Après mille ans de schisme, la réconcilliation historique
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Après mille ans de schisme, la réconcilliation historique
Dans une déclaration commune signée lors de leur rencontre historique à La Havane, le pape François et le primat de l’Église orthodoxe russe appellent à protéger les chrétiens au Moyen-Orient mais aussi les « racines chrétiennes de l’Europe », s’inquiétant au-delà de la perte « des piliers spirituels de l’existence humaine »
Ouvrant une perspective d’unité entre catholiques et orthodoxes, le texte reconnaît des obstacles à surmonter et des attitudes à éviter.
« La civilisation humaine est entrée dans un moment de changement d’époque ». La déclaration signée par le pape François et le patriarche Kirill, au terme de leur rencontre inédite le 12 février à La Havane, pose un regard inquiet sur ce changement tel qu’il frappe les chrétiens, qu’ils soient orthodoxes ou catholiques. Dans un texte en 30 points, diffusé depuis un pays, Cuba, lui-même en pleine mutation, le chef de l’Église catholique et celui de l’Église orthodoxe russe affirment une convergence de vues tant sur les persécutions des chrétiens dans le monde, en particulier au Moyen-Orient, que sur la « discrimination », dont ils font l’objet, selon eux, dans les sociétés développées. Avec la volonté de trouver « une réponse commune ».
« Nouvelle guerre mondiale »
Devant « l’exode massif des chrétiens » en Syrie et en Irak, les deux dirigeants religieux appellent « la communauté internationale à des actions urgentes ». Autrement dit, ils cautionnent implicitement le recours actuel à la force militaire dans la région – ce qui est la position du Saint-Siège depuis le début des frappes contre Daech. Sans que le groupe terroriste ultra-sunnite ne soit cité dans le texte, celui-ci fait état des « églises détruites et pillées de façon barbare, (des) objets sacrés profanés, monuments, détruits. »
Tout en appelant « la communauté internationale à mettre fin à la violence et au terrorisme », le pape et le patriarche russe invitent, en parallèle, aux négociations et au déploiement d’une « aide humanitaire à grande échelle » dans la région. Ils demandant par ailleurs aux dirigeants musulmans de se désolidariser clairement du recours à la violence fait au nom de l’Islam : « Aucun crime ne peut être commis au nom de Dieu ». L’enjeu au final n’est pas moins que d’éviter « une nouvelle guerre mondiale », que le pape juge aujourd’hui de moins en moins morcelée.
« L’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif »
Au-delà des régions en guerre, l’évêque de Rome et le primat russe réagissent aussi au « changement d’époque » en cours au sein des pays développés. La famille, le mariage entre un homme et une femme et la liberté religieuse sont mis en avant comme des valeurs à réaffirmer dans les sociétés où elles sont jugées attaquées, pressant catholiques et orthodoxes à réagir de concert. « Ce monde, dans lequel disparaissent progressivement les piliers spirituels de l’existence humaine, attend de nous un fort témoignage chrétien dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale ».
L’Europe en particulier est visée, comme en opposition au « puissant potentiel religieux de l’Amérique latine ». L’hommage à la construction européenne d’après-guerre s’accompagne d’une mise en garde « contre une intégration qui ne serait pas respectueuse des identités religieuses » : « Tout en demeurant ouverts à la contribution des autres religions à notre civilisation, nous sommes convaincus que l’Europe doit rester fidèle à ses racines chrétiennes. »
L’inquiétude exprimée est profonde et va au-delà du continent européen. « Nous voyons que la transformation de certains pays en sociétés sécularisées, étrangère à toute référence à Dieu et à sa vérité, constitue un sérieux danger pour la liberté religieuse ». Des « forces politiques, guidées par l’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif » sont montrées du doigt.
La critique commune des « normes séculières contemporaines » cible aussi bien l’avortement, le développement de « technologies de reproduction biomédicale » que celui « de la prétendue euthanasie », objet actuel de législations nouvelles. Le système économique mondial aussi est dénoncé pour ses excès, qui génèrent pauvreté, inégalités et injustice, mais en termes très généraux.
« Nous ne sommes pas concurrents mais frères »
Tourné vers les questions de société et les conflits, le texte n’élude pas l’objectif d’unité des deux Églises. Il se borne surtout à en encadrer la quête. « Nous ne sommes pas concurrents, mais frères », est-il résumé, à l’appui d’une « commune tradition spirituelle du premier millénaire du christianisme ». « Toute forme de prosélytisme » ou autres « moyens indus pour pousser des croyants à passer d’une Église à une autre » sont explicitement rejetés.
Le conflit en Ukraine met à l’épreuve cette quête. « Nous appelons nos Églises en Ukraine (..) à s’abstenir de participer à la confrontation et à ne pas soutenir un développement ultérieur du conflit », écrivent les deux primats : « Orthodoxes et gréco-catholiques ont besoin de se réconcilier et de trouver des formes de coexistence mutuellement acceptables ». L’uniatisme est considéré dépassé.
Hormis l’Ukraine, « de nombreux obstacles restent à surmonter » et des « divergences historiques (..) à surmonter » reconnaissent le patriarche Kirill et le pape, dont le texte n’aborde pas l’épineuse question du ministère pétrinien.
Leur rencontre ne se voulait de toute façon qu’un début. Mais elle devait mettre un tel processus sur les rails. Cette première entrevue fut minutieusement préparée pour apparaître solennelle sans être empruntée, chaleureuse sans n’être que protocolaire dans le cadre sans relief de l’aéroport de La Havane. « Finalement ». C’est le premier mot qu’a prononcé avec douceur le pape François en échangeant une longue accolade chaleureuse avec Kirill dans un petit salon au mur sombre, avant de prendre place chacun sur un fauteuil blanc pour deux heures d’entretien personnel, avec interprètes.
Avant les propos échangés, c’est l’intensité de l’échange de regard qui frappait. Les deux pasteurs ne se sont pas quittés des yeux, comme contemplant ce moment tant attendu, conscients de sa portée. Leurs sourires n’étaient pas larges mais profonds et les gestes, pleins de respect. Sous le regard du président cubain, Raul Castro, hôte paradoxal de ce rendez-vous œcuménique, déjà placé en vis-à-vis historique de celui entre Paul VI et le patriarche de Constantinople, Athénagoras.
http://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Vatican/Le-pape-et-le-patriarche-russe-denoncent-persecution-des-chretiens-et-perte-des-valeurs-2016-02-13-1200739800
Ouvrant une perspective d’unité entre catholiques et orthodoxes, le texte reconnaît des obstacles à surmonter et des attitudes à éviter.
« La civilisation humaine est entrée dans un moment de changement d’époque ». La déclaration signée par le pape François et le patriarche Kirill, au terme de leur rencontre inédite le 12 février à La Havane, pose un regard inquiet sur ce changement tel qu’il frappe les chrétiens, qu’ils soient orthodoxes ou catholiques. Dans un texte en 30 points, diffusé depuis un pays, Cuba, lui-même en pleine mutation, le chef de l’Église catholique et celui de l’Église orthodoxe russe affirment une convergence de vues tant sur les persécutions des chrétiens dans le monde, en particulier au Moyen-Orient, que sur la « discrimination », dont ils font l’objet, selon eux, dans les sociétés développées. Avec la volonté de trouver « une réponse commune ».
« Nouvelle guerre mondiale »
Devant « l’exode massif des chrétiens » en Syrie et en Irak, les deux dirigeants religieux appellent « la communauté internationale à des actions urgentes ». Autrement dit, ils cautionnent implicitement le recours actuel à la force militaire dans la région – ce qui est la position du Saint-Siège depuis le début des frappes contre Daech. Sans que le groupe terroriste ultra-sunnite ne soit cité dans le texte, celui-ci fait état des « églises détruites et pillées de façon barbare, (des) objets sacrés profanés, monuments, détruits. »
Tout en appelant « la communauté internationale à mettre fin à la violence et au terrorisme », le pape et le patriarche russe invitent, en parallèle, aux négociations et au déploiement d’une « aide humanitaire à grande échelle » dans la région. Ils demandant par ailleurs aux dirigeants musulmans de se désolidariser clairement du recours à la violence fait au nom de l’Islam : « Aucun crime ne peut être commis au nom de Dieu ». L’enjeu au final n’est pas moins que d’éviter « une nouvelle guerre mondiale », que le pape juge aujourd’hui de moins en moins morcelée.
« L’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif »
Au-delà des régions en guerre, l’évêque de Rome et le primat russe réagissent aussi au « changement d’époque » en cours au sein des pays développés. La famille, le mariage entre un homme et une femme et la liberté religieuse sont mis en avant comme des valeurs à réaffirmer dans les sociétés où elles sont jugées attaquées, pressant catholiques et orthodoxes à réagir de concert. « Ce monde, dans lequel disparaissent progressivement les piliers spirituels de l’existence humaine, attend de nous un fort témoignage chrétien dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale ».
L’Europe en particulier est visée, comme en opposition au « puissant potentiel religieux de l’Amérique latine ». L’hommage à la construction européenne d’après-guerre s’accompagne d’une mise en garde « contre une intégration qui ne serait pas respectueuse des identités religieuses » : « Tout en demeurant ouverts à la contribution des autres religions à notre civilisation, nous sommes convaincus que l’Europe doit rester fidèle à ses racines chrétiennes. »
L’inquiétude exprimée est profonde et va au-delà du continent européen. « Nous voyons que la transformation de certains pays en sociétés sécularisées, étrangère à toute référence à Dieu et à sa vérité, constitue un sérieux danger pour la liberté religieuse ». Des « forces politiques, guidées par l’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif » sont montrées du doigt.
La critique commune des « normes séculières contemporaines » cible aussi bien l’avortement, le développement de « technologies de reproduction biomédicale » que celui « de la prétendue euthanasie », objet actuel de législations nouvelles. Le système économique mondial aussi est dénoncé pour ses excès, qui génèrent pauvreté, inégalités et injustice, mais en termes très généraux.
« Nous ne sommes pas concurrents mais frères »
Tourné vers les questions de société et les conflits, le texte n’élude pas l’objectif d’unité des deux Églises. Il se borne surtout à en encadrer la quête. « Nous ne sommes pas concurrents, mais frères », est-il résumé, à l’appui d’une « commune tradition spirituelle du premier millénaire du christianisme ». « Toute forme de prosélytisme » ou autres « moyens indus pour pousser des croyants à passer d’une Église à une autre » sont explicitement rejetés.
Le conflit en Ukraine met à l’épreuve cette quête. « Nous appelons nos Églises en Ukraine (..) à s’abstenir de participer à la confrontation et à ne pas soutenir un développement ultérieur du conflit », écrivent les deux primats : « Orthodoxes et gréco-catholiques ont besoin de se réconcilier et de trouver des formes de coexistence mutuellement acceptables ». L’uniatisme est considéré dépassé.
Hormis l’Ukraine, « de nombreux obstacles restent à surmonter » et des « divergences historiques (..) à surmonter » reconnaissent le patriarche Kirill et le pape, dont le texte n’aborde pas l’épineuse question du ministère pétrinien.
Leur rencontre ne se voulait de toute façon qu’un début. Mais elle devait mettre un tel processus sur les rails. Cette première entrevue fut minutieusement préparée pour apparaître solennelle sans être empruntée, chaleureuse sans n’être que protocolaire dans le cadre sans relief de l’aéroport de La Havane. « Finalement ». C’est le premier mot qu’a prononcé avec douceur le pape François en échangeant une longue accolade chaleureuse avec Kirill dans un petit salon au mur sombre, avant de prendre place chacun sur un fauteuil blanc pour deux heures d’entretien personnel, avec interprètes.
Avant les propos échangés, c’est l’intensité de l’échange de regard qui frappait. Les deux pasteurs ne se sont pas quittés des yeux, comme contemplant ce moment tant attendu, conscients de sa portée. Leurs sourires n’étaient pas larges mais profonds et les gestes, pleins de respect. Sous le regard du président cubain, Raul Castro, hôte paradoxal de ce rendez-vous œcuménique, déjà placé en vis-à-vis historique de celui entre Paul VI et le patriarche de Constantinople, Athénagoras.
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boisvert- Hosanna au plus haut des cieux!
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