procession mariale à Strasbourg

Vous trouverez ci-après une vidéo qui vous montre un extrait de la procession mariale à Strasbourg le jour de la fête de l'Immaculée Conception en pleine période du marché de Noël.

Détail cocasse : ce n'est pas sur la vidéo mais nous sommes avec la statue de Notre Dame de Fatima passés rue... Martin Luther devant l'église Saint-Thomas et le Stift (le séminaire protestant où se forment les pasteurs) : siège de l'église protestante d'Alsace en chantant des chants à la gloire de la Vierge Immaculée 

Ne nous y trompons pas, bien que largement minoritaire démographiquement, ce sont les protestants qui font la pluie et le beau temps en politique comme dans le domaine religieux en Alsace.
Ainsi par exemple jusqu'à il y a quelques années à peine, les processions catholiques depuis la cathédrale de Strasbourg étaient interdites. Ce n'est que tout récemment, face à la montée en puissance de l'islam à Strasbourg et Mulhouse tout particulièrement, que les décideurs protestants alsaciens commençant à s’inquiéter de ce phénomène qu'ils ont pourtant contribué à faire naitre, ont daigné donner un peu de visibilité aux catholiques.

Je suis bien placé pour le savoir : on l'appelle la HSP (haute société protestante) mais cela s'explique en grande partie par un héritage historique. N'oublions pas que Strasbourg fut un fief protestant très puissant au XVIe siècle. Calvin lui-même s'y réfugia et y habita avant de partir pour Genève. Pendant plus de 150 ans la messe catholique fut interdite dans la ville. Le catholicisme a été réintroduit qu'à partir de 1681 sous l'impulsion de Louis XIV qui exigea personnellement que la cathédrale redevienne catholique.
Et effectivement vu l'influence du protestantisme dans la ville, en dehors de quelques périodes particulières, les autorités ont souvent refusé les processions catholiques externes s'appuyant sur les articles organiques demandant qu'en cas de ville confessionnelle mixte, les autorités de l'autre religion donnent leur accord. Ainsi, je le sais car je l'ai étudiée, toute procession externe catholique fut interdite en 1854 lors de la célébration du dogme de l'Immaculée Conception. Les autorités ont tout juste acceptées l'illumination de maisons des familles catholiques mais sans plus.

vinz 109 a écrit:les autorités ont souvent refusé les processions catholiques

D'après votre message, je crois comprendre que vous êtes alsacien ou vivez en Elsass  
Pouvez-vous nous faire un petit topo de l'état de foi catholique dans cette région ?

Je vais essayer de résumer au maximum car on pourrait écrire des pages sur ce sujet.

Disons que le diocèse de Strasbourg est l'un des plus anciens au monde : il date du IVe siècle et l'Alsace s'est toujours illustrée par sa foi et sa ferveur. Pour vous donner un ordre d'idée 10% des missionnaires au XIXe siècle étaient alsaciens et ils ont joué un rôle majeur dans l'évangélisation de plusieurs pays : le Cameroun, le Rwanda, le Pérou, la Thaïlande (Siam à l'époque), la Chine. Plusieurs ont fini martyrs et certains ont été canonisés d'ailleurs par st Jean-Paul II en 2000 (il s'agit de st Modeste Andlauer et st André Bauer tués lors de la guerre des boxers). Notre diocèse était parmi ceux  qui était le plus fourni en vocation sacerdotale : le grand séminaire était trop petit et les séminaristes devaient parfois loger dans une annexe dans un autre quartier de Strasbourg (devenu depuis un centre diocésain de formation et de colloque) : st jean-Paul II y logea lors de sa venue en 1988 et fit même ériger une croix dans le jardin en souvenir de son passage. Il n'était pas rare que l'évêque de Strasbourg ordonne 30 prêtres par année jusque dans les années 50 : le record fut 56 ordinands c'est dire ! Et même quand je me suis converti en 1993 (j'étais athée) le séminaire comptait encore 70 séminaristes avec une fréquence de 5 à 6 ordinands par an et parfois nous avions encore de bonnes années : le record fut 13 ordinands en 1997. Mais aujourd'hui nous subissons de plein fouet la sécularisation et la déchristianisation de la société de manière brutale. En 1979, le diocèse comptait encore 1000 prêtres et ils ne sont plus que 380 aujourd'hui. Pour la 1er fois ces dernières années on a dû faire venir des prêtres africains (quel paradoxe quand on pense à notre histoire missionnaire). Nous n'avons plus que 16 séminaristes et la fermeture du séminaire diocésain, un des derniers de France, n'est plus tabou. Pour la 1er fois de son existence le diocèse connaît lui aussi la crise des vocations. Mais bon on garde la foi. Quand st Jean-Paul II a béni la plaine d'Alsace en 1988 il a demandé au Seigneur que l'Alsace reste fidèle à son héritage et nous comptons aussi sur l'intercession de sainte Odile notre patronne dont nous fêterons le 1300e anniversaire de sa naissance au ciel l'année prochaine et de st Léon IX le pape alsacien.

Merci Vinz pour ce très intéressant éclairage.

Je me permets aussi de préciser que notre diocèse reste malgré tout encore fidèle à son héritage missionnaire.

Le Supérieur actuel des Missions étrangères de Paris est un prêtre alsacien et le vicaire apostolique de Pnom Phen au Cambodge (qui fut pendant plusieurs années le benjamin du collège épiscopal) est Alsacien et fils d'un diacre permanent.