consiste à recevoir le Concile Vatican II dans une « herméneutique de la réforme, du renouveau dans la continuité de l’unique sujet-Église ». Benoît XVI vise là tout particulièrement ceux qui, au nom de « l’esprit du Concile », affirment qu’il faut aller au-delà des textes promulgués pour parvenir à une véritable rupture avec un passé abhorré. Lire le Concile dans cette optique de continuité du Magistère signifie-t-il qu’il soit désormais loisible de le remettre en cause sur certains points, au prétexte qu’il y aurait des incompatibilités entre son enseignement et le Magistère antérieur ? Certes, il peut y avoir des aspects sur lesquels la réflexion de l’Église n’a pas encore atteint son stade final et qui méritent donc débats et précisions, mais on ne peut accepter le principe d’une rupture du Magistère : c’est le sens fondamental de ce fameux discours à la Curie romaine, comme de toutes les autres interventions de Benoît XVI sur ce thème ; pour lui, le Concile Vatican II s’inscrit dans une évolution homogène du Magistère, y compris sur les questions nouvelles controversées comme la liberté religieuse.
Dans son Discours au monde la culture, le 12 mai à Lisbonne, il a résumé d’une façon très forte la continuité et l’apport original du Concile : « C’est justement dans le but de “mettre le monde moderne en contact avec les énergies vivifiantes et pérennes de l’Évangile” (Jean XXIII), qu’a eu lieu le Concile Vatican II, au cours duquel l’Église, partant d’une conscience renouvelée de la tradition catholique, prend au sérieux et discerne, transfigure et dépasse les critiques qui sont à la base des courants qui ont caractérisé la modernité, c’est-à-dire la Réforme et les Lumières. »
Ce souci de réconcilier le passé et le présent, Benoît XVI l’applique également à la liturgie, domaine qui, dans les années post-conciliaires, a connu les bouleversements les plus brutaux. C’est pourquoi le pape s’élève contre une pratique de la liturgie actuelle en complète rupture avec celle d’hier, rupture dont on peut se demander parfois si beaucoup ne s’en satisfont pas, de manière à ce qu’il demeure un fossé infranchissable entre les deux formes du même rite romain, ce qui permet de refuser les « enrichissements mutuels » prônés par Benoît XVI, les uns pouvant ainsi continuer à « bricoler » leur propre façon de célébrer, les autres figeant une forme jugée intouchable. Quand il sera possible de célébrer la forme ordinaire de façon orientée, en latin et chantée en grégorien, un grand pas aura été fait pour préparer les esprits à la « réforme de la réforme »…
Tant mieux si les media changent d’attitude à l’égard du pape, il n’empêche que les orientations de ce pontificat restent inchangées – orientations pas toujours bien perçues au demeurant par les analyses lues ici ou là à l’occasion du cinquième anniversaire de son élection –, comme le voyage au Portugal l’a montré sur au moins deux points importants.
Le premier est le constant souci de Benoît XVI « de rendre Dieu présent en ce monde et ouvrir aux hommes l’accès à Dieu », pour reprendre les justes termes du cardinal Ruini. À Fatima, le pape a insisté sur cet aspect qui est, en nos pays de vieille Europe rongés par le matérialisme, le sécularisme et le relativisme, d’une extrême urgence : « Combien est grande aujourd’hui la nécessité de ce témoignage ! Beaucoup de nos frères vivent comme s’il n’y avait pas d’Au-delà, sans se préoccuper de leur salut éternel. […] Mais nous sommes responsables de l’annonce de la foi, de la totalité de la foi et de ses exigences. »
Et pour cette mission, il en appelle à l’engagement des laïcs qui ont la charge de la Cité temporelle : « En vérité, les temps dans lesquels nous vivons exigent un nouveau dynamisme missionnaire des chrétiens, appelés à former un laïcat mûr qui s’identifie à l’Église et solidaire de la transformation complexe du monde. Il faut d’authentiques témoins de Jésus-Christ, surtout dans ces milieux humains où le silence de la foi est plus grand et plus profond : les hommes politiques, les intellectuels, les professionnels de la communication ».
Le second est interne à l’Église et consiste à recevoir le Concile Vatican II dans une « herméneutique de la réforme, du renouveau dans la continuité de l’unique sujet-Église ». Benoît XVI vise là tout particulièrement ceux qui, au nom de « l’esprit du Concile », affirment qu’il faut aller au-delà des textes promulgués pour parvenir à une véritable rupture avec un passé abhorré. Lire le Concile dans cette optique de continuité du Magistère signifie-t-il qu’il soit désormais loisible de le remettre en cause sur certains points, au prétexte qu’il y aurait des incompatibilités entre son enseignement et le Magistère antérieur ? Certes, il peut y avoir des aspects sur lesquels la réflexion de l’Église n’a pas encore atteint son stade final et qui méritent donc débats et précisions, mais on ne peut accepter le principe d’une rupture du Magistère : c’est le sens fondamental de ce fameux discours à la Curie romaine, comme de toutes les autres interventions de Benoît XVI sur ce thème ; pour lui, le Concile Vatican II s’inscrit dans une évolution homogène du Magistère, y compris sur les questions nouvelles controversées comme la liberté religieuse.
Dans son Discours au monde la culture, le 12 mai à Lisbonne, il a résumé d’une façon très forte la continuité et l’apport original du Concile : « C’est justement dans le but de “mettre le monde moderne en contact avec les énergies vivifiantes et pérennes de l’Évangile” (Jean XXIII), qu’a eu lieu le Concile Vatican II, au cours duquel l’Église, partant d’une conscience renouvelée de la tradition catholique, prend au sérieux et discerne, transfigure et dépasse les critiques qui sont à la base des courants qui ont caractérisé la modernité, c’est-à-dire la Réforme et les Lumières. »
Ce souci de réconcilier le passé et le présent, Benoît XVI l’applique également à la liturgie, domaine qui, dans les années post-conciliaires, a connu les bouleversements les plus brutaux. C’est pourquoi le pape s’élève contre une pratique de la liturgie actuelle en complète rupture avec celle d’hier, rupture dont on peut se demander parfois si beaucoup ne s’en satisfont pas, de manière à ce qu’il demeure un fossé infranchissable entre les deux formes du même rite romain, ce qui permet de refuser les « enrichissements mutuels » prônés par Benoît XVI, les uns pouvant ainsi continuer à « bricoler » leur propre façon de célébrer, les autres figeant une forme jugée intouchable. Quand il sera possible de célébrer la forme ordinaire de façon orientée, en latin et chantée en grégorien, un grand pas aura été fait pour préparer les esprits à la « réforme de la réforme »…
Sources : La Nef n°216 de juin 2010
Copyright, La Nef 2010
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 02.06.2010 - T/Benoît XVI
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