Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Qui le lui a dit, puisque elle ont été découvertes en 1987 ?
le pape !
le pape !
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Le bien-être passager du mauvais lui a été accordé comme un moyen pour l'attirer au Bien, et comme un paiement du peu de bien que même le plus mauvais peut faire.
Extrait des visions de Maria Valtorta "l'Evangile tel qu'il m'a été révélé" - Tome 6 - Chapitre 143. page 420
(...) Et ici, permettez-moi de vous dire une chose qui n'appartient pas au sujet, mais qu'il est utile que vous ayez présente à l'esprit. Bien souvent, trop souvent, on entend dire que les mauvais ont plus de joie que les bons et que cela n'est pas juste.
Je commence par vous dire: "Ne jugez pas les apparences et ce que vous ne connaissez pas". Les apparences sont souvent trompeuses et, sur la Terre, le jugement de Dieu est caché.
De l'autre côté, vous connaîtrez et vous verrez que le bien-être passager du mauvais lui a été accordé comme un moyen pour l'attirer au Bien, et comme un paiement du peu de bien que même le plus mauvais peut faire.
Mais quand vous verrez les choses dans la juste lumière de l'autre vie, vous verrez que plus courte que la vie d'un brin d'herbe né au printemps sur le bord d'un torrent que l'été dessèche, est le temps de la joie du pécheur, alors qu'un seul instant de gloire dans le Ciel est, pour la joie qu'il communique à l'esprit qui en jouit, plus vaste que la plus triomphale vie d'homme qui ait jamais existé.
N'enviez donc pas la prospérité du méchant, mais cherchez par votre bonne volonté à arriver à la possession du trésor éternel du juste. (...)
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
"n'envie pas la gloire du monde toi qui es déjà dans celle de la résurrection".
Ça m'a été dit dans un songe.
Ça m'a été dit dans un songe.
Philippe Marie- Avec Saint Joseph
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Nous aimons beaucoup Maria Valtorta
Mon mari et moi avons découvert les écrits de Maria Valtorta il y a quelques années et nous y trouvons un grand réconfort pour notre foi. C'était il y a quelques années, j'étais aux puces et je vois sur une tablette, parmi d'autres livres, les cahiers de Maria Valtorta. Ils étaient pratiquement à l'état neuf. Comme je suis contente d'avoir trouvé ces livres..!
Ginette Boudreau- Avec Saint Thomas d'Aquin
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Bonjour.Je souhaiterais me procurer des ouvrages de Maria Valtorta. A ma grande stupéfaction seuls les volumes 1 et 2 sont encore disponibles...
Savez-vous si une réédition des 10 volumes est en cours?
En espérant quelques réponses
Merci par avance
Savez-vous si une réédition des 10 volumes est en cours?
En espérant quelques réponses
Merci par avance
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
@jacques58fan
Bonsoir Jacques,
Etes-vous sûr, en cherchant sur le net et voulant privilégier des librairies chrétiennes, j'ai trouvé deux sites, celui de la procure :
http://www.laprocure.com/evangile-tel-ete-revele-maria-valtorta/9788879870603.html
ou celui des Editions Parvis :
http://www.parvis.ch/fr/tags-generaux/maria-valtorta?page=2
qui tous deux semblent les avoir. Il y a certainement des librairies chrétiennes auprès desquelles on doit pouvoir les commander
et en attendant, pour patienter sur le net, toute l'oeuvre :
http://www.maria-valtorta.org/
@Phiphi
"n'envie pas la gloire du monde toi qui es déjà dans celle de la résurrection"
jolie phrase !
Bonsoir Jacques,
Etes-vous sûr, en cherchant sur le net et voulant privilégier des librairies chrétiennes, j'ai trouvé deux sites, celui de la procure :
http://www.laprocure.com/evangile-tel-ete-revele-maria-valtorta/9788879870603.html
ou celui des Editions Parvis :
http://www.parvis.ch/fr/tags-generaux/maria-valtorta?page=2
qui tous deux semblent les avoir. Il y a certainement des librairies chrétiennes auprès desquelles on doit pouvoir les commander
et en attendant, pour patienter sur le net, toute l'oeuvre :
http://www.maria-valtorta.org/
@Phiphi
"n'envie pas la gloire du monde toi qui es déjà dans celle de la résurrection"
jolie phrase !
carine- Gloire à toi Seigneur Jésus-Christ
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Inscription : 28/10/2009
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
jacques58fan a écrit:Bonjour.Je souhaiterais me procurer des ouvrages de Maria Valtorta. A ma grande stupéfaction seuls les volumes 1 et 2 sont encore disponibles...
Savez-vous si une réédition des 10 volumes est en cours?
En espérant quelques réponses
Merci par avance
Bonsoir Jacques,
La librairie catholique " RASSEMBLEMENT à son IMAGE " (Chrétiens Magazine) est spécialisée dans la distribution de l'évangile tel qu'il ma été révélé de Maria Valtorta, soit en volumes (10 + quelques uns sur les épîtres), soit en CD MP3.
Lien :
https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0ahUKEwiurbDHss3KAhWJ6xoKHTsqCoAQFgggMAA&url=http%3A%2F%2Fwww.asonimage.fr%2F&usg=AFQjCNElUyDvQ9YtExN2gKXx4IyJDhNiiA&sig2=nWCT2gFjJT6SRj23O1VG7w
Invité- Invité
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Inscription : 22/01/2016
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Jack M, respectez l'opinion des autres, et suivez l'attitude ambiante de ce post.
Merci d'avance.
Merci d'avance.
Dernière édition par Henryk le Dim 31 Jan 2016 - 13:45, édité 1 fois
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Peut-être je me trompe ! et si ces découvertes ne datent pas de 1987, merci de me dire de quand elles datent
Cordialement
Cordialement
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
http://www.maria-valtorta.org/Lavere/Matarea.htm
Malgré mon erreur de datation, 1867, comment Mlle Valtorta aurait eu accès à cette information de cette forêt pétrifiée, montrée par métaphore par son interlocuteur divin, ainsi qu'a l'anecdote de la Pyramide vue de Matarea?
Malgré mon erreur de datation, 1867, comment Mlle Valtorta aurait eu accès à cette information de cette forêt pétrifiée, montrée par métaphore par son interlocuteur divin, ainsi qu'a l'anecdote de la Pyramide vue de Matarea?
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
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Localisation : Velay
Inscription : 03/06/2014
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Naissance de Jésus notre Seigneur
Je vois encore l'intérieur de ce pauvre refuge pierreux où, partageant le sort des animaux, Marie et Joseph ont trouvé asile.
Le petit feu sommeille ainsi que son gardien. Marie soulève doucement la tête de sa couche, et regarde. Elle voit Joseph, la tête inclinée sur la poitrine, comme s'il réfléchissait, et elle pense que la fatigue a triomphé de sa bonne volonté de rester éveillé. Elle sourit, d'un bon sourire. Faisant moins de bruit que ne peut en faire un papillon qui se pose sur une rose, elle s'assied, puis s'agenouille. Elle prie avec un sourire radieux sur le visage. Elle prie, les bras étendus non pas précisément en croix, mais presque, les paumes dirigées vers le haut et en avant, et elle ne paraît pas fatiguée de cette pose pénible. Puis, elle se prosterne, le visage contre le foin, dans une prière encore plus profonde. Une prière prolongée.
Joseph s'éveille. Il voit le feu presque mort et l'étable presque dans les ténèbres. Il jette une poignée de brindilles et la flamme se réveille. Il y ajoute des branches plus grosses, puis encore plus grosses car le froid doit être piquant, le froid de la nuit hivernale et tranquille qui pénètre partout dans ces ruines.
170> Le pauvre Joseph tout près comme il l'est de la porte - appelons ainsi l'ouverture que son manteau essaye d'obstruer - doit être gelé. Il approche les mains près de la flamme, défait ses sandales et approche ses pieds. Il se chauffe. Quand le feu est bien pris, et que sa clarté est assurée, il se tourne. Il ne voit rien, pas même cette blancheur du voile de Marie qui traçait une ligne claire sur le foin obscur. Il se lève et lentement s'approche de la couchette.
"Tu ne dors pas, Marie ?" demande-t-il. Il le demande trois fois, jusqu'à ce qu'elle en prenne conscience et réponde : "Je prie."
"Tu n'as besoin de rien ?"
"Non, Joseph."
"Essaie de dormir un peu, de reposer au moins."
"J'essaierai, mais la prière ne me fatigue pas."
"Adieu, Marie."
"Adieu, Joseph."
Marie reprend sa position. Joseph pour ne plus céder au sommeil s'agenouille près du feu et il prie. Il prie avec les mains qui lui couvrent le visage. Il ne les enlève que pour alimenter le feu et puis il revient à sa brûlante prière. À part les crépitements du bois et le bruit du sabot de l'âne, qui de temps en temps frappe le sol, on n'entend rien.
Un faisceau de lumière lunaire se glisse par une fissure du plafond et semble une lame immatérielle d'argent qui s'en va chercher Marie. Il s'allonge peu à peu à mesure que la lune s'élève dans le ciel et l'atteint finalement. Le voilà sur la tête de l'orante. Il la nimbe d'une blancheur éclatante.
Marie lève la tête comme pour un appel du ciel et elle s'agenouille de nouveau. Oh ! comme c'est beau ici ! Elle lève sa tête qui semble resplendir de la lumière blanche de la lune, et elle est transfigurée par un sourire qui n'est pas humain. Que voit-elle ? Qu'entend-elle ? Qu'éprouve-t-elle ? Il n'y a qu'elle qui pourrait dire ce qu'elle vit, entendit, éprouva à l'heure fulgurante de sa Maternité. Je me rends seulement compte qu'autour d'elle la lumière croit, croit, croit. On dirait qu'elle descend du Ciel, qu'elle émane des pauvres choses qui l'environnent, qu'elle émane d'elle surtout.
Son vêtement, d'azur foncé, a à présent la couleur d'un bleu d'une douceur céleste de myosotis, les mains et le visage semblent devenir azurés comme s'ils étaient sous le feu d'un immense et clair saphir. Cette couleur me rappelle, bien que plus légère, celle que je découvre dans la vision du saint Paradis et aussi celle de la vision de l'arrivée des Mages. Elle se diffuse surtout toujours plus sur les choses, les revêt, les purifie, leur communique sa splendeur.
171> La lumière se dégage toujours plus du corps de Marie, absorbe celle de la lune, on dirait qu'elle attire en elle tout ce qui peut arriver du ciel. Désormais, c'est elle qui est la Dépositaire de la Lumière, celle qui doit donner cette Lumière au monde. Et cette radieuse, irrésistible, incommensurable, éternelle, divine Lumière qui va être donnée au monde, s'annonce avec une aube, une diane, un éveil de la lumière, un chœur d'atomes lumineux qui grandit, s'étale comme une marée qui monte, monte en immenses volutes d'encens, qui descend comme un torrent, qui se déploie comme un voile...
La voûte, couverte de fissures, de toiles d'araignées, de décombres en saillie qui semblent miraculeusement équilibrées, noire, fumeuse, repoussante, semble la voûte d'une salle royale. Chaque pierre est un bloc d'argent, chaque fissure une clarté opaline, chaque toile d'araignée un baldaquin broché d'argent et de diamants. Un gros lézard, engourdi entre deux blocs de pierre, semble un collier d'émeraude oublié là, par une reine; une grappe de chauve-souris engourdies émettent une précieuse clarté d'onyx. Le foin qui pend de la mangeoire la plus haute n'est plus de l'herbe : ce sont des fils et des fils d'argent pur qui tremblent dans l'air avec la grâce d'une chevelure flottante.
La mangeoire inférieure, en bois grossier, est devenue un bloc d'argent bruni. Les murs sont couverts d'un brocart où la blancheur de la soie disparaît sous une broderie de perles en relief. Et le sol... qu'est-ce maintenant le sol ? Un cristal illuminé par une lumière blanche. Les saillies semblent des roses lumineuses jetées sur le sol en signe d'hommage; et les trous, des coupes précieuses, d'où se dégagent des arômes et des parfums.
Et la lumière croît de plus en plus. L'œil ne peut la supporter. En elle, comme absorbée par un voile de lumière incandescente, disparaît la Vierge... et en émerge la Mère [1].
172> Oui, quand la lumière devient supportable pour mes yeux, je vois Marie avec son Fils nouveau-né dans ses bras. Un petit Bébé rose et grassouillet qui s'agite et se débat avec ses mains grosses comme un bouton de rose et des petits pieds qui iraient bien dans le cœur d'une rose; qui vagit d'une voix tremblotante exactement comme celle d'un petit agneau qui vient de naître, ouvrant la bouche, rouge comme une petite fraise de bois, montrant sa petite langue qui bat contre son palais couleur de rose; qui remue sa petite tête si blonde qu'on la croirait sans cheveux, une petite tête ronde que la Maman soutient dans le creux de l'une de ses mains pendant qu'elle regarde son Bébé et l'adore, pleurant et riant tout ensemble et qu'elle s'incline pour y déposer un baiser, non pas sur la tête innocente, mais sur le milieu de la poitrine sous lequel se trouve le petit cœur, qui bat, qui bat pour nous... là où un jour sera la blessure. Elle la panse d'avance, cette blessure, sa Maman, avec son pur baiser d'Immaculée.
Le bœuf éveillé par la clarté se dresse avec un grand bruit de sabots et il mugit. L'âne relève la tête et brait. C'est la lumière qui les réveille, mais j'aime penser qu'ils ont voulu saluer leur Créateur pour eux-mêmes et pour tous les animaux.
Joseph aussi, qui comme extasié priait avec autant d'intensité qu'il s'était abstrait de tout ce qui l'entourait, se secoue et entre ses doigts dont il se couvre le visage, il voit filtrer la lumière étrange. Il découvre le visage, lève la tête, se retourne. Le bœuf debout, lui cache Marie, mais elle l'appelle : "Joseph, viens."
Joseph accourt et devant le spectacle s'arrête comme foudroyé de révérence, il va tomber à genoux là où il se trouve. Mais Marie insiste : "Viens, Joseph." Elle appuie la main gauche sur le foin et tenant de la main droite l'Enfant qu'Elle serre sur son cœur, elle se lève et se dirige vers Joseph qui marche hésitant, pris entre le désir d'avancer et la peur d'être irrespectueux.
Au pied de la couche les deux époux se rencontrent et se regardent en pleurant de bonheur.
"Viens" dit Marie "offrons Jésus au Père."
Pendant que Joseph s'agenouille, elle, debout, entre les deux poutres qui soutiennent la voûte, élève sa Créature entre ses bras et dit : "Me voici. C'est pour Lui, ô Dieu, que je te dis cette parole. Me voici pour faire ta volonté. [2] Et avec Lui, moi, Marie et Joseph mon époux. Voici tes serviteurs, Seigneur. Que soit accomplie par nous, à toute heure et en toute occasion, ta volonté pour ta gloire et ton amour." Puis Marie se penche et dit : "Prends, Joseph" et Elle offre l'Enfant.
"Moi ! À Moi ! Oh ! Non ! Je ne suis pas digne !" Joseph est tout effrayé, anéanti à l'idée de devoir toucher Dieu.
Mais Marie insiste en souriant : "Tu en es bien digne. Personne ne l'est plus que toi. C'est pour cela que Dieu t'a choisi. Prends-le, Joseph, et tiens-le pendant que je cherche les langes."
173> Joseph, rouge comme la pourpre, avance les bras et prend le petit bourgeon de chair qui crie parce qu'il a froid. Quand il l'a entre les bras, il ne persiste pas dans l'intention de le tenir par respect éloigné de lui. Il le serre contre son cœur et éclatant en sanglots : "Oh ! Seigneur ! Mon Dieu !" et il se penche pour baiser ses petits pieds et les sent glacés. Alors, il s'assoit sur le sol, le serre sur son sein. Avec son habit marron, avec ses mains il s'ingénie à le couvrir, à le réchauffer, à le défendre contre la bise nocturne. Il voudrait bien aller du côté du feu, mais là il y a un courant d'air qui entre par la porte. Mieux vaut rester où il est. Il vaut mieux même aller entre les deux animaux qui les protégeront du courant d'air et donneront un peu de chaleur. Il va se mettre entre le bœuf et l'âne avec les épaules tournées vers la porte, penché sur le Nouveau-né pour lui faire de sa poitrine une niche dont les parois sont une tête grise aux longues oreilles et un grand museau blanc aux naseaux fumants et aux bons yeux humides.
Marie a ouvert le coffre et en a tiré les linges et les langes. Elle est allée près du feu pour les réchauffer. La voilà qui va vers Joseph et enveloppe le Bébé dans les linges tiédis, puis elle protège la petite tête avec son voile. "Où allons-nous le mettre maintenant ?" dit-elle.
Joseph regarde autour, réfléchit... "Attends, dit-il. Poussons plus loin les deux animaux et leur foin. Tirons en bas le foin de la mangeoire qui est plus haut et mettons-le ici à l'intérieur. Le bord de cette mangeoire le protégera de l'air, le foin lui fera un oreiller et le bœuf par son souffle le réchauffera un peu." Et Joseph se met à l'ouvrage, pendant que Marie berce son Petit en le serrant sur son cœur et en appuyant sa joue sur la petite tête pour la réchauffer.
Joseph ravive le feu sans épargner le bois pour faire une belle flamme. Il réchauffe le foin et peu à peu le sèche et le met sur le sein pour l'empêcher de refroidir. Puis, quand il en a assez amoncelé pour faire un petit matelas à l'Enfant, il va à la mangeoire et l'arrange pour en faire un berceau. "C'est prêt, dit-il. Maintenant il faudrait bien une couverture pour empêcher le foin de le piquer, et pour le couvrir..."
"Prends mon manteau" dit Marie.
"Tu auras froid."
174> "Oh ! cela ne fait rien ! La couverture est trop rugueuse. Le manteau est doux et chaud. Je n'ai pas du tout froid. Mais que Lui ne souffre plus."
Joseph prend l'ample manteau de moelleuse laine bleue sombre et l'arrange en double sur le foin, avec un pli qui penche hors de la crèche. Le premier lit du Sauveur est prêt.
Et la Mère, de sa douce démarche ondoyante, le porte et le dépose, le recouvre avec le pli du manteau qu'elle amène aussi autour de la tête nue qui enfonce dans le foin, à peine protégé des piqûres par le mince voile de Marie. Il ne reste à découvert que le petit visage gros comme le poing, et les deux, penchés sur la crèche, radieux, le regardent dormir son premier sommeil. La chaleur des langes et du foin a arrêté ses pleurs et apporté le sommeil au doux Jésus.
Je vois encore l'intérieur de ce pauvre refuge pierreux où, partageant le sort des animaux, Marie et Joseph ont trouvé asile.
Le petit feu sommeille ainsi que son gardien. Marie soulève doucement la tête de sa couche, et regarde. Elle voit Joseph, la tête inclinée sur la poitrine, comme s'il réfléchissait, et elle pense que la fatigue a triomphé de sa bonne volonté de rester éveillé. Elle sourit, d'un bon sourire. Faisant moins de bruit que ne peut en faire un papillon qui se pose sur une rose, elle s'assied, puis s'agenouille. Elle prie avec un sourire radieux sur le visage. Elle prie, les bras étendus non pas précisément en croix, mais presque, les paumes dirigées vers le haut et en avant, et elle ne paraît pas fatiguée de cette pose pénible. Puis, elle se prosterne, le visage contre le foin, dans une prière encore plus profonde. Une prière prolongée.
Joseph s'éveille. Il voit le feu presque mort et l'étable presque dans les ténèbres. Il jette une poignée de brindilles et la flamme se réveille. Il y ajoute des branches plus grosses, puis encore plus grosses car le froid doit être piquant, le froid de la nuit hivernale et tranquille qui pénètre partout dans ces ruines.
170> Le pauvre Joseph tout près comme il l'est de la porte - appelons ainsi l'ouverture que son manteau essaye d'obstruer - doit être gelé. Il approche les mains près de la flamme, défait ses sandales et approche ses pieds. Il se chauffe. Quand le feu est bien pris, et que sa clarté est assurée, il se tourne. Il ne voit rien, pas même cette blancheur du voile de Marie qui traçait une ligne claire sur le foin obscur. Il se lève et lentement s'approche de la couchette.
"Tu ne dors pas, Marie ?" demande-t-il. Il le demande trois fois, jusqu'à ce qu'elle en prenne conscience et réponde : "Je prie."
"Tu n'as besoin de rien ?"
"Non, Joseph."
"Essaie de dormir un peu, de reposer au moins."
"J'essaierai, mais la prière ne me fatigue pas."
"Adieu, Marie."
"Adieu, Joseph."
Marie reprend sa position. Joseph pour ne plus céder au sommeil s'agenouille près du feu et il prie. Il prie avec les mains qui lui couvrent le visage. Il ne les enlève que pour alimenter le feu et puis il revient à sa brûlante prière. À part les crépitements du bois et le bruit du sabot de l'âne, qui de temps en temps frappe le sol, on n'entend rien.
Un faisceau de lumière lunaire se glisse par une fissure du plafond et semble une lame immatérielle d'argent qui s'en va chercher Marie. Il s'allonge peu à peu à mesure que la lune s'élève dans le ciel et l'atteint finalement. Le voilà sur la tête de l'orante. Il la nimbe d'une blancheur éclatante.
Marie lève la tête comme pour un appel du ciel et elle s'agenouille de nouveau. Oh ! comme c'est beau ici ! Elle lève sa tête qui semble resplendir de la lumière blanche de la lune, et elle est transfigurée par un sourire qui n'est pas humain. Que voit-elle ? Qu'entend-elle ? Qu'éprouve-t-elle ? Il n'y a qu'elle qui pourrait dire ce qu'elle vit, entendit, éprouva à l'heure fulgurante de sa Maternité. Je me rends seulement compte qu'autour d'elle la lumière croit, croit, croit. On dirait qu'elle descend du Ciel, qu'elle émane des pauvres choses qui l'environnent, qu'elle émane d'elle surtout.
Son vêtement, d'azur foncé, a à présent la couleur d'un bleu d'une douceur céleste de myosotis, les mains et le visage semblent devenir azurés comme s'ils étaient sous le feu d'un immense et clair saphir. Cette couleur me rappelle, bien que plus légère, celle que je découvre dans la vision du saint Paradis et aussi celle de la vision de l'arrivée des Mages. Elle se diffuse surtout toujours plus sur les choses, les revêt, les purifie, leur communique sa splendeur.
171> La lumière se dégage toujours plus du corps de Marie, absorbe celle de la lune, on dirait qu'elle attire en elle tout ce qui peut arriver du ciel. Désormais, c'est elle qui est la Dépositaire de la Lumière, celle qui doit donner cette Lumière au monde. Et cette radieuse, irrésistible, incommensurable, éternelle, divine Lumière qui va être donnée au monde, s'annonce avec une aube, une diane, un éveil de la lumière, un chœur d'atomes lumineux qui grandit, s'étale comme une marée qui monte, monte en immenses volutes d'encens, qui descend comme un torrent, qui se déploie comme un voile...
La voûte, couverte de fissures, de toiles d'araignées, de décombres en saillie qui semblent miraculeusement équilibrées, noire, fumeuse, repoussante, semble la voûte d'une salle royale. Chaque pierre est un bloc d'argent, chaque fissure une clarté opaline, chaque toile d'araignée un baldaquin broché d'argent et de diamants. Un gros lézard, engourdi entre deux blocs de pierre, semble un collier d'émeraude oublié là, par une reine; une grappe de chauve-souris engourdies émettent une précieuse clarté d'onyx. Le foin qui pend de la mangeoire la plus haute n'est plus de l'herbe : ce sont des fils et des fils d'argent pur qui tremblent dans l'air avec la grâce d'une chevelure flottante.
La mangeoire inférieure, en bois grossier, est devenue un bloc d'argent bruni. Les murs sont couverts d'un brocart où la blancheur de la soie disparaît sous une broderie de perles en relief. Et le sol... qu'est-ce maintenant le sol ? Un cristal illuminé par une lumière blanche. Les saillies semblent des roses lumineuses jetées sur le sol en signe d'hommage; et les trous, des coupes précieuses, d'où se dégagent des arômes et des parfums.
Et la lumière croît de plus en plus. L'œil ne peut la supporter. En elle, comme absorbée par un voile de lumière incandescente, disparaît la Vierge... et en émerge la Mère [1].
172> Oui, quand la lumière devient supportable pour mes yeux, je vois Marie avec son Fils nouveau-né dans ses bras. Un petit Bébé rose et grassouillet qui s'agite et se débat avec ses mains grosses comme un bouton de rose et des petits pieds qui iraient bien dans le cœur d'une rose; qui vagit d'une voix tremblotante exactement comme celle d'un petit agneau qui vient de naître, ouvrant la bouche, rouge comme une petite fraise de bois, montrant sa petite langue qui bat contre son palais couleur de rose; qui remue sa petite tête si blonde qu'on la croirait sans cheveux, une petite tête ronde que la Maman soutient dans le creux de l'une de ses mains pendant qu'elle regarde son Bébé et l'adore, pleurant et riant tout ensemble et qu'elle s'incline pour y déposer un baiser, non pas sur la tête innocente, mais sur le milieu de la poitrine sous lequel se trouve le petit cœur, qui bat, qui bat pour nous... là où un jour sera la blessure. Elle la panse d'avance, cette blessure, sa Maman, avec son pur baiser d'Immaculée.
Le bœuf éveillé par la clarté se dresse avec un grand bruit de sabots et il mugit. L'âne relève la tête et brait. C'est la lumière qui les réveille, mais j'aime penser qu'ils ont voulu saluer leur Créateur pour eux-mêmes et pour tous les animaux.
Joseph aussi, qui comme extasié priait avec autant d'intensité qu'il s'était abstrait de tout ce qui l'entourait, se secoue et entre ses doigts dont il se couvre le visage, il voit filtrer la lumière étrange. Il découvre le visage, lève la tête, se retourne. Le bœuf debout, lui cache Marie, mais elle l'appelle : "Joseph, viens."
Joseph accourt et devant le spectacle s'arrête comme foudroyé de révérence, il va tomber à genoux là où il se trouve. Mais Marie insiste : "Viens, Joseph." Elle appuie la main gauche sur le foin et tenant de la main droite l'Enfant qu'Elle serre sur son cœur, elle se lève et se dirige vers Joseph qui marche hésitant, pris entre le désir d'avancer et la peur d'être irrespectueux.
Au pied de la couche les deux époux se rencontrent et se regardent en pleurant de bonheur.
"Viens" dit Marie "offrons Jésus au Père."
Pendant que Joseph s'agenouille, elle, debout, entre les deux poutres qui soutiennent la voûte, élève sa Créature entre ses bras et dit : "Me voici. C'est pour Lui, ô Dieu, que je te dis cette parole. Me voici pour faire ta volonté. [2] Et avec Lui, moi, Marie et Joseph mon époux. Voici tes serviteurs, Seigneur. Que soit accomplie par nous, à toute heure et en toute occasion, ta volonté pour ta gloire et ton amour." Puis Marie se penche et dit : "Prends, Joseph" et Elle offre l'Enfant.
"Moi ! À Moi ! Oh ! Non ! Je ne suis pas digne !" Joseph est tout effrayé, anéanti à l'idée de devoir toucher Dieu.
Mais Marie insiste en souriant : "Tu en es bien digne. Personne ne l'est plus que toi. C'est pour cela que Dieu t'a choisi. Prends-le, Joseph, et tiens-le pendant que je cherche les langes."
173> Joseph, rouge comme la pourpre, avance les bras et prend le petit bourgeon de chair qui crie parce qu'il a froid. Quand il l'a entre les bras, il ne persiste pas dans l'intention de le tenir par respect éloigné de lui. Il le serre contre son cœur et éclatant en sanglots : "Oh ! Seigneur ! Mon Dieu !" et il se penche pour baiser ses petits pieds et les sent glacés. Alors, il s'assoit sur le sol, le serre sur son sein. Avec son habit marron, avec ses mains il s'ingénie à le couvrir, à le réchauffer, à le défendre contre la bise nocturne. Il voudrait bien aller du côté du feu, mais là il y a un courant d'air qui entre par la porte. Mieux vaut rester où il est. Il vaut mieux même aller entre les deux animaux qui les protégeront du courant d'air et donneront un peu de chaleur. Il va se mettre entre le bœuf et l'âne avec les épaules tournées vers la porte, penché sur le Nouveau-né pour lui faire de sa poitrine une niche dont les parois sont une tête grise aux longues oreilles et un grand museau blanc aux naseaux fumants et aux bons yeux humides.
Marie a ouvert le coffre et en a tiré les linges et les langes. Elle est allée près du feu pour les réchauffer. La voilà qui va vers Joseph et enveloppe le Bébé dans les linges tiédis, puis elle protège la petite tête avec son voile. "Où allons-nous le mettre maintenant ?" dit-elle.
Joseph regarde autour, réfléchit... "Attends, dit-il. Poussons plus loin les deux animaux et leur foin. Tirons en bas le foin de la mangeoire qui est plus haut et mettons-le ici à l'intérieur. Le bord de cette mangeoire le protégera de l'air, le foin lui fera un oreiller et le bœuf par son souffle le réchauffera un peu." Et Joseph se met à l'ouvrage, pendant que Marie berce son Petit en le serrant sur son cœur et en appuyant sa joue sur la petite tête pour la réchauffer.
Joseph ravive le feu sans épargner le bois pour faire une belle flamme. Il réchauffe le foin et peu à peu le sèche et le met sur le sein pour l'empêcher de refroidir. Puis, quand il en a assez amoncelé pour faire un petit matelas à l'Enfant, il va à la mangeoire et l'arrange pour en faire un berceau. "C'est prêt, dit-il. Maintenant il faudrait bien une couverture pour empêcher le foin de le piquer, et pour le couvrir..."
"Prends mon manteau" dit Marie.
"Tu auras froid."
174> "Oh ! cela ne fait rien ! La couverture est trop rugueuse. Le manteau est doux et chaud. Je n'ai pas du tout froid. Mais que Lui ne souffre plus."
Joseph prend l'ample manteau de moelleuse laine bleue sombre et l'arrange en double sur le foin, avec un pli qui penche hors de la crèche. Le premier lit du Sauveur est prêt.
Et la Mère, de sa douce démarche ondoyante, le porte et le dépose, le recouvre avec le pli du manteau qu'elle amène aussi autour de la tête nue qui enfonce dans le foin, à peine protégé des piqûres par le mince voile de Marie. Il ne reste à découvert que le petit visage gros comme le poing, et les deux, penchés sur la crèche, radieux, le regardent dormir son premier sommeil. La chaleur des langes et du foin a arrêté ses pleurs et apporté le sommeil au doux Jésus.
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Invité a écrit:jacques58fan a écrit:Bonjour.Je souhaiterais me procurer des ouvrages de Maria Valtorta. A ma grande stupéfaction seuls les volumes 1 et 2 sont encore disponibles...
Savez-vous si une réédition des 10 volumes est en cours?
En espérant quelques réponses
Merci par avance
Bonsoir Jacques,
La librairie catholique " RASSEMBLEMENT à son IMAGE " (Chrétiens Magazine) est spécialisée dans la distribution de l'évangile tel qu'il ma été révélé de Maria Valtorta, soit en volumes (10 + quelques uns sur les épîtres), soit en CD MP3.
Lien :
https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0ahUKEwiurbDHss3KAhWJ6xoKHTsqCoAQFgggMAA&url=http%3A%2F%2Fwww.asonimage.fr%2F&usg=AFQjCNElUyDvQ9YtExN2gKXx4IyJDhNiiA&sig2=nWCT2gFjJT6SRj23O1VG7w
Merci pour les ouvrages de Maria Valtorta
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Réédition : j'ai entendu dire assez récemment (je ne sais plus où, ni par qui) qu'une traduction révisée serait en cours d'élaboration ; on m'avait même donné le nom du traducteur, un homme jeune que je connaissais par ailleurs ; je suppose donc que l'info est sérieuse.
Michel-Pierre- J'adore l'Eucharistie
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
De Catherine Emmerich qui décrit le trajet à Bethléem, et de Maria qui décrit l'intérieur de la Grotte, ces chapitres de l'une et de l'autre ont une complémentarité.
(Chant besnier p 30)
Nuit sombre ton ombre
vaut les plus beaux jours!
Des anges sans nombres,
honorent ton cours:
Oh Divin mystère, le Verbe est enfant!
Ref:Non rien n'est si grand,
par toute la terre,
non rien n'est plus grand,
que Jésus naissant!
(Chant besnier p 30)
Nuit sombre ton ombre
vaut les plus beaux jours!
Des anges sans nombres,
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Ref:Non rien n'est si grand,
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que Jésus naissant!
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Bonsoir.
Petit soucis d'ordre technique:je ne suis plus abonné à ce topic, alors que je l'étais et souhaite le demeurer.
Pouvez-vous m'y 'inscrire" svp?
Merci par avance
Petit soucis d'ordre technique:je ne suis plus abonné à ce topic, alors que je l'étais et souhaite le demeurer.
Pouvez-vous m'y 'inscrire" svp?
Merci par avance
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Inscription : 22/01/2016
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
jacques58fan a écrit:Bonsoir.
Petit soucis d'ordre technique:je ne suis plus abonné à ce topic, alors que je l'étais et souhaite le demeurer.
Pouvez-vous m'y 'inscrire" svp?
Merci par avance
Vous l'êtes, comme tous les autres sujet, cela s’arrête tant que vous n'avez pas cliquez sur le lien que vous recevez en mail.
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
L’adoration des bergers.
Tome 1, chapitre 49.
Adoration des bergers (Jean-Honoré Fragonard)
177> J'écris en présence de mon Jésus-Maître. Pour moi, tout pour moi. Revenu pour moi, depuis tant de temps, tout pour moi. Vous direz : "Mais, comment ? Cela fait presque un mois que tu reviens à entendre et à voir, et tu dis que tu l'as enfin après si longtemps ?" Je réponds encore une fois ce que, de vive voix et par écrit, j'ai dit plusieurs fois.
C’est autre chose que de voir et autre chose que d'entendre et surtout autre chose, de voir et entendre pour les autres ou de voir et entendre tout pour moi, exclusivement pour moi. Dans le premier cas je suis une spectatrice, une répétitrice de ce que je vois et entends, mais si cela me donne la joie car ce sont toujours des choses qui vous causent une grande joie, il est vrai aussi que c'est une joie qui est extérieure. Les mots disent mal ce que je ressens si bien. Mais, je ne sais mieux m'exprimer. En somme, je veux dire que ma joie ressemble à celle de quelqu'un qui lit un beau livre ou voit une belle scène. Il en est ému, la goûte, en admire l'harmonie, il pense : "Quelle belle chose ce serait d'être à la place de cette personne !" Tandis que dans le second cas, quand l'audition et la vision est pour moi, alors "cette personne" c'est moi. Elle est pour moi la parole que j'entends, pour moi la figure que je vois.
178> C'est moi et Lui. Moi et Marie. Moi et Jean. Vivants, vrais, réels, tout proche. Non pas en face de moi comme si je voyais passer un film, mais à côté de mon lit, se déplaçant dans la chambre ou s'appuyant aux meubles, ou assis, ou debout comme des personnes vivantes, mes hôtes; ce qui est bien différent d'une vision pour tout le monde. En somme tout cela est "pour moi."
Et aujourd'hui, et même hier depuis l'après-midi, Jésus est ici, avec son vêtement ordinaire de laine blanche, d'un blanc qui tire sur l'ivoire, si différent par sa pesanteur et sa teinte du vêtement éclatant qui semble d'un lin immatériel, si blanc qu'on dirait qu'il est fait de fils de lumière, qui le couvre dans le Ciel. Il est ici avec ses mains belles et longues et effilées, d'un blanc de vieil ivoire, avec son beau visage allongé et pâle où resplendissent ses yeux dominateurs et doux de saphir sombre entre les cils épais d'un châtain étincelant de blond roux. Il est ici avec ses beaux cheveux longs blonds et souples, d'un blond roux plus vif dans les parties éclairées et plus sombre dans le fond des plis. Il est ici ! Il est ici ! Il me sourit et me regarde écrire de Lui. Comme il faisait à Viareggio... et comme il ne faisait plus depuis la Semaine Sainte... me donnant toute cette désolation qui devenait fièvre et presque désespérance quand, à la douleur qui me venait d'être privée de Lui, s'ajoutait encore celle d'être privée de vivre là au moins où je l'avais vu et pouvais dire : "Là, il s'est appuyé. Là, il s'est assis. Là il s'est penché pour mettre sa main sur ma tête" et là où étaient morts les miens. Oh ! qui ne l'a pas éprouvé ne peut comprendre ! Non, il n'y a pas de raison de prétendre de jouir de toutes ces faveurs. Nous savons bien que ce sont des grâces gratuites, que nous ne méritons pas et nous ne pouvons prétendre qu'elles durent quand elles nous sont accordées. Nous le savons bien. Et plus elles nous sont données, et plus nous nous anéantissons dans l'humilité en reconnaissant notre répugnante misère en face de l'Infinie Beauté et de la Divine Richesse qui se donne à nous.
Mais que dites-vous, Père ? Un fils ne désire-t-il pas voir son père et sa mère ? Une femme voir son mari ? Et quand la mort ou une longue absence les prive de leur vue, ne trouvent-ils pas un réconfort dans le fait de vivre là où ils ont vécu ? S'ils doivent quitter ce lieu, ne souffrent-ils pas doublement, parce qu'ils ont perdu aussi le lieu où l'absent partagea leur amour ? Peut-on leur reprocher de souffrir de cette douleur ? Non. Et pour moi ? Jésus n'est-il pas mon Père et mon Époux ? Plus cher; beaucoup plus cher qu'un père ou un époux ? Et qu'il me soit tel, jugez d'après la façon dont j'ai supporté la mort de ma mère. J'ai souffert, savez-vous ? Je pleure encore car je l'aimais malgré son caractère. Mais vous avez vu comment j'ai franchi cette passe. Jésus était là. Et il m'était plus cher que maman. Dois-je Le dire. J'ai souffert, et je souffre davantage maintenant de la mort de maman qui remonte à huit mois que je n'ai souffert alors. C'est que dans ces deux derniers mois, j'étais sans Jésus pour moi et sans Marie pour moi et même maintenant, il suffit qu'ils me laissent un moment pour que je ressente plus que jamais ma désolation d'orpheline malade et je sois replongée dans l'humaine et amère douleur de ces jours inhumains.
J'écris sous les yeux de Jésus et donc je n'exagère pas et je ne déforme rien. Ce n'est pas ma manière, d'ailleurs, mais même si j'étais ainsi, il me serait impossible de rester sous ce regard. J'ai écrit ceci, en cet endroit où je n'ai pas l'habitude de le faire, car pour les visions de Marie, je ne les interromps pas par la manifestation de mon pauvre moi.
179> Je sais déjà que je dois continuer à manifester ses gloires. Sa Maternité, à tous les instants, n'a-t-elle pas été une couronne de gloire ? Je suis très malade et il me coûte beaucoup d'écrire. Je suis une loque. Mais quand il s'agit de la faire connaître pour qu'Elle soit davantage aimée, je ne calcule pas. Les épaules me font mal ? Le cœur cède ? Ma tête souffre ? La fièvre monte ? N'importe ! Que Marie soit connue toute beauté et tendresse, comme je la vois, par la bonté de Dieu et la sienne, et cela me suffit.
Plus tard je vois une vaste étendue de campagne. La lune est au zénith et elle cingle tranquille dans un ciel tout constellé. Les étoiles paraissent des clous de diamant enfoncés dans un immense baldaquin de velours bleu foncé. Et la lune rie au milieu avec sa figure toute blanche d'où descendent des fleuves de lumière laiteuse qui donnent une teinte blanche au paysage. Les arbres dépouillés de leur feuillage se détachent plus grands et sombres sur cette blancheur, pendant que les murets qui surgissent çà et là ressemblent à du lait caillé. Une maisonnette, dans le lointain, semble être un bloc de marbre de Carrare.
Sur ma droite, je vois une sorte de hangar qui est construit partie en maçonnerie, partie en bois. De là, sort de temps en temps un bêlement intermittent et bref. Ce doit être des brebis qui rêvent ou qui croient l'aube proche à cause du clair de lune. C'est une clarté, excessive même, tant elle est intense, et qui s'accroît comme si l'astre s'approchait de la terre ou étincelait par suite d'un mystérieux incendie.
Un berger s'avance sur le seuil. Il lève le bras à hauteur du front pour ménager ses yeux et regarde en l'air. Il semble impossible qu'on doive s'abriter de la clarté de la lune, mais elle est si vive qu'elle éblouit, en particulier celui qui sort d'un enclos, d'ordinaire ténébreux. Tout est calme, mais cette clarté est étonnante. Le berger appelle ses compagnons. Ils vont tous à la porte. Un tas d'hommes hirsutes, de tous âges. Il y a des adolescents et d'autres qui déjà blanchissent. Ils commentent le fait étrange et les plus jeunes ont peur, spécialement un garçon d'une douzaine d'années qui se met à pleurer, s'attirant les moqueries des plus vieux.
180> "De quoi as-tu peur, sot que tu es ?" lui dit le plus vieux[1]. "Tu ne vois pas que l'air est tranquille ? Tu n'as jamais vu un clair de lune ? Es-tu toujours resté sous la robe de la maman comme un poussin sous la poule couveuse ? Mais, tu en verras des choses ! Une fois j'étais allé vers les monts du Liban, plus loin encore. Je montais. J'étais jeune et la marche ne me fatiguait pas. J'étais riche aussi à cette époque... Une nuit, je vis une lumière telle que je pensai qu'Élie allait revenir avec son char de feu. Le ciel était tout embrasé. Un vieux - le vieux c'était lui - me dit : "Un grand événement va bientôt se produire dans le monde. Et pour nous ce fut un événement : l'arrivée des soldats de Rome. Oh ! tu en verras si tu vis..."
Mais le pastoureau ne l'écoute plus. Il semble n'avoir plus peur. En effet, il quitte le seuil et s'esquive de derrière les épaules d'un berger musclé derrière lequel il s'était réfugié et sort dans le parc qui se trouve devant le hangar. Il regarde en l'air et marche comme un somnambule ou comme s'il était hypnotisé par quelque chose qui le captive totalement. À un moment il crie : "Oh !" et reste comme pétrifié, les bras légèrement ouverts. Les autres se regardent, étonnés.
"Mais qu'a donc ce sot ?" dit quelqu'un.
"Demain je le ramène à sa mère. Je ne veux pas d'un fou pour garder les brebis" dit un autre.
Et le vieux qui a parlé précédemment dit alors : "Allons voir avant de juger. Appelez aussi les autres qui dorment et prenez des bâtons. Il y a peut-être une mauvaise bête ou des malandrins..."
Ils rentrent, ils appellent les autres bergers et sortent avec des torches et des matraques. Ils rejoignent l'enfant.
"Là, là" murmure-t-il en souriant. "Au-dessus de l'arbre regardez cette lumière qui arrive. On dirait qu'elle s'avance sur un rayon de lune. La voilà qui approche. Comme elle est belle !"
"Moi, je ne vois qu'une clarté un peu vive."
"Moi aussi."
"Moi aussi" disent les autres.
"Non. Je vois quelque chose qui ressemble à un corps" dit un autre en qui je reconnais le berger qui a donné le lait à Marie.
"C'est un... c'est un ange !" crie l'enfant. "Le voilà qui descend et s'approche... Par terre ! À genoux devant l'Ange de Dieu !"
181> Un "oh !" prolongé et respectueux s'élève du groupe des bergers qui tombent le visage contre terre et paraissent d'autant plus frappés par l'apparition qu'ils sont plus âgés. Les plus jeunes sont à genoux et regardent l'ange qui s'approche toujours plus, et s'arrête en l'air déployant ses grandes ailes, blancheur de perles dans la blancheur lunaire qui l'enveloppe, au-dessus du mur d'enceinte.
"Ne craignez pas, je ne vous porte pas malheur. Je vous apporte la nouvelle d'une grande joie pour le peuple d'Israël et pour tous les peuples de la terre." La voix angélique, c'est une harpe harmonieuse qui accompagne des voix de rossignols.
"Aujourd'hui, dans la cité de David, est né le Sauveur." À ces mots, l'ange ouvre plus grandes ses ailes et les agite comme par un tressaillement de joie et une pluie d'étincelles d'or et de pierres précieuses paraît s'en échapper. Un véritable arc-en-ciel qui dessine un arc de triomphe au-dessus du pauvre parc.
"...le Sauveur qui est le Christ." L'ange brille d'une lumière plus éclatante. Ses deux ailes, maintenant arrêtées et tendues vers le ciel semblent deux voiles immobiles sur le saphir de la mer, deux flammes qui montent ardentes.
"...Christ, le Seigneur !" L'ange replie ses ailes de lumière et s'en couvre comme d'un survêtement de diamant sur un habit de perles, il s'incline comme pour adorer avec les bras serrés sur le cœur et le visage qui disparaît, incliné comme il est sur la poitrine, dans l'ombre du haut des ailes repliées. On ne voit plus qu'une forme allongée et lumineuse, immobile pendant la durée d'un Gloria.
Mais voici qu'il bouge. Il rouvre les ailes et lève son visage où la lumière s'épanouit en un sourire paradisiaque et il dit : "Vous le reconnaîtrez à ces signes : dans une pauvre étable, derrière Bethléem, vous trouverez un bébé enveloppé dans des langes couché dans une mangeoire d'animaux, parce que pour le Messie, il n'y a pas eu de toit dans la cité de David." En disant cela, l'ange devient grave, même triste.
Mais des Cieux arrive une foule – oh ! quelle foule ! - une foule d'anges qui lui ressemblent, une échelle d'anges qui descendent dans l'allégresse, éclipsent la lune par leur lumière paradisiaque. Ils se rassemblent autour de l'ange annonciateur, en agitant leurs ailes, en répandant des parfums, en une harmonie musicale où toutes les voix les plus belles de la création se retrouvent, mais portées à la perfection de leur sonorité.
182> Si la peinture est l'effort de la matière pour devenir lumière, ici la mélodie est l'effort de la musique pour exprimer aux hommes la beauté de Dieu, et entendre cette mélodie c'est connaître le Paradis, où tout est harmonie de l'amour qui de Dieu se donne, se répandant pour réjouir les bienheureux et retourner de ceux-ci à Dieu et Lui dire : "Nous t'aimons !"
Le "Gloria" angélique se répand en ondes de plus en plus étendues sur la campagne tranquille, ainsi que la lumière. Les oiseaux unissent leurs chants pour saluer cette lumière précoce et les brebis leurs bêlements pour ce soleil anticipé, comme si les animaux qui saluaient leur Créateur, venu au milieu d'eux pour les aimer comme Homme et en plus comme Dieu.
Le chant décroît, et la lumière aussi pendant que les anges remontent aux Cieux... Les bergers reviennent à eux-mêmes.
"As-tu entendu ?"
"Allons-nous voir ?"
"Et les animaux ?"
"Oh ! il ne leur arrivera rien. Allons pour obéir à la parole de Dieu"
"Mais, où aller ?"
"N'a-t-il pas dit qu'il était né aujourd'hui et qu'il n'avait pas trouvé de logement à Bethléem ?" Et le berger qui a donné le lait c'est lui qui parle maintenant. "Venez, je sais. J'ai vu la femme et elle m'a fait de la peine. Je lui ai indiqué un endroit pour elle, parce que je pensais bien qu'elle ne trouverait pas de logement, et à l'homme je lui ai donné du lait pour elle. Elle est si jeune et si belle. Elle doit être bonne comme l'ange qui nous a parlé. Venez, venez. Allons prendre du lait, des fromages, des agneaux et des peaux tannées de brebis. Ils doivent être très pauvres et... qui sait quel froid pour Celui que je n'ose nommer ! Et penser que j'ai parlé à la Mère comme à une pauvre épouse ! ..."
Ils vont au hangar et en sortent, peu après, portant qui des récipients de lait, qui des fromages ronds enveloppés dans des filets de sparterie, qui des paniers avec un agneau bêlant, qui des peaux de brebis apprêtées.
"Moi je porte une brebis qui a eu un agneau il y a un mois. Son lait est excellent. Il pourra leur être utile si la femme en manque. Elle me semblait une bambine, et si pâle ! ... Un teint de jasmin, au clair de lune" dit le berger du lait. Et il les conduit.
183> Ils s'en vont, éclairés par la lune et des torches, après avoir fermé le hangar et l'enceinte. Ils vont par les sentiers champêtres, à travers des haies de ronces dépouillées par l'hiver. Ils font le tour de Bethléem et arrivent à l'étable non par le chemin qu'avait suivi Marie, mais en sens contraire. Ainsi ils ne passent pas devant les grottes mieux aménagées mais trouvent immédiatement le refuge qu'ils cherchent. Ils s'approchent.
"Entre !"
"Moi, je n'ose pas."
"Entre, toi."
"Non."
"Regarde au moins."
"Toi, Lévi qui as vu l'ange le premier, cela veut dire que tu es plus bon que nous, regarde." Vraiment ils l'avaient d'abord traité de fou... mais maintenant il leur est utile que le gamin ose ce qu'eux n'osent pas.
L'enfant hésite mais se décide ensuite. Il s'approche du refuge, écarte un peu le manteau... et s'arrête en extase.
"Que vois-tu ?" lui demandent-ils anxieux à voix basse.
"Je vois une femme toute jeune et belle et un homme penché sur une mangeoire et j'entends... j'entends un bébé qui pleure et la femme lui dit d'une voix... oh ! quelle voix !"
"Que dit-elle ?"
"Elle dit : "Jésus, mon tout petit ! Jésus, amour de ta Maman ! Ne pleure pas, mon petit Enfant !" Elle dit : "Oh ! si je pouvais te dire : 'Prends le lait, mon tout petit ! ' Mais je ne l'ai pas encore ! " Elle dit : "Tu as si froid, mon amour ! Le foin te pique. Quelle douleur pour ta Maman de t'entendre pleurer ainsi ! Sans pouvoir te soulager". Elle dit : "Dors, ma petite âme ! Mon cœur se fend de t'entendre et de voir tes larmes". Elle l'embrasse et réchauffe ses petits pieds avec ses mains. Elle est penchée abaissant ses mains sur la mangeoire.
"Appelle ! Montre que tu es là !"
"Moi non. Vous plutôt qui nous avez conduit et la connaissez."
Le berger ouvre la bouche et se borne à un soupir bruyant.
Joseph se retourne et vient à la porte. "Qui êtes-vous ?"
"Des bergers. Nous vous apportons de la nourriture et de la laine. Nous venons adorer le Sauveur."
"Entrez."
Ils entrent dans l'étable qui s'éclaire à la lumière des torches. Les vieux poussent les jeunes devant eux.
184> Marie se retourne et sourit : "Venez" dit-elle. "Venez !" et elle les invite de la main et par son sourire et elle prend le garçon qui a vu l'ange et l'attire à elle, tout près de la crèche. Et l'enfant regarde, radieux.
Les autres, invités aussi par Joseph, s'avancent avec leurs cadeaux, et avec des paroles brèves, émues, les déposent aux pieds de Marie. Ils regardent le petit Bébé qui pleure doucement et ils sourient, émus et heureux.
L'un d'eux plus hardi dit : "Prends, Mère, elle est soyeuse et propre. Je l'avais préparée pour le bambin qui va bientôt naître chez nous, mais je te la donne. Mets ton Fils dans cette laine, elle sera douce et chaude." Et il offre une peau de brebis, une très belle peau avec une longue toison de laine toute blanche [2].
Marie soulève Jésus et l'en enveloppe. Elle le montre aux bergers qui, à genoux sur la litière du sol, le regardent extasiés.
Ils se font plus hardis et l'un d'eux propose : "Il faudrait Lui donner une gorgée de lait ou mieux de l'eau et du miel. Mais nous n'avons pas de miel. On en donne aux tout petits. J'ai sept enfants, je suis au courant... "
"Voilà du lait. Prends, Femme. "
"Mais il est froid. Il faut du chaud. Où est Élie ? C'est lui qui a la brebis."
Élie doit être l'homme au lait, mais il n'est pas là. Il s'est arrêté dehors et regarde par une fente et il est perdu dans l'obscurité de la nuit.
"Qui vous a amenés ici ?"
"Un ange nous a dit de venir et Élie nous a conduits. Mais où est-il à présent ?"
Un bêlement de la brebis le trahit.
"Avance, on demande de toi."
Il entre avec la brebis, intimidé d'être le plus remarqué.
"C'est toi ?" dit Joseph qui le reconnaît. Et Marie lui sourit en disant : "Tu es bon."
Ils traient la brebis, et trempant l'extrémité d'un linge dans le lait chaud et écumeux, Marie baigne les lèvres du Petit qui suce cette douceur crémeuse. Ils sourient tous, et plus encore lorsque avec le coin de la toile encore entre les lèvres, Jésus s'endort dans la tiédeur de la laine.
"Mais vous ne pouvez rester ici. Il fait froid et humide. Et puis... avec cette odeur d'animaux ! Ça ne va pas... et ça ne va pas pour le Sauveur."
185> "Je le sais" dit Marie avec un grand soupir. "Mais il n'y a pas de place pour nous à Bethléem."
"Prends courage, ô Femme. Nous allons te chercher une maison."
"Je vais en parler à ma patronne, dit l'homme au lait, Élie. Elle est bonne. Elle vous accueillera, dut-elle vous céder sa pièce. Dès qu'il va faire jour, je lui en parle. Elle a sa maison toute pleine, mais elle vous donnera une place."
"Pour le Petit au moins. Moi et Joseph, n'importe si nous restons encore par terre. Mais pour le Petit..."
"Ne soupire pas, Femme, j'y pense. Je raconterai à beaucoup de gens ce qui nous a été dit. Vous ne manquerez de rien. Pour le moment, prenez ce que notre pauvreté peut vous donner. Nous sommes des bergers..."
"Nous sommes pauvres, nous aussi" dit Joseph. "Et ne pouvons vous dédommager."
"Oh ! nous ne voulons pas ! Même si vous le pouviez nous ne le voudrions pas ! Le Seigneur nous a déjà récompensés. La paix, il l'a promise à tout le monde. Les anges disaient : "Paix aux hommes de bonne volonté". Mais à nous, il l'a déjà donnée car l'ange a dit que cet Enfant, c'est le Sauveur, le Christ, le Seigneur. Nous sommes pauvres et ignorants, mais nous savons que les Prophètes disent que le Sauveur sera le Prince de la Paix et à nous il a dit d'aller l'adorer. Ainsi il nous a donné sa paix. Gloire à Dieu au plus haut des Cieux et gloire à celui qui est son Christ ! Et toi, sois bénie, Femme qui l'a engendré ! Tu es Sainte puisque tu as mérité de le porter ! Commande-nous, comme une Reine, car nous serons contents de te servir. Que pouvons-nous faire pour toi ?"
"Aimer mon Fils, et avoir toujours dans le cœur vos pensées de maintenant."
"Mais pour toi, tu ne désires rien ? Tu n'as pas de parents à qui faire savoir que ton Fils est né ?"
"Oui, j'en aurais. Mais ils ne sont pas près d'ici. Ils sont à Hébron..."
"J'y vais moi" dit Élie. "Qui sont-ils ?"
"Zacharie, le prêtre, et Élisabeth ma cousine."
"Zacharie, oh ! Je le connais bien. En été je vais sur ces montagnes où il y a de riches et beaux pâturages et je suis l'ami de son berger. Quand je vais te savoir arrangée, je vais chez Zacharie."
"Merci, Élie."
186> "De rien. C'est grand honneur pour moi, pauvre berger, d'aller parler au prêtre et de lui dire : "Le Sauveur est né"."
"Non. Tu lui diras : "Marie de Nazareth, ta cousine, a dit que Jésus est né, et de venir à Bethléem "
"C'est ainsi que je dirai."
"Dieu t'en récompense, je me souviendrai de toi, de vous tous..."
"Tu parleras à ton Enfant de nous ?"
"Oui."
"Je suis Élie."
"Moi Lévi."
"Moi Samuel."
"Moi Jonas."
"Moi Isaac."
"Moi Tobie."
"Moi Jonathas."
"Et moi Daniel."
"Et Siméon, moi."
"Et moi, mon nom est Jean."
"Moi je m'appelle Joseph et mon frère Benjamin, nous sommes jumeaux."
"Je me rappellerai vos noms."
"Il nous faut partir... Mais nous reviendrons... Et nous t'en amènerons d'autres pour adorer ! ..."
"Comment revenir au parc en laissant ce Petit ?"
"Gloire à Dieu qui nous l'a montré !"
"Fais-nous baiser son habit" dit Lévi avec un sourire d'ange.
Marie lève doucement Jésus et, assise sur le foin, présente aux baisers, les pieds minuscules, enveloppés d'un linge. Ceux qui ont de la barbe se l'essuient d'abord. Tous, presque, pleurent et quand ils doivent partir, ils sortent à reculons, laissant leur cœur près de la crèche...
La vision se termine ainsi pour moi : Marie assise sur la paille avec l'Enfant sur son sein et Joseph qui accoudé au bord de la crèche, regarde et adore.
Tome 1, chapitre 49.
Adoration des bergers (Jean-Honoré Fragonard)
177> J'écris en présence de mon Jésus-Maître. Pour moi, tout pour moi. Revenu pour moi, depuis tant de temps, tout pour moi. Vous direz : "Mais, comment ? Cela fait presque un mois que tu reviens à entendre et à voir, et tu dis que tu l'as enfin après si longtemps ?" Je réponds encore une fois ce que, de vive voix et par écrit, j'ai dit plusieurs fois.
C’est autre chose que de voir et autre chose que d'entendre et surtout autre chose, de voir et entendre pour les autres ou de voir et entendre tout pour moi, exclusivement pour moi. Dans le premier cas je suis une spectatrice, une répétitrice de ce que je vois et entends, mais si cela me donne la joie car ce sont toujours des choses qui vous causent une grande joie, il est vrai aussi que c'est une joie qui est extérieure. Les mots disent mal ce que je ressens si bien. Mais, je ne sais mieux m'exprimer. En somme, je veux dire que ma joie ressemble à celle de quelqu'un qui lit un beau livre ou voit une belle scène. Il en est ému, la goûte, en admire l'harmonie, il pense : "Quelle belle chose ce serait d'être à la place de cette personne !" Tandis que dans le second cas, quand l'audition et la vision est pour moi, alors "cette personne" c'est moi. Elle est pour moi la parole que j'entends, pour moi la figure que je vois.
178> C'est moi et Lui. Moi et Marie. Moi et Jean. Vivants, vrais, réels, tout proche. Non pas en face de moi comme si je voyais passer un film, mais à côté de mon lit, se déplaçant dans la chambre ou s'appuyant aux meubles, ou assis, ou debout comme des personnes vivantes, mes hôtes; ce qui est bien différent d'une vision pour tout le monde. En somme tout cela est "pour moi."
Et aujourd'hui, et même hier depuis l'après-midi, Jésus est ici, avec son vêtement ordinaire de laine blanche, d'un blanc qui tire sur l'ivoire, si différent par sa pesanteur et sa teinte du vêtement éclatant qui semble d'un lin immatériel, si blanc qu'on dirait qu'il est fait de fils de lumière, qui le couvre dans le Ciel. Il est ici avec ses mains belles et longues et effilées, d'un blanc de vieil ivoire, avec son beau visage allongé et pâle où resplendissent ses yeux dominateurs et doux de saphir sombre entre les cils épais d'un châtain étincelant de blond roux. Il est ici avec ses beaux cheveux longs blonds et souples, d'un blond roux plus vif dans les parties éclairées et plus sombre dans le fond des plis. Il est ici ! Il est ici ! Il me sourit et me regarde écrire de Lui. Comme il faisait à Viareggio... et comme il ne faisait plus depuis la Semaine Sainte... me donnant toute cette désolation qui devenait fièvre et presque désespérance quand, à la douleur qui me venait d'être privée de Lui, s'ajoutait encore celle d'être privée de vivre là au moins où je l'avais vu et pouvais dire : "Là, il s'est appuyé. Là, il s'est assis. Là il s'est penché pour mettre sa main sur ma tête" et là où étaient morts les miens. Oh ! qui ne l'a pas éprouvé ne peut comprendre ! Non, il n'y a pas de raison de prétendre de jouir de toutes ces faveurs. Nous savons bien que ce sont des grâces gratuites, que nous ne méritons pas et nous ne pouvons prétendre qu'elles durent quand elles nous sont accordées. Nous le savons bien. Et plus elles nous sont données, et plus nous nous anéantissons dans l'humilité en reconnaissant notre répugnante misère en face de l'Infinie Beauté et de la Divine Richesse qui se donne à nous.
Mais que dites-vous, Père ? Un fils ne désire-t-il pas voir son père et sa mère ? Une femme voir son mari ? Et quand la mort ou une longue absence les prive de leur vue, ne trouvent-ils pas un réconfort dans le fait de vivre là où ils ont vécu ? S'ils doivent quitter ce lieu, ne souffrent-ils pas doublement, parce qu'ils ont perdu aussi le lieu où l'absent partagea leur amour ? Peut-on leur reprocher de souffrir de cette douleur ? Non. Et pour moi ? Jésus n'est-il pas mon Père et mon Époux ? Plus cher; beaucoup plus cher qu'un père ou un époux ? Et qu'il me soit tel, jugez d'après la façon dont j'ai supporté la mort de ma mère. J'ai souffert, savez-vous ? Je pleure encore car je l'aimais malgré son caractère. Mais vous avez vu comment j'ai franchi cette passe. Jésus était là. Et il m'était plus cher que maman. Dois-je Le dire. J'ai souffert, et je souffre davantage maintenant de la mort de maman qui remonte à huit mois que je n'ai souffert alors. C'est que dans ces deux derniers mois, j'étais sans Jésus pour moi et sans Marie pour moi et même maintenant, il suffit qu'ils me laissent un moment pour que je ressente plus que jamais ma désolation d'orpheline malade et je sois replongée dans l'humaine et amère douleur de ces jours inhumains.
J'écris sous les yeux de Jésus et donc je n'exagère pas et je ne déforme rien. Ce n'est pas ma manière, d'ailleurs, mais même si j'étais ainsi, il me serait impossible de rester sous ce regard. J'ai écrit ceci, en cet endroit où je n'ai pas l'habitude de le faire, car pour les visions de Marie, je ne les interromps pas par la manifestation de mon pauvre moi.
179> Je sais déjà que je dois continuer à manifester ses gloires. Sa Maternité, à tous les instants, n'a-t-elle pas été une couronne de gloire ? Je suis très malade et il me coûte beaucoup d'écrire. Je suis une loque. Mais quand il s'agit de la faire connaître pour qu'Elle soit davantage aimée, je ne calcule pas. Les épaules me font mal ? Le cœur cède ? Ma tête souffre ? La fièvre monte ? N'importe ! Que Marie soit connue toute beauté et tendresse, comme je la vois, par la bonté de Dieu et la sienne, et cela me suffit.
Plus tard je vois une vaste étendue de campagne. La lune est au zénith et elle cingle tranquille dans un ciel tout constellé. Les étoiles paraissent des clous de diamant enfoncés dans un immense baldaquin de velours bleu foncé. Et la lune rie au milieu avec sa figure toute blanche d'où descendent des fleuves de lumière laiteuse qui donnent une teinte blanche au paysage. Les arbres dépouillés de leur feuillage se détachent plus grands et sombres sur cette blancheur, pendant que les murets qui surgissent çà et là ressemblent à du lait caillé. Une maisonnette, dans le lointain, semble être un bloc de marbre de Carrare.
Sur ma droite, je vois une sorte de hangar qui est construit partie en maçonnerie, partie en bois. De là, sort de temps en temps un bêlement intermittent et bref. Ce doit être des brebis qui rêvent ou qui croient l'aube proche à cause du clair de lune. C'est une clarté, excessive même, tant elle est intense, et qui s'accroît comme si l'astre s'approchait de la terre ou étincelait par suite d'un mystérieux incendie.
Un berger s'avance sur le seuil. Il lève le bras à hauteur du front pour ménager ses yeux et regarde en l'air. Il semble impossible qu'on doive s'abriter de la clarté de la lune, mais elle est si vive qu'elle éblouit, en particulier celui qui sort d'un enclos, d'ordinaire ténébreux. Tout est calme, mais cette clarté est étonnante. Le berger appelle ses compagnons. Ils vont tous à la porte. Un tas d'hommes hirsutes, de tous âges. Il y a des adolescents et d'autres qui déjà blanchissent. Ils commentent le fait étrange et les plus jeunes ont peur, spécialement un garçon d'une douzaine d'années qui se met à pleurer, s'attirant les moqueries des plus vieux.
180> "De quoi as-tu peur, sot que tu es ?" lui dit le plus vieux[1]. "Tu ne vois pas que l'air est tranquille ? Tu n'as jamais vu un clair de lune ? Es-tu toujours resté sous la robe de la maman comme un poussin sous la poule couveuse ? Mais, tu en verras des choses ! Une fois j'étais allé vers les monts du Liban, plus loin encore. Je montais. J'étais jeune et la marche ne me fatiguait pas. J'étais riche aussi à cette époque... Une nuit, je vis une lumière telle que je pensai qu'Élie allait revenir avec son char de feu. Le ciel était tout embrasé. Un vieux - le vieux c'était lui - me dit : "Un grand événement va bientôt se produire dans le monde. Et pour nous ce fut un événement : l'arrivée des soldats de Rome. Oh ! tu en verras si tu vis..."
Mais le pastoureau ne l'écoute plus. Il semble n'avoir plus peur. En effet, il quitte le seuil et s'esquive de derrière les épaules d'un berger musclé derrière lequel il s'était réfugié et sort dans le parc qui se trouve devant le hangar. Il regarde en l'air et marche comme un somnambule ou comme s'il était hypnotisé par quelque chose qui le captive totalement. À un moment il crie : "Oh !" et reste comme pétrifié, les bras légèrement ouverts. Les autres se regardent, étonnés.
"Mais qu'a donc ce sot ?" dit quelqu'un.
"Demain je le ramène à sa mère. Je ne veux pas d'un fou pour garder les brebis" dit un autre.
Et le vieux qui a parlé précédemment dit alors : "Allons voir avant de juger. Appelez aussi les autres qui dorment et prenez des bâtons. Il y a peut-être une mauvaise bête ou des malandrins..."
Ils rentrent, ils appellent les autres bergers et sortent avec des torches et des matraques. Ils rejoignent l'enfant.
"Là, là" murmure-t-il en souriant. "Au-dessus de l'arbre regardez cette lumière qui arrive. On dirait qu'elle s'avance sur un rayon de lune. La voilà qui approche. Comme elle est belle !"
"Moi, je ne vois qu'une clarté un peu vive."
"Moi aussi."
"Moi aussi" disent les autres.
"Non. Je vois quelque chose qui ressemble à un corps" dit un autre en qui je reconnais le berger qui a donné le lait à Marie.
"C'est un... c'est un ange !" crie l'enfant. "Le voilà qui descend et s'approche... Par terre ! À genoux devant l'Ange de Dieu !"
181> Un "oh !" prolongé et respectueux s'élève du groupe des bergers qui tombent le visage contre terre et paraissent d'autant plus frappés par l'apparition qu'ils sont plus âgés. Les plus jeunes sont à genoux et regardent l'ange qui s'approche toujours plus, et s'arrête en l'air déployant ses grandes ailes, blancheur de perles dans la blancheur lunaire qui l'enveloppe, au-dessus du mur d'enceinte.
"Ne craignez pas, je ne vous porte pas malheur. Je vous apporte la nouvelle d'une grande joie pour le peuple d'Israël et pour tous les peuples de la terre." La voix angélique, c'est une harpe harmonieuse qui accompagne des voix de rossignols.
"Aujourd'hui, dans la cité de David, est né le Sauveur." À ces mots, l'ange ouvre plus grandes ses ailes et les agite comme par un tressaillement de joie et une pluie d'étincelles d'or et de pierres précieuses paraît s'en échapper. Un véritable arc-en-ciel qui dessine un arc de triomphe au-dessus du pauvre parc.
"...le Sauveur qui est le Christ." L'ange brille d'une lumière plus éclatante. Ses deux ailes, maintenant arrêtées et tendues vers le ciel semblent deux voiles immobiles sur le saphir de la mer, deux flammes qui montent ardentes.
"...Christ, le Seigneur !" L'ange replie ses ailes de lumière et s'en couvre comme d'un survêtement de diamant sur un habit de perles, il s'incline comme pour adorer avec les bras serrés sur le cœur et le visage qui disparaît, incliné comme il est sur la poitrine, dans l'ombre du haut des ailes repliées. On ne voit plus qu'une forme allongée et lumineuse, immobile pendant la durée d'un Gloria.
Mais voici qu'il bouge. Il rouvre les ailes et lève son visage où la lumière s'épanouit en un sourire paradisiaque et il dit : "Vous le reconnaîtrez à ces signes : dans une pauvre étable, derrière Bethléem, vous trouverez un bébé enveloppé dans des langes couché dans une mangeoire d'animaux, parce que pour le Messie, il n'y a pas eu de toit dans la cité de David." En disant cela, l'ange devient grave, même triste.
Mais des Cieux arrive une foule – oh ! quelle foule ! - une foule d'anges qui lui ressemblent, une échelle d'anges qui descendent dans l'allégresse, éclipsent la lune par leur lumière paradisiaque. Ils se rassemblent autour de l'ange annonciateur, en agitant leurs ailes, en répandant des parfums, en une harmonie musicale où toutes les voix les plus belles de la création se retrouvent, mais portées à la perfection de leur sonorité.
182> Si la peinture est l'effort de la matière pour devenir lumière, ici la mélodie est l'effort de la musique pour exprimer aux hommes la beauté de Dieu, et entendre cette mélodie c'est connaître le Paradis, où tout est harmonie de l'amour qui de Dieu se donne, se répandant pour réjouir les bienheureux et retourner de ceux-ci à Dieu et Lui dire : "Nous t'aimons !"
Le "Gloria" angélique se répand en ondes de plus en plus étendues sur la campagne tranquille, ainsi que la lumière. Les oiseaux unissent leurs chants pour saluer cette lumière précoce et les brebis leurs bêlements pour ce soleil anticipé, comme si les animaux qui saluaient leur Créateur, venu au milieu d'eux pour les aimer comme Homme et en plus comme Dieu.
Le chant décroît, et la lumière aussi pendant que les anges remontent aux Cieux... Les bergers reviennent à eux-mêmes.
"As-tu entendu ?"
"Allons-nous voir ?"
"Et les animaux ?"
"Oh ! il ne leur arrivera rien. Allons pour obéir à la parole de Dieu"
"Mais, où aller ?"
"N'a-t-il pas dit qu'il était né aujourd'hui et qu'il n'avait pas trouvé de logement à Bethléem ?" Et le berger qui a donné le lait c'est lui qui parle maintenant. "Venez, je sais. J'ai vu la femme et elle m'a fait de la peine. Je lui ai indiqué un endroit pour elle, parce que je pensais bien qu'elle ne trouverait pas de logement, et à l'homme je lui ai donné du lait pour elle. Elle est si jeune et si belle. Elle doit être bonne comme l'ange qui nous a parlé. Venez, venez. Allons prendre du lait, des fromages, des agneaux et des peaux tannées de brebis. Ils doivent être très pauvres et... qui sait quel froid pour Celui que je n'ose nommer ! Et penser que j'ai parlé à la Mère comme à une pauvre épouse ! ..."
Ils vont au hangar et en sortent, peu après, portant qui des récipients de lait, qui des fromages ronds enveloppés dans des filets de sparterie, qui des paniers avec un agneau bêlant, qui des peaux de brebis apprêtées.
"Moi je porte une brebis qui a eu un agneau il y a un mois. Son lait est excellent. Il pourra leur être utile si la femme en manque. Elle me semblait une bambine, et si pâle ! ... Un teint de jasmin, au clair de lune" dit le berger du lait. Et il les conduit.
183> Ils s'en vont, éclairés par la lune et des torches, après avoir fermé le hangar et l'enceinte. Ils vont par les sentiers champêtres, à travers des haies de ronces dépouillées par l'hiver. Ils font le tour de Bethléem et arrivent à l'étable non par le chemin qu'avait suivi Marie, mais en sens contraire. Ainsi ils ne passent pas devant les grottes mieux aménagées mais trouvent immédiatement le refuge qu'ils cherchent. Ils s'approchent.
"Entre !"
"Moi, je n'ose pas."
"Entre, toi."
"Non."
"Regarde au moins."
"Toi, Lévi qui as vu l'ange le premier, cela veut dire que tu es plus bon que nous, regarde." Vraiment ils l'avaient d'abord traité de fou... mais maintenant il leur est utile que le gamin ose ce qu'eux n'osent pas.
L'enfant hésite mais se décide ensuite. Il s'approche du refuge, écarte un peu le manteau... et s'arrête en extase.
"Que vois-tu ?" lui demandent-ils anxieux à voix basse.
"Je vois une femme toute jeune et belle et un homme penché sur une mangeoire et j'entends... j'entends un bébé qui pleure et la femme lui dit d'une voix... oh ! quelle voix !"
"Que dit-elle ?"
"Elle dit : "Jésus, mon tout petit ! Jésus, amour de ta Maman ! Ne pleure pas, mon petit Enfant !" Elle dit : "Oh ! si je pouvais te dire : 'Prends le lait, mon tout petit ! ' Mais je ne l'ai pas encore ! " Elle dit : "Tu as si froid, mon amour ! Le foin te pique. Quelle douleur pour ta Maman de t'entendre pleurer ainsi ! Sans pouvoir te soulager". Elle dit : "Dors, ma petite âme ! Mon cœur se fend de t'entendre et de voir tes larmes". Elle l'embrasse et réchauffe ses petits pieds avec ses mains. Elle est penchée abaissant ses mains sur la mangeoire.
"Appelle ! Montre que tu es là !"
"Moi non. Vous plutôt qui nous avez conduit et la connaissez."
Le berger ouvre la bouche et se borne à un soupir bruyant.
Joseph se retourne et vient à la porte. "Qui êtes-vous ?"
"Des bergers. Nous vous apportons de la nourriture et de la laine. Nous venons adorer le Sauveur."
"Entrez."
Ils entrent dans l'étable qui s'éclaire à la lumière des torches. Les vieux poussent les jeunes devant eux.
184> Marie se retourne et sourit : "Venez" dit-elle. "Venez !" et elle les invite de la main et par son sourire et elle prend le garçon qui a vu l'ange et l'attire à elle, tout près de la crèche. Et l'enfant regarde, radieux.
Les autres, invités aussi par Joseph, s'avancent avec leurs cadeaux, et avec des paroles brèves, émues, les déposent aux pieds de Marie. Ils regardent le petit Bébé qui pleure doucement et ils sourient, émus et heureux.
L'un d'eux plus hardi dit : "Prends, Mère, elle est soyeuse et propre. Je l'avais préparée pour le bambin qui va bientôt naître chez nous, mais je te la donne. Mets ton Fils dans cette laine, elle sera douce et chaude." Et il offre une peau de brebis, une très belle peau avec une longue toison de laine toute blanche [2].
Marie soulève Jésus et l'en enveloppe. Elle le montre aux bergers qui, à genoux sur la litière du sol, le regardent extasiés.
Ils se font plus hardis et l'un d'eux propose : "Il faudrait Lui donner une gorgée de lait ou mieux de l'eau et du miel. Mais nous n'avons pas de miel. On en donne aux tout petits. J'ai sept enfants, je suis au courant... "
"Voilà du lait. Prends, Femme. "
"Mais il est froid. Il faut du chaud. Où est Élie ? C'est lui qui a la brebis."
Élie doit être l'homme au lait, mais il n'est pas là. Il s'est arrêté dehors et regarde par une fente et il est perdu dans l'obscurité de la nuit.
"Qui vous a amenés ici ?"
"Un ange nous a dit de venir et Élie nous a conduits. Mais où est-il à présent ?"
Un bêlement de la brebis le trahit.
"Avance, on demande de toi."
Il entre avec la brebis, intimidé d'être le plus remarqué.
"C'est toi ?" dit Joseph qui le reconnaît. Et Marie lui sourit en disant : "Tu es bon."
Ils traient la brebis, et trempant l'extrémité d'un linge dans le lait chaud et écumeux, Marie baigne les lèvres du Petit qui suce cette douceur crémeuse. Ils sourient tous, et plus encore lorsque avec le coin de la toile encore entre les lèvres, Jésus s'endort dans la tiédeur de la laine.
"Mais vous ne pouvez rester ici. Il fait froid et humide. Et puis... avec cette odeur d'animaux ! Ça ne va pas... et ça ne va pas pour le Sauveur."
185> "Je le sais" dit Marie avec un grand soupir. "Mais il n'y a pas de place pour nous à Bethléem."
"Prends courage, ô Femme. Nous allons te chercher une maison."
"Je vais en parler à ma patronne, dit l'homme au lait, Élie. Elle est bonne. Elle vous accueillera, dut-elle vous céder sa pièce. Dès qu'il va faire jour, je lui en parle. Elle a sa maison toute pleine, mais elle vous donnera une place."
"Pour le Petit au moins. Moi et Joseph, n'importe si nous restons encore par terre. Mais pour le Petit..."
"Ne soupire pas, Femme, j'y pense. Je raconterai à beaucoup de gens ce qui nous a été dit. Vous ne manquerez de rien. Pour le moment, prenez ce que notre pauvreté peut vous donner. Nous sommes des bergers..."
"Nous sommes pauvres, nous aussi" dit Joseph. "Et ne pouvons vous dédommager."
"Oh ! nous ne voulons pas ! Même si vous le pouviez nous ne le voudrions pas ! Le Seigneur nous a déjà récompensés. La paix, il l'a promise à tout le monde. Les anges disaient : "Paix aux hommes de bonne volonté". Mais à nous, il l'a déjà donnée car l'ange a dit que cet Enfant, c'est le Sauveur, le Christ, le Seigneur. Nous sommes pauvres et ignorants, mais nous savons que les Prophètes disent que le Sauveur sera le Prince de la Paix et à nous il a dit d'aller l'adorer. Ainsi il nous a donné sa paix. Gloire à Dieu au plus haut des Cieux et gloire à celui qui est son Christ ! Et toi, sois bénie, Femme qui l'a engendré ! Tu es Sainte puisque tu as mérité de le porter ! Commande-nous, comme une Reine, car nous serons contents de te servir. Que pouvons-nous faire pour toi ?"
"Aimer mon Fils, et avoir toujours dans le cœur vos pensées de maintenant."
"Mais pour toi, tu ne désires rien ? Tu n'as pas de parents à qui faire savoir que ton Fils est né ?"
"Oui, j'en aurais. Mais ils ne sont pas près d'ici. Ils sont à Hébron..."
"J'y vais moi" dit Élie. "Qui sont-ils ?"
"Zacharie, le prêtre, et Élisabeth ma cousine."
"Zacharie, oh ! Je le connais bien. En été je vais sur ces montagnes où il y a de riches et beaux pâturages et je suis l'ami de son berger. Quand je vais te savoir arrangée, je vais chez Zacharie."
"Merci, Élie."
186> "De rien. C'est grand honneur pour moi, pauvre berger, d'aller parler au prêtre et de lui dire : "Le Sauveur est né"."
"Non. Tu lui diras : "Marie de Nazareth, ta cousine, a dit que Jésus est né, et de venir à Bethléem "
"C'est ainsi que je dirai."
"Dieu t'en récompense, je me souviendrai de toi, de vous tous..."
"Tu parleras à ton Enfant de nous ?"
"Oui."
"Je suis Élie."
"Moi Lévi."
"Moi Samuel."
"Moi Jonas."
"Moi Isaac."
"Moi Tobie."
"Moi Jonathas."
"Et moi Daniel."
"Et Siméon, moi."
"Et moi, mon nom est Jean."
"Moi je m'appelle Joseph et mon frère Benjamin, nous sommes jumeaux."
"Je me rappellerai vos noms."
"Il nous faut partir... Mais nous reviendrons... Et nous t'en amènerons d'autres pour adorer ! ..."
"Comment revenir au parc en laissant ce Petit ?"
"Gloire à Dieu qui nous l'a montré !"
"Fais-nous baiser son habit" dit Lévi avec un sourire d'ange.
Marie lève doucement Jésus et, assise sur le foin, présente aux baisers, les pieds minuscules, enveloppés d'un linge. Ceux qui ont de la barbe se l'essuient d'abord. Tous, presque, pleurent et quand ils doivent partir, ils sortent à reculons, laissant leur cœur près de la crèche...
La vision se termine ainsi pour moi : Marie assise sur la paille avec l'Enfant sur son sein et Joseph qui accoudé au bord de la crèche, regarde et adore.
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
carine a écrit:@jacques58fan
Bonsoir Jacques,
Etes-vous sûr, en cherchant sur le net et voulant privilégier des librairies chrétiennes, j'ai trouvé deux sites, celui de la procure :
http://www.laprocure.com/evangile-tel-ete-revele-maria-valtorta/9788879870603.html
ou celui des Editions Parvis :
http://www.parvis.ch/fr/tags-generaux/maria-valtorta?page=2
qui tous deux semblent les avoir. Il y a certainement des librairies chrétiennes auprès desquelles on doit pouvoir les commander
et en attendant, pour patienter sur le net, toute l'oeuvre :
http://www.maria-valtorta.org/
@Phiphi
"n'envie pas la gloire du monde toi qui es déjà dans celle de la résurrection"
jolie phrase !
Merci pour ces liens et ces livres!
jacques58fan- Combat l'antechrist
- Messages : 2263
Inscription : 22/01/2016
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Ch Ed écrit: Marie lève doucement Jésus et, assise sur le foin, présente aux baisers, les pieds minuscules, enveloppés d'un linge. Ceux qui ont de la barbe se l'essuient d'abord. Tous, presque, pleurent et quand ils doivent partir, ils sortent à reculons, laissant leur cœur près de la crèche...
C'est un véritable ravissement.
C'est un véritable ravissement.
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
- Messages : 451
Localisation : Velay
Inscription : 03/06/2014
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Charles-Edouard a écrit:L’adoration des bergers.
Tome 1, chapitre 49.
Adoration des bergers (Jean-Honoré Fragonard)
177> J'écris en présence de mon Jésus-Maître. Pour moi, tout pour moi. Revenu pour moi, depuis tant de temps, tout pour moi. Vous direz : "Mais, comment ? Cela fait presque un mois que tu reviens à entendre et à voir, et tu dis que tu l'as enfin après si longtemps ?" Je réponds encore une fois ce que, de vive voix et par écrit, j'ai dit plusieurs fois.
C’est autre chose que de voir et autre chose que d'entendre et surtout autre chose, de voir et entendre pour les autres ou de voir et entendre tout pour moi, exclusivement pour moi. Dans le premier cas je suis une spectatrice, une répétitrice de ce que je vois et entends, mais si cela me donne la joie car ce sont toujours des choses qui vous causent une grande joie, il est vrai aussi que c'est une joie qui est extérieure. Les mots disent mal ce que je ressens si bien. Mais, je ne sais mieux m'exprimer. En somme, je veux dire que ma joie ressemble à celle de quelqu'un qui lit un beau livre ou voit une belle scène. Il en est ému, la goûte, en admire l'harmonie, il pense : "Quelle belle chose ce serait d'être à la place de cette personne !" Tandis que dans le second cas, quand l'audition et la vision est pour moi, alors "cette personne" c'est moi. Elle est pour moi la parole que j'entends, pour moi la figure que je vois.
178> C'est moi et Lui. Moi et Marie. Moi et Jean. Vivants, vrais, réels, tout proche. Non pas en face de moi comme si je voyais passer un film, mais à côté de mon lit, se déplaçant dans la chambre ou s'appuyant aux meubles, ou assis, ou debout comme des personnes vivantes, mes hôtes; ce qui est bien différent d'une vision pour tout le monde. En somme tout cela est "pour moi."
Et aujourd'hui, et même hier depuis l'après-midi, Jésus est ici, avec son vêtement ordinaire de laine blanche, d'un blanc qui tire sur l'ivoire, si différent par sa pesanteur et sa teinte du vêtement éclatant qui semble d'un lin immatériel, si blanc qu'on dirait qu'il est fait de fils de lumière, qui le couvre dans le Ciel. Il est ici avec ses mains belles et longues et effilées, d'un blanc de vieil ivoire, avec son beau visage allongé et pâle où resplendissent ses yeux dominateurs et doux de saphir sombre entre les cils épais d'un châtain étincelant de blond roux. Il est ici avec ses beaux cheveux longs blonds et souples, d'un blond roux plus vif dans les parties éclairées et plus sombre dans le fond des plis. Il est ici ! Il est ici ! Il me sourit et me regarde écrire de Lui. Comme il faisait à Viareggio... et comme il ne faisait plus depuis la Semaine Sainte... me donnant toute cette désolation qui devenait fièvre et presque désespérance quand, à la douleur qui me venait d'être privée de Lui, s'ajoutait encore celle d'être privée de vivre là au moins où je l'avais vu et pouvais dire : "Là, il s'est appuyé. Là, il s'est assis. Là il s'est penché pour mettre sa main sur ma tête" et là où étaient morts les miens. Oh ! qui ne l'a pas éprouvé ne peut comprendre ! Non, il n'y a pas de raison de prétendre de jouir de toutes ces faveurs. Nous savons bien que ce sont des grâces gratuites, que nous ne méritons pas et nous ne pouvons prétendre qu'elles durent quand elles nous sont accordées. Nous le savons bien. Et plus elles nous sont données, et plus nous nous anéantissons dans l'humilité en reconnaissant notre répugnante misère en face de l'Infinie Beauté et de la Divine Richesse qui se donne à nous.
Mais que dites-vous, Père ? Un fils ne désire-t-il pas voir son père et sa mère ? Une femme voir son mari ? Et quand la mort ou une longue absence les prive de leur vue, ne trouvent-ils pas un réconfort dans le fait de vivre là où ils ont vécu ? S'ils doivent quitter ce lieu, ne souffrent-ils pas doublement, parce qu'ils ont perdu aussi le lieu où l'absent partagea leur amour ? Peut-on leur reprocher de souffrir de cette douleur ? Non. Et pour moi ? Jésus n'est-il pas mon Père et mon Époux ? Plus cher; beaucoup plus cher qu'un père ou un époux ? Et qu'il me soit tel, jugez d'après la façon dont j'ai supporté la mort de ma mère. J'ai souffert, savez-vous ? Je pleure encore car je l'aimais malgré son caractère. Mais vous avez vu comment j'ai franchi cette passe. Jésus était là. Et il m'était plus cher que maman. Dois-je Le dire. J'ai souffert, et je souffre davantage maintenant de la mort de maman qui remonte à huit mois que je n'ai souffert alors. C'est que dans ces deux derniers mois, j'étais sans Jésus pour moi et sans Marie pour moi et même maintenant, il suffit qu'ils me laissent un moment pour que je ressente plus que jamais ma désolation d'orpheline malade et je sois replongée dans l'humaine et amère douleur de ces jours inhumains.
J'écris sous les yeux de Jésus et donc je n'exagère pas et je ne déforme rien. Ce n'est pas ma manière, d'ailleurs, mais même si j'étais ainsi, il me serait impossible de rester sous ce regard. J'ai écrit ceci, en cet endroit où je n'ai pas l'habitude de le faire, car pour les visions de Marie, je ne les interromps pas par la manifestation de mon pauvre moi.
179> Je sais déjà que je dois continuer à manifester ses gloires. Sa Maternité, à tous les instants, n'a-t-elle pas été une couronne de gloire ? Je suis très malade et il me coûte beaucoup d'écrire. Je suis une loque. Mais quand il s'agit de la faire connaître pour qu'Elle soit davantage aimée, je ne calcule pas. Les épaules me font mal ? Le cœur cède ? Ma tête souffre ? La fièvre monte ? N'importe ! Que Marie soit connue toute beauté et tendresse, comme je la vois, par la bonté de Dieu et la sienne, et cela me suffit.
Plus tard je vois une vaste étendue de campagne. La lune est au zénith et elle cingle tranquille dans un ciel tout constellé. Les étoiles paraissent des clous de diamant enfoncés dans un immense baldaquin de velours bleu foncé. Et la lune rie au milieu avec sa figure toute blanche d'où descendent des fleuves de lumière laiteuse qui donnent une teinte blanche au paysage. Les arbres dépouillés de leur feuillage se détachent plus grands et sombres sur cette blancheur, pendant que les murets qui surgissent çà et là ressemblent à du lait caillé. Une maisonnette, dans le lointain, semble être un bloc de marbre de Carrare.
Sur ma droite, je vois une sorte de hangar qui est construit partie en maçonnerie, partie en bois. De là, sort de temps en temps un bêlement intermittent et bref. Ce doit être des brebis qui rêvent ou qui croient l'aube proche à cause du clair de lune. C'est une clarté, excessive même, tant elle est intense, et qui s'accroît comme si l'astre s'approchait de la terre ou étincelait par suite d'un mystérieux incendie.
Un berger s'avance sur le seuil. Il lève le bras à hauteur du front pour ménager ses yeux et regarde en l'air. Il semble impossible qu'on doive s'abriter de la clarté de la lune, mais elle est si vive qu'elle éblouit, en particulier celui qui sort d'un enclos, d'ordinaire ténébreux. Tout est calme, mais cette clarté est étonnante. Le berger appelle ses compagnons. Ils vont tous à la porte. Un tas d'hommes hirsutes, de tous âges. Il y a des adolescents et d'autres qui déjà blanchissent. Ils commentent le fait étrange et les plus jeunes ont peur, spécialement un garçon d'une douzaine d'années qui se met à pleurer, s'attirant les moqueries des plus vieux.
180> "De quoi as-tu peur, sot que tu es ?" lui dit le plus vieux[1]. "Tu ne vois pas que l'air est tranquille ? Tu n'as jamais vu un clair de lune ? Es-tu toujours resté sous la robe de la maman comme un poussin sous la poule couveuse ? Mais, tu en verras des choses ! Une fois j'étais allé vers les monts du Liban, plus loin encore. Je montais. J'étais jeune et la marche ne me fatiguait pas. J'étais riche aussi à cette époque... Une nuit, je vis une lumière telle que je pensai qu'Élie allait revenir avec son char de feu. Le ciel était tout embrasé. Un vieux - le vieux c'était lui - me dit : "Un grand événement va bientôt se produire dans le monde. Et pour nous ce fut un événement : l'arrivée des soldats de Rome. Oh ! tu en verras si tu vis..."
Mais le pastoureau ne l'écoute plus. Il semble n'avoir plus peur. En effet, il quitte le seuil et s'esquive de derrière les épaules d'un berger musclé derrière lequel il s'était réfugié et sort dans le parc qui se trouve devant le hangar. Il regarde en l'air et marche comme un somnambule ou comme s'il était hypnotisé par quelque chose qui le captive totalement. À un moment il crie : "Oh !" et reste comme pétrifié, les bras légèrement ouverts. Les autres se regardent, étonnés.
"Mais qu'a donc ce sot ?" dit quelqu'un.
"Demain je le ramène à sa mère. Je ne veux pas d'un fou pour garder les brebis" dit un autre.
Et le vieux qui a parlé précédemment dit alors : "Allons voir avant de juger. Appelez aussi les autres qui dorment et prenez des bâtons. Il y a peut-être une mauvaise bête ou des malandrins..."
Ils rentrent, ils appellent les autres bergers et sortent avec des torches et des matraques. Ils rejoignent l'enfant.
"Là, là" murmure-t-il en souriant. "Au-dessus de l'arbre regardez cette lumière qui arrive. On dirait qu'elle s'avance sur un rayon de lune. La voilà qui approche. Comme elle est belle !"
"Moi, je ne vois qu'une clarté un peu vive."
"Moi aussi."
"Moi aussi" disent les autres.
"Non. Je vois quelque chose qui ressemble à un corps" dit un autre en qui je reconnais le berger qui a donné le lait à Marie.
"C'est un... c'est un ange !" crie l'enfant. "Le voilà qui descend et s'approche... Par terre ! À genoux devant l'Ange de Dieu !"
181> Un "oh !" prolongé et respectueux s'élève du groupe des bergers qui tombent le visage contre terre et paraissent d'autant plus frappés par l'apparition qu'ils sont plus âgés. Les plus jeunes sont à genoux et regardent l'ange qui s'approche toujours plus, et s'arrête en l'air déployant ses grandes ailes, blancheur de perles dans la blancheur lunaire qui l'enveloppe, au-dessus du mur d'enceinte.
"Ne craignez pas, je ne vous porte pas malheur. Je vous apporte la nouvelle d'une grande joie pour le peuple d'Israël et pour tous les peuples de la terre." La voix angélique, c'est une harpe harmonieuse qui accompagne des voix de rossignols.
"Aujourd'hui, dans la cité de David, est né le Sauveur." À ces mots, l'ange ouvre plus grandes ses ailes et les agite comme par un tressaillement de joie et une pluie d'étincelles d'or et de pierres précieuses paraît s'en échapper. Un véritable arc-en-ciel qui dessine un arc de triomphe au-dessus du pauvre parc.
"...le Sauveur qui est le Christ." L'ange brille d'une lumière plus éclatante. Ses deux ailes, maintenant arrêtées et tendues vers le ciel semblent deux voiles immobiles sur le saphir de la mer, deux flammes qui montent ardentes.
"...Christ, le Seigneur !" L'ange replie ses ailes de lumière et s'en couvre comme d'un survêtement de diamant sur un habit de perles, il s'incline comme pour adorer avec les bras serrés sur le cœur et le visage qui disparaît, incliné comme il est sur la poitrine, dans l'ombre du haut des ailes repliées. On ne voit plus qu'une forme allongée et lumineuse, immobile pendant la durée d'un Gloria.
Mais voici qu'il bouge. Il rouvre les ailes et lève son visage où la lumière s'épanouit en un sourire paradisiaque et il dit : "Vous le reconnaîtrez à ces signes : dans une pauvre étable, derrière Bethléem, vous trouverez un bébé enveloppé dans des langes couché dans une mangeoire d'animaux, parce que pour le Messie, il n'y a pas eu de toit dans la cité de David." En disant cela, l'ange devient grave, même triste.
Mais des Cieux arrive une foule – oh ! quelle foule ! - une foule d'anges qui lui ressemblent, une échelle d'anges qui descendent dans l'allégresse, éclipsent la lune par leur lumière paradisiaque. Ils se rassemblent autour de l'ange annonciateur, en agitant leurs ailes, en répandant des parfums, en une harmonie musicale où toutes les voix les plus belles de la création se retrouvent, mais portées à la perfection de leur sonorité.
182> Si la peinture est l'effort de la matière pour devenir lumière, ici la mélodie est l'effort de la musique pour exprimer aux hommes la beauté de Dieu, et entendre cette mélodie c'est connaître le Paradis, où tout est harmonie de l'amour qui de Dieu se donne, se répandant pour réjouir les bienheureux et retourner de ceux-ci à Dieu et Lui dire : "Nous t'aimons !"
Le "Gloria" angélique se répand en ondes de plus en plus étendues sur la campagne tranquille, ainsi que la lumière. Les oiseaux unissent leurs chants pour saluer cette lumière précoce et les brebis leurs bêlements pour ce soleil anticipé, comme si les animaux qui saluaient leur Créateur, venu au milieu d'eux pour les aimer comme Homme et en plus comme Dieu.
Le chant décroît, et la lumière aussi pendant que les anges remontent aux Cieux... Les bergers reviennent à eux-mêmes.
"As-tu entendu ?"
"Allons-nous voir ?"
"Et les animaux ?"
"Oh ! il ne leur arrivera rien. Allons pour obéir à la parole de Dieu"
"Mais, où aller ?"
"N'a-t-il pas dit qu'il était né aujourd'hui et qu'il n'avait pas trouvé de logement à Bethléem ?" Et le berger qui a donné le lait c'est lui qui parle maintenant. "Venez, je sais. J'ai vu la femme et elle m'a fait de la peine. Je lui ai indiqué un endroit pour elle, parce que je pensais bien qu'elle ne trouverait pas de logement, et à l'homme je lui ai donné du lait pour elle. Elle est si jeune et si belle. Elle doit être bonne comme l'ange qui nous a parlé. Venez, venez. Allons prendre du lait, des fromages, des agneaux et des peaux tannées de brebis. Ils doivent être très pauvres et... qui sait quel froid pour Celui que je n'ose nommer ! Et penser que j'ai parlé à la Mère comme à une pauvre épouse ! ..."
Ils vont au hangar et en sortent, peu après, portant qui des récipients de lait, qui des fromages ronds enveloppés dans des filets de sparterie, qui des paniers avec un agneau bêlant, qui des peaux de brebis apprêtées.
"Moi je porte une brebis qui a eu un agneau il y a un mois. Son lait est excellent. Il pourra leur être utile si la femme en manque. Elle me semblait une bambine, et si pâle ! ... Un teint de jasmin, au clair de lune" dit le berger du lait. Et il les conduit.
183> Ils s'en vont, éclairés par la lune et des torches, après avoir fermé le hangar et l'enceinte. Ils vont par les sentiers champêtres, à travers des haies de ronces dépouillées par l'hiver. Ils font le tour de Bethléem et arrivent à l'étable non par le chemin qu'avait suivi Marie, mais en sens contraire. Ainsi ils ne passent pas devant les grottes mieux aménagées mais trouvent immédiatement le refuge qu'ils cherchent. Ils s'approchent.
"Entre !"
"Moi, je n'ose pas."
"Entre, toi."
"Non."
"Regarde au moins."
"Toi, Lévi qui as vu l'ange le premier, cela veut dire que tu es plus bon que nous, regarde." Vraiment ils l'avaient d'abord traité de fou... mais maintenant il leur est utile que le gamin ose ce qu'eux n'osent pas.
L'enfant hésite mais se décide ensuite. Il s'approche du refuge, écarte un peu le manteau... et s'arrête en extase.
"Que vois-tu ?" lui demandent-ils anxieux à voix basse.
"Je vois une femme toute jeune et belle et un homme penché sur une mangeoire et j'entends... j'entends un bébé qui pleure et la femme lui dit d'une voix... oh ! quelle voix !"
"Que dit-elle ?"
"Elle dit : "Jésus, mon tout petit ! Jésus, amour de ta Maman ! Ne pleure pas, mon petit Enfant !" Elle dit : "Oh ! si je pouvais te dire : 'Prends le lait, mon tout petit ! ' Mais je ne l'ai pas encore ! " Elle dit : "Tu as si froid, mon amour ! Le foin te pique. Quelle douleur pour ta Maman de t'entendre pleurer ainsi ! Sans pouvoir te soulager". Elle dit : "Dors, ma petite âme ! Mon cœur se fend de t'entendre et de voir tes larmes". Elle l'embrasse et réchauffe ses petits pieds avec ses mains. Elle est penchée abaissant ses mains sur la mangeoire.
"Appelle ! Montre que tu es là !"
"Moi non. Vous plutôt qui nous avez conduit et la connaissez."
Le berger ouvre la bouche et se borne à un soupir bruyant.
Joseph se retourne et vient à la porte. "Qui êtes-vous ?"
"Des bergers. Nous vous apportons de la nourriture et de la laine. Nous venons adorer le Sauveur."
"Entrez."
Ils entrent dans l'étable qui s'éclaire à la lumière des torches. Les vieux poussent les jeunes devant eux.
184> Marie se retourne et sourit : "Venez" dit-elle. "Venez !" et elle les invite de la main et par son sourire et elle prend le garçon qui a vu l'ange et l'attire à elle, tout près de la crèche. Et l'enfant regarde, radieux.
Les autres, invités aussi par Joseph, s'avancent avec leurs cadeaux, et avec des paroles brèves, émues, les déposent aux pieds de Marie. Ils regardent le petit Bébé qui pleure doucement et ils sourient, émus et heureux.
L'un d'eux plus hardi dit : "Prends, Mère, elle est soyeuse et propre. Je l'avais préparée pour le bambin qui va bientôt naître chez nous, mais je te la donne. Mets ton Fils dans cette laine, elle sera douce et chaude." Et il offre une peau de brebis, une très belle peau avec une longue toison de laine toute blanche [2].
Marie soulève Jésus et l'en enveloppe. Elle le montre aux bergers qui, à genoux sur la litière du sol, le regardent extasiés.
Ils se font plus hardis et l'un d'eux propose : "Il faudrait Lui donner une gorgée de lait ou mieux de l'eau et du miel. Mais nous n'avons pas de miel. On en donne aux tout petits. J'ai sept enfants, je suis au courant... "
"Voilà du lait. Prends, Femme. "
"Mais il est froid. Il faut du chaud. Où est Élie ? C'est lui qui a la brebis."
Élie doit être l'homme au lait, mais il n'est pas là. Il s'est arrêté dehors et regarde par une fente et il est perdu dans l'obscurité de la nuit.
"Qui vous a amenés ici ?"
"Un ange nous a dit de venir et Élie nous a conduits. Mais où est-il à présent ?"
Un bêlement de la brebis le trahit.
"Avance, on demande de toi."
Il entre avec la brebis, intimidé d'être le plus remarqué.
"C'est toi ?" dit Joseph qui le reconnaît. Et Marie lui sourit en disant : "Tu es bon."
Ils traient la brebis, et trempant l'extrémité d'un linge dans le lait chaud et écumeux, Marie baigne les lèvres du Petit qui suce cette douceur crémeuse. Ils sourient tous, et plus encore lorsque avec le coin de la toile encore entre les lèvres, Jésus s'endort dans la tiédeur de la laine.
"Mais vous ne pouvez rester ici. Il fait froid et humide. Et puis... avec cette odeur d'animaux ! Ça ne va pas... et ça ne va pas pour le Sauveur."
185> "Je le sais" dit Marie avec un grand soupir. "Mais il n'y a pas de place pour nous à Bethléem."
"Prends courage, ô Femme. Nous allons te chercher une maison."
"Je vais en parler à ma patronne, dit l'homme au lait, Élie. Elle est bonne. Elle vous accueillera, dut-elle vous céder sa pièce. Dès qu'il va faire jour, je lui en parle. Elle a sa maison toute pleine, mais elle vous donnera une place."
"Pour le Petit au moins. Moi et Joseph, n'importe si nous restons encore par terre. Mais pour le Petit..."
"Ne soupire pas, Femme, j'y pense. Je raconterai à beaucoup de gens ce qui nous a été dit. Vous ne manquerez de rien. Pour le moment, prenez ce que notre pauvreté peut vous donner. Nous sommes des bergers..."
"Nous sommes pauvres, nous aussi" dit Joseph. "Et ne pouvons vous dédommager."
"Oh ! nous ne voulons pas ! Même si vous le pouviez nous ne le voudrions pas ! Le Seigneur nous a déjà récompensés. La paix, il l'a promise à tout le monde. Les anges disaient : "Paix aux hommes de bonne volonté". Mais à nous, il l'a déjà donnée car l'ange a dit que cet Enfant, c'est le Sauveur, le Christ, le Seigneur. Nous sommes pauvres et ignorants, mais nous savons que les Prophètes disent que le Sauveur sera le Prince de la Paix et à nous il a dit d'aller l'adorer. Ainsi il nous a donné sa paix. Gloire à Dieu au plus haut des Cieux et gloire à celui qui est son Christ ! Et toi, sois bénie, Femme qui l'a engendré ! Tu es Sainte puisque tu as mérité de le porter ! Commande-nous, comme une Reine, car nous serons contents de te servir. Que pouvons-nous faire pour toi ?"
"Aimer mon Fils, et avoir toujours dans le cœur vos pensées de maintenant."
"Mais pour toi, tu ne désires rien ? Tu n'as pas de parents à qui faire savoir que ton Fils est né ?"
"Oui, j'en aurais. Mais ils ne sont pas près d'ici. Ils sont à Hébron..."
"J'y vais moi" dit Élie. "Qui sont-ils ?"
"Zacharie, le prêtre, et Élisabeth ma cousine."
"Zacharie, oh ! Je le connais bien. En été je vais sur ces montagnes où il y a de riches et beaux pâturages et je suis l'ami de son berger. Quand je vais te savoir arrangée, je vais chez Zacharie."
"Merci, Élie."
186> "De rien. C'est grand honneur pour moi, pauvre berger, d'aller parler au prêtre et de lui dire : "Le Sauveur est né"."
"Non. Tu lui diras : "Marie de Nazareth, ta cousine, a dit que Jésus est né, et de venir à Bethléem "
"C'est ainsi que je dirai."
"Dieu t'en récompense, je me souviendrai de toi, de vous tous..."
"Tu parleras à ton Enfant de nous ?"
"Oui."
"Je suis Élie."
"Moi Lévi."
"Moi Samuel."
"Moi Jonas."
"Moi Isaac."
"Moi Tobie."
"Moi Jonathas."
"Et moi Daniel."
"Et Siméon, moi."
"Et moi, mon nom est Jean."
"Moi je m'appelle Joseph et mon frère Benjamin, nous sommes jumeaux."
"Je me rappellerai vos noms."
"Il nous faut partir... Mais nous reviendrons... Et nous t'en amènerons d'autres pour adorer ! ..."
"Comment revenir au parc en laissant ce Petit ?"
"Gloire à Dieu qui nous l'a montré !"
"Fais-nous baiser son habit" dit Lévi avec un sourire d'ange.
Marie lève doucement Jésus et, assise sur le foin, présente aux baisers, les pieds minuscules, enveloppés d'un linge. Ceux qui ont de la barbe se l'essuient d'abord. Tous, presque, pleurent et quand ils doivent partir, ils sortent à reculons, laissant leur cœur près de la crèche...
La vision se termine ainsi pour moi : Marie assise sur la paille avec l'Enfant sur son sein et Joseph qui accoudé au bord de la crèche, regarde et adore.
Quelle écriture, mon Dieu ! On croirait y être !
Isabelle-Marie- CONSEILLER DU PEUPLE DE LA PAIX
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Merci.MM Valtorta parle-t-elle de l'Apocalypse?
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
jacques58fan a écrit:Merci.MM Valtorta parle-t-elle de l'Apocalypse?
Je ne sais pas.
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
1.51.
Visite de Zacharie
Vision du jeudi 8 juin 1944
188> Je vois une longue pièce où j'ai vu la rencontre des Mages avec Jésus et leur adoration. Je comprends que je suis dans la maison hospitalière où a été accueillie la Sainte Famille. Et j'assiste à l'arrivée de Zacharie.
Élisabeth ne l'accompagne pas. La propriétaire de la maison court dehors à la rencontre de l'hôte qui arrive. Elle le conduit près d'une porte basse et frappe, puis se retire discrètement.
Joseph ouvre et pousse une exclamation de joie en voyant Zacharie. Il le fait entrer dans la petite pièce, étroite comme un corridor : "Marie donne le sein au Petit. Attends un peu, assieds-toi, car tu dois être fatigué." Il offre une place à l'hôte sur le lit et s'assied à côté de lui.
J'entends Joseph qui lui demande des nouvelles du petit Jean et Zacharie répond : "Il pousse vigoureusement comme un petit poulain. Mais maintenant il souffre un peu des dents. À cause de cela nous n'avons pas voulu l'apporter. Il fait très froid, aussi Élisabeth n'est pas venue non plus. Elle ne pouvait le laisser sans lait. Elle en est désolée, mais la saison est tellement rigoureuse !"
"En effet le temps est très froid" répond Joseph.
"L'homme que vous m'avez envoyé m'a dit que vous n'aviez pas de maison au moment de la naissance. Qui sait à quel point vous avez dû souffrir."
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189> "Oui, beaucoup vraiment. Mais nous avons eu plus de peur que de mal. Nous avions peur que cela fît tort au Bébé. Les premiers jours, nous avons dû rester sur place. Nous ne manquions de rien, pour nous, parce que les bergers portèrent la bonne nouvelle aux Bethléemites et que beaucoup nous apportèrent des cadeaux. Mais il nous manquait une maison, une chambre en bon état, un lit... et Jésus pleurait tellement, la nuit surtout, à cause du vent qui entrait de tous côtés. Je faisais un peu de feu, très peu parce que la fumée faisait tousser l'Enfant... et le froid restait. Deux animaux chauffaient trop peu surtout du côté où l'air s'engouffre. Nous n'avions pas d'eau chaude pour le laver, ni de linge sec pour le changer. Oh ! Il a beaucoup souffert ! Et Marie souffrait de le voir souffrir. Je souffrais moi aussi... tu peux penser quelle souffrance c'était pour elle qui était sa Mère. Elle Lui donnait son lait et ses larmes, son lait et son amour ...Maintenant ici, ça va mieux. J'avais préparé un berceau si commode et Marie y avait mis un matelas douillet. Mais il est à Nazareth ! Ah ! s'il était né là-bas, ç'aurait été bien différent !"
"Mais le Christ devait naître à Bethléem. Les Prophètes l'avaient annoncé."
Marie entre, les ayant entendus parler. Elle est toute vêtue de laine blanche. Elle a quitté l'habit foncé qu'elle avait pour le voyage et dans la grotte. Elle a un vêtement tout blanc comme je l'ai déjà vue d'autres fois. Elle n'a rien sur la tête et porte entre ses bras Jésus endormi, rassasié de lait, dans ses langes blancs.
Zacharie se lève respectueusement et s'incline avec vénération. Puis il s'approche et regarde Jésus avec les marques du plus grand respect. Il est penché, pas tant pour le voir mieux, que pour Lui rendre hommage. Marie le lui présente et Zacharie le prend avec de telles marques d'adoration, qu'il semble porter un ostensoir. C'est réellement, l'Hostie qu'il porte en ses bras, l'Hostie déjà offerte et dont le sacrifice sera consommé lorsqu'elle aura été donnée aux hommes, comme nourriture d'amour et de rédemption.
Zacharie rend Jésus à Marie. Ils s'assoient tous et Zacharie redit à Marie le motif pour lequel Élisabeth n'a pas pu venir et la peine qu'elle en a éprouvée. "Elle avait préparé, ces derniers mois, du linge pour ton Enfant béni. Je te l'ai apporté, il est sur le char, en bas."
Il se lève, sort et revient avec un gros paquet et un autre plus petit. Du gros paquet dont Joseph le débarrasse tout de suite, et de l'autre il tire ses cadeaux : une moelleuse couverture de laine tissée à la main, du linge et des petits vêtements.
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190> Du second paquet il tire du miel, de la farine très blanche, du beurre et des pommes pour Marie, des galettes pétries et cuites par Élisabeth et tant d'autres choses qui disent l'affection maternelle de la reconnaissante cousine pour la jeune Mère.
"Tu diras à Élisabeth que je lui suis bien reconnaissante et à toi aussi, je suis reconnaissante. J'aurais eu tant de joie à la voir, mais je comprends ses raisons. Et aussi j'aurais bien voulu revoir le petit Jean..."
"Mais vous le verrez au printemps. Nous viendrons vous voir."
"Nazareth est trop loin" dit Joseph.
"Nazareth ? Mais vous devez rester ici. Le Messie doit grandir à Bethléem. C'est la Cité de David. Le Très-Haut l'a amené par l'intermédiaire de la volonté de César à naître dans la terre de David, la terre sainte de la Judée. Pourquoi le porter à Nazareth ? Vous savez comment chez les Juifs on juge les Nazaréens. Demain, cet Enfant devra être le Sauveur de son peuple. Il ne faut pas que la capitale méprise son Roi parce qu'il vient d'une région qu'elle méprise. Vous savez comme moi combien le Sanhédrin est susceptible et combien méprisantes les trois principales castes [1]... Et puis, ici près de moi, je pourrai vous aider quelque peu et mettre tout ce que j'ai, non seulement de biens matériels, mais de qualités morales au service de ce Nouveau-Né. Et quand il sera en âge de comprendre, je serai heureux de Lui servir de maître comme à mon enfant, pour obtenir que, devenu grand, il me bénisse. Nous devons penser à la grandeur de son destin et que pour ce motif il doit pouvoir se présenter au monde avec toutes les cartes pour gagner facilement sa partie. Lui, bien sûr, possédera la Sagesse, mais aussi le seul fait qu'un prêtre Lui ait servi de maître le fera accepter plus facilement par les pharisiens exigeants et les scribes. Cela facilitera sa mission."
Marie regarde Joseph et Joseph regarde Marie. Par-dessus la tête innocente du Bébé, qui dort, rose et ignorant, s'engage un muet échange de questions. Et ces questions sont empreintes de tristesse. Marie pense à sa petite maison. Joseph pense à son travail. Ici tout est à refaire dans un endroit où il y a quelques jours, ils étaient des inconnus. Ici, il n'y à rien des chers objets restés là-bas et préparés avec tant d'amour pour le Petit.
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191> Et Marie le dit : "Mais comment faire ? Là-bas, nous avons tout laissé. Joseph avait tant travaillé pour mon Jésus sans épargner la fatigue et l'argent. Il avait travaillé de nuit pour pouvoir travailler le jour pour les autres, et gagner ainsi de quoi acheter les bois les plus beaux, la laine la plus fine, le lin le plus blanc afin de préparer tout pour Jésus. Il avait construit des ruches et avait fait des travaux de maçonnerie pour donner une autre organisation à la maison, afin que le berceau pût être dans ma pièce et y rester jusqu'à ce que Jésus ait grandi et pouvoir donner une place au lit, puisque Jésus restera avec moi jusqu'au jour où il ne sera plus un jeune garçon."
"Joseph peut y aller et prendre ce que vous avez laissé."
"Et où le mettre ? Tu sais, Zacharie, que nous sommes pauvres. Nous n'avons que le travail et la maison. L'une et l'autre nous donnent de quoi aller de l'avant sans avoir faim. Ici, du travail nous en trouverons... peut-être. Mais il nous faudra toujours penser à une maison. Cette brave femme ne peut nous donner toujours l'hospitalité. Et moi, je ne puis imposer à Joseph des sacrifices au-delà de ceux qu'il consent déjà à faire pour moi."
"Oh ! moi ! Pour moi ce n'est rien. Je pense à la douleur de Marie, moi. A la peine de ne pas vivre dans sa maison..."
Marie a deux grosses larmes dans les yeux.
"Je pense que cette maison doit lui être bien chère, comme le Paradis pour le prodige qui s'y est accompli... Je parle peu, mais je comprends tellement ! Si ce n'était que pour cela, je ne me tourmenterais pas. Je ferai double travail, c'est tout. Je suis fort et jeune pour travailler le double de ce que je faisais et pourvoir à tout. Et si Marie ne souffre pas trop... et si tu dis qu'il est bien d'agir ainsi... pour moi... me voilà. Je fais ce qui vous paraît le plus juste. Il suffit que cela soit utile pour Jésus."
"Et ce sera utile, sûrement. Pensez-y et vous en verrez les raisons."
"On dit aussi que le Messie sera appelé Nazaréen..." [2] objecte Marie.
"C'est vrai, mais au moins, tant qu'il n'est pas adulte, faites-le grandir en Judée. Le Prophète a dit : "Et toi, Bethléem Ephrata, tu seras la plus grande, car de toi sortira le Sauveur" [3]. Il ne parle pas de Nazareth. Peut-être cette appellation Lui sera donnée pour je ne sais quelle raison. Mais sa terre, est celle-ci."
"Tu le dis prêtre, et nous... et nous... avec douleur nous t'écoutons... et te donnons raison. Mais quelle douleur !... Quand verrai-je cette maison où je suis devenue Mère ?" Marie pleure, doucement. Et je le comprends son chagrin. Ah ! si je le comprends !
http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2001/01-051.htm
Visite de Zacharie
Vision du jeudi 8 juin 1944
188> Je vois une longue pièce où j'ai vu la rencontre des Mages avec Jésus et leur adoration. Je comprends que je suis dans la maison hospitalière où a été accueillie la Sainte Famille. Et j'assiste à l'arrivée de Zacharie.
Élisabeth ne l'accompagne pas. La propriétaire de la maison court dehors à la rencontre de l'hôte qui arrive. Elle le conduit près d'une porte basse et frappe, puis se retire discrètement.
Joseph ouvre et pousse une exclamation de joie en voyant Zacharie. Il le fait entrer dans la petite pièce, étroite comme un corridor : "Marie donne le sein au Petit. Attends un peu, assieds-toi, car tu dois être fatigué." Il offre une place à l'hôte sur le lit et s'assied à côté de lui.
J'entends Joseph qui lui demande des nouvelles du petit Jean et Zacharie répond : "Il pousse vigoureusement comme un petit poulain. Mais maintenant il souffre un peu des dents. À cause de cela nous n'avons pas voulu l'apporter. Il fait très froid, aussi Élisabeth n'est pas venue non plus. Elle ne pouvait le laisser sans lait. Elle en est désolée, mais la saison est tellement rigoureuse !"
"En effet le temps est très froid" répond Joseph.
"L'homme que vous m'avez envoyé m'a dit que vous n'aviez pas de maison au moment de la naissance. Qui sait à quel point vous avez dû souffrir."
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189> "Oui, beaucoup vraiment. Mais nous avons eu plus de peur que de mal. Nous avions peur que cela fît tort au Bébé. Les premiers jours, nous avons dû rester sur place. Nous ne manquions de rien, pour nous, parce que les bergers portèrent la bonne nouvelle aux Bethléemites et que beaucoup nous apportèrent des cadeaux. Mais il nous manquait une maison, une chambre en bon état, un lit... et Jésus pleurait tellement, la nuit surtout, à cause du vent qui entrait de tous côtés. Je faisais un peu de feu, très peu parce que la fumée faisait tousser l'Enfant... et le froid restait. Deux animaux chauffaient trop peu surtout du côté où l'air s'engouffre. Nous n'avions pas d'eau chaude pour le laver, ni de linge sec pour le changer. Oh ! Il a beaucoup souffert ! Et Marie souffrait de le voir souffrir. Je souffrais moi aussi... tu peux penser quelle souffrance c'était pour elle qui était sa Mère. Elle Lui donnait son lait et ses larmes, son lait et son amour ...Maintenant ici, ça va mieux. J'avais préparé un berceau si commode et Marie y avait mis un matelas douillet. Mais il est à Nazareth ! Ah ! s'il était né là-bas, ç'aurait été bien différent !"
"Mais le Christ devait naître à Bethléem. Les Prophètes l'avaient annoncé."
Marie entre, les ayant entendus parler. Elle est toute vêtue de laine blanche. Elle a quitté l'habit foncé qu'elle avait pour le voyage et dans la grotte. Elle a un vêtement tout blanc comme je l'ai déjà vue d'autres fois. Elle n'a rien sur la tête et porte entre ses bras Jésus endormi, rassasié de lait, dans ses langes blancs.
Zacharie se lève respectueusement et s'incline avec vénération. Puis il s'approche et regarde Jésus avec les marques du plus grand respect. Il est penché, pas tant pour le voir mieux, que pour Lui rendre hommage. Marie le lui présente et Zacharie le prend avec de telles marques d'adoration, qu'il semble porter un ostensoir. C'est réellement, l'Hostie qu'il porte en ses bras, l'Hostie déjà offerte et dont le sacrifice sera consommé lorsqu'elle aura été donnée aux hommes, comme nourriture d'amour et de rédemption.
Zacharie rend Jésus à Marie. Ils s'assoient tous et Zacharie redit à Marie le motif pour lequel Élisabeth n'a pas pu venir et la peine qu'elle en a éprouvée. "Elle avait préparé, ces derniers mois, du linge pour ton Enfant béni. Je te l'ai apporté, il est sur le char, en bas."
Il se lève, sort et revient avec un gros paquet et un autre plus petit. Du gros paquet dont Joseph le débarrasse tout de suite, et de l'autre il tire ses cadeaux : une moelleuse couverture de laine tissée à la main, du linge et des petits vêtements.
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190> Du second paquet il tire du miel, de la farine très blanche, du beurre et des pommes pour Marie, des galettes pétries et cuites par Élisabeth et tant d'autres choses qui disent l'affection maternelle de la reconnaissante cousine pour la jeune Mère.
"Tu diras à Élisabeth que je lui suis bien reconnaissante et à toi aussi, je suis reconnaissante. J'aurais eu tant de joie à la voir, mais je comprends ses raisons. Et aussi j'aurais bien voulu revoir le petit Jean..."
"Mais vous le verrez au printemps. Nous viendrons vous voir."
"Nazareth est trop loin" dit Joseph.
"Nazareth ? Mais vous devez rester ici. Le Messie doit grandir à Bethléem. C'est la Cité de David. Le Très-Haut l'a amené par l'intermédiaire de la volonté de César à naître dans la terre de David, la terre sainte de la Judée. Pourquoi le porter à Nazareth ? Vous savez comment chez les Juifs on juge les Nazaréens. Demain, cet Enfant devra être le Sauveur de son peuple. Il ne faut pas que la capitale méprise son Roi parce qu'il vient d'une région qu'elle méprise. Vous savez comme moi combien le Sanhédrin est susceptible et combien méprisantes les trois principales castes [1]... Et puis, ici près de moi, je pourrai vous aider quelque peu et mettre tout ce que j'ai, non seulement de biens matériels, mais de qualités morales au service de ce Nouveau-Né. Et quand il sera en âge de comprendre, je serai heureux de Lui servir de maître comme à mon enfant, pour obtenir que, devenu grand, il me bénisse. Nous devons penser à la grandeur de son destin et que pour ce motif il doit pouvoir se présenter au monde avec toutes les cartes pour gagner facilement sa partie. Lui, bien sûr, possédera la Sagesse, mais aussi le seul fait qu'un prêtre Lui ait servi de maître le fera accepter plus facilement par les pharisiens exigeants et les scribes. Cela facilitera sa mission."
Marie regarde Joseph et Joseph regarde Marie. Par-dessus la tête innocente du Bébé, qui dort, rose et ignorant, s'engage un muet échange de questions. Et ces questions sont empreintes de tristesse. Marie pense à sa petite maison. Joseph pense à son travail. Ici tout est à refaire dans un endroit où il y a quelques jours, ils étaient des inconnus. Ici, il n'y à rien des chers objets restés là-bas et préparés avec tant d'amour pour le Petit.
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191> Et Marie le dit : "Mais comment faire ? Là-bas, nous avons tout laissé. Joseph avait tant travaillé pour mon Jésus sans épargner la fatigue et l'argent. Il avait travaillé de nuit pour pouvoir travailler le jour pour les autres, et gagner ainsi de quoi acheter les bois les plus beaux, la laine la plus fine, le lin le plus blanc afin de préparer tout pour Jésus. Il avait construit des ruches et avait fait des travaux de maçonnerie pour donner une autre organisation à la maison, afin que le berceau pût être dans ma pièce et y rester jusqu'à ce que Jésus ait grandi et pouvoir donner une place au lit, puisque Jésus restera avec moi jusqu'au jour où il ne sera plus un jeune garçon."
"Joseph peut y aller et prendre ce que vous avez laissé."
"Et où le mettre ? Tu sais, Zacharie, que nous sommes pauvres. Nous n'avons que le travail et la maison. L'une et l'autre nous donnent de quoi aller de l'avant sans avoir faim. Ici, du travail nous en trouverons... peut-être. Mais il nous faudra toujours penser à une maison. Cette brave femme ne peut nous donner toujours l'hospitalité. Et moi, je ne puis imposer à Joseph des sacrifices au-delà de ceux qu'il consent déjà à faire pour moi."
"Oh ! moi ! Pour moi ce n'est rien. Je pense à la douleur de Marie, moi. A la peine de ne pas vivre dans sa maison..."
Marie a deux grosses larmes dans les yeux.
"Je pense que cette maison doit lui être bien chère, comme le Paradis pour le prodige qui s'y est accompli... Je parle peu, mais je comprends tellement ! Si ce n'était que pour cela, je ne me tourmenterais pas. Je ferai double travail, c'est tout. Je suis fort et jeune pour travailler le double de ce que je faisais et pourvoir à tout. Et si Marie ne souffre pas trop... et si tu dis qu'il est bien d'agir ainsi... pour moi... me voilà. Je fais ce qui vous paraît le plus juste. Il suffit que cela soit utile pour Jésus."
"Et ce sera utile, sûrement. Pensez-y et vous en verrez les raisons."
"On dit aussi que le Messie sera appelé Nazaréen..." [2] objecte Marie.
"C'est vrai, mais au moins, tant qu'il n'est pas adulte, faites-le grandir en Judée. Le Prophète a dit : "Et toi, Bethléem Ephrata, tu seras la plus grande, car de toi sortira le Sauveur" [3]. Il ne parle pas de Nazareth. Peut-être cette appellation Lui sera donnée pour je ne sais quelle raison. Mais sa terre, est celle-ci."
"Tu le dis prêtre, et nous... et nous... avec douleur nous t'écoutons... et te donnons raison. Mais quelle douleur !... Quand verrai-je cette maison où je suis devenue Mère ?" Marie pleure, doucement. Et je le comprends son chagrin. Ah ! si je le comprends !
http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2001/01-051.htm
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
1.52.
Joseph protège aussi les âmes consacrées
Catéchèse du jeudi 8 juin 1944
192> Marie me dit ensuite :
"Tu le comprends, je le sais. Mais tu me verras pleurer encore plus fort. Pour l'instant je t'élève l'esprit en te montrant la sainteté de Joseph. C'était un homme, c'est à dire qu'il n'avait d'autre aide pour son esprit que sa sainteté. Pour moi, j'avais tous les dons de Dieu dans ma condition d'Immaculée. Je ne savais pas que je l'étais, mais dans mon âme il y avait des ressources d'activité et qui me donnaient des forces spirituelles. Mais lui, n'était pas immaculé. Il portait en lui l'humanité avec sa lourde pesanteur et il devait, avec tout ce poids, s'élever vers la perfection, au prix d'un effort incessant, une application de toutes ses facultés pour avoir la volonté d'atteindre la perfection et d'être agréable à Dieu.
Oh ! mon saint époux ! Saint en toutes choses, même les plus humbles de l'existence. Saint pour sa chasteté angélique. Saint pour son honnêteté d'homme. Saint pour sa patience, pour son ardeur au travail, pour sa sérénité toujours égale, pour sa modestie, pour tout. Sa sainteté éclate aussi dans cet événement. Un prêtre lui dit : "C'est bien que tu t'établisses ici". Et lui, qui sait pourtant au-devant de quelles plus grandes fatigues il s'en va, il dit : "Pour moi, ce n'est rien. Je pense à la douleur de Marie. N'était-ce pas pour cela, je ne me tourmenterais pas pour moi, il suffit que la chose soit utile à Jésus". Jésus, Marie : ses angéliques amours. Il n'a rien aimé d'autre sur la terre, mon saint époux et à cet amour il s'est voué tout entier comme serviteur.
On l'a fait protecteur des familles chrétiennes et des travailleurs et de tant de catégories. Mais ce n'est pas seulement des agonisants, des époux, des travailleurs, c'est aussi des âmes consacrées dont on devrait faire le protecteur. Qui, parmi les consacrés de ce monde au service de Dieu, quelque il soit, s'est-il consacré, comme lui au service de son Dieu, acceptant tout, renonçant à tout, supportant tout, accomplissant tout avec promptitude, gaieté, bonne humeur constante, comme il l'a fait ? Il n'y en a aucun.
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193> Et voilà une autre chose que je te fais remarquer, deux choses même. Zacharie est prêtre. Joseph ne l'est pas, mais regarde comme lui, qui ne l'est pas, a l'esprit tourné vers le Ciel plus que le prêtre. Zacharie pense humainement et c'est humainement qu'il interprète les Écritures, ce n'est pas la première fois qu'il le fait, il se laisse trop guider par le bon sens humain; Il en a été puni, mais il y retombe encore, bien que moins gravement. Il avait dit pour la naissance de Jean : "Comment sera-ce possible si moi je suis vieux et ma femme stérile ?" Il dit maintenant : "Pour aplanir son chemin, le Christ doit grandir ici" et avec cette racine d'orgueil qui reste chez les meilleurs, il pense pouvoir, lui, être utile à Jésus. Non pas utile comme Joseph veut l'être en le servant, mais utile en Lui servant de maître... Dieu lui a pardonné pour sa bonne intention, mais "le Maître" avait-il besoin de maîtres ?
J'ai cherché de lui faire voir la lumière dans les prophéties. Mais lui se croyait plus savant que moi et accommodait à sa façon son interprétation. J'aurais pu insister et vaincre. Mais - et c'est là la seconde observation que je te fais faire - mais j'ai respecté le prêtre en raison de sa dignité, non pas de son savoir.
Le prêtre est, généralement, toujours éclairé par Dieu. J'ai dit "généralement". Il l'est quand c'est un vrai prêtre. Ce n'est pas l'habit qui lui donne son caractère sacré, c’est l’âme. Pour juger si quelqu'un est un vrai prêtre, il faut juger de ce qui sort de son âme. Comme l'a dit mon Jésus, c'est de l'âme que sortent les choses qui sanctifient ou corrompent : celles qui manifestent entièrement la manière d'agir d'un individu. Eh bien, quand quelqu'un est un vrai prêtre, il est généralement toujours inspiré par Dieu. Quant aux autres qui ne le sont pas, il faut avoir pour eux une surnaturelle charité et prier pour eux.
Mais mon Fils t'a déjà mise au service de cette rédemption et je n'insiste pas. Sois joyeuse de souffrir pour qu'augmente le nombre des vrais prêtres. Quant à toi, repose-toi sur la parole de qui te guide, crois et obéis à ses conseils.
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\ValtortaWeb\Images\Balise.gif Obéir sauve toujours. Même si le conseil que l'on reçoit n'est pas en tout point parfait. Tu le vois : nous avons obéi et ce fut heureux. Il est vrai qu'Hérode se borna à faire exterminer les enfants de Bethléem et des environs. Mais Satan n'aurait-il pu le pousser et étendre cette marée de crimes bien plus loin et pousser à un crime pareil tous les personnages puissants de Palestine pour faire supprimer le futur Roi des Juifs ?
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194> Il l'aurait pu. Et cela serait arrivé dans les premiers temps du Christ, quand des prodiges avaient éveillé l'attention des foules et le regard des puissants. Comment aurions-nous pu, si c'était arrivé, traverser toute la Palestine pour venir de la lointaine Nazareth en Égypte, terre hospitalière pour les Hébreux persécutés et faire le voyage avec un petit bébé et pendant le déchaînement d'une persécution ? Il était plus facile, bien qu'également douloureux de fuir de Bethléem. I:\Maria Valtorta\SiteWeb\ValtortaWeb\Images\Balise.gif L'obéissance sauve toujours. Souviens-toi de cela, et le respect à l'égard du prêtre est toujours une marque d'intégrité chrétienne.
Malheur - et Jésus l'a dit - malheur aux prêtres qui perdent leur flamme apostolique ! Malheur aussi à qui se croit autorisé à les mépriser ! Ce sont eux, en effet, qui consacrent et distribuent le Vrai Pain qui descend du Ciel. Ce contact les rend saints, comme un calice sacré, même si leur personne ne l'est pas. Ils en répondent à Dieu. Pour vous ne voyez que leur dignité et ne vous souciez pas du reste. Ne soyez pas plus intransigeants que votre Seigneur Jésus, qui à leur ordre laisse le Ciel et descend pour être élevé par leurs mains. Apprenez de Lui, et s'ils sont aveugles, s'ils sont sourds, si leur âme est paralytique et leur pensée malade, s'ils ont la lèpre des fautes qui contrastent avec leur mission, si ce sont des Lazare au tombeau, appelez Jésus pour qu'il leur rende la santé et la vie.
Appelez-le par votre prière et votre souffrance, ô âmes victimes. Sauver une âme c'est prédestiner au Ciel la propre. Mais sauver une âme sacerdotale, c'est sauver un grand nombre d'âmes, parce que tout prêtre saint est comme un filet qui amène les âmes à Dieu. Et sauver un prêtre, c'est-à-dire le sanctifier, le sanctifier à nouveau, est faire de lui un filet mystique. Chaque proie à lui ajoute un nouvel éclat de lumière à votre couronne éternelle.
Va en paix.
http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2001/01-052.htm
Joseph protège aussi les âmes consacrées
Catéchèse du jeudi 8 juin 1944
192> Marie me dit ensuite :
"Tu le comprends, je le sais. Mais tu me verras pleurer encore plus fort. Pour l'instant je t'élève l'esprit en te montrant la sainteté de Joseph. C'était un homme, c'est à dire qu'il n'avait d'autre aide pour son esprit que sa sainteté. Pour moi, j'avais tous les dons de Dieu dans ma condition d'Immaculée. Je ne savais pas que je l'étais, mais dans mon âme il y avait des ressources d'activité et qui me donnaient des forces spirituelles. Mais lui, n'était pas immaculé. Il portait en lui l'humanité avec sa lourde pesanteur et il devait, avec tout ce poids, s'élever vers la perfection, au prix d'un effort incessant, une application de toutes ses facultés pour avoir la volonté d'atteindre la perfection et d'être agréable à Dieu.
Oh ! mon saint époux ! Saint en toutes choses, même les plus humbles de l'existence. Saint pour sa chasteté angélique. Saint pour son honnêteté d'homme. Saint pour sa patience, pour son ardeur au travail, pour sa sérénité toujours égale, pour sa modestie, pour tout. Sa sainteté éclate aussi dans cet événement. Un prêtre lui dit : "C'est bien que tu t'établisses ici". Et lui, qui sait pourtant au-devant de quelles plus grandes fatigues il s'en va, il dit : "Pour moi, ce n'est rien. Je pense à la douleur de Marie. N'était-ce pas pour cela, je ne me tourmenterais pas pour moi, il suffit que la chose soit utile à Jésus". Jésus, Marie : ses angéliques amours. Il n'a rien aimé d'autre sur la terre, mon saint époux et à cet amour il s'est voué tout entier comme serviteur.
On l'a fait protecteur des familles chrétiennes et des travailleurs et de tant de catégories. Mais ce n'est pas seulement des agonisants, des époux, des travailleurs, c'est aussi des âmes consacrées dont on devrait faire le protecteur. Qui, parmi les consacrés de ce monde au service de Dieu, quelque il soit, s'est-il consacré, comme lui au service de son Dieu, acceptant tout, renonçant à tout, supportant tout, accomplissant tout avec promptitude, gaieté, bonne humeur constante, comme il l'a fait ? Il n'y en a aucun.
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193> Et voilà une autre chose que je te fais remarquer, deux choses même. Zacharie est prêtre. Joseph ne l'est pas, mais regarde comme lui, qui ne l'est pas, a l'esprit tourné vers le Ciel plus que le prêtre. Zacharie pense humainement et c'est humainement qu'il interprète les Écritures, ce n'est pas la première fois qu'il le fait, il se laisse trop guider par le bon sens humain; Il en a été puni, mais il y retombe encore, bien que moins gravement. Il avait dit pour la naissance de Jean : "Comment sera-ce possible si moi je suis vieux et ma femme stérile ?" Il dit maintenant : "Pour aplanir son chemin, le Christ doit grandir ici" et avec cette racine d'orgueil qui reste chez les meilleurs, il pense pouvoir, lui, être utile à Jésus. Non pas utile comme Joseph veut l'être en le servant, mais utile en Lui servant de maître... Dieu lui a pardonné pour sa bonne intention, mais "le Maître" avait-il besoin de maîtres ?
J'ai cherché de lui faire voir la lumière dans les prophéties. Mais lui se croyait plus savant que moi et accommodait à sa façon son interprétation. J'aurais pu insister et vaincre. Mais - et c'est là la seconde observation que je te fais faire - mais j'ai respecté le prêtre en raison de sa dignité, non pas de son savoir.
Le prêtre est, généralement, toujours éclairé par Dieu. J'ai dit "généralement". Il l'est quand c'est un vrai prêtre. Ce n'est pas l'habit qui lui donne son caractère sacré, c’est l’âme. Pour juger si quelqu'un est un vrai prêtre, il faut juger de ce qui sort de son âme. Comme l'a dit mon Jésus, c'est de l'âme que sortent les choses qui sanctifient ou corrompent : celles qui manifestent entièrement la manière d'agir d'un individu. Eh bien, quand quelqu'un est un vrai prêtre, il est généralement toujours inspiré par Dieu. Quant aux autres qui ne le sont pas, il faut avoir pour eux une surnaturelle charité et prier pour eux.
Mais mon Fils t'a déjà mise au service de cette rédemption et je n'insiste pas. Sois joyeuse de souffrir pour qu'augmente le nombre des vrais prêtres. Quant à toi, repose-toi sur la parole de qui te guide, crois et obéis à ses conseils.
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\ValtortaWeb\Images\Balise.gif Obéir sauve toujours. Même si le conseil que l'on reçoit n'est pas en tout point parfait. Tu le vois : nous avons obéi et ce fut heureux. Il est vrai qu'Hérode se borna à faire exterminer les enfants de Bethléem et des environs. Mais Satan n'aurait-il pu le pousser et étendre cette marée de crimes bien plus loin et pousser à un crime pareil tous les personnages puissants de Palestine pour faire supprimer le futur Roi des Juifs ?
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194> Il l'aurait pu. Et cela serait arrivé dans les premiers temps du Christ, quand des prodiges avaient éveillé l'attention des foules et le regard des puissants. Comment aurions-nous pu, si c'était arrivé, traverser toute la Palestine pour venir de la lointaine Nazareth en Égypte, terre hospitalière pour les Hébreux persécutés et faire le voyage avec un petit bébé et pendant le déchaînement d'une persécution ? Il était plus facile, bien qu'également douloureux de fuir de Bethléem. I:\Maria Valtorta\SiteWeb\ValtortaWeb\Images\Balise.gif L'obéissance sauve toujours. Souviens-toi de cela, et le respect à l'égard du prêtre est toujours une marque d'intégrité chrétienne.
Malheur - et Jésus l'a dit - malheur aux prêtres qui perdent leur flamme apostolique ! Malheur aussi à qui se croit autorisé à les mépriser ! Ce sont eux, en effet, qui consacrent et distribuent le Vrai Pain qui descend du Ciel. Ce contact les rend saints, comme un calice sacré, même si leur personne ne l'est pas. Ils en répondent à Dieu. Pour vous ne voyez que leur dignité et ne vous souciez pas du reste. Ne soyez pas plus intransigeants que votre Seigneur Jésus, qui à leur ordre laisse le Ciel et descend pour être élevé par leurs mains. Apprenez de Lui, et s'ils sont aveugles, s'ils sont sourds, si leur âme est paralytique et leur pensée malade, s'ils ont la lèpre des fautes qui contrastent avec leur mission, si ce sont des Lazare au tombeau, appelez Jésus pour qu'il leur rende la santé et la vie.
Appelez-le par votre prière et votre souffrance, ô âmes victimes. Sauver une âme c'est prédestiner au Ciel la propre. Mais sauver une âme sacerdotale, c'est sauver un grand nombre d'âmes, parce que tout prêtre saint est comme un filet qui amène les âmes à Dieu. Et sauver un prêtre, c'est-à-dire le sanctifier, le sanctifier à nouveau, est faire de lui un filet mystique. Chaque proie à lui ajoute un nouvel éclat de lumière à votre couronne éternelle.
Va en paix.
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
La Passion de Jésus-Christ
Du Prétoire au Calvaire
265> Après sa condamnation, Jésus reste ainsi, gardé par les soldats attendant la croix, pas plus d'une demie heure, peut-être encore moins aussi. Puis Longin, chargé de présider l'exécution, donne ses ordres.[1]
Mais avant que Jésus soit conduit dehors, sur le chemin, pour recevoir la croix et se mettre en marche, Longin l'a regardé deux ou trois fois avec une curiosité déjà nuancée de compassion et, avec le coup d'œil de quelqu'un habitué à certaines choses, il s'approche de Jésus avec un soldat et Lui offre pour le désaltérer une coupe de vin, je crois, car il coule d'une vraie gourde militaire un liquide d'un blond rosé clair. "Cela te fera du bien. Tu dois avoir soif et dehors, il y a du soleil, et la route est longue."
Mais Jésus répond : "Que Dieu te récompense de ta pitié, mais ne te prive pas."
"Mais moi, je suis sain et fort. ...Toi... Je ne me prive pas... Et puis volontiers je le ferais dans ce cas pour te réconforter... Une gorgée... pour me montrer que tu ne hais pas les païens."
Jésus ne refuse plus et boit une gorgée de la boisson. Il a les mains déjà déliées, comme il n'a plus le roseau ni la chlamyde et il peut le faire Lui-même. Ensuite il refuse, bien que la boisson fraîche et bonne devrait soulager la fièvre qui déjà se manifeste dans les traces rouges qui s'allument sur ses joues pâles et sur ses lèvres sèches et gercées.
"Prends, prends. C'est de l'eau et du miel. Cela soutient, désaltère... Tu me fais pitié... oui... pitié... Ce n'était pas Toi qu'il fallait tuer d'entre les hébreux... Hélas !... Moi, je ne te hais pas... et je chercherai à ne te faire souffrir que le nécessaire."
Mais Jésus ne recommence pas à boire... Il a vraiment soif... La soif terrible de ceux qui ont perdu du sang et des fiévreux... Il sait que ce n'est pas une boisson narcotinisée et il boirait volontiers. Mais il ne veut pas moins souffrir. Mais je comprends, comme je comprends ce que je dis grâce à une lumière intérieure que, plus que l'eau au miel, le réconforte la pitié du romain.
"Que Dieu te rende en bénédictions ce soulagement" dit-il ensuite. Et il a encore un sourire... un sourire déchirant avec sa bouche enflée, blessée, qu'il remue difficilement aussi parce que entre le nez et la pommette droite est fortement enflée la forte contusion du coup de bâton qu'il a reçu dans la cour intérieure après la flagellation.
266> Arrivent les deux larrons encadrés chacun par une décurie de soldats. C'est l'heure de partir. Longin donne les derniers ordres.
Une centurie est disposée sur deux rangs distants de trois mètres l'un de l'autre, et elle sort ainsi sur la place où une autre centurie a formé un carré pour repousser la foule afin qu'elle ne gêne pas le cortège. Sur la petite place, se trouvent déjà des hommes à cheval : une décurie de cavalerie avec un jeune gradé qui les commande et avec les enseignes. Un soldat à pied tient par la bride le cheval moreau [2] du centurion. Longin monte en selle et va à sa place à deux mètres en avant des onze cavaliers.
On apporte les croix : celles des deux larrons sont plus courtes. Celle de Jésus est beaucoup plus longue. Je dis que la pièce verticale n'a pas moins de quatre mètres. Je la vois apportée déjà formée.
J'ai lu à ce sujet, quand je lisais... c'est-à-dire il y a des années, que la croix fut formée en haut du Golgotha et que le long du chemin les condamnés portaient seulement les deux poteaux sur leurs épaules. C'est possible, mais moi, je vois une vraie croix bien formée, solide, avec les bras parfaitement encastrés dans la pièce principale et bien renforcée par des clous et des boulons. En fait, si on réfléchit qu'elle était destinée à soutenir le poids appréciable qu'est le corps d'un adulte et à le soutenir même dans les convulsions finales, appréciables aussi, on comprend qu'elle ne pouvait être montée sur le sommet étroit et incommode du Calvaire.[3]
Avant de donner la croix à Jésus, on Lui passe au cou l'écriteau avec la mention "Jésus le Nazaréen Roi des Juifs". La corde qui le soutient s'emmêle dans la couronne qui se déplace et griffe là où il n'y a pas déjà de griffures et pénètre en de nouveaux points en donnant une douleur nouvelle et en faisant de nouveau couler du sang. Les gens rient d'une joie sadique, insultent, blasphèment.
Maintenant ils sont prêts, et Longin donne l'ordre de marche : "D'abord le Nazaréen, derrière les deux larrons; une décurie autour de chacun, les sept autres décuries sur les ailes et comme renfort, et le responsable sera le soldat qui fait frapper à mort les condamnés".
Jésus descend les trois marches qui amènent du vestibule sur la place. Et il apparaît tout de suite avec évidence que Jésus est dans des conditions de grande faiblesse. Il vacille en descendant les trois marches, gêné par la croix qui repose sur son épaule toute écorchée, par l'écriteau qui se déplace devant Lui et dont la corde scie le cou, par les balancements qu'imprimé au corps la longue pièce de la croix qui saute sur les marches et sur les aspérités du sol.
267> Les juifs rient de le voir comme un homme ivre qui tâtonne et ils crient aux soldats: "Poussez-le. Faites-le tomber. Dans la poussière le blasphémateur !"
Mais les soldats font seulement ce qu'ils doivent faire, c'est-à-dire ordonnent au Condamné de se mettre au milieu du chemin et de marcher. Longin éperonne son cheval et le cortège se met lentement en mouvement.
Longin voudrait aussi faire vite en prenant le chemin le plus court pour aller au Golgotha car il n'est pas sûr de la résistance du Condamné. Mais la pègre déchaînée — et l'appeler ainsi, c'est encore un honneur — ne veut pas de cela. Ceux qui ont été les plus rusés sont déjà en avant, au carrefour où la route bifurque pour aller d'un côté vers les murs, de l'autre vers la ville. Ils s'agitent, crient quand ils voient Longin prendre la direction des murs. "Tu ne dois pas ! Tu ne dois pas ! C'est illégal ! La Loi dit que les condamnés doivent être vus par la ville où ils ont péché !" Les juifs, qui sont à la queue du cortège, comprennent que par devant on essaie de les frustrer d'un droit et ils unissent leurs cris à ceux de leurs collègues.
Par amour de la paix, Longin prend la route qui va vers la ville et en parcourt un tronçon. Mais il fait signe aussi à un décurion de venir près de lui (je dis décurion parce que c'est un gradé mais c'est peut-être quelqu'un que nous appellerions son officier d'ordonnance) et il lui dit doucement quelque chose. Celui-ci revient en arrière au trot, et à mesure qu'il rejoint le chef de chaque décurie il transmet l'ordre. Ensuite il revient vers Longin pour dire que c'est fait. Enfin il rejoint sa place primitive dans le rang derrière Longin.
Jésus avance haletant. Chaque trou de la route est un piège pour son pied qui vacille et une torture pour ses épaules écorchées, pour sa tête couronnée d'épines sur laquelle descend à pic un soleil exagérément chaud qui de temps à autre se cache derrière un rideau de nuages de plomb, mais qui, même caché, ne cesse pas de brûler. Jésus est congestionné par la fatigue, par la fièvre et par la chaleur. Je pense que même la lumière et les cris doivent le tourmenter. Et s'il ne peut se boucher les oreilles pour ne pas entendre ces cris déchaînés, il ferme à demi les yeux pour ne pas voir la route éblouissante de soleil... Mais il doit aussi les rouvrir parce qu'il bute contre les pierres et contre les trous et chaque fois qu'il bute, c'est une douleur car il remue brusquement la croix qui heurte la couronne, qui se déplace sur l'épaule écorchée, élargit la plaie et augmente la douleur.
268> Les juifs ne peuvent plus le frapper directement; mais il arrive encore quelques pierres et quelques coups de bâton, les premières spécialement dans les petites places remplies par la foule, les seconds au contraire dans les tournants, dans les petites rues où l'on monte et descend des marches tantôt une, tantôt trois, tantôt davantage, à cause des dénivellations continuelles de la ville. Là, nécessairement, le cortège ralentit et il y a toujours quelque volontaire qui défie les lances romaines pour donner un nouveau coup au chef d'œuvre de torture qu'est désormais Jésus.
Les soldats le défendent comme ils peuvent. Mais même en le défendant ils le frappent parce que les longs manches des lances, brandies en aussi peu d'espace, le heurtent et le font buter. Mais arrivés à un certain point les soldats font une manœuvre impeccable et, malgré les cris et les menaces, le cortège dévie brusquement par un chemin qui va directement vers les murs, en descendant, un chemin qui abrège beaucoup la route vers le lieu du supplice.
Jésus halète toujours plus. La sueur coule sur son visage en même temps que le sang qui coule des blessures de la couronne d'épines. La poussière se colle sur ce visage trempé et le maculent de taches étranges, car il y a aussi du vent maintenant. Des coups de vent syncopés à longs intervalles où retombe la poussière que la foule a soulevée en tourbillons, qui amènent des détritus dans les yeux et dans la gorge.
À la Porte Judiciaire sont déjà entassés quantité de gens, ceux qui, prévoyants, se sont choisis de bonne heure une bonne place pour voir. Mais un peu avant d'y arriver, Jésus a déjà failli tomber. Seule la prompte intervention d'un soldat, sur lequel Lui va presque tomber, empêche Jésus d'aller par terre. La populace rit et crie : "Laissez-le ! Il disait à tous : "Levez-vous". Qu'il se lève Lui, maintenant..."
Au-delà de la porte, il y a un torrent et un petit pont. Nouvelle fatigue pour Jésus d'aller sur ces planches disjointes sur lesquelles rebondit plus fortement le long bois de la croix. Et nouvelle mine de projectiles pour les juifs. Les pierres du torrent volent et frappent le pauvre Martyr...
Alors commence la montée du Calvaire. Un chemin nu, sans un brin d'ombre, avec des pierres disjointes, qui attaque directement la montée.
269> Ici aussi, à l'époque où je lisais, j'ai lu que le Calvaire n'avait que quelques mètres de hauteur. Possible. Ce n'est certainement pas une montagne. Mais c'est une colline, et certainement pas plus basse qu'est par rapport à Lungami le mont aux Croix, là où se trouve la basilique de Saint Miniato à Florence. On dira : "Oh ! c'est peu de chose !" Oui, pour quelqu'un qui est sain et fort c'est peu de chose. Mais il suffit d'avoir le cœur faible pour sentir si c'est peu ou beaucoup !... Je sais qu'après avoir eu le cœur malade, même alors qu'il s'agissait d'une manière bénigne, je ne pouvais gravir cette pente sans souffrir beaucoup et je devais m'arrêter à chaque instant, et je n'avais pas de fardeau sur les épaules. Et je crois que Jésus avait le cœur très malade surtout après la flagellation et la sueur de sang... et je ne contemple rien autre que ces deux chose ?
Jésus éprouve donc une douleur aiguë dans la montée et avec le poids de la croix qui, longue comme elle est, doit être très lourde.
Il trouve une pierre qui dépasse et, épuisé comme il l'est, il lève trop peu le pied, il bute et tombe sur le genou droit réussissant pourtant à se relever à l'aide de la main gauche. La foule pousse des cris de joie... Il se relève, il avance de plus en plus courbé et haletant, congestionné, fiévreux...
L'écriteau, qui cahote devant Lui, Lui gêne la vue et son long vêtement, maintenant qu'il avance courbé, traîne par terre par devant et gêne sa marche. Il bute de nouveau et tombe sur les deux genoux, en se blessant de nouveau là où il est déjà blessé, et .la croix qui échappe de ses mains et tombe, après Lui avoir frappé fortement le dos, l'oblige à se pencher pour la relever et à peiner pour la mettre de nouveau sur ses épaules. Pendant qu'il le fait on voit nettement sur son épaule droite la plaie faite par le frottement de la croix, qui a ouvert les plaies nombreuses de la flagellation et en a fait une seule qui transsude de l'eau et du sang, de sorte que la tunique est toute tachée à cet endroit. Les gens applaudissent même, heureux de ces chutes si mauvaises.
Longin incite à se hâter, et les soldats, à coups de plat de dague, invitent le pauvre Jésus à avancer. On reprend la marche avec une lenteur de plus en plus grande malgré tous les efforts.
Jésus semble tout à fait ivre tant sa marche est chancelante et il heurte tantôt l'un tantôt l'autre des deux rangs de soldats, occupant toute la route. Les gens le remarquent et crient : "Sa doctrine Lui est montée à la tête. Vois, vois comme il titube !" Et d'autres, qui ne sont pas du peuple, mais des prêtres et des scribes, ricanent : "Non ! Ce sont les festins dans la maison de Lazare qui encore Lui montent à la tête. Ils étaient bons ? Maintenant mange notre nourriture..." et d'autres phrases semblables.
270> Longin, qui se tourne de temps en temps, a pitié et commande une halte de quelques minutes. Et il est tellement insulté par la populace que le centurion ordonne aux troupes de charger. Et la foule lâche, devant les lances qui brillent et menacent, s'éloigne en criant et en descendant ça et là sur la montagne.
C'est ici que je revois sortir de derrière des décombres, peut-être de quelque muret éboulé, le petit groupe des bergers. Désolés, bouleversés, poussiéreux, déchirés, ils appellent à eux le Maître par la force de leurs regards. Et Lui tourne la tête, les voit... Il les fixe comme si c'était des visages d'anges, paraît se désaltérer et se fortifier de leurs pleurs, et il sourit... On redonne l'ordre d'avancer et Jésus passe juste devant eux et entend leurs pleurs angoissés. Il tourne avec difficulté la tête de sous le joug de la croix et leur sourit de nouveau...
Ses réconforts... Dix visages... une halte sous le soleil brûlant...
Et puis, tout de suite, la douleur de la troisième chute complète. Et cette fois, ce n'est pas qu'il bute. Mais il tombe par un soudain fléchissement de ses forces, par une syncope. Il s'allonge en se frappant le visage sur les pierres disjointes, restant dans la poussière, sous la croix retombée sur Lui. Les soldats essaient de le relever. Mais comme il paraît mort, ils vont le rapporter au centurion. Pendant qu'ils vont et viennent Jésus revient à Lui, et lentement, avec l'aide de deux soldats dont l'un relève la croix et l'autre aide le Condamné à se mettre debout, il reprend sa place. Mais il est vraiment épuisé.
"Arrangez-vous pour qu'il ne meure que sur la croix !" crie la foule.
"Si vous le faites mourir avant, vous en répondrez au Proconsul, souvenez-vous-en. Le coupable doit arriver vivant au supplice" disent les chefs des scribes aux soldats.
Ceux-ci les foudroient de leurs regards féroces mais, par discipline, ne parlent pas.
Longin, cependant, a la même peur que les juifs que le Christ meure en route et il ne veut pas avoir d'ennuis. Sans avoir besoin que quelqu'un le lui rappelle, il sait quel est son devoir de préposé à l'exécution et il y pourvoit. Il y pourvoit en désorientant les juifs qui sont déjà accourus en avant par la route qu'ils ont rejointe de tous les côtés de la montagne en suant, en se griffant pour passer à travers les buissons rares et épineux du mont aride et brûlé, en tombant sur les détritus qui l'encombrent comme si c'était un lieu de déblai pour Jérusalem, sans sentir d'autre peine que celle de perdre un halètement du Martyr, un de ses regards douloureux, un geste même involontaire de souffrance, et sans d'autre peur que celle de ne pas arriver à avoir une bonne place. Longin donne donc l'ordre de prendre le chemin le plus long qui monte en lacets au sommet et qui pour cela est beaucoup moins rapide.
271> Il semble que ce soit un sentier qui, à force d'être parcouru, soit devenu un chemin suffisamment pratique. Ce croisement de chemin avec l'autre arrive environ à moitié de la montagne. Mais je vois que plus haut, par quatre fois, la route directe se trouve coupée par celle qui monte avec beaucoup moins de pente et qui par compensation est beaucoup plus longue. Et sur cette route, il y a des gens qui montent mais qui ne participent pas à l'indigne chahut des obsédés qui suivent Jésus pour jouir de ses tourments : des femmes pour la plupart, en pleurs et voilées, et quelques petits groupes d'hommes très peu nombreux en vérité, plus en avant de beaucoup que les femmes, qui vont disparaître à la vue quand, en continuant, le chemin fait le tour de la montagne. Ici le Calvaire a une sorte de pointe faite en museau d'un côté alors que de l'autre elle tombe à pic. Les hommes disparaissent derrière la pointe rocheuse et je les perds de vue.
Les gens qui suivaient Jésus hurlent de rage. C'était plus beau, pour eux, de le voir tomber. Avec des imprécations obscènes au Condamné et à ceux qui le conduisent, ils se mettent en partie à suivre le cortège judiciaire et en partie montent presque en courant par la route rapide pour se dédommager de leur déception par une excellente place sur le sommet.
Les femmes, qui s'avancent en pleurant, se retournent en entendant les cris, et voient que le cortège tourne de ce côté. Elles s'arrêtent alors en s'adossant au mont, craignant d'être jetées en bas par les juifs violents. Elles abaissent encore plus leurs voiles sur leurs visages et il y en a une qui est complètement voilée comme une musulmane, ne laissant libres que ses yeux très noirs. Elles sont vêtues très richement et ont pour les défendre un vieil homme robuste dont, enveloppé dans son manteau comme il l'est, je ne distingue pas le visage. Je ne vois que sa longue barbe plutôt blanche que noire qui sort de son manteau foncé.
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Quand Jésus arrive à leur hauteur elles sanglotent plus fort et se courbent en profondes salutations. Puis elles s'avancent résolument. Les soldats voudraient les repousser avec leurs lances, mais celle qui est couverte comme une musulmane écarte un instant son voile devant l'enseigne arrivé à cheval pour voir ce que c'est que ce nouvel obstacle, et il donne l'ordre de la faire passer. 272> Je ne puis voir son visage ni son vêtement, car elle a déplacé son voile avec la rapidité d'un éclair et son habit est complètement caché par un manteau qui arrive jusqu'à terre, lourd, fermé complètement par une série de boucles. La main, qui pour un instant sort de dessous pour déplacer le voile, est blanche et belle, et c'est avec ses yeux noirs l'unique chose que l'on voit de cette grande matrone certainement influente puisque l'officier de Longin lui obéit ainsi.
Elles s'approchent de Jésus en pleurant et s'agenouillent à ses pieds pendant que Lui s'arrête haletant... et pourtant il sait encore sourire à ces pieuses femmes et à l'homme qui les escorte qui se découvre pour montrer qu'il est Jonathas. Mais celui-ci, les gardes ne le font pas passer, seulement les femmes. L'une d'elles est Jeanne de Chouza. Elle est plus défaite que quand elle était mourante. De rouge, elle n'a que les traces de ses pleurs et puis c'est tout un visage de neige avec ses doux yeux noirs qui, ainsi brouillés comme ils le sont, sont devenus d'un violet foncé comme certaines fleurs. Elle a dans les mains une amphore d'argent et l'offre à Jésus, mais Lui refuse. D'ailleurs son essoufflement est si grand qu'il ne pourrait même pas boire. De la main gauche, il s'essuie la sueur et le sang qui Lui tombe dans les yeux, qui, coulant le long de ses joues rouges et de son cou par les veines gonflées dans le battement essoufflé du cœur, trempe tout son vêtement sur la poitrine.
Une autre femme, qui a près d'elle une jeune servante avec un coffret dans les bras, l'ouvre, en tire un linge de lin très blanc, carré, et l'offre au Rédempteur. Il l'accepte et comme il ne peut avec une seule main le faire par Lui-même, la femme pleine de pitié l'aide, en faisant attention de ne pas heurter la couronne, à le poser sur son visage. Jésus presse le linge frais sur son pauvre visage et l'y tient comme s'il trouvait un grand réconfort. Puis il rend le linge et parle : "Merci Jeanne, merci Nique... Sara... Marcella... Élise... Lidia... Anne... Valeria... et toi... Mais... ne pleurez pas... sur Moi... filles de... Jérusalem... mais sur les péchés... les vôtres et ceux... de votre ville... Bénis... Jeanne... de n'avoir...plus d'enfants... Vois... c'est une pitié de Dieu... de ne pas... de ne pas avoir d'enfants... car... ils souffrent de... cela. Et toi aussi... Élisabeth... Mieux... comme cela a été... que parmi les déicides... Et vous... mères... pleurez sur... vos fils, car... cette heure ne passera pas... sans châtiment... Et quel châtiment, s'il en est ainsi pour... l'Innocent... Vous pleurerez alors... d'avoir conçu... allaité et... d'avoir encore... vos fils... Les mères... de ce moment-là... pleureront parce que... en vérité, je vous le dis... qu'il sera heureux... celui qui alors... tombera... sous les décombres... le premier. Je vous bénis... Allez... à la maison... priez... pour Moi. Adieu, Jonathas... éloigne-les..."
273> Et au milieu d'un cri aigu de pleurs féminins et d'imprécations juives, Jésus se remet en marche.
Jésus est de nouveau trempé de sueur. Les soldats aussi suent et les deux autres condamnés, car le soleil de ce jour d'orage est brûlant comme la flamme et le flanc de la montagne devenu brûlant lui aussi s'ajoute à la chaleur du soleil. Que devait être l'effet de ce soleil sur le vêtement de laine de Jésus, en contact avec les blessures des fouets, il est facile de l'imaginer et d'en être horrifié... Mais Lui ne profère pas une plainte. Seulement, bien que la route soit beaucoup moins rapide et n'ait pas ces pierres disjointes, si dangereuses pour son pied qui traîne maintenant, Jésus titube toujours plus fort, allant heurter un rang de soldats puis le rang opposé, et fléchissant de plus en plus vers la terre.
Ils pensent supprimer cet inconvénient en Lui passant une corde à la taille et en la tenant par les deux bouts comme si c'étaient des rênes. Oui, cela le soutient, mais ne Lui enlève pas son fardeau. Au contraire, la corde en heurtant la croix, la déplace continuellement sur l'épaule et la fait frapper la couronne qui désormais a fait du front de Jésus un tatouage sanglant. De plus, la corde frotte la taille où se trouvent tant de blessures et certainement doit les ouvrir de nouveau. Aussi la tunique blanche se colore à la taille d'un rosé pâle. Pour l'aider, ils le font souffrir plus encore.
Le chemin continue, il fait le tour de la montagne, revient presque en avant vers la route rapide. Là se trouve Marie avec Jean. Je dirais que Jean l'a amenée en cet endroit ombragé, derrière la pente de la montagne, pour qu'elle se refasse un peu. C'est l'endroit le plus escarpé de la montagne. Il n'y a que ce chemin qui la côtoie. Au-dessous la côte descend rapidement et au-dessus la pente est aussi forte. À cause de cela les cruels la négligent. Là il y a de l'ombre, car je dirais que c'est le septentrion, et Marie, adossée comme elle l'est à la montagne, est à l'abri du soleil. Elle se tient debout appuyée au flanc de la montagne mais elle est déjà épuisée. Elle aussi halète, pâle comme une morte dans son vêtement bleu très foncé, presque noir.
274> Jean la regarde avec une pitié désolée. Lui aussi a perdu toute trace de couleur et il est terreux, avec deux yeux las et écarquillés, dépeigné, les joues creusées comme s'il avait été malade. Les autres femmes : Marie et Marthe de Lazare, Marie d'Alphée et de Zébédée, Suzanne de Cana, la maîtresse de la maison et d'autres encore que je ne connais pas, sont au milieu du chemin et elles regardent si le Sauveur arrive. Ayant vu que Longin arrive, elles accourent près de Marie pour lui donner la nouvelle. Marie, soutenue par le coude par Jean, se détache, majestueuse dans sa douleur, de la côte du mont et se met résolument au milieu du chemin, en ne s'écartant qu'à l'arrivée de Longin qui, du haut de son cheval, regarde la femme pâle et celui qui l'accompagne, blond, pâle, aux doux yeux de ciel comme elle. Et Longin hoche la tête pendant qu'il la dépasse suivi des onze cavaliers.
Marie essaie de passer entre les soldats à pied mais ceux-ci, qui ont chaud et sont pressés, cherchent à la repousser avec leurs lances, d'autant plus que du chemin pavé volent des pierres pour protester contre tant de pitié. Ce sont encore les juifs qui lancent encore des imprécations à cause de l'arrêt causé par les pieuses femmes et disent : "Vite ! Demain c'est Pâque. Il faut tout finir avant le soir ! Complices qui méprisez notre Loi ! Oppresseurs ! A mort les envahisseurs et leur Christ ! Ils l'aiment ! Voyez comme ils l'aiment ! Mais prenez-le ! Mettez-le dans votre Ville maudite ! Nous vous le cédons ! Nous n'en voulons pas ! Les charognes aux charognes ! La lèpre aux lépreux !"
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Longin se lasse et éperonne son cheval, suivi des dix lanciers, contre la canaille qui l'insulte et qui fuit une seconde fois. C'est en le faisant qu'il voit une charrette arrêtée, montée certainement des cultures maraîchères qui sont au pied de la montagne et qui attend avec son chargement de salades que la foule soit passée pour descendre vers la ville. Je pense qu'un peu de curiosité chez le Cyrénéen et ses fils l'ont fait monter jusque là, car il n'était vraiment pas nécessaire pour lui de le faire. Les deux fils, allongés sur le tas de légumes, regardent et rient après les juifs en fuite. L'homme, de son côté, un homme robuste sur les quarante-cinquante ans, debout près de l'âne qui effrayé veut reculer, regarde attentivement vers le cortège.
Longin le dévisage. Il pense qu'il peut lui être utile et lui ordonne : "Homme, viens ici." Le Cyrénéen fait semblant de ne pas entendre, mais avec Longin on ne plaisante pas. Il répète l'ordre de telle façon que l'homme jette les rênes à un de ses fils et s'approche du centurion.
275> "Tu vois cet homme ?" lui demande-t-il, et en parlant ainsi, il se retourne pour indiquer Jésus et il voit à son tour Marie qui supplie les soldats de la laisser passer. Il en a pitié et crie : "Faites passer la Femme." Puis il reprend à parler au Cyrénéen : "Il ne peut plus avancer ainsi chargé. Tu es fort. Prends sa croix et porte-la à sa place jusqu'à la cime."
"Je ne peux pas... J'ai l'âne... il est rétif... les garçons ne savent pas le retenir."
Mais Longin lui dit : "Va, si tu ne veux pas perdre l'âne et gagner vingt coups comme punition."
Le Cyrénéen n'ose plus réagir. Il crie aux garçons : "Allez vite à la maison et dites que j'arrive tout de suite" et puis il va vers Jésus.
Il le rejoint juste au moment où Jésus se tourne vers sa Mère que seulement alors il voit venir vers Lui, car il avance si courbé et les yeux presque fermés comme s'il était aveugle, et il crie : "Maman !"
C'est la première parole depuis qu'il est torturé qui exprime sa souffrance. Car dans cette parole, il y a la confession de tout et de toute sa terrible douleur de l'esprit, du moral et de la chair. C'est le cri déchiré et déchirant d'un enfant qui meurt seul, parmi les argousins et au milieu des pires tortures... et qui arrive à avoir peur même de sa propre respiration. C'est la plainte d'un enfant qui délire et que déchirent des visions de cauchemar... Et il veut la mère, la mère parce que seul son frais baiser calme l'ardeur de la fièvre, que sa voix fait fuir les fantômes, que son embrassement rend la mort moins effrayante...
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Marie porte la main à son cœur comme si elle avait reçu un coup de poignard et vacille légèrement, mais elle se reprend, hâte sa marche et en allant les bras tendus vers son Fils martyrisé, elle crie : "Fils !" Mais elle le dit d'une telle manière que qui n'a pas un cœur d'hyène le sent se fendre par cette douleur.
Je vois que même parmi les romains il y a un mouvement de pitié... et pourtant ce sont des hommes d'armes habitués aux tueries, marqués de cicatrices - Mais la parole : "Maman !" et "Fils !" sont toujours les mêmes et pour tous ceux qui, je le répète, ne sont pas pires que des hyènes, et sont dites et comprises partout, et soulèvent partout des flots de pitié...
Le Cyrénéen a cette pitié... Il voit que Marie ne peut embrasser son Fils à cause de la croix, et qu'après avoir tendu les mains, elle les laisse retomber, persuadée de ne pouvoir le faire. Elle le regarde seulement, essayant de sourire de son sourire martyr, pour le réconforter alors que ses lèvres tremblantes boivent ses larmes. Lui, tordant la tête de sous le joug de la croix, cherche à son tour à lui sourire et à lui envoyer un baiser avec ses pauvres lèvres blessées et fendues par les coups et la fièvre. Le Cyrénéen, à ce spectacle, se hâte d'enlever la croix et il le fait avec la délicatesse d'un père, pour ne pas heurter la couronne et ne pas frotter les plaies.
276> Mais Marie ne peut baiser son Fils... L'attouchement, même le plus léger, serait une torture sur les chairs déchirées, et Marie s'en abstient. Et puis... les sentiments les plus saints ont une pudeur profonde et ils veulent le respect ou du moins la compassion. Ici, c'est la curiosité et surtout le mépris. Se baisent seulement leurs deux âmes angoissées.
Le cortège se remet en marche sous la poussée des flots d'un peuple furieux qui les presse, les sépare, en repoussant la Mère contre la montagne, l'exposant au mépris de tout un peuple... Maintenant, derrière Jésus, marche le Cyrénéen avec la croix. Et Jésus, libéré de ce fardeau, marche mieux. Il halète fortement, portant souvent la main à son cœur comme s'il avait une grande douleur, une blessure à la région sterno-cardiaque, et maintenant qu'il le peut, n'ayant plus les mains liées, il repousse les cheveux tombés en avant, tout gluants de sang et de sueur, jusque derrière les oreilles, pour sentir l'air sur son visage congestionné, il délace le cordon du cou qui le fait souffrir quand il respire... Mais sa marche est plus facile.
Marie s'est retirée avec les femmes. Elle suit le cortège une fois qu'il est passé, et ensuite, par un raccourci, elle se dirige vers le sommet de la montagne défiant les imprécations de la plèbe cannibale. Maintenant que Jésus est libre, le dernier lacet de la montagne est assez vite parcouru et ils sont proches de la cime toute remplie d'un peuple qui pousse des cris.
Longin s'arrête et il ordonne que tous, inexorablement, soient repoussés plus bas, pour dégager la cime, lieu de l'exécution. Une moitié de la centurie exécute l'ordre en accourant sur place et en repoussant sans pitié tous ceux qui s'y trouvent, en se servant pour cela de leurs dagues et de leurs lances. Sous la grêle des coups de plat et des bâtons les juifs de la cime s'enfuient. Et ils voudraient se placer sur l'esplanade qui est au-dessous. Mais ceux qui y sont déjà ne cèdent pas et parmi ces gens s'allument des rixes féroces. Ils semblent tous fous.
277> Comme je l'ai dit l'an dernier, le Calvaire, à son sommet, a la forme d'un trapèze irrégulier, légèrement plus haut d'un côté, à partir duquel la montagne descend rapidement pour un peu plus de la moitié de sa hauteur. Sur cette petite place on a déjà préparé trois trous profonds tapissés de briques ou d'ardoises, creusés exprès, en somme. Tout près d'eux, il y a des pierres et de la terre, prêtes pour butter les croix. D'autres trous, par contre, ont été laissés pleins de pierres. On comprend qu'ils les vident d'une fois sur l'autre selon le nombre de ceux qui servent.
Sous la cime trapézoïdale, du côté où la montagne ne descend pas, il y a une sorte de plate-forme en pente douce qui forme une seconde petite place. De celle-ci partent deux larges sentiers qui côtoient la cime, de sorte que celle-ci est isolée et surélevée d'au moins deux mètres de tous les côtés.
Les soldats, qui ont repoussé la foule de la cime, apaisent, à coups persuasifs de lances, les rixes et dégagent le chemin pour que le cortège puisse passer sans encombre dans le bout de chemin qui reste, et ils restent là à faire la haie pendant que les trois condamnés, encadrés par les cavaliers, et protégés en arrière par l'autre demi-centurie, arrivent au point où ils doivent s'arrêter: au pied du plancher naturel, surélevé qui forme la cime du Golgotha.
Pendant que cela arrive, j'aperçois les Marie et un peu en arrière d'elles Jeanne de Chouza avec quatre autres des dames de tout à l'heure. Les autres se sont retirées et elles doivent l'avoir fait par elles-mêmes car Jonathas est là, derrière sa maîtresse. Il n'y a plus celle que nous appelons Véronique et que Jésus a appelée Nique, et sa servante manque aussi et aussi la dame toute voilée à laquelle les soldats obéirent. Je vois Jeanne, la vieille qu'on appelle Élise, Anne et deux que je ne saurais identifier. Derrière ces femmes et les Marie, je vois Joseph et Simon d'Alphée, et Alphée de Sara avec le groupe des bergers. Ils ont lutté avec ceux qui voulaient les repousser en les insultant, et la force de ces hommes, que multiplient leur amour et leur douleur, s'est montrée si violente qu'ils ont vaincu en se créant un demi-cercle libre contre les juifs lâches qui n'osent que lancer des cris de mort et tendre leurs poings. Mais rien de plus, car les bâtons des bergers sont noueux et lourds et la force et l'adresse ne manquent pas à ces preux. Et je ne me trompe pas de parler ainsi. Il faut un vrai courage pour rester aussi peu nombreux, connus comme galiléens ou fidèles au Galiléen, contre toute une population hostile. L'unique point, de tout le Calvaire, où on ne blasphème pas le Christ !
278> Le mont, des trois côtés qui descendent en pente douce vers la vallée, n'est qu'une fourmilière. La terre jaunâtre et nue ne se voit plus, et sous le soleil qui va et vient, paraît un pré fleuri de corolles de toutes les couleurs tant sont serrés les couvre-chefs et les manteaux des sadiques qui le couvrent. Au-delà du torrent, sur le chemin, une autre foule; au-delà des murs, une autre encore. Sur les terrasses les plus proches, une autre. Le reste de la ville nu... vide... silencieux. Tout est ici : tout l'amour et toute la haine. Tout le Silence qui aime et pardonne, toute la Clameur qui hait et lance des imprécations.
Pendant que les hommes préposés à l'exécution préparent leurs instruments en achevant de vider les trous, et que les condamnés attendent dans leur carré, les juifs réfugiés dans le coin opposé aux Marie les insultent. Ils insultent même la Mère : "À mort les galiléens ! À mort ! Galiléens ! Galiléens ! Maudits ! À mort le blasphémateur galiléen ! Clouez sur la croix même le sein qui l'a porté ! Loin d'ici les vipères qui enfantent les démons ! À mort ! Purifiez Israël des femmes qui s'allient au bouc !..."
Longin, qui est descendu de cheval, se tourne et voit la Mère... Il ordonne de faire cesser ce chahut. La demi-centurie, qui était derrière les condamnés, charge la racaille et désencombre complètement la seconde petite place, alors que les juifs s'échappent à travers la montagne en s'écrasant les uns les autres. Les onze cavaliers descendent aussi de cheval et l'un d'eux prend les onze chevaux en plus de celui du centurion et les mène à l'ombre, derrière la côte de la montagne.
Le centurion se dirige vers la cime. Jeanne de Chouza s'avance, l'arrête. Elle lui donne l'amphore et une bourse, et puis se retire en pleurant, pour aller vers le coin de la montagne avec les autres.
Là-haut, tout est prêt. On fait monter les condamnés. Jésus passe encore une fois près de la Mère qui pousse un gémissement qu'elle cherche à freiner en portant son manteau sur sa bouche. Les juges la voient et rient et se moquent d'elle.
Jean, le doux Jean, qui a un bras derrière les épaules de Marie pour la soutenir, se retourne avec un regard féroce, son œil en est phosphorescent. S'il ne devait pas protéger les femmes, je crois qu'il prendrait à la gorge quelqu'un de ces lâches.
À peine les condamnés sont-ils sur le plateau fatal que les soldats entourent la place de trois côtés. Il ne reste vide que celui qui surplombe.
Le centurion donne au Cyrénéen l'ordre de s'en aller et il s'en va de mauvaise grâce cette fois et je ne dirais pas par sadisme, mais par amour, si bien qu'il s'arrête près des galiléens en partageant avec eux les insultes dont la foule prodigue au petit nombre de fidèles au Christ. Les deux larrons jettent par terre leurs croix en blasphémant.
Du Prétoire au Calvaire
265> Après sa condamnation, Jésus reste ainsi, gardé par les soldats attendant la croix, pas plus d'une demie heure, peut-être encore moins aussi. Puis Longin, chargé de présider l'exécution, donne ses ordres.[1]
Mais avant que Jésus soit conduit dehors, sur le chemin, pour recevoir la croix et se mettre en marche, Longin l'a regardé deux ou trois fois avec une curiosité déjà nuancée de compassion et, avec le coup d'œil de quelqu'un habitué à certaines choses, il s'approche de Jésus avec un soldat et Lui offre pour le désaltérer une coupe de vin, je crois, car il coule d'une vraie gourde militaire un liquide d'un blond rosé clair. "Cela te fera du bien. Tu dois avoir soif et dehors, il y a du soleil, et la route est longue."
Mais Jésus répond : "Que Dieu te récompense de ta pitié, mais ne te prive pas."
"Mais moi, je suis sain et fort. ...Toi... Je ne me prive pas... Et puis volontiers je le ferais dans ce cas pour te réconforter... Une gorgée... pour me montrer que tu ne hais pas les païens."
Jésus ne refuse plus et boit une gorgée de la boisson. Il a les mains déjà déliées, comme il n'a plus le roseau ni la chlamyde et il peut le faire Lui-même. Ensuite il refuse, bien que la boisson fraîche et bonne devrait soulager la fièvre qui déjà se manifeste dans les traces rouges qui s'allument sur ses joues pâles et sur ses lèvres sèches et gercées.
"Prends, prends. C'est de l'eau et du miel. Cela soutient, désaltère... Tu me fais pitié... oui... pitié... Ce n'était pas Toi qu'il fallait tuer d'entre les hébreux... Hélas !... Moi, je ne te hais pas... et je chercherai à ne te faire souffrir que le nécessaire."
Mais Jésus ne recommence pas à boire... Il a vraiment soif... La soif terrible de ceux qui ont perdu du sang et des fiévreux... Il sait que ce n'est pas une boisson narcotinisée et il boirait volontiers. Mais il ne veut pas moins souffrir. Mais je comprends, comme je comprends ce que je dis grâce à une lumière intérieure que, plus que l'eau au miel, le réconforte la pitié du romain.
"Que Dieu te rende en bénédictions ce soulagement" dit-il ensuite. Et il a encore un sourire... un sourire déchirant avec sa bouche enflée, blessée, qu'il remue difficilement aussi parce que entre le nez et la pommette droite est fortement enflée la forte contusion du coup de bâton qu'il a reçu dans la cour intérieure après la flagellation.
266> Arrivent les deux larrons encadrés chacun par une décurie de soldats. C'est l'heure de partir. Longin donne les derniers ordres.
Une centurie est disposée sur deux rangs distants de trois mètres l'un de l'autre, et elle sort ainsi sur la place où une autre centurie a formé un carré pour repousser la foule afin qu'elle ne gêne pas le cortège. Sur la petite place, se trouvent déjà des hommes à cheval : une décurie de cavalerie avec un jeune gradé qui les commande et avec les enseignes. Un soldat à pied tient par la bride le cheval moreau [2] du centurion. Longin monte en selle et va à sa place à deux mètres en avant des onze cavaliers.
On apporte les croix : celles des deux larrons sont plus courtes. Celle de Jésus est beaucoup plus longue. Je dis que la pièce verticale n'a pas moins de quatre mètres. Je la vois apportée déjà formée.
J'ai lu à ce sujet, quand je lisais... c'est-à-dire il y a des années, que la croix fut formée en haut du Golgotha et que le long du chemin les condamnés portaient seulement les deux poteaux sur leurs épaules. C'est possible, mais moi, je vois une vraie croix bien formée, solide, avec les bras parfaitement encastrés dans la pièce principale et bien renforcée par des clous et des boulons. En fait, si on réfléchit qu'elle était destinée à soutenir le poids appréciable qu'est le corps d'un adulte et à le soutenir même dans les convulsions finales, appréciables aussi, on comprend qu'elle ne pouvait être montée sur le sommet étroit et incommode du Calvaire.[3]
Avant de donner la croix à Jésus, on Lui passe au cou l'écriteau avec la mention "Jésus le Nazaréen Roi des Juifs". La corde qui le soutient s'emmêle dans la couronne qui se déplace et griffe là où il n'y a pas déjà de griffures et pénètre en de nouveaux points en donnant une douleur nouvelle et en faisant de nouveau couler du sang. Les gens rient d'une joie sadique, insultent, blasphèment.
Maintenant ils sont prêts, et Longin donne l'ordre de marche : "D'abord le Nazaréen, derrière les deux larrons; une décurie autour de chacun, les sept autres décuries sur les ailes et comme renfort, et le responsable sera le soldat qui fait frapper à mort les condamnés".
Jésus descend les trois marches qui amènent du vestibule sur la place. Et il apparaît tout de suite avec évidence que Jésus est dans des conditions de grande faiblesse. Il vacille en descendant les trois marches, gêné par la croix qui repose sur son épaule toute écorchée, par l'écriteau qui se déplace devant Lui et dont la corde scie le cou, par les balancements qu'imprimé au corps la longue pièce de la croix qui saute sur les marches et sur les aspérités du sol.
267> Les juifs rient de le voir comme un homme ivre qui tâtonne et ils crient aux soldats: "Poussez-le. Faites-le tomber. Dans la poussière le blasphémateur !"
Mais les soldats font seulement ce qu'ils doivent faire, c'est-à-dire ordonnent au Condamné de se mettre au milieu du chemin et de marcher. Longin éperonne son cheval et le cortège se met lentement en mouvement.
Longin voudrait aussi faire vite en prenant le chemin le plus court pour aller au Golgotha car il n'est pas sûr de la résistance du Condamné. Mais la pègre déchaînée — et l'appeler ainsi, c'est encore un honneur — ne veut pas de cela. Ceux qui ont été les plus rusés sont déjà en avant, au carrefour où la route bifurque pour aller d'un côté vers les murs, de l'autre vers la ville. Ils s'agitent, crient quand ils voient Longin prendre la direction des murs. "Tu ne dois pas ! Tu ne dois pas ! C'est illégal ! La Loi dit que les condamnés doivent être vus par la ville où ils ont péché !" Les juifs, qui sont à la queue du cortège, comprennent que par devant on essaie de les frustrer d'un droit et ils unissent leurs cris à ceux de leurs collègues.
Par amour de la paix, Longin prend la route qui va vers la ville et en parcourt un tronçon. Mais il fait signe aussi à un décurion de venir près de lui (je dis décurion parce que c'est un gradé mais c'est peut-être quelqu'un que nous appellerions son officier d'ordonnance) et il lui dit doucement quelque chose. Celui-ci revient en arrière au trot, et à mesure qu'il rejoint le chef de chaque décurie il transmet l'ordre. Ensuite il revient vers Longin pour dire que c'est fait. Enfin il rejoint sa place primitive dans le rang derrière Longin.
Jésus avance haletant. Chaque trou de la route est un piège pour son pied qui vacille et une torture pour ses épaules écorchées, pour sa tête couronnée d'épines sur laquelle descend à pic un soleil exagérément chaud qui de temps à autre se cache derrière un rideau de nuages de plomb, mais qui, même caché, ne cesse pas de brûler. Jésus est congestionné par la fatigue, par la fièvre et par la chaleur. Je pense que même la lumière et les cris doivent le tourmenter. Et s'il ne peut se boucher les oreilles pour ne pas entendre ces cris déchaînés, il ferme à demi les yeux pour ne pas voir la route éblouissante de soleil... Mais il doit aussi les rouvrir parce qu'il bute contre les pierres et contre les trous et chaque fois qu'il bute, c'est une douleur car il remue brusquement la croix qui heurte la couronne, qui se déplace sur l'épaule écorchée, élargit la plaie et augmente la douleur.
268> Les juifs ne peuvent plus le frapper directement; mais il arrive encore quelques pierres et quelques coups de bâton, les premières spécialement dans les petites places remplies par la foule, les seconds au contraire dans les tournants, dans les petites rues où l'on monte et descend des marches tantôt une, tantôt trois, tantôt davantage, à cause des dénivellations continuelles de la ville. Là, nécessairement, le cortège ralentit et il y a toujours quelque volontaire qui défie les lances romaines pour donner un nouveau coup au chef d'œuvre de torture qu'est désormais Jésus.
Les soldats le défendent comme ils peuvent. Mais même en le défendant ils le frappent parce que les longs manches des lances, brandies en aussi peu d'espace, le heurtent et le font buter. Mais arrivés à un certain point les soldats font une manœuvre impeccable et, malgré les cris et les menaces, le cortège dévie brusquement par un chemin qui va directement vers les murs, en descendant, un chemin qui abrège beaucoup la route vers le lieu du supplice.
Jésus halète toujours plus. La sueur coule sur son visage en même temps que le sang qui coule des blessures de la couronne d'épines. La poussière se colle sur ce visage trempé et le maculent de taches étranges, car il y a aussi du vent maintenant. Des coups de vent syncopés à longs intervalles où retombe la poussière que la foule a soulevée en tourbillons, qui amènent des détritus dans les yeux et dans la gorge.
À la Porte Judiciaire sont déjà entassés quantité de gens, ceux qui, prévoyants, se sont choisis de bonne heure une bonne place pour voir. Mais un peu avant d'y arriver, Jésus a déjà failli tomber. Seule la prompte intervention d'un soldat, sur lequel Lui va presque tomber, empêche Jésus d'aller par terre. La populace rit et crie : "Laissez-le ! Il disait à tous : "Levez-vous". Qu'il se lève Lui, maintenant..."
Au-delà de la porte, il y a un torrent et un petit pont. Nouvelle fatigue pour Jésus d'aller sur ces planches disjointes sur lesquelles rebondit plus fortement le long bois de la croix. Et nouvelle mine de projectiles pour les juifs. Les pierres du torrent volent et frappent le pauvre Martyr...
Alors commence la montée du Calvaire. Un chemin nu, sans un brin d'ombre, avec des pierres disjointes, qui attaque directement la montée.
269> Ici aussi, à l'époque où je lisais, j'ai lu que le Calvaire n'avait que quelques mètres de hauteur. Possible. Ce n'est certainement pas une montagne. Mais c'est une colline, et certainement pas plus basse qu'est par rapport à Lungami le mont aux Croix, là où se trouve la basilique de Saint Miniato à Florence. On dira : "Oh ! c'est peu de chose !" Oui, pour quelqu'un qui est sain et fort c'est peu de chose. Mais il suffit d'avoir le cœur faible pour sentir si c'est peu ou beaucoup !... Je sais qu'après avoir eu le cœur malade, même alors qu'il s'agissait d'une manière bénigne, je ne pouvais gravir cette pente sans souffrir beaucoup et je devais m'arrêter à chaque instant, et je n'avais pas de fardeau sur les épaules. Et je crois que Jésus avait le cœur très malade surtout après la flagellation et la sueur de sang... et je ne contemple rien autre que ces deux chose ?
Jésus éprouve donc une douleur aiguë dans la montée et avec le poids de la croix qui, longue comme elle est, doit être très lourde.
Il trouve une pierre qui dépasse et, épuisé comme il l'est, il lève trop peu le pied, il bute et tombe sur le genou droit réussissant pourtant à se relever à l'aide de la main gauche. La foule pousse des cris de joie... Il se relève, il avance de plus en plus courbé et haletant, congestionné, fiévreux...
L'écriteau, qui cahote devant Lui, Lui gêne la vue et son long vêtement, maintenant qu'il avance courbé, traîne par terre par devant et gêne sa marche. Il bute de nouveau et tombe sur les deux genoux, en se blessant de nouveau là où il est déjà blessé, et .la croix qui échappe de ses mains et tombe, après Lui avoir frappé fortement le dos, l'oblige à se pencher pour la relever et à peiner pour la mettre de nouveau sur ses épaules. Pendant qu'il le fait on voit nettement sur son épaule droite la plaie faite par le frottement de la croix, qui a ouvert les plaies nombreuses de la flagellation et en a fait une seule qui transsude de l'eau et du sang, de sorte que la tunique est toute tachée à cet endroit. Les gens applaudissent même, heureux de ces chutes si mauvaises.
Longin incite à se hâter, et les soldats, à coups de plat de dague, invitent le pauvre Jésus à avancer. On reprend la marche avec une lenteur de plus en plus grande malgré tous les efforts.
Jésus semble tout à fait ivre tant sa marche est chancelante et il heurte tantôt l'un tantôt l'autre des deux rangs de soldats, occupant toute la route. Les gens le remarquent et crient : "Sa doctrine Lui est montée à la tête. Vois, vois comme il titube !" Et d'autres, qui ne sont pas du peuple, mais des prêtres et des scribes, ricanent : "Non ! Ce sont les festins dans la maison de Lazare qui encore Lui montent à la tête. Ils étaient bons ? Maintenant mange notre nourriture..." et d'autres phrases semblables.
270> Longin, qui se tourne de temps en temps, a pitié et commande une halte de quelques minutes. Et il est tellement insulté par la populace que le centurion ordonne aux troupes de charger. Et la foule lâche, devant les lances qui brillent et menacent, s'éloigne en criant et en descendant ça et là sur la montagne.
C'est ici que je revois sortir de derrière des décombres, peut-être de quelque muret éboulé, le petit groupe des bergers. Désolés, bouleversés, poussiéreux, déchirés, ils appellent à eux le Maître par la force de leurs regards. Et Lui tourne la tête, les voit... Il les fixe comme si c'était des visages d'anges, paraît se désaltérer et se fortifier de leurs pleurs, et il sourit... On redonne l'ordre d'avancer et Jésus passe juste devant eux et entend leurs pleurs angoissés. Il tourne avec difficulté la tête de sous le joug de la croix et leur sourit de nouveau...
Ses réconforts... Dix visages... une halte sous le soleil brûlant...
Et puis, tout de suite, la douleur de la troisième chute complète. Et cette fois, ce n'est pas qu'il bute. Mais il tombe par un soudain fléchissement de ses forces, par une syncope. Il s'allonge en se frappant le visage sur les pierres disjointes, restant dans la poussière, sous la croix retombée sur Lui. Les soldats essaient de le relever. Mais comme il paraît mort, ils vont le rapporter au centurion. Pendant qu'ils vont et viennent Jésus revient à Lui, et lentement, avec l'aide de deux soldats dont l'un relève la croix et l'autre aide le Condamné à se mettre debout, il reprend sa place. Mais il est vraiment épuisé.
"Arrangez-vous pour qu'il ne meure que sur la croix !" crie la foule.
"Si vous le faites mourir avant, vous en répondrez au Proconsul, souvenez-vous-en. Le coupable doit arriver vivant au supplice" disent les chefs des scribes aux soldats.
Ceux-ci les foudroient de leurs regards féroces mais, par discipline, ne parlent pas.
Longin, cependant, a la même peur que les juifs que le Christ meure en route et il ne veut pas avoir d'ennuis. Sans avoir besoin que quelqu'un le lui rappelle, il sait quel est son devoir de préposé à l'exécution et il y pourvoit. Il y pourvoit en désorientant les juifs qui sont déjà accourus en avant par la route qu'ils ont rejointe de tous les côtés de la montagne en suant, en se griffant pour passer à travers les buissons rares et épineux du mont aride et brûlé, en tombant sur les détritus qui l'encombrent comme si c'était un lieu de déblai pour Jérusalem, sans sentir d'autre peine que celle de perdre un halètement du Martyr, un de ses regards douloureux, un geste même involontaire de souffrance, et sans d'autre peur que celle de ne pas arriver à avoir une bonne place. Longin donne donc l'ordre de prendre le chemin le plus long qui monte en lacets au sommet et qui pour cela est beaucoup moins rapide.
271> Il semble que ce soit un sentier qui, à force d'être parcouru, soit devenu un chemin suffisamment pratique. Ce croisement de chemin avec l'autre arrive environ à moitié de la montagne. Mais je vois que plus haut, par quatre fois, la route directe se trouve coupée par celle qui monte avec beaucoup moins de pente et qui par compensation est beaucoup plus longue. Et sur cette route, il y a des gens qui montent mais qui ne participent pas à l'indigne chahut des obsédés qui suivent Jésus pour jouir de ses tourments : des femmes pour la plupart, en pleurs et voilées, et quelques petits groupes d'hommes très peu nombreux en vérité, plus en avant de beaucoup que les femmes, qui vont disparaître à la vue quand, en continuant, le chemin fait le tour de la montagne. Ici le Calvaire a une sorte de pointe faite en museau d'un côté alors que de l'autre elle tombe à pic. Les hommes disparaissent derrière la pointe rocheuse et je les perds de vue.
Les gens qui suivaient Jésus hurlent de rage. C'était plus beau, pour eux, de le voir tomber. Avec des imprécations obscènes au Condamné et à ceux qui le conduisent, ils se mettent en partie à suivre le cortège judiciaire et en partie montent presque en courant par la route rapide pour se dédommager de leur déception par une excellente place sur le sommet.
Les femmes, qui s'avancent en pleurant, se retournent en entendant les cris, et voient que le cortège tourne de ce côté. Elles s'arrêtent alors en s'adossant au mont, craignant d'être jetées en bas par les juifs violents. Elles abaissent encore plus leurs voiles sur leurs visages et il y en a une qui est complètement voilée comme une musulmane, ne laissant libres que ses yeux très noirs. Elles sont vêtues très richement et ont pour les défendre un vieil homme robuste dont, enveloppé dans son manteau comme il l'est, je ne distingue pas le visage. Je ne vois que sa longue barbe plutôt blanche que noire qui sort de son manteau foncé.
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Quand Jésus arrive à leur hauteur elles sanglotent plus fort et se courbent en profondes salutations. Puis elles s'avancent résolument. Les soldats voudraient les repousser avec leurs lances, mais celle qui est couverte comme une musulmane écarte un instant son voile devant l'enseigne arrivé à cheval pour voir ce que c'est que ce nouvel obstacle, et il donne l'ordre de la faire passer. 272> Je ne puis voir son visage ni son vêtement, car elle a déplacé son voile avec la rapidité d'un éclair et son habit est complètement caché par un manteau qui arrive jusqu'à terre, lourd, fermé complètement par une série de boucles. La main, qui pour un instant sort de dessous pour déplacer le voile, est blanche et belle, et c'est avec ses yeux noirs l'unique chose que l'on voit de cette grande matrone certainement influente puisque l'officier de Longin lui obéit ainsi.
Elles s'approchent de Jésus en pleurant et s'agenouillent à ses pieds pendant que Lui s'arrête haletant... et pourtant il sait encore sourire à ces pieuses femmes et à l'homme qui les escorte qui se découvre pour montrer qu'il est Jonathas. Mais celui-ci, les gardes ne le font pas passer, seulement les femmes. L'une d'elles est Jeanne de Chouza. Elle est plus défaite que quand elle était mourante. De rouge, elle n'a que les traces de ses pleurs et puis c'est tout un visage de neige avec ses doux yeux noirs qui, ainsi brouillés comme ils le sont, sont devenus d'un violet foncé comme certaines fleurs. Elle a dans les mains une amphore d'argent et l'offre à Jésus, mais Lui refuse. D'ailleurs son essoufflement est si grand qu'il ne pourrait même pas boire. De la main gauche, il s'essuie la sueur et le sang qui Lui tombe dans les yeux, qui, coulant le long de ses joues rouges et de son cou par les veines gonflées dans le battement essoufflé du cœur, trempe tout son vêtement sur la poitrine.
Une autre femme, qui a près d'elle une jeune servante avec un coffret dans les bras, l'ouvre, en tire un linge de lin très blanc, carré, et l'offre au Rédempteur. Il l'accepte et comme il ne peut avec une seule main le faire par Lui-même, la femme pleine de pitié l'aide, en faisant attention de ne pas heurter la couronne, à le poser sur son visage. Jésus presse le linge frais sur son pauvre visage et l'y tient comme s'il trouvait un grand réconfort. Puis il rend le linge et parle : "Merci Jeanne, merci Nique... Sara... Marcella... Élise... Lidia... Anne... Valeria... et toi... Mais... ne pleurez pas... sur Moi... filles de... Jérusalem... mais sur les péchés... les vôtres et ceux... de votre ville... Bénis... Jeanne... de n'avoir...plus d'enfants... Vois... c'est une pitié de Dieu... de ne pas... de ne pas avoir d'enfants... car... ils souffrent de... cela. Et toi aussi... Élisabeth... Mieux... comme cela a été... que parmi les déicides... Et vous... mères... pleurez sur... vos fils, car... cette heure ne passera pas... sans châtiment... Et quel châtiment, s'il en est ainsi pour... l'Innocent... Vous pleurerez alors... d'avoir conçu... allaité et... d'avoir encore... vos fils... Les mères... de ce moment-là... pleureront parce que... en vérité, je vous le dis... qu'il sera heureux... celui qui alors... tombera... sous les décombres... le premier. Je vous bénis... Allez... à la maison... priez... pour Moi. Adieu, Jonathas... éloigne-les..."
273> Et au milieu d'un cri aigu de pleurs féminins et d'imprécations juives, Jésus se remet en marche.
Jésus est de nouveau trempé de sueur. Les soldats aussi suent et les deux autres condamnés, car le soleil de ce jour d'orage est brûlant comme la flamme et le flanc de la montagne devenu brûlant lui aussi s'ajoute à la chaleur du soleil. Que devait être l'effet de ce soleil sur le vêtement de laine de Jésus, en contact avec les blessures des fouets, il est facile de l'imaginer et d'en être horrifié... Mais Lui ne profère pas une plainte. Seulement, bien que la route soit beaucoup moins rapide et n'ait pas ces pierres disjointes, si dangereuses pour son pied qui traîne maintenant, Jésus titube toujours plus fort, allant heurter un rang de soldats puis le rang opposé, et fléchissant de plus en plus vers la terre.
Ils pensent supprimer cet inconvénient en Lui passant une corde à la taille et en la tenant par les deux bouts comme si c'étaient des rênes. Oui, cela le soutient, mais ne Lui enlève pas son fardeau. Au contraire, la corde en heurtant la croix, la déplace continuellement sur l'épaule et la fait frapper la couronne qui désormais a fait du front de Jésus un tatouage sanglant. De plus, la corde frotte la taille où se trouvent tant de blessures et certainement doit les ouvrir de nouveau. Aussi la tunique blanche se colore à la taille d'un rosé pâle. Pour l'aider, ils le font souffrir plus encore.
Le chemin continue, il fait le tour de la montagne, revient presque en avant vers la route rapide. Là se trouve Marie avec Jean. Je dirais que Jean l'a amenée en cet endroit ombragé, derrière la pente de la montagne, pour qu'elle se refasse un peu. C'est l'endroit le plus escarpé de la montagne. Il n'y a que ce chemin qui la côtoie. Au-dessous la côte descend rapidement et au-dessus la pente est aussi forte. À cause de cela les cruels la négligent. Là il y a de l'ombre, car je dirais que c'est le septentrion, et Marie, adossée comme elle l'est à la montagne, est à l'abri du soleil. Elle se tient debout appuyée au flanc de la montagne mais elle est déjà épuisée. Elle aussi halète, pâle comme une morte dans son vêtement bleu très foncé, presque noir.
274> Jean la regarde avec une pitié désolée. Lui aussi a perdu toute trace de couleur et il est terreux, avec deux yeux las et écarquillés, dépeigné, les joues creusées comme s'il avait été malade. Les autres femmes : Marie et Marthe de Lazare, Marie d'Alphée et de Zébédée, Suzanne de Cana, la maîtresse de la maison et d'autres encore que je ne connais pas, sont au milieu du chemin et elles regardent si le Sauveur arrive. Ayant vu que Longin arrive, elles accourent près de Marie pour lui donner la nouvelle. Marie, soutenue par le coude par Jean, se détache, majestueuse dans sa douleur, de la côte du mont et se met résolument au milieu du chemin, en ne s'écartant qu'à l'arrivée de Longin qui, du haut de son cheval, regarde la femme pâle et celui qui l'accompagne, blond, pâle, aux doux yeux de ciel comme elle. Et Longin hoche la tête pendant qu'il la dépasse suivi des onze cavaliers.
Marie essaie de passer entre les soldats à pied mais ceux-ci, qui ont chaud et sont pressés, cherchent à la repousser avec leurs lances, d'autant plus que du chemin pavé volent des pierres pour protester contre tant de pitié. Ce sont encore les juifs qui lancent encore des imprécations à cause de l'arrêt causé par les pieuses femmes et disent : "Vite ! Demain c'est Pâque. Il faut tout finir avant le soir ! Complices qui méprisez notre Loi ! Oppresseurs ! A mort les envahisseurs et leur Christ ! Ils l'aiment ! Voyez comme ils l'aiment ! Mais prenez-le ! Mettez-le dans votre Ville maudite ! Nous vous le cédons ! Nous n'en voulons pas ! Les charognes aux charognes ! La lèpre aux lépreux !"
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Longin se lasse et éperonne son cheval, suivi des dix lanciers, contre la canaille qui l'insulte et qui fuit une seconde fois. C'est en le faisant qu'il voit une charrette arrêtée, montée certainement des cultures maraîchères qui sont au pied de la montagne et qui attend avec son chargement de salades que la foule soit passée pour descendre vers la ville. Je pense qu'un peu de curiosité chez le Cyrénéen et ses fils l'ont fait monter jusque là, car il n'était vraiment pas nécessaire pour lui de le faire. Les deux fils, allongés sur le tas de légumes, regardent et rient après les juifs en fuite. L'homme, de son côté, un homme robuste sur les quarante-cinquante ans, debout près de l'âne qui effrayé veut reculer, regarde attentivement vers le cortège.
Longin le dévisage. Il pense qu'il peut lui être utile et lui ordonne : "Homme, viens ici." Le Cyrénéen fait semblant de ne pas entendre, mais avec Longin on ne plaisante pas. Il répète l'ordre de telle façon que l'homme jette les rênes à un de ses fils et s'approche du centurion.
275> "Tu vois cet homme ?" lui demande-t-il, et en parlant ainsi, il se retourne pour indiquer Jésus et il voit à son tour Marie qui supplie les soldats de la laisser passer. Il en a pitié et crie : "Faites passer la Femme." Puis il reprend à parler au Cyrénéen : "Il ne peut plus avancer ainsi chargé. Tu es fort. Prends sa croix et porte-la à sa place jusqu'à la cime."
"Je ne peux pas... J'ai l'âne... il est rétif... les garçons ne savent pas le retenir."
Mais Longin lui dit : "Va, si tu ne veux pas perdre l'âne et gagner vingt coups comme punition."
Le Cyrénéen n'ose plus réagir. Il crie aux garçons : "Allez vite à la maison et dites que j'arrive tout de suite" et puis il va vers Jésus.
Il le rejoint juste au moment où Jésus se tourne vers sa Mère que seulement alors il voit venir vers Lui, car il avance si courbé et les yeux presque fermés comme s'il était aveugle, et il crie : "Maman !"
C'est la première parole depuis qu'il est torturé qui exprime sa souffrance. Car dans cette parole, il y a la confession de tout et de toute sa terrible douleur de l'esprit, du moral et de la chair. C'est le cri déchiré et déchirant d'un enfant qui meurt seul, parmi les argousins et au milieu des pires tortures... et qui arrive à avoir peur même de sa propre respiration. C'est la plainte d'un enfant qui délire et que déchirent des visions de cauchemar... Et il veut la mère, la mère parce que seul son frais baiser calme l'ardeur de la fièvre, que sa voix fait fuir les fantômes, que son embrassement rend la mort moins effrayante...
I:\Maria Valtorta\SiteWeb\Publication\TOME 09\BaliseNoire.jpg Marie porte la main à son cœur comme si elle avait reçu un coup de poignard et vacille légèrement, mais elle se reprend, hâte sa marche et en allant les bras tendus vers son Fils martyrisé, elle crie : "Fils !" Mais elle le dit d'une telle manière que qui n'a pas un cœur d'hyène le sent se fendre par cette douleur.
Je vois que même parmi les romains il y a un mouvement de pitié... et pourtant ce sont des hommes d'armes habitués aux tueries, marqués de cicatrices - Mais la parole : "Maman !" et "Fils !" sont toujours les mêmes et pour tous ceux qui, je le répète, ne sont pas pires que des hyènes, et sont dites et comprises partout, et soulèvent partout des flots de pitié...
Le Cyrénéen a cette pitié... Il voit que Marie ne peut embrasser son Fils à cause de la croix, et qu'après avoir tendu les mains, elle les laisse retomber, persuadée de ne pouvoir le faire. Elle le regarde seulement, essayant de sourire de son sourire martyr, pour le réconforter alors que ses lèvres tremblantes boivent ses larmes. Lui, tordant la tête de sous le joug de la croix, cherche à son tour à lui sourire et à lui envoyer un baiser avec ses pauvres lèvres blessées et fendues par les coups et la fièvre. Le Cyrénéen, à ce spectacle, se hâte d'enlever la croix et il le fait avec la délicatesse d'un père, pour ne pas heurter la couronne et ne pas frotter les plaies.
276> Mais Marie ne peut baiser son Fils... L'attouchement, même le plus léger, serait une torture sur les chairs déchirées, et Marie s'en abstient. Et puis... les sentiments les plus saints ont une pudeur profonde et ils veulent le respect ou du moins la compassion. Ici, c'est la curiosité et surtout le mépris. Se baisent seulement leurs deux âmes angoissées.
Le cortège se remet en marche sous la poussée des flots d'un peuple furieux qui les presse, les sépare, en repoussant la Mère contre la montagne, l'exposant au mépris de tout un peuple... Maintenant, derrière Jésus, marche le Cyrénéen avec la croix. Et Jésus, libéré de ce fardeau, marche mieux. Il halète fortement, portant souvent la main à son cœur comme s'il avait une grande douleur, une blessure à la région sterno-cardiaque, et maintenant qu'il le peut, n'ayant plus les mains liées, il repousse les cheveux tombés en avant, tout gluants de sang et de sueur, jusque derrière les oreilles, pour sentir l'air sur son visage congestionné, il délace le cordon du cou qui le fait souffrir quand il respire... Mais sa marche est plus facile.
Marie s'est retirée avec les femmes. Elle suit le cortège une fois qu'il est passé, et ensuite, par un raccourci, elle se dirige vers le sommet de la montagne défiant les imprécations de la plèbe cannibale. Maintenant que Jésus est libre, le dernier lacet de la montagne est assez vite parcouru et ils sont proches de la cime toute remplie d'un peuple qui pousse des cris.
Longin s'arrête et il ordonne que tous, inexorablement, soient repoussés plus bas, pour dégager la cime, lieu de l'exécution. Une moitié de la centurie exécute l'ordre en accourant sur place et en repoussant sans pitié tous ceux qui s'y trouvent, en se servant pour cela de leurs dagues et de leurs lances. Sous la grêle des coups de plat et des bâtons les juifs de la cime s'enfuient. Et ils voudraient se placer sur l'esplanade qui est au-dessous. Mais ceux qui y sont déjà ne cèdent pas et parmi ces gens s'allument des rixes féroces. Ils semblent tous fous.
277> Comme je l'ai dit l'an dernier, le Calvaire, à son sommet, a la forme d'un trapèze irrégulier, légèrement plus haut d'un côté, à partir duquel la montagne descend rapidement pour un peu plus de la moitié de sa hauteur. Sur cette petite place on a déjà préparé trois trous profonds tapissés de briques ou d'ardoises, creusés exprès, en somme. Tout près d'eux, il y a des pierres et de la terre, prêtes pour butter les croix. D'autres trous, par contre, ont été laissés pleins de pierres. On comprend qu'ils les vident d'une fois sur l'autre selon le nombre de ceux qui servent.
Sous la cime trapézoïdale, du côté où la montagne ne descend pas, il y a une sorte de plate-forme en pente douce qui forme une seconde petite place. De celle-ci partent deux larges sentiers qui côtoient la cime, de sorte que celle-ci est isolée et surélevée d'au moins deux mètres de tous les côtés.
Les soldats, qui ont repoussé la foule de la cime, apaisent, à coups persuasifs de lances, les rixes et dégagent le chemin pour que le cortège puisse passer sans encombre dans le bout de chemin qui reste, et ils restent là à faire la haie pendant que les trois condamnés, encadrés par les cavaliers, et protégés en arrière par l'autre demi-centurie, arrivent au point où ils doivent s'arrêter: au pied du plancher naturel, surélevé qui forme la cime du Golgotha.
Pendant que cela arrive, j'aperçois les Marie et un peu en arrière d'elles Jeanne de Chouza avec quatre autres des dames de tout à l'heure. Les autres se sont retirées et elles doivent l'avoir fait par elles-mêmes car Jonathas est là, derrière sa maîtresse. Il n'y a plus celle que nous appelons Véronique et que Jésus a appelée Nique, et sa servante manque aussi et aussi la dame toute voilée à laquelle les soldats obéirent. Je vois Jeanne, la vieille qu'on appelle Élise, Anne et deux que je ne saurais identifier. Derrière ces femmes et les Marie, je vois Joseph et Simon d'Alphée, et Alphée de Sara avec le groupe des bergers. Ils ont lutté avec ceux qui voulaient les repousser en les insultant, et la force de ces hommes, que multiplient leur amour et leur douleur, s'est montrée si violente qu'ils ont vaincu en se créant un demi-cercle libre contre les juifs lâches qui n'osent que lancer des cris de mort et tendre leurs poings. Mais rien de plus, car les bâtons des bergers sont noueux et lourds et la force et l'adresse ne manquent pas à ces preux. Et je ne me trompe pas de parler ainsi. Il faut un vrai courage pour rester aussi peu nombreux, connus comme galiléens ou fidèles au Galiléen, contre toute une population hostile. L'unique point, de tout le Calvaire, où on ne blasphème pas le Christ !
278> Le mont, des trois côtés qui descendent en pente douce vers la vallée, n'est qu'une fourmilière. La terre jaunâtre et nue ne se voit plus, et sous le soleil qui va et vient, paraît un pré fleuri de corolles de toutes les couleurs tant sont serrés les couvre-chefs et les manteaux des sadiques qui le couvrent. Au-delà du torrent, sur le chemin, une autre foule; au-delà des murs, une autre encore. Sur les terrasses les plus proches, une autre. Le reste de la ville nu... vide... silencieux. Tout est ici : tout l'amour et toute la haine. Tout le Silence qui aime et pardonne, toute la Clameur qui hait et lance des imprécations.
Pendant que les hommes préposés à l'exécution préparent leurs instruments en achevant de vider les trous, et que les condamnés attendent dans leur carré, les juifs réfugiés dans le coin opposé aux Marie les insultent. Ils insultent même la Mère : "À mort les galiléens ! À mort ! Galiléens ! Galiléens ! Maudits ! À mort le blasphémateur galiléen ! Clouez sur la croix même le sein qui l'a porté ! Loin d'ici les vipères qui enfantent les démons ! À mort ! Purifiez Israël des femmes qui s'allient au bouc !..."
Longin, qui est descendu de cheval, se tourne et voit la Mère... Il ordonne de faire cesser ce chahut. La demi-centurie, qui était derrière les condamnés, charge la racaille et désencombre complètement la seconde petite place, alors que les juifs s'échappent à travers la montagne en s'écrasant les uns les autres. Les onze cavaliers descendent aussi de cheval et l'un d'eux prend les onze chevaux en plus de celui du centurion et les mène à l'ombre, derrière la côte de la montagne.
Le centurion se dirige vers la cime. Jeanne de Chouza s'avance, l'arrête. Elle lui donne l'amphore et une bourse, et puis se retire en pleurant, pour aller vers le coin de la montagne avec les autres.
Là-haut, tout est prêt. On fait monter les condamnés. Jésus passe encore une fois près de la Mère qui pousse un gémissement qu'elle cherche à freiner en portant son manteau sur sa bouche. Les juges la voient et rient et se moquent d'elle.
Jean, le doux Jean, qui a un bras derrière les épaules de Marie pour la soutenir, se retourne avec un regard féroce, son œil en est phosphorescent. S'il ne devait pas protéger les femmes, je crois qu'il prendrait à la gorge quelqu'un de ces lâches.
À peine les condamnés sont-ils sur le plateau fatal que les soldats entourent la place de trois côtés. Il ne reste vide que celui qui surplombe.
Le centurion donne au Cyrénéen l'ordre de s'en aller et il s'en va de mauvaise grâce cette fois et je ne dirais pas par sadisme, mais par amour, si bien qu'il s'arrête près des galiléens en partageant avec eux les insultes dont la foule prodigue au petit nombre de fidèles au Christ. Les deux larrons jettent par terre leurs croix en blasphémant.
Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Bonsoir
J'hésite à visionner le film de Mel Gibson,intitulé"La Passion de Jésus",qui, en fait, décrit par le menu les tortures physiques auxquelles a été soumis le Christ..
PS 2017:à ma désolation, on rappellera que Daesh crucifie des hommes et des femmes au moment où je vous parle...
J'hésite à visionner le film de Mel Gibson,intitulé"La Passion de Jésus",qui, en fait, décrit par le menu les tortures physiques auxquelles a été soumis le Christ..
PS 2017:à ma désolation, on rappellera que Daesh crucifie des hommes et des femmes au moment où je vous parle...
jacques58fan- Combat l'antechrist
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
La description de la Passion chez Catherine Emmerich, est plus axée sur Marie corédemptrice...
Le film, je ne l'ai pas apprécié, on ne ressent pas assez la divinité de Jésus... surtout dans sa Passion.
Le film, je ne l'ai pas apprécié, on ne ressent pas assez la divinité de Jésus... surtout dans sa Passion.
Henryk- Hosanna au plus haut des cieux!
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Re: Naissance de Jésus notre Seigneur, vision de Maria Valtorta
Naissance de Jésus notre Seigneur.
Vision du mardi 6 juin 1944
169> Je vois encore l'intérieur de ce pauvre refuge pierreux où, partageant le sort des animaux, Marie et Joseph ont trouvé asile.
Le petit feu sommeille ainsi que son gardien. Marie soulève doucement la tête de sa couche, et regarde. Elle voit Joseph, la tête inclinée sur la poitrine, comme s'il réfléchissait, et elle pense que la fatigue a triomphé de sa bonne volonté de rester éveillé. Elle sourit, d'un bon sourire. Faisant moins de bruit que ne peut en faire un papillon qui se pose sur une rose, elle s'assied, puis s'agenouille. Elle prie avec un sourire radieux sur le visage. Elle prie, les bras étendus non pas précisément en croix, mais presque, les paumes dirigées vers le haut et en avant, et elle ne paraît pas fatiguée de cette pose pénible. Puis, elle se prosterne, le visage contre le foin, dans une prière encore plus profonde. Une prière prolongée.
Joseph s'éveille. Il voit le feu presque mort et l'étable presque dans les ténèbres. Il jette une poignée de brindilles et la flamme se réveille. Il y ajoute des branches plus grosses, puis encore plus grosses car le froid doit être piquant, le froid de la nuit hivernale et tranquille qui pénètre partout dans ces ruines.
170> Le pauvre Joseph tout près comme il l'est de la porte - appelons ainsi l'ouverture que son manteau essaye d'obstruer - doit être gelé. Il approche les mains près de la flamme, défait ses sandales et approche ses pieds. Il se chauffe. Quand le feu est bien pris, et que sa clarté est assurée, il se tourne. Il ne voit rien, pas même cette blancheur du voile de Marie qui traçait une ligne claire sur le foin obscur. Il se lève et lentement s'approche de la couchette.
"Tu ne dors pas, Marie ?" demande-t-il. Il le demande trois fois, jusqu'à ce qu'elle en prenne conscience et réponde : "Je prie."
"Tu n'as besoin de rien ?"
"Non, Joseph."
"Essaie de dormir un peu, de reposer au moins."
"J'essaierai, mais la prière ne me fatigue pas."
"Adieu, Marie."
"Adieu, Joseph."
Marie reprend sa position. Joseph pour ne plus céder au sommeil s'agenouille près du feu et il prie. Il prie avec les mains qui lui couvrent le visage. Il ne les enlève que pour alimenter le feu et puis il revient à sa brûlante prière. À part les crépitements du bois et le bruit du sabot de l'âne, qui de temps en temps frappe le sol, on n'entend rien.
Un faisceau de lumière lunaire se glisse par une fissure du plafond et semble une lame immatérielle d'argent qui s'en va chercher Marie. Il s'allonge peu à peu à mesure que la lune s'élève dans le ciel et l'atteint finalement. Le voilà sur la tête de l'orante. Il la nimbe d'une blancheur éclatante.
Marie lève la tête comme pour un appel du ciel et elle s'agenouille de nouveau. Oh ! comme c'est beau ici ! Elle lève sa tête qui semble resplendir de la lumière blanche de la lune, et elle est transfigurée par un sourire qui n'est pas humain. Que voit-elle ? Qu'entend-elle ? Qu'éprouve-t-elle ? Il n'y a qu'elle qui pourrait dire ce qu'elle vit, entendit, éprouva à l'heure fulgurante de sa Maternité. Je me rends seulement compte qu'autour d'elle la lumière croit, croit, croit. On dirait qu'elle descend du Ciel, qu'elle émane des pauvres choses qui l'environnent, qu'elle émane d'elle surtout.
Son vêtement, d'azur foncé, a à présent la couleur d'un bleu d'une douceur céleste de myosotis, les mains et le visage semblent devenir azurés comme s'ils étaient sous le feu d'un immense et clair saphir. Cette couleur me rappelle, bien que plus légère, celle que je découvre dans la vision du saint Paradis et aussi celle de la vision de l'arrivée des Mages. Elle se diffuse surtout toujours plus sur les choses, les revêt, les purifie, leur communique sa splendeur.
171> La lumière se dégage toujours plus du corps de Marie, absorbe celle de la lune, on dirait qu'elle attire en elle tout ce qui peut arriver du ciel. Désormais, c'est elle qui est la Dépositaire de la Lumière, celle qui doit donner cette Lumière au monde. Et cette radieuse, irrésistible, incommensurable, éternelle, divine Lumière qui va être donnée au monde, s'annonce avec une aube, une diane, un éveil de la lumière, un chœur d'atomes lumineux qui grandit, s'étale comme une marée qui monte, monte en immenses volutes d'encens, qui descend comme un torrent, qui se déploie comme un voile...
La voûte, couverte de fissures, de toiles d'araignées, de décombres en saillie qui semblent miraculeusement équilibrées, noire, fumeuse, repoussante, semble la voûte d'une salle royale. Chaque pierre est un bloc d'argent, chaque fissure une clarté opaline, chaque toile d'araignée un baldaquin broché d'argent et de diamants. Un gros lézard, engourdi entre deux blocs de pierre, semble un collier d'émeraude oublié là, par une reine; une grappe de chauve-souris engourdies émettent une précieuse clarté d'onyx. Le foin qui pend de la mangeoire la plus haute n'est plus de l'herbe : ce sont des fils et des fils d'argent pur qui tremblent dans l'air avec la grâce d'une chevelure flottante.
La mangeoire inférieure, en bois grossier, est devenue un bloc d'argent bruni. Les murs sont couverts d'un brocart où la blancheur de la soie disparaît sous une broderie de perles en relief. Et le sol... qu'est-ce maintenant le sol ? Un cristal illuminé par une lumière blanche. Les saillies semblent des roses lumineuses jetées sur le sol en signe d'hommage; et les trous, des coupes précieuses, d'où se dégagent des arômes et des parfums.
Et la lumière croît de plus en plus. L'œil ne peut la supporter. En elle, comme absorbée par un voile de lumière incandescente, disparaît la Vierge... et en émerge la Mère[1].
172> Oui, quand la lumière devient supportable pour mes yeux, je vois Marie avec son Fils nouveau-né dans ses bras. Un petit Bébé rose et grassouillet qui s'agite et se débat avec ses mains grosses comme un bouton de rose et des petits pieds qui iraient bien dans le cœur d'une rose; qui vagit d'une voix tremblotante exactement comme celle d'un petit agneau qui vient de naître, ouvrant la bouche, rouge comme une petite fraise de bois, montrant sa petite langue qui bat contre son palais couleur de rose; qui remue sa petite tête si blonde qu'on la croirait sans cheveux, une petite tête ronde que la Maman soutient dans le creux de l'une de ses mains pendant qu'elle regarde son Bébé et l'adore, pleurant et riant tout ensemble et qu'elle s'incline pour y déposer un baiser, non pas sur la tête innocente, mais sur le milieu de la poitrine sous lequel se trouve le petit cœur, qui bat, qui bat pour nous... là où un jour sera la blessure. Elle la panse d'avance, cette blessure, sa Maman, avec son pur baiser d'Immaculée.
Le bœuf éveillé par la clarté se dresse avec un grand bruit de sabots et il mugit. L'âne relève la tête et brait. C'est la lumière qui les réveille, mais j'aime penser qu'ils ont voulu saluer leur Créateur pour eux-mêmes et pour tous les animaux.
Joseph aussi, qui comme extasié priait avec autant d'intensité qu'il s'était abstrait de tout ce qui l'entourait, se secoue et entre ses doigts dont il se couvre le visage, il voit filtrer la lumière étrange. Il découvre le visage, lève la tête, se retourne. Le bœuf debout, lui cache Marie, mais elle l'appelle : "Joseph, viens."
Joseph accourt et devant le spectacle s'arrête comme foudroyé de révérence, il va tomber à genoux là où il se trouve. Mais Marie insiste : "Viens, Joseph." Elle appuie la main gauche sur le foin et tenant de la main droite l'Enfant qu'Elle serre sur son cœur, elle se lève et se dirige vers Joseph qui marche hésitant, pris entre le désir d'avancer et la peur d'être irrespectueux.
Au pied de la couche les deux époux se rencontrent et se regardent en pleurant de bonheur.
"Viens" dit Marie "offrons Jésus au Père."
Pendant que Joseph s'agenouille, elle, debout, entre les deux poutres qui soutiennent la voûte, élève sa Créature entre ses bras et dit : "Me voici. C'est pour Lui, ô Dieu, que je te dis cette parole. Me voici pour faire ta volonté[2]. Et avec Lui, moi, Marie et Joseph mon époux. Voici tes serviteurs, Seigneur. Que soit accomplie par nous, à toute heure et en toute occasion, ta volonté pour ta gloire et ton amour." Puis Marie se penche et dit : "Prends, Joseph" et Elle offre l'Enfant.
"Moi ! À Moi ! Oh ! Non ! Je ne suis pas digne !" Joseph est tout effrayé, anéanti à l'idée de devoir toucher Dieu.
Mais Marie insiste en souriant : "Tu en es bien digne. Personne ne l'est plus que toi. C'est pour cela que Dieu t'a choisi. Prends-le, Joseph, et tiens-le pendant que je cherche les langes."
173> Joseph, rouge comme la pourpre, avance les bras et prend le petit bourgeon de chair qui crie parce qu'il a froid. Quand il l'a entre les bras, il ne persiste pas dans l'intention de le tenir par respect éloigné de lui. Il le serre contre son cœur et éclatant en sanglots : "Oh ! Seigneur ! Mon Dieu !" et il se penche pour baiser ses petits pieds et les sent glacés. Alors, il s'assoit sur le sol, le serre sur son sein. Avec son habit marron, avec ses mains il s'ingénie à le couvrir, à le réchauffer, à le défendre contre la bise nocturne. Il voudrait bien aller du côté du feu, mais là il y a un courant d'air qui entre par la porte. Mieux vaut rester où il est. Il vaut mieux même aller entre les deux animaux qui les protégeront du courant d'air et donneront un peu de chaleur. Il va se mettre entre le bœuf et l'âne avec les épaules tournées vers la porte, penché sur le Nouveau-né pour lui faire de sa poitrine une niche dont les parois sont une tête grise aux longues oreilles et un grand museau blanc aux naseaux fumants et aux bons yeux humides.
Marie a ouvert le coffre et en a tiré les linges et les langes. Elle est allée près du feu pour les réchauffer. La voilà qui va vers Joseph et enveloppe le Bébé dans les linges tiédis, puis elle protège la petite tête avec son voile. "Où allons-nous le mettre maintenant ?" dit-elle.
Joseph regarde autour, réfléchit... "Attends, dit-il. Poussons plus loin les deux animaux et leur foin. Tirons en bas le foin de la mangeoire qui est plus haut et mettons-le ici à l'intérieur. Le bord de cette mangeoire le protégera de l'air, le foin lui fera un oreiller et le bœuf par son souffle le réchauffera un peu." Et Joseph se met à l'ouvrage, pendant que Marie berce son Petit en le serrant sur son cœur et en appuyant sa joue sur la petite tête pour la réchauffer.
Joseph ravive le feu sans épargner le bois pour faire une belle flamme. Il réchauffe le foin et peu à peu le sèche et le met sur le sein pour l'empêcher de refroidir. Puis, quand il en a assez amoncelé pour faire un petit matelas à l'Enfant, il va à la mangeoire et l'arrange pour en faire un berceau. "C'est prêt, dit-il. Maintenant il faudrait bien une couverture pour empêcher le foin de le piquer, et pour le couvrir..."
"Prends mon manteau" dit Marie.
"Tu auras froid."
174> "Oh ! cela ne fait rien ! La couverture est trop rugueuse. Le manteau est doux et chaud. Je n'ai pas du tout froid. Mais que Lui ne souffre plus."
Joseph prend l'ample manteau de moelleuse laine bleue sombre et l'arrange en double sur le foin, avec un pli qui penche hors de la crèche. Le premier lit du Sauveur est prêt.
Et la Mère, de sa douce démarche ondoyante, le porte et le dépose, le recouvre avec le pli du manteau qu'elle amène aussi autour de la tête nue qui enfonce dans le foin, à peine protégé des piqûres par le mince voile de Marie. Il ne reste à découvert que le petit visage gros comme le poing, et les deux, penchés sur la crèche, radieux, le regardent dormir son premier sommeil. La chaleur des langes et du foin a arrêté ses pleurs et apporté le sommeil au doux Jésus.
Vision du mardi 6 juin 1944
169> Je vois encore l'intérieur de ce pauvre refuge pierreux où, partageant le sort des animaux, Marie et Joseph ont trouvé asile.
Le petit feu sommeille ainsi que son gardien. Marie soulève doucement la tête de sa couche, et regarde. Elle voit Joseph, la tête inclinée sur la poitrine, comme s'il réfléchissait, et elle pense que la fatigue a triomphé de sa bonne volonté de rester éveillé. Elle sourit, d'un bon sourire. Faisant moins de bruit que ne peut en faire un papillon qui se pose sur une rose, elle s'assied, puis s'agenouille. Elle prie avec un sourire radieux sur le visage. Elle prie, les bras étendus non pas précisément en croix, mais presque, les paumes dirigées vers le haut et en avant, et elle ne paraît pas fatiguée de cette pose pénible. Puis, elle se prosterne, le visage contre le foin, dans une prière encore plus profonde. Une prière prolongée.
Joseph s'éveille. Il voit le feu presque mort et l'étable presque dans les ténèbres. Il jette une poignée de brindilles et la flamme se réveille. Il y ajoute des branches plus grosses, puis encore plus grosses car le froid doit être piquant, le froid de la nuit hivernale et tranquille qui pénètre partout dans ces ruines.
170> Le pauvre Joseph tout près comme il l'est de la porte - appelons ainsi l'ouverture que son manteau essaye d'obstruer - doit être gelé. Il approche les mains près de la flamme, défait ses sandales et approche ses pieds. Il se chauffe. Quand le feu est bien pris, et que sa clarté est assurée, il se tourne. Il ne voit rien, pas même cette blancheur du voile de Marie qui traçait une ligne claire sur le foin obscur. Il se lève et lentement s'approche de la couchette.
"Tu ne dors pas, Marie ?" demande-t-il. Il le demande trois fois, jusqu'à ce qu'elle en prenne conscience et réponde : "Je prie."
"Tu n'as besoin de rien ?"
"Non, Joseph."
"Essaie de dormir un peu, de reposer au moins."
"J'essaierai, mais la prière ne me fatigue pas."
"Adieu, Marie."
"Adieu, Joseph."
Marie reprend sa position. Joseph pour ne plus céder au sommeil s'agenouille près du feu et il prie. Il prie avec les mains qui lui couvrent le visage. Il ne les enlève que pour alimenter le feu et puis il revient à sa brûlante prière. À part les crépitements du bois et le bruit du sabot de l'âne, qui de temps en temps frappe le sol, on n'entend rien.
Un faisceau de lumière lunaire se glisse par une fissure du plafond et semble une lame immatérielle d'argent qui s'en va chercher Marie. Il s'allonge peu à peu à mesure que la lune s'élève dans le ciel et l'atteint finalement. Le voilà sur la tête de l'orante. Il la nimbe d'une blancheur éclatante.
Marie lève la tête comme pour un appel du ciel et elle s'agenouille de nouveau. Oh ! comme c'est beau ici ! Elle lève sa tête qui semble resplendir de la lumière blanche de la lune, et elle est transfigurée par un sourire qui n'est pas humain. Que voit-elle ? Qu'entend-elle ? Qu'éprouve-t-elle ? Il n'y a qu'elle qui pourrait dire ce qu'elle vit, entendit, éprouva à l'heure fulgurante de sa Maternité. Je me rends seulement compte qu'autour d'elle la lumière croit, croit, croit. On dirait qu'elle descend du Ciel, qu'elle émane des pauvres choses qui l'environnent, qu'elle émane d'elle surtout.
Son vêtement, d'azur foncé, a à présent la couleur d'un bleu d'une douceur céleste de myosotis, les mains et le visage semblent devenir azurés comme s'ils étaient sous le feu d'un immense et clair saphir. Cette couleur me rappelle, bien que plus légère, celle que je découvre dans la vision du saint Paradis et aussi celle de la vision de l'arrivée des Mages. Elle se diffuse surtout toujours plus sur les choses, les revêt, les purifie, leur communique sa splendeur.
171> La lumière se dégage toujours plus du corps de Marie, absorbe celle de la lune, on dirait qu'elle attire en elle tout ce qui peut arriver du ciel. Désormais, c'est elle qui est la Dépositaire de la Lumière, celle qui doit donner cette Lumière au monde. Et cette radieuse, irrésistible, incommensurable, éternelle, divine Lumière qui va être donnée au monde, s'annonce avec une aube, une diane, un éveil de la lumière, un chœur d'atomes lumineux qui grandit, s'étale comme une marée qui monte, monte en immenses volutes d'encens, qui descend comme un torrent, qui se déploie comme un voile...
La voûte, couverte de fissures, de toiles d'araignées, de décombres en saillie qui semblent miraculeusement équilibrées, noire, fumeuse, repoussante, semble la voûte d'une salle royale. Chaque pierre est un bloc d'argent, chaque fissure une clarté opaline, chaque toile d'araignée un baldaquin broché d'argent et de diamants. Un gros lézard, engourdi entre deux blocs de pierre, semble un collier d'émeraude oublié là, par une reine; une grappe de chauve-souris engourdies émettent une précieuse clarté d'onyx. Le foin qui pend de la mangeoire la plus haute n'est plus de l'herbe : ce sont des fils et des fils d'argent pur qui tremblent dans l'air avec la grâce d'une chevelure flottante.
La mangeoire inférieure, en bois grossier, est devenue un bloc d'argent bruni. Les murs sont couverts d'un brocart où la blancheur de la soie disparaît sous une broderie de perles en relief. Et le sol... qu'est-ce maintenant le sol ? Un cristal illuminé par une lumière blanche. Les saillies semblent des roses lumineuses jetées sur le sol en signe d'hommage; et les trous, des coupes précieuses, d'où se dégagent des arômes et des parfums.
Et la lumière croît de plus en plus. L'œil ne peut la supporter. En elle, comme absorbée par un voile de lumière incandescente, disparaît la Vierge... et en émerge la Mère[1].
172> Oui, quand la lumière devient supportable pour mes yeux, je vois Marie avec son Fils nouveau-né dans ses bras. Un petit Bébé rose et grassouillet qui s'agite et se débat avec ses mains grosses comme un bouton de rose et des petits pieds qui iraient bien dans le cœur d'une rose; qui vagit d'une voix tremblotante exactement comme celle d'un petit agneau qui vient de naître, ouvrant la bouche, rouge comme une petite fraise de bois, montrant sa petite langue qui bat contre son palais couleur de rose; qui remue sa petite tête si blonde qu'on la croirait sans cheveux, une petite tête ronde que la Maman soutient dans le creux de l'une de ses mains pendant qu'elle regarde son Bébé et l'adore, pleurant et riant tout ensemble et qu'elle s'incline pour y déposer un baiser, non pas sur la tête innocente, mais sur le milieu de la poitrine sous lequel se trouve le petit cœur, qui bat, qui bat pour nous... là où un jour sera la blessure. Elle la panse d'avance, cette blessure, sa Maman, avec son pur baiser d'Immaculée.
Le bœuf éveillé par la clarté se dresse avec un grand bruit de sabots et il mugit. L'âne relève la tête et brait. C'est la lumière qui les réveille, mais j'aime penser qu'ils ont voulu saluer leur Créateur pour eux-mêmes et pour tous les animaux.
Joseph aussi, qui comme extasié priait avec autant d'intensité qu'il s'était abstrait de tout ce qui l'entourait, se secoue et entre ses doigts dont il se couvre le visage, il voit filtrer la lumière étrange. Il découvre le visage, lève la tête, se retourne. Le bœuf debout, lui cache Marie, mais elle l'appelle : "Joseph, viens."
Joseph accourt et devant le spectacle s'arrête comme foudroyé de révérence, il va tomber à genoux là où il se trouve. Mais Marie insiste : "Viens, Joseph." Elle appuie la main gauche sur le foin et tenant de la main droite l'Enfant qu'Elle serre sur son cœur, elle se lève et se dirige vers Joseph qui marche hésitant, pris entre le désir d'avancer et la peur d'être irrespectueux.
Au pied de la couche les deux époux se rencontrent et se regardent en pleurant de bonheur.
"Viens" dit Marie "offrons Jésus au Père."
Pendant que Joseph s'agenouille, elle, debout, entre les deux poutres qui soutiennent la voûte, élève sa Créature entre ses bras et dit : "Me voici. C'est pour Lui, ô Dieu, que je te dis cette parole. Me voici pour faire ta volonté[2]. Et avec Lui, moi, Marie et Joseph mon époux. Voici tes serviteurs, Seigneur. Que soit accomplie par nous, à toute heure et en toute occasion, ta volonté pour ta gloire et ton amour." Puis Marie se penche et dit : "Prends, Joseph" et Elle offre l'Enfant.
"Moi ! À Moi ! Oh ! Non ! Je ne suis pas digne !" Joseph est tout effrayé, anéanti à l'idée de devoir toucher Dieu.
Mais Marie insiste en souriant : "Tu en es bien digne. Personne ne l'est plus que toi. C'est pour cela que Dieu t'a choisi. Prends-le, Joseph, et tiens-le pendant que je cherche les langes."
173> Joseph, rouge comme la pourpre, avance les bras et prend le petit bourgeon de chair qui crie parce qu'il a froid. Quand il l'a entre les bras, il ne persiste pas dans l'intention de le tenir par respect éloigné de lui. Il le serre contre son cœur et éclatant en sanglots : "Oh ! Seigneur ! Mon Dieu !" et il se penche pour baiser ses petits pieds et les sent glacés. Alors, il s'assoit sur le sol, le serre sur son sein. Avec son habit marron, avec ses mains il s'ingénie à le couvrir, à le réchauffer, à le défendre contre la bise nocturne. Il voudrait bien aller du côté du feu, mais là il y a un courant d'air qui entre par la porte. Mieux vaut rester où il est. Il vaut mieux même aller entre les deux animaux qui les protégeront du courant d'air et donneront un peu de chaleur. Il va se mettre entre le bœuf et l'âne avec les épaules tournées vers la porte, penché sur le Nouveau-né pour lui faire de sa poitrine une niche dont les parois sont une tête grise aux longues oreilles et un grand museau blanc aux naseaux fumants et aux bons yeux humides.
Marie a ouvert le coffre et en a tiré les linges et les langes. Elle est allée près du feu pour les réchauffer. La voilà qui va vers Joseph et enveloppe le Bébé dans les linges tiédis, puis elle protège la petite tête avec son voile. "Où allons-nous le mettre maintenant ?" dit-elle.
Joseph regarde autour, réfléchit... "Attends, dit-il. Poussons plus loin les deux animaux et leur foin. Tirons en bas le foin de la mangeoire qui est plus haut et mettons-le ici à l'intérieur. Le bord de cette mangeoire le protégera de l'air, le foin lui fera un oreiller et le bœuf par son souffle le réchauffera un peu." Et Joseph se met à l'ouvrage, pendant que Marie berce son Petit en le serrant sur son cœur et en appuyant sa joue sur la petite tête pour la réchauffer.
Joseph ravive le feu sans épargner le bois pour faire une belle flamme. Il réchauffe le foin et peu à peu le sèche et le met sur le sein pour l'empêcher de refroidir. Puis, quand il en a assez amoncelé pour faire un petit matelas à l'Enfant, il va à la mangeoire et l'arrange pour en faire un berceau. "C'est prêt, dit-il. Maintenant il faudrait bien une couverture pour empêcher le foin de le piquer, et pour le couvrir..."
"Prends mon manteau" dit Marie.
"Tu auras froid."
174> "Oh ! cela ne fait rien ! La couverture est trop rugueuse. Le manteau est doux et chaud. Je n'ai pas du tout froid. Mais que Lui ne souffre plus."
Joseph prend l'ample manteau de moelleuse laine bleue sombre et l'arrange en double sur le foin, avec un pli qui penche hors de la crèche. Le premier lit du Sauveur est prêt.
Et la Mère, de sa douce démarche ondoyante, le porte et le dépose, le recouvre avec le pli du manteau qu'elle amène aussi autour de la tête nue qui enfonce dans le foin, à peine protégé des piqûres par le mince voile de Marie. Il ne reste à découvert que le petit visage gros comme le poing, et les deux, penchés sur la crèche, radieux, le regardent dormir son premier sommeil. La chaleur des langes et du foin a arrêté ses pleurs et apporté le sommeil au doux Jésus.
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