J'accueille le sourire de Dieu

J’accueille le Sourire de Dieu

(Auteur: Yves Boulvin - Parution F&L n° 267 de Décembre 2007)


Yves Boulvin

est formateur en relations humaines, psychologue et consultant. Il organise depuis de nombreuses années des stages en entreprise,parallèlement à son activité de thérapeute. Il anime depuis plus de dix ans les émissions Foi et psychologie retransmises sur différentes radios francophones.

******

Dans l’Enfant de la Crèche, nous découvrons l’innocence de Dieu, la vulnérabilité de Dieu, l’abandon de Dieu entre les mains des hommes. Et si nous allions plus loin ? Si nous découvrions aujourd’hui que Dieu sourit, que Dieu nous sourit, que Dieu veut rire avec nous ?

Quand je pense à Dieu, en vérité, aujourd’hui, quel visage lui vois-je ? Pas de visage ? Est-il pour moi un état, une énergie ?

Et s’il est une personne, est-ce que je le vois comme particulièrement sérieux, exigeant, fronçant les sourcils, reprochant et réprimandant, attribuant à chacun selon ses mérites ?

Est-ce que je projette sur le visage de Dieu mon père autoritaire, ma mère envahissante, inquisitrice ou harcelante ?

Ai-je découvert le visage épanoui de Dieu, la joie de Dieu, le sourire de Dieu ?
L’innocence joyeuse de Jésus

Beaucoup de personnes en vérité n’imaginent pas Jésus souriant ou riant. Elles peuvent prétexter en effet que ce n’est pas indiqué dans l’Évangile, même si la notion de joie y est souvent présente.

Et pourtant, l’expérience de notre profondeur nous amène à découvrir en Dieu une innocence joyeuse, un émerveillement devant tout ce qui est accompli par les petits hommes que nous sommes, une bienveillance, une proximité souriante, attendrie. Dans son livre Jésus, le Dieu qui riait, Didier Decoin (1) indique que selon lui, Marie aimait voir cette innocence joyeuse dans le regard de Jésus, lorsqu’il jouait avec ses apôtres.

Ai-je déjà imaginé Jésus en train de jouer, de s’amuser ?

L’Évangile nous rapporte surtout des paraboles, des paroles d’amour et de sagesse ainsi que l’accomplissement de guérisons. Et s’il est vrai qu’il est mentionné explicitement que Jésus a pleuré et s’est mis en colère au moins une fois, il n’est pas indiqué clairement qu’il riait ou souriait. Pourtant, c’est bien le sourire de Marie qui a guéri Thérèse de l’Enfant-Jésus, en réponse à la supplication de ses sœurs devant cette statue appelée maintenant la Vierge du Sourire.

Et Marie n’est que transparence à Dieu. Si elle sourit à ses enfants, que nous révèle-t-elle du visage du Père ? Nous voulons voir Jésus, mais qu’allons-nous découvrir en Lui : une majesté et une force intérieure ; un rayonnement et une humilité totale… ; mais aussi une immense tendresse et un sourire merveilleux.


Ce sourire du meilleur de moi

Nous pensons toujours que nous inventons les choses, mais c’est Dieu qui donne l’exemple, fait le premier pas, et c’est nous qui l’imitons.

Si je suis capable aujourd’hui de sourire au meilleur de moi-même, c’est bien la révélation que Dieu aussi sourit à sa création.

D’ailleurs, quand on voit un petit bébé – et les anges les plus hauts sont avec lui – qui s’abandonne dans les bras de sa mère, après avoir été allaité à satiété, massé, dorloté, ne dit-on pas de lui qu’il sourit aux anges ?

Et certaines églises nous montrent des anges en train de sourire. Quand on regarde le visage de personnes en prière ou à l’adoration du Saint-Sacrement, quelle beauté, différente chez chacune lorsqu’elle s’ouvre au Soleil divin. Quel sourire parfois !

Deux personnes qui s’aiment et qui se regardent n’ont-elles pas le plus beau des sourires ? Et comment le bien-aimé regarde-t-il sa bien-aimée, le prince sa princesse ?

Quand je suis bien, détendu, relaxé, sans souci, un sourire naturellement monte du meilleur de moi-même et illumine mon visage.

D’où vient ce sourire intérieur, si ce n’est de Dieu lui-même ? Il est ma réponse au Sourire de Dieu. Et dans l’intimité d’un couple épanoui, lorsque les deux conjoints se donnent et se reçoivent, partagent leur amour, n’y a-t-il pas chez eux un sourire radieux (et dans "radieux", il y a Dieu) ?

La Croix glorieuse

Alors que pendant très longtemps, le Christ en Croix fut quasiment la seule représentation proposée aux chrétiens, aujourd’hui apparaît de plus en plus la Croix glorieuse, Jésus miséricordieux, les bras grands ouverts.

Je peux moi aussi, à mon niveau, vivre cette conversion qui me permet de percevoir son regard souriant.
Si j’ai du mal à le faire, n’est-ce pas parce qu’il me manque des représentations de ce sourire ?

Dans notre monde blessé, torturé, défiguré, il y a peu de représentations d’un Dieu qui sourit. Mais n’est-ce pas aussi parce que je suis le fruit d’une éducation trop rigide, où l’on ne montrait pas sa tendresse, où l’on ne la manifestait pas ?

Seigneur, s’il est vrai que tu me souris et que tu souris à ta création, permets-moi de le sentir aujourd’hui, montre-moi les obstacles, les fausses croyances qui m’empêchent de recevoir ton sourire, comme d'ailleurs j’ai du mal à recevoir ton merci pour ce que je suis et ce que j’accomplis.

S’il est vrai que tu souris, peut-être ris-tu aussi, car si nous autres humains avons de l’humour, si joyeux lorsqu’il n’est pas caustique, peut-être aussi ris-tu avec moi.

Tu me fais rire, Père bien-aimé, quand tu me fais voir avec tendresse et légèreté mes imperfections ! Au lieu de dramatiser et d’en faire "tout un plat", tu cherches à me décontracter, moi qui suis si tendu, et tu entres avec moi dans une complicité joyeuse.

Alors oui ! Seigneur, aujourd'hui, je veux rire avec toi et voir la vie d’un regard amusé.
Rire n’est pas se moquer

Il arrive qu’en relisant notre vie, nous ayons subitement envie de rire d’événements qui, lorsque nous les avons vécus, n’étaient pas du tout réjouissants.
Ce qui nous fait rire maintenant, c’est la façon dont nous avons réagi, et Dieu, dans son humour, nous aide à nous en amuser.

Aujourd’hui, différents mouvements chrétiens ont découvert un rire qui vient de l’intérieur. Dans un enseignement sur l’Esprit Saint, un prêtre, particulièrement sérieux et digne au demeurant, a fait un lapsus au sujet d'un bouton de culotte ; il s’est mis à rire d’un seul coup, de façon tout à fait particulière, et a déclenché un fou-rire dans toute l'assemblée jusqu’à la fin de son intervention.

À partir d’un détail insignifiant, quelque chose s’est passé en lui, un déclic, et en riant, il a entraîné à sa suite toute l’assemblée dans la louange.

Voici la lumière du Ciel, voici l’air de l’Esprit Saint ! Chacun de nous a à trouver sa forme d’humour. On peut rire d’une situation sans s’en moquer, sans qu'il y ait de jugement ni de critique sous-jacente, mais tout simplement parce qu’elle est inattendue, incongrue comme ces paroles d’enfants qui nous surprennent et nous amusent.

Rire avec ceux qu’on aime

Redevenir des petits enfants, c’est, comme eux, savoir pleurer, mais aussi savoir rire, se recréer avec des petites choses, sans vouloir toujours être “sérieux” au mauvais sens du terme. Jean Bosco, qui s’occupait d’adolescents, n’hésitait pas à jouer au foot avec eux, à rire avec eux, à faire des tours de magie ou des exploits forains, et Dieu sait s’il en a entraîné à sa suite !

Croit-on qu’un prêtre qui, aujourd’hui, vit avec les "loubards" va se contenter de faire des sermons ennuyeux, ou bien va-t-il aussi s’amuser avec eux, quitte à choisir parfois un accoutrement qui nous surprend, mais qui le rend proche et fait vraiment rire le Bon Dieu ?

Souviens-toi, toi qui lis ces lignes, de ce qui t’a fait rire au cours de ta vie, et demande-toi d’où te vient cette capacité.
On le dit souvent : le rire détend, libère les contractions, fait du bien, entraîne.
N’est-ce pas d’ailleurs ce que nous cherchons quand nous voulons nous divertir et que nous regardons un comique ou un imitateur que nous aimons ?
Nous serons d’autant plus des chrétiens joyeux que nous saurons trouver cette perle : le rire dans notre vie.

(1).Jésus, le Dieu qui riait, de Didier Decoin, Livre de Poche 2001,


SOURCE : http://www.feuetlumiere.org/
• .