la femme qui craint Dieu sera seule louée.
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la femme qui craint Dieu sera seule louée.
la femme qui craint Dieu sera seule louée.
Abbé Combalot
Conférences sur les grandeurs de la Sainte Vierge
Mois de Marie, église Saint-Sulpice, Paris, 1854
XVè CONFÉRENCE : SUR L'EDUCATION DES FILLES.
Fallax gratia, et varna est pulchristudo : mulier timens Dominum ipsa laudabitur.
Les grâces sont trompeuses, la beauté est vaine : la femme qui craint Dieu sera seule louée. (Pnov. xxxi, 30)
Ces paroles divines renferment un sens profond.
Les grâces purement physiques et la beauté de la femme sont souvent des
dons funestes. Elles cachent presque toujours des piéges, parce que,
d'un côté, les enfants du siècle se laissent aveugler par les attraits
de la nature, et parce que, d'un autre côté, ces dons purement
extérieurs, quand ils n'ont pas la piété, la crainte de Dieu et la
vertu pour fondement, recouvrent toujours un égoïsme profond et une
foule de misères morales pareilles aux épines cachées sous la plus
belle des fleurs, ou au poison mêlé à un breuvage enivrant.
Les
hommes charnels qui courent après la beauté, et la femme qui ne brille
que par l'éclat des grâces de la nature, n'aiment que ces dons
éphémères. De là ces fades louanges, ces adulations basses, indignes de ceux qui les donnent, et si funestes à celle qui les reçoit ; de là ce servilisme rampant de l'homme qui mendie les regards et les préférences coupables de ces idoles de chair ; de là aussi le despotisme, l'orgueil, les pensées mauvaises et souvent implacables de la femme, qui n'a d'autre mérite que la régularité et la fraîcheur des traits de son visage. Et voilà pourquoi le Saint-Esprit nous assure que la beauté de la femme est vaine, et ses grâces personnelles menteuses.
L'éducation
moderne, dans son action sur la jeune fille, n'a pas d'autre but que
cette perfectibilité physique et fallacieusement intellectuelle que les
mondains veulent trouver dans les femmes qui brillent dans les cercles, et qui vont faire assaut d'esprit dans les salons.
La bienheureuse Vierge, chef-d'œuvre de Dieu, a possédé tous les dons de la nature
dans un degré si parfait que le divin saint Denys, après avoir
contemplé sur la terre les traits mortels de Marie, s'écriait qu'il
aurait pris la Mère du Fils de Dieu pour une divinité, si la foi ne lui
avait appris qu'elle n'était qu'une créature.
Mais ces dons
extérieurs, comparés aux richesses divines dont la grâce avait rempli
l'âme immaculée de Marie, n'étaient pas même une ombre de cette beauté
intime et toute céleste qui faisait dire au Roi-Prophète : «Toute la
beauté de la Fille du Roi est au dedans : Omnis gloria ejus Filiæ Regis ab intùs».
La grâce
donc, la grâce divine dont la sainte Vierge est la mère, la reine, le
mystérieux canal, doit présider seule au développement moral de la
jeune fille, comme la foi aux dogmes révélés doit seule présider à son
développement intellectuel.
L'éducation de l'âme de la jeune
fille, en un mot, doit être un reflet des vertus de la très pure
Vierge, et ce n'est qu'à ce prix que nous verrons disparaître la plaie immense de l'éducation égoïste qu'elle reçoit aujourd'hui.
En
essayant de déterminer dans un autre entretien par quelles vertus la
sainte Vierge s'était préparée à la maternité divine, nous avons vu
qu'elle s'en était rendue digne par sa foi héroïque, par son humilité profonde, par sa pureté sans tache, par la ferveur de sa charité et de son oraison. Or, ces vertus, d'origine surnaturelle, que la bienheureuse Marie a pratiquées dans le degré le plus sublime, doivent être aussi l'élément générateur de l'éducation morale de la jeune fille,
et c'est parce que ces vertus seules peuvent la préparer à sa mission
régénératrice sur le monde. Ces vertus, en effet, Mes Frères, résument
sa vie de vierge et d'épouse, de mère et de veuve, et seules enfin
elles peuvent la rendre semblable à la bienheureuse Marie, modèle parfait, type glorieux de la femme chrétienne.
Le premier, le plus indispensable besoin de la jeune fille, dans l'ordre de son éducation morale, c'est la foi que saint Augustin appelle si excellemment «la santé de l'âme : Sanitas animæ».
Le
siècle où nous vivons, et qu'elle doit traverser, est un siècle inondé
d'idées fausses, de systèmes d'erreurs, de préjugés antichrétiens. Une foi vive, forte, pratique et inébranlable
peut seule préserver le cœur et l'esprit de la jeune fille du contact
inévitable de ces erreurs et de ces systèmes. Faible, immensément
faible par nature, elle sera invincible par la foi ; «car la foi, dit l'évangéliste saint Jean, nous fait vaincre le monde : Hæc est victoria quæ vincit mundum, fides nostra. (I Jean, v, 4.)».
La
foi, et une foi éclairée, donnera toujours à une femme une élévation de
pensées, une rectitude de jugement, une force de caractère, une énergie
morale, qui la mettront à l'abri des écueils contre lesquels tant de
femmes, qui se croyaient fortes, ont vu se briser l'édifice de leur
fragile vertu.
Quand la jeune fille se sera
nourrie, avec une sainte abondance, du lait et du pain de la vérité, ne
craignez pas qu'elle laisse monter les noires vapeurs du doute et du mensonge dans la région sereine et sous le ciel sans nuages qu'elle habite avec le Dieu de son cœur.
C'est
par la foi qu'une éducation vraiment réparatrice déracinera du cœur de
la jeune fille ces maximes païennes trop répandues de nos jours sur le
bonheur des richesses, sur les privilèges de la naissance, sur les
droits exagérés des distinctions de rang et de position sociale.
Eclairée
au flambeau de la foi, elle préférera toujours son titre d'enfant de
Dieu à toutes les vanités de la naissance et à tout cet orgueil
idolâtre des enfants du siècle.
La foi apprendra à vos filles à goûter les maximes évangéliques sur la béatitude des larmes et de la pauvreté, du renoncement et de la souffrance.
Par la foi, et par une foi exercée, elles sauront pénétrer dans les
réalités invisibles du monde de la grâce ; elles comprendront, à la
lumière des paroles de Jésus-Christ, la dignité du pauvre dans l'Eglise
et la sainte égalité de tous les enfants de la régénération devant la
loi divine et devant les espérances de la vie éternelle.
L'humilité,
fondement des grandeurs et des hautes destinées de la très sainte
Vierge, doit être aussi la base de l'éducation des filles. La foi leur
donne la lumière de la vérité, et l'humilité enrichit leur âme des plus
solides vertus.
La mission de la femme chrétienne, depuis l'accomplissement du dogme de la maternité divine, est une mission de salut et de vie pour la société.
Par son affranchissement surnaturel, à l'ombre du culte glorificateur
de Marie, la femme régénérée a mis dans la balance des destinées
reconquises de la race humaine le poids de ses vertus, et la
civilisation européenne s'est faite sous l'empire des bénédictions et
des espérances dont elle est devenue le foyer.
Mais remarquez que toute la mission civilisatrice de la femme est, pour ainsi dire, renfermée
dans le cercle de la famille. C'est du fond du sanctuaire domestique
qu'elle répand sur le monde ces germes de vie qui purifient, et ces
bienfaits qui sauvent.
Les femmes sont les racines de l'arbre social ; elles sont le fondement de l'édifice des siècles de la grâce.
Mais les racines puisent aux entrailles de la terre la sève et la vie
qu'elles communiquent à la tige et aux branches ; mais les fondements
d'un édifice doivent être cachés dans les profondeurs du sol sur lequel
l'édifice s'élève.
La vie d'une femme, d'une épouse,
d'une mère, d'une veuve vraiment chrétienne se compose de devoirs
obscurs et presque inaperçus, et l'avenir, tout l'avenir des races
humaines, dépend de ces devoirs.
La vie sociale de la femme catholique doit être une vie de retraite, de silence, de travail, de renoncement et de patience.
Sa royauté véritable est celle de la modestie, des sollicitudes de la famille et de la vertu.
Or, pour se condamner à une vie ignorée et laborieuse, pour s'immoler à
chaque heure aux volontés d'un mari dont le caractère n'a pas toujours
reçu cette souplesse malléable que la grâce de Jésus-Christ seul
pouvait lui donner, il faut être prodigieusement dépouillée de soi-même. Point donc de vertu solide dans le cœur d'une femme sans une abnégation profonde de soi ; mais point d'abnégation sans humilité.
La femme vraiment humble se plaît dans le silence; elle aime la solitude de sa maison
; elle trouve de grandes douceurs dans sa retraite. La femme
orgueilleuse a horreur du silence et de la vie cachée ; il lui faut une
colonne, un théâtre, du haut desquels elle puisse se faire voir et
mendier des applaudissements.
Nous avons dit que l'auguste Marie
s'est élevée à la hauteur de sa destinée par une pureté si grande, que
Dieu seul en connaît le prix, et que le Saint-Esprit la compare à
l'éclatante blancheur du lis qui grandit au milieu des épines.
L'âme
virginale de Marie est devenue le sanctuaire que Dieu Lui-même S'est
choisi, pour y consommer l'œuvre des anéantissements du Verbe et celle
des gloires de l'humanité.
Or, Mes Chers Frères, l'éducation de
la jeune fille doit la faire vivre de la vie de l'âme, de la vie des
Anges et de la vie de Dieu. Elle doit avoir pour conséquence et pour fruit l'anéantissement de l'idolâtrie d'elle-même ; elle doit tendre à subjuguer pleinement en elle l'amour
égoïste de sa frêle beauté, la passion désordonnée des louanges, les
folies de la vanité et du luxe, et jusqu'à l'ombre du sensualisme et de
la mollesse.
Si l'éducation que vous donnez à
vos filles ne pénètre leur âme de cette énergie de la foi, de cette
sève divine de la grâce, seules capables d'éteindre le sensualisme de
l'âme et des sens, vous n'en ferez que des idoles de chair pour les
criminelles adorations des enfants de ce siècle.
La jeune fille naît violemment penchée vers les
choses sensibles, et les deux puissances qui prédominent originairement
en elle sont l'imagination et la sensibilité purement physique. Si donc, à l'aide des secours réparateurs de la grâce et des sacrements, vous ne l'affranchissez de bonne heure de la tyrannie des choses sensibles,
au lieu de porter au sein des familles les éléments de la vie
surnaturelle, elle y ressuscitera le paganisme des sensations et
l'idolâtrie de la matière.
La femme est le principe des mœurs domestiques, et la société est toujours faite à l'image de ses vertus ou de ses passions.
Malheur
donc à un peuple, malheur au monde, quand l'éducation des filles sort
des doctrines et des théories qui proclament ou qui légitiment le
triomphe de la vie des sens sur la vie de l'âme ! ! !
La très sainte Vierge, depuis le premier moment de son existence jusqu'à son glorieux trépas, a vécu de recueillement et de prière. Jamais, au milieu des obscurs travaux de la pauvre maison de Nazareth, elle ne fut distraite un moment des douces et sublimes extases de la contemplation.
Et c'est par cette vie toute céleste qu'elle entra si profondément dans
le mystère de la Rédemption et du salut de l'humanité, que les saints
Docteurs ne craignent pas d'avancer que son divin Fils a voulu lui en
faire partager toute la gloire.
La femme chrétienne, pour atteindre sa vocation et pour remplir sa destinée réparatrice sur le monde, doit être familiarisée avec le saint exercice de la méditation et de la prière. Le sens des choses divines doit être excité et développé en elle par une oraison fervente et continuelle.
La vie d'une femme sera toujours une vie d'obéissance, de sacrifices et de renoncement.
Les devoirs de sa vocation sont des devoirs difficiles. Il faut donc
qu'elle cherche dans la méditation des choses divines une force que la
nature et la raison seules ne lui donneront jamais. Pour refléter sur
le sanctuaire de la famille les vertus qui font sa gloire, elle doit
respirer du côté du ciel et n'attendre que d'en haut le courage dont
elle a besoin.
Elle doit à ses enfants, à son époux, à ses serviteurs et à tous ceux qui l'entourent le touchant spectacle d'une vie
riche de patience, de longanimité, de sagesse et de résignation. Mais
si l'esprit de prière lui manque (et il lui manquera, si une éducation
profondément chrétienne ne l'y a préparée) l'irritabilité de sa nature,
la violence du caractère, l'activité fiévreuse de l'imagination et la
mollesse de l’âme feront de sa demeure la patrie des orages et de sa
vie un supplice.
La femme vraiment chrétienne est un être priant, un ange contemplatif.
La prière est le supplément de ses facultés, et c'est par la prière que
la femme atteint et surpasse quelquefois le niveau intellectuel de
l'homme. La prière a pour une femme sincèrement pieuse des inspirations
qui déconcerteront toujours la raison la plus confiante en elle-même,
quand elle n'a pour guide que les lueurs vacillantes de ses opinions et
de ses doutes. La femme de prière est l'ange protecteur de la
famille, la consolatrice de tous ceux qui souffrent autour d'elle, le
conseil de ceux que le monde aveugle et que les passions égarent.
Et je ne connais pas, chez une mère, de secret plus puissant, pour
faire de sa maison une image du ciel, que d'y naturaliser, pour ainsi
dire, l'élément sacré de la prière.
Ajoutons, Mes Chers Frères, à ces vertus fondamentales de l'éducation morale de la jeune fille le sentiment surnaturel de l'amour de Dieu et de l'amour du prochain, sans lequel sa vie entière ne sera jamais que le perpétuel travail d'un stérile égoïsme.
Ce
double amour dilaté dans sa plénitude, dans le cœur virginal de Marie,
a fait de son âme le séjour le plus digne de Dieu et le foyer le plus
fécond de la charité et de la miséricorde. L'amour de Marie pour son
Dieu L'a, pour ainsi dire, forcé de la choisir pour Mère ; et sa bonté,
sa charité et sa miséricorde s'épanchent sur les enfants de l'Eglise
avec une telle abondance, que, selon l'opinion commune des théologiens,
toutes les bénédictions et toutes les grâces qui sont descendues sur le
monde, depuis l'accomplissement du mystère de la Rédemption, se sont
reposées dans son cœur maternel pour s'y enrichir, si j'ose ainsi dire,
de toute la tendresse de son amour pour les hommes.
Marie a rempli le ciel et la terre des flammes du plus pur amour, et son cœur immaculé est le foyer mystérieux qui échauffe, qui développe et qui mûrit tous les fruits de la grâce.
Or,
Mes Frères, une éducation fondée sur l'amour de Dieu et sur la charité
fraternelle peut seule déraciner du cœur de la jeune fille cet égoïsme
inné, cause de tous les maux de la société.
Le cœur de la femme ne vit que par l'amour;
et, quand la charité de l'Esprit-Saint n'y a pas établi son empire,
s'épuisant elle-même, elle s'efforce de réaliser au fond de son âme une
ombre éphémère de cet amour sans terme et sans fin qui fait le fond de
sa vie.
La prière, l'Eucharistie, la passion du
Sauveur, le culte de la Reine des Anges et des Saints, renferment tous
les éléments de ce double amour; et si la jeune fille sait en
goûter de bonne heure les douceurs et les charmes, elle subira
inévitablement sous son action une transformation miraculeuse, et son
âme, arrosée par la grâce, aimera Dieu et le prochain de toute
l'étendue de ses puissances affectives.
Dès lors aussi son cœur deviendra l'un des plus beaux chefs-d'œuvre du monde surnaturel.
Tout ce qu'il y a de noble et de généreux, d'héroïque et de tendre, s'y
concentrera, pour ainsi dire ; et la famille, ravagée par les
commotions de l'égoïsme, renaîtra à des destinées nouvelles, et nous
pourrons prévoir et même prédire la fin de ces jours qui semblent avoir
ressuscité parmi nous toutes les hontes et toutes les misères des
siècles du paganisme.
Abbé Combalot
Conférences sur les grandeurs de la Sainte Vierge
Mois de Marie, église Saint-Sulpice, Paris, 1854
XVè CONFÉRENCE : SUR L'EDUCATION DES FILLES.
Fallax gratia, et varna est pulchristudo : mulier timens Dominum ipsa laudabitur.
Les grâces sont trompeuses, la beauté est vaine : la femme qui craint Dieu sera seule louée. (Pnov. xxxi, 30)
Ces paroles divines renferment un sens profond.
Les grâces purement physiques et la beauté de la femme sont souvent des
dons funestes. Elles cachent presque toujours des piéges, parce que,
d'un côté, les enfants du siècle se laissent aveugler par les attraits
de la nature, et parce que, d'un autre côté, ces dons purement
extérieurs, quand ils n'ont pas la piété, la crainte de Dieu et la
vertu pour fondement, recouvrent toujours un égoïsme profond et une
foule de misères morales pareilles aux épines cachées sous la plus
belle des fleurs, ou au poison mêlé à un breuvage enivrant.
Les
hommes charnels qui courent après la beauté, et la femme qui ne brille
que par l'éclat des grâces de la nature, n'aiment que ces dons
éphémères. De là ces fades louanges, ces adulations basses, indignes de ceux qui les donnent, et si funestes à celle qui les reçoit ; de là ce servilisme rampant de l'homme qui mendie les regards et les préférences coupables de ces idoles de chair ; de là aussi le despotisme, l'orgueil, les pensées mauvaises et souvent implacables de la femme, qui n'a d'autre mérite que la régularité et la fraîcheur des traits de son visage. Et voilà pourquoi le Saint-Esprit nous assure que la beauté de la femme est vaine, et ses grâces personnelles menteuses.
L'éducation
moderne, dans son action sur la jeune fille, n'a pas d'autre but que
cette perfectibilité physique et fallacieusement intellectuelle que les
mondains veulent trouver dans les femmes qui brillent dans les cercles, et qui vont faire assaut d'esprit dans les salons.
La bienheureuse Vierge, chef-d'œuvre de Dieu, a possédé tous les dons de la nature
dans un degré si parfait que le divin saint Denys, après avoir
contemplé sur la terre les traits mortels de Marie, s'écriait qu'il
aurait pris la Mère du Fils de Dieu pour une divinité, si la foi ne lui
avait appris qu'elle n'était qu'une créature.
Mais ces dons
extérieurs, comparés aux richesses divines dont la grâce avait rempli
l'âme immaculée de Marie, n'étaient pas même une ombre de cette beauté
intime et toute céleste qui faisait dire au Roi-Prophète : «Toute la
beauté de la Fille du Roi est au dedans : Omnis gloria ejus Filiæ Regis ab intùs».
La grâce
donc, la grâce divine dont la sainte Vierge est la mère, la reine, le
mystérieux canal, doit présider seule au développement moral de la
jeune fille, comme la foi aux dogmes révélés doit seule présider à son
développement intellectuel.
L'éducation de l'âme de la jeune
fille, en un mot, doit être un reflet des vertus de la très pure
Vierge, et ce n'est qu'à ce prix que nous verrons disparaître la plaie immense de l'éducation égoïste qu'elle reçoit aujourd'hui.
En
essayant de déterminer dans un autre entretien par quelles vertus la
sainte Vierge s'était préparée à la maternité divine, nous avons vu
qu'elle s'en était rendue digne par sa foi héroïque, par son humilité profonde, par sa pureté sans tache, par la ferveur de sa charité et de son oraison. Or, ces vertus, d'origine surnaturelle, que la bienheureuse Marie a pratiquées dans le degré le plus sublime, doivent être aussi l'élément générateur de l'éducation morale de la jeune fille,
et c'est parce que ces vertus seules peuvent la préparer à sa mission
régénératrice sur le monde. Ces vertus, en effet, Mes Frères, résument
sa vie de vierge et d'épouse, de mère et de veuve, et seules enfin
elles peuvent la rendre semblable à la bienheureuse Marie, modèle parfait, type glorieux de la femme chrétienne.
Le premier, le plus indispensable besoin de la jeune fille, dans l'ordre de son éducation morale, c'est la foi que saint Augustin appelle si excellemment «la santé de l'âme : Sanitas animæ».
Le
siècle où nous vivons, et qu'elle doit traverser, est un siècle inondé
d'idées fausses, de systèmes d'erreurs, de préjugés antichrétiens. Une foi vive, forte, pratique et inébranlable
peut seule préserver le cœur et l'esprit de la jeune fille du contact
inévitable de ces erreurs et de ces systèmes. Faible, immensément
faible par nature, elle sera invincible par la foi ; «car la foi, dit l'évangéliste saint Jean, nous fait vaincre le monde : Hæc est victoria quæ vincit mundum, fides nostra. (I Jean, v, 4.)».
La
foi, et une foi éclairée, donnera toujours à une femme une élévation de
pensées, une rectitude de jugement, une force de caractère, une énergie
morale, qui la mettront à l'abri des écueils contre lesquels tant de
femmes, qui se croyaient fortes, ont vu se briser l'édifice de leur
fragile vertu.
Quand la jeune fille se sera
nourrie, avec une sainte abondance, du lait et du pain de la vérité, ne
craignez pas qu'elle laisse monter les noires vapeurs du doute et du mensonge dans la région sereine et sous le ciel sans nuages qu'elle habite avec le Dieu de son cœur.
C'est
par la foi qu'une éducation vraiment réparatrice déracinera du cœur de
la jeune fille ces maximes païennes trop répandues de nos jours sur le
bonheur des richesses, sur les privilèges de la naissance, sur les
droits exagérés des distinctions de rang et de position sociale.
Eclairée
au flambeau de la foi, elle préférera toujours son titre d'enfant de
Dieu à toutes les vanités de la naissance et à tout cet orgueil
idolâtre des enfants du siècle.
La foi apprendra à vos filles à goûter les maximes évangéliques sur la béatitude des larmes et de la pauvreté, du renoncement et de la souffrance.
Par la foi, et par une foi exercée, elles sauront pénétrer dans les
réalités invisibles du monde de la grâce ; elles comprendront, à la
lumière des paroles de Jésus-Christ, la dignité du pauvre dans l'Eglise
et la sainte égalité de tous les enfants de la régénération devant la
loi divine et devant les espérances de la vie éternelle.
L'humilité,
fondement des grandeurs et des hautes destinées de la très sainte
Vierge, doit être aussi la base de l'éducation des filles. La foi leur
donne la lumière de la vérité, et l'humilité enrichit leur âme des plus
solides vertus.
La mission de la femme chrétienne, depuis l'accomplissement du dogme de la maternité divine, est une mission de salut et de vie pour la société.
Par son affranchissement surnaturel, à l'ombre du culte glorificateur
de Marie, la femme régénérée a mis dans la balance des destinées
reconquises de la race humaine le poids de ses vertus, et la
civilisation européenne s'est faite sous l'empire des bénédictions et
des espérances dont elle est devenue le foyer.
Mais remarquez que toute la mission civilisatrice de la femme est, pour ainsi dire, renfermée
dans le cercle de la famille. C'est du fond du sanctuaire domestique
qu'elle répand sur le monde ces germes de vie qui purifient, et ces
bienfaits qui sauvent.
Les femmes sont les racines de l'arbre social ; elles sont le fondement de l'édifice des siècles de la grâce.
Mais les racines puisent aux entrailles de la terre la sève et la vie
qu'elles communiquent à la tige et aux branches ; mais les fondements
d'un édifice doivent être cachés dans les profondeurs du sol sur lequel
l'édifice s'élève.
La vie d'une femme, d'une épouse,
d'une mère, d'une veuve vraiment chrétienne se compose de devoirs
obscurs et presque inaperçus, et l'avenir, tout l'avenir des races
humaines, dépend de ces devoirs.
La vie sociale de la femme catholique doit être une vie de retraite, de silence, de travail, de renoncement et de patience.
Sa royauté véritable est celle de la modestie, des sollicitudes de la famille et de la vertu.
Or, pour se condamner à une vie ignorée et laborieuse, pour s'immoler à
chaque heure aux volontés d'un mari dont le caractère n'a pas toujours
reçu cette souplesse malléable que la grâce de Jésus-Christ seul
pouvait lui donner, il faut être prodigieusement dépouillée de soi-même. Point donc de vertu solide dans le cœur d'une femme sans une abnégation profonde de soi ; mais point d'abnégation sans humilité.
La femme vraiment humble se plaît dans le silence; elle aime la solitude de sa maison
; elle trouve de grandes douceurs dans sa retraite. La femme
orgueilleuse a horreur du silence et de la vie cachée ; il lui faut une
colonne, un théâtre, du haut desquels elle puisse se faire voir et
mendier des applaudissements.
Nous avons dit que l'auguste Marie
s'est élevée à la hauteur de sa destinée par une pureté si grande, que
Dieu seul en connaît le prix, et que le Saint-Esprit la compare à
l'éclatante blancheur du lis qui grandit au milieu des épines.
L'âme
virginale de Marie est devenue le sanctuaire que Dieu Lui-même S'est
choisi, pour y consommer l'œuvre des anéantissements du Verbe et celle
des gloires de l'humanité.
Or, Mes Chers Frères, l'éducation de
la jeune fille doit la faire vivre de la vie de l'âme, de la vie des
Anges et de la vie de Dieu. Elle doit avoir pour conséquence et pour fruit l'anéantissement de l'idolâtrie d'elle-même ; elle doit tendre à subjuguer pleinement en elle l'amour
égoïste de sa frêle beauté, la passion désordonnée des louanges, les
folies de la vanité et du luxe, et jusqu'à l'ombre du sensualisme et de
la mollesse.
Si l'éducation que vous donnez à
vos filles ne pénètre leur âme de cette énergie de la foi, de cette
sève divine de la grâce, seules capables d'éteindre le sensualisme de
l'âme et des sens, vous n'en ferez que des idoles de chair pour les
criminelles adorations des enfants de ce siècle.
La jeune fille naît violemment penchée vers les
choses sensibles, et les deux puissances qui prédominent originairement
en elle sont l'imagination et la sensibilité purement physique. Si donc, à l'aide des secours réparateurs de la grâce et des sacrements, vous ne l'affranchissez de bonne heure de la tyrannie des choses sensibles,
au lieu de porter au sein des familles les éléments de la vie
surnaturelle, elle y ressuscitera le paganisme des sensations et
l'idolâtrie de la matière.
La femme est le principe des mœurs domestiques, et la société est toujours faite à l'image de ses vertus ou de ses passions.
Malheur
donc à un peuple, malheur au monde, quand l'éducation des filles sort
des doctrines et des théories qui proclament ou qui légitiment le
triomphe de la vie des sens sur la vie de l'âme ! ! !
La très sainte Vierge, depuis le premier moment de son existence jusqu'à son glorieux trépas, a vécu de recueillement et de prière. Jamais, au milieu des obscurs travaux de la pauvre maison de Nazareth, elle ne fut distraite un moment des douces et sublimes extases de la contemplation.
Et c'est par cette vie toute céleste qu'elle entra si profondément dans
le mystère de la Rédemption et du salut de l'humanité, que les saints
Docteurs ne craignent pas d'avancer que son divin Fils a voulu lui en
faire partager toute la gloire.
La femme chrétienne, pour atteindre sa vocation et pour remplir sa destinée réparatrice sur le monde, doit être familiarisée avec le saint exercice de la méditation et de la prière. Le sens des choses divines doit être excité et développé en elle par une oraison fervente et continuelle.
La vie d'une femme sera toujours une vie d'obéissance, de sacrifices et de renoncement.
Les devoirs de sa vocation sont des devoirs difficiles. Il faut donc
qu'elle cherche dans la méditation des choses divines une force que la
nature et la raison seules ne lui donneront jamais. Pour refléter sur
le sanctuaire de la famille les vertus qui font sa gloire, elle doit
respirer du côté du ciel et n'attendre que d'en haut le courage dont
elle a besoin.
Elle doit à ses enfants, à son époux, à ses serviteurs et à tous ceux qui l'entourent le touchant spectacle d'une vie
riche de patience, de longanimité, de sagesse et de résignation. Mais
si l'esprit de prière lui manque (et il lui manquera, si une éducation
profondément chrétienne ne l'y a préparée) l'irritabilité de sa nature,
la violence du caractère, l'activité fiévreuse de l'imagination et la
mollesse de l’âme feront de sa demeure la patrie des orages et de sa
vie un supplice.
La femme vraiment chrétienne est un être priant, un ange contemplatif.
La prière est le supplément de ses facultés, et c'est par la prière que
la femme atteint et surpasse quelquefois le niveau intellectuel de
l'homme. La prière a pour une femme sincèrement pieuse des inspirations
qui déconcerteront toujours la raison la plus confiante en elle-même,
quand elle n'a pour guide que les lueurs vacillantes de ses opinions et
de ses doutes. La femme de prière est l'ange protecteur de la
famille, la consolatrice de tous ceux qui souffrent autour d'elle, le
conseil de ceux que le monde aveugle et que les passions égarent.
Et je ne connais pas, chez une mère, de secret plus puissant, pour
faire de sa maison une image du ciel, que d'y naturaliser, pour ainsi
dire, l'élément sacré de la prière.
Ajoutons, Mes Chers Frères, à ces vertus fondamentales de l'éducation morale de la jeune fille le sentiment surnaturel de l'amour de Dieu et de l'amour du prochain, sans lequel sa vie entière ne sera jamais que le perpétuel travail d'un stérile égoïsme.
Ce
double amour dilaté dans sa plénitude, dans le cœur virginal de Marie,
a fait de son âme le séjour le plus digne de Dieu et le foyer le plus
fécond de la charité et de la miséricorde. L'amour de Marie pour son
Dieu L'a, pour ainsi dire, forcé de la choisir pour Mère ; et sa bonté,
sa charité et sa miséricorde s'épanchent sur les enfants de l'Eglise
avec une telle abondance, que, selon l'opinion commune des théologiens,
toutes les bénédictions et toutes les grâces qui sont descendues sur le
monde, depuis l'accomplissement du mystère de la Rédemption, se sont
reposées dans son cœur maternel pour s'y enrichir, si j'ose ainsi dire,
de toute la tendresse de son amour pour les hommes.
Marie a rempli le ciel et la terre des flammes du plus pur amour, et son cœur immaculé est le foyer mystérieux qui échauffe, qui développe et qui mûrit tous les fruits de la grâce.
Or,
Mes Frères, une éducation fondée sur l'amour de Dieu et sur la charité
fraternelle peut seule déraciner du cœur de la jeune fille cet égoïsme
inné, cause de tous les maux de la société.
Le cœur de la femme ne vit que par l'amour;
et, quand la charité de l'Esprit-Saint n'y a pas établi son empire,
s'épuisant elle-même, elle s'efforce de réaliser au fond de son âme une
ombre éphémère de cet amour sans terme et sans fin qui fait le fond de
sa vie.
La prière, l'Eucharistie, la passion du
Sauveur, le culte de la Reine des Anges et des Saints, renferment tous
les éléments de ce double amour; et si la jeune fille sait en
goûter de bonne heure les douceurs et les charmes, elle subira
inévitablement sous son action une transformation miraculeuse, et son
âme, arrosée par la grâce, aimera Dieu et le prochain de toute
l'étendue de ses puissances affectives.
Dès lors aussi son cœur deviendra l'un des plus beaux chefs-d'œuvre du monde surnaturel.
Tout ce qu'il y a de noble et de généreux, d'héroïque et de tendre, s'y
concentrera, pour ainsi dire ; et la famille, ravagée par les
commotions de l'égoïsme, renaîtra à des destinées nouvelles, et nous
pourrons prévoir et même prédire la fin de ces jours qui semblent avoir
ressuscité parmi nous toutes les hontes et toutes les misères des
siècles du paganisme.
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