Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
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Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire
Abbé Rossignoli
Introduction
La charité bien comprise nous fait un devoir très-pressant
de subvenir aux nécessités des âmes du Purgatoire 1
1 - Excellence des suffrages en faveur des morts 6
2 - Ne pas soulager les défunts par des aumônes, c'est se priver soi-même
de grands avantages spirituels 10
3 - Dieu exauce les prières des communautés ferventes en faveur des
défunts 15
4 - La conversion renvoyée au soir de la vie conduit l'âme à la cruelle
faim du Purgatoire 18
5 - La miséricorde envers les défunts procure le salut de l'âme, et souvent
même celui du corps 21.
6 - Le purgatoire des paroles inconvenantes 24
7 - Une âme du Purgatoire rappelée à l'expiation sur la terre 27
8 - Combien les âmes du Purgatoire sont soulagées par le jeûne et l'oraison 30
9 - Intercession d'une femme pleine de foi 33
10 - La protection du Ciel en faveur de l'homme de bien 36.
11 - Martyre de charité de sainte Christine-l'Admirable pour la délivrance
des âmes du Purgatoire 40
12 - La Mère de Dieu mère des âmes du Purgatoire 44
13 - Dieu accorde à ses saints de grandes grâces en faveur des âmes du
Purgatoire 47
14 - Comment les prières d'un saint délivrent quantité d'âmes 50
15 - La peine transférée d'un défunt à un vivant 54
16 - C'est se délivrer soi-même que de secourir les âmes du Purgatoire 57
17 - Les souffrances du Purgatoire bien que passagères paraissent
extrèmement longues 61
18 - Les peines du Purgatoire conformes aux fautes commises 64
19 - Le Ciel bénit ceux qui prient pour les morts 68
20 - Ingratitude des héritiers envers leurs bienfaiteurs 70
21 - Actions de grâces des âmes du Purgatoire envers leurs libérateurs 74
22 - Il faut travailler par soi-même à éviter le Purgatoire 77
23 - Traits divers de charité 81
24 - Souffrances des âmes qui ont donné du scandale 84
25 - Pour entrer au Ciel il faut être exempt de la moindre faute 87
26 - Admirable commerce de charité entre les vivants et les défunts 91
27 - Traits divers 96
28 - Traits merveilleux sur la mort et sur le Purgatoire 99
29 - Les indulgences 102
30 - La protection des saints utile, après la mort à qui l'a invoquée ici-bas 105
31 - Reconnaissance des âmes pour leurs bienfaiteurs 108
32 - Celui qui souffre pieusement ici-bas va tout droit au repos éternel 111
33 - Sainte usure de ceux qui appliquent leurs oeuvres au soulagement des défunts 114
34 - Le sang de Notre-Seigneur dans l'Eucharistie 117
35 - Il vaut mieux mourir avec la certitude d'aller en Purgatoire
que de vivre en danger de péché 120
36 - Les justes eux-mêmes ne sont pas irrépréhensibles devant Dieu 125
37 - On ne sort du Purgatoire qu'après une expiation entière et complète 128
38 - La dévotion du saint Rosaire 131
39 - Tourment apaisé 135
40 - Protection des âmes du Purgatoire 137
41 - Oeuvres d'insigne charité envers les âmes du Purgatoire 140
42 - Supplication merveilleuse 143
43 - Bienfaits des âmes du Purgatoire envers ceux qui les assistent 145
44 - La sainte communion pour les morts 148
45 - La divine Eucharistie154
46 - Le pardon d'une offense soulage les âmes souffrantes 154
47 - Valeur du saint sacrifice en faveur des âmes du Purgatoire 157
48 - Obéissance à la volonté divine 160
49 - Délivrance d'une âme 162
50 - Bonté des anges pour les pauvres du Purgatoire 165
51 - Reconnaissance des âmes du Purgatoire 168
SECONDE PARTIE
Introduction 172
52 - Grand pêcheur délivré par une âme du Purgatoire 176
53 - Défunt répondant aux prières qu'on fait pour eux 180
54 - La divine Marie et le Scapulaire 182
55 - Accusations du démon contre les morts 185
56 - Un Purgatoire plus long à qui n'a pas prié pour les morts 188
57 - Rigueur de la justice divine 191
58 - Protection miraculeuse 194
59 - Apparitions et révélations 196
60 - Mérite de la sainte obéissance 199
61 - Dévouement charitable 203
62 - Suffrages conformes aux bonnes oeuvres accomplies pendant la vie 206
63 - Idée du feu du Purgatoire et des leçons qu'il nous donne 208
64 - Marie au jour de son Assomption 211
65 - Récompense du bien accompli pendant la vie 214
66 - Combien effrayants sont les tourments du Purgatoire 216
67 - La crainte du Purgatoire fait taire la volupté 220
68 - Les plaintes douloureuses des âmes du Purgatoire 224
69 - La plus grande souffrance du Purgatoire est la privation de la vue de Dieu 228
70 - Les peines du Purgatoire conformes aux fautes commises.234
71 - Reconnaissance des âmes du Purgatoire 237
72 - L'oeil de la justice divine 241
73 - Supplications des âmes pour obtenir qu'on les secoure 244
74 - Récompense de ce que l'on fait pour les âmes du Purgatoire 247
75 - Dévotion extraordinaire envers les âmes 251
76 - Petites aumônes faites de bon coeur 254
77 - Le besoin que nous avons d'être purifiés 257
78 - Iniquité convertie en oeuvre méritoire 261
79 - L'amour du prochain doit s'étendre au delà de cette vie 265
80 - Révélations sur l'autre vie 268
81 - Prix des souffrances d'ici-bas 271
82 - L'intercession des justes apaise la colère divine 275
83 - Un rayon de la lumière céleste dans le Purgatoire 278
84 - Utilité des sacrements pour nous purifier devant Dieu 282
85 - Prières exaucées 285
86 - Dieu instruit les vivants sur les mystères de l'autre vie 288
87 - Combien la prière est utile aux âmes du Purgatoire 292
88 - Efficacité de la prière des justes en faveur des âmes 296
89 - Protection spéciale de Marie 301
90 - L'or et l'argent des vertus doivent être souvent purifiés par le feu 304
91 - Récompense assurée à l'aumône pour les âmes du Purgatoire 308
92 - Supplications des âmes du Purgatoire pour qu'on se souvienne d'elles 312
93 - Combien Dieu aime qu'on prie pour ses parents défunts 316
94 - La peine du Purgatoire prolongée jusqu'à l'acquittement des dettes 319
95 - Les âmes délivrées venant au-devant de leurs bienfaiteurs 323
96 - Double prodige 326
97 - Purgatoire imposé à ceux qui résistent à la parole de Dieu 330
98 - Zèle pour les âmes du Purgatoire 334
99 - Communion sainte entre la terre et le Purgatoire 337
100 - L'affection pour les amis et les parents ne meurt point avec eux 341
101 - C'est une erreur de s'en remettre sur les autres du soin d'apaiser la
colère de Dieu 346
Conclusion 351
APPENDICE
Recueil de pratiques et de prières en faveur des âmes du Purgatoire
I - Intentions 356
II - Pratiques 359
III - Prières 363
Prière pour obtenir une bonne mort 371
Exercice pour se disposer à bien mourrir 374
Abbé Rossignoli
Introduction
La charité bien comprise nous fait un devoir très-pressant
de subvenir aux nécessités des âmes du Purgatoire 1
1 - Excellence des suffrages en faveur des morts 6
2 - Ne pas soulager les défunts par des aumônes, c'est se priver soi-même
de grands avantages spirituels 10
3 - Dieu exauce les prières des communautés ferventes en faveur des
défunts 15
4 - La conversion renvoyée au soir de la vie conduit l'âme à la cruelle
faim du Purgatoire 18
5 - La miséricorde envers les défunts procure le salut de l'âme, et souvent
même celui du corps 21.
6 - Le purgatoire des paroles inconvenantes 24
7 - Une âme du Purgatoire rappelée à l'expiation sur la terre 27
8 - Combien les âmes du Purgatoire sont soulagées par le jeûne et l'oraison 30
9 - Intercession d'une femme pleine de foi 33
10 - La protection du Ciel en faveur de l'homme de bien 36.
11 - Martyre de charité de sainte Christine-l'Admirable pour la délivrance
des âmes du Purgatoire 40
12 - La Mère de Dieu mère des âmes du Purgatoire 44
13 - Dieu accorde à ses saints de grandes grâces en faveur des âmes du
Purgatoire 47
14 - Comment les prières d'un saint délivrent quantité d'âmes 50
15 - La peine transférée d'un défunt à un vivant 54
16 - C'est se délivrer soi-même que de secourir les âmes du Purgatoire 57
17 - Les souffrances du Purgatoire bien que passagères paraissent
extrèmement longues 61
18 - Les peines du Purgatoire conformes aux fautes commises 64
19 - Le Ciel bénit ceux qui prient pour les morts 68
20 - Ingratitude des héritiers envers leurs bienfaiteurs 70
21 - Actions de grâces des âmes du Purgatoire envers leurs libérateurs 74
22 - Il faut travailler par soi-même à éviter le Purgatoire 77
23 - Traits divers de charité 81
24 - Souffrances des âmes qui ont donné du scandale 84
25 - Pour entrer au Ciel il faut être exempt de la moindre faute 87
26 - Admirable commerce de charité entre les vivants et les défunts 91
27 - Traits divers 96
28 - Traits merveilleux sur la mort et sur le Purgatoire 99
29 - Les indulgences 102
30 - La protection des saints utile, après la mort à qui l'a invoquée ici-bas 105
31 - Reconnaissance des âmes pour leurs bienfaiteurs 108
32 - Celui qui souffre pieusement ici-bas va tout droit au repos éternel 111
33 - Sainte usure de ceux qui appliquent leurs oeuvres au soulagement des défunts 114
34 - Le sang de Notre-Seigneur dans l'Eucharistie 117
35 - Il vaut mieux mourir avec la certitude d'aller en Purgatoire
que de vivre en danger de péché 120
36 - Les justes eux-mêmes ne sont pas irrépréhensibles devant Dieu 125
37 - On ne sort du Purgatoire qu'après une expiation entière et complète 128
38 - La dévotion du saint Rosaire 131
39 - Tourment apaisé 135
40 - Protection des âmes du Purgatoire 137
41 - Oeuvres d'insigne charité envers les âmes du Purgatoire 140
42 - Supplication merveilleuse 143
43 - Bienfaits des âmes du Purgatoire envers ceux qui les assistent 145
44 - La sainte communion pour les morts 148
45 - La divine Eucharistie154
46 - Le pardon d'une offense soulage les âmes souffrantes 154
47 - Valeur du saint sacrifice en faveur des âmes du Purgatoire 157
48 - Obéissance à la volonté divine 160
49 - Délivrance d'une âme 162
50 - Bonté des anges pour les pauvres du Purgatoire 165
51 - Reconnaissance des âmes du Purgatoire 168
SECONDE PARTIE
Introduction 172
52 - Grand pêcheur délivré par une âme du Purgatoire 176
53 - Défunt répondant aux prières qu'on fait pour eux 180
54 - La divine Marie et le Scapulaire 182
55 - Accusations du démon contre les morts 185
56 - Un Purgatoire plus long à qui n'a pas prié pour les morts 188
57 - Rigueur de la justice divine 191
58 - Protection miraculeuse 194
59 - Apparitions et révélations 196
60 - Mérite de la sainte obéissance 199
61 - Dévouement charitable 203
62 - Suffrages conformes aux bonnes oeuvres accomplies pendant la vie 206
63 - Idée du feu du Purgatoire et des leçons qu'il nous donne 208
64 - Marie au jour de son Assomption 211
65 - Récompense du bien accompli pendant la vie 214
66 - Combien effrayants sont les tourments du Purgatoire 216
67 - La crainte du Purgatoire fait taire la volupté 220
68 - Les plaintes douloureuses des âmes du Purgatoire 224
69 - La plus grande souffrance du Purgatoire est la privation de la vue de Dieu 228
70 - Les peines du Purgatoire conformes aux fautes commises.234
71 - Reconnaissance des âmes du Purgatoire 237
72 - L'oeil de la justice divine 241
73 - Supplications des âmes pour obtenir qu'on les secoure 244
74 - Récompense de ce que l'on fait pour les âmes du Purgatoire 247
75 - Dévotion extraordinaire envers les âmes 251
76 - Petites aumônes faites de bon coeur 254
77 - Le besoin que nous avons d'être purifiés 257
78 - Iniquité convertie en oeuvre méritoire 261
79 - L'amour du prochain doit s'étendre au delà de cette vie 265
80 - Révélations sur l'autre vie 268
81 - Prix des souffrances d'ici-bas 271
82 - L'intercession des justes apaise la colère divine 275
83 - Un rayon de la lumière céleste dans le Purgatoire 278
84 - Utilité des sacrements pour nous purifier devant Dieu 282
85 - Prières exaucées 285
86 - Dieu instruit les vivants sur les mystères de l'autre vie 288
87 - Combien la prière est utile aux âmes du Purgatoire 292
88 - Efficacité de la prière des justes en faveur des âmes 296
89 - Protection spéciale de Marie 301
90 - L'or et l'argent des vertus doivent être souvent purifiés par le feu 304
91 - Récompense assurée à l'aumône pour les âmes du Purgatoire 308
92 - Supplications des âmes du Purgatoire pour qu'on se souvienne d'elles 312
93 - Combien Dieu aime qu'on prie pour ses parents défunts 316
94 - La peine du Purgatoire prolongée jusqu'à l'acquittement des dettes 319
95 - Les âmes délivrées venant au-devant de leurs bienfaiteurs 323
96 - Double prodige 326
97 - Purgatoire imposé à ceux qui résistent à la parole de Dieu 330
98 - Zèle pour les âmes du Purgatoire 334
99 - Communion sainte entre la terre et le Purgatoire 337
100 - L'affection pour les amis et les parents ne meurt point avec eux 341
101 - C'est une erreur de s'en remettre sur les autres du soin d'apaiser la
colère de Dieu 346
Conclusion 351
APPENDICE
Recueil de pratiques et de prières en faveur des âmes du Purgatoire
I - Intentions 356
II - Pratiques 359
III - Prières 363
Prière pour obtenir une bonne mort 371
Exercice pour se disposer à bien mourrir 374
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
PREMIERE PARTIE
1
Les Merveilles Divines dans les Âmes du Purgatoire
PREMIERE PARTIE
Introduction.
La charité bien comprise nous fait un devoir très pressant de subvenir aux
nécessités des âmes du Purgatoire.
Ordinavit in une charitatem : Dieu m'a placé
sous l'étendard de la charité ( Cant.2,4 ).
Il ne peut entrer dans ma pensée de réduire ici à quelques lignes tout ce
qu'il y a de parfait dans la charité envers les pauvres âmes du Purgatoire
je me borne à quelques considérations rapides toute charité est d'autant
plus grande que les misères qu'elle soulage le sont elles-même là ou le
besoin est extrême l'obligation d'y porter remède devient plus pressante or
quelle plus douloureuse nécessité se peut-il concevoir que celle d'âmes
plongées dans un océan de tourments vouées aux souffrances les plus atroces
aux plus inexprimables angoisses ? Les commentateurs appliquent au
Purgatoire ce mot de Mala-
2
chie,III,3 : "Sedebit conflans, et Purgabit filios levi , et colabit eos
quasi aurum : Le messie sera comme un homme qui s'assied pour faire fondre
et pour épurer l'argent ; il purifiera les enfants de Lévi et il les rendra
nets comme l'or qui a passé par le feu ;" le comparent à un alambic de
toutes les peines imaginables d'ici-bas comme si Dieu à l'exemple de ces
savants qui distillent de diverses substances les esprits les plus purs pour
en composer un extrait qui les représente dans toute leur force avait réuni
dans le Purgatoire par une opération semblable les différentes espèces de
maux dont nous souffrons davantage dans cette vie les maladies naturelles
les supplices violents les tortures les tourments infligés aux martyrs etc
et en avait exprimé l'essence et l'activité c'est ce que paraît avoir
indiqué le prophète Isaie, IV, 4, dans ce passage :"Abluet Dominus sordes
filiurum Sion in spiritu ardoris :Le Seigneur purifiera les souillures de la
fille de Sion dans l'ardeur du feu." Ce feu est doué d'une puissance
surnaturelle d'une activité et d'une violence cent fois plus grandes que
celles du nôtre parce qu'il a été choisi pour instrument de la divine
justice Tertullien appelle même le Purgatoire un enfer momentané : car
observe-t-il les deux peines principales celle du sens et celle du dam y
sont réservées aux âmes avec seule différence de la durée les damnés ne
devant jamais voir finir leurs tourments le feu est le même suivant saint
Augustin :" Eodem igne purgatur justus et torquetur damnatus." Combien donc
n'est-ce pas une charité excellente d'apporter du soulagement à ces âmes
infortunées il ne s'agit pas seulement de nourrir un affamé de couvrir celui
qui man -
3
que de vêtements de délivrer un malade de sa fièvre mais de retirer des
malheureux de l'abîme immense de tous les maux cette charité est plus
précieuse encore si l'on considère le grand bien dont ces âmes vont être
mises en possession l'histoire a enregistré comme un prodige de bonté
l'action du grand Théodose qui tira de son abjection la pauvre jeune fille
Athénais pour la faire monter sur le trône impérial David a exprimé de mille
manières sa reconnaissance pour la divine miséricorde qui l'avait ôté à la
garde des troupeaux et établi chef de son peuple Oh combien meilleure est la
charité qui procure à une âme la possession de l'éternelle béatitude ne
pourrait-on pas dire dans un certain sens qu'elle est aussi élevée que le
bien même qu'elle assure ? il est vrai que nous ne pouvons guère en saisir
toute l'étendue ignorants comme nous le sommes de ces célestes profondeurs
mais ces âmes bénies sont placées mieux que nous pour cela elles savent tout
ce qui est caché sous ces simples mots voir Dieu face à face Dieu le premier
principe et la fin dernière s'unir entièrement à cet objet souverainement
aimable après lequel elles soupirent de tout ce qu'elles ont d'intelligence
et d'amour cette ardeur ce désir invincible cette flamme brûlante leur cause
un tourment plus insupportable que la flamme extérieure et vengeresse qui
les consume l'illustre Tertullien explique admirablement cette vérité par
l'exemple de Job image sensible de l'âme du Purgatoire ainsi que l'Eglise le
fait entendre elle-même en lisant son histoire dans l'office des morts tout
le corps de ce prophète de la patience était couvert d'ulcères douloureux
qui le
4
tourmentaient de la tête aux pieds et cependant celui de tous ses organes
qui le faisait le plus cruellement souffrir et dont il se plaignait le plus
haut c'était la vue qui n'aperçevait plus le bien suprême (C. XVIII, 2 )
:"In amaritudinibus moratur oculus meus : cur faciem tuam abscondis ? Mon
oeil est plongé dans l'amertume : Oh! pourquoi me cachez-vous votre visage
?" Comme s'il avait dit : Mon supplice le plus amer c'est de ne vous voir
plus ; ô mon Dieu!"On plaint l'oeil tout entier dans les tourments" dit
encore Tertullien ainsi l'âme souffrante du Purgatoire n'a point de torture
qui l'éprouve autant que la privation de la présence visible de son Dieu les
autres peines auprès de celles-là ne lui semblent rien or que fait la
charité dont nous parlons ? elle met fin à cet état d'horrible souffrance
elle apaise cette soif ardente elle comble ces immenses désirs en leur
assurant la possession de leur céleste objet l'amour de Dieu y est
d'ailleurs intéressé lui-même directement Dieu veut souverainement avoir
auprès de lui ces âmes qu'il aime afin de les faire participautes de sa
gloire " Deliciae meae esse am filius hominum, dit-il au livre des
proverbes, VIII, 31 : Mes délices sont d'habiter avec les enfants des hommes
; " comme si la compagnie de ses créatures ajoutait quelque chose à sa
félicité éternelle, et qu'il ne fût point complètement heureux tant qu'il ne
la communique pas ces âmes en effet sont ses chères filles les épouses du
Sauveur rachetées au prix de tout son sang et adoptées par lui il se réjouit
donc de les délivrer de la prison ou elles gémissent et de les introduire à
la lumière de son paradis pensez un peu quelle serait la consolation d'un
roi
1
Les Merveilles Divines dans les Âmes du Purgatoire
PREMIERE PARTIE
Introduction.
La charité bien comprise nous fait un devoir très pressant de subvenir aux
nécessités des âmes du Purgatoire.
Ordinavit in une charitatem : Dieu m'a placé
sous l'étendard de la charité ( Cant.2,4 ).
Il ne peut entrer dans ma pensée de réduire ici à quelques lignes tout ce
qu'il y a de parfait dans la charité envers les pauvres âmes du Purgatoire
je me borne à quelques considérations rapides toute charité est d'autant
plus grande que les misères qu'elle soulage le sont elles-même là ou le
besoin est extrême l'obligation d'y porter remède devient plus pressante or
quelle plus douloureuse nécessité se peut-il concevoir que celle d'âmes
plongées dans un océan de tourments vouées aux souffrances les plus atroces
aux plus inexprimables angoisses ? Les commentateurs appliquent au
Purgatoire ce mot de Mala-
2
chie,III,3 : "Sedebit conflans, et Purgabit filios levi , et colabit eos
quasi aurum : Le messie sera comme un homme qui s'assied pour faire fondre
et pour épurer l'argent ; il purifiera les enfants de Lévi et il les rendra
nets comme l'or qui a passé par le feu ;" le comparent à un alambic de
toutes les peines imaginables d'ici-bas comme si Dieu à l'exemple de ces
savants qui distillent de diverses substances les esprits les plus purs pour
en composer un extrait qui les représente dans toute leur force avait réuni
dans le Purgatoire par une opération semblable les différentes espèces de
maux dont nous souffrons davantage dans cette vie les maladies naturelles
les supplices violents les tortures les tourments infligés aux martyrs etc
et en avait exprimé l'essence et l'activité c'est ce que paraît avoir
indiqué le prophète Isaie, IV, 4, dans ce passage :"Abluet Dominus sordes
filiurum Sion in spiritu ardoris :Le Seigneur purifiera les souillures de la
fille de Sion dans l'ardeur du feu." Ce feu est doué d'une puissance
surnaturelle d'une activité et d'une violence cent fois plus grandes que
celles du nôtre parce qu'il a été choisi pour instrument de la divine
justice Tertullien appelle même le Purgatoire un enfer momentané : car
observe-t-il les deux peines principales celle du sens et celle du dam y
sont réservées aux âmes avec seule différence de la durée les damnés ne
devant jamais voir finir leurs tourments le feu est le même suivant saint
Augustin :" Eodem igne purgatur justus et torquetur damnatus." Combien donc
n'est-ce pas une charité excellente d'apporter du soulagement à ces âmes
infortunées il ne s'agit pas seulement de nourrir un affamé de couvrir celui
qui man -
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que de vêtements de délivrer un malade de sa fièvre mais de retirer des
malheureux de l'abîme immense de tous les maux cette charité est plus
précieuse encore si l'on considère le grand bien dont ces âmes vont être
mises en possession l'histoire a enregistré comme un prodige de bonté
l'action du grand Théodose qui tira de son abjection la pauvre jeune fille
Athénais pour la faire monter sur le trône impérial David a exprimé de mille
manières sa reconnaissance pour la divine miséricorde qui l'avait ôté à la
garde des troupeaux et établi chef de son peuple Oh combien meilleure est la
charité qui procure à une âme la possession de l'éternelle béatitude ne
pourrait-on pas dire dans un certain sens qu'elle est aussi élevée que le
bien même qu'elle assure ? il est vrai que nous ne pouvons guère en saisir
toute l'étendue ignorants comme nous le sommes de ces célestes profondeurs
mais ces âmes bénies sont placées mieux que nous pour cela elles savent tout
ce qui est caché sous ces simples mots voir Dieu face à face Dieu le premier
principe et la fin dernière s'unir entièrement à cet objet souverainement
aimable après lequel elles soupirent de tout ce qu'elles ont d'intelligence
et d'amour cette ardeur ce désir invincible cette flamme brûlante leur cause
un tourment plus insupportable que la flamme extérieure et vengeresse qui
les consume l'illustre Tertullien explique admirablement cette vérité par
l'exemple de Job image sensible de l'âme du Purgatoire ainsi que l'Eglise le
fait entendre elle-même en lisant son histoire dans l'office des morts tout
le corps de ce prophète de la patience était couvert d'ulcères douloureux
qui le
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tourmentaient de la tête aux pieds et cependant celui de tous ses organes
qui le faisait le plus cruellement souffrir et dont il se plaignait le plus
haut c'était la vue qui n'aperçevait plus le bien suprême (C. XVIII, 2 )
:"In amaritudinibus moratur oculus meus : cur faciem tuam abscondis ? Mon
oeil est plongé dans l'amertume : Oh! pourquoi me cachez-vous votre visage
?" Comme s'il avait dit : Mon supplice le plus amer c'est de ne vous voir
plus ; ô mon Dieu!"On plaint l'oeil tout entier dans les tourments" dit
encore Tertullien ainsi l'âme souffrante du Purgatoire n'a point de torture
qui l'éprouve autant que la privation de la présence visible de son Dieu les
autres peines auprès de celles-là ne lui semblent rien or que fait la
charité dont nous parlons ? elle met fin à cet état d'horrible souffrance
elle apaise cette soif ardente elle comble ces immenses désirs en leur
assurant la possession de leur céleste objet l'amour de Dieu y est
d'ailleurs intéressé lui-même directement Dieu veut souverainement avoir
auprès de lui ces âmes qu'il aime afin de les faire participautes de sa
gloire " Deliciae meae esse am filius hominum, dit-il au livre des
proverbes, VIII, 31 : Mes délices sont d'habiter avec les enfants des hommes
; " comme si la compagnie de ses créatures ajoutait quelque chose à sa
félicité éternelle, et qu'il ne fût point complètement heureux tant qu'il ne
la communique pas ces âmes en effet sont ses chères filles les épouses du
Sauveur rachetées au prix de tout son sang et adoptées par lui il se réjouit
donc de les délivrer de la prison ou elles gémissent et de les introduire à
la lumière de son paradis pensez un peu quelle serait la consolation d'un
roi
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
1ère Merveille
9
éprouvent une entière contrition ; elles sont rentrées en grâce avec Dieu, auquel elles sont présentement agréables, ayant recouvré le titre de ses amies et de ses filles. Les pécheurs, eux, sont devant le Seigneur, comme des rebelles et des ennemis. Si donc la charité bien ordonnée veut que nous nous conformions à la très sage bonté de Dieu, il va de soi que nous devons nous attacher davantage à ceux qu’il aime, de préférence à ceux qui se déclarent en révolte contre lui. »
Bertrand, toutefois, ne se rendait point à ces raisons. Une miraculeuse apparition le convainquit enfin. Dieu permit que la nuit suivante, en allant au chœur pour chanter l’office, il vit venir au-devant de lui une âme du purgatoire sous la forme d’un spectre horrible, chargé d’un poids qu’il ne pouvait soulevait. L’apparition s’approcha en se plaignant et en gémissant, et le chargea de cet insupportable fardeau, sous lequel le bon religieux succombait. Oh ! alors, comme dit Isaïe, « le tourment lui donna l’intelligence : Vexatio dedit intellectum ; » et il comprit qu’il devait faire davantage pour les âmes souffrantes. Le matin, dès qu’il le put, la compassion dans le cœur et les larmes aux yeux, il monta au saint autel en leur faveur, et il continua cette pratique le reste de sa vie.
Le grand docteur saint Thomas d’Aquin paraît avoir tranché la controverse par ces lignes de la Somme théologique (Supp. « . quaest. 71. art. v. ad 3) : « Les suffrages pour les morts sont plus agréables que les suffrages pour les vivants, parce que les premiers se trouvent dans un plus pressant besoin, ne pouvant se secourir eux-mêmes comme ceux qui vivent encore. » Plusieurs autres docteurs enseignent la même chose, et on doit
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tout au moins conclure qu’il faut avoir en grande estime la prière pour les morts./
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2ème MERVEILLE
NE PAS SOULAGER LES DEFUNTS PAR LES AUMONES, C’EST SE PRIVER SOI-MEME DE GRANDS AVANTAGES SPIRITUELS
Noliesse pusillanismis, et facere elcemosypam ne despicias : Ne soyez point faible
de cœur, et ne méprisez point l’aumône. (Eccli, vii, 3)
Le Docteur angélique, saint Thomas, préfère au jeûne et à la prière le mérite de l’aumône, quand il s’agit d’expier les fautes passées. « L’aumône, dit-il, (In 4, d. 15, q. 3), possède plus complètement la vertu de la satisfaction que la prière, et la prière plus complètement que le jeûne. » C’est pourquoi de grands serviteurs de Dieu et de grands saints l’ont principalement choisie comme moyen de secourir les défunts. Nous pouvons citer parmi eux, comme l’un des plus remarquables, le pieux Raban-Maur, premier abbé de Fulde, au IXè siècle, puis archevêque de Mayence. L’abbé Thrithème, écrivain distingué de l’ordre de Saint-Benoît, raconte que Raban avait prescrit aux économes de son monastère de faire constamment les plus abondantes largesses aux pauvres. Cependant, le procureur de l’abbaye, appelé Edédard, trop attaché aux biens de ce monde et moins préoccupés par des indigents,
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retenait souvent la part qui leur était destinée. Le saint abbé avait, de plus, et du commun consentement, décrété que, chaque fois que l’un des religieux passerait à une meilleure vie, sa portion serait pendant trente jours distribuée aux mendiants, afin que l’âme du défunt fût soulagée par cette aumône. L’avare procureur omettait cette distribution, ou bien la remettait au-delà du trentième jour, malgré la tradition ancienne observée par saint Grégoire-le-Grand, qui marque ce temps comme le plus propice aux suffrages pour les morts. Il arriva, l’an 830, que le monastère de Fulde fut éprouvé par une sorte de contagion, qui emporta le bon nombre de moines, et même l’un des supérieurs. Raban-Maur, plein de zèle et de charité pour ces chères âmes, fit venir Edédard, et lui rappela la pieuse pratique. « Ayez grand soin, lui dit-il, que nos constitutions soient fidèlement observées, et qu’on gratifie les pauvres, durant un mois entier, de la nourriture destinée aux frères que nous venons de perdre. Si vous y manquiez, vous seriez très-coupable devant Dieu, et certainement, il vous en punirait. » Le procureur promit d’obéir.
Mais, hélas ! combien fatale est la passion de l’avarice, dans un homme consacré à Dieu surtout ! Edédard, qui en était dominé, qui avait le cœur étroit et la main serrée, ne fit point ce qu’il devait, priva les pauvres et resta sans pitié pour les âmes de ses frères. Dans la crainte, tout à fait déraisonnable, que les vivants ne vinssent à manquer, il négligea à la fois les indigents et les défunts. La justice divine ne laissa point impunie cette infidélité.
Un jour qu’il avait été accablé d’affaires, le soir venu,
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comme les religieux s’étaient déjà retirés, il traversait la salle du chapitre, tenant une lanterne à la main. Quel fut sont étonnement de voir l’abbé, avec une quantité de moines, assis à leurs places, tenant conseil malgré l’heure avancée ! Il ne comprenait pas le sujet d’une réunion semblable, à pareil moment, lorsque, regardant plus attentivement, il reconnut le supérieur défunt, avec les autres religieux défunts aussi. Il est difficile d’exprimer la terreur dont il fut saisi ; un froid glacial, qui courut aussitôt dans ses veines, le cloua à sa place, comme une statue sans vie. Mais cette terreur était peu de chose auprès de ce qui lui était réservé. Le supérieur et quelques un des morts, se levant, vinrent à lui, le dépouillèrent de son habit et se mirent à le frapper à coups de fouet avec tant de violence, qu’il resta privé de sentiment. En même temps, il lui disaient : « Reçois, malheureux, reçois le châtiment de ton avarice ! tu en éprouveras un plus terrible dans trois jours, lorsque tu seras descendu dans la tombe avec nous. Alors le suffrage qui t’est réservé sera appliqué à ceux que tu as privés des leurs. » Puis tout disparut. Pour lui, il était couvert de sang et de plaies.
Il fut trouvé dans cet état par la communauté, au moment où elle se rendait au chœur, après minuit. On le porte à l’infirmerie à moitié mort, et on s’empresse de lui prodiguer tous les soins que réclamait sa position. Mais lui, dès qu’il put parler : « Hâtez-vous, s’écria-t-il, appelez tout de suite le père abbé : j’ai plus besoin des remèdes de l’âme que de ceux du corps. Ces membres ne sauraient plus guérir ! » Dès que l’abbé fut venu, en sa présence et devant toute la maison, il raconta le terrible événement, dont l’état où il était
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rendait un trop sensible témoignage. Quand il eut ajouté qu’il devait paraître au tribunal de DIEU dans trois jours, il supplia qu’on lui administrât les derniers sacrements, en protestant de tout son regret. Il les eut à peine reçus, avec les marques d’une grande dévotion, qu’il commença à baisser, jusqu’au moment où il expira, le troisième jour, au milieu des prières de ses confrères et des exhortations de l’abbé, qui lui rappelait les miséricordes de DIEU et la confiance qu’il faut avoir en lui.
On chanta aussitôt la messe des morts, et on distribua, selon l’usage, la part des pauvres. La punition n’était pas finie cependant. Le défunt apparut à Raban, pâle, défiguré. L’abbé, frappé, de cette vision, lui demanda ce qu’il y avait à faire pour lui. « Ah ! répondit l’âme infortunée, les prières de notre sainte communauté m’ont procuré du soulagement, mais je ne puis obtenir ma grâce entière avant la délivrance de tous ceux de mes frères que mon avarice a frustrés des suffrages qui leur étaient dus. Ce qu’on a donné aux pauvres en mon nom leur a profité, et non point à moi, selon l’ordre de la divine Justice. Je vous supplie donc, mon père, vous qui êtes si bon, qui m’avez accordé tant d’intérêt pendant ma vie, de faire redoubler les aumônes. J’espère que moyennant cela la clémence du Seigneur nous délivrera tous, eux d’abord, et moi ensuite.
Raban-Maur le promit, et la chose fut faite. Un autre mois était à peine écoulé, qu’Edédard lui apparut de nouveau, vêtu de blanc, entouré de rayons lumineux, la joie peinte sur le visage. Il rendit au monastère les actions de grâces les plus touchantes pour la charité
14 :
dont on avait usé envers lui, assurant qu’au ciel, où il s’envolait, il ne cesserait de conjurer le Dieu de toute bonté pour ses bienfaiteurs.
Combien d’utiles réflexions se présentent à l’esprit à la lecture de cette histoire ! On y voit, premièrement, que les pauvres âmes du purgatoire ne peuvent rien pour elles-mêmes ; et Dieu permet, dans cette circonstance, qu’elles viennent châtier l’oubli qu’on fait de leurs peines. Secondement, dans l’application des suffrages le Seigneur fait quelquefois une exception contre celui qui a démérité d’une manière spéciale, alors surtout qu’on a manqué aux devoirs de prières et de bonnes œuvres envers les autres, ce qui rend indigne de recueillir pour soi-même un fruit si précieux. Troisièmement, nous devons exciter en nous un grand zèle pour ces bonnes et tristes âmes, à l’exemple des religieux de Fulde, toujours empressés dans cet exercice de charité. L’historien que nous citons ajoute qu’ils portaient cette affection si loin, que chacun se privait encore d’une partie de ses aliments pour les distribuer aux mendiants à la même intention
(V. Trithemus, Vita-Bab-Mauri, I. II ; Théophile Raynaud, jésuite, Heter. Spirit., p.2, sect. 3, punct. 7)./
15
3ème Merveille
DIEU EXAUCE LES PRIERES DES COMMUNAUTES FERVENTES EN FAVEUR DES DEFUNTS
Oculi Domini super justos, et aures ejus in preces corum : Les yeux du Seigneur sont ouverts sur les justes ; et son oreille est attentive à leur prière (XXXIII, 16)
Saint Chrysostome expose quelque part, en développant les promesses de Jésus-christ à ceux qui sont rassemblés en son nom, combien sont bonnes et profitables les prières des communautés ferventes, vivant dans la pratique de l’oraison et de la pénitence. « Dieu lui-même, dit-il, atteste souvent dans la divine Ecriture qu’il a les oreilles attentives à ceux qui se sont réunis pour le prier. » On en vit une preuve for touchante dans une chartreuse d’Angleterre, comme je vais le raconter.
Un personnage de haute noblesse et de richesses considérables, étant mort dans ce pays, laissait un fils que cette perte avait cruellement affecté, et qui, plein de zèle pour le salut de celui qu’il aimait à si juste titre, se rendit aussitôt chez les chartreux. C’était dans leur église que s’était fait l’office des funérailles. Il présenta au prieur une grosse somme d’argent, à titre d’aumône, avec prière à la communauté d’avoir un souvenir devant Dieu pour l’âme de son cher défunt. A l’instant, les religieux sont convoqués au chœur : « Ser-
16 :
-viteurs de Dieu, leur dit le prieur, unissons nos prières en faveur du défunt qui a été enterré ici dernièrement , ce jeune homme, qui nous fait une offrande considérable, nous le demande. » Les moines alors entonnèrent d’une seule voix le Requiscat in pace, auquel le supérieur répondit Amen, puis chacun se retira en silence dans sa cellule.
Le bienfaiteur restait tout étonné. « C’est bien peu de chose, pensait-il : quoi ! pour une somme aussi importante, un seul Requiscat in pace ! » Il s’approche donc du prieur avec modestie, et lui dit d’un ton de plainte respectueux : « C’est là tout, mon père ? et l’âme de celui que je pleure n’aura point d’autre suffrages, lorsque j’ai fait preuve envers vous de quelque générosité , » Le saint homme, surpris à son tour de cette question, lui répondit avec douceur : « Prétendriez-vous, mon fils, peser dans la même balance votre aumône, fût-elle un monceau d’or, et les prières de mes religieux, si courtes soient-elles , » ? Non certes, reprit le jeune homme ; non, mon père, je n’entends point établir e comparaison. Cependant, je trouve que deux ou trois paroles sont bien peu de choses, et que j’ai fait davantage pour le monastère. ? Je vois que vous doutez encore, mon enfant. Attendez un moment : vous allez, grâce à Dieu, vous assurer de votre erreur. »
Se tournant vers le père cellérier : « Allez, lui dit-il trouver l’un après l’autre nos frères dans leurs cellules ; dites-leur d’écrire sur un morceau de papier leur Requiscat in pace et de me l’apporter tout de suite. » Il commanda en même temps à un frère convers d’aller prendre une balance. Il y mit, d’un côté, l’argent et l’or du jeune homme, et le poids emporta rapidement
17:
21
qu'il n'y avait point d'autre foi où l'on pût opérer son salut. Puis il avait désavoué, avec tous les signes du repentir le plus sincère, les scandales de sa vie mondaine, l'oubli qu'il avait fait de ses devoirs ; accompagnant cet acte de soupirs et de gémissements, et assurant qu'il voudrait pour tout au monde verser sur ces malheurs des larmes de sang. Une si vive et si noble contrition l'avait préservé de l'enfer, et, quand il s'était présenté au tribunal de Dieu, il avait trouvé un juge apaisé, mais non satisfait, qui lui faisait expier dans un douloureux purgatoire les restes de son infidélité.
Ceci nous montre, une fois de plus, l'inconcevable folie de ceux qui remettent leur conversion au dernier moment.
(V. Daniel, histoire d'Angleterre, l. v, ch. 7.)
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éprouvent une entière contrition ; elles sont rentrées en grâce avec Dieu, auquel elles sont présentement agréables, ayant recouvré le titre de ses amies et de ses filles. Les pécheurs, eux, sont devant le Seigneur, comme des rebelles et des ennemis. Si donc la charité bien ordonnée veut que nous nous conformions à la très sage bonté de Dieu, il va de soi que nous devons nous attacher davantage à ceux qu’il aime, de préférence à ceux qui se déclarent en révolte contre lui. »
Bertrand, toutefois, ne se rendait point à ces raisons. Une miraculeuse apparition le convainquit enfin. Dieu permit que la nuit suivante, en allant au chœur pour chanter l’office, il vit venir au-devant de lui une âme du purgatoire sous la forme d’un spectre horrible, chargé d’un poids qu’il ne pouvait soulevait. L’apparition s’approcha en se plaignant et en gémissant, et le chargea de cet insupportable fardeau, sous lequel le bon religieux succombait. Oh ! alors, comme dit Isaïe, « le tourment lui donna l’intelligence : Vexatio dedit intellectum ; » et il comprit qu’il devait faire davantage pour les âmes souffrantes. Le matin, dès qu’il le put, la compassion dans le cœur et les larmes aux yeux, il monta au saint autel en leur faveur, et il continua cette pratique le reste de sa vie.
Le grand docteur saint Thomas d’Aquin paraît avoir tranché la controverse par ces lignes de la Somme théologique (Supp. « . quaest. 71. art. v. ad 3) : « Les suffrages pour les morts sont plus agréables que les suffrages pour les vivants, parce que les premiers se trouvent dans un plus pressant besoin, ne pouvant se secourir eux-mêmes comme ceux qui vivent encore. » Plusieurs autres docteurs enseignent la même chose, et on doit
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tout au moins conclure qu’il faut avoir en grande estime la prière pour les morts./
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2ème MERVEILLE
NE PAS SOULAGER LES DEFUNTS PAR LES AUMONES, C’EST SE PRIVER SOI-MEME DE GRANDS AVANTAGES SPIRITUELS
Noliesse pusillanismis, et facere elcemosypam ne despicias : Ne soyez point faible
de cœur, et ne méprisez point l’aumône. (Eccli, vii, 3)
Le Docteur angélique, saint Thomas, préfère au jeûne et à la prière le mérite de l’aumône, quand il s’agit d’expier les fautes passées. « L’aumône, dit-il, (In 4, d. 15, q. 3), possède plus complètement la vertu de la satisfaction que la prière, et la prière plus complètement que le jeûne. » C’est pourquoi de grands serviteurs de Dieu et de grands saints l’ont principalement choisie comme moyen de secourir les défunts. Nous pouvons citer parmi eux, comme l’un des plus remarquables, le pieux Raban-Maur, premier abbé de Fulde, au IXè siècle, puis archevêque de Mayence. L’abbé Thrithème, écrivain distingué de l’ordre de Saint-Benoît, raconte que Raban avait prescrit aux économes de son monastère de faire constamment les plus abondantes largesses aux pauvres. Cependant, le procureur de l’abbaye, appelé Edédard, trop attaché aux biens de ce monde et moins préoccupés par des indigents,
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retenait souvent la part qui leur était destinée. Le saint abbé avait, de plus, et du commun consentement, décrété que, chaque fois que l’un des religieux passerait à une meilleure vie, sa portion serait pendant trente jours distribuée aux mendiants, afin que l’âme du défunt fût soulagée par cette aumône. L’avare procureur omettait cette distribution, ou bien la remettait au-delà du trentième jour, malgré la tradition ancienne observée par saint Grégoire-le-Grand, qui marque ce temps comme le plus propice aux suffrages pour les morts. Il arriva, l’an 830, que le monastère de Fulde fut éprouvé par une sorte de contagion, qui emporta le bon nombre de moines, et même l’un des supérieurs. Raban-Maur, plein de zèle et de charité pour ces chères âmes, fit venir Edédard, et lui rappela la pieuse pratique. « Ayez grand soin, lui dit-il, que nos constitutions soient fidèlement observées, et qu’on gratifie les pauvres, durant un mois entier, de la nourriture destinée aux frères que nous venons de perdre. Si vous y manquiez, vous seriez très-coupable devant Dieu, et certainement, il vous en punirait. » Le procureur promit d’obéir.
Mais, hélas ! combien fatale est la passion de l’avarice, dans un homme consacré à Dieu surtout ! Edédard, qui en était dominé, qui avait le cœur étroit et la main serrée, ne fit point ce qu’il devait, priva les pauvres et resta sans pitié pour les âmes de ses frères. Dans la crainte, tout à fait déraisonnable, que les vivants ne vinssent à manquer, il négligea à la fois les indigents et les défunts. La justice divine ne laissa point impunie cette infidélité.
Un jour qu’il avait été accablé d’affaires, le soir venu,
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comme les religieux s’étaient déjà retirés, il traversait la salle du chapitre, tenant une lanterne à la main. Quel fut sont étonnement de voir l’abbé, avec une quantité de moines, assis à leurs places, tenant conseil malgré l’heure avancée ! Il ne comprenait pas le sujet d’une réunion semblable, à pareil moment, lorsque, regardant plus attentivement, il reconnut le supérieur défunt, avec les autres religieux défunts aussi. Il est difficile d’exprimer la terreur dont il fut saisi ; un froid glacial, qui courut aussitôt dans ses veines, le cloua à sa place, comme une statue sans vie. Mais cette terreur était peu de chose auprès de ce qui lui était réservé. Le supérieur et quelques un des morts, se levant, vinrent à lui, le dépouillèrent de son habit et se mirent à le frapper à coups de fouet avec tant de violence, qu’il resta privé de sentiment. En même temps, il lui disaient : « Reçois, malheureux, reçois le châtiment de ton avarice ! tu en éprouveras un plus terrible dans trois jours, lorsque tu seras descendu dans la tombe avec nous. Alors le suffrage qui t’est réservé sera appliqué à ceux que tu as privés des leurs. » Puis tout disparut. Pour lui, il était couvert de sang et de plaies.
Il fut trouvé dans cet état par la communauté, au moment où elle se rendait au chœur, après minuit. On le porte à l’infirmerie à moitié mort, et on s’empresse de lui prodiguer tous les soins que réclamait sa position. Mais lui, dès qu’il put parler : « Hâtez-vous, s’écria-t-il, appelez tout de suite le père abbé : j’ai plus besoin des remèdes de l’âme que de ceux du corps. Ces membres ne sauraient plus guérir ! » Dès que l’abbé fut venu, en sa présence et devant toute la maison, il raconta le terrible événement, dont l’état où il était
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rendait un trop sensible témoignage. Quand il eut ajouté qu’il devait paraître au tribunal de DIEU dans trois jours, il supplia qu’on lui administrât les derniers sacrements, en protestant de tout son regret. Il les eut à peine reçus, avec les marques d’une grande dévotion, qu’il commença à baisser, jusqu’au moment où il expira, le troisième jour, au milieu des prières de ses confrères et des exhortations de l’abbé, qui lui rappelait les miséricordes de DIEU et la confiance qu’il faut avoir en lui.
On chanta aussitôt la messe des morts, et on distribua, selon l’usage, la part des pauvres. La punition n’était pas finie cependant. Le défunt apparut à Raban, pâle, défiguré. L’abbé, frappé, de cette vision, lui demanda ce qu’il y avait à faire pour lui. « Ah ! répondit l’âme infortunée, les prières de notre sainte communauté m’ont procuré du soulagement, mais je ne puis obtenir ma grâce entière avant la délivrance de tous ceux de mes frères que mon avarice a frustrés des suffrages qui leur étaient dus. Ce qu’on a donné aux pauvres en mon nom leur a profité, et non point à moi, selon l’ordre de la divine Justice. Je vous supplie donc, mon père, vous qui êtes si bon, qui m’avez accordé tant d’intérêt pendant ma vie, de faire redoubler les aumônes. J’espère que moyennant cela la clémence du Seigneur nous délivrera tous, eux d’abord, et moi ensuite.
Raban-Maur le promit, et la chose fut faite. Un autre mois était à peine écoulé, qu’Edédard lui apparut de nouveau, vêtu de blanc, entouré de rayons lumineux, la joie peinte sur le visage. Il rendit au monastère les actions de grâces les plus touchantes pour la charité
14 :
dont on avait usé envers lui, assurant qu’au ciel, où il s’envolait, il ne cesserait de conjurer le Dieu de toute bonté pour ses bienfaiteurs.
Combien d’utiles réflexions se présentent à l’esprit à la lecture de cette histoire ! On y voit, premièrement, que les pauvres âmes du purgatoire ne peuvent rien pour elles-mêmes ; et Dieu permet, dans cette circonstance, qu’elles viennent châtier l’oubli qu’on fait de leurs peines. Secondement, dans l’application des suffrages le Seigneur fait quelquefois une exception contre celui qui a démérité d’une manière spéciale, alors surtout qu’on a manqué aux devoirs de prières et de bonnes œuvres envers les autres, ce qui rend indigne de recueillir pour soi-même un fruit si précieux. Troisièmement, nous devons exciter en nous un grand zèle pour ces bonnes et tristes âmes, à l’exemple des religieux de Fulde, toujours empressés dans cet exercice de charité. L’historien que nous citons ajoute qu’ils portaient cette affection si loin, que chacun se privait encore d’une partie de ses aliments pour les distribuer aux mendiants à la même intention
(V. Trithemus, Vita-Bab-Mauri, I. II ; Théophile Raynaud, jésuite, Heter. Spirit., p.2, sect. 3, punct. 7)./
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3ème Merveille
DIEU EXAUCE LES PRIERES DES COMMUNAUTES FERVENTES EN FAVEUR DES DEFUNTS
Oculi Domini super justos, et aures ejus in preces corum : Les yeux du Seigneur sont ouverts sur les justes ; et son oreille est attentive à leur prière (XXXIII, 16)
Saint Chrysostome expose quelque part, en développant les promesses de Jésus-christ à ceux qui sont rassemblés en son nom, combien sont bonnes et profitables les prières des communautés ferventes, vivant dans la pratique de l’oraison et de la pénitence. « Dieu lui-même, dit-il, atteste souvent dans la divine Ecriture qu’il a les oreilles attentives à ceux qui se sont réunis pour le prier. » On en vit une preuve for touchante dans une chartreuse d’Angleterre, comme je vais le raconter.
Un personnage de haute noblesse et de richesses considérables, étant mort dans ce pays, laissait un fils que cette perte avait cruellement affecté, et qui, plein de zèle pour le salut de celui qu’il aimait à si juste titre, se rendit aussitôt chez les chartreux. C’était dans leur église que s’était fait l’office des funérailles. Il présenta au prieur une grosse somme d’argent, à titre d’aumône, avec prière à la communauté d’avoir un souvenir devant Dieu pour l’âme de son cher défunt. A l’instant, les religieux sont convoqués au chœur : « Ser-
16 :
-viteurs de Dieu, leur dit le prieur, unissons nos prières en faveur du défunt qui a été enterré ici dernièrement , ce jeune homme, qui nous fait une offrande considérable, nous le demande. » Les moines alors entonnèrent d’une seule voix le Requiscat in pace, auquel le supérieur répondit Amen, puis chacun se retira en silence dans sa cellule.
Le bienfaiteur restait tout étonné. « C’est bien peu de chose, pensait-il : quoi ! pour une somme aussi importante, un seul Requiscat in pace ! » Il s’approche donc du prieur avec modestie, et lui dit d’un ton de plainte respectueux : « C’est là tout, mon père ? et l’âme de celui que je pleure n’aura point d’autre suffrages, lorsque j’ai fait preuve envers vous de quelque générosité , » Le saint homme, surpris à son tour de cette question, lui répondit avec douceur : « Prétendriez-vous, mon fils, peser dans la même balance votre aumône, fût-elle un monceau d’or, et les prières de mes religieux, si courtes soient-elles , » ? Non certes, reprit le jeune homme ; non, mon père, je n’entends point établir e comparaison. Cependant, je trouve que deux ou trois paroles sont bien peu de choses, et que j’ai fait davantage pour le monastère. ? Je vois que vous doutez encore, mon enfant. Attendez un moment : vous allez, grâce à Dieu, vous assurer de votre erreur. »
Se tournant vers le père cellérier : « Allez, lui dit-il trouver l’un après l’autre nos frères dans leurs cellules ; dites-leur d’écrire sur un morceau de papier leur Requiscat in pace et de me l’apporter tout de suite. » Il commanda en même temps à un frère convers d’aller prendre une balance. Il y mit, d’un côté, l’argent et l’or du jeune homme, et le poids emporta rapidement
17:
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qu'il n'y avait point d'autre foi où l'on pût opérer son salut. Puis il avait désavoué, avec tous les signes du repentir le plus sincère, les scandales de sa vie mondaine, l'oubli qu'il avait fait de ses devoirs ; accompagnant cet acte de soupirs et de gémissements, et assurant qu'il voudrait pour tout au monde verser sur ces malheurs des larmes de sang. Une si vive et si noble contrition l'avait préservé de l'enfer, et, quand il s'était présenté au tribunal de Dieu, il avait trouvé un juge apaisé, mais non satisfait, qui lui faisait expier dans un douloureux purgatoire les restes de son infidélité.
Ceci nous montre, une fois de plus, l'inconcevable folie de ceux qui remettent leur conversion au dernier moment.
(V. Daniel, histoire d'Angleterre, l. v, ch. 7.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
IV MERVEILLE CONTENU ERRONE
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Ve MERVEILLE
LA MISÉRICORDE ENVERS LES DÉFUNTS PROCURE LE SALUT DE L'ÂME, ET SOUVENT MÊME CELUI DU CORPS.
Benefacit unimæ suæ vir misericors.
L'homme de miséricorde assure le bonheur
de son âme. (Prov. xi, 29.)
Pour exciter la piété des fidèles à prier en faveur des âmes de ceux qui ont été mis à mort par la justice humaine, et qui souffrent dans les flammes de l'expiation, il n'est peut-être point de trait plus pathétique que celui-ci.
22
Il y avait aux environs de Rome, vers l'an 1620, un jeune homme de vie dissolue et scandaleuse, qui était devenu à cause de cela un objet à la fois d'horreur et de terreur. Ses excès, ses violences continuelles lui suscitèrent des ennemis décidés, qui résolurent de lui arracher la vie. Le malheureux, au milieu de ses désordres, avait conservé une grande compassion pour les âmes du purgatoire, pour lesquelles il faisait dire de temps en temps des messes, ou donnait l'aumône ; il priait même pour elles avec toute la ferveur dont il était capable, dans ce triste état de conscience. Cette unique dévotion devait lui sauver miraculeusement la vie de l'âme et celle du corps.
Un soir qu'il se rendait à Tivoli, monté sur un bon cheval, pensant échapper aux embûches qu'il savait dressées contre lui, il se trouva au contraire qu'il marchait juste au-devant d'elles. En effet, n'ignorant pas qu'il devait passer par là, ils s'étaient placés en embuscade armés d'arquebuses, derrière un petit bois, et attendaient son arrivée pour le tuer. Il approchait rapidement de ce lieu, quand il aperçut au-dessus de sa tête les membres d'un criminel attaché aux branches d'un chêne pour l'exemple des malfaiteurs. Emu de pitié, il s'arrête afin de réciter quelques prières, suivant sa coutume, pour cette pauvre âme abandonnée. Mais voici que, comme il priait, une merveille inconcevable frappe ses yeux, aux derniers rayons du jour : ces membres décharnés, desséchés, séparés, se rejoignent, tombent à terre, s'animent, s'approchent du cavalier sous une forme vivante. Il restait à sa place, cloué par la terreur. Le fantôme prend la bride du cheval et dit au jeune homme : « Descends et me laisse
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monter un moment ; il y va de ton salut ! tu vas m'attendre ici ; je ne serai pas long. » Tel était son saisissement, que, sans proférer une parole, il descend et laisse son cheval aux mains du cadavre ressuscité, qui y monte et le lance en avant.
Au bruit qu'ils entendent, les ennemis s'apprêtent, dressent leurs arquebuses, les déchargent, et, voyant tomber le cavalier, s'enfuient au plus vite, avant que le coup n'attirât du monde et ne les fit découvrir. Ils étaient sûrs d'avoir enfin tué leur homme. Ils se trompaient. Tout tremblant, hors de lui, celui-ci n'avait pas bougé, lorsqu'il vit revenir le spectre, lequel s'arrêtant lui dit : « Tu viens d'entendre cette décharge d'arquebuses ; elle t'était destinée : tu serais mort infailliblement : mort quant à la vie présente, mort quant à l'âme. Les âmes souffrantes du purgatoire, pour lesquelles tu as une compatissante dévotion, ont obtenu de Dieu que je vinsse à ton secours dans cet extrême péril. Reconnais cet immense bienfait, en continuant de prier pour elles, mais plus encore en changeant de vie et en te conduisant désormais comme il convient à un chrétien. »
Ce discours fini, le cadavre reprit sa place, comme si une invisible main le rattachait aux branches. Quant au jeune homme, il n'est pas besoin de s'étendre sur la révolution qui s'était opérée en lui. Peu de jours après, il se décida à dire adieu au monde pour faire pénitence dans un ordre austère, où il vécut dans une grande perfection.
Combien donc est vraie cette parole de la divine Ecriture : L'homme de miséricorde assure le bonheur de son âme !
(V. J.-B. Manni Sac. Trig., disc. 12)
6ème MERVEILLE
LE PURGATOIRE DES PAROLES INCONVENANTES.
Ex verbis tuis condemnaberis : Vous serez
Condamné sur vos paroles. (Matth. XII, 37.)
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Saint Ambroise recommande fortement aux vierges consacrées à Dieu l'observation rigoureuse du silence, principalement lorsqu'elles sont au chœur pour le chant des louanges divines, parce que, dit-il, « l'époux céleste, quand il vient, n'entre dans une âme qu'autant que les portes en sont fermées aux discours profanes : Sponsus vult clausam esse januam, cùm pulsat : janua nostra os nostrum est ; Christo propemodiùm soli debet aperiri : Notre porte, c'est la bouche, et elle ne doit s'ouvrir que pour le Seigneur. » (De Virg., v.) Césaire nous apprend, par un mémorable exemple, combien les conversations dans le lieu saint déplaisent à Dieu. Voici ce trait.
Dans un monastère de l'ordre de Citeaux, appelé Saint-Sauveur, deux jeunes filles de riches maisons firent profession et vouèrent à Dieu leur virginité. L'une avait nom Gertrude, l'autre Marguerite. On les avait placées, au chœur, l'une à côté de l'autre. La première, Gertrude, quoique très vertueuse, avait le malheureux défaut du bavardage, et rompait souvent le silence, faute dans laquelle elle entraînait sa compagne ; ce qui lui attira un sévère châtiment après sa mort. Une maladie l'emporta à la fleur de ses années. On l'avait
25
enterrée, suivant l’usage, au fond de l’église. Or, un
soir que les religieuses étaient réunies à chanter l’office,
la voici qui apparaît devant l’autel, y fait la génuflexion
accoutumée et va s’asseoir auprès de Marguerite. La
bonne sœur, à cette vue, est saisie de frayeur, devient
pâle, tremblante, prête à défaillir. On s’empresse autour
d’elle, on s’informe du mal qu’elle éprouve, on lui pro-
digue mille soins. Alors, sans dire un mot, elle se pros-
terne aux pieds de l’abbesse, lui demande sa bénédiction
et commence à raconter ce qui lui est arrivé. La dé-
funte, ajoute-t-elle, aussitôt après l’office des vêpres et
pendant qu’on récitait l’oraison, s’était levée, avait fait
une grande inclination jusqu’à terre et avait disparu.
La prudente supérieure, craignant que tout cela ne
fût le jeu d’une imagination troublée, ou bien quelque
illusion du démon, lui donna cette consigne : « Si
Gertrude vous apparaît encore, vous lui direz Benedi-
cite, à quoi elle répondra, suivant notre usage, Domi-
nus : nous lui demanderez alors d’où elle vient et ce
qu’elle veut. »
Le jour suivant, à la même heure, nouvelle appari-
tion. Marguerite la salue : « Benedicite ! – Dominus !
répond le fantôme. – Ma chère sœur Gertrude, pour-
suit la religieuse, d’où venez-vous à cette heure et que
voulez-vous ? – Je viens, dit-elle, satisfaire à la justice
divine dans le même lieu où j’ai péché avec toi, lorsque
j’ai tant de fois rompu le silence et te l’ai fait rompre
pour des choses futiles, pendant les saintes cérémo-
nies. Le Seigneur équitable veut que je m’acquitte en-
vers lui à l’endroit et dans les circonstances où je l’ai
offensé. Oh ! si tu savais combien je souffre ! Je suis
tout environnée de flammes ; ma langue surtout en est
26
consumée, sans que je trouve le moindre soulagement.
Ma bien-aimée sœur, profite de mon exemple ; mets un
frein à tes paroles ; oublie que je t’ai donné ce scandale
et n’y entraîne personne à ma suite, parce qu’un sup-
plice pareil te serait réservé. » Elle disparaût.
Plusieurs fois encore, elle revint réclamer les prières
des religieuses, jusqu’à ce que, délivrée par leurs suf-
frages, elle dit à sa compagne un tendre adieu et se
dirigea, sous ses yeux, vers le tombeau où on l’avait
ensevelie ; elle en souleva la pierre et s’y coucha pour
toujours.
Ces différentes émotions agirent si fortement sur
Marguerite, qu’elle tomba dans une grave maladie et
ne tarda pas à être à toute extrémité. On la crut même
morte. Mais ce n’était qu’une sorte d’extase, durant
laquelle il lui fut révélé des choses admirables de l’au-
tre vie. Elle les raconta, quand elle fut revenue à elle,
à des sœurs étonnées, et les exhorta à marcher de plus
en plus dans la voie courageuse de la mortification des
sens. De son côté, elle devint d’une scrupuleuse exacti-
tude à la règle du silence, ayant toujours présent à
l’esprit le châtiment infligé à sœur Gertrude. Elle veil-
lait tellement sur ses paroles, qu’on aurait pu lui appli-
quer le mont du Prophète royal : « Dixi : custodiam vias
meas ut non delinquam in linguâ meà posui ori meo
custodiam : Je me suis promis de veiller sur moi, afin de
ne point pécher par ma langue, et j’ai mis une barrière
à mes lèvres. »
(V.Césaire, Illustr. Mirac., I, XVIII, ch. 36, Alexis
Segala, Triumph. Purg. , p.II, c. 24, n. 32.)
21
Ve MERVEILLE
LA MISÉRICORDE ENVERS LES DÉFUNTS PROCURE LE SALUT DE L'ÂME, ET SOUVENT MÊME CELUI DU CORPS.
Benefacit unimæ suæ vir misericors.
L'homme de miséricorde assure le bonheur
de son âme. (Prov. xi, 29.)
Pour exciter la piété des fidèles à prier en faveur des âmes de ceux qui ont été mis à mort par la justice humaine, et qui souffrent dans les flammes de l'expiation, il n'est peut-être point de trait plus pathétique que celui-ci.
22
Il y avait aux environs de Rome, vers l'an 1620, un jeune homme de vie dissolue et scandaleuse, qui était devenu à cause de cela un objet à la fois d'horreur et de terreur. Ses excès, ses violences continuelles lui suscitèrent des ennemis décidés, qui résolurent de lui arracher la vie. Le malheureux, au milieu de ses désordres, avait conservé une grande compassion pour les âmes du purgatoire, pour lesquelles il faisait dire de temps en temps des messes, ou donnait l'aumône ; il priait même pour elles avec toute la ferveur dont il était capable, dans ce triste état de conscience. Cette unique dévotion devait lui sauver miraculeusement la vie de l'âme et celle du corps.
Un soir qu'il se rendait à Tivoli, monté sur un bon cheval, pensant échapper aux embûches qu'il savait dressées contre lui, il se trouva au contraire qu'il marchait juste au-devant d'elles. En effet, n'ignorant pas qu'il devait passer par là, ils s'étaient placés en embuscade armés d'arquebuses, derrière un petit bois, et attendaient son arrivée pour le tuer. Il approchait rapidement de ce lieu, quand il aperçut au-dessus de sa tête les membres d'un criminel attaché aux branches d'un chêne pour l'exemple des malfaiteurs. Emu de pitié, il s'arrête afin de réciter quelques prières, suivant sa coutume, pour cette pauvre âme abandonnée. Mais voici que, comme il priait, une merveille inconcevable frappe ses yeux, aux derniers rayons du jour : ces membres décharnés, desséchés, séparés, se rejoignent, tombent à terre, s'animent, s'approchent du cavalier sous une forme vivante. Il restait à sa place, cloué par la terreur. Le fantôme prend la bride du cheval et dit au jeune homme : « Descends et me laisse
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monter un moment ; il y va de ton salut ! tu vas m'attendre ici ; je ne serai pas long. » Tel était son saisissement, que, sans proférer une parole, il descend et laisse son cheval aux mains du cadavre ressuscité, qui y monte et le lance en avant.
Au bruit qu'ils entendent, les ennemis s'apprêtent, dressent leurs arquebuses, les déchargent, et, voyant tomber le cavalier, s'enfuient au plus vite, avant que le coup n'attirât du monde et ne les fit découvrir. Ils étaient sûrs d'avoir enfin tué leur homme. Ils se trompaient. Tout tremblant, hors de lui, celui-ci n'avait pas bougé, lorsqu'il vit revenir le spectre, lequel s'arrêtant lui dit : « Tu viens d'entendre cette décharge d'arquebuses ; elle t'était destinée : tu serais mort infailliblement : mort quant à la vie présente, mort quant à l'âme. Les âmes souffrantes du purgatoire, pour lesquelles tu as une compatissante dévotion, ont obtenu de Dieu que je vinsse à ton secours dans cet extrême péril. Reconnais cet immense bienfait, en continuant de prier pour elles, mais plus encore en changeant de vie et en te conduisant désormais comme il convient à un chrétien. »
Ce discours fini, le cadavre reprit sa place, comme si une invisible main le rattachait aux branches. Quant au jeune homme, il n'est pas besoin de s'étendre sur la révolution qui s'était opérée en lui. Peu de jours après, il se décida à dire adieu au monde pour faire pénitence dans un ordre austère, où il vécut dans une grande perfection.
Combien donc est vraie cette parole de la divine Ecriture : L'homme de miséricorde assure le bonheur de son âme !
(V. J.-B. Manni Sac. Trig., disc. 12)
6ème MERVEILLE
LE PURGATOIRE DES PAROLES INCONVENANTES.
Ex verbis tuis condemnaberis : Vous serez
Condamné sur vos paroles. (Matth. XII, 37.)
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Saint Ambroise recommande fortement aux vierges consacrées à Dieu l'observation rigoureuse du silence, principalement lorsqu'elles sont au chœur pour le chant des louanges divines, parce que, dit-il, « l'époux céleste, quand il vient, n'entre dans une âme qu'autant que les portes en sont fermées aux discours profanes : Sponsus vult clausam esse januam, cùm pulsat : janua nostra os nostrum est ; Christo propemodiùm soli debet aperiri : Notre porte, c'est la bouche, et elle ne doit s'ouvrir que pour le Seigneur. » (De Virg., v.) Césaire nous apprend, par un mémorable exemple, combien les conversations dans le lieu saint déplaisent à Dieu. Voici ce trait.
Dans un monastère de l'ordre de Citeaux, appelé Saint-Sauveur, deux jeunes filles de riches maisons firent profession et vouèrent à Dieu leur virginité. L'une avait nom Gertrude, l'autre Marguerite. On les avait placées, au chœur, l'une à côté de l'autre. La première, Gertrude, quoique très vertueuse, avait le malheureux défaut du bavardage, et rompait souvent le silence, faute dans laquelle elle entraînait sa compagne ; ce qui lui attira un sévère châtiment après sa mort. Une maladie l'emporta à la fleur de ses années. On l'avait
25
enterrée, suivant l’usage, au fond de l’église. Or, un
soir que les religieuses étaient réunies à chanter l’office,
la voici qui apparaît devant l’autel, y fait la génuflexion
accoutumée et va s’asseoir auprès de Marguerite. La
bonne sœur, à cette vue, est saisie de frayeur, devient
pâle, tremblante, prête à défaillir. On s’empresse autour
d’elle, on s’informe du mal qu’elle éprouve, on lui pro-
digue mille soins. Alors, sans dire un mot, elle se pros-
terne aux pieds de l’abbesse, lui demande sa bénédiction
et commence à raconter ce qui lui est arrivé. La dé-
funte, ajoute-t-elle, aussitôt après l’office des vêpres et
pendant qu’on récitait l’oraison, s’était levée, avait fait
une grande inclination jusqu’à terre et avait disparu.
La prudente supérieure, craignant que tout cela ne
fût le jeu d’une imagination troublée, ou bien quelque
illusion du démon, lui donna cette consigne : « Si
Gertrude vous apparaît encore, vous lui direz Benedi-
cite, à quoi elle répondra, suivant notre usage, Domi-
nus : nous lui demanderez alors d’où elle vient et ce
qu’elle veut. »
Le jour suivant, à la même heure, nouvelle appari-
tion. Marguerite la salue : « Benedicite ! – Dominus !
répond le fantôme. – Ma chère sœur Gertrude, pour-
suit la religieuse, d’où venez-vous à cette heure et que
voulez-vous ? – Je viens, dit-elle, satisfaire à la justice
divine dans le même lieu où j’ai péché avec toi, lorsque
j’ai tant de fois rompu le silence et te l’ai fait rompre
pour des choses futiles, pendant les saintes cérémo-
nies. Le Seigneur équitable veut que je m’acquitte en-
vers lui à l’endroit et dans les circonstances où je l’ai
offensé. Oh ! si tu savais combien je souffre ! Je suis
tout environnée de flammes ; ma langue surtout en est
26
consumée, sans que je trouve le moindre soulagement.
Ma bien-aimée sœur, profite de mon exemple ; mets un
frein à tes paroles ; oublie que je t’ai donné ce scandale
et n’y entraîne personne à ma suite, parce qu’un sup-
plice pareil te serait réservé. » Elle disparaût.
Plusieurs fois encore, elle revint réclamer les prières
des religieuses, jusqu’à ce que, délivrée par leurs suf-
frages, elle dit à sa compagne un tendre adieu et se
dirigea, sous ses yeux, vers le tombeau où on l’avait
ensevelie ; elle en souleva la pierre et s’y coucha pour
toujours.
Ces différentes émotions agirent si fortement sur
Marguerite, qu’elle tomba dans une grave maladie et
ne tarda pas à être à toute extrémité. On la crut même
morte. Mais ce n’était qu’une sorte d’extase, durant
laquelle il lui fut révélé des choses admirables de l’au-
tre vie. Elle les raconta, quand elle fut revenue à elle,
à des sœurs étonnées, et les exhorta à marcher de plus
en plus dans la voie courageuse de la mortification des
sens. De son côté, elle devint d’une scrupuleuse exacti-
tude à la règle du silence, ayant toujours présent à
l’esprit le châtiment infligé à sœur Gertrude. Elle veil-
lait tellement sur ses paroles, qu’on aurait pu lui appli-
quer le mont du Prophète royal : « Dixi : custodiam vias
meas ut non delinquam in linguâ meà posui ori meo
custodiam : Je me suis promis de veiller sur moi, afin de
ne point pécher par ma langue, et j’ai mis une barrière
à mes lèvres. »
(V.Césaire, Illustr. Mirac., I, XVIII, ch. 36, Alexis
Segala, Triumph. Purg. , p.II, c. 24, n. 32.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
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7ème Merveille UNE AME DU PURGATOIRE RAPPELEE A L’EXPIATION
SUR LA TERRE. Dedi illi tempus ut paenitentiam ageret : Je lui ai accordé du temps pour faire Pénitence. (Apocal. II, 21)
Oh ! que ne donneraient pas les âmes du purgatoire
pour avoir quelques moments de ce temps dont nous
prodiguons les heures dans des occupations inutiles et
dans les vanités terrestres ! Quelles pénitences, quels
travaux n’entreprendraient-elles pas volontiers, avec
empressement, pour s’épargner seulement quelques
minutes de leurs cruelles tortures ! Citons un nouvel
exemple, plus admirable à la vérité qu’il n’est imitable,
celui de la vénérable vierge Angèle Tholoméi, domi-
nicaine.
Elevée dès le premier âge dans l’amour de la vertu,
elle fit, par sa correspondance à la grâce, de rapides
progrès dans la perfection. Bientôt elle tomba dange-
reusement malade. Quand elle vit qu’il n’y avait plus
d’espérance du côté de la science humaine, elle eut
recours à son bienheureux frère, J.-B. Tholoméi, dont
la sainteté était déjà célèbre ; mais les ferventes oraisons
de ces deux âmes n’obtinrent point ce qu’elles dési-
raient, DIEU ayant d’autres desseins sur sa servante.
On peut dire ici, comme saint Augustin au sujet de
28
Lazare : « Distulit sanare infirmum, ut resuscitaret mor-
tuum : Il tarde de guérir le malade, afin de ressusciter
le mort »
Angèle était donc près de rendre le dernier soupir,
lorsqu’elle eut une vision. Il lui sembla qu’elle était
transportée dans une lieu très-vaste, où étaient repré-
sentées au vif toutes les peines du purgatoire. C’étaient
les tourments les plus variés : ici, des flammes arden-
tes ; là, des étangs de glace ; ailleurs, du soufre bouil-
lant, des roues à pointes de fer rougies au feu ; des
bêtes féroces à la dent aiguë, et cent autres supplices
dont la seule idée fait frémir. Il lui fut montré en quel
lieu son âme, qui allait sortir de son corps, allait se
rendre pour expier certains défauts qu’elle n’avait pas
assez combattus durant sa vie. En un mot, tel fut cet
horrible spectacle, que, lorsqu’elle retrouva sa connais-
sance, elle frémissait de la tête aux pieds. Elle raconta
tout à son saint frère, le suppliant de lui obtenir par
ses prières assez de vie pour se purifier de ces fautes
et éviter de pareils tourments.
Malgré ces désirs et ces supplications, le Seigneur
marqua le moment final, et elle expira. Mais, pendant
que l’on portait son corps en terre, le bienheureux
Jean-Baptiste, mu par une inspiration d’en-haut, com-
manda à sa sœur, au nom de JESUS-CHRIST , de quitter
les ombres de la mort et de reparaître vivante. O pro-
dige ! à l’instant le corps s’agite, la tête se lève, la
défunte est ressuscitée !
Elle savait à quel dessein le Ciel avait permis pour
elle un tel miracle. Aussi n’eut-elle plus d’autre souci
que de faire pénitence. Elle ne se contentait pas des
austérités aordinaires, cilices, disciplines, veilles pro-
29
Longées, jeunes rigoureux ; tout cela lui paraissait insignifiant auprès de ce qu’elle avait vu, mais elle demandait à l’eau et au feu une expiation plus complète : au milieu de l’hiver elle se plongeait dans une étang glacé ; d’autre fois, elle se mettait dans les flammes et y restait plusieurs secondes, malgré les plus cuisantes douleurs ; ou bien elle se roulait dans les épines jusqu'à rester tout en sang. Elle n’était attentive qu’a rechercher les moyens de mortifier sa chair, de la punir des moindres fautes. Elle ne se montrait pas moins avides des peines morales et des contradictions de toutes sortes. Elle était devenue un objet de pitié et presque d’horreur pour les témoins de son martyres. Plus d’une fois on lui conseilla de modérer ses austérités, on lui reprocha d’être trop cruelle pour elle-même. – « Ah ! Répondait-elle, qu’est-ce que tout cela, en comparaison des supplices réservés dans l’autre vie au infidélités qu’on se permet ici-bas si aisément ? Qu’est-ce que cela ? Qu’est-ce que cela ? Puissé-je en faire cent fois d’avantages ! » Et elle continuait. Enfin, semblable à l’or purifié par le feu, elle fut de nouveau appelée par le juge souverain au lieu du céleste repos, où elle s’envola, il faut le croire, sans passer par une expiation nouvelle. Combien ce trait nous devrait faire trembler ! Quoi ! Voilà une bonne religieuse, une fervente sœur Angèle, dans le travail de cette effroyable pénitence ; elle l’accomplit en tremblant et nous, pêcheurs, nous nous en dormons trantiquellement dans la mer de nos iniquités ! Quel sommeil ! Quelle illusion ! Quel endurcissement !
Frère Dominique-Marie Marchesi, Vie de la vénérable Angelae Tholomeae, 9 nov, au Diario Dominicano
30
8e MERVEILLE.
COMBIEN LES AMES DU PURGATOIRE SONT SOULAGEES PAR LE JEUNE ET L’ORAISON.
Le Seigneur exaucera vos prières, si vous persévérez dans la prière et le jeûne
(Judith IV, 12)
La charité doit porter tous les fidèles, sans exception, à s’intéresser aux souffrances des pauvres âmes qui expirent leurs péchés par le feu ; mais elle créé un devoir plus pressant encore s’il s’agit de parents, d’amis, de bienfaiteurs. La reine Gude, épouse de Sanche roi de Léon, l’avait compris.
Ce grand prince venait de triompher d’une révolte par la valeur de ses armes, et les rebelles étaient amenés à une entière soumission, lorsque leur chef Gonzalve, voyant qu’il ne pouvait résister à la force, appela la ruse à son secours. Il vint se jeter aux pieds du monarque, lui demanda humblement pardon et l’obtint. Admis dans l’intimité de Sanche, ou du moins dans ses bonnes grâces, le félon préparait une horrible trahison : il présente au roi un fruit empoisonné. A peine Sanche l’eut’il goûté que, se sentant mortellement atteint, il voulut être reporté tout de suite dans sa capitale ; mais il expira en route. Ce fut une grande désolation par tout le royaume, où Sanche était fort
31
aimé ; comment peindre de la douleur de sa femme Gude ? Elle ne cessait de pleurer, de gémir, de plaindre la victime d’une si lâche perfidie. Mais, comme elle était chrétienne, elle s’occupa surtout de prier et de faire prier pour défunt ; c’est en cela qu’elle plaça le plus grand luxe de ses funérailles, qui eurent d’ailleurs toute la pompe ordinaire pour de tels personnages. Le corps avait été porté au monastère de Castillo, où l’on célébra quantité de messes. La pieuse veuve ne voulut point s’éloigner de ces chères dépouilles ; elle déposa son diadème et prit le voile de la pénitence parmi les religieuses, accompagnée dans ce sacrifice par plusieurs dames de la cour. Elle se dévoua ainsi à Dieu et aux œuvres saintes, principalement en faveur de son époux défunt.
La nuit aussi bien que le jour, elle faisait monter au ciel les plus ardentes prières ; mais le samedi jour consacré à la divine Marie, elle redoublait ses oraisons, ses pénitences, ses aumônes, la rigueur de son jeûne, afin de délivrer cette âme des tourments du purgatoire, si elle y était encore détenue. Un samedi qu’elle était agenouillée devant l’autel de la Reine du ciel et qu’elle s’acquittait avec ferveur, de ce touchant devoir, Sanche lui apparut. Il était couvert d’habits de deuil et avait pour ceinture un double rang de chaînes rougies par le feu. Il commença par remercier Gude de ce qu’elle faisait pour lui et la supplia en même temps de continuer cette œuvre de charité, et même de faire davantage si elle pouvait. « Ah ! lui dit-il s’il m’était donné ma chère épouse, de vous faire connaître mes supplices que j’endure dans le purgatoire, combien s’augmenterait votre zèle pour celui que vous aimez encore ! Par
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les entrailles de la divine miséricorde, secourez-moi, Gude, secourez-moi ! Je suis dévoré dans ces flammes, Crucior in hac flamâ »
On le pense bien, il n’en fallait pas tant pour ranimer le zèle de pieuse femme ; redoubla de ferveur, de prières, de suffrages de toutes sortes, par elle-même et par les autres. Pendant quarante jours sans interruption, elle ne faisait que verser des larmes afin d’éteindre de feu qui consumait son mari, multiplier les prières afin de faire tomber ses chaînes, répandre d’immenses largesses dans les main des pauvres afin de racheter les fautes pour lesquelles il souffrait. En outre, elle fit dire un grand nombre de messes, et fit présent pour cela d’un riche ornement, destiné à rehausser la pompe des cérémonies sacrées.
Au bout de ces quarante jours, un samedi encore, le roi lui apparut de nouveau, non-seulement délivré de ses liens brûlants, mais environné d’un éclat céleste, vêtu d’un manteau d’une éclatante blancheur, dans lequel Gude reconnut l’objet précieux qu’elle avait donné pour l’église et que Dieu avait miraculeusement appliqué au salut de Sanche et à son triomphe. – « Me voici, lui dit-il d’un air heureux ; je suis libre ; grâce à vous, pieuse reine, je n’ai plus à souffrir. Soyez bénie à jamais ! Persévérez dans vos saints exercices. Méditez les peines de l’autre vie, et plus encore la gloire du paradis, où je vais vous attendre et où je serai votre protecteur. » Gude tendit les bras vers lui, mais elle ne put le toucher ; seulement, elle saisit l’ornement, qui resta en sa possession et qu’elle donna de nouveau à l’église de Saint-Etienne. Il en avait, en effet, disparu quoique enfermé avec soin, et on admira par quel pro-
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7ème Merveille UNE AME DU PURGATOIRE RAPPELEE A L’EXPIATION
SUR LA TERRE. Dedi illi tempus ut paenitentiam ageret : Je lui ai accordé du temps pour faire Pénitence. (Apocal. II, 21)
Oh ! que ne donneraient pas les âmes du purgatoire
pour avoir quelques moments de ce temps dont nous
prodiguons les heures dans des occupations inutiles et
dans les vanités terrestres ! Quelles pénitences, quels
travaux n’entreprendraient-elles pas volontiers, avec
empressement, pour s’épargner seulement quelques
minutes de leurs cruelles tortures ! Citons un nouvel
exemple, plus admirable à la vérité qu’il n’est imitable,
celui de la vénérable vierge Angèle Tholoméi, domi-
nicaine.
Elevée dès le premier âge dans l’amour de la vertu,
elle fit, par sa correspondance à la grâce, de rapides
progrès dans la perfection. Bientôt elle tomba dange-
reusement malade. Quand elle vit qu’il n’y avait plus
d’espérance du côté de la science humaine, elle eut
recours à son bienheureux frère, J.-B. Tholoméi, dont
la sainteté était déjà célèbre ; mais les ferventes oraisons
de ces deux âmes n’obtinrent point ce qu’elles dési-
raient, DIEU ayant d’autres desseins sur sa servante.
On peut dire ici, comme saint Augustin au sujet de
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Lazare : « Distulit sanare infirmum, ut resuscitaret mor-
tuum : Il tarde de guérir le malade, afin de ressusciter
le mort »
Angèle était donc près de rendre le dernier soupir,
lorsqu’elle eut une vision. Il lui sembla qu’elle était
transportée dans une lieu très-vaste, où étaient repré-
sentées au vif toutes les peines du purgatoire. C’étaient
les tourments les plus variés : ici, des flammes arden-
tes ; là, des étangs de glace ; ailleurs, du soufre bouil-
lant, des roues à pointes de fer rougies au feu ; des
bêtes féroces à la dent aiguë, et cent autres supplices
dont la seule idée fait frémir. Il lui fut montré en quel
lieu son âme, qui allait sortir de son corps, allait se
rendre pour expier certains défauts qu’elle n’avait pas
assez combattus durant sa vie. En un mot, tel fut cet
horrible spectacle, que, lorsqu’elle retrouva sa connais-
sance, elle frémissait de la tête aux pieds. Elle raconta
tout à son saint frère, le suppliant de lui obtenir par
ses prières assez de vie pour se purifier de ces fautes
et éviter de pareils tourments.
Malgré ces désirs et ces supplications, le Seigneur
marqua le moment final, et elle expira. Mais, pendant
que l’on portait son corps en terre, le bienheureux
Jean-Baptiste, mu par une inspiration d’en-haut, com-
manda à sa sœur, au nom de JESUS-CHRIST , de quitter
les ombres de la mort et de reparaître vivante. O pro-
dige ! à l’instant le corps s’agite, la tête se lève, la
défunte est ressuscitée !
Elle savait à quel dessein le Ciel avait permis pour
elle un tel miracle. Aussi n’eut-elle plus d’autre souci
que de faire pénitence. Elle ne se contentait pas des
austérités aordinaires, cilices, disciplines, veilles pro-
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Longées, jeunes rigoureux ; tout cela lui paraissait insignifiant auprès de ce qu’elle avait vu, mais elle demandait à l’eau et au feu une expiation plus complète : au milieu de l’hiver elle se plongeait dans une étang glacé ; d’autre fois, elle se mettait dans les flammes et y restait plusieurs secondes, malgré les plus cuisantes douleurs ; ou bien elle se roulait dans les épines jusqu'à rester tout en sang. Elle n’était attentive qu’a rechercher les moyens de mortifier sa chair, de la punir des moindres fautes. Elle ne se montrait pas moins avides des peines morales et des contradictions de toutes sortes. Elle était devenue un objet de pitié et presque d’horreur pour les témoins de son martyres. Plus d’une fois on lui conseilla de modérer ses austérités, on lui reprocha d’être trop cruelle pour elle-même. – « Ah ! Répondait-elle, qu’est-ce que tout cela, en comparaison des supplices réservés dans l’autre vie au infidélités qu’on se permet ici-bas si aisément ? Qu’est-ce que cela ? Qu’est-ce que cela ? Puissé-je en faire cent fois d’avantages ! » Et elle continuait. Enfin, semblable à l’or purifié par le feu, elle fut de nouveau appelée par le juge souverain au lieu du céleste repos, où elle s’envola, il faut le croire, sans passer par une expiation nouvelle. Combien ce trait nous devrait faire trembler ! Quoi ! Voilà une bonne religieuse, une fervente sœur Angèle, dans le travail de cette effroyable pénitence ; elle l’accomplit en tremblant et nous, pêcheurs, nous nous en dormons trantiquellement dans la mer de nos iniquités ! Quel sommeil ! Quelle illusion ! Quel endurcissement !
Frère Dominique-Marie Marchesi, Vie de la vénérable Angelae Tholomeae, 9 nov, au Diario Dominicano
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8e MERVEILLE.
COMBIEN LES AMES DU PURGATOIRE SONT SOULAGEES PAR LE JEUNE ET L’ORAISON.
Le Seigneur exaucera vos prières, si vous persévérez dans la prière et le jeûne
(Judith IV, 12)
La charité doit porter tous les fidèles, sans exception, à s’intéresser aux souffrances des pauvres âmes qui expirent leurs péchés par le feu ; mais elle créé un devoir plus pressant encore s’il s’agit de parents, d’amis, de bienfaiteurs. La reine Gude, épouse de Sanche roi de Léon, l’avait compris.
Ce grand prince venait de triompher d’une révolte par la valeur de ses armes, et les rebelles étaient amenés à une entière soumission, lorsque leur chef Gonzalve, voyant qu’il ne pouvait résister à la force, appela la ruse à son secours. Il vint se jeter aux pieds du monarque, lui demanda humblement pardon et l’obtint. Admis dans l’intimité de Sanche, ou du moins dans ses bonnes grâces, le félon préparait une horrible trahison : il présente au roi un fruit empoisonné. A peine Sanche l’eut’il goûté que, se sentant mortellement atteint, il voulut être reporté tout de suite dans sa capitale ; mais il expira en route. Ce fut une grande désolation par tout le royaume, où Sanche était fort
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aimé ; comment peindre de la douleur de sa femme Gude ? Elle ne cessait de pleurer, de gémir, de plaindre la victime d’une si lâche perfidie. Mais, comme elle était chrétienne, elle s’occupa surtout de prier et de faire prier pour défunt ; c’est en cela qu’elle plaça le plus grand luxe de ses funérailles, qui eurent d’ailleurs toute la pompe ordinaire pour de tels personnages. Le corps avait été porté au monastère de Castillo, où l’on célébra quantité de messes. La pieuse veuve ne voulut point s’éloigner de ces chères dépouilles ; elle déposa son diadème et prit le voile de la pénitence parmi les religieuses, accompagnée dans ce sacrifice par plusieurs dames de la cour. Elle se dévoua ainsi à Dieu et aux œuvres saintes, principalement en faveur de son époux défunt.
La nuit aussi bien que le jour, elle faisait monter au ciel les plus ardentes prières ; mais le samedi jour consacré à la divine Marie, elle redoublait ses oraisons, ses pénitences, ses aumônes, la rigueur de son jeûne, afin de délivrer cette âme des tourments du purgatoire, si elle y était encore détenue. Un samedi qu’elle était agenouillée devant l’autel de la Reine du ciel et qu’elle s’acquittait avec ferveur, de ce touchant devoir, Sanche lui apparut. Il était couvert d’habits de deuil et avait pour ceinture un double rang de chaînes rougies par le feu. Il commença par remercier Gude de ce qu’elle faisait pour lui et la supplia en même temps de continuer cette œuvre de charité, et même de faire davantage si elle pouvait. « Ah ! lui dit-il s’il m’était donné ma chère épouse, de vous faire connaître mes supplices que j’endure dans le purgatoire, combien s’augmenterait votre zèle pour celui que vous aimez encore ! Par
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les entrailles de la divine miséricorde, secourez-moi, Gude, secourez-moi ! Je suis dévoré dans ces flammes, Crucior in hac flamâ »
On le pense bien, il n’en fallait pas tant pour ranimer le zèle de pieuse femme ; redoubla de ferveur, de prières, de suffrages de toutes sortes, par elle-même et par les autres. Pendant quarante jours sans interruption, elle ne faisait que verser des larmes afin d’éteindre de feu qui consumait son mari, multiplier les prières afin de faire tomber ses chaînes, répandre d’immenses largesses dans les main des pauvres afin de racheter les fautes pour lesquelles il souffrait. En outre, elle fit dire un grand nombre de messes, et fit présent pour cela d’un riche ornement, destiné à rehausser la pompe des cérémonies sacrées.
Au bout de ces quarante jours, un samedi encore, le roi lui apparut de nouveau, non-seulement délivré de ses liens brûlants, mais environné d’un éclat céleste, vêtu d’un manteau d’une éclatante blancheur, dans lequel Gude reconnut l’objet précieux qu’elle avait donné pour l’église et que Dieu avait miraculeusement appliqué au salut de Sanche et à son triomphe. – « Me voici, lui dit-il d’un air heureux ; je suis libre ; grâce à vous, pieuse reine, je n’ai plus à souffrir. Soyez bénie à jamais ! Persévérez dans vos saints exercices. Méditez les peines de l’autre vie, et plus encore la gloire du paradis, où je vais vous attendre et où je serai votre protecteur. » Gude tendit les bras vers lui, mais elle ne put le toucher ; seulement, elle saisit l’ornement, qui resta en sa possession et qu’elle donna de nouveau à l’église de Saint-Etienne. Il en avait, en effet, disparu quoique enfermé avec soin, et on admira par quel pro-
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Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
CHAPITRE IX VIDE
11ème Merveille
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occupons. On ne pourrait croire les pénitences et les austérités qu'elle s'est imposées pour elles, si le récit n'en était garanti par les historiens les plus dignes de foi. Ils racontent donc que l'âme de cette pieuse vierge, séparée de son corps, fut portée par les anges dans le purgatoire afin de voir les souffrances qu'on y endure, et qu'elle en prit une compassion inexprimable. De là, elle fut ravie au ciel, dans la gloire immortelle des élus, et, présentée à la divine Majesté, elle entendit ce discours : "Christine, te voici au séjour de la félicité qui ne finit plus ; je te laisse le choix, ou bien de vivre dès aujourd'hui éternellement parmi les bienheureux, ou de retourner sur la terre pendant quelques années, obtenir des mérites, par tes expiations, en faveur des pauvres âmes que tu as contemplées au lieu de la douleur. Si tu préfères le premier parti, tu es au port, tu n'as plus rien à craindre ; si c'est le second, retourne dans ton corps pour y endurer le martyre de la charité, soulager des malheureux et embellir d'autant ta couronne".
La généreuse fille répondit : "Retournons donc, ô Seigneur, retournons à souffrir, à me sacrifier pour les âmes des défunts ; je ne refuse pour cela aucun calice d'amertume, aucun martyre".
Elle ressuscita, en présence de tous ceux qui étaient venus l'ensevelir, et aussitôt commencèrent les pénitences les plus épouvantables, dont on ne lit point les détails sans frémir. C'était peu pour elle de rester plusieurs jours de suite dans un jeûne absolu, de se rouler parmi les épines, de châtier ses membres délicats par des disciplines affreuses ; elle se jeta plusieurs fois dans des brasiers ardents, d'où elle ne pouvait sortir vivante
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que par miracle, et, à peine retirée, elle courait se plonger jusqu'au cou dans un étang glacé, où elle éprouvait d'indicibles angoisses. Elle s'exposait, dans cette ardeur sainte, aux roues des moulins, aux dents de fer des machines, à tout ce qui pouvait torturer ses sens et expier les délicatesses des autres. Ce qui l'encourageait dans ces rigoureuses pratiques et les lui rendait douces (nous n'en citons qu'une bien faible partie), c'est que Dieu permettait aux âmes qu'elle délivrait de lui apparaître et de la remercier l'une après l'autre ; elles se manifestaient quelquefois par troupes entières, et cette vue donnait à Christine un courage surnaturel.
Rappelons une seule de ces apparitions. Louis, le comte de Léon, dans la basse Allemagne, seigneur vaillant et renommé dans les conseils, avait pour Christine une grande vénération, et écoutait volontiers les reproches qu'elle lui adressait au sujet de bien des écarts auxquels il s'abandonnait. Etant tombé malade et en danger de mort, il expédia un messager pour la supplier de venir : car il désirait ardemment s'entretenir avec elle des intérêts de son âme, avant de paraître devant Dieu. Elle ne fut pas plus tôt venue, qu'il se jeta à ses pieds et lui dit, au milieu de ses larmes et de ses gémissements : "Vous savez bien déjà, servante de Dieu, quel grand pécheur je suis. Dans peu de temps, d'heures peut-être, il va me falloir rendre compte au Juge suprême de mes coupables et nombreuses fautes. Ah ! vous qui êtes si fidèle au Seigneur, conjurez-le, au nom de sa miséricorde, de m'accorder un acte de vraie contrition, afin que mes péchés me soient remis ; et puis, par vos suffrages, je vous en supplie, obtenez à
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cette pauvre âme quelque diminution dans les peines qu'elle mérite". La vierge compatissante pria avec toute la ferveur dont elle était capable, et Louis, plein de regrets, réconcilié par une bonne confession, rendit l'âme à son Créateur.
Il ne tarda guère à apparaître à Christine et lui dit : "O servante de Jésus-Christ, si vous saviez à quels tourments ineffables je suis condamné, combien vous auriez pitié de moi ! Je vous conjure de nouveau, par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu, de redoubler votre intercession en ma faveur, afin que je sois délivré". Christine, touchée de pitié, lui répondit : "Allez en paix, âme souffrante : je m'offre à endurer dans mon corps la moitié des tourments qui vous seraient infligés encore par la justice divine".
Elle s'adonna donc à des pénitences nouvelles, effroyables, le feu, l'eau, la glace, etc. Elle allait sur les lieux mêmes où elle avait entendu dire que Louis se livrait à des plaisirs défendus lorsqu'il vivait, et là, par ses larmes, par le sang qu'elle tirait de ses veines, elle cherchait à expier. Elle continua ainsi, épouvantant tous les témoins de son courage et de sa charité, jusqu'à ce que le défunt se montra à elle de nouveau, mais cette fois environné de gloire. Il lui rendit de grandes actions de grâces de ce que, par ses souffrances, il était acquitté envers l'éternelle justice et montait dans les splendeurs de la patrie. Christine, ravie, l'y accompagna du regard, et cette nouvelle joie lui fut une compensation de tout ce qu'elle s'imposait de privations et de misères.
(V. S. Surius, Vie de Christine-l'Admirable, 23 juin ; Denys-le-Chartreux, De quatuaor novissimis, ch. 50).
11ème Merveille
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occupons. On ne pourrait croire les pénitences et les austérités qu'elle s'est imposées pour elles, si le récit n'en était garanti par les historiens les plus dignes de foi. Ils racontent donc que l'âme de cette pieuse vierge, séparée de son corps, fut portée par les anges dans le purgatoire afin de voir les souffrances qu'on y endure, et qu'elle en prit une compassion inexprimable. De là, elle fut ravie au ciel, dans la gloire immortelle des élus, et, présentée à la divine Majesté, elle entendit ce discours : "Christine, te voici au séjour de la félicité qui ne finit plus ; je te laisse le choix, ou bien de vivre dès aujourd'hui éternellement parmi les bienheureux, ou de retourner sur la terre pendant quelques années, obtenir des mérites, par tes expiations, en faveur des pauvres âmes que tu as contemplées au lieu de la douleur. Si tu préfères le premier parti, tu es au port, tu n'as plus rien à craindre ; si c'est le second, retourne dans ton corps pour y endurer le martyre de la charité, soulager des malheureux et embellir d'autant ta couronne".
La généreuse fille répondit : "Retournons donc, ô Seigneur, retournons à souffrir, à me sacrifier pour les âmes des défunts ; je ne refuse pour cela aucun calice d'amertume, aucun martyre".
Elle ressuscita, en présence de tous ceux qui étaient venus l'ensevelir, et aussitôt commencèrent les pénitences les plus épouvantables, dont on ne lit point les détails sans frémir. C'était peu pour elle de rester plusieurs jours de suite dans un jeûne absolu, de se rouler parmi les épines, de châtier ses membres délicats par des disciplines affreuses ; elle se jeta plusieurs fois dans des brasiers ardents, d'où elle ne pouvait sortir vivante
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que par miracle, et, à peine retirée, elle courait se plonger jusqu'au cou dans un étang glacé, où elle éprouvait d'indicibles angoisses. Elle s'exposait, dans cette ardeur sainte, aux roues des moulins, aux dents de fer des machines, à tout ce qui pouvait torturer ses sens et expier les délicatesses des autres. Ce qui l'encourageait dans ces rigoureuses pratiques et les lui rendait douces (nous n'en citons qu'une bien faible partie), c'est que Dieu permettait aux âmes qu'elle délivrait de lui apparaître et de la remercier l'une après l'autre ; elles se manifestaient quelquefois par troupes entières, et cette vue donnait à Christine un courage surnaturel.
Rappelons une seule de ces apparitions. Louis, le comte de Léon, dans la basse Allemagne, seigneur vaillant et renommé dans les conseils, avait pour Christine une grande vénération, et écoutait volontiers les reproches qu'elle lui adressait au sujet de bien des écarts auxquels il s'abandonnait. Etant tombé malade et en danger de mort, il expédia un messager pour la supplier de venir : car il désirait ardemment s'entretenir avec elle des intérêts de son âme, avant de paraître devant Dieu. Elle ne fut pas plus tôt venue, qu'il se jeta à ses pieds et lui dit, au milieu de ses larmes et de ses gémissements : "Vous savez bien déjà, servante de Dieu, quel grand pécheur je suis. Dans peu de temps, d'heures peut-être, il va me falloir rendre compte au Juge suprême de mes coupables et nombreuses fautes. Ah ! vous qui êtes si fidèle au Seigneur, conjurez-le, au nom de sa miséricorde, de m'accorder un acte de vraie contrition, afin que mes péchés me soient remis ; et puis, par vos suffrages, je vous en supplie, obtenez à
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cette pauvre âme quelque diminution dans les peines qu'elle mérite". La vierge compatissante pria avec toute la ferveur dont elle était capable, et Louis, plein de regrets, réconcilié par une bonne confession, rendit l'âme à son Créateur.
Il ne tarda guère à apparaître à Christine et lui dit : "O servante de Jésus-Christ, si vous saviez à quels tourments ineffables je suis condamné, combien vous auriez pitié de moi ! Je vous conjure de nouveau, par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu, de redoubler votre intercession en ma faveur, afin que je sois délivré". Christine, touchée de pitié, lui répondit : "Allez en paix, âme souffrante : je m'offre à endurer dans mon corps la moitié des tourments qui vous seraient infligés encore par la justice divine".
Elle s'adonna donc à des pénitences nouvelles, effroyables, le feu, l'eau, la glace, etc. Elle allait sur les lieux mêmes où elle avait entendu dire que Louis se livrait à des plaisirs défendus lorsqu'il vivait, et là, par ses larmes, par le sang qu'elle tirait de ses veines, elle cherchait à expier. Elle continua ainsi, épouvantant tous les témoins de son courage et de sa charité, jusqu'à ce que le défunt se montra à elle de nouveau, mais cette fois environné de gloire. Il lui rendit de grandes actions de grâces de ce que, par ses souffrances, il était acquitté envers l'éternelle justice et montait dans les splendeurs de la patrie. Christine, ravie, l'y accompagna du regard, et cette nouvelle joie lui fut une compensation de tout ce qu'elle s'imposait de privations et de misères.
(V. S. Surius, Vie de Christine-l'Admirable, 23 juin ; Denys-le-Chartreux, De quatuaor novissimis, ch. 50).
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
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12ème Merveille
LA MERE DE DIEU MERE DES AMES DU PURGATOIRE.
Ego mater pulchroe ditertionis et sanctus Spei : Je suis la mère du bel amour et de la sainte espérance? (Eccli. XXIV, 24).
Ce beau nom de Mère des âmes du purgatoire, la Reine du Ciel se le donne à elle-même, dans les Révélations de sainte Brigitte : "Je suis, dit-elle à cette sainte, la mère de tous ceux qui sont dans le lieu de l'expiation ; mes prières adoucissent les châtiments qui leur sont infligés pour leurs fautes( liv. IVè, c. 1, 38)".
Et certainement si les saints du paradis peuvent par leur intercession obtenir la grâce de ces âmes, qui osera nier que Celle qui est tant au-dessus d'eux ne jouisse de ce privilège à un bien plus haut degré, alors surtout qu'elle est appelée par l'Eglise Consolatrice des affligés, Mère de la miséricorde ? Saint Pierre Damien rapporte l'apparition d'une personne sortie du purgatoire, qui assurait que dans la fête de la glorieuse assomption de Marie il avait été délivré plus d'âmes (Opusc. "', 2è p., c. 3). Il raconte, en outre, le mémorable exemple d'un prêtre à qui il fut donné de voir une admirable chose dans la basilique de Sainte-Cécile, l'une des plus célèbres de Rome.
Il sembla à ce prêtre qu'il était tiré de son sommeil
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par un ami défunt et conduit dans cette église. Là, il aperçut une troupe de vierges saintes, Cécile, Agnès, Agathe, et autres, qui se groupèrent autour d'un trône magnifique, sur lequel la Mère de Dieu vint s'asseoir, environnée d'anges et de bienheureux qui lui faisaient la cour. Notre-Dame avait un visage majestueux à la fois et serein, qui faisait la joie de toute la sainte et silencieuse assemblée. Alors parut une pauvre petite femme en habits négligés, mais ayant sur les épaules des fourrures assez précieuses. Elle se mit humblement aux pieds de la céleste Reine, joignant les mains, les yeux pleins de larmes, et dit en soupirant : "Mère des miséricordes, au nom de votre ineffable bonté je vous supplie d'avoir pitié du malheureux Jean Patrizi, qui vient de mourir et qui souffre cruellement dans le purgatoire". Trois fois elle répéta la même prière, y mettant chaque fois plus de ferveur, sans recevoir aucune réponse. Enfin, elle éleva encore la voix et ajouta : "Vous savez bien, ô très-miséricordieuse Reine, que je suis cette mendiante qui, à la porte de votre grande basilique, demandais l'aumône, dans le cœur de l'hiver, sans autre vêtement qu'un misérable haillon. Oh! Comme je tremblais de froid : C'est alors que Jean, imploré par moi au nom de la vierge Marie, ôta de ses épaules et me donna cette précieuse fourrure, s'en privant lui-même. Une si grande charité, faite en votre nom, mérite bien quelque indulgence !"
A cette touchante requête, la Reine du ciel jeta sur la suppliante un regard plein d'amour. "L'homme pour lequel tu pries, lui répondit-elle, est condamné pour longtemps à de rudes souffrances à cause de ses nombreux et graves péchés. Mais, comme il a eu deux
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vertus spéciales, la miséricorde envers les pauvres et la dévotion pour mes autels, je veux user de condescendance".
Des autres bienheureux qui étaient présents intercédèrent à leur tour. Marie ordonna qu'on amenât Patrizi au milieu de l'assemblée : aussitôt, une troupe de démons l'introduisirent, pâle, défiguré, chargé de chaînes qui lui déchiraient les membres. La Sainte Vierge leur commanda de le délier à l'instant même et de le mettre en liberté, afin qu'il pût se joindre aux saints qui faisaient la couronne de son trône. Quand cet ordre eut été exécuté, tout disparut, et l'église rentra dans son silence ordinaire.
Le bon prêtre qui avait joui de cette vision ne cessa plus, à partir de ce moment, de prêcher en tous lieux la clémence de la divine Marie envers les pauvres âmes qui n'ont pas encore acquitté toute leur dette, pourvu qu'elles aient été charitables et qu'elles l'aient servie.
(V. Pierre Damien, Opusc., 34 c. 4 . Théophile Raynaud, Heter. Spirit. 2è partie, sect. 3, 2è point q. 2).
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13ème Merveille
DIEU ACCORDE A SES SAINTS DE GRANDES GRACES
EN FAVEUR DES AMES DU PURGATOIRE.
Mirificavit Dominus sanctum suam ; Dominus exaudict me cum clmavero ad eum : Le Seigneur a exalté son serviteur ; il m'exaucera lorsque je crierai vers lui (PS. IV. 4).
Il ne serait pas inutile d'examiner ici, comment et par quels suffrages les bienheureux déjà couronnés peuvent secourir les âmes de l'Eglise souffrante. Il est certain, et tel est l'enseignement des maîtres de la théologie saint Augustin et saint Thomas, que les saints sont très puissants à cet égard par voie de supplication, ou, comme on dit, d'impétration. C'est tout ce qu'il nous suffit de savoir, et nous nous bornerons à rapporter un nouvel exemple de ce pouvoir dans la personne du roi de France Dagobert 1er. Le récit est emprunté à Théophile Raynaud, qui ajoute, à titre de confirmation, que les détails en sont sculptés sur le tombeau du prince dans la basilique royale de Saint-Denys près Paris. (1) Dagobert avait construit cette église en 636, et on y a depuis enseveli les Rois Très-Chrétiens.
Ansoald, évêque de Poitiers, avait fait le voyage de
(1) Ces sculptures s'y voient encore aujourd'hui, et les archéologues les considèrent comme symboliques. (Trad.).
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Sicile pour s'acquitter d'une ambassade et traiter quelques affaires de son Eglise. Comme il revenait satisfait, se dirigeant vers Marseille, une tempête s'éleva, qui le força de s'arrêter dans une petite île à moitié déserte. Là vivait en ermite un fidèle serviteur de Dieu, qui s'appelait Jean et qui était en lointaine réputation de sainteté ; on venait de toutes parts se recommander à ses prières et réclamer son intercession, à laquelle on attribuait des miracles nombreux. Ansoald, quittant le vaisseau, se rendit à cet ermitage et se plut à interroger le pieux solitaire sur les choses célestes, et spécialement sur la gloire qui nous est réservée dans le paradis. Après ces conversations spirituelles, Jean s'informa du pays de l'évêque, du sujet de son voyage, de sa navigation, etc. Quand il eut appris qu'il était français, qu'il retournait de Sicile dans son diocèse et les autres particularités, il lui demanda s'il connaissait la vie édifiante du roi Dagobert. "Sans aucun doute", répondit le prélat et il raconta tout ce qu'il en savait : que, après des guerres malheureuses, il s'était adonné à la piété, à la glorification de l'Eglise, à la construction de temples magnifiques et à l'embellissement des saintes cérémonies. Il parlait avec âme. Mais Jean l'interrompit bientôt : "Vous ignorez, ce semble, dit-il, que ce prince est passé à une meilleure vie ?" Comme l'évêque paraissait étonné de cette nouvelle, et même incrédule, l'ermite lui raconta une vision qu'il avait eue. Un matin que, fatigué de ses longues veilles, il s'était laissé gagner par le sommeil, il avait vu paraître un vénérable personnage en cheveux blancs, qui, le secouant, lui disait : "Levez-vous tout de suite et vous mettez en oraison afin d'implorer la divine miséricorde en faveur du roi
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Dagobert, dont l'âme est sortie aujourd'hui même de son corps". Le serviteur de Dieu avait commencé effectivement à prier, lorsqu'il aperçut sur les flots de la Méditerranée une troupe de monstres infernaux qui semblaient conduire le prince dans une barque, par une permission spéciale du Seigneur. Ils le poussaient avec fureur vers l'île volcanique du Stromboli, d'où s'élancent des flammes continuelles, d'un cratère célèbre, et en même temps ils le frappaient avec beaucoup de cruauté, et de diverses manières. L'infortuné roi appelait à son secours, avec de grands cris, les martyrs Denys et Maurice, le saint évêque Martin, qu'il avait honorés particulièrement durant sa vie et auxquels il avait élevé trois magnifiques églises ; il espérait qu'ils le tireraient des mains de ses bourreaux. Un moment après, voici que le ciel se couvre, l'orage accourt, la foudre gronde, d'horribles éclairs sillonnent l'air et frappent les démons au visage ; puis, au milieu de la tempête, trois personnages vêtus de blanc, éclatants comme le soleil, se montrent à Dagobert et le regardent avec des marques de compassion. Il les interroge, toujours suppliant : "Oh ! qui êtes-vous ? Venez-vous me délivrer ?" Ils lui répondent qu'ils sont Denys, Maurice et Martin, qu'ils descendent à son appel et qu'ils le tireront de ce péril pour le conduire à l'éternelle félicité. Aussitôt, ils lèvent contre les esprits infernaux un bras menaçant, leur arrachent leur victime toute tremblante, les mettent en fuite ; après quoi, ils l'embrassent tendrement, le consolent et l'emportent avec eux au ciel en chantant avec le Prophète et d'une voix d'une angélique douceur : "Beatus quem elegisti et assumpsisty, Domine ! inhabitabit inotriis tuis ; replebi-
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tur in bonis domûs tuoe ; sanctum est templum iuum, mirabile in oequitate : Bienheureux, Seigneur, celui que vous avez choisi et attiré à vous ! il habitera dans vos parvis ; il sera rassasié des biens de votre maison ; votre demeure est sainte, et on l'admire parce que les justes seuls y sont reçus".
Tel fut le récit du bon anachorète Jean, et c'est à la suite de la connaissance qui en fut répandue en France par Ansoald que l'on exprima sur le marbre de Saint-Denys toute l'histoire, afin que la mémoire en fût conservée et que les princes apprissent de-là à s'assurer la protection des saints en les priant et en honorant leurs autels.
(V. le chroniqueur bénédictin du XIè siècle, Aymon, Histoire des Français, liv. IV, ch. 24 ; Raynaud, Heter. Spirit., 3è p., sect. 3, 2è point, q. 2.).
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14ème Merveille
COMMENT LES PRIERES D'UN SAINT DELIVRENT
QUANTITE D'AMES
Millet tible auxilium de sancto : Dieu vous enverra son secours du fond du santuaire (PS. XIX, 3).
Ce que nous venons de voir de la puissante intercession des saints en faveur des âmes du purgatoire, me remet en mémoire tout ce qu'a opéré dans le même genre le grand serviteur de Dieu Jean de Nivelle, cha-
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noine primicier de la cathédrale de Liège (1). Thomas de Catimpré s'étend au long sur les œuvres apostoliques de ce pieux personnage, qu'il loue extrêmement. Bornons-nous à ce qui touche notre sujet.
Un prédicateur plein de zèle, prêchant en Angleterre, se livrait à des mouvements oratoires très vifs contre les impies qui osent outrager en face la divine Majesté. Une femme du monde, livrée à de grands désordres, assistait à ce sermon ; elle y fut tellement touchée de la grâce du Saint-Esprit et de la terreur des jugements de Dieu, qu'elle voulut donner devant tout le monde la preuve de son repentir et de sa contrition.
"Mon père, s'écria-t-elle à haute voix et en versant des larmes, mon père ! la confession, la confession tout de suite pour cette malheureuse pécheresse !" Celui-ci, dans l'admiration de cette grande foi, l'invita cependant à se taire jusqu'à la fin du discours et à ne point troubler le recueillement des autres. Elle le fit pour un moment ; mais, le repentir oppressant de plus en plus son cœur, elle s'écria de nouveau : "Oh ! je vous en prie, serviteur de Dieu, descendez un seul instant pour me donner l'absolution des mes crimes, de mes énormes offenses !". Le prêtre lui imposa encore silence, ajoutant qu'il n'avait plus que peu de chose à dire, et qu'il serait ensuite à sa disposition, pour la consoler et rendre la
(1) C'est le même, dit-on, qui a donné lieu au proverbe si répandu du chien de Jean de Nivelle. Ce fidèle animal l'accompagnait dans toutes ses courses apostoliques, et devint à Liège une vraie célébrité. On le battait tellement, pendant la dernière maladie de son maître, pour l'empêcher de sauter sur son lit, qu'il finit par s'enfuir chaque fois qu'il apercevait un visage nouveau, quelques caresses qu'on lui fit. (Trad.).
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paix à sa conscience troublée. Il termina en récapitulant brièvement ce qu'il venait d'exprimer touchant la gravité du péché ; mais, à ce tableau qui la saisissait, cette femme se leva et recommença ses cris, comme hors d'elle-même : "Point de retard, mon père ! tout de suite, tout de suite ! la douleur me brise, et je me meurs…" Et, en effet, elle tombe sur le pavé de l'église et expire au milieu de ses sanglots.
Grande fut la stupeur de l'assistance et le trouble du prédicateur. Il regrettait de ne s'être pas rendu immédiatement à la prière de cette pauvre pécheresse convertie qui soupirait après la parole du pardon. Après ce premier moment d'agitation, il se recueillit, et, s'adressant aux auditeurs, il leur demanda de se mettre en prières pour supplier la divine Majesté d'user de miséricorde envers cette âme et de daigner lui faire connaître en quel état elle se trouvait, afin qu'on pût mériter pour elle des suffrages si elle en avait besoin. Quant il fut rentré dans son monastère, il s'enferma dans sa cellule pendant trois jours, à prier continuellement, sans prendre ni repos ni nourriture; la troisième nuit, la défunte lui apparut toute glorieuse, le visage resplendissant d'allégresse, et elle lui dit : "Voici la pécheresse pour laquelle vous faites tant de prières : je suis délivrée des peines que m'avaient méritées mes innombrables fautes. Rendez plutôt d'éternelles actions de grâces à la bonté divine, qui m'a si promptement accueillie. Oui, je vole pour toujours dans le magnifique séjour du ciel, et j'y serai votre protectrice". Et comme le bon père paraissait douter de la vision et craindre que tout cela ne fût un rêve de son imagination, elle ajouta : "Afin que vous n'hésitiez point à
CHAPITRE XV VIDE
CHAPITRE XVI VIDE
CHAPITRE XVII
12ème Merveille
LA MERE DE DIEU MERE DES AMES DU PURGATOIRE.
Ego mater pulchroe ditertionis et sanctus Spei : Je suis la mère du bel amour et de la sainte espérance? (Eccli. XXIV, 24).
Ce beau nom de Mère des âmes du purgatoire, la Reine du Ciel se le donne à elle-même, dans les Révélations de sainte Brigitte : "Je suis, dit-elle à cette sainte, la mère de tous ceux qui sont dans le lieu de l'expiation ; mes prières adoucissent les châtiments qui leur sont infligés pour leurs fautes( liv. IVè, c. 1, 38)".
Et certainement si les saints du paradis peuvent par leur intercession obtenir la grâce de ces âmes, qui osera nier que Celle qui est tant au-dessus d'eux ne jouisse de ce privilège à un bien plus haut degré, alors surtout qu'elle est appelée par l'Eglise Consolatrice des affligés, Mère de la miséricorde ? Saint Pierre Damien rapporte l'apparition d'une personne sortie du purgatoire, qui assurait que dans la fête de la glorieuse assomption de Marie il avait été délivré plus d'âmes (Opusc. "', 2è p., c. 3). Il raconte, en outre, le mémorable exemple d'un prêtre à qui il fut donné de voir une admirable chose dans la basilique de Sainte-Cécile, l'une des plus célèbres de Rome.
Il sembla à ce prêtre qu'il était tiré de son sommeil
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par un ami défunt et conduit dans cette église. Là, il aperçut une troupe de vierges saintes, Cécile, Agnès, Agathe, et autres, qui se groupèrent autour d'un trône magnifique, sur lequel la Mère de Dieu vint s'asseoir, environnée d'anges et de bienheureux qui lui faisaient la cour. Notre-Dame avait un visage majestueux à la fois et serein, qui faisait la joie de toute la sainte et silencieuse assemblée. Alors parut une pauvre petite femme en habits négligés, mais ayant sur les épaules des fourrures assez précieuses. Elle se mit humblement aux pieds de la céleste Reine, joignant les mains, les yeux pleins de larmes, et dit en soupirant : "Mère des miséricordes, au nom de votre ineffable bonté je vous supplie d'avoir pitié du malheureux Jean Patrizi, qui vient de mourir et qui souffre cruellement dans le purgatoire". Trois fois elle répéta la même prière, y mettant chaque fois plus de ferveur, sans recevoir aucune réponse. Enfin, elle éleva encore la voix et ajouta : "Vous savez bien, ô très-miséricordieuse Reine, que je suis cette mendiante qui, à la porte de votre grande basilique, demandais l'aumône, dans le cœur de l'hiver, sans autre vêtement qu'un misérable haillon. Oh! Comme je tremblais de froid : C'est alors que Jean, imploré par moi au nom de la vierge Marie, ôta de ses épaules et me donna cette précieuse fourrure, s'en privant lui-même. Une si grande charité, faite en votre nom, mérite bien quelque indulgence !"
A cette touchante requête, la Reine du ciel jeta sur la suppliante un regard plein d'amour. "L'homme pour lequel tu pries, lui répondit-elle, est condamné pour longtemps à de rudes souffrances à cause de ses nombreux et graves péchés. Mais, comme il a eu deux
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vertus spéciales, la miséricorde envers les pauvres et la dévotion pour mes autels, je veux user de condescendance".
Des autres bienheureux qui étaient présents intercédèrent à leur tour. Marie ordonna qu'on amenât Patrizi au milieu de l'assemblée : aussitôt, une troupe de démons l'introduisirent, pâle, défiguré, chargé de chaînes qui lui déchiraient les membres. La Sainte Vierge leur commanda de le délier à l'instant même et de le mettre en liberté, afin qu'il pût se joindre aux saints qui faisaient la couronne de son trône. Quand cet ordre eut été exécuté, tout disparut, et l'église rentra dans son silence ordinaire.
Le bon prêtre qui avait joui de cette vision ne cessa plus, à partir de ce moment, de prêcher en tous lieux la clémence de la divine Marie envers les pauvres âmes qui n'ont pas encore acquitté toute leur dette, pourvu qu'elles aient été charitables et qu'elles l'aient servie.
(V. Pierre Damien, Opusc., 34 c. 4 . Théophile Raynaud, Heter. Spirit. 2è partie, sect. 3, 2è point q. 2).
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13ème Merveille
DIEU ACCORDE A SES SAINTS DE GRANDES GRACES
EN FAVEUR DES AMES DU PURGATOIRE.
Mirificavit Dominus sanctum suam ; Dominus exaudict me cum clmavero ad eum : Le Seigneur a exalté son serviteur ; il m'exaucera lorsque je crierai vers lui (PS. IV. 4).
Il ne serait pas inutile d'examiner ici, comment et par quels suffrages les bienheureux déjà couronnés peuvent secourir les âmes de l'Eglise souffrante. Il est certain, et tel est l'enseignement des maîtres de la théologie saint Augustin et saint Thomas, que les saints sont très puissants à cet égard par voie de supplication, ou, comme on dit, d'impétration. C'est tout ce qu'il nous suffit de savoir, et nous nous bornerons à rapporter un nouvel exemple de ce pouvoir dans la personne du roi de France Dagobert 1er. Le récit est emprunté à Théophile Raynaud, qui ajoute, à titre de confirmation, que les détails en sont sculptés sur le tombeau du prince dans la basilique royale de Saint-Denys près Paris. (1) Dagobert avait construit cette église en 636, et on y a depuis enseveli les Rois Très-Chrétiens.
Ansoald, évêque de Poitiers, avait fait le voyage de
(1) Ces sculptures s'y voient encore aujourd'hui, et les archéologues les considèrent comme symboliques. (Trad.).
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Sicile pour s'acquitter d'une ambassade et traiter quelques affaires de son Eglise. Comme il revenait satisfait, se dirigeant vers Marseille, une tempête s'éleva, qui le força de s'arrêter dans une petite île à moitié déserte. Là vivait en ermite un fidèle serviteur de Dieu, qui s'appelait Jean et qui était en lointaine réputation de sainteté ; on venait de toutes parts se recommander à ses prières et réclamer son intercession, à laquelle on attribuait des miracles nombreux. Ansoald, quittant le vaisseau, se rendit à cet ermitage et se plut à interroger le pieux solitaire sur les choses célestes, et spécialement sur la gloire qui nous est réservée dans le paradis. Après ces conversations spirituelles, Jean s'informa du pays de l'évêque, du sujet de son voyage, de sa navigation, etc. Quand il eut appris qu'il était français, qu'il retournait de Sicile dans son diocèse et les autres particularités, il lui demanda s'il connaissait la vie édifiante du roi Dagobert. "Sans aucun doute", répondit le prélat et il raconta tout ce qu'il en savait : que, après des guerres malheureuses, il s'était adonné à la piété, à la glorification de l'Eglise, à la construction de temples magnifiques et à l'embellissement des saintes cérémonies. Il parlait avec âme. Mais Jean l'interrompit bientôt : "Vous ignorez, ce semble, dit-il, que ce prince est passé à une meilleure vie ?" Comme l'évêque paraissait étonné de cette nouvelle, et même incrédule, l'ermite lui raconta une vision qu'il avait eue. Un matin que, fatigué de ses longues veilles, il s'était laissé gagner par le sommeil, il avait vu paraître un vénérable personnage en cheveux blancs, qui, le secouant, lui disait : "Levez-vous tout de suite et vous mettez en oraison afin d'implorer la divine miséricorde en faveur du roi
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Dagobert, dont l'âme est sortie aujourd'hui même de son corps". Le serviteur de Dieu avait commencé effectivement à prier, lorsqu'il aperçut sur les flots de la Méditerranée une troupe de monstres infernaux qui semblaient conduire le prince dans une barque, par une permission spéciale du Seigneur. Ils le poussaient avec fureur vers l'île volcanique du Stromboli, d'où s'élancent des flammes continuelles, d'un cratère célèbre, et en même temps ils le frappaient avec beaucoup de cruauté, et de diverses manières. L'infortuné roi appelait à son secours, avec de grands cris, les martyrs Denys et Maurice, le saint évêque Martin, qu'il avait honorés particulièrement durant sa vie et auxquels il avait élevé trois magnifiques églises ; il espérait qu'ils le tireraient des mains de ses bourreaux. Un moment après, voici que le ciel se couvre, l'orage accourt, la foudre gronde, d'horribles éclairs sillonnent l'air et frappent les démons au visage ; puis, au milieu de la tempête, trois personnages vêtus de blanc, éclatants comme le soleil, se montrent à Dagobert et le regardent avec des marques de compassion. Il les interroge, toujours suppliant : "Oh ! qui êtes-vous ? Venez-vous me délivrer ?" Ils lui répondent qu'ils sont Denys, Maurice et Martin, qu'ils descendent à son appel et qu'ils le tireront de ce péril pour le conduire à l'éternelle félicité. Aussitôt, ils lèvent contre les esprits infernaux un bras menaçant, leur arrachent leur victime toute tremblante, les mettent en fuite ; après quoi, ils l'embrassent tendrement, le consolent et l'emportent avec eux au ciel en chantant avec le Prophète et d'une voix d'une angélique douceur : "Beatus quem elegisti et assumpsisty, Domine ! inhabitabit inotriis tuis ; replebi-
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tur in bonis domûs tuoe ; sanctum est templum iuum, mirabile in oequitate : Bienheureux, Seigneur, celui que vous avez choisi et attiré à vous ! il habitera dans vos parvis ; il sera rassasié des biens de votre maison ; votre demeure est sainte, et on l'admire parce que les justes seuls y sont reçus".
Tel fut le récit du bon anachorète Jean, et c'est à la suite de la connaissance qui en fut répandue en France par Ansoald que l'on exprima sur le marbre de Saint-Denys toute l'histoire, afin que la mémoire en fût conservée et que les princes apprissent de-là à s'assurer la protection des saints en les priant et en honorant leurs autels.
(V. le chroniqueur bénédictin du XIè siècle, Aymon, Histoire des Français, liv. IV, ch. 24 ; Raynaud, Heter. Spirit., 3è p., sect. 3, 2è point, q. 2.).
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14ème Merveille
COMMENT LES PRIERES D'UN SAINT DELIVRENT
QUANTITE D'AMES
Millet tible auxilium de sancto : Dieu vous enverra son secours du fond du santuaire (PS. XIX, 3).
Ce que nous venons de voir de la puissante intercession des saints en faveur des âmes du purgatoire, me remet en mémoire tout ce qu'a opéré dans le même genre le grand serviteur de Dieu Jean de Nivelle, cha-
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noine primicier de la cathédrale de Liège (1). Thomas de Catimpré s'étend au long sur les œuvres apostoliques de ce pieux personnage, qu'il loue extrêmement. Bornons-nous à ce qui touche notre sujet.
Un prédicateur plein de zèle, prêchant en Angleterre, se livrait à des mouvements oratoires très vifs contre les impies qui osent outrager en face la divine Majesté. Une femme du monde, livrée à de grands désordres, assistait à ce sermon ; elle y fut tellement touchée de la grâce du Saint-Esprit et de la terreur des jugements de Dieu, qu'elle voulut donner devant tout le monde la preuve de son repentir et de sa contrition.
"Mon père, s'écria-t-elle à haute voix et en versant des larmes, mon père ! la confession, la confession tout de suite pour cette malheureuse pécheresse !" Celui-ci, dans l'admiration de cette grande foi, l'invita cependant à se taire jusqu'à la fin du discours et à ne point troubler le recueillement des autres. Elle le fit pour un moment ; mais, le repentir oppressant de plus en plus son cœur, elle s'écria de nouveau : "Oh ! je vous en prie, serviteur de Dieu, descendez un seul instant pour me donner l'absolution des mes crimes, de mes énormes offenses !". Le prêtre lui imposa encore silence, ajoutant qu'il n'avait plus que peu de chose à dire, et qu'il serait ensuite à sa disposition, pour la consoler et rendre la
(1) C'est le même, dit-on, qui a donné lieu au proverbe si répandu du chien de Jean de Nivelle. Ce fidèle animal l'accompagnait dans toutes ses courses apostoliques, et devint à Liège une vraie célébrité. On le battait tellement, pendant la dernière maladie de son maître, pour l'empêcher de sauter sur son lit, qu'il finit par s'enfuir chaque fois qu'il apercevait un visage nouveau, quelques caresses qu'on lui fit. (Trad.).
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paix à sa conscience troublée. Il termina en récapitulant brièvement ce qu'il venait d'exprimer touchant la gravité du péché ; mais, à ce tableau qui la saisissait, cette femme se leva et recommença ses cris, comme hors d'elle-même : "Point de retard, mon père ! tout de suite, tout de suite ! la douleur me brise, et je me meurs…" Et, en effet, elle tombe sur le pavé de l'église et expire au milieu de ses sanglots.
Grande fut la stupeur de l'assistance et le trouble du prédicateur. Il regrettait de ne s'être pas rendu immédiatement à la prière de cette pauvre pécheresse convertie qui soupirait après la parole du pardon. Après ce premier moment d'agitation, il se recueillit, et, s'adressant aux auditeurs, il leur demanda de se mettre en prières pour supplier la divine Majesté d'user de miséricorde envers cette âme et de daigner lui faire connaître en quel état elle se trouvait, afin qu'on pût mériter pour elle des suffrages si elle en avait besoin. Quant il fut rentré dans son monastère, il s'enferma dans sa cellule pendant trois jours, à prier continuellement, sans prendre ni repos ni nourriture; la troisième nuit, la défunte lui apparut toute glorieuse, le visage resplendissant d'allégresse, et elle lui dit : "Voici la pécheresse pour laquelle vous faites tant de prières : je suis délivrée des peines que m'avaient méritées mes innombrables fautes. Rendez plutôt d'éternelles actions de grâces à la bonté divine, qui m'a si promptement accueillie. Oui, je vole pour toujours dans le magnifique séjour du ciel, et j'y serai votre protectrice". Et comme le bon père paraissait douter de la vision et craindre que tout cela ne fût un rêve de son imagination, elle ajouta : "Afin que vous n'hésitiez point à
CHAPITRE XV VIDE
CHAPITRE XVI VIDE
CHAPITRE XVII
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
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D’avoir péché par la langue, en prononçant des mots obscènes, des serments et des malédictions ; le troisième, d’avoir péché en actions, par toute espèce de souillures et larcins. L’ange prit sa défense et rappela les actes de vertu qu’il avait produits : les prières fervent souvent récitées, les aumônes abondantes distribuées aux malheureux, les jeûnes et les mortifications qu’il s’imposait au milieu même des camps. Il a jouta spécialement qu’au moment de la mort il avait recouru avec grand abandon à la Mère ses miséricordes, à la Reine du ciel, et qu’elle lui avait fait produire les actes d’une vraie contrition.
Après ce double plaidoyer, le juge souverain prononça que l’accusé serait exempt des peines éternelles, mais qu’il ferait un douloureux et long purgatoire, dans ce sens que l’expiation serait parfaitement conforme aux fautes commises. « Il faut, dit-il, que cette âme soit entièrement purifiée, et elle subira un châtiment en rapport avec ses faiblesses. La peine des yeux sera de contempler des objets affreux ; celle de la langue d’être percée de mille pointes et tourmentée de la soif ; celle du toucher, d’être plongé dans un océan de feu. »
A ce moment parut l’avocate des pêcheurs, la Mère de DIEU, pour demander en grâce à son divin Fils un adoucissement à tant de supplices réunis ; elle rappelait que ce soldat avait jeûné les veilles de ses fêtes, récité son office souvent, et recouru à sa protection par de dévotes prières. Le Sauveur, touché de cette intervention, consentit à adoucir la sentence, et ajouta que pour obtenir davantage encore il faudrait, de la part des vivants, des prières, des aumônes et des pénitences :
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La seconde vision fut celle d’une noble demoiselle, dont Brigitte vit les grands tourments et entendit les plaintes. La sainte était livrée à une haute contemplation lorsqu’elle se trouva tout à coup ravie extase en présence des peines de l’autre vie. Parmi bon nombre de personnes, elle observa une jeune fille de condition distinguée, qui se désolait au sujet de sa mère dont l’excessive indulgence, pire que la haine, l’avait laissée trop à elle-même et à ses goûts de dépense, de délicatesse et de vanité. En outre, elle l’avait conduite aux spectacles, aux festins, aux réunions mondaines et licencieuses. En un mot, au lieu de retenir une jeunesse déjà portée d’elle-même au plaisir et à l’oubli des devoirs sérieux du christianisme, cette mère aveugle l’avait pour ainsi dire introduite dans la vie légère et sans retenue qui ruine les âmes.
Il est vrai, ajoutait la malheureuse condamnée, que ma mère me conseillait de temps en temps quelques actes de vertu et plusieurs dévotions utiles ; mais, comme d’autre part elle consentait à mes égarements, ce bien se mêlait au mal ; c’étaient des aliments, sains d’eux-mêmes, empoisonnés et rendus mauvais. Toutefois, je dois rendre grâces à l’infinie miséricorde du Sauveur, qui n’a pas permis ma damnation éternelle, que je méritais si bien par tant de fautes.
Avant de mourir, touchée de repentir, je me suis confessée ; et quoique cette conversion fût l’effet de la crainte, au moment où j’entrais en agonie je mes ressouvins de la douloureuse Passion du Sauveur, et cette pensée me porta à une sincère contrition. Je m’écriai donc, de cœur plus que de bouche : « Seigneur, JESUS, je crois que vous êtes mon DIEU. Ayez pitié de moi, ô Fils de la Vierge Marie, au nom de vos douleurs du Calvaire. J’ai un vif regret de mes péchés, et je souhaiterais de les réparer si j’avais pour cela du temps.
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En disant ces mots j’expirai. J’ai été délivrée de l’enfer, mais précipitée dans les plus graves tourments du purgatoire. »
Après ce discours, que DIEU fit entendre distinctement à la saintes, afin qu’il servit d’instruction à tous, l’âme continua d’expliquer ce qu’elle endurait en rapport avec ses fautes : « Maintenant, disait-elle, cette tête qui se plaisait aux parures et à la vanité, qui cherchait à attirer les regards, est dévorée de flammes à l’intérieur et à l’extérieur, et de flammes si cuisantes, qu’il me semble que je suis le point de mire de toutes les flèches du ciel. Ces épaules et ces bras que j’aimais à découvrir sont cruellement étreints dans des chaînes de fer. Ces pieds, ornés pour la danse, et objets de vanité, sont entourés de vipères qui les mordent et les souillent de leur bave immonde. Tous ces membres, chargés de colliers, de bracelets, de fleurs, de joyaux, se trouvent plongés dans des tortures qui leur font éprouver à la fois la consomption du feu et l’insupportable froid de la glace. »
L’infortunée poursuivant ce tableau, afin d’émouvoir la compassion de Brigitte et d’obtenir ses suffrages. La sainte raconta tout à une cousine de la défunte qui s’abandonnait elle-même à la mondanité ; ce qui fit sur elle une telle impression, qu’elle commença par renoncer à ses vains ajustements, et plus tard se voua à la pénitence dans un ordre extrêmement austère, où elle n’avait de bonheur que dans les mortifications, les jeûnes et les prières, tant pour elle-même que pour soulager sa pauvre parente.
(V. Révélations de sainte Brigitte, liv. VI, ch. 38 et 52).
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19ème MERVEILLE
LE CIEL BENIT CEUX QUI PRIENT POUR LES MORTS
Bénis soyez-vous du Seigneur, vous qui avez exercé la miséricorde.
Avant de quitter sainte Brigitte, je veux rapporter une autre de ses visions, qui montre clairement combien sont bénis des anges et des élus ceux qui s’occupent généreusement à prier en faveur des défunts. Ils reçoivent, à bien meilleur titre encore, l’expression ardente de la reconnaissance de David envers les habitants de Jabès : Bénis soyez-vous du Seigneur, vous qui avez usé de miséricorde envers votre maître Saül et qui lui avez donné la sépulture !
Brigitte vit donc, une autre fois, ouvert devant elle le lieu où les âmes sont purifiées comme l’or dans le creuset, avant de monter au séjour de l’éternel repos. Elle y entendit la voix d’un ange qui disait parmi ses prières : « Béni soit celui qui, vivant encore sur la terre, aide les âmes de ses oraisons et de ses bonnes œuvres ! car l’infaillible justice de DIEU exige que les âmes soient purifiées par les tourments du purgatoire ou délivrées par les bonnes œuvres de leurs amis. »
Alors la sainte entendit un chœur de voix suppliantes : « O Seigneur JESUS-CHRIST, très-juste juge, au nom de
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votre infinie miséricorde n"ayez point égard à nos innombrables fautes mais
aux mérites de votre très précieuse passion inspirez un sentiment de vraie
charité au coeur des ecclésiastiques ces religieux des prêtres et des
prélats afin que par leurs prières et leurs sacrifices par les aumônes par
les indulgences ils nous secourent dans notre triste situation ils peuvent
s'ils le veulent adoucir et abréger nos tourments ineffables et faire que
nous soyons plus tôt près de vous ô Dieu !" Enfin de l'abîme de ce lieu de
souffrance d'autres supplications frappaient l'oreille :"Grâces et mille
fois grâces à ceux qui nous envoient du soulagement dans notre malheur !"
Puis une sorte de lumière brillante d'un côté nuageuse de l'autre descendit
d'en-haut et pénétra dans le Purgatoire pour faire comprendre que le
soulagement venait avec des prières mais non parfait encore et de nouvelles
voix chantaient :"O Seigneur Dieu, que votre puissance infinie rende au
centuple le bien que nous font ceux qui pensent à intercéder pour notre
délivrance et à contribuer à nous introduire dans votre céleste et douce
lumière !" Voilà donc la récompense assurée de ceux qui prient pour les
morts voilà les intercesseurs qu'ils s'attachent ce sont des âmes qui
envoyées par eux dans la félicité éternelle n'oublient jamais un pareil
service et le rendent en prières semblables admirable communion des fidèles
entre eux qui fait de l'Eglise une seule famille étroitement unie source
assurée de grâces pour qui sait comprendre plaise à Dieu que chacun de mes
lecteurs éprouve quelque chose des sentiments de compassion et de faveur
dont ces visions remplirent la grande
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sainte Brigitte jusqu'à la fin de sa vie hélas combien nous avons besoin de
nous assurer un appui dans l'autre monde nous que tant de fautes exposent
aux rigueurs de la divine colère !"
(V. Révélations de sainte Brigitte, liv. IV, ch.7 ;
Théophile Raynaud, LLeter.Spirit, 2e partie;sect.
1,7epoint.)
D’avoir péché par la langue, en prononçant des mots obscènes, des serments et des malédictions ; le troisième, d’avoir péché en actions, par toute espèce de souillures et larcins. L’ange prit sa défense et rappela les actes de vertu qu’il avait produits : les prières fervent souvent récitées, les aumônes abondantes distribuées aux malheureux, les jeûnes et les mortifications qu’il s’imposait au milieu même des camps. Il a jouta spécialement qu’au moment de la mort il avait recouru avec grand abandon à la Mère ses miséricordes, à la Reine du ciel, et qu’elle lui avait fait produire les actes d’une vraie contrition.
Après ce double plaidoyer, le juge souverain prononça que l’accusé serait exempt des peines éternelles, mais qu’il ferait un douloureux et long purgatoire, dans ce sens que l’expiation serait parfaitement conforme aux fautes commises. « Il faut, dit-il, que cette âme soit entièrement purifiée, et elle subira un châtiment en rapport avec ses faiblesses. La peine des yeux sera de contempler des objets affreux ; celle de la langue d’être percée de mille pointes et tourmentée de la soif ; celle du toucher, d’être plongé dans un océan de feu. »
A ce moment parut l’avocate des pêcheurs, la Mère de DIEU, pour demander en grâce à son divin Fils un adoucissement à tant de supplices réunis ; elle rappelait que ce soldat avait jeûné les veilles de ses fêtes, récité son office souvent, et recouru à sa protection par de dévotes prières. Le Sauveur, touché de cette intervention, consentit à adoucir la sentence, et ajouta que pour obtenir davantage encore il faudrait, de la part des vivants, des prières, des aumônes et des pénitences :
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La seconde vision fut celle d’une noble demoiselle, dont Brigitte vit les grands tourments et entendit les plaintes. La sainte était livrée à une haute contemplation lorsqu’elle se trouva tout à coup ravie extase en présence des peines de l’autre vie. Parmi bon nombre de personnes, elle observa une jeune fille de condition distinguée, qui se désolait au sujet de sa mère dont l’excessive indulgence, pire que la haine, l’avait laissée trop à elle-même et à ses goûts de dépense, de délicatesse et de vanité. En outre, elle l’avait conduite aux spectacles, aux festins, aux réunions mondaines et licencieuses. En un mot, au lieu de retenir une jeunesse déjà portée d’elle-même au plaisir et à l’oubli des devoirs sérieux du christianisme, cette mère aveugle l’avait pour ainsi dire introduite dans la vie légère et sans retenue qui ruine les âmes.
Il est vrai, ajoutait la malheureuse condamnée, que ma mère me conseillait de temps en temps quelques actes de vertu et plusieurs dévotions utiles ; mais, comme d’autre part elle consentait à mes égarements, ce bien se mêlait au mal ; c’étaient des aliments, sains d’eux-mêmes, empoisonnés et rendus mauvais. Toutefois, je dois rendre grâces à l’infinie miséricorde du Sauveur, qui n’a pas permis ma damnation éternelle, que je méritais si bien par tant de fautes.
Avant de mourir, touchée de repentir, je me suis confessée ; et quoique cette conversion fût l’effet de la crainte, au moment où j’entrais en agonie je mes ressouvins de la douloureuse Passion du Sauveur, et cette pensée me porta à une sincère contrition. Je m’écriai donc, de cœur plus que de bouche : « Seigneur, JESUS, je crois que vous êtes mon DIEU. Ayez pitié de moi, ô Fils de la Vierge Marie, au nom de vos douleurs du Calvaire. J’ai un vif regret de mes péchés, et je souhaiterais de les réparer si j’avais pour cela du temps.
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En disant ces mots j’expirai. J’ai été délivrée de l’enfer, mais précipitée dans les plus graves tourments du purgatoire. »
Après ce discours, que DIEU fit entendre distinctement à la saintes, afin qu’il servit d’instruction à tous, l’âme continua d’expliquer ce qu’elle endurait en rapport avec ses fautes : « Maintenant, disait-elle, cette tête qui se plaisait aux parures et à la vanité, qui cherchait à attirer les regards, est dévorée de flammes à l’intérieur et à l’extérieur, et de flammes si cuisantes, qu’il me semble que je suis le point de mire de toutes les flèches du ciel. Ces épaules et ces bras que j’aimais à découvrir sont cruellement étreints dans des chaînes de fer. Ces pieds, ornés pour la danse, et objets de vanité, sont entourés de vipères qui les mordent et les souillent de leur bave immonde. Tous ces membres, chargés de colliers, de bracelets, de fleurs, de joyaux, se trouvent plongés dans des tortures qui leur font éprouver à la fois la consomption du feu et l’insupportable froid de la glace. »
L’infortunée poursuivant ce tableau, afin d’émouvoir la compassion de Brigitte et d’obtenir ses suffrages. La sainte raconta tout à une cousine de la défunte qui s’abandonnait elle-même à la mondanité ; ce qui fit sur elle une telle impression, qu’elle commença par renoncer à ses vains ajustements, et plus tard se voua à la pénitence dans un ordre extrêmement austère, où elle n’avait de bonheur que dans les mortifications, les jeûnes et les prières, tant pour elle-même que pour soulager sa pauvre parente.
(V. Révélations de sainte Brigitte, liv. VI, ch. 38 et 52).
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19ème MERVEILLE
LE CIEL BENIT CEUX QUI PRIENT POUR LES MORTS
Bénis soyez-vous du Seigneur, vous qui avez exercé la miséricorde.
Avant de quitter sainte Brigitte, je veux rapporter une autre de ses visions, qui montre clairement combien sont bénis des anges et des élus ceux qui s’occupent généreusement à prier en faveur des défunts. Ils reçoivent, à bien meilleur titre encore, l’expression ardente de la reconnaissance de David envers les habitants de Jabès : Bénis soyez-vous du Seigneur, vous qui avez usé de miséricorde envers votre maître Saül et qui lui avez donné la sépulture !
Brigitte vit donc, une autre fois, ouvert devant elle le lieu où les âmes sont purifiées comme l’or dans le creuset, avant de monter au séjour de l’éternel repos. Elle y entendit la voix d’un ange qui disait parmi ses prières : « Béni soit celui qui, vivant encore sur la terre, aide les âmes de ses oraisons et de ses bonnes œuvres ! car l’infaillible justice de DIEU exige que les âmes soient purifiées par les tourments du purgatoire ou délivrées par les bonnes œuvres de leurs amis. »
Alors la sainte entendit un chœur de voix suppliantes : « O Seigneur JESUS-CHRIST, très-juste juge, au nom de
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votre infinie miséricorde n"ayez point égard à nos innombrables fautes mais
aux mérites de votre très précieuse passion inspirez un sentiment de vraie
charité au coeur des ecclésiastiques ces religieux des prêtres et des
prélats afin que par leurs prières et leurs sacrifices par les aumônes par
les indulgences ils nous secourent dans notre triste situation ils peuvent
s'ils le veulent adoucir et abréger nos tourments ineffables et faire que
nous soyons plus tôt près de vous ô Dieu !" Enfin de l'abîme de ce lieu de
souffrance d'autres supplications frappaient l'oreille :"Grâces et mille
fois grâces à ceux qui nous envoient du soulagement dans notre malheur !"
Puis une sorte de lumière brillante d'un côté nuageuse de l'autre descendit
d'en-haut et pénétra dans le Purgatoire pour faire comprendre que le
soulagement venait avec des prières mais non parfait encore et de nouvelles
voix chantaient :"O Seigneur Dieu, que votre puissance infinie rende au
centuple le bien que nous font ceux qui pensent à intercéder pour notre
délivrance et à contribuer à nous introduire dans votre céleste et douce
lumière !" Voilà donc la récompense assurée de ceux qui prient pour les
morts voilà les intercesseurs qu'ils s'attachent ce sont des âmes qui
envoyées par eux dans la félicité éternelle n'oublient jamais un pareil
service et le rendent en prières semblables admirable communion des fidèles
entre eux qui fait de l'Eglise une seule famille étroitement unie source
assurée de grâces pour qui sait comprendre plaise à Dieu que chacun de mes
lecteurs éprouve quelque chose des sentiments de compassion et de faveur
dont ces visions remplirent la grande
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sainte Brigitte jusqu'à la fin de sa vie hélas combien nous avons besoin de
nous assurer un appui dans l'autre monde nous que tant de fautes exposent
aux rigueurs de la divine colère !"
(V. Révélations de sainte Brigitte, liv. IV, ch.7 ;
Théophile Raynaud, LLeter.Spirit, 2e partie;sect.
1,7epoint.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
20ème MERVEILLE.
Ingratitude des Héritiers envers leurs bienfaiteurs.
Ingrati fuerunt et qui proeparavit eis vitam :
Ils se sont montrés ingrats envers celui de qui ils tiennent la vie.(Esdr.)
Si Dieu doit juger sans miséricorde celui qui n'a pas eu de miséricorde
envers les autres Judicium sine misericordia illi qui fecit misericordiam (s.Jacques,11,13.)
quelle sera sa rigueur à l'égard de ces héritiers qui font à l'âme de leurs
bienfaiteurs cette injustice de n'acquitter point leurs legs pieux ? je
n'hésite pas pour ma part à leur appliquer le mot du IVe concile de Carthage
et à les appeler Egentium necatores meurtriers des malheureux on va voir
dans ce chapitre un exemple du châtiment réservé à leur impiété et à leur
criminelle usurpation car enfin tout ce qu'ils ont retenu de la sorte ne
leur appartient pas c'est un bien dérobé oh combien de
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fois ces héritages manqués au cachet de l'ingratitude n'ont-ils enfanté pour
leurs possesseurs que labeurs et peines a Milan une propriété peu éloignée
de la ville avait été affreusement tourmentée et désolée par la grèle
pendant que les campagnes voisines étaient demeurées intactes et
florissantes on ignorait la cause de ce désastre particulier lorsque
l'apparition d'une âme du Purgatoire fit connaître que c'était un châtiment
de la justice divine sur des enfants ingrats qui n'avaient point exécuté la
dernière volonté de leur père relativement à des oeuvres pieuses on raconte
aussi et sur le nombre il y a certainement des faits prouvés que maintes
fois les âmes des défunts ont fait entendre dans les maisons des bruits
effrayants ont bouleversé les meubles et autres choses semblables pour le
même motif a Ferrare un des plus beaux palais de la ville était resté
inhabitable par suite du tapage nocturne qui s'y faisait régulièrement et
dont la cause naturelle avait échappé à toutes les investigations le
propriétaire voyant la perte considérable qui en résultait pour lui chaque
année avait tout employé mais inutilement un étudiant en droit fatigué de
ses plaintes et persuadé qu'il n'y avait au fond que de ridicules terreurs
s'offrit hardiment à demeurer dans cette maison seul et à prouver la vanité
des craintes générales pourvu qu'on lui garantit un logement gratuit pendant
dix ans l'une des chambres le propriétaire y consentit bien volontier
l'étudiant s'installa au palais le jour même après y avoir fait porter ses
livres et tout son bagage la nuit vient notre jeune homme plein de courage
72:
se mit à étudier tranquillement il avait à soutenir le lendemain une thèse
importante et son esprit n'était rempli que de cette idée comme il avait
d'ailleurs de la piété il avait fait bénir le cierge qui l'éclairait
persuadé qu'au cas ou le démon tenterait quelque chose contre lui ce saint
objet le préserverait de malheur il étudiait donc sinon sans émotion du
moins sans crainte appréciable lorsque vers le milieu de la nuit un bruit
singulier se fait entendre dans tous les appartements on eût dit d'un
mouvement de chaînes trainées lourdement sur le parquet sans s'émouvoir
notre étudiant s'apprête à voir ce que c'est et attend avec impassibilité
car il distinguait l'approche de ce bruit qui venait de son côté il tenait
les yeux fixés sur la porte prêt à interpeller le nouveau-venu lorsque cette
porte s'ouvre et qu'aperçoit-il ? un spectre hideux des fers aux pieds et
aux mains qui sans lui adresser une parole ni répondre à ses questions
s'assied à côté de lui et le regarde avec des yeux terribles le jeune homme
commençait à trembler bien fort mais ayant fait une prière intérieur à Dieu
il se rassied à son tour et continue de consulter ses livres et d'écrire
"que cherches-tu donc avec tant de soin ? demanda enfin le fantôme d'une
voix sépulcrale - je cherche un texte de loi qui m'est indispensable pour ma
thèse de demain. -Ce n'est pas dans ce livre que tu le trouveras reprend
l'effrayant visiteur ; je vois là, sur la table, un darthole à tel endroit
tu auras ce que tu veux - je vous remercie". Et il poursuit son travail
je n'oserais dire qu'il le fit en toute liberté d'esprit on ne pouvait pas
l'exiger de lui dès que la première lueur du jour parut le spectre
73
se leva faisant de nouveau résonner ses chaînes et sortit comme il était
venu mais le jeune homme se lève à son tour sa lumière à la main et le suit
pas à pas jusqu'à une sorte de cave ou la terre sembla s'ouvrir et ou la
vision s'évanouit il laisse son cierge bénit à cet endroit et remonte dans
sa chambre aussitôt que l'heure le lui permit il sortit et alla raconter
l'histoire à ses amis on se rend au palais on visite les lieux on descend ou
était le cierge on creuse et on trouve un cadavre dont personne ne put
indiquer l'origine on appela donc un prêtre ces restes ignorés furent
déposés dans un cercueil et inhumés en terre sainte après les cérémonies et
les prières ordinaires on dit pour le défunt un grand nombre de messes et
depuis ce moment le palais demeura libre de tout ce qui l'avait rendu
inhabitable tout le monde fut persuadé que Dieu avait permis à une âme
abandonnée dans le Purgatoire de solliciter ainsi les suffrages de ses
frères.
(v.Jacques Hautin,Patroc,defunet,1.II,art.5;
Nicolas Lagus, Mirac.SS.Sacram,1r. VII,dist. 4, ch.27. )
(1) Cette histoire paraîtra presque incroyable mais les livres les plus
sérieux et les plus dignes de foi en contiennent de semblables à toutes les
époques et dans tous les pays voyez par exemple la Mystique divine du
célèbre Goerrés traduite par M.Sainte-Foi ou le savant critique a rassemblé
une foule de traits plus étonnants encore et authentiquement prouvés nous
rappelerons que Pline dans une de ses lettres raconte une apparition du même
genre à laquelle il déclare positivement croire Suétone en a plusieurs dans
ses Douze Césars notamment au n° 59 de sa Vie de Caligula.(note du traduct.)
74:
21ème Merveille
Actions de grâces des âmes du Purgatoire envers leurs libérateurs.
Salvasti nos de affigentibus nos, et odientes nos confudisti
Vous nous avez délivrés de nos persécuteurs, et vous avez confondu ceux qui nous
haissaient.Ps .XIIII,8.
Des âmes que l'illustre saint Nicolas de Tolentino avait délivrée par ses
prières lui adressèrent les paroles du psaume que je viens de prendre pour
épigraphe une des plus grandes vertus de cet admirable serviteur de Dieu fut
sa charité son dévouement pour l'Eglise souffrante pour elle il jeûnait
souvent au pain et à l'eau il se donnait des disciplines cruelles il se
mettait autour des reins une chaîne de fer étroitement sérrée ce fut surtout
lorsque l'obéissance l'eut forcé à se laisser ordonner prêtre qu'il
témoigna cet empressement et ce zèle en offrant l'auguste sacrifice aussi
les âmes qu'il soulageait par tant de suffrages lui apparurent-elles
plusieurs fois pour en réclamer de lui la continuation il demeurait à
Vallimanèsé près de Pise tout occupé de ses excercices spirituels lorsqu'un
samedi pendant la nuit comme il s'était retiré pour prendre un peu de repos
il vit en songe une personne toute dolente qui le supplia de monter pour
elle au saint autel la matinée suivante et aussi pour quelques autres mes
qui souf-
75:
fraient d'une manière affreuse dans le Purgatoire Nicolas reconnaissait la
voix mais ne pouvait se rappeler distinctement celui qui l'interpellait il
lui demanda donc qui il était.-"Je suis, répondit l'apparition, l'âme de
votre défunt ami le frère l'ellégrino d'Osima, qui ai pu éviter, par la
divine miséricorde, les châtiments éternels dus à mes fautes, mais non pas
l'expiation douloureuse qui leur est réservée pour un temps. Je viens, au
nom de beaucoup d'âmes aussi malheureuses que moi, vous supplier de dire
pour nous demain la sainte Messe, et nous espérons de là ou notre délivrance
entière ou du moins un grand soulagement." Le saint lui répondit avec sa
bonté accoutumée :"Que le Seigneur daigne vous secourir par les mérites de
son sang, par lequel il vous a rachetées ! Mais pour cette messe de Requiem,
je ne puis la dire demain : c'est moi qui dois chanter au coeur la messe du
couvent, et le dimanche il ne nous est pas permis de faire l'office des
morts." Alors l'âme soupirant et gémissant ajouta :"Ah ! venez avec moi, je
vous en conjure pour l'amour de Dieu ; venez contempler nos souffrances, et
vous ne me refuserez plus: vous êtes trop bon pour nous laisser dans de
pareilles angoisses." Il lui sembla qu'il était transporté dans une plaine
immense ou il aperçut une grande multitude d'âmes de tout état de tout âge
et de toute condition livrées à des tortures diverses et épouvantables du
geste et de la voix elles imploraient tristement son assistance. -"Voilà,
lui dit le frère Pellégrino, la malheureuse situation de ceux qui m'ont
député auprès de vous. Nous avons la confiance que le Seigneur ne refuserait
rien à vos sacrifices, et que sa divine miséricorde nous délivrerait."
76:
Le serviteur de Dieu à ce spectacle trois fois lamentable ne pouvait
contenir son émotion il se mit aussitôt à genoux et pria avec grande ferveur
pour tant d'infortunés il eût voulu que ses larmes éteignissent le feu qui
les consumait le matin venu dès qu'il fut réveillé il courut chez le prieur
lui raconter en détail toute sa vision et lui exposer la demande que le
frère Pellégrino lui avait faite d'une messe de Requiem ce jour-là même le
père ne put l'entendre sans partager sa vive émotion et cédant à ce
sentiment il le dispensa non-seulement pour ce jour-là mais pour toute la
semaine suivante de la messe conventuelle afin qu'il pût vaquer au
soulagement des âmes qui paraissent l'avoir imploré heureux de cette
permission Nicolas se rendit incontinent à la sacristie et célébra avec une
extraordinaire ardeur de plus il passa le jour et même la nuit à toutes
sortes de bonnes oeuvres dans la même intention macérations jeûne
disciplines oraisons prolongées l'auteur de sa vie assure que le démon le
troubla plusieurs fois visiblement dans ce saint exercice mais en vain il
continua ainsi toute la semaine alors il revit l'âme du frère Pellégrino
mais non plus dans son état de douleur dans ses flammes dans sa tristesse
une robe blanche le recouvrait il était environné d'une splendeur toute
céleste dans laquelle se jouaient une quantité d'autres âmes aussi heureuses
toutes ensemble lui rendaient grâce et l'appelaient leur libérateur puis
elles s'élevèrent au Ciel en chantant : Salvâsti nos de affligentibus nos,
et odientes nos confudisti !
(V. Surius, Vita S. Nicol. Tol., 10 sept ;jourdain de Saxe,Vies des fr. erm. de S- Augustins.)
Ingratitude des Héritiers envers leurs bienfaiteurs.
Ingrati fuerunt et qui proeparavit eis vitam :
Ils se sont montrés ingrats envers celui de qui ils tiennent la vie.(Esdr.)
Si Dieu doit juger sans miséricorde celui qui n'a pas eu de miséricorde
envers les autres Judicium sine misericordia illi qui fecit misericordiam (s.Jacques,11,13.)
quelle sera sa rigueur à l'égard de ces héritiers qui font à l'âme de leurs
bienfaiteurs cette injustice de n'acquitter point leurs legs pieux ? je
n'hésite pas pour ma part à leur appliquer le mot du IVe concile de Carthage
et à les appeler Egentium necatores meurtriers des malheureux on va voir
dans ce chapitre un exemple du châtiment réservé à leur impiété et à leur
criminelle usurpation car enfin tout ce qu'ils ont retenu de la sorte ne
leur appartient pas c'est un bien dérobé oh combien de
71:
fois ces héritages manqués au cachet de l'ingratitude n'ont-ils enfanté pour
leurs possesseurs que labeurs et peines a Milan une propriété peu éloignée
de la ville avait été affreusement tourmentée et désolée par la grèle
pendant que les campagnes voisines étaient demeurées intactes et
florissantes on ignorait la cause de ce désastre particulier lorsque
l'apparition d'une âme du Purgatoire fit connaître que c'était un châtiment
de la justice divine sur des enfants ingrats qui n'avaient point exécuté la
dernière volonté de leur père relativement à des oeuvres pieuses on raconte
aussi et sur le nombre il y a certainement des faits prouvés que maintes
fois les âmes des défunts ont fait entendre dans les maisons des bruits
effrayants ont bouleversé les meubles et autres choses semblables pour le
même motif a Ferrare un des plus beaux palais de la ville était resté
inhabitable par suite du tapage nocturne qui s'y faisait régulièrement et
dont la cause naturelle avait échappé à toutes les investigations le
propriétaire voyant la perte considérable qui en résultait pour lui chaque
année avait tout employé mais inutilement un étudiant en droit fatigué de
ses plaintes et persuadé qu'il n'y avait au fond que de ridicules terreurs
s'offrit hardiment à demeurer dans cette maison seul et à prouver la vanité
des craintes générales pourvu qu'on lui garantit un logement gratuit pendant
dix ans l'une des chambres le propriétaire y consentit bien volontier
l'étudiant s'installa au palais le jour même après y avoir fait porter ses
livres et tout son bagage la nuit vient notre jeune homme plein de courage
72:
se mit à étudier tranquillement il avait à soutenir le lendemain une thèse
importante et son esprit n'était rempli que de cette idée comme il avait
d'ailleurs de la piété il avait fait bénir le cierge qui l'éclairait
persuadé qu'au cas ou le démon tenterait quelque chose contre lui ce saint
objet le préserverait de malheur il étudiait donc sinon sans émotion du
moins sans crainte appréciable lorsque vers le milieu de la nuit un bruit
singulier se fait entendre dans tous les appartements on eût dit d'un
mouvement de chaînes trainées lourdement sur le parquet sans s'émouvoir
notre étudiant s'apprête à voir ce que c'est et attend avec impassibilité
car il distinguait l'approche de ce bruit qui venait de son côté il tenait
les yeux fixés sur la porte prêt à interpeller le nouveau-venu lorsque cette
porte s'ouvre et qu'aperçoit-il ? un spectre hideux des fers aux pieds et
aux mains qui sans lui adresser une parole ni répondre à ses questions
s'assied à côté de lui et le regarde avec des yeux terribles le jeune homme
commençait à trembler bien fort mais ayant fait une prière intérieur à Dieu
il se rassied à son tour et continue de consulter ses livres et d'écrire
"que cherches-tu donc avec tant de soin ? demanda enfin le fantôme d'une
voix sépulcrale - je cherche un texte de loi qui m'est indispensable pour ma
thèse de demain. -Ce n'est pas dans ce livre que tu le trouveras reprend
l'effrayant visiteur ; je vois là, sur la table, un darthole à tel endroit
tu auras ce que tu veux - je vous remercie". Et il poursuit son travail
je n'oserais dire qu'il le fit en toute liberté d'esprit on ne pouvait pas
l'exiger de lui dès que la première lueur du jour parut le spectre
73
se leva faisant de nouveau résonner ses chaînes et sortit comme il était
venu mais le jeune homme se lève à son tour sa lumière à la main et le suit
pas à pas jusqu'à une sorte de cave ou la terre sembla s'ouvrir et ou la
vision s'évanouit il laisse son cierge bénit à cet endroit et remonte dans
sa chambre aussitôt que l'heure le lui permit il sortit et alla raconter
l'histoire à ses amis on se rend au palais on visite les lieux on descend ou
était le cierge on creuse et on trouve un cadavre dont personne ne put
indiquer l'origine on appela donc un prêtre ces restes ignorés furent
déposés dans un cercueil et inhumés en terre sainte après les cérémonies et
les prières ordinaires on dit pour le défunt un grand nombre de messes et
depuis ce moment le palais demeura libre de tout ce qui l'avait rendu
inhabitable tout le monde fut persuadé que Dieu avait permis à une âme
abandonnée dans le Purgatoire de solliciter ainsi les suffrages de ses
frères.
(v.Jacques Hautin,Patroc,defunet,1.II,art.5;
Nicolas Lagus, Mirac.SS.Sacram,1r. VII,dist. 4, ch.27. )
(1) Cette histoire paraîtra presque incroyable mais les livres les plus
sérieux et les plus dignes de foi en contiennent de semblables à toutes les
époques et dans tous les pays voyez par exemple la Mystique divine du
célèbre Goerrés traduite par M.Sainte-Foi ou le savant critique a rassemblé
une foule de traits plus étonnants encore et authentiquement prouvés nous
rappelerons que Pline dans une de ses lettres raconte une apparition du même
genre à laquelle il déclare positivement croire Suétone en a plusieurs dans
ses Douze Césars notamment au n° 59 de sa Vie de Caligula.(note du traduct.)
74:
21ème Merveille
Actions de grâces des âmes du Purgatoire envers leurs libérateurs.
Salvasti nos de affigentibus nos, et odientes nos confudisti
Vous nous avez délivrés de nos persécuteurs, et vous avez confondu ceux qui nous
haissaient.Ps .XIIII,8.
Des âmes que l'illustre saint Nicolas de Tolentino avait délivrée par ses
prières lui adressèrent les paroles du psaume que je viens de prendre pour
épigraphe une des plus grandes vertus de cet admirable serviteur de Dieu fut
sa charité son dévouement pour l'Eglise souffrante pour elle il jeûnait
souvent au pain et à l'eau il se donnait des disciplines cruelles il se
mettait autour des reins une chaîne de fer étroitement sérrée ce fut surtout
lorsque l'obéissance l'eut forcé à se laisser ordonner prêtre qu'il
témoigna cet empressement et ce zèle en offrant l'auguste sacrifice aussi
les âmes qu'il soulageait par tant de suffrages lui apparurent-elles
plusieurs fois pour en réclamer de lui la continuation il demeurait à
Vallimanèsé près de Pise tout occupé de ses excercices spirituels lorsqu'un
samedi pendant la nuit comme il s'était retiré pour prendre un peu de repos
il vit en songe une personne toute dolente qui le supplia de monter pour
elle au saint autel la matinée suivante et aussi pour quelques autres mes
qui souf-
75:
fraient d'une manière affreuse dans le Purgatoire Nicolas reconnaissait la
voix mais ne pouvait se rappeler distinctement celui qui l'interpellait il
lui demanda donc qui il était.-"Je suis, répondit l'apparition, l'âme de
votre défunt ami le frère l'ellégrino d'Osima, qui ai pu éviter, par la
divine miséricorde, les châtiments éternels dus à mes fautes, mais non pas
l'expiation douloureuse qui leur est réservée pour un temps. Je viens, au
nom de beaucoup d'âmes aussi malheureuses que moi, vous supplier de dire
pour nous demain la sainte Messe, et nous espérons de là ou notre délivrance
entière ou du moins un grand soulagement." Le saint lui répondit avec sa
bonté accoutumée :"Que le Seigneur daigne vous secourir par les mérites de
son sang, par lequel il vous a rachetées ! Mais pour cette messe de Requiem,
je ne puis la dire demain : c'est moi qui dois chanter au coeur la messe du
couvent, et le dimanche il ne nous est pas permis de faire l'office des
morts." Alors l'âme soupirant et gémissant ajouta :"Ah ! venez avec moi, je
vous en conjure pour l'amour de Dieu ; venez contempler nos souffrances, et
vous ne me refuserez plus: vous êtes trop bon pour nous laisser dans de
pareilles angoisses." Il lui sembla qu'il était transporté dans une plaine
immense ou il aperçut une grande multitude d'âmes de tout état de tout âge
et de toute condition livrées à des tortures diverses et épouvantables du
geste et de la voix elles imploraient tristement son assistance. -"Voilà,
lui dit le frère Pellégrino, la malheureuse situation de ceux qui m'ont
député auprès de vous. Nous avons la confiance que le Seigneur ne refuserait
rien à vos sacrifices, et que sa divine miséricorde nous délivrerait."
76:
Le serviteur de Dieu à ce spectacle trois fois lamentable ne pouvait
contenir son émotion il se mit aussitôt à genoux et pria avec grande ferveur
pour tant d'infortunés il eût voulu que ses larmes éteignissent le feu qui
les consumait le matin venu dès qu'il fut réveillé il courut chez le prieur
lui raconter en détail toute sa vision et lui exposer la demande que le
frère Pellégrino lui avait faite d'une messe de Requiem ce jour-là même le
père ne put l'entendre sans partager sa vive émotion et cédant à ce
sentiment il le dispensa non-seulement pour ce jour-là mais pour toute la
semaine suivante de la messe conventuelle afin qu'il pût vaquer au
soulagement des âmes qui paraissent l'avoir imploré heureux de cette
permission Nicolas se rendit incontinent à la sacristie et célébra avec une
extraordinaire ardeur de plus il passa le jour et même la nuit à toutes
sortes de bonnes oeuvres dans la même intention macérations jeûne
disciplines oraisons prolongées l'auteur de sa vie assure que le démon le
troubla plusieurs fois visiblement dans ce saint exercice mais en vain il
continua ainsi toute la semaine alors il revit l'âme du frère Pellégrino
mais non plus dans son état de douleur dans ses flammes dans sa tristesse
une robe blanche le recouvrait il était environné d'une splendeur toute
céleste dans laquelle se jouaient une quantité d'autres âmes aussi heureuses
toutes ensemble lui rendaient grâce et l'appelaient leur libérateur puis
elles s'élevèrent au Ciel en chantant : Salvâsti nos de affligentibus nos,
et odientes nos confudisti !
(V. Surius, Vita S. Nicol. Tol., 10 sept ;jourdain de Saxe,Vies des fr. erm. de S- Augustins.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
77
22ème Merveille
Il faut travailler par soi-même à éviter le purgatoire
« Tout ce que vous pouvez faire, hâtez-vous de l’accomplir : car ni le travaille si la volonté de vous suivront après la mort » (Ecclés. 13,10)
C’est avec grande raison que Thomas à Kempis nous avertit de ne pas trop compter sur les suffrages de nos amis et de nos parents après notre mort, et de prendre nous-mêmes le plus grand soin de notre salut. Ne vous fiez point à vos amis et à vos proches, dit-il dans l’Imitation (Liv 1, chap. 23) : car ils vous oublieront plus que vous ne pensez. Si vous ne vous occupez pas de vous même actuellement, qui s’occupera de vous quand vous aurez disparu ? Je ne sache pas qu’il y ait souvenir plus sacré que celui d’un père dans le cœur de sa fille. Et pourtant, il s’est trouvé des filles même vertueuses, qui ont oublié ceux de qui elles tenaient le jour ! un exemple entre plusieurs autres.
Archangèle Panigorola, prieure du monastère de Sainte Marthe à Milan, avait une zèles extraordinaire pour le soulagement des âmes du purgatoire ; elle priait et faisait beaucoup priez en leur faveur. Cependant elle ne songeait que rarement et presque sans
78
effet à l’âme de son père Gothard, bien qu’elle l’eut tendrement aimé pendant sa vie. L’idée lui venait bien quelquefois, et elle prenait la résolution de le recommander particulièrement : puis elle pensait à autre chose ou à d’autres âmes, et l’oubli persévérait. Un événement inattendu et merveilleux la tira de cette insensibilité.
Le jour de la tête des morts, elle s’était renfermée dans sa cellule à prier pour eux et à faire en leur faveur divers actes de pénitence. Tout d’un coup son ange gardien lui apparaît, la prend par la main la conduit en esprit au purgatoire. Là, parmi les âmes qu’elle aperçut, elle reconnut celle de son père, plongée dans un étang d’eau glacée. A peine eut-il reconnu lui-même sa fille, qu’il se souleva vers elle en criant : « Hélas ! Archangèle ma fille, comment as-tu pu oublier si longtemps ton malheureux père, dans les tortures qu’il souffre ici ? Tu te montres animée d’une douce charité envers les étrangers ; j’en ai vu beaucoup monter au ciel par les suffrages : et pour moi qui suis ton père, à qui tu dois tant, qui t’ai aimée, élevée, favorisée, tu n’as pas le moindre sentiment de compassion ! Ne vois-tu pas que je suis transi, avec d’insupportables douleurs, dans ce lac de glace, pour châtiment de ma tiédeur au service de Dieu et de mon indifférence à l’égard de sa loi et du salut des âmes ? Ah ! sois donc émue une seule fois de pitié pour ton père, et fais par la ferveur de tes prières qu’il obtienne enfin miséricorde et monte au séjour de la gloire et du repos ! »
Archangèle demeura interdite à ces proches, qu’elle reconnaissait mériter ; bientôt sa douleur se répandit en un torrent de larmes, et c’est parmi les san
79
glots qu’elle put répondre ce peu de mots : « Je ferai, ô mon bien-aimé père, tout ce que vous me demandez, et je ferai immédiatement. Plaise au Seigneur que mes supplications vous délivrent ! »
L’ange la conduisit alors dans un autre lieu. Elle lui demanda comment il se faisait que, ayant eu souvent l’intention et formé la résolution de prier pour son père elle l’avait le plus souvent oublié, et pourquoi Dieu avait permis une telle distraction. « Je me rappelle même, dit-elle, qu’un matin, comme je me mettais à intercéder pour lui, je fus ravie en esprit, et il me sembla que je lui offrais un pain très blanc, mais qu’il le regardait d’un air dédaigneux et refusait de le prendre. Ce qui me fit craindre qu’il ne fût damné. Le fait est que je ne songeai pour plus guère à prier pour lui, tandis que j’y songeai pour tant d’autres qui ne me sont attachés par aucun lien. L’ange lui répondit : « Votre oubli a été permis de Dieu en punition du peu de zèle de votre père, quand il était en vie, à travailler à son salut. Il n’avait point de mauvaises mœurs, cela est vrai ; mais il ne montrait non plus aucun empressement pour les œuvres pieuses que le Ciel lui inspirait, et quand il en accomplissait quelqu’une, c’était sans l’attention ni l’intention désirables. Dieu impose pour l’ordinaire cette peine à ceux qui ont ainsi passé leur existence, sans empressement pour le bien : il permet qu’on se conduise envers eux comme ils se sont conduits envers le Seigneur. Oubli pour oubli. Tel était le sens de ce refus du pain qui vous a été montré. Mais maintenant, il faut multiplier vos suffrages en sa faveur, et obtenir de la divine miséricorde qu’elle le dire de ce lieu de tourments. »
80
Archangèle revint à elle, mais si émue, si brisée de chagrin, qu’elle n’eut plus un instant de calme ; il lui semblait toujours entendre les gémissements et les cris de son pauvre père, et elle versait toutes les larmes de ses yeux. Nous ne pouvons dire combien de prières, de jeûnes, de macérations elle fit pour cette âme si chère. Elle avait coutume de demander la délivrance des âmes au nom du sang très–précieux du Sauveur et de l’amour infini qu’il nous a témoigné sur la croix ; elle ajouta désormais une nouvelle invocation, celle des mérites de la divine Mère, lorsqu’au calvaire elle contemplait son fils expirant. Enfin, lorsque l’éternelle justice eut été satisfaite, l’âme de Gothard lui apparut, lumineuse, inondée de joie ; elle la remercia dans les termes les plus touchants ; après quoi elle s’éleva triomphante au ciel, laissant Archangèle aussi heureuse qu’elle avait pu auparavant éprouver de chagrin et de regrets.
(V. Vie de la sœur Archangèle Panagorala, par le R.P Octave Ivitiati, de la compagnie de Jésus, 1er Partie, ch. 11e)
22ème Merveille
Il faut travailler par soi-même à éviter le purgatoire
« Tout ce que vous pouvez faire, hâtez-vous de l’accomplir : car ni le travaille si la volonté de vous suivront après la mort » (Ecclés. 13,10)
C’est avec grande raison que Thomas à Kempis nous avertit de ne pas trop compter sur les suffrages de nos amis et de nos parents après notre mort, et de prendre nous-mêmes le plus grand soin de notre salut. Ne vous fiez point à vos amis et à vos proches, dit-il dans l’Imitation (Liv 1, chap. 23) : car ils vous oublieront plus que vous ne pensez. Si vous ne vous occupez pas de vous même actuellement, qui s’occupera de vous quand vous aurez disparu ? Je ne sache pas qu’il y ait souvenir plus sacré que celui d’un père dans le cœur de sa fille. Et pourtant, il s’est trouvé des filles même vertueuses, qui ont oublié ceux de qui elles tenaient le jour ! un exemple entre plusieurs autres.
Archangèle Panigorola, prieure du monastère de Sainte Marthe à Milan, avait une zèles extraordinaire pour le soulagement des âmes du purgatoire ; elle priait et faisait beaucoup priez en leur faveur. Cependant elle ne songeait que rarement et presque sans
78
effet à l’âme de son père Gothard, bien qu’elle l’eut tendrement aimé pendant sa vie. L’idée lui venait bien quelquefois, et elle prenait la résolution de le recommander particulièrement : puis elle pensait à autre chose ou à d’autres âmes, et l’oubli persévérait. Un événement inattendu et merveilleux la tira de cette insensibilité.
Le jour de la tête des morts, elle s’était renfermée dans sa cellule à prier pour eux et à faire en leur faveur divers actes de pénitence. Tout d’un coup son ange gardien lui apparaît, la prend par la main la conduit en esprit au purgatoire. Là, parmi les âmes qu’elle aperçut, elle reconnut celle de son père, plongée dans un étang d’eau glacée. A peine eut-il reconnu lui-même sa fille, qu’il se souleva vers elle en criant : « Hélas ! Archangèle ma fille, comment as-tu pu oublier si longtemps ton malheureux père, dans les tortures qu’il souffre ici ? Tu te montres animée d’une douce charité envers les étrangers ; j’en ai vu beaucoup monter au ciel par les suffrages : et pour moi qui suis ton père, à qui tu dois tant, qui t’ai aimée, élevée, favorisée, tu n’as pas le moindre sentiment de compassion ! Ne vois-tu pas que je suis transi, avec d’insupportables douleurs, dans ce lac de glace, pour châtiment de ma tiédeur au service de Dieu et de mon indifférence à l’égard de sa loi et du salut des âmes ? Ah ! sois donc émue une seule fois de pitié pour ton père, et fais par la ferveur de tes prières qu’il obtienne enfin miséricorde et monte au séjour de la gloire et du repos ! »
Archangèle demeura interdite à ces proches, qu’elle reconnaissait mériter ; bientôt sa douleur se répandit en un torrent de larmes, et c’est parmi les san
79
glots qu’elle put répondre ce peu de mots : « Je ferai, ô mon bien-aimé père, tout ce que vous me demandez, et je ferai immédiatement. Plaise au Seigneur que mes supplications vous délivrent ! »
L’ange la conduisit alors dans un autre lieu. Elle lui demanda comment il se faisait que, ayant eu souvent l’intention et formé la résolution de prier pour son père elle l’avait le plus souvent oublié, et pourquoi Dieu avait permis une telle distraction. « Je me rappelle même, dit-elle, qu’un matin, comme je me mettais à intercéder pour lui, je fus ravie en esprit, et il me sembla que je lui offrais un pain très blanc, mais qu’il le regardait d’un air dédaigneux et refusait de le prendre. Ce qui me fit craindre qu’il ne fût damné. Le fait est que je ne songeai pour plus guère à prier pour lui, tandis que j’y songeai pour tant d’autres qui ne me sont attachés par aucun lien. L’ange lui répondit : « Votre oubli a été permis de Dieu en punition du peu de zèle de votre père, quand il était en vie, à travailler à son salut. Il n’avait point de mauvaises mœurs, cela est vrai ; mais il ne montrait non plus aucun empressement pour les œuvres pieuses que le Ciel lui inspirait, et quand il en accomplissait quelqu’une, c’était sans l’attention ni l’intention désirables. Dieu impose pour l’ordinaire cette peine à ceux qui ont ainsi passé leur existence, sans empressement pour le bien : il permet qu’on se conduise envers eux comme ils se sont conduits envers le Seigneur. Oubli pour oubli. Tel était le sens de ce refus du pain qui vous a été montré. Mais maintenant, il faut multiplier vos suffrages en sa faveur, et obtenir de la divine miséricorde qu’elle le dire de ce lieu de tourments. »
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Archangèle revint à elle, mais si émue, si brisée de chagrin, qu’elle n’eut plus un instant de calme ; il lui semblait toujours entendre les gémissements et les cris de son pauvre père, et elle versait toutes les larmes de ses yeux. Nous ne pouvons dire combien de prières, de jeûnes, de macérations elle fit pour cette âme si chère. Elle avait coutume de demander la délivrance des âmes au nom du sang très–précieux du Sauveur et de l’amour infini qu’il nous a témoigné sur la croix ; elle ajouta désormais une nouvelle invocation, celle des mérites de la divine Mère, lorsqu’au calvaire elle contemplait son fils expirant. Enfin, lorsque l’éternelle justice eut été satisfaite, l’âme de Gothard lui apparut, lumineuse, inondée de joie ; elle la remercia dans les termes les plus touchants ; après quoi elle s’éleva triomphante au ciel, laissant Archangèle aussi heureuse qu’elle avait pu auparavant éprouver de chagrin et de regrets.
(V. Vie de la sœur Archangèle Panagorala, par le R.P Octave Ivitiati, de la compagnie de Jésus, 1er Partie, ch. 11e)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
81
23ème Merveille Traits divers de Charité
« Mon âme se réjouis dans le Seigneur, parce qu’il ma revêtu du manteau du salut »
(Is LXI, 40)
Ente le père Jules Mandnelli, de la Compagnie de Jésus, et les âmes du purgatoire, il y avait un tel échange de prières d’une part et de visites de l’antre, qu’on ne saurait en redire tous les détails. Je me borne ici à quelques-uns.
Rien de gracieux comme ce qui lui arriva avec l’âme de l’archevêque de Capone, César Costa, son oncle du côté maternel. Ce prélat, le voyant mal vêtu dans une fonction ecclésiastique, et jugeant qu’il devait souffrir de froid, lui donna de l’argent pour se procurer un manteau meilleur et plus chaud. Le Père Pachela et le mit sur ses épaules pour faire visite accoutumée des malades, à travers la ville. Un jour, après la mort de l’archevêque, comme il était déjà sur le pas de la porte pour sortir, ayant son luisant manteau, il voit venir les défunt, environné de flammes, qui le supplie de lui prêter un moment ce vêtement. Le bon Père, tout étonné, de lui donne ; et le prélat s’en entoure comme s’il voulait s’y cacher et comme s’il y trouvait un rafraîchissement délicieux. Mandnelli comprit que cette âme souffrait dans le purgatoire, et qu’elle voulait marquer par-là que son unique soulagement était dans la charité dont elle avait preuve envers lui. C’est pourquoi il lui promit de prier pour elle avec plus de zèle, à partir de cette heure, ajoutant qu’il fallait lui rendre son manteau, parce qu’il était envoyé quelques part pour la gloire de Dieu et que la chose pressait.
Un autre jour, c’est le baron de Montfort, qui, ayant été lié d’amitié avec le Père, lui apparut quelques temps après sa mort et se recommanda à lui avec une confiance toute amicale. Il revint plusieurs fois pour le même objet, jusqu'à ce que, après une messe de Requiem qu’il avait demandée, il cessa de se faire voir : ce qui donna au Père l’assurance qu’il était délivré.
Il avait eu pour maître Antoine Ugolino, qui fut depuis un prélat distingué de la cour de Grégoire XIII. Après sa mort, cet ancien professeur apparut à Mancinelli avec tous les attributs ordinaires de l’âme souffrante, visage pâle et défait, flammes autour de lui, chaînes étroites et présantes, etc., et il supplia, au nom des leçons qu’il lui avait données autrefois, d’intercéder pour lui dans l’extrémité où il se trouvait, et d’offrir le saint sacrifice. Le pieux jésuite s’empressa de faire de grand matin, le jour suivant, il monta dans cette intention au saint autel, afin d’immoler l’hostie de propitiation. Il put contempler ensuite cette même âme dans la plus belle gloire, au milieu de rayons célestes, respirant une félicité ineffable et lui témoignant pour sa charité une reconnaissance vive et sans bornes.
Et vraiment, on peut le dire, les sacrifices offerts par ce digne religieux semblaient avoir auprès du Seigneur
83 à suivre
CHAPITRE 24 VIDE SUR LE SITE
87
25ème Merveille
88 :
Elle tenait les yeux baissés, avec une certaine honte, comme si elle eut peur de contempler en face la gloire de l’adorable Majesté ; elle semblait même chercher à se cacher et à fuir les regards de son Rédempteur. Gertrude, émue de voir sa fille spirituelle trembler ainsi devant l’Eternel Epoux, se tourna vers lui et lui adressa cette invocation : »Très doux Jésus, pourquoi donc votre infinie bonté n’invite -t’elle pas celle qui s’est donnée à vous parfaitement, à s’approcher et à entrer dans la joie qui lui est réservée ?pourquoi ne l’attirez-vous pas dans vos bras, et la laissez-vous ainsi seule, triste, craintive ? »Le Seigneur aussitôt fit signe à la bonne religieuse de s ‘avancer, avec un sourire de tendresse. Mais elle, plus troublée encore, hésitait, tremblait, et enfin, après une profonde inclination, se retira.
L’étonnement de Gertrude était au comble. Elle s’adressa cette fois à l’âme et lui dit : »Comment, ma fille ! vous vous éloignez du Sauveur qui vous appelle !vous voilà en possession de ce que vous avez désiré toute votre vie ; et c’est pour vous en séparer avec cette froideur ! Ne voyez-vous pas ce que Jésus attend de vous ? »La jeune fille lui répondit : »Ah ! ma mère, je ne suis pas encore assez digne de paraître devant l’Agneau immaculé ; il me reste des taches terrestres. Il faut être plus pur que la lumière pour s’unir au Soleil de la justice, et je n’ai pas cette pureté parfaite sur laquelle se reposent avec complaisance ses regards. Je vous assure que, quand même la porte du ciel m’eût été toute grande ouverte et que j’eusse pu m’y élancer d’un bond, je n’aurais pas osé le faire avant d’être entièrement délivrée des plus légères imperfections ;il me
89 :
semble que les chœurs de vierges qui suivent Notre-Seigneur m’eût repoussée.- Et comment cela, reprit l’abbesse, puisque je vous vois environnée de lumière et de gloire ? – Ah ! répondit-elle, tout ceci n’est encore que la frange du dernier vêtement de l’immortalité ; c ‘est bien autre chose quand on voit Dieu, qu’on vit de lui, qu’on en jouit pour toujours ! mais pour cela il ne faut pas une tache ! »
L’autre vision est à peu près semblable. Elle eut pour objet la sœur de cette même religieuse, un peu plus jeune, mais non moins vertueuse. Elle était morte dans la fleur de l’âge, chargée d’œuvres saintes et de mérites. Elle s’était fait remarquer surtout par une dévotion toute singulière envers le très-saint Sacrement. La communauté s’empressa de prier pour son âme et d’offrir à cette intention des pénitences et des oraisons nombreuses. Gertrude la vit, brillante aussi, agenouillée devant le Roi de gloire, de qui s’échappaient cinq rayons enflammés qui allaient doucement frapper les cinq sens de la défunte. Mais elle n’en avait pas moins sur le front comme un nuage de chagrin et une tristesse visible. La sainte, s’adressant de nouveau à Notre-Seigneur, lui demanda comment il pouvait illuminer de la sorte toute sa servante , sans qu’elle éprouva aussitôt une joie parfaite. Jésus lui répondit que, jusqu’à ce moment, cette pieuse fille était digne seulement de contempler sa divine humanité et de jouir de la vue de ses cinq plaies, mais qu’elle ne méritait pas encore la vision béatifique de la divinité, parce qu’il restait en elle certaines taches légères contractées dans l’observation des règles. Gertrude supplia le Seigneur d’user envers elle d’indulgence, de lui pardonner ces misères
90 :
et de l’admettre au sort le plus heureux, après lequel nous soupirons tous ? Notre-Seigneur répondit que à moins de suffrages en sa faveur, la divine justice exigeait l’entier accomplissement de la peine , laquelle d’ailleurs était si bien comprise de cette âme et lui était si agréable, qu’elle ne consentirait point à en être exemptée. Elle fit signe effectivement, qu’il en était ainsi, et le sauveur, en signe de bienveillance, étendit sa main sur sa tête.
Dès cet instant, la sainte abbesse s’imposa plusieurs pratiques méritoires, afin de soulager et de délivrer l’âme de sa sœur ; elle pensait à elle principalement au saint sacrifice, et il lui semblait alors la voir s’élever peu à peu au ciel. Un jour, l’âme lui apparût et lui dit : « la dévotion que j’ai eue au divin Sacrement, durant ma vie , me fait recueillir des fruits particuliers de l’adorable Hostie quand on l’offre pour moi. C’est pourquoi je suis sur le point d’être introduite à jamais au séjour où m’attend le céleste époux pour me couronner. Oh ! que je suis heureuse du culte que je lui ai rendu pendant les courtes années d’une si passagère existence : et quel bon maître nous servons ! » Par ces paroles , elle enflamma d’un nouvel amour pour la sainte eucharistie toute la communauté que dirigeait Gertrude, et on y conçut en même temps un plus scrupuleux éloignement pour les moindres fautes, puisqu’il n’en est aucune qui ne doive être expiée.
(V. Louis de Blois Monite spirituale, ch.13.)
23ème Merveille Traits divers de Charité
« Mon âme se réjouis dans le Seigneur, parce qu’il ma revêtu du manteau du salut »
(Is LXI, 40)
Ente le père Jules Mandnelli, de la Compagnie de Jésus, et les âmes du purgatoire, il y avait un tel échange de prières d’une part et de visites de l’antre, qu’on ne saurait en redire tous les détails. Je me borne ici à quelques-uns.
Rien de gracieux comme ce qui lui arriva avec l’âme de l’archevêque de Capone, César Costa, son oncle du côté maternel. Ce prélat, le voyant mal vêtu dans une fonction ecclésiastique, et jugeant qu’il devait souffrir de froid, lui donna de l’argent pour se procurer un manteau meilleur et plus chaud. Le Père Pachela et le mit sur ses épaules pour faire visite accoutumée des malades, à travers la ville. Un jour, après la mort de l’archevêque, comme il était déjà sur le pas de la porte pour sortir, ayant son luisant manteau, il voit venir les défunt, environné de flammes, qui le supplie de lui prêter un moment ce vêtement. Le bon Père, tout étonné, de lui donne ; et le prélat s’en entoure comme s’il voulait s’y cacher et comme s’il y trouvait un rafraîchissement délicieux. Mandnelli comprit que cette âme souffrait dans le purgatoire, et qu’elle voulait marquer par-là que son unique soulagement était dans la charité dont elle avait preuve envers lui. C’est pourquoi il lui promit de prier pour elle avec plus de zèle, à partir de cette heure, ajoutant qu’il fallait lui rendre son manteau, parce qu’il était envoyé quelques part pour la gloire de Dieu et que la chose pressait.
Un autre jour, c’est le baron de Montfort, qui, ayant été lié d’amitié avec le Père, lui apparut quelques temps après sa mort et se recommanda à lui avec une confiance toute amicale. Il revint plusieurs fois pour le même objet, jusqu'à ce que, après une messe de Requiem qu’il avait demandée, il cessa de se faire voir : ce qui donna au Père l’assurance qu’il était délivré.
Il avait eu pour maître Antoine Ugolino, qui fut depuis un prélat distingué de la cour de Grégoire XIII. Après sa mort, cet ancien professeur apparut à Mancinelli avec tous les attributs ordinaires de l’âme souffrante, visage pâle et défait, flammes autour de lui, chaînes étroites et présantes, etc., et il supplia, au nom des leçons qu’il lui avait données autrefois, d’intercéder pour lui dans l’extrémité où il se trouvait, et d’offrir le saint sacrifice. Le pieux jésuite s’empressa de faire de grand matin, le jour suivant, il monta dans cette intention au saint autel, afin d’immoler l’hostie de propitiation. Il put contempler ensuite cette même âme dans la plus belle gloire, au milieu de rayons célestes, respirant une félicité ineffable et lui témoignant pour sa charité une reconnaissance vive et sans bornes.
Et vraiment, on peut le dire, les sacrifices offerts par ce digne religieux semblaient avoir auprès du Seigneur
83 à suivre
CHAPITRE 24 VIDE SUR LE SITE
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25ème Merveille
88 :
Elle tenait les yeux baissés, avec une certaine honte, comme si elle eut peur de contempler en face la gloire de l’adorable Majesté ; elle semblait même chercher à se cacher et à fuir les regards de son Rédempteur. Gertrude, émue de voir sa fille spirituelle trembler ainsi devant l’Eternel Epoux, se tourna vers lui et lui adressa cette invocation : »Très doux Jésus, pourquoi donc votre infinie bonté n’invite -t’elle pas celle qui s’est donnée à vous parfaitement, à s’approcher et à entrer dans la joie qui lui est réservée ?pourquoi ne l’attirez-vous pas dans vos bras, et la laissez-vous ainsi seule, triste, craintive ? »Le Seigneur aussitôt fit signe à la bonne religieuse de s ‘avancer, avec un sourire de tendresse. Mais elle, plus troublée encore, hésitait, tremblait, et enfin, après une profonde inclination, se retira.
L’étonnement de Gertrude était au comble. Elle s’adressa cette fois à l’âme et lui dit : »Comment, ma fille ! vous vous éloignez du Sauveur qui vous appelle !vous voilà en possession de ce que vous avez désiré toute votre vie ; et c’est pour vous en séparer avec cette froideur ! Ne voyez-vous pas ce que Jésus attend de vous ? »La jeune fille lui répondit : »Ah ! ma mère, je ne suis pas encore assez digne de paraître devant l’Agneau immaculé ; il me reste des taches terrestres. Il faut être plus pur que la lumière pour s’unir au Soleil de la justice, et je n’ai pas cette pureté parfaite sur laquelle se reposent avec complaisance ses regards. Je vous assure que, quand même la porte du ciel m’eût été toute grande ouverte et que j’eusse pu m’y élancer d’un bond, je n’aurais pas osé le faire avant d’être entièrement délivrée des plus légères imperfections ;il me
89 :
semble que les chœurs de vierges qui suivent Notre-Seigneur m’eût repoussée.- Et comment cela, reprit l’abbesse, puisque je vous vois environnée de lumière et de gloire ? – Ah ! répondit-elle, tout ceci n’est encore que la frange du dernier vêtement de l’immortalité ; c ‘est bien autre chose quand on voit Dieu, qu’on vit de lui, qu’on en jouit pour toujours ! mais pour cela il ne faut pas une tache ! »
L’autre vision est à peu près semblable. Elle eut pour objet la sœur de cette même religieuse, un peu plus jeune, mais non moins vertueuse. Elle était morte dans la fleur de l’âge, chargée d’œuvres saintes et de mérites. Elle s’était fait remarquer surtout par une dévotion toute singulière envers le très-saint Sacrement. La communauté s’empressa de prier pour son âme et d’offrir à cette intention des pénitences et des oraisons nombreuses. Gertrude la vit, brillante aussi, agenouillée devant le Roi de gloire, de qui s’échappaient cinq rayons enflammés qui allaient doucement frapper les cinq sens de la défunte. Mais elle n’en avait pas moins sur le front comme un nuage de chagrin et une tristesse visible. La sainte, s’adressant de nouveau à Notre-Seigneur, lui demanda comment il pouvait illuminer de la sorte toute sa servante , sans qu’elle éprouva aussitôt une joie parfaite. Jésus lui répondit que, jusqu’à ce moment, cette pieuse fille était digne seulement de contempler sa divine humanité et de jouir de la vue de ses cinq plaies, mais qu’elle ne méritait pas encore la vision béatifique de la divinité, parce qu’il restait en elle certaines taches légères contractées dans l’observation des règles. Gertrude supplia le Seigneur d’user envers elle d’indulgence, de lui pardonner ces misères
90 :
et de l’admettre au sort le plus heureux, après lequel nous soupirons tous ? Notre-Seigneur répondit que à moins de suffrages en sa faveur, la divine justice exigeait l’entier accomplissement de la peine , laquelle d’ailleurs était si bien comprise de cette âme et lui était si agréable, qu’elle ne consentirait point à en être exemptée. Elle fit signe effectivement, qu’il en était ainsi, et le sauveur, en signe de bienveillance, étendit sa main sur sa tête.
Dès cet instant, la sainte abbesse s’imposa plusieurs pratiques méritoires, afin de soulager et de délivrer l’âme de sa sœur ; elle pensait à elle principalement au saint sacrifice, et il lui semblait alors la voir s’élever peu à peu au ciel. Un jour, l’âme lui apparût et lui dit : « la dévotion que j’ai eue au divin Sacrement, durant ma vie , me fait recueillir des fruits particuliers de l’adorable Hostie quand on l’offre pour moi. C’est pourquoi je suis sur le point d’être introduite à jamais au séjour où m’attend le céleste époux pour me couronner. Oh ! que je suis heureuse du culte que je lui ai rendu pendant les courtes années d’une si passagère existence : et quel bon maître nous servons ! » Par ces paroles , elle enflamma d’un nouvel amour pour la sainte eucharistie toute la communauté que dirigeait Gertrude, et on y conçut en même temps un plus scrupuleux éloignement pour les moindres fautes, puisqu’il n’en est aucune qui ne doive être expiée.
(V. Louis de Blois Monite spirituale, ch.13.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
26ème Merveille
ADMIRABLE COMMERCE DE CHARITE ENTRE LES VIVANTS ET LES DEFUNTS
Vigilate in oratioibus, mutuam in vobis-
Metipsis charitatem habentes: Veillez dans
la prière, exerçant la charité les uns envers
les autres(1Petr. Iv, 7.)
Il ne serait pas facile de décider à qui la prière pour les morts est le plus utile, ou aux morts eux-mêmes ou à ceux qui travaillent à leur délivrance. En effet, si d’une part les âmes du Purgatoire sont puissamment soulagées par nos suffrages, de l’autre elles nous obtiennent elles-mêmes des grâces non moins précieuses. La vie de la vénérable Mère Marie-Françoise du Saint-Sacrement qui avait la plus grande dévotion à ces pauvres âmes, peut fournir d’utiles éclaircissements sur ce sujet.
Elle avait été élevée dans cette sainte pratique, et tant qu’elle vécut elle y resta fidèle ; elle était tout cœur, tout dévouement envers ces âmes souffrantes ; pour elles chaque jour elle récitait le rosaire, qu’elle avait coutume d’appeler son aumônier, et elle en terminait chaque dizaine par le Requiescant in pace. Les jours de fête, où elle était plus libre de son temps, elle y ajoutait l’office des morts. La meilleure partie de l’année, elle se condamnait pour elles au jeûne au pain
92 :
et à l’eau, sans parler des cruelles disciplines dont elle accablait son corps ; ainsi, elle ne quittait jamais son rude cilice. Le repos qu’elle était obligée de prendre, elle le troublait encore par plusieurs genres de mortifications. Toutes les fonctions dont elle s’acquittait, les travaux qu’elle faisait, les pensées de son esprit, le souffrances intérieures, les fatigues du corps, les persécutions continuelles des démons, elle consacrait tout aux âmes des défunts.
Ce n’est pas tout. Elle s’unissait avec les religieuses qu’elle fréquentait davantage, afin de former avec elles une sorte de ligne de bonnes œuvres et de prières. Quand des ecclésiastiques venaient au monastère, elle les exhortait à dire des messes de Requiem ; elle en faisait autant envers les laïques qu’elle voyait, les engageant à répandre beaucoup d’aumônes dans le même but. En un mot, pour les secourir , elles avait renoncé au mérite personnel de ses œuvres ; elle présentait chaque jour à la justice divine, pour leur soulagement, les oraisons, les pénitences , les privations qu’elle s’imposait, et les indulgences qu’elle gagnait. Le matin esprit s’efforça de lui suggérer une pensée de regret ; il lui représenta qu’en se dépouillant ainsi de tous ses mérites elle n’en aurait plus aucun quand elle paraîtrait devant Dieu, et devrait par conséquent souffrir elle-même un long purgatoire. Mais il ne réussit point ; tout retour d’intérêt propre était impossible à cette âme généreuse et ferme comme le diamant : les défunts qui lui apparaissaient l’assuraient d’ailleurs qu’ils sauraient bien compenser cette différence par leur intercession quand ils seraient délivrés, et que Dieu ne ferait point tourner contre elle son héroïque charité.
93 :
Ceci nous amène à dire encore un mot de la reconnaissance des âmes du purgatoire envers les bienfaiteurs. Un la vit dans cette sainte femme. Ces âmes la visitaient fréquemment, non-seulement pour solliciter ses suffrages, mais pour l’en remercier. Des témoins ont assuré que , plusieurs fois, elle l’attendrirent visiblement à sa porte, quand elle se rendait à l’office de matines, pour se recommander à elle ; d’autres fois, elles pénétrèrent dans la chambre, afin de lui présenter leur requête ; elles se rangeaient autour de son lit jusqu’à ce qu’elle s’éveillât. Pour elle, elle ne témoignait aucune crainte devant ces apparitions, qui auraient rempli tout autre de frayeur. »Nos peines sont adoucies, disaient les âmes, rien que par votre présence. »Elles lui disaient en entrant, afin qu’elle ne se crût point le jouet de quelque rêve ou d’une illusion du démon : »Nous vous saluons, servante de Dieu, épouse du Seigneur : que Jésus soit avec vous toujours ! »Puis elles témoignaient leur vénération pour une grande croix et pour les reliques que leur bienfaitrice conservaient dans sa cellule. Si elles la trouvaient récitant le rosaire, ajoutent les mêmes témoins, elles le lui prenaient des mains et semblaient le baiser avec respect et confiance, comme un instrument de salut et de délivrance. Elles la prévenaient des artifices se Satan , des pièges qu’il dressait contre elle et des tentations ou des illusions qu’il lui préparait, afin qu’elle se disposât à les déjouer par les sacrements et par la prière.
Dans le but de la toucher davantage, elles se montraient à elles sous des formes particulières. C’était ordinairement, accompagnées des signes ou des instruments de leurs péchés, devenus ceux de leur châtiment.
94 :
Tantôt c’étaient des évêques la mitre en tête, la crosse à la main, revêtus de la chasuble, et en même temps environnés de flammes ; ils lui disaient : « Nous souffrons tout ceci pour avoir recherché ambitieusement les dignités, et n’avoir point correspondu aux obligations qu’elles nous ont fait contracter. »D’autres fois, c’étaient des prêtres avec leurs ornements en feu, l’étole transformée en chaîne, les mains couvertes d’ulcères : ils s’accusaient d’avoir traité avec irrévérence le divin corps du Seigneur, et d’avoir administré sans respect les sacrements. UN religieux se fit voir entouré d’objets précieux, d’écrins, de fauteuils, de tableaux,,tout enflammés, parce que, manquant à son vœu de pauvreté, il avait rassemblé ces futilités dans sa cellule. Elle vit aussi un notaire de Soria avec tous les insignes de sa profession, qui, accumulés autour de lui et enflammés le tourmentaient terriblement : « J’ai employé cet encrier, cette plume, ce papier, dit-il, à des actes illégitimes, contraires à la justice et à l’équité. J’avais aussi la passion du jeu : et ces cartes tout en feu que je suis obligé de tenir dans les mains font ma punition. Cette bourse brûlante contient mes gains illicites et me les fait expier. Au moment de mourir, j’aurais infailliblement couru à ma damnation, si une sincère contrition n’avait rempli mon cœur. Du moins suis-je condamné à un long et rigoureux purgatoire, si vous ne consentez charitablement à l’abréger par vos bonnes œuvres. »Ces apparitions causaient un grand chagrin à la servante de Dieu ;mais d’un autre côté, elle éprouvait une immense consolation lorsque les âmes délivrées venaient la remercier avant de monter au ciel.
Nous ne pouvons passer sous silence le trait qui
95 :
concerne Christophe de Ribéra, évêque de Pampelune. CE prélat, ayant appris que la Mère Françoise était animée d’une grande dévotion pour l’Eglise souffrante, et qu’elle avait eu révélation
que trois de ses prédécesseurs sur ce siège étaient encore dans le purgatoire, s’empressa de prier pour eux, mu par un sentiment de vive compassion ; et, comme c’était le moment où l’on distribuait dans toute l’Espagne les bulles dites de la Croisade, qui contiennent pour ce royaume des privilèges spirituels, il en envoya quatorze à la servante de Dieu, en lui faisant dire d’en appliquer trois pour les évêques, et les onze autres suivant son inspiration. La nuit suivante, les trois prélats apparurent à Françoise et lui rendirent grâces ; ils la prièrent de remercier pour eux Christophe de Ribéra. D’autres âmes lui demandèrent de leur appliquer le fruit des autres bulles : ce qu’elle fut heureuse de leur accorder. Les apparitions se multiplièrent dans cette circonstance, et, par son empressement à intercéder et à mériter, la sainte rendit de nouveau gloire à Dieu.
(Vie de Françoise du Saint –Sacrement par le frère Joachim de Sainte-Marie,I. II..)
27ème Merveille
TRAITS DIVERS
Est qui multu redimat modiro pretio :On
Peut racheter beaucoup avec peu de chose.
(Eceli xx,12.)
Les âmes qui gémissent dans le feu du Purgatoire ne nous demandent pas toujours des mérites extraordinaires, des aumônes considérables, des jeunes rigoureux, de dures privations, ou d’autres pénitences austères ; souvent elles trouveraient leur soulagement dans les petites choses, de courtes prières, des pratiques faciles ; et on les leur refuse !De sorte qu ‘elles en sont tout affligées, et qu’elles pourraient bien dire avec le poète :
Quodque magis deleo : non nos mare separat ingens, Exiguà prohibemeur aqua :
Ma douleur augmente de ce que ce n’est point la mer qui nous sépare, mais un peu d’eau… »Ce qui veut dire qu’elles n’auraient plus besoin que d’un léger effort pour arriver jusqu’au Seigneur qui les attend pour les couronner, et qu’elles ressentent tristement l’indifférence qui refuse de le faire pour elles.
J’ai lu quelque part qu’un saint évêque vit en songe un enfant, lequel, avec un hameçon d’or et un fil d’argent, tirait du fond d’un puits une femme qui s’y
97 :
noyait. A son réveil, jetant les yeux par la fenêtre, il aperçut ce même enfant agenouillé, priant sur une tombe du cimetière. Il l’appela et lui dit : »Que fais-tu là mon ami ?.- Monseigneur, je dis un Pater et un Miserere pour l’âme de ma mère, dont le corps repose en ce lieu. »Le prélat comprit aussitôt que Dieu avait voulu lui montrer l’efficacité de la prière la plus simple ; il crut que l’âme de cette mère venait d’être délivrée, que l’hameçon d’or était le Pater, et le Miserere le fil d’argent de cette ligne mystique.
On rencontre deux traits du même genre, plus frappants même, dans les Chroniques des Frères Mineurs. Le P.Conrad D’Offida, religieux de l’ordre séraphique, grand serviteur de Dieu, était resté une nuit devant un autel privilégié, à faire oraison. Un frère du couvent, qui était mort peu auparavant, lui apparut et le conjura ; au nom des services qu’il lui avait rendus lui-même en lui donnant autrefois des règles et des conseils de perfection, de travailler maintenant à le délivrer des supplices auxquels il se voyait condamné. « Vous savez bien, ajouta-t-il, que le Seigneur a pour agréable vos prières , et vous ne serez pas cruel pour me les refuser. »Aussitôt, le charitable Père récita le Pater et le Requiem oeternam. La vision revint, et on entendit ces paroles : »O mon Père, si vous saviez quel grand soulagement m’a procuré cette simple invocation, votre miséricorde vous porterait à la renouveler ! »Le religieux le fit avec empressement. « Ah !s’écria de nouveau cette âme, continuez , mon Père, au nom des entrailles de Jésus-Christ, continuez : voici que mes peines de changent en consolation ! »Sans attendre de nouvelles instances, le bon religieux redit un grand
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nombre de fois cette prière. Par une miraculeuse permission du Ciel, il voyait peu à peu le visage du défunt exprimer un adoucissement, puis un commencement de jouissance, puis une joie extraordinaire ; ses vêtements se modifiaient de la même façon ; ils devinrent blancs et éclatants ; la lumière environna cette bonne âme ; et enfin, après mille actions de grâces, elle s’éleva radieuse vers l’éternel séjour.
Le bienheureux Etienne, du même ordre, avait la même dévotion, et auprès de Dieu un crédit égal. Il aimait à passer plusieurs heures de la nuit auprès de Saint-Sacrement, auquel il faisait sa cour assidue. Une nuit, se retournant, il aperçut un des religieux assis dans une des stalles du choeur, le capuchon ramené sur la tête et jusque sur les yeux. Etonné d’une telle posture, qui n’était, qui n’était pas celle de la prière, à cette heure du repos général, il s’approcha et lui demanda pourquoi il se tenait ainsi à l’église et ce qu’il y faisait. Le moine répondit d’une voix lugubre : »Je suis un religieux défunt, condamné par la divine justice à endurer ici un rigoureux purgatoire, à cause des fautes nombreuses que j’ai commises par des distractions et des tiédeurs volontaires pendant le chant de l’office. Le Seigneur m’a permis de me manifester à vous, afin de vous conjurer de faire pour moi quelque chose :puissé-je sortir de cette captivité douloureuse et entrer dans la liberté des enfants de Dieu ! »Le bienheureux Etienne, sans attendre davantage, se remet à genoux et récite à cette intention le De Profundis avec l’oraison Fidelium. Le défunt en parut singulièrement soulagé, et pendant plusieurs nuits encore il vint exciter la charité du bon Etienne, le remerciant chaque fois avec grande effusion.
99 :
Si bien qu’une nuit, à la suite du Requiem Oeternam, il quitta la stalle comme un prisonnier qui abandonne son cachot, et s’élança vers le ciel.
Le bienheureux raconta plusieurs fois ce trait pour exhorter les religieux à une parfaite modestie et au recueillement en chantant les louanges de Dieu et dans la prière ; car le Seigneur ne peut bénir ceux qui ne l’honorent que des lèvres, tandis que leur cœur est loin de lui.(Isaïe,xxix,13.)
(V. Barthlémy de Pise, liv.i ch.23 ;Chroni-
ques des Frères-Mineurs, liv.iv, ch.30.)
ADMIRABLE COMMERCE DE CHARITE ENTRE LES VIVANTS ET LES DEFUNTS
Vigilate in oratioibus, mutuam in vobis-
Metipsis charitatem habentes: Veillez dans
la prière, exerçant la charité les uns envers
les autres(1Petr. Iv, 7.)
Il ne serait pas facile de décider à qui la prière pour les morts est le plus utile, ou aux morts eux-mêmes ou à ceux qui travaillent à leur délivrance. En effet, si d’une part les âmes du Purgatoire sont puissamment soulagées par nos suffrages, de l’autre elles nous obtiennent elles-mêmes des grâces non moins précieuses. La vie de la vénérable Mère Marie-Françoise du Saint-Sacrement qui avait la plus grande dévotion à ces pauvres âmes, peut fournir d’utiles éclaircissements sur ce sujet.
Elle avait été élevée dans cette sainte pratique, et tant qu’elle vécut elle y resta fidèle ; elle était tout cœur, tout dévouement envers ces âmes souffrantes ; pour elles chaque jour elle récitait le rosaire, qu’elle avait coutume d’appeler son aumônier, et elle en terminait chaque dizaine par le Requiescant in pace. Les jours de fête, où elle était plus libre de son temps, elle y ajoutait l’office des morts. La meilleure partie de l’année, elle se condamnait pour elles au jeûne au pain
92 :
et à l’eau, sans parler des cruelles disciplines dont elle accablait son corps ; ainsi, elle ne quittait jamais son rude cilice. Le repos qu’elle était obligée de prendre, elle le troublait encore par plusieurs genres de mortifications. Toutes les fonctions dont elle s’acquittait, les travaux qu’elle faisait, les pensées de son esprit, le souffrances intérieures, les fatigues du corps, les persécutions continuelles des démons, elle consacrait tout aux âmes des défunts.
Ce n’est pas tout. Elle s’unissait avec les religieuses qu’elle fréquentait davantage, afin de former avec elles une sorte de ligne de bonnes œuvres et de prières. Quand des ecclésiastiques venaient au monastère, elle les exhortait à dire des messes de Requiem ; elle en faisait autant envers les laïques qu’elle voyait, les engageant à répandre beaucoup d’aumônes dans le même but. En un mot, pour les secourir , elles avait renoncé au mérite personnel de ses œuvres ; elle présentait chaque jour à la justice divine, pour leur soulagement, les oraisons, les pénitences , les privations qu’elle s’imposait, et les indulgences qu’elle gagnait. Le matin esprit s’efforça de lui suggérer une pensée de regret ; il lui représenta qu’en se dépouillant ainsi de tous ses mérites elle n’en aurait plus aucun quand elle paraîtrait devant Dieu, et devrait par conséquent souffrir elle-même un long purgatoire. Mais il ne réussit point ; tout retour d’intérêt propre était impossible à cette âme généreuse et ferme comme le diamant : les défunts qui lui apparaissaient l’assuraient d’ailleurs qu’ils sauraient bien compenser cette différence par leur intercession quand ils seraient délivrés, et que Dieu ne ferait point tourner contre elle son héroïque charité.
93 :
Ceci nous amène à dire encore un mot de la reconnaissance des âmes du purgatoire envers les bienfaiteurs. Un la vit dans cette sainte femme. Ces âmes la visitaient fréquemment, non-seulement pour solliciter ses suffrages, mais pour l’en remercier. Des témoins ont assuré que , plusieurs fois, elle l’attendrirent visiblement à sa porte, quand elle se rendait à l’office de matines, pour se recommander à elle ; d’autres fois, elles pénétrèrent dans la chambre, afin de lui présenter leur requête ; elles se rangeaient autour de son lit jusqu’à ce qu’elle s’éveillât. Pour elle, elle ne témoignait aucune crainte devant ces apparitions, qui auraient rempli tout autre de frayeur. »Nos peines sont adoucies, disaient les âmes, rien que par votre présence. »Elles lui disaient en entrant, afin qu’elle ne se crût point le jouet de quelque rêve ou d’une illusion du démon : »Nous vous saluons, servante de Dieu, épouse du Seigneur : que Jésus soit avec vous toujours ! »Puis elles témoignaient leur vénération pour une grande croix et pour les reliques que leur bienfaitrice conservaient dans sa cellule. Si elles la trouvaient récitant le rosaire, ajoutent les mêmes témoins, elles le lui prenaient des mains et semblaient le baiser avec respect et confiance, comme un instrument de salut et de délivrance. Elles la prévenaient des artifices se Satan , des pièges qu’il dressait contre elle et des tentations ou des illusions qu’il lui préparait, afin qu’elle se disposât à les déjouer par les sacrements et par la prière.
Dans le but de la toucher davantage, elles se montraient à elles sous des formes particulières. C’était ordinairement, accompagnées des signes ou des instruments de leurs péchés, devenus ceux de leur châtiment.
94 :
Tantôt c’étaient des évêques la mitre en tête, la crosse à la main, revêtus de la chasuble, et en même temps environnés de flammes ; ils lui disaient : « Nous souffrons tout ceci pour avoir recherché ambitieusement les dignités, et n’avoir point correspondu aux obligations qu’elles nous ont fait contracter. »D’autres fois, c’étaient des prêtres avec leurs ornements en feu, l’étole transformée en chaîne, les mains couvertes d’ulcères : ils s’accusaient d’avoir traité avec irrévérence le divin corps du Seigneur, et d’avoir administré sans respect les sacrements. UN religieux se fit voir entouré d’objets précieux, d’écrins, de fauteuils, de tableaux,,tout enflammés, parce que, manquant à son vœu de pauvreté, il avait rassemblé ces futilités dans sa cellule. Elle vit aussi un notaire de Soria avec tous les insignes de sa profession, qui, accumulés autour de lui et enflammés le tourmentaient terriblement : « J’ai employé cet encrier, cette plume, ce papier, dit-il, à des actes illégitimes, contraires à la justice et à l’équité. J’avais aussi la passion du jeu : et ces cartes tout en feu que je suis obligé de tenir dans les mains font ma punition. Cette bourse brûlante contient mes gains illicites et me les fait expier. Au moment de mourir, j’aurais infailliblement couru à ma damnation, si une sincère contrition n’avait rempli mon cœur. Du moins suis-je condamné à un long et rigoureux purgatoire, si vous ne consentez charitablement à l’abréger par vos bonnes œuvres. »Ces apparitions causaient un grand chagrin à la servante de Dieu ;mais d’un autre côté, elle éprouvait une immense consolation lorsque les âmes délivrées venaient la remercier avant de monter au ciel.
Nous ne pouvons passer sous silence le trait qui
95 :
concerne Christophe de Ribéra, évêque de Pampelune. CE prélat, ayant appris que la Mère Françoise était animée d’une grande dévotion pour l’Eglise souffrante, et qu’elle avait eu révélation
que trois de ses prédécesseurs sur ce siège étaient encore dans le purgatoire, s’empressa de prier pour eux, mu par un sentiment de vive compassion ; et, comme c’était le moment où l’on distribuait dans toute l’Espagne les bulles dites de la Croisade, qui contiennent pour ce royaume des privilèges spirituels, il en envoya quatorze à la servante de Dieu, en lui faisant dire d’en appliquer trois pour les évêques, et les onze autres suivant son inspiration. La nuit suivante, les trois prélats apparurent à Françoise et lui rendirent grâces ; ils la prièrent de remercier pour eux Christophe de Ribéra. D’autres âmes lui demandèrent de leur appliquer le fruit des autres bulles : ce qu’elle fut heureuse de leur accorder. Les apparitions se multiplièrent dans cette circonstance, et, par son empressement à intercéder et à mériter, la sainte rendit de nouveau gloire à Dieu.
(Vie de Françoise du Saint –Sacrement par le frère Joachim de Sainte-Marie,I. II..)
27ème Merveille
TRAITS DIVERS
Est qui multu redimat modiro pretio :On
Peut racheter beaucoup avec peu de chose.
(Eceli xx,12.)
Les âmes qui gémissent dans le feu du Purgatoire ne nous demandent pas toujours des mérites extraordinaires, des aumônes considérables, des jeunes rigoureux, de dures privations, ou d’autres pénitences austères ; souvent elles trouveraient leur soulagement dans les petites choses, de courtes prières, des pratiques faciles ; et on les leur refuse !De sorte qu ‘elles en sont tout affligées, et qu’elles pourraient bien dire avec le poète :
Quodque magis deleo : non nos mare separat ingens, Exiguà prohibemeur aqua :
Ma douleur augmente de ce que ce n’est point la mer qui nous sépare, mais un peu d’eau… »Ce qui veut dire qu’elles n’auraient plus besoin que d’un léger effort pour arriver jusqu’au Seigneur qui les attend pour les couronner, et qu’elles ressentent tristement l’indifférence qui refuse de le faire pour elles.
J’ai lu quelque part qu’un saint évêque vit en songe un enfant, lequel, avec un hameçon d’or et un fil d’argent, tirait du fond d’un puits une femme qui s’y
97 :
noyait. A son réveil, jetant les yeux par la fenêtre, il aperçut ce même enfant agenouillé, priant sur une tombe du cimetière. Il l’appela et lui dit : »Que fais-tu là mon ami ?.- Monseigneur, je dis un Pater et un Miserere pour l’âme de ma mère, dont le corps repose en ce lieu. »Le prélat comprit aussitôt que Dieu avait voulu lui montrer l’efficacité de la prière la plus simple ; il crut que l’âme de cette mère venait d’être délivrée, que l’hameçon d’or était le Pater, et le Miserere le fil d’argent de cette ligne mystique.
On rencontre deux traits du même genre, plus frappants même, dans les Chroniques des Frères Mineurs. Le P.Conrad D’Offida, religieux de l’ordre séraphique, grand serviteur de Dieu, était resté une nuit devant un autel privilégié, à faire oraison. Un frère du couvent, qui était mort peu auparavant, lui apparut et le conjura ; au nom des services qu’il lui avait rendus lui-même en lui donnant autrefois des règles et des conseils de perfection, de travailler maintenant à le délivrer des supplices auxquels il se voyait condamné. « Vous savez bien, ajouta-t-il, que le Seigneur a pour agréable vos prières , et vous ne serez pas cruel pour me les refuser. »Aussitôt, le charitable Père récita le Pater et le Requiem oeternam. La vision revint, et on entendit ces paroles : »O mon Père, si vous saviez quel grand soulagement m’a procuré cette simple invocation, votre miséricorde vous porterait à la renouveler ! »Le religieux le fit avec empressement. « Ah !s’écria de nouveau cette âme, continuez , mon Père, au nom des entrailles de Jésus-Christ, continuez : voici que mes peines de changent en consolation ! »Sans attendre de nouvelles instances, le bon religieux redit un grand
98 :
nombre de fois cette prière. Par une miraculeuse permission du Ciel, il voyait peu à peu le visage du défunt exprimer un adoucissement, puis un commencement de jouissance, puis une joie extraordinaire ; ses vêtements se modifiaient de la même façon ; ils devinrent blancs et éclatants ; la lumière environna cette bonne âme ; et enfin, après mille actions de grâces, elle s’éleva radieuse vers l’éternel séjour.
Le bienheureux Etienne, du même ordre, avait la même dévotion, et auprès de Dieu un crédit égal. Il aimait à passer plusieurs heures de la nuit auprès de Saint-Sacrement, auquel il faisait sa cour assidue. Une nuit, se retournant, il aperçut un des religieux assis dans une des stalles du choeur, le capuchon ramené sur la tête et jusque sur les yeux. Etonné d’une telle posture, qui n’était, qui n’était pas celle de la prière, à cette heure du repos général, il s’approcha et lui demanda pourquoi il se tenait ainsi à l’église et ce qu’il y faisait. Le moine répondit d’une voix lugubre : »Je suis un religieux défunt, condamné par la divine justice à endurer ici un rigoureux purgatoire, à cause des fautes nombreuses que j’ai commises par des distractions et des tiédeurs volontaires pendant le chant de l’office. Le Seigneur m’a permis de me manifester à vous, afin de vous conjurer de faire pour moi quelque chose :puissé-je sortir de cette captivité douloureuse et entrer dans la liberté des enfants de Dieu ! »Le bienheureux Etienne, sans attendre davantage, se remet à genoux et récite à cette intention le De Profundis avec l’oraison Fidelium. Le défunt en parut singulièrement soulagé, et pendant plusieurs nuits encore il vint exciter la charité du bon Etienne, le remerciant chaque fois avec grande effusion.
99 :
Si bien qu’une nuit, à la suite du Requiem Oeternam, il quitta la stalle comme un prisonnier qui abandonne son cachot, et s’élança vers le ciel.
Le bienheureux raconta plusieurs fois ce trait pour exhorter les religieux à une parfaite modestie et au recueillement en chantant les louanges de Dieu et dans la prière ; car le Seigneur ne peut bénir ceux qui ne l’honorent que des lèvres, tandis que leur cœur est loin de lui.(Isaïe,xxix,13.)
(V. Barthlémy de Pise, liv.i ch.23 ;Chroni-
ques des Frères-Mineurs, liv.iv, ch.30.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
28e MERVEILLE
TRAITS MERVEILLEUX SUR LA MORT T SUR LE PURGATOIRE
Ficbat omni anime timor ; multu quoque
Prodigia et sigua fiebunt : Tous les esprits
étaient frappés de crainte ;; il se faisait aussi
beaucoup de prodiges et de merveilles(Act. ii,43)
Le P. Ferdinand de Castille rapporte deux étonnants prodiges opérées par le Seigneur, dans le couvent de Saint-Dominique, à Zamorra, ville du royaume de Léon en Espagne ; l’un pour nous rappeler que nous ignorons le moment de notre mort ; l’autre pou nous faire comprendre la rigueur des souffrances du purgatoire.
Il arriva plusieurs fois que la cloche du chapitre sonna d’elle-même, sans être touchée, et l’expérience
100 :
fit connaître que c’était l’avertissement de la mort prochaine de quelqu’un des religieux. Ainsi, quand on entendait ce son retentir tout-à-coup, bien qu personne ne fût malade dans le couvent, chacun se disposait au redoutable passage par la réception des sacrements, par des prières et des pénitences. Le battement de cœur général ne cessait que lorsqu’un des religieux était frappé et quittait la terre. Cette cloche était pour eux cette voix dont, il est parlé dans Isaïe,38,1 : Mets ordre à la maison ,car tu vas mourir et ta vie est à son terme.
Le second trait vient plus directement à notre objet. Il y avait, dans ce même couvent de Saint-Dominique, un religieux de grande vertu uni d’étroite amitié avec un moine de Saint-François non moins saint. Leurs goûts de piété et leur commune aspiration à la perfection les portaient à discourir souvent des choses spirituelles. UN jour, s’entretenant de la mort à l’occasion de la cloche merveilleuse, ils s’engagèrent mutuellement à se visiter quand ils seraient morts, c’est-à-dire que le premier apparaîtrait au survivant, s’il plaisait à Dieu, pour l’instruire de sa position et de son sort dans l’autre monde, afin que, s’il gémissait dans le purgatoire, il pût être soulagé par les prières de son ami. Ce fut le frère Mineur qui fut appelé le premier dans l’éternité. Fidèle à son engagement, il apparut au Dominicain, à l’heure où l’obéissance l’avait conduit à préparer le réfectoire pour le repas de la communauté. Après l’avoir salué affectueusement, il lui apprit que la divine miséricorde l’avait sauvé, mais qu’il lui restait beaucoup à souffrir pour l’expiation d’une infinité de choses légères dont il n’avait pas eu un assez vif repentir. Puis, afin de l’exciter
101 :
davantage à travailler par ses bonnes œuvres à sa délivrance, il lui laissa entrevoir les flammes cruelles dont il était dévoré. « Rien sur la terre, lui dit-il, ne peut vous donner une idée de ces tortures ? En voulez-vous une preuve sensible ? »Il étendit la main droite sur la table du réfectoire, et la marque s’y enfonça aussitôt profondément, comme si on y avait passé un fer rouge. Je laisse à penser l’émotion du bon religieux, et avec quelle ardeur il s’occupa se son défunt ami. On conservera la table comme un monument du miracle, et elle se voit encore à Zamorra au moment où j’écris (1); pour la préserver, on l’a recouverte d’une feuille de cuivre.
Ces deux merveilles contribuèrent puissamment à développer chez les religieux de Saint-Dominique le pansée fréquente et fructueuse de la mort, et la crainte des châtiments de l’autre vie. Un poète espagnol écrivit à ce sujet les vers suivants :
Horride fumantem monstrant vestigia dextram,
Inque suis venis flamma cremat.
Vindicis ardorem, quem nulla referre
Lingua patest, poterit sat manus ista toqui.
Ce qui signifie : »Ces terribles marques accusent une main consumée par le feu, et la flamme qui s’y cache est dévorante. Aucune langue n’en peut rendre l’ardeur vengeresse, mais la main elle-même a parlé mieux qu’aucune langue du monde ! »
(V.Ferdinand de Castille, Histoire de Saint Domi
nique, 2e part, I. i, ch 23.)
(1) Vers le milieu du siècle dernier.
29ème Merveilles
LES INDULGENCES
In praesculi tempore, uestra abundantia
Illorum inupiam suppleat : Qu’en ce moment
voite abondance supplée à tout ce qui leur manque(II Cor.8,14)
Pour faire comprendre le prix des indulgences en faveur des âmes du Purgatoire, nous mettrons ici le trait admirable du bienheureux Berthold, prédicateur de l’ordre de Saint-François. Il venait de faire un sermon très émouvant sur l’aumône, et il avait accordé à ses auditeurs dix jours d’indulgences, selon le pouvoir qu’il en avait reçu de Souverain-Pontife, lorsqu’une dame de condition, qui n’avait conservé de son ancien rang que la crainte d’avouer sa misère présente, vint la lui exposer secrètement. Le bon père lui fit la même réponse qu’autrefois saint Pierre au boiteux de Jérusalem : »Je n’au in argent ni or ; mais ce que j’ai , je vous le donne. Je vous renouvelle l’assurance que vous avez gagné dix jours d’indulgences en assistant ma prédication ce matin, car le Saint-Père m’a honoré de ce privilège pour le bien des âmes que je suis appelé à évangéliser. Allez donc chez tel banquier, lequel n’a guère en souci jusqu’à présent des trésors spirituels, et offrez-lui, en retour de l’aumône qu’il vous fera, de lui céder votre mérite, afin que les peines qui l’attendent
103
dans le Purgatoire en soient diminuées j'ai tout lieu de croire qu'il vous
donnera quelques secours." La pauvre femme s'y rendit en toute simplicité et
avec beaucoup de foi Dieu permit que cet homme l'accueillit avec bonté il
lui demanda combien elle prétendait recevoir en échange de ses dix jours
d'indulgence -"Autant répondit-elle, qu'ils pèsent dans la balance !" Elle
se sentait animée par une force intérieure -"Eh bien, reprit le banquier,
voici des balances : écrivez sur un papier vos dix jours et le mettez dans
l'un des plateaux ; je pose sur l'autre un réal (petite monnaie espagnole valant environ 27 centimes de franc en 1866.) ." O prodige le premier
plateau ne s'élève pas mais au contraire entraine celui de l'argent étonné
l'homme ajoute un réal qui ne change rien à ce poids il en met cinq dix
trente enfin autant qu'il en fallait à la suppliante dans sa nécessité
actuelle alors seulement les deux plateaux s'équilibrent ce fut la valeur
des intérêts célestes mais les pauvres âmes la comprennent bien mieux encore
pour la plus légère indulgence elles donneraient tout l'or du monde c'est
pourquoi elles les appellent de tous leurs soupirs nous conjurant de les
leur procurer par charité nous à qui la bonté divine les prodigue la
bienheureuse Marie de Quito fut ravie en extase et elle vit au milieu d'une
grande place une table chargée de monceaux d'argent d'or de rubis de perles
de diamants en même temps elle entendit une voix qui disait :"Ces richesses
sont publiques ; chacun peut s'approcher et recueillir autant qu'il lui
convient." Dieu lui fit
104
connaître que c'était une image des indulgences combien donc ne sommes-nous
pas coupables dans une abondance pareille de rester pauvres et dénués pour
nous-mêmes et de ne point songer à ceux qui dans le purgatoire pourraient
être enrichis par nous qui nous supplient avec larmes au milieu de leurs
tourments ce trésor exige t-il des efforts pénibles des
jeûnes des voyages des privations insupportables à la nature ? Quand même
cela serait il faudrait nous y résoudre comme le disait éloquemment
l'illustre P.Ségneri qui oppose à notre insensibilité le zèle d'un amateur
des arts s'exposant au milieu d'un incendie pour sauver une toile mais la
bonté infinie de Dieu n'en demande pas tant elle attend de nous des oeuvres
simples une communion la visite d'un sanctuaire voisin de notre habitation
une petite aumône un mot de cathéchisme dit à des enfants abandonnés etc et
nous négligeons l'acquisition aisée d'un tel trésor et nous n'avons point
d'ardeur pour l'appliquer à tous ces malheureux qui gémissent dans les
flammes un second exemple Sainte Madeleine de Pazzi avait dans son monastère
de Florence une religieuse d'éminente vertu elle l'assista avec la plus
grande charité pendant sa dernière maladie et lui ferma elle-même les yeux
quand le corps eut été porté à l'église pour les funérailles la sainte se
retira dans la salle du chapitre d'ou elle voyait la bière et priant pour sa
chère défunte elle fut à ce moment favorisée d'une vision elle aperçut l'âme
de la religieuse plus belle que le soleil s'élever au Ciel enivrée de
bonheur -" Adieu, ma soeur, s'écria Madeleine ; adieu âme bienheureuse, vous
TRAITS MERVEILLEUX SUR LA MORT T SUR LE PURGATOIRE
Ficbat omni anime timor ; multu quoque
Prodigia et sigua fiebunt : Tous les esprits
étaient frappés de crainte ;; il se faisait aussi
beaucoup de prodiges et de merveilles(Act. ii,43)
Le P. Ferdinand de Castille rapporte deux étonnants prodiges opérées par le Seigneur, dans le couvent de Saint-Dominique, à Zamorra, ville du royaume de Léon en Espagne ; l’un pour nous rappeler que nous ignorons le moment de notre mort ; l’autre pou nous faire comprendre la rigueur des souffrances du purgatoire.
Il arriva plusieurs fois que la cloche du chapitre sonna d’elle-même, sans être touchée, et l’expérience
100 :
fit connaître que c’était l’avertissement de la mort prochaine de quelqu’un des religieux. Ainsi, quand on entendait ce son retentir tout-à-coup, bien qu personne ne fût malade dans le couvent, chacun se disposait au redoutable passage par la réception des sacrements, par des prières et des pénitences. Le battement de cœur général ne cessait que lorsqu’un des religieux était frappé et quittait la terre. Cette cloche était pour eux cette voix dont, il est parlé dans Isaïe,38,1 : Mets ordre à la maison ,car tu vas mourir et ta vie est à son terme.
Le second trait vient plus directement à notre objet. Il y avait, dans ce même couvent de Saint-Dominique, un religieux de grande vertu uni d’étroite amitié avec un moine de Saint-François non moins saint. Leurs goûts de piété et leur commune aspiration à la perfection les portaient à discourir souvent des choses spirituelles. UN jour, s’entretenant de la mort à l’occasion de la cloche merveilleuse, ils s’engagèrent mutuellement à se visiter quand ils seraient morts, c’est-à-dire que le premier apparaîtrait au survivant, s’il plaisait à Dieu, pour l’instruire de sa position et de son sort dans l’autre monde, afin que, s’il gémissait dans le purgatoire, il pût être soulagé par les prières de son ami. Ce fut le frère Mineur qui fut appelé le premier dans l’éternité. Fidèle à son engagement, il apparut au Dominicain, à l’heure où l’obéissance l’avait conduit à préparer le réfectoire pour le repas de la communauté. Après l’avoir salué affectueusement, il lui apprit que la divine miséricorde l’avait sauvé, mais qu’il lui restait beaucoup à souffrir pour l’expiation d’une infinité de choses légères dont il n’avait pas eu un assez vif repentir. Puis, afin de l’exciter
101 :
davantage à travailler par ses bonnes œuvres à sa délivrance, il lui laissa entrevoir les flammes cruelles dont il était dévoré. « Rien sur la terre, lui dit-il, ne peut vous donner une idée de ces tortures ? En voulez-vous une preuve sensible ? »Il étendit la main droite sur la table du réfectoire, et la marque s’y enfonça aussitôt profondément, comme si on y avait passé un fer rouge. Je laisse à penser l’émotion du bon religieux, et avec quelle ardeur il s’occupa se son défunt ami. On conservera la table comme un monument du miracle, et elle se voit encore à Zamorra au moment où j’écris (1); pour la préserver, on l’a recouverte d’une feuille de cuivre.
Ces deux merveilles contribuèrent puissamment à développer chez les religieux de Saint-Dominique le pansée fréquente et fructueuse de la mort, et la crainte des châtiments de l’autre vie. Un poète espagnol écrivit à ce sujet les vers suivants :
Horride fumantem monstrant vestigia dextram,
Inque suis venis flamma cremat.
Vindicis ardorem, quem nulla referre
Lingua patest, poterit sat manus ista toqui.
Ce qui signifie : »Ces terribles marques accusent une main consumée par le feu, et la flamme qui s’y cache est dévorante. Aucune langue n’en peut rendre l’ardeur vengeresse, mais la main elle-même a parlé mieux qu’aucune langue du monde ! »
(V.Ferdinand de Castille, Histoire de Saint Domi
nique, 2e part, I. i, ch 23.)
(1) Vers le milieu du siècle dernier.
29ème Merveilles
LES INDULGENCES
In praesculi tempore, uestra abundantia
Illorum inupiam suppleat : Qu’en ce moment
voite abondance supplée à tout ce qui leur manque(II Cor.8,14)
Pour faire comprendre le prix des indulgences en faveur des âmes du Purgatoire, nous mettrons ici le trait admirable du bienheureux Berthold, prédicateur de l’ordre de Saint-François. Il venait de faire un sermon très émouvant sur l’aumône, et il avait accordé à ses auditeurs dix jours d’indulgences, selon le pouvoir qu’il en avait reçu de Souverain-Pontife, lorsqu’une dame de condition, qui n’avait conservé de son ancien rang que la crainte d’avouer sa misère présente, vint la lui exposer secrètement. Le bon père lui fit la même réponse qu’autrefois saint Pierre au boiteux de Jérusalem : »Je n’au in argent ni or ; mais ce que j’ai , je vous le donne. Je vous renouvelle l’assurance que vous avez gagné dix jours d’indulgences en assistant ma prédication ce matin, car le Saint-Père m’a honoré de ce privilège pour le bien des âmes que je suis appelé à évangéliser. Allez donc chez tel banquier, lequel n’a guère en souci jusqu’à présent des trésors spirituels, et offrez-lui, en retour de l’aumône qu’il vous fera, de lui céder votre mérite, afin que les peines qui l’attendent
103
dans le Purgatoire en soient diminuées j'ai tout lieu de croire qu'il vous
donnera quelques secours." La pauvre femme s'y rendit en toute simplicité et
avec beaucoup de foi Dieu permit que cet homme l'accueillit avec bonté il
lui demanda combien elle prétendait recevoir en échange de ses dix jours
d'indulgence -"Autant répondit-elle, qu'ils pèsent dans la balance !" Elle
se sentait animée par une force intérieure -"Eh bien, reprit le banquier,
voici des balances : écrivez sur un papier vos dix jours et le mettez dans
l'un des plateaux ; je pose sur l'autre un réal (petite monnaie espagnole valant environ 27 centimes de franc en 1866.) ." O prodige le premier
plateau ne s'élève pas mais au contraire entraine celui de l'argent étonné
l'homme ajoute un réal qui ne change rien à ce poids il en met cinq dix
trente enfin autant qu'il en fallait à la suppliante dans sa nécessité
actuelle alors seulement les deux plateaux s'équilibrent ce fut la valeur
des intérêts célestes mais les pauvres âmes la comprennent bien mieux encore
pour la plus légère indulgence elles donneraient tout l'or du monde c'est
pourquoi elles les appellent de tous leurs soupirs nous conjurant de les
leur procurer par charité nous à qui la bonté divine les prodigue la
bienheureuse Marie de Quito fut ravie en extase et elle vit au milieu d'une
grande place une table chargée de monceaux d'argent d'or de rubis de perles
de diamants en même temps elle entendit une voix qui disait :"Ces richesses
sont publiques ; chacun peut s'approcher et recueillir autant qu'il lui
convient." Dieu lui fit
104
connaître que c'était une image des indulgences combien donc ne sommes-nous
pas coupables dans une abondance pareille de rester pauvres et dénués pour
nous-mêmes et de ne point songer à ceux qui dans le purgatoire pourraient
être enrichis par nous qui nous supplient avec larmes au milieu de leurs
tourments ce trésor exige t-il des efforts pénibles des
jeûnes des voyages des privations insupportables à la nature ? Quand même
cela serait il faudrait nous y résoudre comme le disait éloquemment
l'illustre P.Ségneri qui oppose à notre insensibilité le zèle d'un amateur
des arts s'exposant au milieu d'un incendie pour sauver une toile mais la
bonté infinie de Dieu n'en demande pas tant elle attend de nous des oeuvres
simples une communion la visite d'un sanctuaire voisin de notre habitation
une petite aumône un mot de cathéchisme dit à des enfants abandonnés etc et
nous négligeons l'acquisition aisée d'un tel trésor et nous n'avons point
d'ardeur pour l'appliquer à tous ces malheureux qui gémissent dans les
flammes un second exemple Sainte Madeleine de Pazzi avait dans son monastère
de Florence une religieuse d'éminente vertu elle l'assista avec la plus
grande charité pendant sa dernière maladie et lui ferma elle-même les yeux
quand le corps eut été porté à l'église pour les funérailles la sainte se
retira dans la salle du chapitre d'ou elle voyait la bière et priant pour sa
chère défunte elle fut à ce moment favorisée d'une vision elle aperçut l'âme
de la religieuse plus belle que le soleil s'élever au Ciel enivrée de
bonheur -" Adieu, ma soeur, s'écria Madeleine ; adieu âme bienheureuse, vous
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
105
vous en allez donc en paradis m'abandonnant dans cette vallée de larmes Oh
que grande est votre gloire qui pourrait exprimer l'éclat de ce triomphe et
comme l'épreuve du purgatoire a pour vous été courte vos restes mortels ne
sont point encore dans leur dernière demeure et déjà vous entrez dans
l'éternelle patrie vous voyez maintenant la vérité de ce que je vous disais
que les misères de cette vie et l'expiation passagère du purgatoire ne sont
rien comparées à ce que l'époux vous réservait auprès de lui !" il lui fut
révélé par Notre Seigneur que cette âme n'était restée que quinze heures
dans le purgatoire en vertu des indulgences dont on lui avait appliqué les
mérites pendant toute la cérémonie de l'enterrement Madeleine ne put
distraire sa pensée d'un si beau et si consolant spectacle.
(V.Chroniques des frères Mineurs, 2e part, liv,
II, ch. 30; Vie de sainte Madeleine de Pazzi,
1er part, h.39 )
105
XXXe MERVEILLE.
La protection des saints utile.Après la mort, a qui l'a invoquée ici-bas.
Adaliquem sanctorum couveriere ; vora si
est qui tibi respondent
Tournez-vous vers quelqu'un des saints ;
appelez pour qu'on
vous réponde. (Job. v.)
La dévotion envers les saints qu'elle a eu la fidelité d'invoquer souvent
pendant la vie est une source d'avantages
106
précieux pour l'âme soumise au feu du purgatoire nous avons sur ce point une
miraculeuse vision de la bienheureuse Jeanne de la Croix religieuse de
Saint- François et fidèle épouse de Jésus-Christ un prélat éminent après
avoir eu pour elle pendant quelque temps de l'affection et du respect
changea entièrement de sentiments et ne la vit plus qu'avec peine et
répugnance à la suite d'une admonition charitable que la servante de Dieu
avait été inspirée de lui faire cet ecclésiastique oubliant parfois les
devoirs de sa profession tombait dans certains défauts de langue dans une
démarche trop fière et dans l'oubli des âmes qui lui étaient confiées il
mourut bientôt a peine la vertueuse fille l'eut-elle appris que voulant
rendre le bien pour le mal elle s'employa à procurer à cette âme tous les
suffrages en son pouvoir une nuit qu'elle se livrait plus spécialement à la
prière dans cette intention le défunt lui apparut avec un visage tout abattu
et lamentable il avait à la bouche des chaines ses vêtements n'étaient que
de misérables haillons il était humilié au-delà de toute expression et comme
il ne pouvait parler les soupirs qu'il laissait échapper manifestaient ses
tourments on voyait sur son front et sur sa tête certaines taches indices
des péchés qu'il avait commis derrière lui suivaient quelques âmes qu'il
avait portées au péché par ses exemples de relâchement les démons
l'environnaient aussi et le tourmentaient de mille façons à la fois
douloureuses et humiliantes la bienheureuse Jeanne en fut toute consternée
et avec d'autant plus de raison qu'elle ignorait si c'était les peines de
l'enfer ou celles du purgatoire elle s'adressa à son ange gardien dont la
présence lui
107
était sensible mais il lui répondit :" Dieu vous le fera savoir en temps
utile." Elle persévéra donc à prier et à conjurer la clémence divine d'avoir
pitié de cette âme infortunée pour laquelle elle espérait encore elle aimait
à se rappeler les bonnes oeuvres qu'elle avait accomplies durant sa vie et
surtout la tendre dévotion qu'elle avait eue envers un saint dont
l'historien ne nous a pas conservé le nom. "Seigneur disait Jeanne vous
savez avec quel empressement et quelle confiance ce prélat servait le saint
patron qu'il s'était choisi quels devoirs il lui rendait avec quelle
tendresse il implorait ses suffrages il avait fait dessiner son image et la
tenait toujours près de lui afin de n'en point perdre le souvenir ayez égard
je vous en conjure à ces bonnes pratiques de sa foi et le délivrez des
supplices ou vous me l'avez fait voir." Pendant plusieurs jours elle redit
cette prière tout -à-coup la porte de sa cellule s'ouvre l'image du saint se
présente et derrière elle l'âme du prélat mais non plus dans le même état de
désolation et de souffrance après avoir salué Jeanne elle lui dit : " Je
suis celui pour lequel vous avez tant prié grâce à votre intercession et à
celle de mon bienheureux patron dont vous voyez ici l'image le Dieu de toute
bonté a usé envers moi de miséricorde cette image a été mon bouclier contre
les assauts du démon le Seigneur allége mes tourments mon épreuve touche à
sa fin et j'espère que vous travaillerez encore à l'abréger ô ma soeur
vous que j'ai autrefois méconnue - qu'il en soit ainsi
s'écria Jeanne et que bénit soit Dieu pour la consolation que j'éprouve à
vous savoir préservé de l'enfer j'avais redouté ce sort affreux quand vous
m'êtes apparu pour la
108
première fois." Le défunt lui demanda de nouveau pardon pour les chagrins
qu'il lui avait causés el la remercia de ses saintes prières Jeanne continua
d'intercéder en sa faveur jusqu'au moment ou elle connut par révélation sa
délivrance c'est elle qui fit tout ce récit à ses religieuses afin
d'augmenter en elles tout à la fois la crainte des jugements de Dieu la
dévotion aux saints et le zèle pour les âmes du Purgatoire.
(V. Chroniques des Frères Mineurs par Cimarello,
4e P.liv. II, chap. 18 ; Triomphe des âmes, par Ségala, 2e p., ch.VII, II. 4.)
108
31e Merveille Reconnaissance des âmes pour leurs bienfaiteurs.
Bené egistis, et reddidistis vicem beneretis ejus :
Vous avez bien agi en rendant le bien pour le bien. (Juges, IX, 16.)
Si le sentiment de la gratitude se rencontre quelque part c'est certainement
dans les âmes délivrées du Purgatoire je vais en donner une preuve nouvelle
sur la foi de graves auteurs en Bretagne un homme occupé de toutes les
affaires du siècle menait cependant une vie fort religieuse parmi ses autres
vertus on remarquait une grande charité envers les pauvres défunts pour
lesquels il offrait nombre de prières d'aumônes de pénitences et autres
oeuvres méritoires il ne passait jamais dans
110
ne saurions lui en témoigner assez pour tout le bien que sa piété généreuse
nous a fait à nous surtout qui attendons dans ce cimetière la résurrection
suprême ." Aussitôt un fracas extraordinaire eut lieu tout autour du vicaire
épouvanté il lui sembla que les ossements sortaient des tombeaux se
réunissaient et que le reste du passage d'Ezéchiel s'accomplissait :Factus
est sonitus et commotio et accesserunt ossa unumquodque ad juncturam suam en
même temps l'église paraissait illiminée les morts se rangèrent dans le
choeur et commencèrent à chanter solennellement quand il fut fini la même
voix qui avait donné l'ordre au commencement se fit de nouveau entendre et
prescrivit aux corps de retourner dans leur demeure funèbre ce qui s'exécuta
pendant que les lumières de l'autel s'éteignaient d'un seul coup le prêtre
qui était demeuré comme cloué à sa place osant à peine respirer put alors
rentrer librement dans le lieu saint et y déposer le ciboire puis il courut
raconter sa vision au curé aussi émerveillé que lui mais doutant de la
réalité au moment ou il disait :"Au moins faudrait-il savoir si réellement
le malade est mort ce qui est peu vraisemblable," on frappe à la porte et un
messager vient apporter la nouvelle du décès qui avait eu lieu à l'heure
même de la vision l'impression du vicaire fut si forte qu'il dit adieu au
monde renonça à toute espérance terrestre et alla s'enfermer dans le
monastère de Saint - Martin à Tours dont il fut plus tard élu prieur il est
superflu sans doute d'ajouter que tout le reste de sa vie fut employée à
prier pour les âmes du purgatoire et à demander à
111
Dieu leur délivrance assuré qu'à leur tour elles ne l'abandonneraient point
au jour du jugement.
(V. Alexis Segala, Trimph, animarum, 2e p., ch. XXII, n. 1 ; P.
Martin, de Roa, De statu animarum, ch. XXI.)
vous en allez donc en paradis m'abandonnant dans cette vallée de larmes Oh
que grande est votre gloire qui pourrait exprimer l'éclat de ce triomphe et
comme l'épreuve du purgatoire a pour vous été courte vos restes mortels ne
sont point encore dans leur dernière demeure et déjà vous entrez dans
l'éternelle patrie vous voyez maintenant la vérité de ce que je vous disais
que les misères de cette vie et l'expiation passagère du purgatoire ne sont
rien comparées à ce que l'époux vous réservait auprès de lui !" il lui fut
révélé par Notre Seigneur que cette âme n'était restée que quinze heures
dans le purgatoire en vertu des indulgences dont on lui avait appliqué les
mérites pendant toute la cérémonie de l'enterrement Madeleine ne put
distraire sa pensée d'un si beau et si consolant spectacle.
(V.Chroniques des frères Mineurs, 2e part, liv,
II, ch. 30; Vie de sainte Madeleine de Pazzi,
1er part, h.39 )
105
XXXe MERVEILLE.
La protection des saints utile.Après la mort, a qui l'a invoquée ici-bas.
Adaliquem sanctorum couveriere ; vora si
est qui tibi respondent
Tournez-vous vers quelqu'un des saints ;
appelez pour qu'on
vous réponde. (Job. v.)
La dévotion envers les saints qu'elle a eu la fidelité d'invoquer souvent
pendant la vie est une source d'avantages
106
précieux pour l'âme soumise au feu du purgatoire nous avons sur ce point une
miraculeuse vision de la bienheureuse Jeanne de la Croix religieuse de
Saint- François et fidèle épouse de Jésus-Christ un prélat éminent après
avoir eu pour elle pendant quelque temps de l'affection et du respect
changea entièrement de sentiments et ne la vit plus qu'avec peine et
répugnance à la suite d'une admonition charitable que la servante de Dieu
avait été inspirée de lui faire cet ecclésiastique oubliant parfois les
devoirs de sa profession tombait dans certains défauts de langue dans une
démarche trop fière et dans l'oubli des âmes qui lui étaient confiées il
mourut bientôt a peine la vertueuse fille l'eut-elle appris que voulant
rendre le bien pour le mal elle s'employa à procurer à cette âme tous les
suffrages en son pouvoir une nuit qu'elle se livrait plus spécialement à la
prière dans cette intention le défunt lui apparut avec un visage tout abattu
et lamentable il avait à la bouche des chaines ses vêtements n'étaient que
de misérables haillons il était humilié au-delà de toute expression et comme
il ne pouvait parler les soupirs qu'il laissait échapper manifestaient ses
tourments on voyait sur son front et sur sa tête certaines taches indices
des péchés qu'il avait commis derrière lui suivaient quelques âmes qu'il
avait portées au péché par ses exemples de relâchement les démons
l'environnaient aussi et le tourmentaient de mille façons à la fois
douloureuses et humiliantes la bienheureuse Jeanne en fut toute consternée
et avec d'autant plus de raison qu'elle ignorait si c'était les peines de
l'enfer ou celles du purgatoire elle s'adressa à son ange gardien dont la
présence lui
107
était sensible mais il lui répondit :" Dieu vous le fera savoir en temps
utile." Elle persévéra donc à prier et à conjurer la clémence divine d'avoir
pitié de cette âme infortunée pour laquelle elle espérait encore elle aimait
à se rappeler les bonnes oeuvres qu'elle avait accomplies durant sa vie et
surtout la tendre dévotion qu'elle avait eue envers un saint dont
l'historien ne nous a pas conservé le nom. "Seigneur disait Jeanne vous
savez avec quel empressement et quelle confiance ce prélat servait le saint
patron qu'il s'était choisi quels devoirs il lui rendait avec quelle
tendresse il implorait ses suffrages il avait fait dessiner son image et la
tenait toujours près de lui afin de n'en point perdre le souvenir ayez égard
je vous en conjure à ces bonnes pratiques de sa foi et le délivrez des
supplices ou vous me l'avez fait voir." Pendant plusieurs jours elle redit
cette prière tout -à-coup la porte de sa cellule s'ouvre l'image du saint se
présente et derrière elle l'âme du prélat mais non plus dans le même état de
désolation et de souffrance après avoir salué Jeanne elle lui dit : " Je
suis celui pour lequel vous avez tant prié grâce à votre intercession et à
celle de mon bienheureux patron dont vous voyez ici l'image le Dieu de toute
bonté a usé envers moi de miséricorde cette image a été mon bouclier contre
les assauts du démon le Seigneur allége mes tourments mon épreuve touche à
sa fin et j'espère que vous travaillerez encore à l'abréger ô ma soeur
vous que j'ai autrefois méconnue - qu'il en soit ainsi
s'écria Jeanne et que bénit soit Dieu pour la consolation que j'éprouve à
vous savoir préservé de l'enfer j'avais redouté ce sort affreux quand vous
m'êtes apparu pour la
108
première fois." Le défunt lui demanda de nouveau pardon pour les chagrins
qu'il lui avait causés el la remercia de ses saintes prières Jeanne continua
d'intercéder en sa faveur jusqu'au moment ou elle connut par révélation sa
délivrance c'est elle qui fit tout ce récit à ses religieuses afin
d'augmenter en elles tout à la fois la crainte des jugements de Dieu la
dévotion aux saints et le zèle pour les âmes du Purgatoire.
(V. Chroniques des Frères Mineurs par Cimarello,
4e P.liv. II, chap. 18 ; Triomphe des âmes, par Ségala, 2e p., ch.VII, II. 4.)
108
31e Merveille Reconnaissance des âmes pour leurs bienfaiteurs.
Bené egistis, et reddidistis vicem beneretis ejus :
Vous avez bien agi en rendant le bien pour le bien. (Juges, IX, 16.)
Si le sentiment de la gratitude se rencontre quelque part c'est certainement
dans les âmes délivrées du Purgatoire je vais en donner une preuve nouvelle
sur la foi de graves auteurs en Bretagne un homme occupé de toutes les
affaires du siècle menait cependant une vie fort religieuse parmi ses autres
vertus on remarquait une grande charité envers les pauvres défunts pour
lesquels il offrait nombre de prières d'aumônes de pénitences et autres
oeuvres méritoires il ne passait jamais dans
110
ne saurions lui en témoigner assez pour tout le bien que sa piété généreuse
nous a fait à nous surtout qui attendons dans ce cimetière la résurrection
suprême ." Aussitôt un fracas extraordinaire eut lieu tout autour du vicaire
épouvanté il lui sembla que les ossements sortaient des tombeaux se
réunissaient et que le reste du passage d'Ezéchiel s'accomplissait :Factus
est sonitus et commotio et accesserunt ossa unumquodque ad juncturam suam en
même temps l'église paraissait illiminée les morts se rangèrent dans le
choeur et commencèrent à chanter solennellement quand il fut fini la même
voix qui avait donné l'ordre au commencement se fit de nouveau entendre et
prescrivit aux corps de retourner dans leur demeure funèbre ce qui s'exécuta
pendant que les lumières de l'autel s'éteignaient d'un seul coup le prêtre
qui était demeuré comme cloué à sa place osant à peine respirer put alors
rentrer librement dans le lieu saint et y déposer le ciboire puis il courut
raconter sa vision au curé aussi émerveillé que lui mais doutant de la
réalité au moment ou il disait :"Au moins faudrait-il savoir si réellement
le malade est mort ce qui est peu vraisemblable," on frappe à la porte et un
messager vient apporter la nouvelle du décès qui avait eu lieu à l'heure
même de la vision l'impression du vicaire fut si forte qu'il dit adieu au
monde renonça à toute espérance terrestre et alla s'enfermer dans le
monastère de Saint - Martin à Tours dont il fut plus tard élu prieur il est
superflu sans doute d'ajouter que tout le reste de sa vie fut employée à
prier pour les âmes du purgatoire et à demander à
111
Dieu leur délivrance assuré qu'à leur tour elles ne l'abandonneraient point
au jour du jugement.
(V. Alexis Segala, Trimph, animarum, 2e p., ch. XXII, n. 1 ; P.
Martin, de Roa, De statu animarum, ch. XXI.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
111
32ème Merveille
celui qui souffre pieusement ici-bas va tout droit au repos éternel.
Esque in tempus sustinchit patiens, et posted redditio juennditatis :
L'homme patient attendra la fin de ses maux jusqu'au temps destiné de Dieu pour les faire cesser, et après cela la joie lui sera rendue. (Eccli. I , 29.)
L'empereur Maurice était bien inspiré lorsque interrogé miraculeusement par
le Sauveur s'il préférait expier ses fautes ici-bas ou dans le purgatoire il
répondit avec empressement : " Ici-bas, Seigneur ! j'aime mieux souffrir
ici-bas !" Un autre personnage n'eut pas la même sagesse c'était un
religieux de Saint- François un ange se manifesta à ses yeux et lui dit de
choisir entre une longue maladie et un purgatoire très-court il se détermina
pour celui-ci parce que déjà depuis longtemps il était malade en proie à une
extrême tristesse et à charge lui paraissait-il à ses frères il jugeait donc
meilleur d'abandonner la terre et la prison de son corps. " O mon Dieu
disait-il par pitié appelez-moi hors de ce monde secourez votre malheureux
112
serviteur je ne trouve de repos ni le jour ni la nuit tant sont cruelles les
douleurs qui me tourmentent elles augmentent sans cesse je n'ai plus la
force de les supporter si mes fautes me rendent indigne d'être délivré ayez
égard Seigneur aux mérites de mes frères qui se sacrifient autour de mon lit
d'agonie ayez pitié d'eux et de moi et s'il n'y a point d'autre voie vienne
plutôt la mort je l'accueillerai comme envoyée par votre clémence c'est
alors que l'ange descendit du ciel pour le fortifier et lui proposer
l'alternative :" Puisque vous vous fatiguez de souffrir dans cette vie vos
prière ont été entendues Dieu vous permet de décider vous-même votre départ
immédiat de ce monde ou le prolongement de vos douleurs terrestres si vous
adoptez ce dernier parti vous avez encore une année de maladie après
laquelle vous monterez au ciel directement mais si vous préférez mourir vous
aurez à subir trois jours de purgatoire pour achever de vous purifier de vos
fautes choisissez librement." Le pauvre religieux tout à sa souffrance
présente qui lui paraissait insupportable et ne songeant point à ce qui
l'attendait dans le lieu de l'expiation répondit :" J'aime mieux mourir au
risque d'être tourmenté dans le purgatoire non pas seulement trois jours
mais autant qu'il plaira à Dieu car ma vie présente est une mort de chaque
minute et je ne pense pas que je puisse trouver rien de comparable. - Eh
bien répondit l'ange il sera fait comme vous le souhaitez. Vous allez
mourir aujourd'hui. Munissez-vous donc des sacrements au plus tôt." Le
malade raconta sa vision et réclama les secours de la sainte Eglise puis il
expira et son âme fut portée au purgatoire.
113
Au bout d'un temps qu'on peut comparer à la durée d'un jour si toutefois
cette expression de temps et de jour convient à l'éternité le même ange vint
le visiter et lui demanda que lui semblait de l'épreuve à laquelle il était
soumis si elle lui paraissait moins pénible que ses souffrances de la terre
"Oh ! combien j'ai été aveugle ! répondit l'âme; mais combien aussi vous
avez été cruel, vous qui m'aviez parlé de trois jours et qui me laissez ici
des siècles !Qu'elles sont longues les années dont je vois se dérouler pour
moi l'interminable série ! et encore rien ne m'annonce une délivrance
prochaine ! - Eh quoi ! repartit l'ange, est-ce donc ainsi qu'une âme
infortunée peut tomber dans l'erreur ! il n'y a pas vingt-quatre heures que
vous êtes au purgatoire, et vous vous lamentez de la sorte, et vous
m'accusez de vous avoir trompé ! Ce n'est point le temps, c'est la rigueur
de la peine qui vous fait raisonner ainsi. Un instant vous paraît un
siècle.Croyez donc bien qu'il n'y a pas encore un jour que vous souffrez ;
votre corps n'a pas reçu encore la sépulture. Toutefois, si vous vous
repentez de votre choix, Dieu consent à ce que vous retourniez sur la terre
pour y subir l'année de maladie qui vous était réservée. - Oh ! oui,
s'écria l'âme avec joie, oui je préfère ce parti, je le demande en grâce !
l'expérience a changé mes pensée. Plutôt deux, trois, quatre années de
maladies affreuses, qu'une seule heure dans ce séjour d'inexprimables
angoisses !" L'ange alors reporta l'âme dans le corps qu'elle anima de
nouveau à la vue de la communauté saisie d'étonnement et de crainte dès que
le ressuscité put parler il révéla tout ce qui était advenu et en prit texte
pour exhorter ses frères à faire une plus rigou -
114
reuse pénitence de leurs moindres fautes afin d'éviter les tourments que la
divine justice leur a préparés dans l'autre monde pour lui il supporta avec
joie les souffrances diverses de son infirmité trop heureux de racheter
par-là les instants plus courts mais si affreux dont il avait connu
l'amertume au bout d'un an il mourut et on a tout lieu de croire qu'il monta
droit au séjour du bonheur promis ce trait qui paraît certain justifie
pleinement le mot de saint Augustin au sujet du purgatoire :" Un seul jour
dans ce lieu d'expiation peut-être comparé à mille ans de supplices
terrestres." Et il ajoute ailleurs (in ps.75) : "Le feu y est plus
insupportable que tout ce qu'on peut endurer ici-bàs : Gravior erit ille
ignis quàm quicquid potest pati homo in hâc vitâ."
(V. Luc de Wadding, Ann. Minor, anno 1183, n° 9).
114
33ème Merveille
sainte usure de ceux qui appliquent leurs oeuvres au soulagement des défunts.
Benefac justo, et invenies retributianein magnam :
Faites du bien au juste, et vous aurez une grande récompense. (Eccli. XII, 2.)
Il ne faut pas oublier combien de mérites de prières et de grâces s'assure à
lui-même celui qui offre ses bonnes oeuvres pour racheter les âmes du
purgatoire
115
les mettre en liberté et les envoyer au ciel on peut dire qu'il travaille à
peupler le ciel mais qu'en même temps il s'y prépare des avocats intéressés
par la reconnaissance à lui obtenir à la fois ce qui lui est nécessaire
ici-bàs et ce qui assurera son salut dans l'autre vie je dirai même que les
anges gardiens de ces âmes se trouvent en quelque sorte obligés à le
favoriser à cause de ce qu'il a fait pour leurs pupilles les bienheureux le
regardent avec des yeux pleins d'affection parce qu'il a augmenté leur
nombre la divine Marie le cache sous son manteau pour avoir contribué à la
couronne de ces âmes qui ont coûté tout le sang de son Fils Jésus-Christ
lui-même quelles bénédictions quelles faveurs quelle rémunération ne
versera-t-il pas sur celui qui coopère généreusement à son oeuvre de
Rédempteur voici à ce sujet une petite histoire il y avait au récit de
Denys-le-Chartreux une vierge remplie de piété nommée Gertrude qui chaque
matin par une charité singulière faisait donation aux âmes du purgatoire de
tout ce qu'elle acquerrait de mérites devant Dieu pendant la journée sans en
rien retenir pour elle bonnes oeuvres aumônes prières mortifications etc.
Bien plus dans sa grande foi elle suppliait Notre Seigneur de vouloir
appliquer lui-même ce trésor suivant ses divines lumières Jésus-Christ lui
fit plusieurs fois connaitre miraculeusement les âmes qui en avaient le plus
besoin et alors elle redoublait pour elles de ferveur de pénitences et de
prières et ne s'arrêtait point qu'elle ne crût avoir procuré leur délivrance
quelques travaux qu'une semblable pratique coûtat à la nature souvent ces
âmes lui apparaissaient au moment de se réunir au Seigneur et la comblaient
de bénédictions
116
Elle arriva chargée de mérites plus encore que d'années à la vieillesse
couchée sur son lit de mort elle fut assaillie de tentations du démon qui
cherchait à lui persuader qu'elle avait délivré tant d'âmes du purgatoire
justement pour aller occuper leur place et souffrir plus qu'elles il lui
représenta les horribles supplices auxquels elle serait soumise par la
justice divine pour l'expiation de ses moindres fautes puisqu'elle n'avait
réservé pour elle-même rien de tous les mérites de sa vie les prodiguant à
des étrangers et à des inconnus elle commença donc à gémir -" Oh ! que je
suis malheureuse ! se disait-elle : dans peu d'instants je vais mourir ; je
vais rendre de toutes mes actions le compte le plus rigoureux et le plus
sévère comment pourrai-je être délivrée après que je n'ai rien gardé pour
moi de mes bonnes oeuvres depuis tant d'années ? j'ai donc en perspective un
effroyable purgatoire actuelle, sans adoucissement sans réserve de
compensation actuelle ! Mon Dieu le permettez-vous ?" Pendant qu'elle était
en proie à cette angoisse elle voit paraître devant elle Notre Seigneur son
époux céleste qui lui adresse la parole :"Quel est donc, ô Gertrude le sujet
de ta tristesse ? " Elle répond : " Seigneur je m'afflige parce que je me
vois sur le point de mourir sans aucun capital de bonnes oeuvres qui
puissent satisfaire pour tant d'offenses que j'ai commises car je me suis
dépouillée en faveur des âmes souffrantes vous le savez bien !" Alors le
Sauveur lui souriant doucement la consola "Ma fille Gertrude, lui dit-il
afin que tu saches combien m'a été agréable ta charité envers ces âmes et ta
dévotion je te remets en ce moment même sans exception toutes les peines qui
117
t'eussent été réservées de plus moi qui ai promis cent pour un à ceux
qu'anime mon amour je veux encore te récompenser en augmentant le degré de
gloire qui t'attend là-haut toutes les âmes que tu as soulagées viendront
par mon ordre à ta rencontre et t'introduiront dans le Jérusalem éternelle
au milieu de leurs cantiques de joie." L'allégresse de la sainte ne put se
contenir à cette belle et toute divine assurance elle eut à peine le temps
d'en faire part à ses soeurs qu'elle expira le sourire sur les lèvres les
yeux animés d'une clarté merveilleuse comme une prédestinée qui ne doute
point de son sort (V. Denys-le-Chartreux, cité par le P.Martin de Roa dans
son livre De statu. animarum, 20.)
32ème Merveille
celui qui souffre pieusement ici-bas va tout droit au repos éternel.
Esque in tempus sustinchit patiens, et posted redditio juennditatis :
L'homme patient attendra la fin de ses maux jusqu'au temps destiné de Dieu pour les faire cesser, et après cela la joie lui sera rendue. (Eccli. I , 29.)
L'empereur Maurice était bien inspiré lorsque interrogé miraculeusement par
le Sauveur s'il préférait expier ses fautes ici-bas ou dans le purgatoire il
répondit avec empressement : " Ici-bas, Seigneur ! j'aime mieux souffrir
ici-bas !" Un autre personnage n'eut pas la même sagesse c'était un
religieux de Saint- François un ange se manifesta à ses yeux et lui dit de
choisir entre une longue maladie et un purgatoire très-court il se détermina
pour celui-ci parce que déjà depuis longtemps il était malade en proie à une
extrême tristesse et à charge lui paraissait-il à ses frères il jugeait donc
meilleur d'abandonner la terre et la prison de son corps. " O mon Dieu
disait-il par pitié appelez-moi hors de ce monde secourez votre malheureux
112
serviteur je ne trouve de repos ni le jour ni la nuit tant sont cruelles les
douleurs qui me tourmentent elles augmentent sans cesse je n'ai plus la
force de les supporter si mes fautes me rendent indigne d'être délivré ayez
égard Seigneur aux mérites de mes frères qui se sacrifient autour de mon lit
d'agonie ayez pitié d'eux et de moi et s'il n'y a point d'autre voie vienne
plutôt la mort je l'accueillerai comme envoyée par votre clémence c'est
alors que l'ange descendit du ciel pour le fortifier et lui proposer
l'alternative :" Puisque vous vous fatiguez de souffrir dans cette vie vos
prière ont été entendues Dieu vous permet de décider vous-même votre départ
immédiat de ce monde ou le prolongement de vos douleurs terrestres si vous
adoptez ce dernier parti vous avez encore une année de maladie après
laquelle vous monterez au ciel directement mais si vous préférez mourir vous
aurez à subir trois jours de purgatoire pour achever de vous purifier de vos
fautes choisissez librement." Le pauvre religieux tout à sa souffrance
présente qui lui paraissait insupportable et ne songeant point à ce qui
l'attendait dans le lieu de l'expiation répondit :" J'aime mieux mourir au
risque d'être tourmenté dans le purgatoire non pas seulement trois jours
mais autant qu'il plaira à Dieu car ma vie présente est une mort de chaque
minute et je ne pense pas que je puisse trouver rien de comparable. - Eh
bien répondit l'ange il sera fait comme vous le souhaitez. Vous allez
mourir aujourd'hui. Munissez-vous donc des sacrements au plus tôt." Le
malade raconta sa vision et réclama les secours de la sainte Eglise puis il
expira et son âme fut portée au purgatoire.
113
Au bout d'un temps qu'on peut comparer à la durée d'un jour si toutefois
cette expression de temps et de jour convient à l'éternité le même ange vint
le visiter et lui demanda que lui semblait de l'épreuve à laquelle il était
soumis si elle lui paraissait moins pénible que ses souffrances de la terre
"Oh ! combien j'ai été aveugle ! répondit l'âme; mais combien aussi vous
avez été cruel, vous qui m'aviez parlé de trois jours et qui me laissez ici
des siècles !Qu'elles sont longues les années dont je vois se dérouler pour
moi l'interminable série ! et encore rien ne m'annonce une délivrance
prochaine ! - Eh quoi ! repartit l'ange, est-ce donc ainsi qu'une âme
infortunée peut tomber dans l'erreur ! il n'y a pas vingt-quatre heures que
vous êtes au purgatoire, et vous vous lamentez de la sorte, et vous
m'accusez de vous avoir trompé ! Ce n'est point le temps, c'est la rigueur
de la peine qui vous fait raisonner ainsi. Un instant vous paraît un
siècle.Croyez donc bien qu'il n'y a pas encore un jour que vous souffrez ;
votre corps n'a pas reçu encore la sépulture. Toutefois, si vous vous
repentez de votre choix, Dieu consent à ce que vous retourniez sur la terre
pour y subir l'année de maladie qui vous était réservée. - Oh ! oui,
s'écria l'âme avec joie, oui je préfère ce parti, je le demande en grâce !
l'expérience a changé mes pensée. Plutôt deux, trois, quatre années de
maladies affreuses, qu'une seule heure dans ce séjour d'inexprimables
angoisses !" L'ange alors reporta l'âme dans le corps qu'elle anima de
nouveau à la vue de la communauté saisie d'étonnement et de crainte dès que
le ressuscité put parler il révéla tout ce qui était advenu et en prit texte
pour exhorter ses frères à faire une plus rigou -
114
reuse pénitence de leurs moindres fautes afin d'éviter les tourments que la
divine justice leur a préparés dans l'autre monde pour lui il supporta avec
joie les souffrances diverses de son infirmité trop heureux de racheter
par-là les instants plus courts mais si affreux dont il avait connu
l'amertume au bout d'un an il mourut et on a tout lieu de croire qu'il monta
droit au séjour du bonheur promis ce trait qui paraît certain justifie
pleinement le mot de saint Augustin au sujet du purgatoire :" Un seul jour
dans ce lieu d'expiation peut-être comparé à mille ans de supplices
terrestres." Et il ajoute ailleurs (in ps.75) : "Le feu y est plus
insupportable que tout ce qu'on peut endurer ici-bàs : Gravior erit ille
ignis quàm quicquid potest pati homo in hâc vitâ."
(V. Luc de Wadding, Ann. Minor, anno 1183, n° 9).
114
33ème Merveille
sainte usure de ceux qui appliquent leurs oeuvres au soulagement des défunts.
Benefac justo, et invenies retributianein magnam :
Faites du bien au juste, et vous aurez une grande récompense. (Eccli. XII, 2.)
Il ne faut pas oublier combien de mérites de prières et de grâces s'assure à
lui-même celui qui offre ses bonnes oeuvres pour racheter les âmes du
purgatoire
115
les mettre en liberté et les envoyer au ciel on peut dire qu'il travaille à
peupler le ciel mais qu'en même temps il s'y prépare des avocats intéressés
par la reconnaissance à lui obtenir à la fois ce qui lui est nécessaire
ici-bàs et ce qui assurera son salut dans l'autre vie je dirai même que les
anges gardiens de ces âmes se trouvent en quelque sorte obligés à le
favoriser à cause de ce qu'il a fait pour leurs pupilles les bienheureux le
regardent avec des yeux pleins d'affection parce qu'il a augmenté leur
nombre la divine Marie le cache sous son manteau pour avoir contribué à la
couronne de ces âmes qui ont coûté tout le sang de son Fils Jésus-Christ
lui-même quelles bénédictions quelles faveurs quelle rémunération ne
versera-t-il pas sur celui qui coopère généreusement à son oeuvre de
Rédempteur voici à ce sujet une petite histoire il y avait au récit de
Denys-le-Chartreux une vierge remplie de piété nommée Gertrude qui chaque
matin par une charité singulière faisait donation aux âmes du purgatoire de
tout ce qu'elle acquerrait de mérites devant Dieu pendant la journée sans en
rien retenir pour elle bonnes oeuvres aumônes prières mortifications etc.
Bien plus dans sa grande foi elle suppliait Notre Seigneur de vouloir
appliquer lui-même ce trésor suivant ses divines lumières Jésus-Christ lui
fit plusieurs fois connaitre miraculeusement les âmes qui en avaient le plus
besoin et alors elle redoublait pour elles de ferveur de pénitences et de
prières et ne s'arrêtait point qu'elle ne crût avoir procuré leur délivrance
quelques travaux qu'une semblable pratique coûtat à la nature souvent ces
âmes lui apparaissaient au moment de se réunir au Seigneur et la comblaient
de bénédictions
116
Elle arriva chargée de mérites plus encore que d'années à la vieillesse
couchée sur son lit de mort elle fut assaillie de tentations du démon qui
cherchait à lui persuader qu'elle avait délivré tant d'âmes du purgatoire
justement pour aller occuper leur place et souffrir plus qu'elles il lui
représenta les horribles supplices auxquels elle serait soumise par la
justice divine pour l'expiation de ses moindres fautes puisqu'elle n'avait
réservé pour elle-même rien de tous les mérites de sa vie les prodiguant à
des étrangers et à des inconnus elle commença donc à gémir -" Oh ! que je
suis malheureuse ! se disait-elle : dans peu d'instants je vais mourir ; je
vais rendre de toutes mes actions le compte le plus rigoureux et le plus
sévère comment pourrai-je être délivrée après que je n'ai rien gardé pour
moi de mes bonnes oeuvres depuis tant d'années ? j'ai donc en perspective un
effroyable purgatoire actuelle, sans adoucissement sans réserve de
compensation actuelle ! Mon Dieu le permettez-vous ?" Pendant qu'elle était
en proie à cette angoisse elle voit paraître devant elle Notre Seigneur son
époux céleste qui lui adresse la parole :"Quel est donc, ô Gertrude le sujet
de ta tristesse ? " Elle répond : " Seigneur je m'afflige parce que je me
vois sur le point de mourir sans aucun capital de bonnes oeuvres qui
puissent satisfaire pour tant d'offenses que j'ai commises car je me suis
dépouillée en faveur des âmes souffrantes vous le savez bien !" Alors le
Sauveur lui souriant doucement la consola "Ma fille Gertrude, lui dit-il
afin que tu saches combien m'a été agréable ta charité envers ces âmes et ta
dévotion je te remets en ce moment même sans exception toutes les peines qui
117
t'eussent été réservées de plus moi qui ai promis cent pour un à ceux
qu'anime mon amour je veux encore te récompenser en augmentant le degré de
gloire qui t'attend là-haut toutes les âmes que tu as soulagées viendront
par mon ordre à ta rencontre et t'introduiront dans le Jérusalem éternelle
au milieu de leurs cantiques de joie." L'allégresse de la sainte ne put se
contenir à cette belle et toute divine assurance elle eut à peine le temps
d'en faire part à ses soeurs qu'elle expira le sourire sur les lèvres les
yeux animés d'une clarté merveilleuse comme une prédestinée qui ne doute
point de son sort (V. Denys-le-Chartreux, cité par le P.Martin de Roa dans
son livre De statu. animarum, 20.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
34ème Merveille
Le sang de Notre-Seigneur dans l'Eucharistie
Il nous a purifié de son sang (Apocalypse I, 5)
nous avons eu déjà l'occasion de rappeler au lecteur que de
tout ce qu'on peut entreprendre en faveur des âmes du purgatoire il n'est
rien d'aussi précieux que l'immolation du divin Sauveur à l'autel outre que
c'est la doctrine expresse de l'Eglise manifestée dans nombre de conciles
des faits miraculeux authentiques ne laissent point de doute à cet égard
118
Il y a à Cologne parmi les étudiants des cours supérieurs de l'université
deux religieux dominicains d'un talent distingué dont l'un était le
bienheureux Suzon les mêmes études le même genre de vie et par-dessus tout
le même goût pour la sainteté leur avaient fait contracter une amitié intime
et ils se faisaient confidentiellement part des faveurs spirituelles qu'ils
recevaient du ciel c'est ainsi que le bienheureux dévoila à son ami un fait
qu'il tenait caché un jour qu'ils s'entretenaient ensemble des mystères de
la vie de Notre-Seigneur il lui fit voir le nom de Jésus qu'avec une pointe
de fer il s'était gravé au vif sur la poitrine afin de ne l'oublier jamais
dans les mouvements de son coeur le bon frère en fut si frappé si ému qu'il
demanda et reçut la permission d'appliquer ses lèvres sur cette plaie
glorieuse et il la mouilla de ses larmes quand ils eurent terminé leurs
études se voyant à la veille de se séparer pour retourner chacun dans leur
couvent ils convinrent et se promirent mutuellement que le premier des deux
qui mourrait serait secouru par l'autre une année entière de deux messes par
semaine : le lundi une messe de Requiem selon l'usage et le vendredi celle
de la passion autant que le permettraient les rubriques ils s'y engagèrent
se donnèrent le baiser de paix et quittèrent Cologne pendant plusieurs
années ils continuèrent chacun de leur côté à servir Dieu avec la plus
édifiante ferveur le frère fut le premier appelé au jugement et Suzon en
reçut la nouvelle avec de grands sentiments de soumission à la divine
volonté quant à l'engagement qu'il avait pris le temps le lui avait fait
oublier il priait beaucoup pour son ami s'imposait en sa faveur des
pénitences nouvelles
119
et bien des oeuvres saintes mais ne songeait point à dire les messes
convenues un matin qu'il méditait à l'écart dans une chapelle il voit tout
d'un coup paraître devant lui son cher défunt qui le regardant tendrement
lui reproche d'avoir été infidèle à une parole donnée acceptée sur laquelle
il avait droit de compter le bienheureux surpris chercha à s'excuser sur son
oubli involontaire sur les oraisons et mortifications qu'il avait faites et
faisait encore pour un ami dont le salut lui était aussi précieux que le
sien même. " Oh ! non, non, mon frère, reprit l'âme souffrante ; non cela ne
me suffit pas ! c'est le sang de Jésus-Christ qu'il faut pour éteindre les
flammes dont je suis consumé ; c'est l'auguste sacrifice qui me rachètera de
ces tourments épouvantables je vous conjure de tenir votre parole. Ne me
refusez pas cette justice, ô mon frère." Suzon s'empressa de lui dire qu'il
s'acquitterait et qu'il dirait encore plus de messes qu'il n'en avait promis
afin de réparer sa faute involontaire autant qu'il était en lui dès le
lendemain plusieurs prêtres avertis par le bienheureux s'unirent à lui au
saint autel et continuèrent plusieurs jours cet acte de charité le défunt
revint au bout de ce temps mais non plus dans la tristesse et l'abattement
la joie brillait sur son front une vive et pure lumière l'environnait et il
paraissait parfaitement heureux "Je vous rends grâces, mon fidèle ami, lui
dit-il du soulagement que je vous dois.Me voici , grâce au sang du Seigneur,
délivré de l'épreuve et je monte au ciel ou je pourrai
contempler celui que nous avons si souvent adoré ensemble sous les voiles
eucharistiques et dont le sang vient encore de me purifier." Suzon se
prosterna à son tour pour remercier la Dieu de toute
120
miséricorde et il comprit mieux que jamais l'inestimable prix du sacrifice
auguste de nos autels. ( V. Ferdinand de Castille, Histor. S. Dominici. 2e
p., 1.2, c. 1.)
Le sang de Notre-Seigneur dans l'Eucharistie
Il nous a purifié de son sang (Apocalypse I, 5)
nous avons eu déjà l'occasion de rappeler au lecteur que de
tout ce qu'on peut entreprendre en faveur des âmes du purgatoire il n'est
rien d'aussi précieux que l'immolation du divin Sauveur à l'autel outre que
c'est la doctrine expresse de l'Eglise manifestée dans nombre de conciles
des faits miraculeux authentiques ne laissent point de doute à cet égard
118
Il y a à Cologne parmi les étudiants des cours supérieurs de l'université
deux religieux dominicains d'un talent distingué dont l'un était le
bienheureux Suzon les mêmes études le même genre de vie et par-dessus tout
le même goût pour la sainteté leur avaient fait contracter une amitié intime
et ils se faisaient confidentiellement part des faveurs spirituelles qu'ils
recevaient du ciel c'est ainsi que le bienheureux dévoila à son ami un fait
qu'il tenait caché un jour qu'ils s'entretenaient ensemble des mystères de
la vie de Notre-Seigneur il lui fit voir le nom de Jésus qu'avec une pointe
de fer il s'était gravé au vif sur la poitrine afin de ne l'oublier jamais
dans les mouvements de son coeur le bon frère en fut si frappé si ému qu'il
demanda et reçut la permission d'appliquer ses lèvres sur cette plaie
glorieuse et il la mouilla de ses larmes quand ils eurent terminé leurs
études se voyant à la veille de se séparer pour retourner chacun dans leur
couvent ils convinrent et se promirent mutuellement que le premier des deux
qui mourrait serait secouru par l'autre une année entière de deux messes par
semaine : le lundi une messe de Requiem selon l'usage et le vendredi celle
de la passion autant que le permettraient les rubriques ils s'y engagèrent
se donnèrent le baiser de paix et quittèrent Cologne pendant plusieurs
années ils continuèrent chacun de leur côté à servir Dieu avec la plus
édifiante ferveur le frère fut le premier appelé au jugement et Suzon en
reçut la nouvelle avec de grands sentiments de soumission à la divine
volonté quant à l'engagement qu'il avait pris le temps le lui avait fait
oublier il priait beaucoup pour son ami s'imposait en sa faveur des
pénitences nouvelles
119
et bien des oeuvres saintes mais ne songeait point à dire les messes
convenues un matin qu'il méditait à l'écart dans une chapelle il voit tout
d'un coup paraître devant lui son cher défunt qui le regardant tendrement
lui reproche d'avoir été infidèle à une parole donnée acceptée sur laquelle
il avait droit de compter le bienheureux surpris chercha à s'excuser sur son
oubli involontaire sur les oraisons et mortifications qu'il avait faites et
faisait encore pour un ami dont le salut lui était aussi précieux que le
sien même. " Oh ! non, non, mon frère, reprit l'âme souffrante ; non cela ne
me suffit pas ! c'est le sang de Jésus-Christ qu'il faut pour éteindre les
flammes dont je suis consumé ; c'est l'auguste sacrifice qui me rachètera de
ces tourments épouvantables je vous conjure de tenir votre parole. Ne me
refusez pas cette justice, ô mon frère." Suzon s'empressa de lui dire qu'il
s'acquitterait et qu'il dirait encore plus de messes qu'il n'en avait promis
afin de réparer sa faute involontaire autant qu'il était en lui dès le
lendemain plusieurs prêtres avertis par le bienheureux s'unirent à lui au
saint autel et continuèrent plusieurs jours cet acte de charité le défunt
revint au bout de ce temps mais non plus dans la tristesse et l'abattement
la joie brillait sur son front une vive et pure lumière l'environnait et il
paraissait parfaitement heureux "Je vous rends grâces, mon fidèle ami, lui
dit-il du soulagement que je vous dois.Me voici , grâce au sang du Seigneur,
délivré de l'épreuve et je monte au ciel ou je pourrai
contempler celui que nous avons si souvent adoré ensemble sous les voiles
eucharistiques et dont le sang vient encore de me purifier." Suzon se
prosterna à son tour pour remercier la Dieu de toute
120
miséricorde et il comprit mieux que jamais l'inestimable prix du sacrifice
auguste de nos autels. ( V. Ferdinand de Castille, Histor. S. Dominici. 2e
p., 1.2, c. 1.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
35ème Merveille Il vaut mieux mourir avec la certitude d'aller en Purgatoire, que de vivre en danger de péché.
Ils ont mieux aimé mourir que de violer la loi de Dieu
(I Mach. I,63)
Le trait que nous allons rapporter convaincra le lecteur chrétien qu'on doit
envisager la mort comme un avantage même en étant assuré de souffrir
beaucoup dans les flammes expiatoires en comparaison d'une vie exposée à
l'offense de Dieu il y verra de plus le confirmation manifeste de la
doctrine catholique sur le purgatoire et sur la prière pour les morts car le
miracle a eu pour témoin non pas telle personne mais toute une ville saint
Stanislas évèque de Cracovie (vers l'an 1070) avait acheté d'un paysan nommé
Pierre un bien de campagne pour son église il paya intégralement le prix
convenu sans toutefois exiger de reçu en forme depuis trois ans déjà le
vendeur était passé de vie à trépas lorsque ses héritiers voyant que le roi
Boleslas prince injuste et cruel était irrité contre le saint
121
à cause des remontrances qu'il lui faisait sur sa conduite scandaleuse
songèrent à mettre à profit cette circonstance ils intentèrent à l'évèque un
procès l'accusant de s'être emparé sans aucun titre d'un héritage qui leur
appartenait à eux-mêmes le roi admit très volontiers la cause et comme le
saint avait effectivement négligé les formalités ordinaires ne pouvant
prévoir tant de mauvaise foi il fut condamné à payer de nouveau ce qui lui
appartenait légitimement ou à faire aussitôt restitution pure et simple de
la propriété Stanislas mu par une inspiration déclara que puisqu'il ne
pouvait obtenir justice des vivants il l'obtiendrait des morts dont le
témoignage trancherait la question c'est pourquoi il demanda un délai de
trois jours à l'effet d'invoquer la déposition du vendeur Pierre que l'on
savait défunt depuis plusieurs années les juges se moquèrent d'une pareille
réclamation qui leur parut une folie et cependant y firent droit au milieu
de plaisanteries et de paroles offensantes rentré dans sa maison Stanislas
assemble ses prêtres les invite à prier avec lui et à jeuner durant trois
jours sans goûter le sommeil afin d'obtenir de Dieu qu'il prenne en main la
cause de la justice le troisième jour donc après avoir célébré
solennellement le saint sacrifice à cette intention gardant ses ornements
pontificaux il se mit en marche vers le cimetière suivi de tout son clergé
et d'une foule de peuple que ce spectacle avait attiré arrivé auprès de la
tombe il ordonna d'ôter la pierre sépulcrale et de creuser jusqu'au cadavre
qui n'était plus que des ossements arides et sans forme quand ils eurent été
mis à jour l'évèque s'agenouille lève les yeux au ciel et conjure le
122
Seigneur de faire un miracle devant cette ville attentive pour la
glorification de son Nom et pour le triomphe de l'équité puis touchant de
son bâton pastoral ces restes inanimés il leur dit comme autrefois le
prophète Ezéchiel : "Ossa arida, audite verbum Domini : Ossements desséchés,
écoutez la parole du Seigneur Dieu !" il leur commande au nom du Père du
fils et du Saint-Esprit de s'animer de nouveau et de rendre témoignage à la
vérité O merveille aussitôt ces restes sans nom s'agitent la poussière se
change en chair le mort se dresse sur ses pieds et sortant du sépulcre
s'avance vers le pontife qui le conduit d'abord à l'église pour remercier
Dieu au milieu du peuple puis au tribunal dans ce moment-là même le roi s'y
trouvait entouré des grands et de tous les magistrats on lui annonce que
Stanislas arrive processionnellement avec son clergé et avec Pierre
ressuscité le prince n'en veut rien croire mais il faut bien se rendre à
l'évidence lorsque le prélat entre dans la salle s'arrête en face du trône
et parle ainsi :" Je vous amène, Sire, l'homme qui m'a vendu cette terre :
il a quitté la région des morts pour rendre hommage à la vérité
interrogez-le il parlera lui-même il vous dira si j'ai réellement acheté son
héritage et si je lui en ai remis la valeur l'homme est connu son tombeau
est encore ouvert Dieu l'envoie confondre l'imposture sa déposition vaudra
plus je le pense que la dénégation des autres témoins et que toutes les
signatures imaginables." Pierre alors élevant la voix attesta qu'il avait
reçu le prix entier de la terre vendue au saint prélat pour son église et
que ses trois neveux Pierre Jacques et Stanislas n'avaient
123
aucun droit à le troubler dans sa possession ensuite se tournant vers
ceux-ci qui étaient présents dans l'auditoire il les menaça de la justice de
Dieu qu'on ne peut tromper et d'une mort malheureuse avant peu s'ils ne
cessaient de réclamer ce qu'ils savaient bien ne point leur appartenir la
stupéfaction de l'assistance ne se peut rendre tous restaient cloués par la
terreur à la place ou ils se trouvaient les héritiers demeurèrent confondus
pendant que le roi rendait une nouvelle sentence en faveur de saint
Stanislas le ressuscité était toujours là l'évèque lui demanda s'il désirait
vivre encore quelques années il espérait en obtenir la grâce de celui qui
l'avait ressuscité pour peu de moments mais il répondit qu'il préférait
rentrer au sépulcre et mourir de nouveau plutôt que de rester dans une vie
si misérable et si périlleuse il assura néanmoins que son âme était encore
en purgatoire et qu'il lui restait quelque temps à y souffrir pour se
purifier des dernières souillures de ses fautes que nonobstant les supplices
cruels auxquels il allait être rendu il les préférait de beaucoup à
l'incertitude ou l'on est ici-bas de plaire à Dieu et de faire son salut il
termina en disant que la plus grande grâce que le saint lui pouvait accorder
c'était de prier le Seigneur d'abréger le temps de son épreuve et de le
recevoir plus tôt parmi les élus puisqu'il avait l'assurance d'y être admis
un jour Stanislas le lui promit puis l'accompagna au cimetière avec tout le
clergé et la foule du peuple on récita sur lui les prières ordinaires de la
recommandation de l'âme pendant qu'il se couchait dans la tombe il renouvela
à tous les assistants la demande de prier pour lui ses ossements se
séparèrent de nouveau la
124
chaire tomba en poussière et on n'eut plus devant les yeux que les restes
informes de la matinée c'est une croyance dans le pays que saint Stanislas
obtint très promptement la délivrance de cette âme* de tout ceci nous devons
conclure avec un saint auteur combien nous sommes insensés de tant aimer la
vie lorsque nous connaissons les dangers qui nous y menacent du côté du
salut nous ne savons pas si nous persévèrons jusqu'à la fin si nous mourrons
dans les conditions nécessaires de contrition et de ferveur et cependant
nous nous attachons à cette existence fragile et dangereuse comme s'il n'y
en avait pas d'autre pour nous quel aveuglement étrange quelle insensibilité
injustifiable !
(V. Laurent Surius, Vies des Saints ; et de plus les Acta
Sanctorum des Bollandistes, 7 mai, vie de saint Stanislas.)
*Ce saint mourut plus tard tué à l'autel par Boleslas II le hardi et son
cadavre traîné hors de l'église fut mis en pièces par les satellites du roi.
(Note du Trad.)
Ils ont mieux aimé mourir que de violer la loi de Dieu
(I Mach. I,63)
Le trait que nous allons rapporter convaincra le lecteur chrétien qu'on doit
envisager la mort comme un avantage même en étant assuré de souffrir
beaucoup dans les flammes expiatoires en comparaison d'une vie exposée à
l'offense de Dieu il y verra de plus le confirmation manifeste de la
doctrine catholique sur le purgatoire et sur la prière pour les morts car le
miracle a eu pour témoin non pas telle personne mais toute une ville saint
Stanislas évèque de Cracovie (vers l'an 1070) avait acheté d'un paysan nommé
Pierre un bien de campagne pour son église il paya intégralement le prix
convenu sans toutefois exiger de reçu en forme depuis trois ans déjà le
vendeur était passé de vie à trépas lorsque ses héritiers voyant que le roi
Boleslas prince injuste et cruel était irrité contre le saint
121
à cause des remontrances qu'il lui faisait sur sa conduite scandaleuse
songèrent à mettre à profit cette circonstance ils intentèrent à l'évèque un
procès l'accusant de s'être emparé sans aucun titre d'un héritage qui leur
appartenait à eux-mêmes le roi admit très volontiers la cause et comme le
saint avait effectivement négligé les formalités ordinaires ne pouvant
prévoir tant de mauvaise foi il fut condamné à payer de nouveau ce qui lui
appartenait légitimement ou à faire aussitôt restitution pure et simple de
la propriété Stanislas mu par une inspiration déclara que puisqu'il ne
pouvait obtenir justice des vivants il l'obtiendrait des morts dont le
témoignage trancherait la question c'est pourquoi il demanda un délai de
trois jours à l'effet d'invoquer la déposition du vendeur Pierre que l'on
savait défunt depuis plusieurs années les juges se moquèrent d'une pareille
réclamation qui leur parut une folie et cependant y firent droit au milieu
de plaisanteries et de paroles offensantes rentré dans sa maison Stanislas
assemble ses prêtres les invite à prier avec lui et à jeuner durant trois
jours sans goûter le sommeil afin d'obtenir de Dieu qu'il prenne en main la
cause de la justice le troisième jour donc après avoir célébré
solennellement le saint sacrifice à cette intention gardant ses ornements
pontificaux il se mit en marche vers le cimetière suivi de tout son clergé
et d'une foule de peuple que ce spectacle avait attiré arrivé auprès de la
tombe il ordonna d'ôter la pierre sépulcrale et de creuser jusqu'au cadavre
qui n'était plus que des ossements arides et sans forme quand ils eurent été
mis à jour l'évèque s'agenouille lève les yeux au ciel et conjure le
122
Seigneur de faire un miracle devant cette ville attentive pour la
glorification de son Nom et pour le triomphe de l'équité puis touchant de
son bâton pastoral ces restes inanimés il leur dit comme autrefois le
prophète Ezéchiel : "Ossa arida, audite verbum Domini : Ossements desséchés,
écoutez la parole du Seigneur Dieu !" il leur commande au nom du Père du
fils et du Saint-Esprit de s'animer de nouveau et de rendre témoignage à la
vérité O merveille aussitôt ces restes sans nom s'agitent la poussière se
change en chair le mort se dresse sur ses pieds et sortant du sépulcre
s'avance vers le pontife qui le conduit d'abord à l'église pour remercier
Dieu au milieu du peuple puis au tribunal dans ce moment-là même le roi s'y
trouvait entouré des grands et de tous les magistrats on lui annonce que
Stanislas arrive processionnellement avec son clergé et avec Pierre
ressuscité le prince n'en veut rien croire mais il faut bien se rendre à
l'évidence lorsque le prélat entre dans la salle s'arrête en face du trône
et parle ainsi :" Je vous amène, Sire, l'homme qui m'a vendu cette terre :
il a quitté la région des morts pour rendre hommage à la vérité
interrogez-le il parlera lui-même il vous dira si j'ai réellement acheté son
héritage et si je lui en ai remis la valeur l'homme est connu son tombeau
est encore ouvert Dieu l'envoie confondre l'imposture sa déposition vaudra
plus je le pense que la dénégation des autres témoins et que toutes les
signatures imaginables." Pierre alors élevant la voix attesta qu'il avait
reçu le prix entier de la terre vendue au saint prélat pour son église et
que ses trois neveux Pierre Jacques et Stanislas n'avaient
123
aucun droit à le troubler dans sa possession ensuite se tournant vers
ceux-ci qui étaient présents dans l'auditoire il les menaça de la justice de
Dieu qu'on ne peut tromper et d'une mort malheureuse avant peu s'ils ne
cessaient de réclamer ce qu'ils savaient bien ne point leur appartenir la
stupéfaction de l'assistance ne se peut rendre tous restaient cloués par la
terreur à la place ou ils se trouvaient les héritiers demeurèrent confondus
pendant que le roi rendait une nouvelle sentence en faveur de saint
Stanislas le ressuscité était toujours là l'évèque lui demanda s'il désirait
vivre encore quelques années il espérait en obtenir la grâce de celui qui
l'avait ressuscité pour peu de moments mais il répondit qu'il préférait
rentrer au sépulcre et mourir de nouveau plutôt que de rester dans une vie
si misérable et si périlleuse il assura néanmoins que son âme était encore
en purgatoire et qu'il lui restait quelque temps à y souffrir pour se
purifier des dernières souillures de ses fautes que nonobstant les supplices
cruels auxquels il allait être rendu il les préférait de beaucoup à
l'incertitude ou l'on est ici-bas de plaire à Dieu et de faire son salut il
termina en disant que la plus grande grâce que le saint lui pouvait accorder
c'était de prier le Seigneur d'abréger le temps de son épreuve et de le
recevoir plus tôt parmi les élus puisqu'il avait l'assurance d'y être admis
un jour Stanislas le lui promit puis l'accompagna au cimetière avec tout le
clergé et la foule du peuple on récita sur lui les prières ordinaires de la
recommandation de l'âme pendant qu'il se couchait dans la tombe il renouvela
à tous les assistants la demande de prier pour lui ses ossements se
séparèrent de nouveau la
124
chaire tomba en poussière et on n'eut plus devant les yeux que les restes
informes de la matinée c'est une croyance dans le pays que saint Stanislas
obtint très promptement la délivrance de cette âme* de tout ceci nous devons
conclure avec un saint auteur combien nous sommes insensés de tant aimer la
vie lorsque nous connaissons les dangers qui nous y menacent du côté du
salut nous ne savons pas si nous persévèrons jusqu'à la fin si nous mourrons
dans les conditions nécessaires de contrition et de ferveur et cependant
nous nous attachons à cette existence fragile et dangereuse comme s'il n'y
en avait pas d'autre pour nous quel aveuglement étrange quelle insensibilité
injustifiable !
(V. Laurent Surius, Vies des Saints ; et de plus les Acta
Sanctorum des Bollandistes, 7 mai, vie de saint Stanislas.)
*Ce saint mourut plus tard tué à l'autel par Boleslas II le hardi et son
cadavre traîné hors de l'église fut mis en pièces par les satellites du roi.
(Note du Trad.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
36ème Merveille
Les justes eux-mêmes ne sont pas irrépréhensibles devant Dieu
Aucun homme n'est juste devant vous (Ps. CXI.II,2)
Le livre de l'Ecclésiastique compare le juste au soleil : Quasi sol refulgens mais de même qu'on découvre des taches dans cet astre lumineux les saints ont aussi leurs imperfections dont ils doivent être purifiés dans les flammes du purgatoire avant de recevoir
la couronne de l'immortalité et de jouir pleinement de Dieu il n'y a point
d'homme si parfait qui ne touche la terre des pieds tout en ayant les yeux
élevés au ciel dans le couvent des Frères-Mineurs de Paris mourut un
religieux que sa piété éminente avait fait surnommer l'Angélique et c'était
véritablement un ange de perfection spirituelle dans une chair mortelle et
fragile il y avait parmi ses confrères un lecteur de théologie savant dans
les choses de l'âme lequel bien qu'il n'ignorât pas l'obligation commune de
célébrer trois messes en faveur de chaque moine qui mourrait dans la maison
omit de s'acquitter de ce devoir dans cette circonstance il lui semblait
inutile d'intercéder pour une âme dont la vie avait été si vertueuse et qui
devait être dès maintenant pensait-il au plus haut degré de
126
la gloire mais au bout de quelques jours comme il se promenait un matin dans
les allées du jardin tout entier à ses méditations théologiques il voit
subitement le défunt se présenter devant ses yeux et il l'entend lui dire
d'un ton lamentable : "Cher maître je vous en conjure ayez compassion de moi
!" Surpris de cette apparition et de cette demande : "Eh quoi ! âme sainte
répondit-il quel besoin as-tu de mon secours ? - Je suis retenu dans les
feux du purgatoire, reprit le défunt dans l'attente des trois messes que
vous deviez célébrer pour moi. Si vous vous acquittiez de cette obligation,
je serais tout aussitôt introduit dans la Jérusalem céleste. - Ah !
répondit le religieux je l'aurais fait avec bonheur si j'avais pu penser que
vous en dussiez éprouver du soulagement mais en songeant à la vie si sainte
que vous aviez menée parmi nous je m'imaginais que la couronne vous avait
été donnée tout de suite au sortir de ce monde n'étiez-vous pas le premier
et le plus édifiant au choeur au chapitre à l'oraison ? y avait-il un seul
point de la règle auquel vous ne fussiez scrupuleusement fidèle ? chacun
vous admirait il atteindrait la perfection de sa vocation religieuse ne
faisiez-vous pas en outre de vos obligations des prières et des pénitences
sans nombre qui rendraient votre vie un acte de vertu continuel ? non je
n'aurais pu croire qu'il y eût encore à s'inquiéter pour vous hélas !
hélas ! dit le défunt personne ne croit personne ne comprend avec quelle
sévérité Dieu juge et punit sa créature son infinie sainteté découvre dans
nos meilleures actions des côtés par ou elles pêchent et lui dé-
127
Les justes eux-mêmes ne sont pas irrépréhensibles devant Dieu
Aucun homme n'est juste devant vous (Ps. CXI.II,2)
Le livre de l'Ecclésiastique compare le juste au soleil : Quasi sol refulgens mais de même qu'on découvre des taches dans cet astre lumineux les saints ont aussi leurs imperfections dont ils doivent être purifiés dans les flammes du purgatoire avant de recevoir
la couronne de l'immortalité et de jouir pleinement de Dieu il n'y a point
d'homme si parfait qui ne touche la terre des pieds tout en ayant les yeux
élevés au ciel dans le couvent des Frères-Mineurs de Paris mourut un
religieux que sa piété éminente avait fait surnommer l'Angélique et c'était
véritablement un ange de perfection spirituelle dans une chair mortelle et
fragile il y avait parmi ses confrères un lecteur de théologie savant dans
les choses de l'âme lequel bien qu'il n'ignorât pas l'obligation commune de
célébrer trois messes en faveur de chaque moine qui mourrait dans la maison
omit de s'acquitter de ce devoir dans cette circonstance il lui semblait
inutile d'intercéder pour une âme dont la vie avait été si vertueuse et qui
devait être dès maintenant pensait-il au plus haut degré de
126
la gloire mais au bout de quelques jours comme il se promenait un matin dans
les allées du jardin tout entier à ses méditations théologiques il voit
subitement le défunt se présenter devant ses yeux et il l'entend lui dire
d'un ton lamentable : "Cher maître je vous en conjure ayez compassion de moi
!" Surpris de cette apparition et de cette demande : "Eh quoi ! âme sainte
répondit-il quel besoin as-tu de mon secours ? - Je suis retenu dans les
feux du purgatoire, reprit le défunt dans l'attente des trois messes que
vous deviez célébrer pour moi. Si vous vous acquittiez de cette obligation,
je serais tout aussitôt introduit dans la Jérusalem céleste. - Ah !
répondit le religieux je l'aurais fait avec bonheur si j'avais pu penser que
vous en dussiez éprouver du soulagement mais en songeant à la vie si sainte
que vous aviez menée parmi nous je m'imaginais que la couronne vous avait
été donnée tout de suite au sortir de ce monde n'étiez-vous pas le premier
et le plus édifiant au choeur au chapitre à l'oraison ? y avait-il un seul
point de la règle auquel vous ne fussiez scrupuleusement fidèle ? chacun
vous admirait il atteindrait la perfection de sa vocation religieuse ne
faisiez-vous pas en outre de vos obligations des prières et des pénitences
sans nombre qui rendraient votre vie un acte de vertu continuel ? non je
n'aurais pu croire qu'il y eût encore à s'inquiéter pour vous hélas !
hélas ! dit le défunt personne ne croit personne ne comprend avec quelle
sévérité Dieu juge et punit sa créature son infinie sainteté découvre dans
nos meilleures actions des côtés par ou elles pêchent et lui dé-
127
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
128
37ème Merveille
ON NE SORT DU PURGATOIRE QU’APRES UNE EXPIATION
ENTIERE ET COMPLETE
Il ne faudrait pas croire que les grandes fautes seulement nous conduiront dans le lieu de l’expiation, et que nous en sortirons aisément si nous n’avons pas fait tout ce qui est nécessaire pour éviter le mal. Les moindres imperfections des justes eux-mêmes seront purifiées par le feu, suivant la parole du prophète Malachie : « Le Seigneur purifiera les enfants de Lévi, et il les passera au creuset comme l’or. »
Nous lisons de saint Séverin, archevêque de Cologne, qu’il se fit voir, après sa mort, à l’un des chanoines de sa cathédrale pour réclamer le secours de ses prières, parce qu’il avait été condamné au purgatoire. « Et comment cela se peut-il ? S’écria le prêtre consterné. Vous si pieux, vous si zélé pasteur, qui avez accompli tant de bien dans ce diocèse ! Vous que nous invoquons tous comme notre protecteur au ciel ! – Ah ! répondit le prélat, DIEU m’a fait la grâce de le servir de tout mon cœur, et de travailler longtemps dans son héritage ; mais je l’ai offensé Souvent par la manière pressée dont je récitais mon bréviaire.
129
Les affaires de la cour occupaient mon esprit et mon temps, et, quand je devais m’acquitter de ce devoir de la prière, c’était sans assez de recueillement, quelquefois à une autre heure qu’à l’heure marquée par les règles de l’Eglise. Maintenant, j’expie ces infidélités, et le Ciel me permet de venir réclamer vos prières. Me les refuserez-vous ? » C’est saint Pierre Damien qui rapporte ce fait, dans sa lettre 14è à l’abbé Désidérius, chap. 7.
Durand, premier abbé d’un monastère, puis évêque de Toulouse, nous offre un autre exemple du même genre. Il avait une singulière piété, beaucoup de zèle pour son avancement spirituel, l’esprit de mortification, la régularité ; cependant, il avait aussi le défaut de veiller trop peu sur sa langue. Lorsqu’il était simple religieux, il se livrait volontiers à une excessive gaieté dans la conversation, disant des plaisanteries, des bons mots, des histoires amusantes qui prêtaient à rire. Son supérieur, l’abbé Hugues, l’avertit plusieurs fois de modérer cet entrain qui le portait à la dissipation ; il lui représentait que ces jovialités conviennent peu dans la bouche d’un moine qui est en même temps prêtre, dont les lèvres doivent être vouées aux choses utiles et saintes, selon le précepte des Livres sacrés (Malachie II, 7). Il l’avertit même, un jour, que s’il ne se corrigeait pas, il aurait infailliblement des peines à souffrir en purgatoire pour ces fautes quotidiennes. Durand attacha peu d’importance à ces avis, et continua, même étant évêque, à aimer le mot pour rire et les facéties d’une conversation enjouée. Quelques personnes en étaient mal édifiées.
130
Lorsque le prélat fut mort, la prédiction du supérieur se réalisa. Il apparut à un moine de ses amis, le P. Séguin, et le chargea de prier l’abbé, dont il avait si mal écouté les conseils, d’intercéder pour lui. Celui-ci, qui était plein de charité, assembla les religieux, leur dit ce qu’il venait d’apprendre, et leur demanda de s’imposer pendant toute une semaine, en faveur de cette âme souffrante, un rigoureux silence. Ils y consentirent. Cependant, l’un d’eux n’observa pas si bien sa promesse qu’il ne laissât échapper quelques paroles. Le défunt apparut de nouveau et se plaignit de cette infraction, qui le privait du fruit de la bonne œuvre. On recommença dont une autre semaine, avec beaucoup de prières. A peine s’achevait-elle, que Durand se vit voir à l’abbé, revêtu de son costume pontifical, la joie peinte sur le visage ; il lui exprima sa reconnaissance envers tout le couvent, et ajouta que DIEU le recevait à l’instant même parmi ses élus.
Ce trait est une leçons pour les personnes consacrées à DIEU ; on peut l’appeler le commentaire vivant de ce passage du livre de la Considération de saint Bernard : « Parmi les séculiers, les plaisanteries ne sont que des plaisanteries : parmi les ecclésiastiques, ce sont comme des blasphèmes. Votre bouche a été consacrée à l’Evangile : il ne faut donc point l’ouvrir à de telles inutilités. »
manque référence citation (Vincent de Beanvais, ...
37ème Merveille
ON NE SORT DU PURGATOIRE QU’APRES UNE EXPIATION
ENTIERE ET COMPLETE
Il ne faudrait pas croire que les grandes fautes seulement nous conduiront dans le lieu de l’expiation, et que nous en sortirons aisément si nous n’avons pas fait tout ce qui est nécessaire pour éviter le mal. Les moindres imperfections des justes eux-mêmes seront purifiées par le feu, suivant la parole du prophète Malachie : « Le Seigneur purifiera les enfants de Lévi, et il les passera au creuset comme l’or. »
Nous lisons de saint Séverin, archevêque de Cologne, qu’il se fit voir, après sa mort, à l’un des chanoines de sa cathédrale pour réclamer le secours de ses prières, parce qu’il avait été condamné au purgatoire. « Et comment cela se peut-il ? S’écria le prêtre consterné. Vous si pieux, vous si zélé pasteur, qui avez accompli tant de bien dans ce diocèse ! Vous que nous invoquons tous comme notre protecteur au ciel ! – Ah ! répondit le prélat, DIEU m’a fait la grâce de le servir de tout mon cœur, et de travailler longtemps dans son héritage ; mais je l’ai offensé Souvent par la manière pressée dont je récitais mon bréviaire.
129
Les affaires de la cour occupaient mon esprit et mon temps, et, quand je devais m’acquitter de ce devoir de la prière, c’était sans assez de recueillement, quelquefois à une autre heure qu’à l’heure marquée par les règles de l’Eglise. Maintenant, j’expie ces infidélités, et le Ciel me permet de venir réclamer vos prières. Me les refuserez-vous ? » C’est saint Pierre Damien qui rapporte ce fait, dans sa lettre 14è à l’abbé Désidérius, chap. 7.
Durand, premier abbé d’un monastère, puis évêque de Toulouse, nous offre un autre exemple du même genre. Il avait une singulière piété, beaucoup de zèle pour son avancement spirituel, l’esprit de mortification, la régularité ; cependant, il avait aussi le défaut de veiller trop peu sur sa langue. Lorsqu’il était simple religieux, il se livrait volontiers à une excessive gaieté dans la conversation, disant des plaisanteries, des bons mots, des histoires amusantes qui prêtaient à rire. Son supérieur, l’abbé Hugues, l’avertit plusieurs fois de modérer cet entrain qui le portait à la dissipation ; il lui représentait que ces jovialités conviennent peu dans la bouche d’un moine qui est en même temps prêtre, dont les lèvres doivent être vouées aux choses utiles et saintes, selon le précepte des Livres sacrés (Malachie II, 7). Il l’avertit même, un jour, que s’il ne se corrigeait pas, il aurait infailliblement des peines à souffrir en purgatoire pour ces fautes quotidiennes. Durand attacha peu d’importance à ces avis, et continua, même étant évêque, à aimer le mot pour rire et les facéties d’une conversation enjouée. Quelques personnes en étaient mal édifiées.
130
Lorsque le prélat fut mort, la prédiction du supérieur se réalisa. Il apparut à un moine de ses amis, le P. Séguin, et le chargea de prier l’abbé, dont il avait si mal écouté les conseils, d’intercéder pour lui. Celui-ci, qui était plein de charité, assembla les religieux, leur dit ce qu’il venait d’apprendre, et leur demanda de s’imposer pendant toute une semaine, en faveur de cette âme souffrante, un rigoureux silence. Ils y consentirent. Cependant, l’un d’eux n’observa pas si bien sa promesse qu’il ne laissât échapper quelques paroles. Le défunt apparut de nouveau et se plaignit de cette infraction, qui le privait du fruit de la bonne œuvre. On recommença dont une autre semaine, avec beaucoup de prières. A peine s’achevait-elle, que Durand se vit voir à l’abbé, revêtu de son costume pontifical, la joie peinte sur le visage ; il lui exprima sa reconnaissance envers tout le couvent, et ajouta que DIEU le recevait à l’instant même parmi ses élus.
Ce trait est une leçons pour les personnes consacrées à DIEU ; on peut l’appeler le commentaire vivant de ce passage du livre de la Considération de saint Bernard : « Parmi les séculiers, les plaisanteries ne sont que des plaisanteries : parmi les ecclésiastiques, ce sont comme des blasphèmes. Votre bouche a été consacrée à l’Evangile : il ne faut donc point l’ouvrir à de telles inutilités. »
manque référence citation (Vincent de Beanvais, ...
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
38ème Merveille
LA DEVOTION DU SAINT ROSAIRE
Fructifiez comme le rosier planté au bord des eaux
Eccli 39, 17
Ce que Pline assure de la rose, qu’elle reçoit de la nature non seulement l’office de nous embaumer de ses parfums, mais aussi d’être utile à notre santé, peut s’appliquer justement à la dévotion du Rosaire : car cette dévotion, outre le bonheur qu’elle procure à ceux qui l’embrassent, leur est très profitable pour les guérir à la fois du mal du péché et de la peine qui lui est réservée. En voici un exemple très convaincant.
Dans le royaume d’Arragon, une jeune fille de haute naissance, appelée Alexandra, assistant aux prédications du grand saint Dominique, se décida à entrer dans la confrérie instituée pour cet objet. Mais, livrée à la vanité mondaine, elle oubliait souvent de réciter son chapelet, préférant passer des heures entières au miroir et aux conversations inutiles. Comme elle était fort belle et gracieuse, plusieurs jeunes gens commencèrent à l’entourer de leurs hommages et à lui demander sa main, et chacun faisait de son mieux pour attirer ses regards et son cœur. Il y en avait deux surtout, d’une condition élevée, qui se montraient plus ardents à sa poursuite, et qui finirent par se défier en duel. La
132
jeune fille était présente pour décider entre les combattants, armés chacun d’une longue lance comme pour un tournoi. Au signal donné, ils se précipitèrent l’un sur l’autre avec tant de fureur, qu’ils tombèrent tous deux à la renverse, mutuellement frappés, et ne tardèrent pas à expirer. Ce fut un sujet de vive douleur pour les deux familles ; unissant leur colère contre celle qui avait été l’occasion de ce malheur, elles se jetèrent sur elle, et la battirent jusqu’à compromettre sa vie. Baignant dans son sang, l’infortunée demandait grâce et suppliait qu’on la laissât au moins se confesser ; mais ces furieux, s’animant de plus en plus, l’achevèrent en lui coupant la tête d’un coup de sabre ; après quoi, afin d’échapper à la justice, ils jetèrent le cadavre au fonds d’un puits et se sauvèrent.
Cependant, la divine MARIE, mère des miséricordes, voulut récompenser les quelques actes de piété de cette malheureuse enfant envers elle ; elle révéla tous les détails du crime à saint Dominique, qui se trouvait alors dans une autre ville. Le saint fut consterné ; il serait parti aussitôt pour se rendre en ce lieu-là, s’il n’avait été retenu par les affaires de son ordre. Au bout de quelques jours seulement, il put venir au bord du puits, y plongea le regard, et, après avoir fait une prière, se mit à appeler : « Alexandra, Alexandra ! » O prodige inouï ! En présence de plusieurs personnes que la venue du Père avait attirées, la morte s’anime, la tête se rapproche du tronc, et la voici qui sort pleine de vie, quoique couverte de sang ; elle se jette aux pieds de Dominique, et fait avec beaucoup de larmes une confession générale, en bénissant DIEU qui lui avait permis de se faire inscrire parmi les servantes de la
133
Reine du ciel.
Elle vécut encoure deux jours, afin de pouvoir réciter un certain nombre de rosaires qui lui avaient été imposés pour pénitence. On vint la voir de tous côtés, et elle ne cessait de prêcher la dévotion à MARIE.
Interrogée par le saint patriarche sur ce qui lui était arrivé après sa mort, elle raconta trois choses bien mémorables. La première, que, par les mérites de la confrérie du Rosaire, elle avait eu la grâce de la contrition au moment d’expirer, sans quoi elle eût été damnée. Secondement, quand on lui tranchait la tête, elle s’était vue assaillie d’une troupe de démons hideux qui voulaient l’emporter en enfer, lorsque MARIE était accourue à son aide et l’avait délivrée.
En troisième lieu, elle avait été condamnée par la divine justice, à deux cents années de purgatoire pour avoir causé la mort des deux jeunes gens ; en outre, à cause de ses parures vaines et immodestes, qui avaient été à beaucoup une occasion prochaine de péché, elle avait à endurer encore cinq cents autres années de souffrances. « Mais j’espère, ajouta-t-elle, que les confrères auxquels je m’étais associée pour honorer MARIE prieront pour moi avec tant de ferveur, que ce temps de terrible épreuve sera miséricordieusement abrégé. »
Elle mourut de nouveau, après avoir donné les marques de la plus édifiante piété. On lui fit des obsèques solennelles. Saint Dominique prit tellement à cœur l’heureuse fin du miracle que DIEU avait opéré par lui, il fit lui-même et fit faire à d’autres tant de pénitences, de prières, d’aumônes et de jeûnes, qu’il obtint la délivrance entière d’Alexandra. Au bout de quinze jours, elle lui apparut toute éclatante de lumière, semblable à
134
une étoile.
Elle pria le saint de remercier pour elle ses confrères, qui lui avaient été autant de bienfaiteurs, et qui avaient par leurs suffrages hâté son salut. Elle ajouta aussi qu’elle venait, comme ambassadrice des âmes du purgatoire, le conjurer de prêcher et d’étendre la dévotion du Rosaire, qui leur procurait chaque jour un admirable soulagement. « Que les confrères, dit-elle, appliquent à ces pauvres âmes les indulgences et les faveurs spirituelles dont il possèdent un trésor si abondant : ils n’y perdront rien, car les élus à leur tour intercèderont pour eux quand ils auront reçu la couronne. Les anges se réjouissent de cette dévotion, et la Reine du ciel s’est déclarée la tendre mère de tous ceux qui l’embrassent. »
Dominique, ravi de cette révélation nouvelle, en fit part à ses disciples, et travailla avec un redoublement de zèle à faire réciter autour de lui le chapelet.
39ème Merveille
TOURMENT APAISE
ps LXV, 12
Dieu, pour récompenser les trois enfants jeté dans la fournaise de Babylone, en changea les flammes en douce rosée et un vent rafraîchissant ; quasi ventum rosis flantem ; en sorte que, loin de souffrir et d’être consumés, ils éprouvaient une délicieuse jouissance. Par un miracle tout opposé, que nous allons dire, il fit d’une fontaine une véritable fournaise, pour la punition d’un de ses serviteurs, à qui il restait à expier une faute particulière.
Dans les vies des hommes illustres de l’ordre des Cisterciens, on lit qu’un abbé d’un grand savoir et de beaucoup de vertu avait connu une amitié trop humaine et trop partiale pour son neveu, élevé par lui dans le couvent, et formé de bonne heure à l’observance des règles. Après avoir longtemps administré la maison, étant réduit à l’extrémité, les religieux, qui lui étaient fort attachés et qui avaient la plus entière confiance dans ses lumières, le prièrent de désigner lui-même son successeur. Bien qu’il fût un modèle de désintéressement et de prudence, il se laissa aller à son
LA DEVOTION DU SAINT ROSAIRE
Fructifiez comme le rosier planté au bord des eaux
Eccli 39, 17
Ce que Pline assure de la rose, qu’elle reçoit de la nature non seulement l’office de nous embaumer de ses parfums, mais aussi d’être utile à notre santé, peut s’appliquer justement à la dévotion du Rosaire : car cette dévotion, outre le bonheur qu’elle procure à ceux qui l’embrassent, leur est très profitable pour les guérir à la fois du mal du péché et de la peine qui lui est réservée. En voici un exemple très convaincant.
Dans le royaume d’Arragon, une jeune fille de haute naissance, appelée Alexandra, assistant aux prédications du grand saint Dominique, se décida à entrer dans la confrérie instituée pour cet objet. Mais, livrée à la vanité mondaine, elle oubliait souvent de réciter son chapelet, préférant passer des heures entières au miroir et aux conversations inutiles. Comme elle était fort belle et gracieuse, plusieurs jeunes gens commencèrent à l’entourer de leurs hommages et à lui demander sa main, et chacun faisait de son mieux pour attirer ses regards et son cœur. Il y en avait deux surtout, d’une condition élevée, qui se montraient plus ardents à sa poursuite, et qui finirent par se défier en duel. La
132
jeune fille était présente pour décider entre les combattants, armés chacun d’une longue lance comme pour un tournoi. Au signal donné, ils se précipitèrent l’un sur l’autre avec tant de fureur, qu’ils tombèrent tous deux à la renverse, mutuellement frappés, et ne tardèrent pas à expirer. Ce fut un sujet de vive douleur pour les deux familles ; unissant leur colère contre celle qui avait été l’occasion de ce malheur, elles se jetèrent sur elle, et la battirent jusqu’à compromettre sa vie. Baignant dans son sang, l’infortunée demandait grâce et suppliait qu’on la laissât au moins se confesser ; mais ces furieux, s’animant de plus en plus, l’achevèrent en lui coupant la tête d’un coup de sabre ; après quoi, afin d’échapper à la justice, ils jetèrent le cadavre au fonds d’un puits et se sauvèrent.
Cependant, la divine MARIE, mère des miséricordes, voulut récompenser les quelques actes de piété de cette malheureuse enfant envers elle ; elle révéla tous les détails du crime à saint Dominique, qui se trouvait alors dans une autre ville. Le saint fut consterné ; il serait parti aussitôt pour se rendre en ce lieu-là, s’il n’avait été retenu par les affaires de son ordre. Au bout de quelques jours seulement, il put venir au bord du puits, y plongea le regard, et, après avoir fait une prière, se mit à appeler : « Alexandra, Alexandra ! » O prodige inouï ! En présence de plusieurs personnes que la venue du Père avait attirées, la morte s’anime, la tête se rapproche du tronc, et la voici qui sort pleine de vie, quoique couverte de sang ; elle se jette aux pieds de Dominique, et fait avec beaucoup de larmes une confession générale, en bénissant DIEU qui lui avait permis de se faire inscrire parmi les servantes de la
133
Reine du ciel.
Elle vécut encoure deux jours, afin de pouvoir réciter un certain nombre de rosaires qui lui avaient été imposés pour pénitence. On vint la voir de tous côtés, et elle ne cessait de prêcher la dévotion à MARIE.
Interrogée par le saint patriarche sur ce qui lui était arrivé après sa mort, elle raconta trois choses bien mémorables. La première, que, par les mérites de la confrérie du Rosaire, elle avait eu la grâce de la contrition au moment d’expirer, sans quoi elle eût été damnée. Secondement, quand on lui tranchait la tête, elle s’était vue assaillie d’une troupe de démons hideux qui voulaient l’emporter en enfer, lorsque MARIE était accourue à son aide et l’avait délivrée.
En troisième lieu, elle avait été condamnée par la divine justice, à deux cents années de purgatoire pour avoir causé la mort des deux jeunes gens ; en outre, à cause de ses parures vaines et immodestes, qui avaient été à beaucoup une occasion prochaine de péché, elle avait à endurer encore cinq cents autres années de souffrances. « Mais j’espère, ajouta-t-elle, que les confrères auxquels je m’étais associée pour honorer MARIE prieront pour moi avec tant de ferveur, que ce temps de terrible épreuve sera miséricordieusement abrégé. »
Elle mourut de nouveau, après avoir donné les marques de la plus édifiante piété. On lui fit des obsèques solennelles. Saint Dominique prit tellement à cœur l’heureuse fin du miracle que DIEU avait opéré par lui, il fit lui-même et fit faire à d’autres tant de pénitences, de prières, d’aumônes et de jeûnes, qu’il obtint la délivrance entière d’Alexandra. Au bout de quinze jours, elle lui apparut toute éclatante de lumière, semblable à
134
une étoile.
Elle pria le saint de remercier pour elle ses confrères, qui lui avaient été autant de bienfaiteurs, et qui avaient par leurs suffrages hâté son salut. Elle ajouta aussi qu’elle venait, comme ambassadrice des âmes du purgatoire, le conjurer de prêcher et d’étendre la dévotion du Rosaire, qui leur procurait chaque jour un admirable soulagement. « Que les confrères, dit-elle, appliquent à ces pauvres âmes les indulgences et les faveurs spirituelles dont il possèdent un trésor si abondant : ils n’y perdront rien, car les élus à leur tour intercèderont pour eux quand ils auront reçu la couronne. Les anges se réjouissent de cette dévotion, et la Reine du ciel s’est déclarée la tendre mère de tous ceux qui l’embrassent. »
Dominique, ravi de cette révélation nouvelle, en fit part à ses disciples, et travailla avec un redoublement de zèle à faire réciter autour de lui le chapelet.
39ème Merveille
TOURMENT APAISE
ps LXV, 12
Dieu, pour récompenser les trois enfants jeté dans la fournaise de Babylone, en changea les flammes en douce rosée et un vent rafraîchissant ; quasi ventum rosis flantem ; en sorte que, loin de souffrir et d’être consumés, ils éprouvaient une délicieuse jouissance. Par un miracle tout opposé, que nous allons dire, il fit d’une fontaine une véritable fournaise, pour la punition d’un de ses serviteurs, à qui il restait à expier une faute particulière.
Dans les vies des hommes illustres de l’ordre des Cisterciens, on lit qu’un abbé d’un grand savoir et de beaucoup de vertu avait connu une amitié trop humaine et trop partiale pour son neveu, élevé par lui dans le couvent, et formé de bonne heure à l’observance des règles. Après avoir longtemps administré la maison, étant réduit à l’extrémité, les religieux, qui lui étaient fort attachés et qui avaient la plus entière confiance dans ses lumières, le prièrent de désigner lui-même son successeur. Bien qu’il fût un modèle de désintéressement et de prudence, il se laissa aller à son
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
41ème Merveille
Oeuvres d'insigne charité envers les âmes du purgatoire la charité est
patiente elle est bienveillante elle endure tout ( I Cor. XIII.) la
véritable charité est pleine de zèle d'industrie même pour trouver les
moyens de subvenir aux nécessités du prochain et spécialement à celles des
âmes du purgatoire nous rencontrons un modèle de cette disposition dans la
grande servante de Dieu Marie Villani de l'ordre de Saint-Dominique elle
s'appliquait nuit et jour à inventer de nouvelles oeuvres méritoires en
faveur de ces pauvres âmes une veille d'Epiphanie elle s'était adonnée à de
plus longues oraisons et en satisfaction des peines que ces âmes devaient
endurer pour leurs fautes elle offrait à Dieu les cruels tourments de la
Passion de Notre Seigneur méditant sur chaque détail chaque douleur chaque
instrument la nuit suivante le Ciel se plut à lui manifester combien lui
était agréable cette belle pratique pendant sa prière elle tomba en extase
il lui sembla voir une longue procession de personnes vêtues de blanc avec
des manteaux éclatants chacune portant un insigne de la passion celle-ci les
cordes cette autre les fouets une troisième la colonne une autre les épines
141
la croix les clous la lance etc en tête marchait une vierge balançant dans
sa main une palme arrivés à un magnifique autel l'une après l'autre y venait
offrir et déposer l'instrument en place duquel elle recevait d'une grande
dame une riche couronne d'or le sens de cette vision lui fut révélé ces
personnes brillantes et couronnées étaient les âmes du purgatoire dont les
insignes de la passion marquaient la délivrance par les mérites du sang de
Jésus-Christ mérites appliqués précisément en vertu de la prière de Villani
c'était elle qui était figurée par la vierge ayant une palme à la main et
conduisant à l'autel cette troupe bénie un autre jour celui de la
Commémoration des fidèles défunts on lui avait demandé de continuer un livre
qu'elle avait commencé sur des matières spirituelles mais elle s'en excusa
sur l'intention qu'elle avait de consacrer tout ce jour à la prière à la
pénitence et aux exercices de piété pour le soulagement des âmes du
purgatoire Notre Seigneur lui apparut et lui intima l'ordre d'écrire parce
que telle était sa volonté souveraine et afin qu'elle le fît plus volontiers
il lui promit que chaque ligne qu'elle tracerait procurerait la délivrance
d'une âme ce jour-là seulement aussitôt la sainte religieuse se mit avec
joie au travail et s'efforça d'écrire beaucoup le démon ne manqua pas de s'y
opposer de toutes ses forces même d'une manière sensible la distrayant de
son ouvrage lui suscitant des embarras des dérangements des difficultés
matérielles en dépit de lui Villani s'appliqua si bien qu'à la fin du jour
elle avait terminé son traité les quatres jours suivants elle ressentit une
telle fatigue qu'elle ne pouvait pas même
142
remuer les doigts de la main on pouvait croire que par-là aussi elle
méritait pour ses chères âmes et de fait sa grande charité envers elles ne
se bornait point à des prières des jeûnes et des pénitences elle désira
prendre pour elle-même une partie de leurs souffrances spécialement celle du
feu voici un exemple de ce qu'elle fit comme elle priait un jour dans cette
intention elle fut ravie en esprit et conduite en purgatoire ou parmi tous
les infortunés qu'elle vit il y en avait un plus cruellement éprouvé que les
autres par des flammes horribles qui l'enveloppaient de la tête aux pieds
touchée de compassion elle s'approche de cette âme et lui demande pour quel
sujet elle est ainsi traitée et si jamais elle n'éprouve de soulagement " je
suis ici, répondit-elle depuis un long temps effroyablement punie pour mes
vanités passées et pour mon luxe scandaleux je n'ai pas obtenu jusqu'à cette
heure, le moindre soulagement parce que le Seigneur a permis que je fusse
oubliée de mes parents de mes enfants de toute ma famille et de mes amis ils
ne font pour moi aucune prière quand j'étais sur la terre livrée aux
toilettes inutiles aux pompes mondaines aux fêtes et aux plaisirs je n'avais
de Dieu et de mes devoirs qu'un rare et infructueux souvenir les seules
préoccupations sérieuses de ma vie étaient d'accroître le renom et les
richesses périssables des miens j'en suis bien punie vous le voyez
puisqu'ils ne m'accordent pas même une pensée !" ce récit fit sur notre
religieuse une douloureuse impression elle pria cette âme de lui faire
sentir quelque chose de ce qu'elle endurait a l'instant même il lui sembla
qu'on la touchait au front avec un doigt de feu et la douleur qu'elle en
éprouva fut si forte si aigue
143
qu'elle la fit revenir de son extase or la marque lui resta au front si
profondément marquée qu'on la voyait encore deux mois après et qu'elle lui
causait une souffrance insupportable Villani offrit cette douleur avec
d'autres prières pour l'âme qui lui avait parlé cette âme lui apparut au
bout de deux mois et lui dit que délivrée par son intercession elle montait
au ciel dès ce moment la brûlure du front s'effaça pour toujours (V. Vita
Mariae Villani, par le P. Domin. Marchi, I. II,5)
143
42ème Merveille supplication merveilleuse.
Ouvrez la main au pauvre afin que votre
sacrifice d'expiation soit parfait ( Eccli. VII, 56)
parmi les nombreux
prodiges accomplis par le Seigneur à l'occasion des prières solennelles pour
les morts l'un des plus célèbres est celui qui eut lieu à Mantoue dans le
monastère de Saint-Vincent en présence de toute la communauté une religieuse
nommée Paule de l'ordre de Saint-Dominique après une vie sanctifiée par les
plus excellentes vertus et une mort précieuse aux yeux des hommes montra que
devant le Seigneur qui sonde les coeurs et les reins il n'y a point de
perfections humaine qui n'ait ses taches le corps avait été apporté
144
à l'église et placé selon l'usage au milieu du choeur toutes les soeurs
faisant autour du modeste catafalque une couronne chantaient pieusement les
prières ordinaires du Requiem on avait exhorté spécialement la bienheureuse
Etiennette Quinzana favorisée de dons singuliers à intercéder avec toute la
ferveur dont elle était capable pour le sa lut de la défunte et à
d'autant meilleur droit que ces deux saintes filles avaient été liées
d'amitié spirituelle toute au profit de leurs âmes Etiennette donc mue d'un
sentiment personnel d'affection s'approcha de la bière les mains jointes et
se mit à réciter avec grande ardeur les psaumes de circonstance tout-à-coup
la morte laisse tomber un petit crucifix qu'elle tenait étend la main gauche
vers la droite de son amie et la serre de telle façon qu'aucun effort ne la
lui peut arracher la communauté entière qui était présente demeura
stupéfaite pendant plus d'une heure ces deux mains restèrent étroitement
enlacées au bout de ce temps intervint le supérieur qui commanda à la
défunte au nom de la sainte obéissance de laisser la soeur Quinzana
instantanément il fut obéi comme si la vertu d'une telle personne n'eût subi
aucun changement au-delà du tombeau que signifiait ce serrement de main ?
Etiennette le comprit parfaitement soit que Paule eût adressé
miraculeusement la parole soit qu'elle eût agi sur son esprit l'histoire n'a
point éclairci ce détail toujours est-il que celle-ci interpréta la chose
par ce discours "Secourez-moi ,ma soeur ,secourez-moi dans les supplices
auxquels je suis vouée ! Oh si vous saviez la rage de nos ennemis invisibles
pour nous tenter à l'heure de la mort ! si vous saviez combien sévère est ce
juge qui
145
exige notre amour parfait quel examen quelle discussion des moindres fautes
et puis quelle expiation avant la récompense comme il faut être pur pour
ceindre l'éternelle couronne priez donc pour moi maintenant placez-vous
entre le Seigneur et sa servante priez priez faites pénitence à ma place !"
Etiennette entendit ce touchant langage et se mit à accomplir toutes sortes
d'oeuvres méritoires pour son amie jusqu'au moment ou elle sut par
révélation que la porte du ciel ouverte à Paule et que Dieu l'avait enfin
reçue dans son sein comment donc ô Seigneur ne tremblerions-nous pas pour
nous-mêmes et quel est le sacrifice que nous ne consentirions point à faire
pour vous apaiser nous dont la vie ne se compose guère que d'offenses ! (V.
Franc. Seghizzus, Vita B. Stephanae, p. 110; J - B Manni, Sacr. Trig., disc.
VI, n.27.)
Oeuvres d'insigne charité envers les âmes du purgatoire la charité est
patiente elle est bienveillante elle endure tout ( I Cor. XIII.) la
véritable charité est pleine de zèle d'industrie même pour trouver les
moyens de subvenir aux nécessités du prochain et spécialement à celles des
âmes du purgatoire nous rencontrons un modèle de cette disposition dans la
grande servante de Dieu Marie Villani de l'ordre de Saint-Dominique elle
s'appliquait nuit et jour à inventer de nouvelles oeuvres méritoires en
faveur de ces pauvres âmes une veille d'Epiphanie elle s'était adonnée à de
plus longues oraisons et en satisfaction des peines que ces âmes devaient
endurer pour leurs fautes elle offrait à Dieu les cruels tourments de la
Passion de Notre Seigneur méditant sur chaque détail chaque douleur chaque
instrument la nuit suivante le Ciel se plut à lui manifester combien lui
était agréable cette belle pratique pendant sa prière elle tomba en extase
il lui sembla voir une longue procession de personnes vêtues de blanc avec
des manteaux éclatants chacune portant un insigne de la passion celle-ci les
cordes cette autre les fouets une troisième la colonne une autre les épines
141
la croix les clous la lance etc en tête marchait une vierge balançant dans
sa main une palme arrivés à un magnifique autel l'une après l'autre y venait
offrir et déposer l'instrument en place duquel elle recevait d'une grande
dame une riche couronne d'or le sens de cette vision lui fut révélé ces
personnes brillantes et couronnées étaient les âmes du purgatoire dont les
insignes de la passion marquaient la délivrance par les mérites du sang de
Jésus-Christ mérites appliqués précisément en vertu de la prière de Villani
c'était elle qui était figurée par la vierge ayant une palme à la main et
conduisant à l'autel cette troupe bénie un autre jour celui de la
Commémoration des fidèles défunts on lui avait demandé de continuer un livre
qu'elle avait commencé sur des matières spirituelles mais elle s'en excusa
sur l'intention qu'elle avait de consacrer tout ce jour à la prière à la
pénitence et aux exercices de piété pour le soulagement des âmes du
purgatoire Notre Seigneur lui apparut et lui intima l'ordre d'écrire parce
que telle était sa volonté souveraine et afin qu'elle le fît plus volontiers
il lui promit que chaque ligne qu'elle tracerait procurerait la délivrance
d'une âme ce jour-là seulement aussitôt la sainte religieuse se mit avec
joie au travail et s'efforça d'écrire beaucoup le démon ne manqua pas de s'y
opposer de toutes ses forces même d'une manière sensible la distrayant de
son ouvrage lui suscitant des embarras des dérangements des difficultés
matérielles en dépit de lui Villani s'appliqua si bien qu'à la fin du jour
elle avait terminé son traité les quatres jours suivants elle ressentit une
telle fatigue qu'elle ne pouvait pas même
142
remuer les doigts de la main on pouvait croire que par-là aussi elle
méritait pour ses chères âmes et de fait sa grande charité envers elles ne
se bornait point à des prières des jeûnes et des pénitences elle désira
prendre pour elle-même une partie de leurs souffrances spécialement celle du
feu voici un exemple de ce qu'elle fit comme elle priait un jour dans cette
intention elle fut ravie en esprit et conduite en purgatoire ou parmi tous
les infortunés qu'elle vit il y en avait un plus cruellement éprouvé que les
autres par des flammes horribles qui l'enveloppaient de la tête aux pieds
touchée de compassion elle s'approche de cette âme et lui demande pour quel
sujet elle est ainsi traitée et si jamais elle n'éprouve de soulagement " je
suis ici, répondit-elle depuis un long temps effroyablement punie pour mes
vanités passées et pour mon luxe scandaleux je n'ai pas obtenu jusqu'à cette
heure, le moindre soulagement parce que le Seigneur a permis que je fusse
oubliée de mes parents de mes enfants de toute ma famille et de mes amis ils
ne font pour moi aucune prière quand j'étais sur la terre livrée aux
toilettes inutiles aux pompes mondaines aux fêtes et aux plaisirs je n'avais
de Dieu et de mes devoirs qu'un rare et infructueux souvenir les seules
préoccupations sérieuses de ma vie étaient d'accroître le renom et les
richesses périssables des miens j'en suis bien punie vous le voyez
puisqu'ils ne m'accordent pas même une pensée !" ce récit fit sur notre
religieuse une douloureuse impression elle pria cette âme de lui faire
sentir quelque chose de ce qu'elle endurait a l'instant même il lui sembla
qu'on la touchait au front avec un doigt de feu et la douleur qu'elle en
éprouva fut si forte si aigue
143
qu'elle la fit revenir de son extase or la marque lui resta au front si
profondément marquée qu'on la voyait encore deux mois après et qu'elle lui
causait une souffrance insupportable Villani offrit cette douleur avec
d'autres prières pour l'âme qui lui avait parlé cette âme lui apparut au
bout de deux mois et lui dit que délivrée par son intercession elle montait
au ciel dès ce moment la brûlure du front s'effaça pour toujours (V. Vita
Mariae Villani, par le P. Domin. Marchi, I. II,5)
143
42ème Merveille supplication merveilleuse.
Ouvrez la main au pauvre afin que votre
sacrifice d'expiation soit parfait ( Eccli. VII, 56)
parmi les nombreux
prodiges accomplis par le Seigneur à l'occasion des prières solennelles pour
les morts l'un des plus célèbres est celui qui eut lieu à Mantoue dans le
monastère de Saint-Vincent en présence de toute la communauté une religieuse
nommée Paule de l'ordre de Saint-Dominique après une vie sanctifiée par les
plus excellentes vertus et une mort précieuse aux yeux des hommes montra que
devant le Seigneur qui sonde les coeurs et les reins il n'y a point de
perfections humaine qui n'ait ses taches le corps avait été apporté
144
à l'église et placé selon l'usage au milieu du choeur toutes les soeurs
faisant autour du modeste catafalque une couronne chantaient pieusement les
prières ordinaires du Requiem on avait exhorté spécialement la bienheureuse
Etiennette Quinzana favorisée de dons singuliers à intercéder avec toute la
ferveur dont elle était capable pour le sa lut de la défunte et à
d'autant meilleur droit que ces deux saintes filles avaient été liées
d'amitié spirituelle toute au profit de leurs âmes Etiennette donc mue d'un
sentiment personnel d'affection s'approcha de la bière les mains jointes et
se mit à réciter avec grande ardeur les psaumes de circonstance tout-à-coup
la morte laisse tomber un petit crucifix qu'elle tenait étend la main gauche
vers la droite de son amie et la serre de telle façon qu'aucun effort ne la
lui peut arracher la communauté entière qui était présente demeura
stupéfaite pendant plus d'une heure ces deux mains restèrent étroitement
enlacées au bout de ce temps intervint le supérieur qui commanda à la
défunte au nom de la sainte obéissance de laisser la soeur Quinzana
instantanément il fut obéi comme si la vertu d'une telle personne n'eût subi
aucun changement au-delà du tombeau que signifiait ce serrement de main ?
Etiennette le comprit parfaitement soit que Paule eût adressé
miraculeusement la parole soit qu'elle eût agi sur son esprit l'histoire n'a
point éclairci ce détail toujours est-il que celle-ci interpréta la chose
par ce discours "Secourez-moi ,ma soeur ,secourez-moi dans les supplices
auxquels je suis vouée ! Oh si vous saviez la rage de nos ennemis invisibles
pour nous tenter à l'heure de la mort ! si vous saviez combien sévère est ce
juge qui
145
exige notre amour parfait quel examen quelle discussion des moindres fautes
et puis quelle expiation avant la récompense comme il faut être pur pour
ceindre l'éternelle couronne priez donc pour moi maintenant placez-vous
entre le Seigneur et sa servante priez priez faites pénitence à ma place !"
Etiennette entendit ce touchant langage et se mit à accomplir toutes sortes
d'oeuvres méritoires pour son amie jusqu'au moment ou elle sut par
révélation que la porte du ciel ouverte à Paule et que Dieu l'avait enfin
reçue dans son sein comment donc ô Seigneur ne tremblerions-nous pas pour
nous-mêmes et quel est le sacrifice que nous ne consentirions point à faire
pour vous apaiser nous dont la vie ne se compose guère que d'offenses ! (V.
Franc. Seghizzus, Vita B. Stephanae, p. 110; J - B Manni, Sacr. Trig., disc.
VI, n.27.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
43ème Merveille
Bienfaits des âmes du purgatoire envers ceux qui les assistent
soyez miséricordieux car vous amassez ainsi un trésor pour le jour du besoin (Tob.
IV, 10.)
Plusieurs auteurs ont rapporté le merveilleux secours que reçut des
âmes du purgatoire Christophe Sandoval
146
archevèque de Séville n'étant encore qu'un enfant il avait l'habitude de
distribuer aux pauvres en leur faveur une partie de l'argent qu'on lui
remettait pour ses menus plaisirs devenu grand sa piété envers les morts
augmenta avec les années il donnait pour eux tout ce dont il pouvait
disposer jusqu'à se priver de mille choses qui lui eussent été utiles ou
nécessaires lorsqu'il suivait les cours de l'université de Louvain ou il
exerçait les mêmes oeuvres il arriva un jour que les lettres qu'il attendait
d'Espagne ayant tardé il se trouva réduit à une véritable extrémité n'ayant
pas même de quoi prendre son repas sa peine augmenta beaucoup en se voyant
obligé de refuser un pauvre qui lui demandait l'aumône au nom des âmes du
purgatoire ce qu'il n'avait encore jamais fait il en conçut un si vif
chagrin qu'il entra aussitôt dans une église "Au moins se disait-il si je
ne puis donner d'argent au nom de ces pauvres âmes je prierai pour elles
étant pauvre moi-même et dénué de tout il n'avait pas fini sa prière qu'il
vit venir à lui un beau jeune homme en habits de voyageur qui lui adressa un
salut à la fois respectueux et empressé Christophe resta tout interdit
effrayé même comme s'il se trouvait en présence d'une apparition de l'autre
monde mais il se rassura bientôt lorsque celui-ci lui parlant avec beaucoup
de politesse lui donna des nouvelles du marquis de Dania son père de ses
autres parents de ses amis absolument comme s'il arrivait à l'heure même de
la péninsule il finit par le prier de venir avec lui à l'hôtel ou il
l'invitait à diner Sandoval ne refuse point cette offre parce qu'il n'avait
pas mangé de la journée ils se mettent donc à table et continuent
147
de s'entretenir pendant le repas après lequel l'étranger lui remit une
certaine somme lui disant d'en faire tel usage qu'il lui plairait parce que
quand il le voudrait il se la ferait rendre par le marquis son père en
Espagne puis il prétexte quelques affaires et se retire or quels que fussent
depuis les soins et les démarches de pieux Christophe il ne put découvrir
son inconnu ni à Louvain ni en Espagne personne ne l'avait vu jamais
l'argent ne fut réclamé auprès de sa famille et il se trouva que c'était
exactement la somme dont il avait besoin pour attendre ses lettres en retard
il se persuada donc que le Ciel avait fait un miracle en lui envoyant une de
ces âmes que ses prières et ses aumônes soulageaint habituellement et il le
crut à d'autant meilleur droit que ce fut aussi l'avis du pape Clément VIII
auquel il raconta l'histoire en allant à Rome pour ses bulles d'évèques ce
pontife frappé de ces circonstances lui fit un devoir de les publier afin
que les fidèles fussent encouragés par là à intercéder pour les défunts et à
faire grand cas de cet acte de charité le saint archevèque on le conçoit fut
toute sa vie rempli de zèle à promouvoir dans sa patrie une si généreuse
dévotion et il réussit à l'inspirer à une foule de coeurs autour de lui (V.
Martin de Roa, de statu animar., c XXI.)
148
44ème Merveille
la sainte communion pour les morts
déposez votre pain sur le tombeau du juste (Tob. IV, 18.)
l'objet du présent ouvrage n'est point d'aborder les
questions théologiques ni d'expliquer comment la sainte communion faite par
les vivants est utile aux morts qui ont encore à expier leurs fautes les
docteurs ont savamment établi cette doctrine et on les peut consulter il
nous suffit de rappeler que cet acte pieux le plus sublime de la religion
procure à Dieu une gloire telle qu'elle répare l'injure du péché dans une
mesure que lui seul définit mais qui est considérable l'humilité la
contrition la ferveur l'amour dont l'âme se pénètre alors sont d'ailleurs de
leur nature des oeuvres satisfactoires d'un haut prix principalement lorsque
le divin Sauveur soleil de justice et foyer de charité réside au milieu
d'elle et puis de grandes indulgences sont attachées souvent à la communion
dans une circonstance déterminée c'est d'après ces diverses considérations
que plusieurs interprètes appliquent à la communion pour les défunts le mot
de Tobie que j'ai écrit ci-dessus come épigraphe :" Mettez votre pain sur le
tombeau du juste." Voyons plutôt des exemples
149
Le vénérable Louis de Blois célèbre maître de la vie spirituelle et homme
d'une remarquable sagesse rapporte dans un de ses livres qu'un dévot
serviteur de Dieu qu'il connaissait et aimait fut visité par une âme du
purgatoire qui lui fit voir tout ce qu'elle endurait de tourments elle était
punie pour avoir reçu la divine Eucharistie avec une préparation
insuffisante et beaucoup de tiédeur et en expiation l'éternelle justice lui
avait ménagé le supplice d'un feu dévorant qui la consumait " je vous
conjure donc dit-elle vous qui avez été mon ami et qui devez l'être encore
au nom de notre fidèle union de communier une fois en mon nom et de le faire
avec toute l'ardeur et la charité dont vous êtes capable j'espère que cela
suffira pour ma délivrance et qu'ainsi seront compensées mes coupables
froideurs." Celui-ci s'empressa de le faire l'âme lui apparut de nouveau
brillante d'un incomparable éclat heureuse et pleine de reconnaissance "
Enfin lui dit-elle grâce à vous mon adorable Maitre !" N'est-ce pas le cas
de rappeler le conseil de saint Bonaventure : " Que la charité vous porte à
communier car, il n'y a rien de plus efficace pour le repos éternel des
défunts ( De proepar. Missae.)" plus merveilleux encore est ce qui arriva à
la bienheureuse Jeanne de la Croix religieuse de l'ordre de Saint-François à
laquelle les anges apportèrent une,hostie consacrée afin qu'elle communiât
pour la délivrance d'une âme autrefois pleine de dévotion envers l'auguste
Sacrement pendant une de ses oraisons la sainte fut ravie en esprit et
demeura quelque temps dans cet état privée de sentiment une religieuse étant
150
entrée dans sa cellule la tira de cette extase par le bruit qu'elle fit en
dérangeant un meuble " Retirez-vous lui dit vivement Jeanne et faites bien
attention de ne pas toucher à l'objet précieux qui est là sur ce linge car
c'est le divin sacrement apporté ici par les anges et coment cela peut-il
être ? " demanda la soeur étonnée Jeanne lui fit alors part de ce qui était
arrivé lui en demandant le secret un pêcheur endurci qui avait toujours vécu
dans la disgrâce du Seigneur et qui venait d'être condamné au feu de l'enfer
était mort avec le saint viatique dans la bouche on avait cru en le lui
donnant à une conversion trompeuse les anges ajouta-t-elle n'avaient pu
souffrir une telle profanation ni que la divine hostie restât dans cette
bouche impure et ils l'avaient apportée à la servante de Dieu " De plus
continua Jeanne ils m'ont ordonné de communier demain matin en faveur d'une
âme du purgatoire qui eut une grande dévotion pour l'Eucharistie ce sont les
mêmes anges qui m'ont retirée de mon extase à votre arrivée afin que je vous
prévinsse de ne point toucher un objet si sacré." Elle communia en effet de
cette manière dans les sentiments de la plus ardente piété et elle fut
assurée que l'âme pour laquelle elle avait intercédé était montée au ciel
(V. Louis de Blois, Monile spirituale, ch. VI ; Alex. Segala, Triumph.
animar., 2e part., ch.6, ex.6; Vie de la bienh. jeanne de la croix, ch.
VII.)
Bienfaits des âmes du purgatoire envers ceux qui les assistent
soyez miséricordieux car vous amassez ainsi un trésor pour le jour du besoin (Tob.
IV, 10.)
Plusieurs auteurs ont rapporté le merveilleux secours que reçut des
âmes du purgatoire Christophe Sandoval
146
archevèque de Séville n'étant encore qu'un enfant il avait l'habitude de
distribuer aux pauvres en leur faveur une partie de l'argent qu'on lui
remettait pour ses menus plaisirs devenu grand sa piété envers les morts
augmenta avec les années il donnait pour eux tout ce dont il pouvait
disposer jusqu'à se priver de mille choses qui lui eussent été utiles ou
nécessaires lorsqu'il suivait les cours de l'université de Louvain ou il
exerçait les mêmes oeuvres il arriva un jour que les lettres qu'il attendait
d'Espagne ayant tardé il se trouva réduit à une véritable extrémité n'ayant
pas même de quoi prendre son repas sa peine augmenta beaucoup en se voyant
obligé de refuser un pauvre qui lui demandait l'aumône au nom des âmes du
purgatoire ce qu'il n'avait encore jamais fait il en conçut un si vif
chagrin qu'il entra aussitôt dans une église "Au moins se disait-il si je
ne puis donner d'argent au nom de ces pauvres âmes je prierai pour elles
étant pauvre moi-même et dénué de tout il n'avait pas fini sa prière qu'il
vit venir à lui un beau jeune homme en habits de voyageur qui lui adressa un
salut à la fois respectueux et empressé Christophe resta tout interdit
effrayé même comme s'il se trouvait en présence d'une apparition de l'autre
monde mais il se rassura bientôt lorsque celui-ci lui parlant avec beaucoup
de politesse lui donna des nouvelles du marquis de Dania son père de ses
autres parents de ses amis absolument comme s'il arrivait à l'heure même de
la péninsule il finit par le prier de venir avec lui à l'hôtel ou il
l'invitait à diner Sandoval ne refuse point cette offre parce qu'il n'avait
pas mangé de la journée ils se mettent donc à table et continuent
147
de s'entretenir pendant le repas après lequel l'étranger lui remit une
certaine somme lui disant d'en faire tel usage qu'il lui plairait parce que
quand il le voudrait il se la ferait rendre par le marquis son père en
Espagne puis il prétexte quelques affaires et se retire or quels que fussent
depuis les soins et les démarches de pieux Christophe il ne put découvrir
son inconnu ni à Louvain ni en Espagne personne ne l'avait vu jamais
l'argent ne fut réclamé auprès de sa famille et il se trouva que c'était
exactement la somme dont il avait besoin pour attendre ses lettres en retard
il se persuada donc que le Ciel avait fait un miracle en lui envoyant une de
ces âmes que ses prières et ses aumônes soulageaint habituellement et il le
crut à d'autant meilleur droit que ce fut aussi l'avis du pape Clément VIII
auquel il raconta l'histoire en allant à Rome pour ses bulles d'évèques ce
pontife frappé de ces circonstances lui fit un devoir de les publier afin
que les fidèles fussent encouragés par là à intercéder pour les défunts et à
faire grand cas de cet acte de charité le saint archevèque on le conçoit fut
toute sa vie rempli de zèle à promouvoir dans sa patrie une si généreuse
dévotion et il réussit à l'inspirer à une foule de coeurs autour de lui (V.
Martin de Roa, de statu animar., c XXI.)
148
44ème Merveille
la sainte communion pour les morts
déposez votre pain sur le tombeau du juste (Tob. IV, 18.)
l'objet du présent ouvrage n'est point d'aborder les
questions théologiques ni d'expliquer comment la sainte communion faite par
les vivants est utile aux morts qui ont encore à expier leurs fautes les
docteurs ont savamment établi cette doctrine et on les peut consulter il
nous suffit de rappeler que cet acte pieux le plus sublime de la religion
procure à Dieu une gloire telle qu'elle répare l'injure du péché dans une
mesure que lui seul définit mais qui est considérable l'humilité la
contrition la ferveur l'amour dont l'âme se pénètre alors sont d'ailleurs de
leur nature des oeuvres satisfactoires d'un haut prix principalement lorsque
le divin Sauveur soleil de justice et foyer de charité réside au milieu
d'elle et puis de grandes indulgences sont attachées souvent à la communion
dans une circonstance déterminée c'est d'après ces diverses considérations
que plusieurs interprètes appliquent à la communion pour les défunts le mot
de Tobie que j'ai écrit ci-dessus come épigraphe :" Mettez votre pain sur le
tombeau du juste." Voyons plutôt des exemples
149
Le vénérable Louis de Blois célèbre maître de la vie spirituelle et homme
d'une remarquable sagesse rapporte dans un de ses livres qu'un dévot
serviteur de Dieu qu'il connaissait et aimait fut visité par une âme du
purgatoire qui lui fit voir tout ce qu'elle endurait de tourments elle était
punie pour avoir reçu la divine Eucharistie avec une préparation
insuffisante et beaucoup de tiédeur et en expiation l'éternelle justice lui
avait ménagé le supplice d'un feu dévorant qui la consumait " je vous
conjure donc dit-elle vous qui avez été mon ami et qui devez l'être encore
au nom de notre fidèle union de communier une fois en mon nom et de le faire
avec toute l'ardeur et la charité dont vous êtes capable j'espère que cela
suffira pour ma délivrance et qu'ainsi seront compensées mes coupables
froideurs." Celui-ci s'empressa de le faire l'âme lui apparut de nouveau
brillante d'un incomparable éclat heureuse et pleine de reconnaissance "
Enfin lui dit-elle grâce à vous mon adorable Maitre !" N'est-ce pas le cas
de rappeler le conseil de saint Bonaventure : " Que la charité vous porte à
communier car, il n'y a rien de plus efficace pour le repos éternel des
défunts ( De proepar. Missae.)" plus merveilleux encore est ce qui arriva à
la bienheureuse Jeanne de la Croix religieuse de l'ordre de Saint-François à
laquelle les anges apportèrent une,hostie consacrée afin qu'elle communiât
pour la délivrance d'une âme autrefois pleine de dévotion envers l'auguste
Sacrement pendant une de ses oraisons la sainte fut ravie en esprit et
demeura quelque temps dans cet état privée de sentiment une religieuse étant
150
entrée dans sa cellule la tira de cette extase par le bruit qu'elle fit en
dérangeant un meuble " Retirez-vous lui dit vivement Jeanne et faites bien
attention de ne pas toucher à l'objet précieux qui est là sur ce linge car
c'est le divin sacrement apporté ici par les anges et coment cela peut-il
être ? " demanda la soeur étonnée Jeanne lui fit alors part de ce qui était
arrivé lui en demandant le secret un pêcheur endurci qui avait toujours vécu
dans la disgrâce du Seigneur et qui venait d'être condamné au feu de l'enfer
était mort avec le saint viatique dans la bouche on avait cru en le lui
donnant à une conversion trompeuse les anges ajouta-t-elle n'avaient pu
souffrir une telle profanation ni que la divine hostie restât dans cette
bouche impure et ils l'avaient apportée à la servante de Dieu " De plus
continua Jeanne ils m'ont ordonné de communier demain matin en faveur d'une
âme du purgatoire qui eut une grande dévotion pour l'Eucharistie ce sont les
mêmes anges qui m'ont retirée de mon extase à votre arrivée afin que je vous
prévinsse de ne point toucher un objet si sacré." Elle communia en effet de
cette manière dans les sentiments de la plus ardente piété et elle fut
assurée que l'âme pour laquelle elle avait intercédé était montée au ciel
(V. Louis de Blois, Monile spirituale, ch. VI ; Alex. Segala, Triumph.
animar., 2e part., ch.6, ex.6; Vie de la bienh. jeanne de la croix, ch.
VII.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
45ème Merveille
la divine eucharistie vous avez préparé pour moi un banquet contre ceux qui
m'oppriment (ps. XXII, 5.)
puisque nous avons parlé de la sainte communion
nous sommes amené naturellement à dire aussi quelque chose de celle qui se
fait chaque mois dans les églises de la Compagnie de Jésus pour le
soulagement des âmes du purgatoire les docteurs ont vu le symbole du divin
Sacrement dans l'arbre de vie planté au milieu du paradis suivant saint Jean
(Apoc.XXII) et qui donnait chaque année douze fruits un par mois ses
feuilles même étaient utiles au salut des nations : Lignum vitae afferens
fructus duodecim, per menses singulos reddens fructum suum ; et folia ligni
ad sanitatem gentium." c 'est en particulier l'interprétation de saint
Thomas d'Aquin (Opusc. de Sacr. alt.VI) " De même dit-il que la corruption
et la mort nous sont venues d'une nourriture défendue c'est-à-dire de
l'arbre de la science du bien et du mal ainsi la justification et la vie
doivent commencer en nous par une nourriture sainte celle de l'arbre de la
vie qui est le corps du Seigneur." Si donc l'Eucharistie est bien
représentée par ces douze fruits annuels de l'arbre on voit com -
46ème Merveille VIDE SUR LE SITE
47ème Merveille VIDE SUR LE SITE
48ème Merveille VIDE SUR LE SITE
49ème Merveille VIDE SUR LE SITE
50ème Merveille VIDE SUR LE SITE
51ème Merveille VIDE SUR LE SITE
la divine eucharistie vous avez préparé pour moi un banquet contre ceux qui
m'oppriment (ps. XXII, 5.)
puisque nous avons parlé de la sainte communion
nous sommes amené naturellement à dire aussi quelque chose de celle qui se
fait chaque mois dans les églises de la Compagnie de Jésus pour le
soulagement des âmes du purgatoire les docteurs ont vu le symbole du divin
Sacrement dans l'arbre de vie planté au milieu du paradis suivant saint Jean
(Apoc.XXII) et qui donnait chaque année douze fruits un par mois ses
feuilles même étaient utiles au salut des nations : Lignum vitae afferens
fructus duodecim, per menses singulos reddens fructum suum ; et folia ligni
ad sanitatem gentium." c 'est en particulier l'interprétation de saint
Thomas d'Aquin (Opusc. de Sacr. alt.VI) " De même dit-il que la corruption
et la mort nous sont venues d'une nourriture défendue c'est-à-dire de
l'arbre de la science du bien et du mal ainsi la justification et la vie
doivent commencer en nous par une nourriture sainte celle de l'arbre de la
vie qui est le corps du Seigneur." Si donc l'Eucharistie est bien
représentée par ces douze fruits annuels de l'arbre on voit com -
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Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
SECONDE PARTIE
Introduction 172
176
52ème Merveille
177
178
Récité le rosaire, comme il en avait l’habitude malgré ses tristes débordements, il commença à s’acquitter de ce tribut de dévotion envers la Mère du Celui qu’il était sur le point de grièvement offenser, et il le fit en faveur des âmes de ces malheureux suppliciés, pour lesquels sans doute personne ne pensait à intercéder. La récompense ne se fit pas attendre.
Une voix forte lui cria : »Arrêtez, cavalier, n’allez plus avant ! »Il regarde autour de lui, ne voit que les cadavres et donne de l’éperon à son cheval. La même voix recommence : »Arrêtez, vous dis-je ; n’allez pas plus loin ! »La peur lui était inconnue ; il descend et se met à chercher, parmi ces hideux restes ; à moitié mangés par les corbeaux, s’il n’y avait pas quelque condamné vivant encore. En effet, d’une des potences descend cette supplication : »Cavalier, je vous prie par pitié de couper cette corde qui m’étrangle. »Touché de compassion autant que surpris, il donne un coup d’épée à ce lien , et le corps tombe à terre, d’où il se relève ; et voilà un homme plein de vie, qui se répand en remerciements, et proteste qu’il ne quittera plus son bienfaiteur, son sauveur, qu’il le servira comme un esclave. Le jeune aventurier refusa tout net cette offre de reconnaissance, et déclara qu’il voulait aller seul.-« Mais reprit l’autre, ignorez-vous qu’un danger extrême vous attend au bout de votre course, qu’il y va pour vous de la vie même ? Je veux vous délivrer. Laissez-moi vous marquer ma reconnaissance. »Se voyant ainsi découvert, notre cavalier ne fit pas d’objection. Il remonta à cheval et prit son nouveau compagnon en croupe. Ils ne tardèrent pas à apercevoir la maison ; l’échelle était préparée. Le jeune homme voulait s’y
179
risquer tout de suite. »Non pas, dit son compagnon ; je soupçonne quelque machine, et , si vous m’en croyez, vous me laisserez monter le premier, afin que je m’assure de tout. Donnez-moi seulement votre chapeau et votre manteau. »Quand il les eut, il s’élança à l’échelle et pénétra par la fenêtre entr’ouverte. Au même instant on entendit un cliquetis d’armes, des menaces, des cris de colère, et au bout de quelques secondes, un corps frappé d’un coup d’épée tombait au pied du mur. Il se releva et dit au jeune homme stupéfait : »Vite ! vite ! à cheval, et sauvons-nous ! »Lorsqu’ils furent à quelques distance : « Avez-vous maintenant, dit le compagnon, vu et compris la belle réception qu’on voulait vous faire ?Le mari vous attendait out bonnement pour vous tuer à coups de dague. Et , dites-moi, s’il avait réussi, où serait-elle allée votre âme ? Rendez donc grâces à la Mère des miséricordes, qui vous a délivré à cause de votre fidélité à dire le saint rosaire chaque jour. Vous devez aussi bénir les âmes du purgatoire : car vous avez obtenu la délivrance de quelques-unes, alors que vous étiez en état de grâce, et elles vous le rendent aujourd’hui. Eh bien ! changez de vie et apprenez à craindre Dieu. »
Comme il finissait cette exhortation, ils étaient revenus au lieu es potences. L’inconnu descend du cheval, se rattache au gibet, et déclare qu’il a été envoyé miraculeusement de l’autre vie pour ce qu’il vient de faire, et qu’il retourne où Dieu l’appelle. Un minute après, ce n’était plus qu’un cadavre.
Quant au jeune homme, il est à peine besoin de dire dans quels sentiments il rentra chez lui. Son cœur tout bouleversé n’eut point de repos qu’il n’eût fait à Dieu
180 :
le sacrifice de sa vie ; il se dévoua pour le reste de ses jours à la pénitence et aux œuvres de piété, et il devint un modèle de sainteté, aussi empressé à se mortifier et à gagner les âmes au bien, qu’il avait autrefois recherché les plaisirs et compté pour rie le salut des autres.
(V.J. de alloza, Coelum sict. Mariae I III . ch 3. ex. 60.)
180
53ème Merveille DEFUNTS REPONDANT AUX PRIERES QU’ON FAIT POUR EUX
Per illum, defunctus adhuc loquitur: Grâ-
ce à sa foi, tout mort qu’il est , il parle encore (Hebr. Xi,4.)
Si c’est une détestable pratique, flétrie par l’Ecriture Sainte, de se servir de la magie pour interroger les morts, comme nous le lisons de Simon-le-Magicien et de la pythonis dont il est question au premier livre des Rois, il est au contraire très louable de réciter pour eux des prières, auxquelles on les entendus plus d’une fois répondre. L’histoire est riche en traits de ce genre. C’est ainsi qu’on raconte du saint évêque Bristano, qui avait pour les âmes du purgatoire une extrême dévotion, priant exactement pour elles chaque jour au saint sacrifice, disant des messes de Requiem toutes les fois que les règles liturgiques le permettaient, se levant la nuit pour aller faire oraison sur leurs tombes dans les
181 :
cimetières, où il récitait en leur faveur les psaumes de la pénitence, accompagnés de nombreuses supplications, que dans une de ces circonstances, comme il achevait le Requiescant in pace, il distingua clairement une foule de voix qui répondaient au sein de la terre :Amen ! amen ! amen !
Le bienheureux François de Fabriano, de l’ordre des Frères-Mineurs, fut témoin d’un semblable miracle. Il avait coutume d’appliquer en suffrage aux défunts ses œuvres de dévotion et de pénitence ,unies aux mérites de Jésus sur la croix. Sa compassion pour eux était si grande, qu’il ne pouvait pas même arrêter sa pensée sur les tourments expiatoires de l’autre vie ; il frémissait et tremblait, comme si cette image allait le faire mourir. Aussi, avait-il une ferveur peu commune en priant pour eux, particulièrement au saint autel. Un jour, il terminait une messe de Requiem par la post-communion Fidelium Deus omnium conditor, etc., suivis de la formule qui remplace l’Ite Missa est : Requiescant in pace ; on entendit dans toute l’église, alors presque déserte, un concert de voix qui répondaient en chœur : Amen ! Ce que le saint religieux interpréta comme un cri de joie des âmes délivrées par l’auguste Victime qu’il venait d’immoler.
Saint Grégoire de Tours rapporte quelque chose de plus admirable encore. Au diocèse de Bordeaux, dans un bourg dont il donne le nom, deux vénérables prêtres vinrent à mourir presque au même moment, après une vie extrêmement édifiante. Ils furent ensevelis dans la même église, quoique à des endroits différents, et aux deux extrémités de la nef. Or, pendant que le clergé partagé en deux chœurs, chantaient l’office(l’his-
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torien ne dit pas si c’était celui des morts), on entendit très clairement la voix des deux défunts unie à celles des chantres, l’un d’un côté, l’autre de l’autre ; et cela avec tant d’harmonie, une si parfaite suavité d’organe, que les assistants y prenaient un grand plaisir. On fut persuadé que Dieu permettait le miracle pour faire connaître que ses serviteurs lui adressaient leurs dernières supplications avant de monter au ciel, et en même temps pour affermir la foi de nos ancêtres, qui à cette époque étaient convertis depuis peu. Qu’on juge combien il y avait de charme pieux à écouter ces âmes bienheureuses redire le psaume : « Laetatus sum : Je me suis réjouis à la pensée que nous irions à la maison du Seigneur. »
(V .j Bagutta, De admir. Orbis christiani. t.
II , chap4 ;saint Grégoire, De glor. Confessor., chap.47.)
Introduction 172
176
52ème Merveille
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Récité le rosaire, comme il en avait l’habitude malgré ses tristes débordements, il commença à s’acquitter de ce tribut de dévotion envers la Mère du Celui qu’il était sur le point de grièvement offenser, et il le fit en faveur des âmes de ces malheureux suppliciés, pour lesquels sans doute personne ne pensait à intercéder. La récompense ne se fit pas attendre.
Une voix forte lui cria : »Arrêtez, cavalier, n’allez plus avant ! »Il regarde autour de lui, ne voit que les cadavres et donne de l’éperon à son cheval. La même voix recommence : »Arrêtez, vous dis-je ; n’allez pas plus loin ! »La peur lui était inconnue ; il descend et se met à chercher, parmi ces hideux restes ; à moitié mangés par les corbeaux, s’il n’y avait pas quelque condamné vivant encore. En effet, d’une des potences descend cette supplication : »Cavalier, je vous prie par pitié de couper cette corde qui m’étrangle. »Touché de compassion autant que surpris, il donne un coup d’épée à ce lien , et le corps tombe à terre, d’où il se relève ; et voilà un homme plein de vie, qui se répand en remerciements, et proteste qu’il ne quittera plus son bienfaiteur, son sauveur, qu’il le servira comme un esclave. Le jeune aventurier refusa tout net cette offre de reconnaissance, et déclara qu’il voulait aller seul.-« Mais reprit l’autre, ignorez-vous qu’un danger extrême vous attend au bout de votre course, qu’il y va pour vous de la vie même ? Je veux vous délivrer. Laissez-moi vous marquer ma reconnaissance. »Se voyant ainsi découvert, notre cavalier ne fit pas d’objection. Il remonta à cheval et prit son nouveau compagnon en croupe. Ils ne tardèrent pas à apercevoir la maison ; l’échelle était préparée. Le jeune homme voulait s’y
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risquer tout de suite. »Non pas, dit son compagnon ; je soupçonne quelque machine, et , si vous m’en croyez, vous me laisserez monter le premier, afin que je m’assure de tout. Donnez-moi seulement votre chapeau et votre manteau. »Quand il les eut, il s’élança à l’échelle et pénétra par la fenêtre entr’ouverte. Au même instant on entendit un cliquetis d’armes, des menaces, des cris de colère, et au bout de quelques secondes, un corps frappé d’un coup d’épée tombait au pied du mur. Il se releva et dit au jeune homme stupéfait : »Vite ! vite ! à cheval, et sauvons-nous ! »Lorsqu’ils furent à quelques distance : « Avez-vous maintenant, dit le compagnon, vu et compris la belle réception qu’on voulait vous faire ?Le mari vous attendait out bonnement pour vous tuer à coups de dague. Et , dites-moi, s’il avait réussi, où serait-elle allée votre âme ? Rendez donc grâces à la Mère des miséricordes, qui vous a délivré à cause de votre fidélité à dire le saint rosaire chaque jour. Vous devez aussi bénir les âmes du purgatoire : car vous avez obtenu la délivrance de quelques-unes, alors que vous étiez en état de grâce, et elles vous le rendent aujourd’hui. Eh bien ! changez de vie et apprenez à craindre Dieu. »
Comme il finissait cette exhortation, ils étaient revenus au lieu es potences. L’inconnu descend du cheval, se rattache au gibet, et déclare qu’il a été envoyé miraculeusement de l’autre vie pour ce qu’il vient de faire, et qu’il retourne où Dieu l’appelle. Un minute après, ce n’était plus qu’un cadavre.
Quant au jeune homme, il est à peine besoin de dire dans quels sentiments il rentra chez lui. Son cœur tout bouleversé n’eut point de repos qu’il n’eût fait à Dieu
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le sacrifice de sa vie ; il se dévoua pour le reste de ses jours à la pénitence et aux œuvres de piété, et il devint un modèle de sainteté, aussi empressé à se mortifier et à gagner les âmes au bien, qu’il avait autrefois recherché les plaisirs et compté pour rie le salut des autres.
(V.J. de alloza, Coelum sict. Mariae I III . ch 3. ex. 60.)
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53ème Merveille DEFUNTS REPONDANT AUX PRIERES QU’ON FAIT POUR EUX
Per illum, defunctus adhuc loquitur: Grâ-
ce à sa foi, tout mort qu’il est , il parle encore (Hebr. Xi,4.)
Si c’est une détestable pratique, flétrie par l’Ecriture Sainte, de se servir de la magie pour interroger les morts, comme nous le lisons de Simon-le-Magicien et de la pythonis dont il est question au premier livre des Rois, il est au contraire très louable de réciter pour eux des prières, auxquelles on les entendus plus d’une fois répondre. L’histoire est riche en traits de ce genre. C’est ainsi qu’on raconte du saint évêque Bristano, qui avait pour les âmes du purgatoire une extrême dévotion, priant exactement pour elles chaque jour au saint sacrifice, disant des messes de Requiem toutes les fois que les règles liturgiques le permettaient, se levant la nuit pour aller faire oraison sur leurs tombes dans les
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cimetières, où il récitait en leur faveur les psaumes de la pénitence, accompagnés de nombreuses supplications, que dans une de ces circonstances, comme il achevait le Requiescant in pace, il distingua clairement une foule de voix qui répondaient au sein de la terre :Amen ! amen ! amen !
Le bienheureux François de Fabriano, de l’ordre des Frères-Mineurs, fut témoin d’un semblable miracle. Il avait coutume d’appliquer en suffrage aux défunts ses œuvres de dévotion et de pénitence ,unies aux mérites de Jésus sur la croix. Sa compassion pour eux était si grande, qu’il ne pouvait pas même arrêter sa pensée sur les tourments expiatoires de l’autre vie ; il frémissait et tremblait, comme si cette image allait le faire mourir. Aussi, avait-il une ferveur peu commune en priant pour eux, particulièrement au saint autel. Un jour, il terminait une messe de Requiem par la post-communion Fidelium Deus omnium conditor, etc., suivis de la formule qui remplace l’Ite Missa est : Requiescant in pace ; on entendit dans toute l’église, alors presque déserte, un concert de voix qui répondaient en chœur : Amen ! Ce que le saint religieux interpréta comme un cri de joie des âmes délivrées par l’auguste Victime qu’il venait d’immoler.
Saint Grégoire de Tours rapporte quelque chose de plus admirable encore. Au diocèse de Bordeaux, dans un bourg dont il donne le nom, deux vénérables prêtres vinrent à mourir presque au même moment, après une vie extrêmement édifiante. Ils furent ensevelis dans la même église, quoique à des endroits différents, et aux deux extrémités de la nef. Or, pendant que le clergé partagé en deux chœurs, chantaient l’office(l’his-
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torien ne dit pas si c’était celui des morts), on entendit très clairement la voix des deux défunts unie à celles des chantres, l’un d’un côté, l’autre de l’autre ; et cela avec tant d’harmonie, une si parfaite suavité d’organe, que les assistants y prenaient un grand plaisir. On fut persuadé que Dieu permettait le miracle pour faire connaître que ses serviteurs lui adressaient leurs dernières supplications avant de monter au ciel, et en même temps pour affermir la foi de nos ancêtres, qui à cette époque étaient convertis depuis peu. Qu’on juge combien il y avait de charme pieux à écouter ces âmes bienheureuses redire le psaume : « Laetatus sum : Je me suis réjouis à la pensée que nous irions à la maison du Seigneur. »
(V .j Bagutta, De admir. Orbis christiani. t.
II , chap4 ;saint Grégoire, De glor. Confessor., chap.47.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
54ème Merveille LA DIVINE MARIE ET LE SCAPULAIRE
In me gratia omnis vioe…, in me spes vitoe : En moi est toute le grâce de la voie, toute l’espérance de la vie.(Eccl. xxiv,25.)
Parmi les dévotions à la très-sainte Vierge qui nous doivent inspirer la confiance d’échapper aux supplices du purgatoire et de monter au ciel plus promptement, il faut mettre au premier rang celle du Scapulaire. La
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Mère de Dieu elle-même a daigné promettre au bienheureux Simon que quiconque porterait ce saint habit dans les dispositions convenables de mortification, de prière et de chasteté, feraient une courte expiation dans l’autre vie. Cette promesse est rappelée dans le bréviaire romain, à la sixième leçon de la fête : Bentissimo Virgo relatos in societatem scapularis, etc. La bulle pontificale dite Sabbatine fait également mention de ce fait, et de ce que les associés obtiennent d’échapper aux flammes du purgatoire, ou d’en être retirés le premier samedi après leur mort, ce jour de la semaine étant spécialement consacré à Marie. L’auguste Mère peut donc employer ici le langage du Seigneur à son peuple, dans le Lévitique : »In âc dic expiatio erit vestri alque munulatio ab omnibus peccatis, sabbatum enim requietionis est : Ce jour-là vous aurez accompli votre expiation et vous serez purifiés de tous vos péchés, car c’est le samedi du repos. »Les annales des carmélites contiennent plusieurs faits miraculeux dans ce sens.
A Otrante, ville du royaume de Naples , une dame de la haute société éprouvait le plus sensible bonheur à suivre les prédications d’un père de l’ordre des carmes, grand promoteur de la dévotion envers Marie. Il assurait à ses auditeurs que tout chrétien portant le scapulaire dans les sentiments requis, en observant les faciles conditions de l’association, rencontrerait le divine Mère sur la route de son dernier soupir, et qu’elle viendrait le délivrer le samedi suivant, pour l’emmener avec elle au séjour de la gloire. Cette dame donc, émue de si précieux avantages, se fit inscrire et fit l’engagement d’observer les règles et les conditions exigées. Sa
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pété en augmenta considérablement ; sa joie la plus vive était de prier Marie de jour et de nuit, de mettre en elle sa confiance, de lui rendre toutes sortes d’hommages. Elle la suppliait, entre autres grâces de lui obtenir de mourir, un samedi, afin d’être immédiatement tirée du milieu des tourments mérités par ses péchés.
Elle fut exaucée. Quelques années après, cette pieuse dame tomba gravement malade, et, malgré l’assurance contraire des médecins, elle comprit et déclara que s’était sa fin, ce dont elle se réjouissait, dans l’espérance de voir Dieu. Le mal fit de tels progrès, que les hommes de l’art annoncèrent alors qu’elle ne passerait pas le mercredi suivant ; mais elle leur dit : »Vous vous trompez encore ; je vivrai trois jours de plus et ne mourrai que samedi. »L’événement justifia sa parole et elle employa ses souffrances, comme un trésor inestimable, à se purifier des restes de ses fautes. Puis, elle rendit l’âme à son Créateur.
La perte d’une si bonne mère fut extrêmement douloureuse pour une fille très pieuse qu’elle laissait sur la terre, et qui se retira aussitôt dans un oratoire, où elle priait pour la défunte. Elle y reçut la visite d’un grand serviteur de Dieu, accouru pour la consoler. C’était un homme fameux par les grâces dont le Ciel le comblait et par les révélations merveilleuses. »Cessez ô pieuse enfant, lui dit-il, cessez de pleurer, et que votre tristesse se change en joie. En perdant une mère ici-bas, vous avez acquis une protectrice au ciel : car je vous assure qu’aujourd’hui même, aujourd’hui samedi, grâce à la divine Marie, celle que vous aimez tant est sortie du purgatoire et a été admise parmi les
185 :
élus. Réjouissez-vous donc, et bénissez l’auguste Vierge, notre bonne mère à tous ! »
(V. Philocalus Caputus, Histor. Miracul. Imag
. De Vuirg. Carmeli ;, ch XI. Carmelus thaumaturgu s, an. 1643)
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55ème Merveille ACCUSATIONS DU DEMON CONTRE LES MORTS Satanas expedit vos, ut cribraret sicut
triticum :Satan a demandé à vous cribler
comme on crible le froment(Luc , xxii,34.)
Le démon poursuit au tribunal de Dieu, avec une cruelle instance, les âmes qui viennent de quitter leurs corps et qui entrent dans la vie éternelle. Il veut les entraîner au moins dans le purgatoire, quand il ne peut obtenir pour elles l’enfer et la damnation. On se fera une idée de ce combat d’après le récit de saint Anselme, au sujet d’un de ses moines, appelé Osbern, qu’il avait appelé à la parfaite observance des règles, après une vie peu édifiante. Le converti vécut plusieurs années dans les meilleures dispositions, à la grande joie du saint abbé, qui l’aimait beaucoup. Au bout de ce temps et quoiqu’il fut encore jeune, il fut visité par la maladie qui le devait mettre au tombeau. Anselme, plein de chagrin, le veilla comme un père ; puis, le voyant près d’expirer, il lui demanda en grâce de lui faire savoir, après sa mort, quelque chose de l’état où il se trouverait. Le moribond le promit, et expira.
186 :
Or, pendant que la communauté chantait les prières ordinaires autour du corps, l’abbé s’était retiré dans un coin pour n’être pas distrait, et pouvoir implorer avec plus de recueillement la miséricorde divine sur le défunt. Là, versant beaucoup de larmes, multipliant ses soupirs et ses supplications, il implorait le salut de cette âme avec toute l’ardeur dont il était capable. Le sommeil le surprit dans cette œuvre de charité ; alors il eut une vision : il voyait entrer dans la chambre du défunt plusieurs personnages vénérables, vêtus de blanc, qui s’asseyaient pour prononcer la sentence ; mais il n’entendait rien, et se demandait avec anxiété quelle elle serait, lorsque le religieux lui apparût lui-même, le visage troublé inquiet, bouleversé, comme quelqu’un qui sort d’un combat ou qui échappe à peine d’un danger.-« Qu’y a t’il, mon fils ? lui dit l’abbé ; qu’est ce qui a été prononcé ? » Il répondit : »L’antique serpent s’est levé trois fois contre moi ; trois fois il a voulu m’abattre ; mais les oursiers du Seigneur m’ont délivré… »Le saint s’éveilla et ne vit plus rien.
Anselme comprit que cette vision avait un sens. Il l’interpréta. Osbern avait été trois fois poursuivi par le démon devant le juge suprême : la première, pour les péchés commis depuis son baptême, avant son entrée en religion ; la seconde, pour ceux dont il s’était rendu coupable depuis sa retraite dans le monastère ; la troisième, depuis ses voeux jusqu’à la mort. Mais trois fois l’ennemi avait dû faire retraite : car les premières fautes avaient été effacées par la foi et la générosité d’un adieu volontaire au monde ; elles du noviciat, par la ferveur avec laquelle il avait prononcé ses engagements définitifs ; celles de la dernières époque, par les
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sacrements pieusement reçus et la pénitence courageusement embrassée. L’accusateur maudit avait donc été confondu sur tous les points, et, en fin de compte, il avait dût retirer son opposition. Quant à ces oursiers du Seigneur, qui avaient délivré le défunt, Anselme entendait par là les bons anges, qui ont mission de museler la bête infernale, et de l’empêcher de déchirer le troupeau de Jésus-Christ.
Afin de se montrer vrai père spirituel, le bon saint abbé dit la messe pendant toute l’année suivant en faveur d’Osbern ; il désirait abréger les peines du Purgatoire auxquelles il ne doutait guère qu’il eut été condamné, pour la tiédeur et les infidélités de quelques-unes de ses années de religion ; s’il était empêché de célébrer lui-même, il se faisait remplacer dans cet office de charité. De plus, il recommanda la même intention à divers monastères. Et ainsi, non-seulement les défunts en obtinrent du secours, mais les vivants apprirent de ce bel exemple à prier pour les âmes souffrantes, que nous sommes trop disposés, hélas ! à oublier.
(V. Acta Sanctorum, 21 avril in, 70.).
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56ème Merveille
UN PURGATOIRE PLUS LONG A QUI N'A PAS PRIE
POUR LES MORTS
Qui non diligit manet in morte : Celui qui
n’aime moint demeure dans la mort(1 Jean ,iii,14)
Dans la belle Vie de saint Malachie, archevêque d’Armagh, saint Bernard loue hautement la dévotion du prélat envers les âmes du purgatoire, mais il blâme au même degré la sœur de Malachie, animée de tout autres sentiments. Etant encore diacre, l’archevêque aimait à assister aux funérailles des pauvres, afin de prier pour eux ; il les accompagnait au cimetière ; souvent même il les ensevelissait de ses propres mains, cet office lui paraissant propre à développer l’humilité autant que la pratique de la charité. Mais, comme le saint homme Tobie, il devait être éprouvé et tenté par la femme, ou plutôt par l’antique ennemi du genre humain. Sa sœur, toute aux idées du monde, tenait à déshonneur qu’un membre de sa noble famille se consacrât à des œuvres si basses, et lui disait avec colère : »Beau métier tu fais là, fou et grossier personnage ! est-ce l’occupation d’un homme de ton rang ?Laisse les morts ensevelir les morts, selon le mot du Seigneur… »Et, abusant de ce texte évangélique, elle le tourmentait de ses reproches et de ses plaintes.
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Malachie lui répondait avec douceur, mais non sans fermeté : »Pauvre fille, que dis-tu ? Tu sais les mots du texte sacré, mais tu n’en pénètres guère le sens. »Et il continuait de s’acquitter de l’humble fonction, où Dieu le récompensait par de grandes consolations intérieures.
Cependant me Ciel ne laissa pas impunie l’imprudente témérité de cette femme. Elle mourut assez jeune et parut devant le Juge terrible, qui lit jusqu’au fond du cœur et demande compte de ses moindres mouvements. Malachie avait eu à se plaindre d’elle ; mais ,quand elle fut morte, il ne pensa plus qu’aux besoins de son âme, et pria pour elle avec tout le zèle dont il était capable . Une nuit, pendant son sommeil, longtemps après, il lui sembla la voir dans la cour de l’église, triste, vêtue de noir, sollicitant sa compassion, parce qu’il y avait trente jours qu’elle n’éprouvait plus de soulagement. Le saint homme s’éveille en sursaut, tout plein de ce rêve, et il se rappelle en effet que depuis un mois il n’a pas dit la sainte Messe pour sa sœur. On peut croire que Dieu avait encore permis cet oubli en punition de son insensibilité ancienne envers les défunts.
Le pieux frère se remet donc à ses suffrages, et dès le lendemain il monte à l’aute l et offre dans ce but le saint sacrifice. Peu après, la morte se fit voir à lui dans une autre vision : elle se tenait sur le seuil de l ‘église, comme s’il ne lui était pas encore permis d’entrer, et elle gémissait. Il persévéra donc dans ses prières, n’omettant pas un seul jour l’auguste sacrifice. Alors il la vit entrer, mais elle ne pouvait avancer jusqu’à l’autel, malgré tous ses efforts. Bref, le saint ne cessa point de
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célébrer qu’il ne l’eût revue admise auprès de l’autel magnifiquement parée, brillante, heureuse, parmi une foule d’âmes éclatantes comme elle, qui paraissaient quitter aussi le lieu de l’épreuve, après leur expiation terminée. Ce qui démontre une fois de pluscomme l’observe saint Bernard lui-même, la puissance de la sainte Messe pour nous purifier de toutes nos fautes et nous rendre agréables à Dieu : « Hoc plané sacaramentam, dit-il, potens est peccata consummare, debellare obvias potestas, inferre coelis revertentes de terrâ »
Mais nous ne devons point ici omettre le récit de la grâce que valut à saint Malachie sa grande charité envers les âmes du purgatoire. Il avait un jour convoqué les personnes dont il dirigeait la conscience à une conférence spirituelle, où, discourant du dernier passage, il demandait à chacun où et quand il lui serait plus agréable de mourir. Les uns indiquaient une fête, les autres une autre ; ceux-là un endroit, ceux-ci tel autre, etc. Quand ce fut au tour du saint de manifester sa pensée, il dit que quant au lieu, il ne finirait nulle part plus volontiers sa vie , hors de l’Irlande, qu’au monastère de Clairvaux(dirigé par saint Bernard), afin de jouir tout de suite des saints sacrifices de ces fervents religieux ; et que quant au temps, il préférerait le jour de la fête des morts, afin d’avoir toutes les prières qui se font ce jour-là dans le monde catholique pour les défunts. Ce souhait de sa piété fut accompli de point en point. Comme il se rendait auprès du souverain-pontife Eugène III ? il fut surpris que le Seigneur l’exauçait, car il s’écria avec le prophète : « Voici mon repos pour toujours ; je l’ai choisi
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et j’y demeurerai :Haee requies mea in saaeculam saeculi hie habitabo, quniam elegi eam. »(Ps. 131.)En effet le lendemain de la Toussaint, il rendit son ¨me au Créateur, et courut recevoir la récompense de ses vertus(Nous avons connu une pieuse religieuse, Zénaïde-Pauline p…, qui attaquée d’une maladie affreuse depuis plusieurs années , suppliait Notre-Seigneur de lui accorder de mourir le jour de la commémoration des fidèles défunts, pour lesquels elle avait toujours eu une grande dévotion. Il lui fut accordé comme elle désirait. Le 2 novembre au matin, après deux ans de souffrances supportées avec le courage le plus chrétien, elle se mit à chanter un cantique d’action de grâce, et expira doucement quelques instants avant l’haure où commence la célébration des messe dans touts les églises)
In me gratia omnis vioe…, in me spes vitoe : En moi est toute le grâce de la voie, toute l’espérance de la vie.(Eccl. xxiv,25.)
Parmi les dévotions à la très-sainte Vierge qui nous doivent inspirer la confiance d’échapper aux supplices du purgatoire et de monter au ciel plus promptement, il faut mettre au premier rang celle du Scapulaire. La
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Mère de Dieu elle-même a daigné promettre au bienheureux Simon que quiconque porterait ce saint habit dans les dispositions convenables de mortification, de prière et de chasteté, feraient une courte expiation dans l’autre vie. Cette promesse est rappelée dans le bréviaire romain, à la sixième leçon de la fête : Bentissimo Virgo relatos in societatem scapularis, etc. La bulle pontificale dite Sabbatine fait également mention de ce fait, et de ce que les associés obtiennent d’échapper aux flammes du purgatoire, ou d’en être retirés le premier samedi après leur mort, ce jour de la semaine étant spécialement consacré à Marie. L’auguste Mère peut donc employer ici le langage du Seigneur à son peuple, dans le Lévitique : »In âc dic expiatio erit vestri alque munulatio ab omnibus peccatis, sabbatum enim requietionis est : Ce jour-là vous aurez accompli votre expiation et vous serez purifiés de tous vos péchés, car c’est le samedi du repos. »Les annales des carmélites contiennent plusieurs faits miraculeux dans ce sens.
A Otrante, ville du royaume de Naples , une dame de la haute société éprouvait le plus sensible bonheur à suivre les prédications d’un père de l’ordre des carmes, grand promoteur de la dévotion envers Marie. Il assurait à ses auditeurs que tout chrétien portant le scapulaire dans les sentiments requis, en observant les faciles conditions de l’association, rencontrerait le divine Mère sur la route de son dernier soupir, et qu’elle viendrait le délivrer le samedi suivant, pour l’emmener avec elle au séjour de la gloire. Cette dame donc, émue de si précieux avantages, se fit inscrire et fit l’engagement d’observer les règles et les conditions exigées. Sa
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pété en augmenta considérablement ; sa joie la plus vive était de prier Marie de jour et de nuit, de mettre en elle sa confiance, de lui rendre toutes sortes d’hommages. Elle la suppliait, entre autres grâces de lui obtenir de mourir, un samedi, afin d’être immédiatement tirée du milieu des tourments mérités par ses péchés.
Elle fut exaucée. Quelques années après, cette pieuse dame tomba gravement malade, et, malgré l’assurance contraire des médecins, elle comprit et déclara que s’était sa fin, ce dont elle se réjouissait, dans l’espérance de voir Dieu. Le mal fit de tels progrès, que les hommes de l’art annoncèrent alors qu’elle ne passerait pas le mercredi suivant ; mais elle leur dit : »Vous vous trompez encore ; je vivrai trois jours de plus et ne mourrai que samedi. »L’événement justifia sa parole et elle employa ses souffrances, comme un trésor inestimable, à se purifier des restes de ses fautes. Puis, elle rendit l’âme à son Créateur.
La perte d’une si bonne mère fut extrêmement douloureuse pour une fille très pieuse qu’elle laissait sur la terre, et qui se retira aussitôt dans un oratoire, où elle priait pour la défunte. Elle y reçut la visite d’un grand serviteur de Dieu, accouru pour la consoler. C’était un homme fameux par les grâces dont le Ciel le comblait et par les révélations merveilleuses. »Cessez ô pieuse enfant, lui dit-il, cessez de pleurer, et que votre tristesse se change en joie. En perdant une mère ici-bas, vous avez acquis une protectrice au ciel : car je vous assure qu’aujourd’hui même, aujourd’hui samedi, grâce à la divine Marie, celle que vous aimez tant est sortie du purgatoire et a été admise parmi les
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élus. Réjouissez-vous donc, et bénissez l’auguste Vierge, notre bonne mère à tous ! »
(V. Philocalus Caputus, Histor. Miracul. Imag
. De Vuirg. Carmeli ;, ch XI. Carmelus thaumaturgu s, an. 1643)
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55ème Merveille ACCUSATIONS DU DEMON CONTRE LES MORTS Satanas expedit vos, ut cribraret sicut
triticum :Satan a demandé à vous cribler
comme on crible le froment(Luc , xxii,34.)
Le démon poursuit au tribunal de Dieu, avec une cruelle instance, les âmes qui viennent de quitter leurs corps et qui entrent dans la vie éternelle. Il veut les entraîner au moins dans le purgatoire, quand il ne peut obtenir pour elles l’enfer et la damnation. On se fera une idée de ce combat d’après le récit de saint Anselme, au sujet d’un de ses moines, appelé Osbern, qu’il avait appelé à la parfaite observance des règles, après une vie peu édifiante. Le converti vécut plusieurs années dans les meilleures dispositions, à la grande joie du saint abbé, qui l’aimait beaucoup. Au bout de ce temps et quoiqu’il fut encore jeune, il fut visité par la maladie qui le devait mettre au tombeau. Anselme, plein de chagrin, le veilla comme un père ; puis, le voyant près d’expirer, il lui demanda en grâce de lui faire savoir, après sa mort, quelque chose de l’état où il se trouverait. Le moribond le promit, et expira.
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Or, pendant que la communauté chantait les prières ordinaires autour du corps, l’abbé s’était retiré dans un coin pour n’être pas distrait, et pouvoir implorer avec plus de recueillement la miséricorde divine sur le défunt. Là, versant beaucoup de larmes, multipliant ses soupirs et ses supplications, il implorait le salut de cette âme avec toute l’ardeur dont il était capable. Le sommeil le surprit dans cette œuvre de charité ; alors il eut une vision : il voyait entrer dans la chambre du défunt plusieurs personnages vénérables, vêtus de blanc, qui s’asseyaient pour prononcer la sentence ; mais il n’entendait rien, et se demandait avec anxiété quelle elle serait, lorsque le religieux lui apparût lui-même, le visage troublé inquiet, bouleversé, comme quelqu’un qui sort d’un combat ou qui échappe à peine d’un danger.-« Qu’y a t’il, mon fils ? lui dit l’abbé ; qu’est ce qui a été prononcé ? » Il répondit : »L’antique serpent s’est levé trois fois contre moi ; trois fois il a voulu m’abattre ; mais les oursiers du Seigneur m’ont délivré… »Le saint s’éveilla et ne vit plus rien.
Anselme comprit que cette vision avait un sens. Il l’interpréta. Osbern avait été trois fois poursuivi par le démon devant le juge suprême : la première, pour les péchés commis depuis son baptême, avant son entrée en religion ; la seconde, pour ceux dont il s’était rendu coupable depuis sa retraite dans le monastère ; la troisième, depuis ses voeux jusqu’à la mort. Mais trois fois l’ennemi avait dû faire retraite : car les premières fautes avaient été effacées par la foi et la générosité d’un adieu volontaire au monde ; elles du noviciat, par la ferveur avec laquelle il avait prononcé ses engagements définitifs ; celles de la dernières époque, par les
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sacrements pieusement reçus et la pénitence courageusement embrassée. L’accusateur maudit avait donc été confondu sur tous les points, et, en fin de compte, il avait dût retirer son opposition. Quant à ces oursiers du Seigneur, qui avaient délivré le défunt, Anselme entendait par là les bons anges, qui ont mission de museler la bête infernale, et de l’empêcher de déchirer le troupeau de Jésus-Christ.
Afin de se montrer vrai père spirituel, le bon saint abbé dit la messe pendant toute l’année suivant en faveur d’Osbern ; il désirait abréger les peines du Purgatoire auxquelles il ne doutait guère qu’il eut été condamné, pour la tiédeur et les infidélités de quelques-unes de ses années de religion ; s’il était empêché de célébrer lui-même, il se faisait remplacer dans cet office de charité. De plus, il recommanda la même intention à divers monastères. Et ainsi, non-seulement les défunts en obtinrent du secours, mais les vivants apprirent de ce bel exemple à prier pour les âmes souffrantes, que nous sommes trop disposés, hélas ! à oublier.
(V. Acta Sanctorum, 21 avril in, 70.).
188
56ème Merveille
UN PURGATOIRE PLUS LONG A QUI N'A PAS PRIE
POUR LES MORTS
Qui non diligit manet in morte : Celui qui
n’aime moint demeure dans la mort(1 Jean ,iii,14)
Dans la belle Vie de saint Malachie, archevêque d’Armagh, saint Bernard loue hautement la dévotion du prélat envers les âmes du purgatoire, mais il blâme au même degré la sœur de Malachie, animée de tout autres sentiments. Etant encore diacre, l’archevêque aimait à assister aux funérailles des pauvres, afin de prier pour eux ; il les accompagnait au cimetière ; souvent même il les ensevelissait de ses propres mains, cet office lui paraissant propre à développer l’humilité autant que la pratique de la charité. Mais, comme le saint homme Tobie, il devait être éprouvé et tenté par la femme, ou plutôt par l’antique ennemi du genre humain. Sa sœur, toute aux idées du monde, tenait à déshonneur qu’un membre de sa noble famille se consacrât à des œuvres si basses, et lui disait avec colère : »Beau métier tu fais là, fou et grossier personnage ! est-ce l’occupation d’un homme de ton rang ?Laisse les morts ensevelir les morts, selon le mot du Seigneur… »Et, abusant de ce texte évangélique, elle le tourmentait de ses reproches et de ses plaintes.
189 :
Malachie lui répondait avec douceur, mais non sans fermeté : »Pauvre fille, que dis-tu ? Tu sais les mots du texte sacré, mais tu n’en pénètres guère le sens. »Et il continuait de s’acquitter de l’humble fonction, où Dieu le récompensait par de grandes consolations intérieures.
Cependant me Ciel ne laissa pas impunie l’imprudente témérité de cette femme. Elle mourut assez jeune et parut devant le Juge terrible, qui lit jusqu’au fond du cœur et demande compte de ses moindres mouvements. Malachie avait eu à se plaindre d’elle ; mais ,quand elle fut morte, il ne pensa plus qu’aux besoins de son âme, et pria pour elle avec tout le zèle dont il était capable . Une nuit, pendant son sommeil, longtemps après, il lui sembla la voir dans la cour de l’église, triste, vêtue de noir, sollicitant sa compassion, parce qu’il y avait trente jours qu’elle n’éprouvait plus de soulagement. Le saint homme s’éveille en sursaut, tout plein de ce rêve, et il se rappelle en effet que depuis un mois il n’a pas dit la sainte Messe pour sa sœur. On peut croire que Dieu avait encore permis cet oubli en punition de son insensibilité ancienne envers les défunts.
Le pieux frère se remet donc à ses suffrages, et dès le lendemain il monte à l’aute l et offre dans ce but le saint sacrifice. Peu après, la morte se fit voir à lui dans une autre vision : elle se tenait sur le seuil de l ‘église, comme s’il ne lui était pas encore permis d’entrer, et elle gémissait. Il persévéra donc dans ses prières, n’omettant pas un seul jour l’auguste sacrifice. Alors il la vit entrer, mais elle ne pouvait avancer jusqu’à l’autel, malgré tous ses efforts. Bref, le saint ne cessa point de
190 :
célébrer qu’il ne l’eût revue admise auprès de l’autel magnifiquement parée, brillante, heureuse, parmi une foule d’âmes éclatantes comme elle, qui paraissaient quitter aussi le lieu de l’épreuve, après leur expiation terminée. Ce qui démontre une fois de pluscomme l’observe saint Bernard lui-même, la puissance de la sainte Messe pour nous purifier de toutes nos fautes et nous rendre agréables à Dieu : « Hoc plané sacaramentam, dit-il, potens est peccata consummare, debellare obvias potestas, inferre coelis revertentes de terrâ »
Mais nous ne devons point ici omettre le récit de la grâce que valut à saint Malachie sa grande charité envers les âmes du purgatoire. Il avait un jour convoqué les personnes dont il dirigeait la conscience à une conférence spirituelle, où, discourant du dernier passage, il demandait à chacun où et quand il lui serait plus agréable de mourir. Les uns indiquaient une fête, les autres une autre ; ceux-là un endroit, ceux-ci tel autre, etc. Quand ce fut au tour du saint de manifester sa pensée, il dit que quant au lieu, il ne finirait nulle part plus volontiers sa vie , hors de l’Irlande, qu’au monastère de Clairvaux(dirigé par saint Bernard), afin de jouir tout de suite des saints sacrifices de ces fervents religieux ; et que quant au temps, il préférerait le jour de la fête des morts, afin d’avoir toutes les prières qui se font ce jour-là dans le monde catholique pour les défunts. Ce souhait de sa piété fut accompli de point en point. Comme il se rendait auprès du souverain-pontife Eugène III ? il fut surpris que le Seigneur l’exauçait, car il s’écria avec le prophète : « Voici mon repos pour toujours ; je l’ai choisi
191 :
et j’y demeurerai :Haee requies mea in saaeculam saeculi hie habitabo, quniam elegi eam. »(Ps. 131.)En effet le lendemain de la Toussaint, il rendit son ¨me au Créateur, et courut recevoir la récompense de ses vertus(Nous avons connu une pieuse religieuse, Zénaïde-Pauline p…, qui attaquée d’une maladie affreuse depuis plusieurs années , suppliait Notre-Seigneur de lui accorder de mourir le jour de la commémoration des fidèles défunts, pour lesquels elle avait toujours eu une grande dévotion. Il lui fut accordé comme elle désirait. Le 2 novembre au matin, après deux ans de souffrances supportées avec le courage le plus chrétien, elle se mit à chanter un cantique d’action de grâce, et expira doucement quelques instants avant l’haure où commence la célébration des messe dans touts les églises)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
57ème Merveille RIGUEUR DE LA JUSTICE DIVINE.
(Ajoutée par le traducteur de l'italien en français).
Justicia et judicium praeparatia sedis luce :
Le jugement et la justice sont l’appui de votre trône(Ps.lxxxviii,15)
Telle est la sainteté de notre Sauveur, qu’il ne saurait souffrir souillure dans ceux de ses enfants q’il appelle l’éternelle couronne. Nous avons à lui rendre compte de tout sans exception, pensées, actions, omissions volontaires, paroles, aspirations, etc.
192 :
Qui donc ne tremblerait à la pensée de ce jugement que nul ne pourra éviter ?Qui ne s’appliquerait à préparer une sentence favorable, en se ménageant des intercesseurs et des protecteurs ? Voici un fait, tout récent, qui donnera à penser aux plus insensibles.
En Amérique, grâce aux progrès consolants du catholicisme, presque tous les ordres religieux ont fondé des maisons florissantes, où l’ontravaille généreusement, par la prière, l’aumône et les labeurs de l’apostolat, à étendre le règne de Jésus-Christ. Les bénédictins, entre autres, ont une abbaye du nom de Saint-Vincent, au village de Latrobe. C’est en 1846 que le P.Boniface Wimmer fonda ce monastère, lequel dix ans après était élevé à la dignité d’abbaye et agrégé au Mont-Cassin d’Italie. Le bruit courut, au commencement de 1860, qu’une âme était apparue à l’un des religieux, afin de réclamer ses prières. Aussitôt les mauvais journaux de se répandre, selon leur coutume, en plaisanteries et en grossières impiétés. Le vénérable Wimmer, affligé de ces scandales, crut devoir faire et publier le 26 février 1860, de déclaration suivante :
« Voici la vérité. Dans notre abbaye de Saint-Vincent, près de Latrobe, le 18 septembre 1859, un novice a vu apparaître un moine bénédictin en costume complet de chœur. Cette apparition s’est renouvelée chaque jour, depuis le 18 septembre jusqu’au 19 novembre, soit de onze heure à midi, soit de minuit à deux heures du matin. Le 19 novembre seulement, le novice a interrogé l’esprit, en présence d’un autre membre de la communauté, sur ce qu’il demandait. L’esprit a répondu qu’il souffrait depuis soixante-dix-sept ans, pour n’avoir pas dit sept messes d’obligation ; qu’il était déjà
193
apparu, à diverses époques, à sept autres bénédictins, qu’il n’avait pas été entendu ; qu’il serait contraint d’apparaître encore onze années si lui, novice, ne venait pas à son secours. L’esprit demandait que ces sept messe fussent dites pour lui ; de plus , le novice devait pendant sept jours demeurer en retraite et garder un profond silence ; en outre, et pendant trente-trois jours, il devait réciter trois fois par jour le psaume 50(Miserere mei, Deus), les pieds nus et les bras élevés au ciel.
« Toutes ces conditions ont été remplies, à dater du 21 novembre jusqu’au 25 décembre, où, après la célébration de la dernière messe, l’esprit a disparu. Pendant cette période, l’esprit s’était montré encore plusieurs fois, exhortant le novice, dans les termes les plus touchants, à prier pour les âmes du purgatoire, disant qu’elles souffrent affreusement, et qu’elles sont profondément reconnaissantes envers ceux qui concourent à leur rédemption. L’esprit a ajouté, chose bien triste à dire, que, des cinq prêtres qui sont déjà morts à notre abbaye, aucun n’était encore au ciel, que tous souffraient dans le purgatoire. Je ne tire pas de conclusions mais tout ceci est exact. »
Telle est la déclaration de l’abbé, signée de sa main. Les conclusions frappent le plus distrait des lecteurs. Préparons-nous avec tremblement à cette discussion sévère de notre vie, et, si nous voulons être secourus un jour, secourons nous-mêmes ceux qui souffrent et qui s’adressent à notre charité.
(V. le journal Le Monde, 4 avril 1860 n.47.)
194
58ème Merveille Protection miraculeuse
quand même je serais attaqué par les forces ennemis
mon coeur ne tremblera point (Ps. XXVI, 3)
Déjà nous avons rapporté le
secours miraculeux accordé par les âmes du purgatoire à un soldat dévot pour
elles mais de même que la Sainte-Ecriture nous montre plusieurs fois les
légions célestes volant à la défense des Israélites contre les armées de
Sennachérib et du roi de Syrie de même dans les annales de l'Eglise nous
lisons plus d'une intervention de ce genre de la part des pauvres âmes
souffrantes en faveur des princes qui songeaient à leur soulagement Eusèbe
duc de Sardaigne est un de ces témoins ce prince était tellement dévoué aux
âmes du purgatoire que indépendamment des aumônes considérables qu'il
faisait à leur intention il avait consacré à cette oeuvre les revenus d'une
ville entière ou la piété était en honneur on l'appelait pour ce motif la
Ville de Dieu et tout l'argent qui en provenait pour le trésor de l'Etat
servait aux oeuvres saintes à l'entretien d'un certain nombre de prêtres et
de chapelains chargés de célébrer journellement en faveur de ces âmes le
démon ne put souffrir une si belle institution et il excita Ostorge roi de
Sicile qui avait de grandes richesses et
195
des troupes nombreuses à déclarer la guerre à Eusèbe sous de frivoles
prétextes Ostorge se mit donc en route assiégea cette ville et s'en empara
dès que le duc apprit cette nouvelle il en éprouva une aussi vive douleur
que s'il eût perdu la moitié de ses états aussitôt il assemble ses officiers
tient conseil avec eux et se résout à tout entreprendre pour chasser
l'ennemi de cette place l'armée se forme bien inférieure à celle des
Siciliens et l'on marche ce n'était pas sans crainte à cause de cette grande
infériorité mais voici que les sentinelles avancées signalent au loin des
légions de cavalerie et d'infanterie vêtues de blanc chevaux blancs armes et
bannières blanches le duc reste interdit d'une part il tremblait que ce ne
fussent des renforts siciliens de l'a utre il lui semblait comprendre que
Dieu lui envoyait du secours il se décide à expédier des hérauts d'armes au
nombre de quatre pour faire une reconnaissance et découvrir à qui l'on a
affaire dès qu'ils furent à égale distance des deux armées quatre hérauts
des nouveau-venus se détachèrent et marchant vers eux les saluèrent en
disant "N'ayez aucune crainte nous sommes la milice du souverain Roi et nous
accourons au secours de votre prince qu'il vienne s'entendre avec notre chef
" le duc s'avança et joignit ses soldats à ceux que le Ciel lui adressait
ainsi miraculeusement dès qu'Ostorge aperçut les légions qu'il avait à
combattre ces vêtements blancs ces légions martiales qui lui étaient
inconnues il fut saisi de terreur des éclaireurs envoyés à la découverte lui
rapportèrent que ces nouvelles légions ne pouvaient apparaître que par
miracle personne dans le pays ne comprenant d'ou ni comment
196
elles étaient venues en même temps il fut sommé de restituer la Ville de
Dieu à son légitime souverain il s'empressa d'accéder à toutes les
propositions répara le dommage qu'il avait causé et se retira en toute hâte
Eusèbe rendit à Dieu ses actions de grâces et remercia les généreux inconnus
leur chef lui répondit : " Sachez prince que presque tous ces soldats que
vous voyez sont des âmes tirées du purgatoire par vos suffrages le Seigneur
leur a confié le soin de vous protéger dans cette extrémité continuez donc
cette charitable dévotion et n'oubliez jamais qu'autant d'âmes vous délivrez
autant vous acquérez d'amis et de défenseurs au ciel ." Puis tout disparut
le duc se jeta à genoux et bénit le Dieu de toute miséricorde qui
n'abandonne jamais les siens (V. Henri Grandgermain, Magn. Specul.exem.,
dist. 9, ex. 184.)
196
59ème Merveille Apparitions et révélations
nous savons que nous avons été
transférés de la mort à la vie. (I Joan, III, 14.)
Quoique déjà nous ayons
cité des apparitions et des révélations terribles sur les mystères de
l'autre vie pour la confusion de ces impies à qui il plaît de répéter
197
que personne n'est revenu nous dire ce qui s'y passe je n'hésite pas à en
rapporter deux autres appuyées sur l'indiscutable autorité du grand saint
Thomas d'Aquin témoin occulaire cet illustre docteur la gloire de l'Eglise
et de l'esprit humain était pénétré d'un grand zèle pour les pauvres âmes et
il pensait à elles dans ses sacrifices ses prières et ses mortifications
lorsqu'il était lecteur de théologie de l'Université de Paris il vit
apparaître devant lui l'âme de sa soeur morte abbesse de Sainte-Marie de
Capoue qui le conjura d'avoir pitié d'elle car elle souffrait cruellement
dans les flammes de l'autre vie et avait grand besoin d'être secourue le
saint s'empressa de prier de jeûner de se macérer et de réclamer les
charitables suffrages de plusieurs de ses amis il obtint la délivrance de sa
soeur et il en eut l'assurance à Rome ou on l'avait envoyé elle se fit voir
à lui de nouveau mais cette fois dans tout l'éclat du triomphe et de la joie
elle lui dit qu'il était exaucé que désormais elle allait pour l'éternité se
reposer dans le sein de Dieu Thomas saisit cette occasion de lui demander ce
qu'étaient devenus deux de ses frères morts depuis quelque temps l'âme
répondit que celui qui se nommait Arnaud jouissait dans le ciel d'un haut
degré de gloire pour avoir courageusement défendu le souverain pontife
contre l'empereur Frédéric d'Allemagne et avoir souffert persécution sur ce
sujet mais que Landolphe était encore dans les peines du purgatoire ou il
attendait qu'on s'intérressât à lui elle ajouta :" Pour vous mon frère
hâtez-vous de mettre la dernière main aux saintes choses que vous avez
entreprises car vous viendrez bientôt vous réunir à nous dans
198
le paradis ou une place magnifique vous attend en récompense de tout ce que
vous faites pour l'Eglise." Une autre fois comme le saint faisait oraison
dans l'église de Saint-Dominique à Naples il aperçut tout-à-coup frère
Romain qu'il avait laissé à Paris dans sa chaire de théologie pensant qu'il
vivait encore et qu'il venait le voir il se leva pour aller à sa rencontre
et le saluer en s'informant de son voyage et de sa santé le bon religieux
l'arrêtant lui dit que sa vie terrestre était achevée qu'il avait reçu déjà
la couronne et qu'il était envoyé de Dieu pour encourager Thomas dans ses
travaux celui-ci interdit au premier moment reprit courage et l'interrogea
sur ce qu'il mettait au-dessus de tout : " Suis-je en état de grâce ? "
demanda-t-il le défunt sourit l'assura qu'il y était et que ses oeuvres
étaient agréables à la divine Majesté il l'interrogea ensuite sur son propre
état à lui et Romain lui répondit qu'il jouissait actuellement de la gloire
après quinze jours de purgatoire pour différentes infidélités qu'il n'avait
point expiées auparavant enfin il voulut apprendre de cette âme certains
détails théologiques si par exemple dans le ciel on voit Dieu par le moyen
de la gloire élevant l'intelligence ou bien par toute autre action divine il
lui fut répondu seulement par le verset neuvième du psaume XLVIIe : " Sicut
audivimus sic vidimus in civitate Domini virtutum : nous avons vu dans la
cité du Dieu puissant selon ce que nous avons appris." En prononçant ces
mots la vision s'évanouit laissant l'angélique docteur dans une grande
impatience de monter auprès de son Sauveur adorable on voit par ce double
trait qu'en assurant que Dieu se sert quelquefois des âmes pour en faire ses
messagers
199
comme il fait des anges saint Thomas parlait après une expérience
personnelle qui ne pouvait le laisser dans le moindre doute ( V. Vie de
saint Thomas d'Aquin, par Pierre Mafféi ; Dario Dominicano, 7 mars.)
(Ajoutée par le traducteur de l'italien en français).
Justicia et judicium praeparatia sedis luce :
Le jugement et la justice sont l’appui de votre trône(Ps.lxxxviii,15)
Telle est la sainteté de notre Sauveur, qu’il ne saurait souffrir souillure dans ceux de ses enfants q’il appelle l’éternelle couronne. Nous avons à lui rendre compte de tout sans exception, pensées, actions, omissions volontaires, paroles, aspirations, etc.
192 :
Qui donc ne tremblerait à la pensée de ce jugement que nul ne pourra éviter ?Qui ne s’appliquerait à préparer une sentence favorable, en se ménageant des intercesseurs et des protecteurs ? Voici un fait, tout récent, qui donnera à penser aux plus insensibles.
En Amérique, grâce aux progrès consolants du catholicisme, presque tous les ordres religieux ont fondé des maisons florissantes, où l’ontravaille généreusement, par la prière, l’aumône et les labeurs de l’apostolat, à étendre le règne de Jésus-Christ. Les bénédictins, entre autres, ont une abbaye du nom de Saint-Vincent, au village de Latrobe. C’est en 1846 que le P.Boniface Wimmer fonda ce monastère, lequel dix ans après était élevé à la dignité d’abbaye et agrégé au Mont-Cassin d’Italie. Le bruit courut, au commencement de 1860, qu’une âme était apparue à l’un des religieux, afin de réclamer ses prières. Aussitôt les mauvais journaux de se répandre, selon leur coutume, en plaisanteries et en grossières impiétés. Le vénérable Wimmer, affligé de ces scandales, crut devoir faire et publier le 26 février 1860, de déclaration suivante :
« Voici la vérité. Dans notre abbaye de Saint-Vincent, près de Latrobe, le 18 septembre 1859, un novice a vu apparaître un moine bénédictin en costume complet de chœur. Cette apparition s’est renouvelée chaque jour, depuis le 18 septembre jusqu’au 19 novembre, soit de onze heure à midi, soit de minuit à deux heures du matin. Le 19 novembre seulement, le novice a interrogé l’esprit, en présence d’un autre membre de la communauté, sur ce qu’il demandait. L’esprit a répondu qu’il souffrait depuis soixante-dix-sept ans, pour n’avoir pas dit sept messes d’obligation ; qu’il était déjà
193
apparu, à diverses époques, à sept autres bénédictins, qu’il n’avait pas été entendu ; qu’il serait contraint d’apparaître encore onze années si lui, novice, ne venait pas à son secours. L’esprit demandait que ces sept messe fussent dites pour lui ; de plus , le novice devait pendant sept jours demeurer en retraite et garder un profond silence ; en outre, et pendant trente-trois jours, il devait réciter trois fois par jour le psaume 50(Miserere mei, Deus), les pieds nus et les bras élevés au ciel.
« Toutes ces conditions ont été remplies, à dater du 21 novembre jusqu’au 25 décembre, où, après la célébration de la dernière messe, l’esprit a disparu. Pendant cette période, l’esprit s’était montré encore plusieurs fois, exhortant le novice, dans les termes les plus touchants, à prier pour les âmes du purgatoire, disant qu’elles souffrent affreusement, et qu’elles sont profondément reconnaissantes envers ceux qui concourent à leur rédemption. L’esprit a ajouté, chose bien triste à dire, que, des cinq prêtres qui sont déjà morts à notre abbaye, aucun n’était encore au ciel, que tous souffraient dans le purgatoire. Je ne tire pas de conclusions mais tout ceci est exact. »
Telle est la déclaration de l’abbé, signée de sa main. Les conclusions frappent le plus distrait des lecteurs. Préparons-nous avec tremblement à cette discussion sévère de notre vie, et, si nous voulons être secourus un jour, secourons nous-mêmes ceux qui souffrent et qui s’adressent à notre charité.
(V. le journal Le Monde, 4 avril 1860 n.47.)
194
58ème Merveille Protection miraculeuse
quand même je serais attaqué par les forces ennemis
mon coeur ne tremblera point (Ps. XXVI, 3)
Déjà nous avons rapporté le
secours miraculeux accordé par les âmes du purgatoire à un soldat dévot pour
elles mais de même que la Sainte-Ecriture nous montre plusieurs fois les
légions célestes volant à la défense des Israélites contre les armées de
Sennachérib et du roi de Syrie de même dans les annales de l'Eglise nous
lisons plus d'une intervention de ce genre de la part des pauvres âmes
souffrantes en faveur des princes qui songeaient à leur soulagement Eusèbe
duc de Sardaigne est un de ces témoins ce prince était tellement dévoué aux
âmes du purgatoire que indépendamment des aumônes considérables qu'il
faisait à leur intention il avait consacré à cette oeuvre les revenus d'une
ville entière ou la piété était en honneur on l'appelait pour ce motif la
Ville de Dieu et tout l'argent qui en provenait pour le trésor de l'Etat
servait aux oeuvres saintes à l'entretien d'un certain nombre de prêtres et
de chapelains chargés de célébrer journellement en faveur de ces âmes le
démon ne put souffrir une si belle institution et il excita Ostorge roi de
Sicile qui avait de grandes richesses et
195
des troupes nombreuses à déclarer la guerre à Eusèbe sous de frivoles
prétextes Ostorge se mit donc en route assiégea cette ville et s'en empara
dès que le duc apprit cette nouvelle il en éprouva une aussi vive douleur
que s'il eût perdu la moitié de ses états aussitôt il assemble ses officiers
tient conseil avec eux et se résout à tout entreprendre pour chasser
l'ennemi de cette place l'armée se forme bien inférieure à celle des
Siciliens et l'on marche ce n'était pas sans crainte à cause de cette grande
infériorité mais voici que les sentinelles avancées signalent au loin des
légions de cavalerie et d'infanterie vêtues de blanc chevaux blancs armes et
bannières blanches le duc reste interdit d'une part il tremblait que ce ne
fussent des renforts siciliens de l'a utre il lui semblait comprendre que
Dieu lui envoyait du secours il se décide à expédier des hérauts d'armes au
nombre de quatre pour faire une reconnaissance et découvrir à qui l'on a
affaire dès qu'ils furent à égale distance des deux armées quatre hérauts
des nouveau-venus se détachèrent et marchant vers eux les saluèrent en
disant "N'ayez aucune crainte nous sommes la milice du souverain Roi et nous
accourons au secours de votre prince qu'il vienne s'entendre avec notre chef
" le duc s'avança et joignit ses soldats à ceux que le Ciel lui adressait
ainsi miraculeusement dès qu'Ostorge aperçut les légions qu'il avait à
combattre ces vêtements blancs ces légions martiales qui lui étaient
inconnues il fut saisi de terreur des éclaireurs envoyés à la découverte lui
rapportèrent que ces nouvelles légions ne pouvaient apparaître que par
miracle personne dans le pays ne comprenant d'ou ni comment
196
elles étaient venues en même temps il fut sommé de restituer la Ville de
Dieu à son légitime souverain il s'empressa d'accéder à toutes les
propositions répara le dommage qu'il avait causé et se retira en toute hâte
Eusèbe rendit à Dieu ses actions de grâces et remercia les généreux inconnus
leur chef lui répondit : " Sachez prince que presque tous ces soldats que
vous voyez sont des âmes tirées du purgatoire par vos suffrages le Seigneur
leur a confié le soin de vous protéger dans cette extrémité continuez donc
cette charitable dévotion et n'oubliez jamais qu'autant d'âmes vous délivrez
autant vous acquérez d'amis et de défenseurs au ciel ." Puis tout disparut
le duc se jeta à genoux et bénit le Dieu de toute miséricorde qui
n'abandonne jamais les siens (V. Henri Grandgermain, Magn. Specul.exem.,
dist. 9, ex. 184.)
196
59ème Merveille Apparitions et révélations
nous savons que nous avons été
transférés de la mort à la vie. (I Joan, III, 14.)
Quoique déjà nous ayons
cité des apparitions et des révélations terribles sur les mystères de
l'autre vie pour la confusion de ces impies à qui il plaît de répéter
197
que personne n'est revenu nous dire ce qui s'y passe je n'hésite pas à en
rapporter deux autres appuyées sur l'indiscutable autorité du grand saint
Thomas d'Aquin témoin occulaire cet illustre docteur la gloire de l'Eglise
et de l'esprit humain était pénétré d'un grand zèle pour les pauvres âmes et
il pensait à elles dans ses sacrifices ses prières et ses mortifications
lorsqu'il était lecteur de théologie de l'Université de Paris il vit
apparaître devant lui l'âme de sa soeur morte abbesse de Sainte-Marie de
Capoue qui le conjura d'avoir pitié d'elle car elle souffrait cruellement
dans les flammes de l'autre vie et avait grand besoin d'être secourue le
saint s'empressa de prier de jeûner de se macérer et de réclamer les
charitables suffrages de plusieurs de ses amis il obtint la délivrance de sa
soeur et il en eut l'assurance à Rome ou on l'avait envoyé elle se fit voir
à lui de nouveau mais cette fois dans tout l'éclat du triomphe et de la joie
elle lui dit qu'il était exaucé que désormais elle allait pour l'éternité se
reposer dans le sein de Dieu Thomas saisit cette occasion de lui demander ce
qu'étaient devenus deux de ses frères morts depuis quelque temps l'âme
répondit que celui qui se nommait Arnaud jouissait dans le ciel d'un haut
degré de gloire pour avoir courageusement défendu le souverain pontife
contre l'empereur Frédéric d'Allemagne et avoir souffert persécution sur ce
sujet mais que Landolphe était encore dans les peines du purgatoire ou il
attendait qu'on s'intérressât à lui elle ajouta :" Pour vous mon frère
hâtez-vous de mettre la dernière main aux saintes choses que vous avez
entreprises car vous viendrez bientôt vous réunir à nous dans
198
le paradis ou une place magnifique vous attend en récompense de tout ce que
vous faites pour l'Eglise." Une autre fois comme le saint faisait oraison
dans l'église de Saint-Dominique à Naples il aperçut tout-à-coup frère
Romain qu'il avait laissé à Paris dans sa chaire de théologie pensant qu'il
vivait encore et qu'il venait le voir il se leva pour aller à sa rencontre
et le saluer en s'informant de son voyage et de sa santé le bon religieux
l'arrêtant lui dit que sa vie terrestre était achevée qu'il avait reçu déjà
la couronne et qu'il était envoyé de Dieu pour encourager Thomas dans ses
travaux celui-ci interdit au premier moment reprit courage et l'interrogea
sur ce qu'il mettait au-dessus de tout : " Suis-je en état de grâce ? "
demanda-t-il le défunt sourit l'assura qu'il y était et que ses oeuvres
étaient agréables à la divine Majesté il l'interrogea ensuite sur son propre
état à lui et Romain lui répondit qu'il jouissait actuellement de la gloire
après quinze jours de purgatoire pour différentes infidélités qu'il n'avait
point expiées auparavant enfin il voulut apprendre de cette âme certains
détails théologiques si par exemple dans le ciel on voit Dieu par le moyen
de la gloire élevant l'intelligence ou bien par toute autre action divine il
lui fut répondu seulement par le verset neuvième du psaume XLVIIe : " Sicut
audivimus sic vidimus in civitate Domini virtutum : nous avons vu dans la
cité du Dieu puissant selon ce que nous avons appris." En prononçant ces
mots la vision s'évanouit laissant l'angélique docteur dans une grande
impatience de monter auprès de son Sauveur adorable on voit par ce double
trait qu'en assurant que Dieu se sert quelquefois des âmes pour en faire ses
messagers
199
comme il fait des anges saint Thomas parlait après une expérience
personnelle qui ne pouvait le laisser dans le moindre doute ( V. Vie de
saint Thomas d'Aquin, par Pierre Mafféi ; Dario Dominicano, 7 mars.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
60ème Merveille mérite de la sainte obéissance.
Vous serez comme un enfant du Trés-Haut obéissant
et il aura pitié de vous ( Eccl.5 ou 15 ,11.)
Parmi les grands avantages de la
vertu d'obéissance si fortement recommandée par la sainte Ecriture et par
les saints Pères l'un des principaux est de délivrer des peines du
purgatoire ou du moins de les adoucir cela se comprend aisément celui qui
obéit en suivant les ordres du Seigneur qui lui sont intimés par son
supérieur entre en conformité parfaite avec la divine volonté c'est pourquoi
il ne saurait être puni pour des actions accomplies selon les lois de
l'infaillible sagesse Saint Jean Climaque dit de la sincère obéissance
qu'elle est le bouclier de nos oeuvres au grand tribunal voici un exemple la
bienheureuse Emilie dominicaine prieure du monastère de Sainte-Marguerite à
Verceil aimait à développer devant ses religieuses le mérite de l'obéissance
200
au point de vue spécial du purgatoire un des articles de la règle
interdisait de boire entre les repas à moins d'une permission expresse de la
supérieure et celle-ci avait pour pratique ordinaire de la refuser afin de
fournir à ses soeurs une occasion de pénitence facile seulement elle
s'efforçait de leur adoucir ce refus en les invitant à offrir leur soif à
Jésus en croix tourmenté de la même façon et à un degré bien plus
insupportable elle leur conseillait de réserver cette eau pour l'autre vie
ou les ardeurs du purgatoire la leur feraient désirer et d'en confier le
dépôt à l'ange gardien jusqu'à ce moment-là une des soeurs Cécile Avogadra
étant un jour pressée d'un besoin de ce genre vint demander à la servante de
Dieu l'autorisation de boire mais inspirée d'en-haut elle ne la lui accorda
pas et l'exhorta à s'imposer pour Jésus en croix cette légère car elle se
sentait très-altérée toutefois elle se rendit à l'obéissance et fit son
offrande de bon coeur au divin Epoux elle mourut peu de temps après il y
avait trois jours qu'elle était ensevelie lorsqu'elle apparut toute
resplendissante à la mère Emilie elle lui raconta avec mille actions de
grâces que devant souffrir en purgatoire pour un attachement déréglée à ses
parents elle avait été délivrée très promptement en récompense de ces
quelques gouttes de rafraîchissement qu'elle avait sacrifiées à l'obéissance
le troisième jour son ange gardien était descendu dans le lieu des tourments
portant cette eau offerte au Seigneur et la versant sur les flammes les
avait éteintes pour la conduire avec lui dans l'éternel séjour
201
nous devons rapporter aussi ce que fit notre bienheureuse à l'égard d'une
autre soeur appelée Marie- Isabelle qui éprouvait du dégoût pour le choeur
auquel elle préférait la conversation et d'autres amusements elle était
toujours la première à sortir après le dernier verset des psaumes or la
prieure affaire la pressait ainsi de s'éloigner à la hâte avant toutes les
autres même avant les anciennes la bonne religieuse sans chercher à feindre
avoua qu'elle s'ennuyait un peu à l'office et qu'elle trouvait trop lente la
marche de la communauté " C'est très bien reprit la prieure mais dites-moi
s'il vous en coûte d'être commodément assise au milieu de nous à chanter les
louanges divines comment donc ferez-vous dans le purgatoire lorsque vous
serez détenue au milieu des tourments ? je juge nécessaire de vous éviter
pour l'avenir cette terrible quitter votre place que la dernière." la soeur
se soumit avec grande simplicité Dieu bénit cette obéissance pieuse en lui
ôtant le dégoût et l'ennui dont elle se plaignait elle éprouva au contraire
une consolation extrême à prier longuement et à rester au choeur après
toutes les autres ce n'est pas tout elle obtint encore à cause de cela
d'être délivrée du purgatoire avant le temps d'expiation imposée à ses
défauts et que les heures qu'elle avait ainsi passées en oraison
d'obéissance fussent comptées pour heures de purgatoire en quoi sans doute
elle fut aidée par les prières de la bienheureuse Emilie très efficaces pour
les âmes souffrantes nous savons par son historien qu'elle avait obtenu de
la sorte par sa fervente intercession que son propre père vît changer en
202
trois heures seulement les trois jours de purgatoire prononcés contre lui
(V. Diario Domenicano, 3 mai.)
202
61ème Merveille Dévouement charitable.
Nous devons pour nos
frères donner notre vie.( I Joan, III, 16.)
Le nom du P. Jean-Eusèbe
Nieremberg (Ce père de l'ordre des Jésuites était espagnol et vécut de 1590 à 1668.)
est fort connu pour les ouvrages qu'il a publiés en faveur de la
religion et de la piété on ne sait pas aussi bien peut-être à quel point il
portait la dévotion aux âmes du purgatoire il s'imposait pour elles des
mortifications fréquentes accompagnées d'oraisons et de prières il y avait à
la cour de Madrid parmi ses pénitents une dame de qualité que sa direction
sage et expérimentée avait conduite à une haute perfection au milieu du
monde cette dame d'une faible complexion tomba dangeureusement malade d'une
fièvre maligne à laquelle les médecins ne surent point trouver de remède
avertie du péril elle en témoigna un profond chagrin non seulement à cause
des oeuvres utiles qu'elle avait entreprises et qu'il fallait abandonner
mais aussi par la
203
crainte du purgatoire ou elle prévoyait que la divine justice la retiendrait
le P. Eusèbe qui l'assistait usa de toutes les industries de sa charité de
tous les raisonnements les plus convaincants pour lui donner du courage de
la soumission à la volonté de Dieu et l'armer par les sacrements contre les
derniers combats mais elle toute livrée à son trouble et à ses terreurs
différait de jour en jour jusqu'à ce qu'elle tomba dans une sorte de
léthargie privée de connaissance entre la vie et la mort Alarmé à la pensée
qu'une personne qui avait donné de si saints exemples pût expirer sans les
secours de l'Eglise reçus en pleine liberté d'esprit le confesseur se retira
dans une chapelle voisine près de la chambre de la moribonde il y offrit le
saint sacrifice avec une grande ferveur conjurant le Seigneur d'accorder à
la malade au moins le temps de se reconnaitre et dêtre munie des sacrements
avant de paraitre devant lui il s'offrit à la justice divine pour souffrir
lui-même dans cette vie les tourments qui lui étaient réservés au purgatoire
afin que délivrée de cette appréhension elle se résignât plus facilement à
mourir Dieu fut favorable à une si pieuse et si charitable prière la messe
était à peine achevée que la dame revint à elle et avec un tel changement de
dispositions qu'elle demanda d'elle-même les sacrements et les reçut avec
la plus édifiante ferveur quand ensuite elle entendit le P. Eusèbe l'assurer
qu'elle ne devait plus craindre le purgatoire elle se soumit entièrement à
la mort et expira dans la plus parfaite tranquilité on vit bien que la
prière du bon religieux avait été doublement exaucée car à partir de cet
instant et pendant seize ans qu'il vécut encore son existence ne fut plus
qu'un
204
martyre et un rigoureux purgatoire aucun remède naturel ne pouvait soulager
ses douleurs et il n'avait d'autre adoucissement que le souvenir de la cause
généreuse pour laquelle il les endurait ses prières n'étaient pas moins
profitables aux âmes déjà condamnées à ce feu terrible comme on le vit en
plusieurs occasions il ne manquait point de réciter chaque jour le chapelet
à leur intention et de gagner pour elles le plus d'indulgences qu'il se
pouvait dévotion à laquelle il invita depuis les fidèles dans un ouvrage
spécial le chapelet qu'il possédait avait reçu quantité de bénédictions de
ce genre il eut le chagrin de le perdre et se vit dans la nécessité d'en
emprunter chaque jour un semblable à l'un de ses amis ce qui se pouvait
faire alors un jour cependant occupé plus que de coutume à différentes
affaires qui avaient pour objet la gloire de Dieu il s'aperçut fort tard
qu'il avait oublié son tribut quotidien de prières et qu'il ne pouvait plus
à cette heure avancée avoir recours à son ami ce lui fut une peine
très-sensible il se mit à genoux pour supplier les pauvres âmes de lui
pardonner leur offrant sa bonne volonté son désir de gagner sur ce rosaire
les indulgences qui les soulageaient mais il ne l'avait point et ne pouvait
se le procurer pour ce jour-là il priait encore lorsqu'il entend un bruit
singulier au plafond de sa chambre il y jette les yeux et aussitôt il en
voit tomber son propre chapelet avec toutes les médailles qui y étaient
attachées il ne douta pas que ce ne fussent les âmes pour lesquelles il
méritait qui le lui eussent renvoyé je laisse à juger avec quelle ferveur
nouvelle après cette merveille il récita les cinq dizaines accoutumées et
combien il se fortifia dans une pratique qu'il voyait si utile et si
favorisée du ciel.
205
on a conservé de lui un autre trait non moins précieux il se tenait une nuit
priant au milieu du choeur de l'église du collége impérial de Madrid quand
il vit apparaître à ses yeux l'âme d'un père lecteur de théologie mort
quelques jours auparavant le défunt réclamait une part de ses suffrages
parce qu'il était condamné à de rudes tourments dans le lieu d'épreuve il
avoua même que le sujet de ces tourments était d'avoir souvent rapporté aux
supérieurs avec exagération et sans assez de charité les défauts du prochain
à cause de cela sa langue était livrée à un feu cuisant cependant la divine
miséricorde et l'intercession de Marie lui avaient accordé de venir
solliciter des prières et de servir en même temps d'exemple aux autres il
espérait donc qu'un si charitable religieux autrefois son ami dévoué
d'ailleurs aux âmes des défunts aurait compassion de lui le P. Eusèbe fut
extrêmement touché de ce discours et ayant promis ce qu'on lui demandait se
hâta de faire part de tout au supérieur le jour suivant dès l'aube il
célébra la sainte Messe pour cette âme et continua de prier et de faire
pénitence à son intention bientôt elle lui apprit que grâce à lui l'instant
du triomphe était arrivé pour elle
(V. Alph. de Andrada. Vita P. Jos. Nierembergii, S. J. c. IX.)
Vous serez comme un enfant du Trés-Haut obéissant
et il aura pitié de vous ( Eccl.5 ou 15 ,11.)
Parmi les grands avantages de la
vertu d'obéissance si fortement recommandée par la sainte Ecriture et par
les saints Pères l'un des principaux est de délivrer des peines du
purgatoire ou du moins de les adoucir cela se comprend aisément celui qui
obéit en suivant les ordres du Seigneur qui lui sont intimés par son
supérieur entre en conformité parfaite avec la divine volonté c'est pourquoi
il ne saurait être puni pour des actions accomplies selon les lois de
l'infaillible sagesse Saint Jean Climaque dit de la sincère obéissance
qu'elle est le bouclier de nos oeuvres au grand tribunal voici un exemple la
bienheureuse Emilie dominicaine prieure du monastère de Sainte-Marguerite à
Verceil aimait à développer devant ses religieuses le mérite de l'obéissance
200
au point de vue spécial du purgatoire un des articles de la règle
interdisait de boire entre les repas à moins d'une permission expresse de la
supérieure et celle-ci avait pour pratique ordinaire de la refuser afin de
fournir à ses soeurs une occasion de pénitence facile seulement elle
s'efforçait de leur adoucir ce refus en les invitant à offrir leur soif à
Jésus en croix tourmenté de la même façon et à un degré bien plus
insupportable elle leur conseillait de réserver cette eau pour l'autre vie
ou les ardeurs du purgatoire la leur feraient désirer et d'en confier le
dépôt à l'ange gardien jusqu'à ce moment-là une des soeurs Cécile Avogadra
étant un jour pressée d'un besoin de ce genre vint demander à la servante de
Dieu l'autorisation de boire mais inspirée d'en-haut elle ne la lui accorda
pas et l'exhorta à s'imposer pour Jésus en croix cette légère car elle se
sentait très-altérée toutefois elle se rendit à l'obéissance et fit son
offrande de bon coeur au divin Epoux elle mourut peu de temps après il y
avait trois jours qu'elle était ensevelie lorsqu'elle apparut toute
resplendissante à la mère Emilie elle lui raconta avec mille actions de
grâces que devant souffrir en purgatoire pour un attachement déréglée à ses
parents elle avait été délivrée très promptement en récompense de ces
quelques gouttes de rafraîchissement qu'elle avait sacrifiées à l'obéissance
le troisième jour son ange gardien était descendu dans le lieu des tourments
portant cette eau offerte au Seigneur et la versant sur les flammes les
avait éteintes pour la conduire avec lui dans l'éternel séjour
201
nous devons rapporter aussi ce que fit notre bienheureuse à l'égard d'une
autre soeur appelée Marie- Isabelle qui éprouvait du dégoût pour le choeur
auquel elle préférait la conversation et d'autres amusements elle était
toujours la première à sortir après le dernier verset des psaumes or la
prieure affaire la pressait ainsi de s'éloigner à la hâte avant toutes les
autres même avant les anciennes la bonne religieuse sans chercher à feindre
avoua qu'elle s'ennuyait un peu à l'office et qu'elle trouvait trop lente la
marche de la communauté " C'est très bien reprit la prieure mais dites-moi
s'il vous en coûte d'être commodément assise au milieu de nous à chanter les
louanges divines comment donc ferez-vous dans le purgatoire lorsque vous
serez détenue au milieu des tourments ? je juge nécessaire de vous éviter
pour l'avenir cette terrible quitter votre place que la dernière." la soeur
se soumit avec grande simplicité Dieu bénit cette obéissance pieuse en lui
ôtant le dégoût et l'ennui dont elle se plaignait elle éprouva au contraire
une consolation extrême à prier longuement et à rester au choeur après
toutes les autres ce n'est pas tout elle obtint encore à cause de cela
d'être délivrée du purgatoire avant le temps d'expiation imposée à ses
défauts et que les heures qu'elle avait ainsi passées en oraison
d'obéissance fussent comptées pour heures de purgatoire en quoi sans doute
elle fut aidée par les prières de la bienheureuse Emilie très efficaces pour
les âmes souffrantes nous savons par son historien qu'elle avait obtenu de
la sorte par sa fervente intercession que son propre père vît changer en
202
trois heures seulement les trois jours de purgatoire prononcés contre lui
(V. Diario Domenicano, 3 mai.)
202
61ème Merveille Dévouement charitable.
Nous devons pour nos
frères donner notre vie.( I Joan, III, 16.)
Le nom du P. Jean-Eusèbe
Nieremberg (Ce père de l'ordre des Jésuites était espagnol et vécut de 1590 à 1668.)
est fort connu pour les ouvrages qu'il a publiés en faveur de la
religion et de la piété on ne sait pas aussi bien peut-être à quel point il
portait la dévotion aux âmes du purgatoire il s'imposait pour elles des
mortifications fréquentes accompagnées d'oraisons et de prières il y avait à
la cour de Madrid parmi ses pénitents une dame de qualité que sa direction
sage et expérimentée avait conduite à une haute perfection au milieu du
monde cette dame d'une faible complexion tomba dangeureusement malade d'une
fièvre maligne à laquelle les médecins ne surent point trouver de remède
avertie du péril elle en témoigna un profond chagrin non seulement à cause
des oeuvres utiles qu'elle avait entreprises et qu'il fallait abandonner
mais aussi par la
203
crainte du purgatoire ou elle prévoyait que la divine justice la retiendrait
le P. Eusèbe qui l'assistait usa de toutes les industries de sa charité de
tous les raisonnements les plus convaincants pour lui donner du courage de
la soumission à la volonté de Dieu et l'armer par les sacrements contre les
derniers combats mais elle toute livrée à son trouble et à ses terreurs
différait de jour en jour jusqu'à ce qu'elle tomba dans une sorte de
léthargie privée de connaissance entre la vie et la mort Alarmé à la pensée
qu'une personne qui avait donné de si saints exemples pût expirer sans les
secours de l'Eglise reçus en pleine liberté d'esprit le confesseur se retira
dans une chapelle voisine près de la chambre de la moribonde il y offrit le
saint sacrifice avec une grande ferveur conjurant le Seigneur d'accorder à
la malade au moins le temps de se reconnaitre et dêtre munie des sacrements
avant de paraitre devant lui il s'offrit à la justice divine pour souffrir
lui-même dans cette vie les tourments qui lui étaient réservés au purgatoire
afin que délivrée de cette appréhension elle se résignât plus facilement à
mourir Dieu fut favorable à une si pieuse et si charitable prière la messe
était à peine achevée que la dame revint à elle et avec un tel changement de
dispositions qu'elle demanda d'elle-même les sacrements et les reçut avec
la plus édifiante ferveur quand ensuite elle entendit le P. Eusèbe l'assurer
qu'elle ne devait plus craindre le purgatoire elle se soumit entièrement à
la mort et expira dans la plus parfaite tranquilité on vit bien que la
prière du bon religieux avait été doublement exaucée car à partir de cet
instant et pendant seize ans qu'il vécut encore son existence ne fut plus
qu'un
204
martyre et un rigoureux purgatoire aucun remède naturel ne pouvait soulager
ses douleurs et il n'avait d'autre adoucissement que le souvenir de la cause
généreuse pour laquelle il les endurait ses prières n'étaient pas moins
profitables aux âmes déjà condamnées à ce feu terrible comme on le vit en
plusieurs occasions il ne manquait point de réciter chaque jour le chapelet
à leur intention et de gagner pour elles le plus d'indulgences qu'il se
pouvait dévotion à laquelle il invita depuis les fidèles dans un ouvrage
spécial le chapelet qu'il possédait avait reçu quantité de bénédictions de
ce genre il eut le chagrin de le perdre et se vit dans la nécessité d'en
emprunter chaque jour un semblable à l'un de ses amis ce qui se pouvait
faire alors un jour cependant occupé plus que de coutume à différentes
affaires qui avaient pour objet la gloire de Dieu il s'aperçut fort tard
qu'il avait oublié son tribut quotidien de prières et qu'il ne pouvait plus
à cette heure avancée avoir recours à son ami ce lui fut une peine
très-sensible il se mit à genoux pour supplier les pauvres âmes de lui
pardonner leur offrant sa bonne volonté son désir de gagner sur ce rosaire
les indulgences qui les soulageaient mais il ne l'avait point et ne pouvait
se le procurer pour ce jour-là il priait encore lorsqu'il entend un bruit
singulier au plafond de sa chambre il y jette les yeux et aussitôt il en
voit tomber son propre chapelet avec toutes les médailles qui y étaient
attachées il ne douta pas que ce ne fussent les âmes pour lesquelles il
méritait qui le lui eussent renvoyé je laisse à juger avec quelle ferveur
nouvelle après cette merveille il récita les cinq dizaines accoutumées et
combien il se fortifia dans une pratique qu'il voyait si utile et si
favorisée du ciel.
205
on a conservé de lui un autre trait non moins précieux il se tenait une nuit
priant au milieu du choeur de l'église du collége impérial de Madrid quand
il vit apparaître à ses yeux l'âme d'un père lecteur de théologie mort
quelques jours auparavant le défunt réclamait une part de ses suffrages
parce qu'il était condamné à de rudes tourments dans le lieu d'épreuve il
avoua même que le sujet de ces tourments était d'avoir souvent rapporté aux
supérieurs avec exagération et sans assez de charité les défauts du prochain
à cause de cela sa langue était livrée à un feu cuisant cependant la divine
miséricorde et l'intercession de Marie lui avaient accordé de venir
solliciter des prières et de servir en même temps d'exemple aux autres il
espérait donc qu'un si charitable religieux autrefois son ami dévoué
d'ailleurs aux âmes des défunts aurait compassion de lui le P. Eusèbe fut
extrêmement touché de ce discours et ayant promis ce qu'on lui demandait se
hâta de faire part de tout au supérieur le jour suivant dès l'aube il
célébra la sainte Messe pour cette âme et continua de prier et de faire
pénitence à son intention bientôt elle lui apprit que grâce à lui l'instant
du triomphe était arrivé pour elle
(V. Alph. de Andrada. Vita P. Jos. Nierembergii, S. J. c. IX.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
62ème Merveille Suffrages conformes aux bonnes oeuvres accomplies pendant la vie
chacun
recevra ce qui est dû aux bonnes ou aux mauvaises actions qu'il aura faites
pendant qu'il était revêtu de son corps ( II. Cor. v, 10.)
La justice divine
proportionne les châtiments aux fautes celui qui a été ici-bas dur pour les
pauvres ne trouve plus après sa mort de compassion ni de miséricorde celui
qui fut idolâtre de son corps ne lui refusant aucune voluptés après
lesquelles il s'élance se voit condamné à des tourments atroces sans
adoucissement la même corrélation a lieu de la part de la bonté céleste à
l'égard des vertus contraires celui qui aima et pratiqua l'aumône est
soulagé dans le purgatoire par les suffrages de l'aumône celui qui aima et
pratiqua la mortification est soulagé par les suffrages de la pénitence et
ainsi du reste nous nous préparons donc à nous-même notre avenir l'empereur
d'Allemagne Othon IV avait été le généreux bienfaiteur des maisons
religieuses et en même temps d'une grande austérité personnelle aussi après
sa mort il reçut un grand soulagement dans ses peines et fut promptement
délivré en vertu des prières et des
207
mortifications des moines il était mort dans une parfaite réputation de
religion et chacun le croyait au ciel lorsqu'un matin il se fit voir à l'une
de ses tantes pour réclamer le secours de ses prières celle-ci était abbesse
d'un couvent fort régulier et elle exerçait sur les soeurs non-seulement
l'autorité de sa charge mais celle aussi de son éminente vertu et des dons
miraculeux de la grâce qui brillaient en elle elle était donc ce matin-là à
une fenêtre du parloir elle entendit frapper légèrement à la porte qui
s'ouvrit aussitôt d'elle-même et voici l'empereur qui s'avance dans
l'attitude d'un suppliant " Je suis lui dit-il d'un ton douloureux passé à
l'autre vie et je languis dans les peines du purgatoire Ah si vous avez pour
moi quelque compassion montrez-la je vous en supplie que les monastères
avertis par vous me viennent en aide qu'on récite en ma faveur le psautier
un grand nombre de fois avec la discipline pendant le De profundis et de
plus l'Oraison Dominicale et la Salutation Angélique cette expiation
volontaire me purifiera j'en ai l'assurance car j'ai fait du bien aux ordres
religieux et Dieu veut me délivrer par eux." Le prince pouvait bien parler
ainsi ayant l'année même de sa mort dans une grande disette qui régnait par
tout le pays secouru de toutes ses ressources les maisons consacrées à la
retraite et à la prière avertis par l'abbesse les différents monastères
accomplirent en hâte ce que le défunt attendait d'eux les prières et les
austérités comme il les avait demandées en reconnaissance de sa protection
passée peu de jours s'écoulèrent et l'âme apparut de nouveau de la même
manière et au même lieu mais quelle différence une telle lumière émanait
d'elle une gloire si admirable
208
l'environnait que les yeux en étaient éblouis elle exprima sa gratitude dans
les termes les plus touchants avec mille bénédictions au Ciel qui daignait
la recevoir parmi les élus éternellement couronnés (V. Thom. de Catimpré,
Apum, liv, II, c. 35, n°19 ; Théoph. Reynaud, Heier Spirit, q. II. lect. 3,
6e point, qu. 6e.)
208
63ème Merveille Idée du feu du purgatoire et des leçons qu'il nous donne
il a mis le feu à mes os,et il m'a instruit (Threni I, 13.)
la vie de la
bienheureuse Catherine de Racconigi est pleine de visions admirables de la
gloire du paradis des supplices de l'enfer et des peines du purgatoire Dieu
daigna lui donner de ces dernières non-seulement des visions mais une preuve
sensible parce qu'il voulait exciter dans son coeur un zèle ardent pour la
délivrance des âmes qui y gémissent le Sauveur lui apparut un jour et tira
du sang de la poitrine de la sainte lui faisant entendre qu'une partie
tombait sur la tête des pêcheurs et l'autre sur les âmes du purgatoire
Catherine comprit donc que par ses prières ses exhortations ses pénitences
elle devait convertir beaucoup d'hommes éloignés de leur Créateur et en même
temps
209
délivrer beaucoup d'âmes du lieu de l'expiation bientôt ce zèle redoubla
encore à l'occasion du fait que je vais rapporter comme elle était une fois
étendue dans son lit avec une grosse fièvre elle se mit à méditer sur les
tourments de l'autre vie bientôt elle se sentit ravie en extase et conduite
en présence des flammes même du purgatoire là le Seigneur afin qu'elle
conçut une dévotion plus grande voulut qu'elle regardait ce terrible feu
elle entendit une voix qui lui disait : " Tu vas ressentir tout cela pour un
moment." A l'instant même une étincelle se détacha et vint toucher sa joue
gauche à la vue de quelques-unes de ses compagnes qui se tenaient autour de
son lit pour l'assister dans sa maladie or la douleur qu'elle en éprouva
fut telle que son visage tout entier enfla et resta plusieurs jours dans cet
état elle disait que en comparaison de ce que cette simple étincelle lui
causait de tourments les souffrances de cette vie n'étaient absolument rien
dès cette heure elle redoubla de dévouement pour les pauvres âmes il lui
semblait qu'elle ne faisait jamais assez en leur faveur bien qu'elle
s'imposât les plus dures austérités et travaillât de toutes ses forces à
les soulager plusieurs de ces âmes lui apparurent pour la remercier de leur
délivrance et l'encourager dans sa dévotion la première qu'elle vit ainsi
d'abord dans un cachot obscur puis brillante de célestes clartés fut celle
d'un prieur de la chartreuse ce religieux était tombé dans le schisme du
conciliabule de Pise et quoiqu'il eût été relevé des censures à l'article de
la mort il avait laissé à la communauté quelques doutes sur sa conversion
210
sincère et sur son salut éternel Catherine manifesta ce qui lui en avait été
révélé et réclama les prières des moines jusqu'au moment ou elle acquit la
certitude de la délivrance plus étonnante fut son histoire avec une soeur du
tiers-ordre laquelle étant passée inopinément de vie à trépas elle désirait
vivement de savoir en quel état elle se trouvait pendant la cérémonie de
l'enterrement elle supplia le Seigneur de lui faire connaître ce mystère et
elle fut exaucée le cadavre qui était exposé à découvert avait selon l'usage
les mains croisées sur la poitrine la droite se leva saisit celle de
Catherine qui était près de la bière et la serra fortement comme si l'eût
conjurée de se souvenir de leur amitié et de lui accorder le bénéfice de ses
suffrages elle l'entendit ainsi pria beaucoup et finit par voir cette âme
qui lui apparut directement pour la remercier la bénir et l'assurer qu'elle
était admise dans le sein de Dieu Catherine recevait elle-même par le moyen
de ces âmes reconnaissantes des grâces précieuses particulièrement de
révélations de choses éloignées ainsi par exemple lorsque l'armée française
descendit en Lombardie en 1525 sous la conduite de François 1er et mit le
siège devant Pavie la reine Claude première femme de ce prince se fit voir à
notre bienheureuse et lui annonça la prise du roi et la défaite de ses
troupes et cela afin qu'elle priât et fît prier pour tant de soldats jetés à
l'improviste entre les mains de leur juge (V. Dario Dominicano, 4 sept. ,
Vie de la bienh.)
chacun
recevra ce qui est dû aux bonnes ou aux mauvaises actions qu'il aura faites
pendant qu'il était revêtu de son corps ( II. Cor. v, 10.)
La justice divine
proportionne les châtiments aux fautes celui qui a été ici-bas dur pour les
pauvres ne trouve plus après sa mort de compassion ni de miséricorde celui
qui fut idolâtre de son corps ne lui refusant aucune voluptés après
lesquelles il s'élance se voit condamné à des tourments atroces sans
adoucissement la même corrélation a lieu de la part de la bonté céleste à
l'égard des vertus contraires celui qui aima et pratiqua l'aumône est
soulagé dans le purgatoire par les suffrages de l'aumône celui qui aima et
pratiqua la mortification est soulagé par les suffrages de la pénitence et
ainsi du reste nous nous préparons donc à nous-même notre avenir l'empereur
d'Allemagne Othon IV avait été le généreux bienfaiteur des maisons
religieuses et en même temps d'une grande austérité personnelle aussi après
sa mort il reçut un grand soulagement dans ses peines et fut promptement
délivré en vertu des prières et des
207
mortifications des moines il était mort dans une parfaite réputation de
religion et chacun le croyait au ciel lorsqu'un matin il se fit voir à l'une
de ses tantes pour réclamer le secours de ses prières celle-ci était abbesse
d'un couvent fort régulier et elle exerçait sur les soeurs non-seulement
l'autorité de sa charge mais celle aussi de son éminente vertu et des dons
miraculeux de la grâce qui brillaient en elle elle était donc ce matin-là à
une fenêtre du parloir elle entendit frapper légèrement à la porte qui
s'ouvrit aussitôt d'elle-même et voici l'empereur qui s'avance dans
l'attitude d'un suppliant " Je suis lui dit-il d'un ton douloureux passé à
l'autre vie et je languis dans les peines du purgatoire Ah si vous avez pour
moi quelque compassion montrez-la je vous en supplie que les monastères
avertis par vous me viennent en aide qu'on récite en ma faveur le psautier
un grand nombre de fois avec la discipline pendant le De profundis et de
plus l'Oraison Dominicale et la Salutation Angélique cette expiation
volontaire me purifiera j'en ai l'assurance car j'ai fait du bien aux ordres
religieux et Dieu veut me délivrer par eux." Le prince pouvait bien parler
ainsi ayant l'année même de sa mort dans une grande disette qui régnait par
tout le pays secouru de toutes ses ressources les maisons consacrées à la
retraite et à la prière avertis par l'abbesse les différents monastères
accomplirent en hâte ce que le défunt attendait d'eux les prières et les
austérités comme il les avait demandées en reconnaissance de sa protection
passée peu de jours s'écoulèrent et l'âme apparut de nouveau de la même
manière et au même lieu mais quelle différence une telle lumière émanait
d'elle une gloire si admirable
208
l'environnait que les yeux en étaient éblouis elle exprima sa gratitude dans
les termes les plus touchants avec mille bénédictions au Ciel qui daignait
la recevoir parmi les élus éternellement couronnés (V. Thom. de Catimpré,
Apum, liv, II, c. 35, n°19 ; Théoph. Reynaud, Heier Spirit, q. II. lect. 3,
6e point, qu. 6e.)
208
63ème Merveille Idée du feu du purgatoire et des leçons qu'il nous donne
il a mis le feu à mes os,et il m'a instruit (Threni I, 13.)
la vie de la
bienheureuse Catherine de Racconigi est pleine de visions admirables de la
gloire du paradis des supplices de l'enfer et des peines du purgatoire Dieu
daigna lui donner de ces dernières non-seulement des visions mais une preuve
sensible parce qu'il voulait exciter dans son coeur un zèle ardent pour la
délivrance des âmes qui y gémissent le Sauveur lui apparut un jour et tira
du sang de la poitrine de la sainte lui faisant entendre qu'une partie
tombait sur la tête des pêcheurs et l'autre sur les âmes du purgatoire
Catherine comprit donc que par ses prières ses exhortations ses pénitences
elle devait convertir beaucoup d'hommes éloignés de leur Créateur et en même
temps
209
délivrer beaucoup d'âmes du lieu de l'expiation bientôt ce zèle redoubla
encore à l'occasion du fait que je vais rapporter comme elle était une fois
étendue dans son lit avec une grosse fièvre elle se mit à méditer sur les
tourments de l'autre vie bientôt elle se sentit ravie en extase et conduite
en présence des flammes même du purgatoire là le Seigneur afin qu'elle
conçut une dévotion plus grande voulut qu'elle regardait ce terrible feu
elle entendit une voix qui lui disait : " Tu vas ressentir tout cela pour un
moment." A l'instant même une étincelle se détacha et vint toucher sa joue
gauche à la vue de quelques-unes de ses compagnes qui se tenaient autour de
son lit pour l'assister dans sa maladie or la douleur qu'elle en éprouva
fut telle que son visage tout entier enfla et resta plusieurs jours dans cet
état elle disait que en comparaison de ce que cette simple étincelle lui
causait de tourments les souffrances de cette vie n'étaient absolument rien
dès cette heure elle redoubla de dévouement pour les pauvres âmes il lui
semblait qu'elle ne faisait jamais assez en leur faveur bien qu'elle
s'imposât les plus dures austérités et travaillât de toutes ses forces à
les soulager plusieurs de ces âmes lui apparurent pour la remercier de leur
délivrance et l'encourager dans sa dévotion la première qu'elle vit ainsi
d'abord dans un cachot obscur puis brillante de célestes clartés fut celle
d'un prieur de la chartreuse ce religieux était tombé dans le schisme du
conciliabule de Pise et quoiqu'il eût été relevé des censures à l'article de
la mort il avait laissé à la communauté quelques doutes sur sa conversion
210
sincère et sur son salut éternel Catherine manifesta ce qui lui en avait été
révélé et réclama les prières des moines jusqu'au moment ou elle acquit la
certitude de la délivrance plus étonnante fut son histoire avec une soeur du
tiers-ordre laquelle étant passée inopinément de vie à trépas elle désirait
vivement de savoir en quel état elle se trouvait pendant la cérémonie de
l'enterrement elle supplia le Seigneur de lui faire connaître ce mystère et
elle fut exaucée le cadavre qui était exposé à découvert avait selon l'usage
les mains croisées sur la poitrine la droite se leva saisit celle de
Catherine qui était près de la bière et la serra fortement comme si l'eût
conjurée de se souvenir de leur amitié et de lui accorder le bénéfice de ses
suffrages elle l'entendit ainsi pria beaucoup et finit par voir cette âme
qui lui apparut directement pour la remercier la bénir et l'assurer qu'elle
était admise dans le sein de Dieu Catherine recevait elle-même par le moyen
de ces âmes reconnaissantes des grâces précieuses particulièrement de
révélations de choses éloignées ainsi par exemple lorsque l'armée française
descendit en Lombardie en 1525 sous la conduite de François 1er et mit le
siège devant Pavie la reine Claude première femme de ce prince se fit voir à
notre bienheureuse et lui annonça la prise du roi et la défaite de ses
troupes et cela afin qu'elle priât et fît prier pour tant de soldats jetés à
l'improviste entre les mains de leur juge (V. Dario Dominicano, 4 sept. ,
Vie de la bienh.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
211
64ème Merveille Marie au jour de son Assomption.
En montant au ciel elle emmêne la captivité
captive ( Eph. IV, 8.)
La gloire que l'Apôtre saluait dans le Rédempteur du
monde lorsque montant au ciel au jour de son ascension il y conduisait avec
lui triomphalement les âmes des patriaches arrachées aux limbes Acendens in
altum captivam duxit captivitatem cette gloire Gerson l'attribue à bon droit
à la mère de Jésus dans son assomption elle se présente au ciel dit-il
suivie d'une nombreuse multitude d'âmes du purgatoire et chaque année à
pareil jour elle en délivre une troupe nouvelle Saint Pierre Damien confirme
cette pensée par une vision miraculeuse voici comment il s'exprime a la fête
de l'Assomption de la divine Vierge le peuple romain a coutume pendant la
nuit qui précède de visiter pieusement les églises de la ville un cierge à
la main parmi la foule se trouvait une année une dame de vie très-édifiante
qui vint ainsi s'agenouiller dans la basilique de l'Ara-Coeli au Capitole
elle y aperçut à une certaine distance d'elle une femme qu'elle avait
beaucoup connue et qui était morte depuis un peu moins d'une année sa
surprise on le pense bien fut extrême elle aurait eu le plus grand désir de
lui parler
212
mais il était fort difficile de fendre la foule pour arriver jusqu'à elle
c'est pourquoi elle se plaça dans un coin l'attendant à la sortie et dès
qu'elle put s'approcher lui prenant la main : " N'êtes-vous pas lui dit-elle
ma marraine Marozie qui m'a tenu sur les fonts du baptême ? - Oui répondit
l'apparition c'est moi-même - Comment donc vous rencontré-je aujourd'hui
parmi les vivants lorsque je sais que vous êtes morte l'année dernière ?
Qu'êtes-vous devenue de l'autre côté du tombeau ?" La défunte lui répondit :
" Jusqu'à ce jour je suis restée plongée dans un feu épouvantable pour les
fautes de ma jeunesse alors que je me plaisais aux ajustements et aux
pauvres immodestes tenant avec mes compagnes des discours inconvenants et
m'abandonnant à de coupables affections je m'étais à la vérité confessée de
toutes ces iniquités mais en recevant la rémission de la coulpe je ne reçus
pas en même temps celles des peines temporelles que j'avais méritées et le
purgatoire m'attendait avec de cruelles tortures mais maintenant dans cette
grande solennité la Reine du ciel émue de compassion envers les âmes
souffrantes a adressé pour nous ses prières au redoutable Juge et a obtenu
pour moi et pour beaucoup d'autres la grâce d'être reçues en paradis le jour
de son assomption et tel est le nombre des âmes que sa toute puissance
intercession a sauvées dans cette circonstance que celui du peuple de Rome
n'est pas plus élevé a cause de cela nous toutes ( vous ne voyez que moi
mais il y en a bien d'autres !) nous nous transportons dans les sanctuaires
dédiés à Marie afin de lui rendre grâces et de la bénir autant que nous
pouvons pour son immense miséricorde."
213
A ce récit la bonne dame restait comme stupéfaite ne sachant si elle devait
ajouter foi à ce qu'elle entendait ce que voyant Marozie elle ajouta : "
Afin que vous ne doutiez point de la vérité de mon histoire sachez que
vous-même dans un an et à pareille fête de l'Assomption vous mourrez si vous
passez cette époque tenez tout ceci pour une illusion." Puis elle disparut
cette dame resta seule dans l'église ne pouvant plus douter de la grâce que
Dieu lui faisait par cet avertissement dès cette heure elle renonça à toutes
les vanités mondaines s'habilla modestement revêtit le cilice vécut dans la
retraite et l'austérité d'une pénitence exemplaire fréquentant assidûment le
tribunal de la réconciliation et la sainte table elle espérait abréger de la
sorte le temps du purgatoire que méritaient ses péchés l'avant-veille de la
fête elle tomba malade et fut rapidement conduite à toute extrémité le jour
même de l'assomption elle expira et alla éprouver les effets de la
maternelle bonté de Marie (V. Petri Damiani Opusc. 34, 2e part., ch. 3.)
64ème Merveille Marie au jour de son Assomption.
En montant au ciel elle emmêne la captivité
captive ( Eph. IV, 8.)
La gloire que l'Apôtre saluait dans le Rédempteur du
monde lorsque montant au ciel au jour de son ascension il y conduisait avec
lui triomphalement les âmes des patriaches arrachées aux limbes Acendens in
altum captivam duxit captivitatem cette gloire Gerson l'attribue à bon droit
à la mère de Jésus dans son assomption elle se présente au ciel dit-il
suivie d'une nombreuse multitude d'âmes du purgatoire et chaque année à
pareil jour elle en délivre une troupe nouvelle Saint Pierre Damien confirme
cette pensée par une vision miraculeuse voici comment il s'exprime a la fête
de l'Assomption de la divine Vierge le peuple romain a coutume pendant la
nuit qui précède de visiter pieusement les églises de la ville un cierge à
la main parmi la foule se trouvait une année une dame de vie très-édifiante
qui vint ainsi s'agenouiller dans la basilique de l'Ara-Coeli au Capitole
elle y aperçut à une certaine distance d'elle une femme qu'elle avait
beaucoup connue et qui était morte depuis un peu moins d'une année sa
surprise on le pense bien fut extrême elle aurait eu le plus grand désir de
lui parler
212
mais il était fort difficile de fendre la foule pour arriver jusqu'à elle
c'est pourquoi elle se plaça dans un coin l'attendant à la sortie et dès
qu'elle put s'approcher lui prenant la main : " N'êtes-vous pas lui dit-elle
ma marraine Marozie qui m'a tenu sur les fonts du baptême ? - Oui répondit
l'apparition c'est moi-même - Comment donc vous rencontré-je aujourd'hui
parmi les vivants lorsque je sais que vous êtes morte l'année dernière ?
Qu'êtes-vous devenue de l'autre côté du tombeau ?" La défunte lui répondit :
" Jusqu'à ce jour je suis restée plongée dans un feu épouvantable pour les
fautes de ma jeunesse alors que je me plaisais aux ajustements et aux
pauvres immodestes tenant avec mes compagnes des discours inconvenants et
m'abandonnant à de coupables affections je m'étais à la vérité confessée de
toutes ces iniquités mais en recevant la rémission de la coulpe je ne reçus
pas en même temps celles des peines temporelles que j'avais méritées et le
purgatoire m'attendait avec de cruelles tortures mais maintenant dans cette
grande solennité la Reine du ciel émue de compassion envers les âmes
souffrantes a adressé pour nous ses prières au redoutable Juge et a obtenu
pour moi et pour beaucoup d'autres la grâce d'être reçues en paradis le jour
de son assomption et tel est le nombre des âmes que sa toute puissance
intercession a sauvées dans cette circonstance que celui du peuple de Rome
n'est pas plus élevé a cause de cela nous toutes ( vous ne voyez que moi
mais il y en a bien d'autres !) nous nous transportons dans les sanctuaires
dédiés à Marie afin de lui rendre grâces et de la bénir autant que nous
pouvons pour son immense miséricorde."
213
A ce récit la bonne dame restait comme stupéfaite ne sachant si elle devait
ajouter foi à ce qu'elle entendait ce que voyant Marozie elle ajouta : "
Afin que vous ne doutiez point de la vérité de mon histoire sachez que
vous-même dans un an et à pareille fête de l'Assomption vous mourrez si vous
passez cette époque tenez tout ceci pour une illusion." Puis elle disparut
cette dame resta seule dans l'église ne pouvant plus douter de la grâce que
Dieu lui faisait par cet avertissement dès cette heure elle renonça à toutes
les vanités mondaines s'habilla modestement revêtit le cilice vécut dans la
retraite et l'austérité d'une pénitence exemplaire fréquentant assidûment le
tribunal de la réconciliation et la sainte table elle espérait abréger de la
sorte le temps du purgatoire que méritaient ses péchés l'avant-veille de la
fête elle tomba malade et fut rapidement conduite à toute extrémité le jour
même de l'assomption elle expira et alla éprouver les effets de la
maternelle bonté de Marie (V. Petri Damiani Opusc. 34, 2e part., ch. 3.)
Re: Les Merveilles Divines dans les Ames du Purgatoire Abbé Ross
65ème Merveille Recompense du bien accompli.
Avant la mort faites du bien à votre ami donnez
pour reçevoir et établissez la justice dans votre âme ( Eccli. XIV, 13).
Nous
avons vu plus haut un prince récompensé après sa mort pour le bien qu'il
avait fait à des communautés religieuses le Souverain -Pontife Benoit VIII
était rempli d'affection et de bienveillance pour le monastère de Cluny et
pour l'abbé saint Odilon ce qu'il aimait en lui c'était sa fervente piété et
aussi la dévotion dont il donnait des preuves quotidiennes en faveur des
âmes du purgatoire il ne se contentait pas pour elles de ses propres oeuvres
il recommandait encore aux suffrages de tous ceux sur qui il pouvait avoir
quelque autorité on croit même d'après certains auteurs que ce fut lui qui
le premier introduisit l'usage de prier spécialement pour les fidèles
défunts le lendemain de la Toussaint le pape donc dans son attachement
accordait à Odilon les grâces les plus précieuses et lorsque le pieux abbé
venait à Rome visiter les tombeaux des saints martyrs Benoit voulait se
charger lui-même de tous les frais de route et d'entretien tant que durait
le voyage Benoit reçut après sa mort la récompense de cette
215
sainte affection quelques jours après qu'on l'eut enseveli il apparut à Jean
évèque de Porto et lui apprit qu'il était condamné à une terrible expiation
pour n'avoir pas correspondu parfaitement à la grandeur de sa dignité
suprême il espérait néanmoins éprouver du soulagement par les suffrages du
saint abbé Odilon si on lui faisait connaître la nécessité ou il se trouvait
"Je vous supplie donc dit-il de lui donner avis de ce que vous venez
d'entendre si vous me conservez encore quelque attachement avertissez pour
plus de rapidité mon successeur Jean afin qu'il expédie tout de suite un
messager à Cluny et que cette vertueuse communauté intercède pour moi." A
peine saint Odilon eut-il été informé de la vision que non content de ses
propres prières il recommanda à tout son monastère de faire de grandes
mortifications et des oraisons plus nombreuses en faveur de leur bienfaiteur
défunt le pape Benoit il fit dire la même chose aux différentes maisons de
l'ordre et tous se mirent à prier avec une touchante et unanime ferveur et à
offrir l'auguste sacrifice plusieurs fois chaque matin il y avait quelques
jours que ces saints exercices se poursuivaient lorsque Edelbert procureur
et aumônier du couvent eut une vision comme si elle s'adressait
particulièrement à lui à cause des aumônes dont il avait été le distributeur
il lui sembla donc qu'il voyait entrer d'abord dans le monastère puis au
chapitre un personnage de belle et vénérable apparence couvert d'un brillant
manteau couronné de pierres précieuses et de diamants accompagné d'un grand
cortège d'hommes vêtus de blanc il se dirigea tout droit vers le siège de
l'abbé inclina la tête jusqu'aux genoux de saint
216
Odilon comme s'il rendait grâces à lui et à sa communauté de quelque
signalée faveur Edelbert étant fort étonné à ce spectacle et désirant savoir
quel était ce personnage qu'il ne reconnaissait point il entendit une voix
qui disait distinctement : " Celui-ci est le Souverain-Pontife Benoît
délivré par vos suffrages et par ceux de votre saint abbé avant de monter au
ciel il a voulu venir ici témoigner sa gratitude à ses bienfaiteurs et les
assurer qu'à son tour il ne les oubliera point auprès de Dieu." C'est ainsi
que la plus haute majesté du monde celle à qui ont été confiées les clefs du
royaume céleste et qui distribue les indulgences à tous les fidèles a besoin
elle-même en présence du juge redoutable de l'intercession des saints ( V.
Vincent de Beauvais, Specul. Hist. liv. 24, ch. 105.)
216
66ème Merveille Combien effrayants sont les tourments du Purgatoire.
Pesez bien la rigueur de ce feu. ( Esdr.IV, 5.)
Un célèbre philosophe de l'antiquité disait que les peines de cette
vie ne sauraient abattre le sage car si elles sont légères il n'y a pas lieu
d'en parler si elles sont graves elles ont une bien courte durée Nemo potest
multium dolere et ? Cette pensée est de Sénèque
217
hélas on n'en peut pas dire autant du purgatoire ou les tourments unissent
la durée à l'intensité là les heures paraissent des jours les jours des mois
les mois des années les années des siècles " Oui dit Thomas à Kempis une
seule heure de cette expiation semblera plus insupportable qu'ici-bas cent
années de la pénitence la plus sévère Ibi erit una hora gravior in poenà
quàm hic centum anni in gravissimâ poenitentiâ" Nous trouvons dans les
Annales des pères capucins sous la rubrique 1618 une histoire terrible sur
ce sujet le père Hyppolyte de Scalvo grand serviteur de Dieu était animé
d'un zèle brûlant pour le salut du prochain et conséquemment pour la
délivrance des pauvres âmes il priait et se mortifiait pour elles et souvent
aussi il prêchait en leur faveur afin d'exciter parmi les fidèles une
dévotion pareille il voulait que les prémices de ses actions de chaque jour
fussent pour elles il se levait donc de meilleurs heure et récitait à leur
intention l'office des morts sans préjudice de ce qu'il faisait d'actions
saintes jusqu'au soir en pensant à leur soulagement encore n'avait-il qu'une
idée très-imparfaite des tourments de l'autre vie il ne se les figurait pas
aussi épouvantables qu'ils sont ce qui lui arriva bientôt lui donna à cet
égard une effrayante lumière il avait été envoyé en Flandre avec le titre de
commissaire général pour y établir quelques maisons de capucins destinées à
protéger par les saintes oeuvres de l'apostolat la foi de ce pays au moment
ou l'hérésie l'envahissait de toutes parts quand il eut accompli sa mission
on le maintint dans l'un de ces monastères en qualité de père gardien et de
maître des novices il mettait
218
un soin scrupuleux à s'acquitter de sa charge et à faire avancer ces jeunes
gens dans toutes les vertus de leur état parmi eux s'en trouvait un qui
marchait à grands pas dans la voie de la perfection religieuse lorsqu'il fut
surpris d'une maladie subite qui le conduisit rapidement au tombeau par
malheur le père de Scalvo était absent dans ce moment-là et il ne put lui
donner sa bénédiction avec la dernière absolution ce qui causa au bon
gardien une vive douleur et l'engagea à prier d'autant mieux pour cette
chère âme qui n'avait pas achevé la première année du noviciat il était
revenu le soir même la nuit suivante il s'arrêta suivant sa coutume à prier
dans le choeur après l'office des matines comme il était plongée dans une
fervente oraison tout à coup il voit paraître devant lui le défunt sous la
forme d'un fantôme environné de feux et de flammes horribles qui
participaient à la fois des ténèbres et de l'éclat ordinaire au feu la voix
du spectre ne laissait point d'ailleurs de place au doute s'adressant à son
ancien supérieur avec mille gémissements il s'accusa d'une faute qu'il avait
commise et qui n'avait rien de grave " Donnez-moi ô mon Père dit-il vous
qui êtes plein de charité donnez-moi votre bénédiction afin de me délivrer
de ce manquement pour lequel je satisfais à la justice divine dans le
purgatoire vous-même imposez-moi la pénitence convenable ce sera celle que
je ferai la bonté du Seigneur m'y autorisant par une faveur spéciale Jésus
m'a permis de m'adresser à vous." Le religieux resta comme pétrifié telle
était son émotion sa terreur en présence de cette apparition que désirant y
échapper plus vite il répondit précipitamment
219
"Autant que je le puis mon fils je vous absous et vous bénis et quant à la
pénitence puisque vous m'assurez que j'ai aussi le droit de la marquer vous
resterez en purgatoire jusqu'à l'heure de prime (c'est-à-dire jusque vers
huit heures du matin). " En se limitant à ces quelques heures le saint homme
s'imaginait faire acte de grande indulgence ce ne fut point la pensée du
mort car à cette réponse il témoigna une sorte de désespoir comme si la
foudre l'eût frappé il courait dans l'église en criant " O coeur sans
compassion ô père qui n'avez point de pitié pour un fils si affligé quoi
punir de la sorte une faute que pendant ma vie vous eussiez jugée digne à
peine d'une légère discipline vous ignorez donc l'atrocité des supplices du
purgatoire ô coeur sans compassion O poeniitentia sine misericordiâ " La
vision avait cessé le père gardien sentait ses cheveux se hérisser sur sa
tête le regret l'étonnement la crainte se disputaient son coeur il cherchait
un moyen de revenir sur cette sentence et ne savait à quoi se résoudre
lorsque Dieu lui inspira une bonne pensée celle de courir à la cloche du
couvent et d'appeler au choeur les religieux quand ils furent assemblés à
cette heure inaccoutumée il raconta ce qui lui était arrivé et demanda que
l'on commençât aussitôt le chant de l'office de prime ce qui fut fait mais
pendant les vingt années qu'il vécut encore ce souvenir ne s'effaça point de
sa mémoire il l'avait toujours présent et il répétait dans ses sermons le
mot de saint Anselme " Après la mort la moindre peine qui nous attend au
purgatoire est beaucoup plus grande que tout ce qu'on peut concevoir
ici-bas". (v. f. Marcellin de Mâcon, Annal. Capuc., t.III, an.1618, n.13.)
Avant la mort faites du bien à votre ami donnez
pour reçevoir et établissez la justice dans votre âme ( Eccli. XIV, 13).
Nous
avons vu plus haut un prince récompensé après sa mort pour le bien qu'il
avait fait à des communautés religieuses le Souverain -Pontife Benoit VIII
était rempli d'affection et de bienveillance pour le monastère de Cluny et
pour l'abbé saint Odilon ce qu'il aimait en lui c'était sa fervente piété et
aussi la dévotion dont il donnait des preuves quotidiennes en faveur des
âmes du purgatoire il ne se contentait pas pour elles de ses propres oeuvres
il recommandait encore aux suffrages de tous ceux sur qui il pouvait avoir
quelque autorité on croit même d'après certains auteurs que ce fut lui qui
le premier introduisit l'usage de prier spécialement pour les fidèles
défunts le lendemain de la Toussaint le pape donc dans son attachement
accordait à Odilon les grâces les plus précieuses et lorsque le pieux abbé
venait à Rome visiter les tombeaux des saints martyrs Benoit voulait se
charger lui-même de tous les frais de route et d'entretien tant que durait
le voyage Benoit reçut après sa mort la récompense de cette
215
sainte affection quelques jours après qu'on l'eut enseveli il apparut à Jean
évèque de Porto et lui apprit qu'il était condamné à une terrible expiation
pour n'avoir pas correspondu parfaitement à la grandeur de sa dignité
suprême il espérait néanmoins éprouver du soulagement par les suffrages du
saint abbé Odilon si on lui faisait connaître la nécessité ou il se trouvait
"Je vous supplie donc dit-il de lui donner avis de ce que vous venez
d'entendre si vous me conservez encore quelque attachement avertissez pour
plus de rapidité mon successeur Jean afin qu'il expédie tout de suite un
messager à Cluny et que cette vertueuse communauté intercède pour moi." A
peine saint Odilon eut-il été informé de la vision que non content de ses
propres prières il recommanda à tout son monastère de faire de grandes
mortifications et des oraisons plus nombreuses en faveur de leur bienfaiteur
défunt le pape Benoit il fit dire la même chose aux différentes maisons de
l'ordre et tous se mirent à prier avec une touchante et unanime ferveur et à
offrir l'auguste sacrifice plusieurs fois chaque matin il y avait quelques
jours que ces saints exercices se poursuivaient lorsque Edelbert procureur
et aumônier du couvent eut une vision comme si elle s'adressait
particulièrement à lui à cause des aumônes dont il avait été le distributeur
il lui sembla donc qu'il voyait entrer d'abord dans le monastère puis au
chapitre un personnage de belle et vénérable apparence couvert d'un brillant
manteau couronné de pierres précieuses et de diamants accompagné d'un grand
cortège d'hommes vêtus de blanc il se dirigea tout droit vers le siège de
l'abbé inclina la tête jusqu'aux genoux de saint
216
Odilon comme s'il rendait grâces à lui et à sa communauté de quelque
signalée faveur Edelbert étant fort étonné à ce spectacle et désirant savoir
quel était ce personnage qu'il ne reconnaissait point il entendit une voix
qui disait distinctement : " Celui-ci est le Souverain-Pontife Benoît
délivré par vos suffrages et par ceux de votre saint abbé avant de monter au
ciel il a voulu venir ici témoigner sa gratitude à ses bienfaiteurs et les
assurer qu'à son tour il ne les oubliera point auprès de Dieu." C'est ainsi
que la plus haute majesté du monde celle à qui ont été confiées les clefs du
royaume céleste et qui distribue les indulgences à tous les fidèles a besoin
elle-même en présence du juge redoutable de l'intercession des saints ( V.
Vincent de Beauvais, Specul. Hist. liv. 24, ch. 105.)
216
66ème Merveille Combien effrayants sont les tourments du Purgatoire.
Pesez bien la rigueur de ce feu. ( Esdr.IV, 5.)
Un célèbre philosophe de l'antiquité disait que les peines de cette
vie ne sauraient abattre le sage car si elles sont légères il n'y a pas lieu
d'en parler si elles sont graves elles ont une bien courte durée Nemo potest
multium dolere et ? Cette pensée est de Sénèque
217
hélas on n'en peut pas dire autant du purgatoire ou les tourments unissent
la durée à l'intensité là les heures paraissent des jours les jours des mois
les mois des années les années des siècles " Oui dit Thomas à Kempis une
seule heure de cette expiation semblera plus insupportable qu'ici-bas cent
années de la pénitence la plus sévère Ibi erit una hora gravior in poenà
quàm hic centum anni in gravissimâ poenitentiâ" Nous trouvons dans les
Annales des pères capucins sous la rubrique 1618 une histoire terrible sur
ce sujet le père Hyppolyte de Scalvo grand serviteur de Dieu était animé
d'un zèle brûlant pour le salut du prochain et conséquemment pour la
délivrance des pauvres âmes il priait et se mortifiait pour elles et souvent
aussi il prêchait en leur faveur afin d'exciter parmi les fidèles une
dévotion pareille il voulait que les prémices de ses actions de chaque jour
fussent pour elles il se levait donc de meilleurs heure et récitait à leur
intention l'office des morts sans préjudice de ce qu'il faisait d'actions
saintes jusqu'au soir en pensant à leur soulagement encore n'avait-il qu'une
idée très-imparfaite des tourments de l'autre vie il ne se les figurait pas
aussi épouvantables qu'ils sont ce qui lui arriva bientôt lui donna à cet
égard une effrayante lumière il avait été envoyé en Flandre avec le titre de
commissaire général pour y établir quelques maisons de capucins destinées à
protéger par les saintes oeuvres de l'apostolat la foi de ce pays au moment
ou l'hérésie l'envahissait de toutes parts quand il eut accompli sa mission
on le maintint dans l'un de ces monastères en qualité de père gardien et de
maître des novices il mettait
218
un soin scrupuleux à s'acquitter de sa charge et à faire avancer ces jeunes
gens dans toutes les vertus de leur état parmi eux s'en trouvait un qui
marchait à grands pas dans la voie de la perfection religieuse lorsqu'il fut
surpris d'une maladie subite qui le conduisit rapidement au tombeau par
malheur le père de Scalvo était absent dans ce moment-là et il ne put lui
donner sa bénédiction avec la dernière absolution ce qui causa au bon
gardien une vive douleur et l'engagea à prier d'autant mieux pour cette
chère âme qui n'avait pas achevé la première année du noviciat il était
revenu le soir même la nuit suivante il s'arrêta suivant sa coutume à prier
dans le choeur après l'office des matines comme il était plongée dans une
fervente oraison tout à coup il voit paraître devant lui le défunt sous la
forme d'un fantôme environné de feux et de flammes horribles qui
participaient à la fois des ténèbres et de l'éclat ordinaire au feu la voix
du spectre ne laissait point d'ailleurs de place au doute s'adressant à son
ancien supérieur avec mille gémissements il s'accusa d'une faute qu'il avait
commise et qui n'avait rien de grave " Donnez-moi ô mon Père dit-il vous
qui êtes plein de charité donnez-moi votre bénédiction afin de me délivrer
de ce manquement pour lequel je satisfais à la justice divine dans le
purgatoire vous-même imposez-moi la pénitence convenable ce sera celle que
je ferai la bonté du Seigneur m'y autorisant par une faveur spéciale Jésus
m'a permis de m'adresser à vous." Le religieux resta comme pétrifié telle
était son émotion sa terreur en présence de cette apparition que désirant y
échapper plus vite il répondit précipitamment
219
"Autant que je le puis mon fils je vous absous et vous bénis et quant à la
pénitence puisque vous m'assurez que j'ai aussi le droit de la marquer vous
resterez en purgatoire jusqu'à l'heure de prime (c'est-à-dire jusque vers
huit heures du matin). " En se limitant à ces quelques heures le saint homme
s'imaginait faire acte de grande indulgence ce ne fut point la pensée du
mort car à cette réponse il témoigna une sorte de désespoir comme si la
foudre l'eût frappé il courait dans l'église en criant " O coeur sans
compassion ô père qui n'avez point de pitié pour un fils si affligé quoi
punir de la sorte une faute que pendant ma vie vous eussiez jugée digne à
peine d'une légère discipline vous ignorez donc l'atrocité des supplices du
purgatoire ô coeur sans compassion O poeniitentia sine misericordiâ " La
vision avait cessé le père gardien sentait ses cheveux se hérisser sur sa
tête le regret l'étonnement la crainte se disputaient son coeur il cherchait
un moyen de revenir sur cette sentence et ne savait à quoi se résoudre
lorsque Dieu lui inspira une bonne pensée celle de courir à la cloche du
couvent et d'appeler au choeur les religieux quand ils furent assemblés à
cette heure inaccoutumée il raconta ce qui lui était arrivé et demanda que
l'on commençât aussitôt le chant de l'office de prime ce qui fut fait mais
pendant les vingt années qu'il vécut encore ce souvenir ne s'effaça point de
sa mémoire il l'avait toujours présent et il répétait dans ses sermons le
mot de saint Anselme " Après la mort la moindre peine qui nous attend au
purgatoire est beaucoup plus grande que tout ce qu'on peut concevoir
ici-bas". (v. f. Marcellin de Mâcon, Annal. Capuc., t.III, an.1618, n.13.)
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